Jean-François Guérin (prêtre)
Jean-François Guérin | |
Jean-François Guérin (à droite) et le cardinal Giuseppe Siri (à gauche). | |
Biographie | |
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Naissance | à Loches (Indre-et-Loire) |
Ordination sacerdotale | par Louis-Joseph Gaillard |
Décès | (à 75 ans) à Blois (Loir-et-Cher) |
Autres fonctions | |
Fonction religieuse | |
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Fonction laïque | |
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Jean-François Guérin est un prêtre catholique et prélat français, né à Loches (Indre-et-Loire) le et mort à Blois (Loir-et-Cher) le . Il est le fondateur de la Communauté Saint-Martin. En 2024, il est mis en cause à titre posthume pour son comportement.
Biographie
[modifier | modifier le code]Il naît à Loches le [1], fils unique d'Albert Guérin et de Camille Linard, charcutiers[2]. Il est baptisé le à Loches[3] et restera pour toujours « marqué par la fierté d'être tourangeau »[4].
Il entre au séminaire de Versailles en 1949, effectue son service militaire en Tunisie[réf. à confirmer][5] puis rejoint le séminaire diocésain de Tours. Il étudie un an au séminaire français de Rome[6]. Il est ordonné prêtre le 29 juin 1955[4] par Louis-Joseph Gaillard, archevêque de Tours. Il est pendant quelques années vicaire à la cathédrale de Tours, puis en aumônier des lycées Descartes, Balzac et Grandmont dans cette même ville[7],[8]. Jean-François Guérin organise pour les jeunes des retraites à l'abbaye Notre-Dame de Fontgombault dont il devient oblat en 1961[9],[N 1],[11].
Lors du concile Vatican II (1962-1965), il entre en conflit avec le nouvel archevêque de Tours, Louis Ferrand[7]. Conservateur, proche du Coetus Internationalis Patrum, Guérin considère que le concile risque d'entraîner des dérives, contre lesquelles il souhaite lutter[12]. Il est envoyé à Paris de 1965 à 1968 pour suivre des études de licence en droit canonique à l'Institut catholique de Paris[4]. À Paris, il est également chapelain des sœurs du Bon Secours, rue Notre-Dame-des-Champs, et il exerce les fonctions d'un chapelain à la basilique du Sacré-Cœur, sans en avoir le titre, accueilli par le recteur, Maxime Charles[13]. Un certain nombre de jeunes étudiants parisiens et d’anciens scouts d’Europe le choisissent comme directeur spirituel[14]. Il se lie d'amitié avec le recteur de la Basilique et la prieure des sœurs du Bon Secours. Tandis qu'il « multiplie les prédications et directions de pèlerinages dans le cadre de son ministère à Paris »[13], plusieurs de ses jeunes étudiants entrent par la suite dans des monastères, tant masculins que féminins[7],[8]. En 1968, Il devient délégué général de l’Œuvre d'Orient jusqu'en 1975[14],[11],[15].
Jugé alors « trop traditionnel »[13], Jean-François Guérin trouve de l'aide auprès de Jean Roy, abbé de l'abbaye Notre-Dame de Fontgombault, dans le diocèse de Bourges[N 2]. Jean Roy le met en relation, en février 1976, avec le cardinal Giuseppe Siri[7],[14] [11]. Celui-ci, de tendance conservatrice[17], accueille l’abbé Guérin et ses étudiants le , à Gênes, dans le quartier de Voltri, et met à leur disposition le vieux couvent San Francesco[4] : c'est la fondation de la Communauté Saint-Martin[7],[18],[14].
En 1979, Giuseppe Siri érige la Communauté Saint Martin en pia unio de droit diocésain[3] [11].
Le 11 novembre 1983, le cardinal Siri nomme l'abbé Guérin chanoine de la basilique Santa Maria Immacolata de Gênes. En mai 1987, il le nomme chanoine d'honneur de la cathédrale Saint-Laurent de Gênes[11].
Membre de l'Opus sacerdotale, destinée à éviter de possibles dérives de l'esprit réformateur du concile, l'abbé Guérin promeut, pour sa communauté, « une interprétation conservatrice du concile Vatican II, sans être strictement traditionaliste »[7]. Il partage certaines critiques de Marcel Lefebvre, mais ne participe pas au schisme de 1988. Selon Jean-François Guérin on « ne peut pas désobéir au pape, pour quelque raison que ce soit »[8].
