Occlusion intestinale
Une occlusion intestinale est un arrêt du déplacement des matières et des gaz dans une partie de l'intestin, par une cause mécanique (obstruction, strangulation), fonctionnelle ou mixte[1].
On distingue les occlusions de l'intestin grêle et les occlusions du côlon[2].
Ce sont des affections fréquentes relevant de causes très nombreuses et dont le diagnostic se fait avant tout par l'observation clinique, et de plus en plus par la radiographie « abdomen sans préparation » et la tomodensitométrie.
Mécanismes
[modifier | modifier le code]Occlusions mécaniques
[modifier | modifier le code]Trois causes possibles[3] :
- obstruction par un obstacle pouvant être :
- intra-luminal, par exemple un calcul, un aliment ou, au niveau rectal, une impaction fécale,
- intra-mural, comme une tumeur bénigne ou maligne[4],
- extra-luminal, la plus fréquente est la bride : cicatrice péritonéale tendue dans l'abdomen[5] ;
- strangulation par :
Lors d'une strangulation, la vascularisation est compromise, ce qui peut provoquer la nécrose puis la perforation de la paroi intestinale.
- invagination : un segment d'intestin s'invagine dans un segment plus en aval le plus souvent à la jonction intestin grêle/côlon. Il y a obstruction puisque le boudin d'invagination bouche la lumière intestinale, ainsi qu'un certain degré de strangulation, car les vaisseaux sont comprimés. C'est le cas le plus rare chez l'adulte (voir l'article sur l'invagination intestinale)[6].
Occlusions fonctionnelles
[modifier | modifier le code]Il y a deux mécanismes possibles[3] :
- occlusion inflammatoire, qui survient lors des épanchements inflammatoires de la cavité péritonéale (pus ou sang) comme une péritonite. La paralysie de l'intestin répond à la loi de Stockes (tout muscle sous-jacent à une séreuse enflammée se paralyse) ;
- occlusion réflexe dont la cause peut être :
- rétropéritonéale dans les irritations du rétro-péritoine : hématome rétro-péritonéal, traumatisme du rachis,
- dysmétabolique lors par exemple d'une hypokaliémie,
- causes neurologiques, pneumologiques, médicamenteuses, etc.
Clinique
[modifier | modifier le code]Signes fonctionnels
[modifier | modifier le code]Les symptômes de l’occlusion intestinale sont entre autres ceux-ci[7] :
- douleur : signe majeur, dont le siège varie avec le niveau de l'occlusion mais qui est péri-ombilicale le plus souvent et n'entraîne pas d'irradiation. Son installation est progressive et évolue vers l'aggravation. Elle est de type paroxystique, entraînant des vagues douloureuses et décrite comme une torsion. Mais parfois elle peut ne pas être évocatrice, juste ressentie comme une gêne intestinale assez vague.
- vomissements, d'autant plus précoces que l'occlusion est haute. Ils soulagent temporairement le sujet mais peuvent complètement manquer. Ils varient en fonction de l'ancienneté :
- alimentaires,
- biliaires,
- fécaloïdes ;
- arrêt du transit, signe le plus spécifique de l'occlusion et le plus difficile à faire préciser. Il est d'autant plus précoce que l'occlusion est basse. Il peut parfois être précédé d'une diarrhée, trompeuse ;
- météorisme.
Signes cliniques
[modifier | modifier le code]Les signes à rechercher sont[8] :
- pouls, tension, température, recherche de signes de choc ;
- recherche d'une défense abdominale signant la souffrance péritonéale ;
- évaluation du ballonnement abdominal, recherche d'un péristaltisme intestinal visible sous la peau ;
- auscultation à la recherche des bruits hydro-aériques ;
- recherche de cicatrices abdominales ;
- vérification des orifices herniaires ;
- toucher rectal à la recherche d'un fécalome ;
- examen pulmonaire, urinaire, etc., selon les signes fonctionnels associés.
Radiologie
[modifier | modifier le code]De manière standard, seront réalisés trois clichés radiologiques, qui permettront de déterminer le siège et le type de l'occlusion :
- abdomen sans préparation (ASP) de face debout, à la recherche de niveaux hydro-aériques ;
- ASP de face couché ;
- ASP centré sur les coupoles diaphragmatiques, à la recherche d'un pneumopéritoine.
Un scanner abdominal est effectué en urgence : il détermine le siège et le type de l'occlusion de façon la plus précise[3],[9].
Biologie
[modifier | modifier le code]Les tests suivants sont effectués pour l'identification des causes possibles[8] :
- numération sanguine :
- pour une hyperleucocytose, signe de strangulation ou de souffrance digestive,
- pour une anémie microcytaire, orientant vers une tumeur associée ;
- ionogramme sanguin, urée et créatinine, calcémie, à la recherche :
- pour des signes de déshydratation liés à l'occlusion, à corriger avant toute intervention,
- pour des troubles ioniques responsables du syndrome occlusif ;
- coagulation sanguine, CRP, groupe sanguin, rhésus, recherche d'agglutinines irrégulières (RAI) :
- en vue d'une éventuelle intervention.
Traitement
[modifier | modifier le code]Principes
[modifier | modifier le code]Un syndrome occlusif est une urgence thérapeutique qui nécessite une hospitalisation dans un service de chirurgie digestive. Une prise en charge retardée aggrave le pronostic avec la survenue de lésions irréversibles.
Le degré de l'urgence est évaluée selon le mécanisme de l'occlusion (une occlusion fonctionnelle est moins grave qu'une strangulation) et en fonction des signes de gravité cliniques, biologiques et d'imagerie.
Dans le cas d'occlusion fonctionnelle, la priorité est au traitement médical de la cause avec prise en charge des symptômes. Dans le cas d'occlusion mécanique avec signes de gravité, une intervention chirurgicale urgente s'impose pour lever l'obstacle, après une courte phase de réanimation.
