Northvolt Six
Type d'usine | |
---|---|
Superficie |
172 hectares |
Opérateur | |
---|---|
Date d'ouverture |
2026 |
Produits | |
---|---|
Production |
60 GWh / année |
Situation | |
---|---|
Coordonnées |
Northvolt Six est un projet de giga usine intégrée de batteries lithium-ion situé dans les municipalités de Saint-Basile-le-Grand et McMasterville, au Québec. Sa capacité annuelle de production de cellules serait de 60 GWh et elle pourrait employer plus de 3 000 personnes. Sa construction devrait débuter en 2024. La première cellule serait livrée en 2026 et la production augmenterait graduellement jusqu’en 2028.
Historique
[modifier | modifier le code]Choix et acquisition du terrain
[modifier | modifier le code]La Californie était une autre région envisagée par Northvolt pour la construction de sa sixième usine, la première en Amérique du Nord. L'important financement public[1] et un « emplacement idéal dans la chaîne de valeur de l'industrie automobile nord-américaine » font pencher le choix de Northvolt en faveur du Québec[2]. L'hydroélectricité propre produite par Hydro-Québec[2] et à faible coût constitue un autre argument[3].
L'emplacement choisi est un terrain vague d'une superficie de 172 hectares (18 500 000 pieds carrés) situé en bordure de la rivière Richelieu, partagé entre les municipalités de Saint-Basile-le-Grand et McMasterville, en Montérégie. Le site est avantagé par sa proximité avec Montréal et des réseaux de transport : route 116, autoroutes 20 et 30 et chemin de fer (ligne 13 d'Exo)[4].
Northvolt devient propriétaire du terrain le . Elle en fait l'acquisition pour la somme de 240 millions $, grâce à un prêt du gouvernement du Québec, de la firme d'investissement Gestion immobilière GAP[5],[6],[7]. Les actionnaires de cette firme d'investissement sont Alice Minying Wu, Serge Gariépy et Luc Poirier. En seulement huit ans, ils ont multiplié la valeur du terrain par 12, passant de 20 millions en 2015 à 240 millions en 2023. Malgré une évaluation initiale à 85 millions en 2020, Luc Poirier a profité des circonstances et de ses relations avec le gouvernement pour négocier agressivement, ignorant les préoccupations environnementales liées aux milieux humides [6]. Cette vente met en lumière un manque de transparence et de rigueur de la part de Northvolt et du gouvernement du Québec [6]. La firme d'investissement comptaient initialement y construire 5 000 logements. Luc Poirier mentionne qu'il s'agit du « nouveau record de l'histoire du Québec pour la plus grosse vente de terrain »[8].
Financement
[modifier | modifier le code]Northvolt Six représente le « plus important investissement privé de l’histoire du Québec » au moment de son dévoilement[2].
Le , le projet et son montage financier sont officiellement dévoilés au public en présence du premier ministre québécois François Legault et canadien Justin Trudeau[9]. Le gouvernement du Québec et du Canada annoncent à cette occasion un investissement massif de 7,3 milliards concernant uniquement une première phase de l'usine[10].
Prêt | Subvention | Actions | Total | |
---|---|---|---|---|
Gouvernement du Québec | 376 M $ | 436 M $ | 567 M $ | 1,37 G $ |
Gouvernement du Canada | (900 M $) | 400 M $ | (900 M $) | 1,34 G $ |
Total | 836 M $ | 2,74 G $ |
Subvention | |
---|---|
Gouvernement du Québec | 1,5 G $ |
Gouvernement du Canada | 3,1 G $ |
Total | 4,6 G $ |
En , la Caisse de dépôt et placement du Québec investit 200 M $ en dette convertible dans Northvolt[11].
Construction
[modifier | modifier le code]La construction de la première phase (30 GWh) devrait s'échelonner jusqu'en 2028 avec un début de production en 2026. Northvolt obtient les permis nécessaires pour commencer les travaux préparatoires le [12]. Après un court arrêt en réaction à une demande d'injonction du Centre québécois du droit de l’environnement, les travaux reprennent le 26 janvier[13].
Retard
[modifier | modifier le code]En , Northvolt annonce ralentir son plan de développement international pour se concentrer sur son usine dans le nord de la Suède[14]. Le mois suivant, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, révèle en entrevue avec La Presse que l’usine Northvolt Six pourrait avoir un retard de 12 à 18 mois[15]. Ce retard s'expliquerait à la fois par un délai plus long que prévu pour obtenir les autorisations gouvernementales nécessaires pour mener à bien le projet et par un ralentissement mondial de l’industrie des véhicules électriques, frappée par une demande plus faible que prévu[15].