Il participe également à l'Office international des œuvres de formations civiques et d’action doctrinale selon le droit naturel et chrétien, « association créée par l’intellectuel maurrassien Jean Ousset, favorable au régime de Vichy puis proche des défenseurs de l’Algérie française », et qui rassemble des royalistes, conservateurs, ainsi que des traditionalistes[7].
En 1993, alors que certains évêques français ont déjà confié des ministères à la Communauté, l'abbé Guérin rentre en France : l'évêque de Blois Jean Cuminal invite la Communauté Saint-Martin à installer sa Maison-mère et sa Maison de formation à Candé-sur-Beuvron (qui déménage en 2014 vers l'abbaye Notre-Dame d'Évron, en Mayenne).
L'abbé Guérin assure la charge de modérateur général de la communauté. Il y exerce à la fois la responsabilité de la formation des séminaristes et le suivi spirituel, y compris la confession de ces derniers. En 2021, Paul Préaux, responsable de la Communauté Saint-Martin depuis 2010, mentionne au contraire la nécessité de bien séparer ces deux charges interne et externe[8],[19].
Il démissionne en 2004 pour des raisons de santé[8]. Le Cardinal Castrillón Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé, salue « la patience avec laquelle il a accepté de se voir diminuer et de passer les rênes à d'autres mains »[20].
Il meurt le [1],[11]. Antoine Forgeot, père abbé de l'abbaye Notre-Dame de Fontgombault, célèbre la fermeture du cercueil. La messe des funérailles se tient en la cathédrale Saint-Louis de Blois, la cérémonie est présidée par l'évêque de Blois Maurice de Germiny[21],[6]. Une lettre de Leonardo Sandri transmet les condoléances du pape Benoît XVI aux fidèles assistant à la célébration[22]. À sa mort, la communauté fondée par lui compte plus de 60 prêtres et diacres[23] [11].
Guérin passe pour un fondateur qui « n’était ni grand intellectuel, ni grand théologien » et qui « semble avoir été bien moins idéalisé que dans d’autres communautés des années 1970 », selon La Croix[8].
À la suite d'une enquête menée entre juillet 2022 et janvier 2023 par l'évêque de Mende Benoît Bertrand, la Congrégation pour le Clergé demande, en 2024, à la Communauté Saint-Martin de faire un travail de relecture historique concernant la période de fondation et son fondateur. En effet, il est reproché par plusieurs anciens membres de la communauté « un climat abusif dans l’exercice de l’autorité et l’accompagnement spirituel. Certaines personnes, majeures à l’époque des faits, évoquent aussi des gestes pouvant relever de délits à caractère sexuel (baisers forcés) »[24],[25],[26],[27],[19].
Citations
[modifier | modifier le code]- « Aucune de nos attaches les plus chères à Dieu, au Christ, à l'Eucharistie, à l'Évangile, à Marie, à la Tradition, ne peut justifier une mise volontaire hors de l'Église ».
- « Tout le mystère de Dieu est dans le mystère du Christ et tout le mystère du Christ est dans le mystère de l'Eucharistie ».
- « Être à sa place, toute sa place, rien que sa place »[28].
Pour approfondir
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
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- Site de la Communauté Saint-Martin, fondée par l'abbé Guérin.
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Marc Aillet indique pour sa part : « Jean-François Guérin, notre fondateur, était oblat de l'abbaye bénédictine de Fontgombault depuis son ordination en 1955 »[10]
- L'abbaye est notamment connue pour avoir caché dès 1973 le milicien Paul Touvier[7]. René Rémond indique que « Avant 1972, il n'était guère possible de déceler une corrélation quelconque entre les soutiens qu'il s'était acquis et les clivages politiques et idéologiques. Après 1972, il en va différemment. L'éventail tend à se réduire au secteur le plus traditionaliste. (...) D'année en année, Touvier est davantage pris en charge par la fraction catholique qui partage en tout sa vision politique. Dès lors, on est en droit de penser que les affinités idéologiques ont largement supplanté les motifs de charité et les considérations spécifiquement religieuses »[16]
Références
[modifier | modifier le code]- Fichier Insee des décès en France depuis 1970.
- Olivier Landron, Les communautés nouvelles: nouveaux visages du catholicisme français, Editions du CERF, (ISBN 978-2-204-07305-9, lire en ligne), p. 87.
- Paul Préaux, « Abbé Jean-François Guérin », sur le site de la Communauté Saint-Martin (consulté le )
- Bruno Attuyt, « Priez pour l'Abbé et ses fils », Sub Signo Martini, no 8, , p. 6-8
- « Abbé Jean-François Guérin », sur Communauté Saint-Martin, fondée par Jean-François Guérin
- Bruno Attuyt, « En mémoire de Mgr Guérin » [PDF], sur France catholique, (consulté le ), p. 8-9
- Timothée de Rauglaudre, « La revanche de l’abbé Guérin », Les Jours, (lire en ligne, consulté le )
- Mikael Corre, « Communauté Saint-Martin, l’avenir de l’Église de France ? », La Croix, (lire en ligne, consulté le ).
- Sébastien Antoni, « Transmettre à la façon de la communauté saint Martin », sur La Croix - Croire, (consulté le )
- Marc Aillet, « Le Pape a eu plus qu'une attitude pastorale exemplaire », sur eucharistiemisericor, (consulté le )
- Il Timone 2014, p. 28.
- Valentin Béchu, « Il a enquêté sur la communauté Saint-Martin, plus grande pourvoyeuse de prêtres », Ouest-France, (lire en ligne, consulté le )
- Olivier Landron, À la droite du Christ: les catholiques traditionnels en France depuis le concile Vatican II, 1965-2015, Cerf, (ISBN 978-2-204-10383-1), p. 147
- « Abbé Jean-François Guérin », sur Communauté Saint-Martin (consulté le )
- « Souvenons-nous de ceux qui nous ont précédés », Œuvre d'Orient, no 740, , p. 85 (ISSN 1162-5058, lire en ligne) :
« [...] décès [...] de Mgr Jean-François Guérin qui avait collaboré à l'Œuvre d'Orient de 1967 à 1975 avant de devenir Modérateur de la Communauté Saint-Martin »
- René Rémond, Jean-Dominique Durand, Jean-Pierre Azéma, François Bédarida, Gérard Cholvy, Bernard Comte et Yves-Marie Hilaire, Paul Touvier et l'Église, Paris, Librairie Arthème Fayard, , 417 p. (ISBN 978-2-213-02880-4, OCLC 25561981, BNF 35494708), p. 301-302 ; 394-395..
- « Le cardinal Giuseppe Siri, archevêque de Gênes, démissionne », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- Michel Turin, Sacré business - L'incroyable marché des biens immobiliers du clergé, Groupe Robert Laffont, (ISBN 978-2-221-26581-9, lire en ligne), p. 119
- « Baisers forcés et « climat abusif » : enquête sur la puissante communauté catholique Saint-Martin sommée de se réformer », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- Lettre du préfet de la Congrégation pour le Clergé du 21 mai 2005, publié dans SSM 8 (2005), p. 18.
- « Décès de Mgr Guérin, fondateur de la communauté Saint-Martin », Zenit, (lire en ligne, consulté le )
- « Porté par la prière de l'Église », Sub Signo Martini, no 8, , p. 9
- Jean-Marie Le Gall, « Passeur de vie jusqu'au bout de l'amour », Sub Signo Martini, no 8, , p. 10-16
- Matthieu Dupont et François-Marie Humann, « Message des assistants apostoliques » [PDF], sur Conférence des évêques de France, (consulté le )
- Antoine Pasquier, « Communauté Saint-Martin : Rome demande des réformes, le fondateur mis en cause », Famille Chrétienne, (lire en ligne, consulté le )
- Jean-Marie Guénois, « Le fondateur de la communauté Saint-Martin accusé de «délits à caractères sexuels» et d’«abus d'autorité» », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le )
- « Le fondateur d’un puissant séminaire catholique français mis en cause pour des « baisers forcés » », Le Parisien, (lire en ligne, consulté le )
- Maurice de Germiny, « L'hommage de l'évêque qui veille sur la Communauté », Sub Signo Martini, no 8, , p. 21-23
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Sub Signo Martini, (ISSN 1764-2914)
- (it) Andrea Galli, « San Martino in aiuto della Francia », Il Timone, vol. XVI, , p. 28-29 (ISSN 1827-8043)
- Naissance en juillet 1929
- Prélat d'honneur
- Chanoine du XXe siècle
- Chanoine du XXIe siècle
- Décès en mai 2005
- Prêtre catholique français du XXe siècle
- Prêtre catholique français du XXIe siècle
- Communauté Saint-Martin
- Décès à Blois
- Naissance à Loches
- Décès à 75 ans
- Personnalité inhumée en Indre-et-Loire
- Oblat
- Séminaire pontifical français
- Fondateur