Le 8 octobre 2024, Thomas Gerbet, journaliste chez Radio-Canada, annonce sur son compte LinkedIn, après avoir fait une demande officielle d'accès à l'information [16], que « J'ai demandé au ministère de l'Économie du Québec ses analyses de risque et analyses coûts-bénéfices préalables à l'investissement dans Northvolt et la filière batterie. On me répond que «le ministère détient des documents», mais «ceux-ci ne sont pas accessibles», car, en vertu de la loi, «nous ne divulguerons pas de documents qui contiennent, en substance, des informations ayant des incidences sur l’économie et les décisions administratives ainsi que des documents au stade d’ébauche, des brouillons, des notes préparatoires ou autres documents de même nature» » [16].
Enjeux environnementaux
[modifier | modifier le code]Décontamination
[modifier | modifier le code]En 1878, les terres agricoles qui composent jadis le site sont achetées par la Hamilton Powder Company (HPC) pour y construire une usine d'explosifs. L'usine sera détenue par Canadian Explosives Limited (CXL) à partir de 1910 puis Canadian Industries Limited (en) à partir de 1928. Des engrais chimiques sont également produits durant le XXe siècle. Les activités cessent en février 1999[17]. Ces activités industrielles ont fortement contaminé le site. Des travaux de réhabilitation sont réalisés jusqu'en 2015. Une petite portion de 33 000 m3 reste à décontaminer[18].
Milieux humides
[modifier | modifier le code]Un rapport a recensé sur le site un total de 74 milieux humides, dont 8 étangs, 19 marais, 28 marécages arborescents et 19 marécages arbustifs qui seront détruits pour faire place à l'usine[19]. 8 730 arbres vivants et 5 365 arbres morts doivent également être retirés du site. En compensation, Northvolt s'engage à replanter 24 000 arbres et à verser 4,75 millions $ au Fonds de protection de l’environnement et du domaine hydrique de l'État[20].
Exemption du BAPE
[modifier | modifier le code]En , Radio-Canada révèle que Northvolt Six pourrait échapper à un examen du Bureau d'audiences publiques sur l’environnement(BAPE) grâce à des changements dans la règlementation. En effet, le seuil de fabrication de cathodes rendant obligatoire un examen du BAPE était passé de 50 000 à 60 000 tonnes, alors que Northvolt Six en produirait 56 000. De plus, un projet de règlement visant à forcer un examen du BAPE pour tout projet d'assemblage de batterie d'une capacité de 30 gigawattheures (GWh) ou plus, ce qui correspond précisément à la capacité de la première phase de Northvolt Six, avait été abandonné. Québec solidaire dénonce ces changements, accusant le gouvernement d'avoir modifié le règlement « sur mesure » pour Northvolt[21]. À la suite de l'annonce du projet, le premier ministre François Legault confirme qu'un examen du BAPE « ne s'applique pas »[22].
En , Radio-Canada révèle que seule la partie du projet impliquant le recyclage de matériaux de batteries, qui excèderait le seuil de 50 000 tonnes de produits chimiques par année, sera soumise à un examen du BAPE[23].
En , après l'avoir nié pendant des mois, Québec admet avoir changé les règles spécifiquement pour permettre à Northvolt Six d'éviter un examen du BAPE. Le gouvernement se justifie en prétextant un échéancier trop serré pour permettre un tel examen[24].
En , des courriels et clavardages déposés en preuve dans le cadre d'une poursuite du Centre québécois du droit de l’environnement montrent que des employés et des gestionnaires du ministère de l’Environnement impliqués dans l’analyse du projet se plaignaient de subir des pressions politiques pour éviter un examen du BAPE[25].
Rejet de contaminants
[modifier | modifier le code]En , Northvolt confirme à Radio-Canada qu'il est prévu que Northvolt Six rejette divers contaminants dans l'atmosphère et dans la rivière Richelieu, notamment du nickel, du cobalt, du lithium et de l'ammonium[26]. Cette révélation suscite l'inquiétude de plusieurs experts, d'autant plus qu'il n'existe alors pas de norme de rejet pour certains de ces contaminants dans la loi québécoise. En réaction, le ministère de l'Environnement se veut rassurant, et promet d'établir une norme pour les contaminants non-inclus dans la réglementation. De son côté, Northvolt assure « adapt[er] la conception de l'usine afin de respecter les normes environnementales en vigueur au Québec ».
Recyclage des batteries
[modifier | modifier le code]Le Bureau d'audiences publiques sur l’environnement examinera les impacts environnementaux du processus de recyclage des matériaux de batteries effectué sur le site de Northvolt Six[23]. Selon l'avis de projet déposé au ministère de l'Environnement, Northvolt anticipe de nombreux impacts environnementaux potentiels de l'usine de recyclage des batteries, soit :
- une modification de la qualité de l'air
- une émissions de gaz à effet de serre
- une augmentation du bruit ambiant
- une dégradation de la qualité de l'eau de surface de la rivière Richelieu
- une détérioration de la qualité des sols
- des émissions atmosphériques et des odeurs liées au chargement et déchargement
- un empiètement sur des milieux humides
- une perturbation et une perte de végétation
- une perturbation et un impact sur la faune(poissons, tortues et oiseaux), et leurs habitats ainsi qu'un dérangement de la faune durant la phase d'exploitation.
Le document liste également un accroissement du trafic routier, des implications concernant l'utilisation et l'occupation du territoire par les Premières Nations, des impacts sur la santé issus de la dégradation de l’environnement, des préoccupations concernant la sécurité publique et les besoins en main-d'œuvre et les pressions sur le parc immobilier et les services publics comme impacts négatifs potentiels de l'usine de recyclage des batteries[27].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Julien Arsenault, « L’aide pourrait dépasser 7 milliards… et ce n’est pas fini », La Presse, (lire en ligne)
- « Northvolt choisit le Québec, Canada, pour sa première usine à l’extérieur de l’Europe », sur Northvolt,
- Thomas Gerbet, « Électrifier les nouveaux projets industriels pourrait coûter cher aux Québécois », Radio-Canada, (lire en ligne)
- Frank Rodi, « Northvolt privilégie le ferroviaire », Les Versants, (lire en ligne)
- La Presse canadienne, « Northvolt achète le terrain en Montérégie », La Presse, (lire en ligne)
- Thomas Gerbet, « Northvolt : voici les coulisses de l’achat record du terrain avec votre argent », sur Radio-Canada, (consulté le )
- Frank Jr Rodi, « Northvolt achète son terrain », sur BAnQ : Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Les Versants du Mont-Bruno, (consulté le ), p. 3
- André Dubuc, « Une transaction historique qui profite à Luc Poirier et ses partenaires », La Presse, (lire en ligne)
- Félix Pedneault, « Trudeau et Legault lancent le projet de méga-usine », 24 Heures, (lire en ligne)
- La Presse canadienne, « Québec accorde 2,9 G$ pour séduire Northvolt », Les Affaires, (lire en ligne)
- « La CDPQ investit dans Northvolt », sur Caisse de dépôt et placement du Québec,
- « Début des travaux sur le site de Northvolt Six », sur Northvolt,
- « Northvolt reprend ses travaux en Montérégie », TVA Nouvelles, (lire en ligne)
- Zone Économie- ICI.Radio-Canada.ca, « Batteries électriques : Northvolt va ralentir son plan de développement international | La filière batterie », sur ici.radio-canada.ca, (consulté le )
- Julien Arsenault et Ulysse Bergeron, « Méga-usine de cellules de batteries: Northvolt : jusqu’à 18 mois de retard, avance Québec », La Presse, (lire en ligne, consulté le )
- Thomas Gerbet, « Poste sur LinkedIn », sur LinkedIn, (consulté le )
- McMasterville d'hier à aujourd'hui, Mont-Saint-Hilaire, Société d'histoire de Beloeil-Mont-Saint-Hilaire, (ISSN 0225-5359, lire en ligne), p. 19-24
- « Suivi environnemental du dossier de Northvolt », sur Gouvernement du Québec (consulté le )
- Alexandre Shields, « Plus de 50 000 tonnes de sols contaminés resteront sur le site de Northvolt », Le Devoir, (lire en ligne)
- Alexandre Shields et Roxane Léouzon, « Northvolt a l’autorisation de raser les milieux naturels sur son site », Le Devoir, (lire en ligne)
- Zone Politique- ICI.Radio-Canada.ca, « Northvolt pourrait éviter le BAPE grâce à un règlement modifié par Québec | La filière batterie », sur ici.radio-canada.ca, (consulté le )
- Zone Politique- ICI.Radio-Canada.ca, « Un BAPE pour Northvolt : « Ça ne s’applique pas », dit Legault | La filière batterie », sur ici.radio-canada.ca, (consulté le )
- Sébastien Desrosiers, « Une phase de l’usine Northvolt sera soumise au BAPE », Radio-Canada, (lire en ligne)
- Zone Politique- ICI.Radio-Canada.ca, « Québec admet avoir voulu éviter l’examen du BAPE à Northvolt | La filière batterie », sur ici.radio-canada.ca, (consulté le )
- Zone Politique- ICI.Radio-Canada.ca, « Northvolt et le BAPE : les fonctionnaires se vidaient le cœur sur Teams | La filière batterie », sur ici.radio-canada.ca, (consulté le )
- Zone Environnement- ICI.Radio-Canada.ca, « Northvolt rejettera du nickel dans l’air et du lithium dans la rivière Richelieu | La filière batterie », sur ici.radio-canada.ca, (consulté le )
- « Projet », sur www.ree.environnement.gouv.qc.ca (consulté le )