Dans tous les cas, le patient doit recevoir une information claire, objective et adaptée à son niveau de compréhension. Il doit être informé de la nécessité d'une opération, des différentes modalités thérapeutiques proposées, et des risques relatifs à l'anesthésie générale et à la chirurgie[10].
Traitement médical
[modifier | modifier le code]Un traitement conservateur (non chirurgical) est indiqué chez les patients en état stable, sans signes de gravité. Il comporte[11],[12] :
- correction des troubles hydro-électrolytiques sur la base de l'ionogramme sanguin ;
- mise en place d'une sonde nasogastrique pour aspiration digestive douce, à visée antalgique et thérapeutique (elle peut permettre une levée d'obstacle dans des cas non graves) ;
- antibiothérapie pour prévenir les risques d'infection.
- prise en charge de la douleur (antalgiques et antispasmodiques).
La surveillance est pluriquotidienne par examen de l'abdomen, du liquide d'aspiration gastrique, des constantes vitales, de la reprise du transit, et de l'évolution des douleurs. Cette phase de surveillance dure de deux à trois jours, sinon, en l'absence d'amélioration, l'intervention devient nécessaire[12],[13].
Traitement chirurgical
[modifier | modifier le code]Il s'impose en présence de signes de gravité indiquant une instabilité clinique ou biologique, une péritonite, un sepsis abdominal, une ischémie ou une perforation intestinale[11].
Après bilan préropératoire, l'intervention d'urgence est aussi de règle en cas :
- d'étranglement de hernie ou d'éventration (réparation pariétale) ;
- de volvulus du grêle et de volvulus de cæcum (levée de l'occlusion, résection d'un segment de tube digestif selon la vitalité en cours d'opération).
Historiquement (jusqu'aux années 1970), l'exploration chirurgicale des occlusions intestinales aigües du grêle se faisait obligatoirement par laparotomie (grande incision de l'abdomen). Avec les progrès de la chirurgie mini-invasive, l'exploration et le traitement par cœlioscopie devient plus fréquente, à partir de patients sélectionnés (occlusion intestinale aigüe non compliquée)[11],[12].
Morts notoires
[modifier | modifier le code]George Sand[14], l'auteur Christophe[15], Maurice Gibb[16], l'acteur Claude Dauphin[17] sont morts à la suite de complications dues à une occlusion intestinale.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) J. Edward F. Fitzgerald, « Small Bowel Obstruction », Emergency Surgery, Wiley-Blackwell, , p. 74–79 (ISBN 978-1-4443-1517-2, DOI 10.1002/9781444315172.ch14, lire en ligne, consulté le )
- (en) Richard M. Gore, Robert I. Silvers, Kiran H. Thakrar et Daniel R. Wenzke, « Bowel Obstruction », Radiologic Clinics of North America, vol. 53, no 6, , p. 1225–1240 (DOI 10.1016/j.rcl.2015.06.008, lire en ligne, consulté le )
- « Occlusion intestinale aiguë », sur www.snfge.org (consulté le )
- H Legendre, F Van Huyse, F.X Caroli-Bosc et J.C Pector, « Occlusions intestinales chez le patient cancéreux : résultats de la chirurgie palliative », Annales de Chirurgie, vol. 126, no 3, , p. 227–231 (DOI 10.1016/S0003-3944(01)00509-0, lire en ligne, consulté le )
- (en) R. P. G. ten Broek, Y. Issa, E. J. P. van Santbrink et N. D. Bouvy, « Burden of adhesions in abdominal and pelvic surgery: systematic review and met-analysis », BMJ, vol. 347, no oct03 1, , f5588–f5588 (ISSN 1756-1833, PMID 24092941, PMCID PMC3789584, DOI 10.1136/bmj.f5588, lire en ligne, consulté le )
- R. Lebeau, E. Koffi, B. Diané et A. Amani, « Invaginations intestinales aiguës de l'adulte : analyse d'une série de 20 cas », Annales de Chirurgie, vol. 131, no 8, , p. 447–450 (DOI 10.1016/j.anchir.2006.04.007, lire en ligne, consulté le )
- « Occlusion intestinale - Société canadienne du cancer », sur www.cancer.ca (consulté le )
- M. Thoma, « Occlusion intestinale : intervention chirurgicale ou traitement médical ? », Urgences 2011, , p. 541-550 (lire en ligne)
- (en) A J Megibow, E J Balthazar, K C Cho et S W Medwid, « Bowel obstruction: evaluation with CT. », Radiology, vol. 180, no 2, , p. 313–318 (ISSN 0033-8419 et 1527-1315, DOI 10.1148/radiology.180.2.2068291, lire en ligne, consulté le )
- Michel Scotté, « Syndrome occlusif », La Revue du Praticien, vol. 60, , p. 399-406.
- Patrick Jackson et Mariana Vigiola Cruz, « Intestinal Obstruction: Evaluation and Management », American Family Physician, vol. 98, no 6, , p. 362–367 (ISSN 0002-838X et 1532-0650, lire en ligne, consulté le )
- Fausto Catena, Belinda De Simone, Federico Coccolini et Salomone Di Saverio, « Bowel obstruction: a narrative review for all physicians », World journal of emergency surgery: WJES, vol. 14, , p. 20 (ISSN 1749-7922, PMID 31168315, PMCID 6489175, DOI 10.1186/s13017-019-0240-7, lire en ligne, consulté le )
- Isabelle Andrieu, « Syndrome occlusif », La Revue du Praticien, vol. 53, , p. 657-664.
- « George Sand », sur Atramenta (consulté le )
- « Christophe (Georges Colomb) », sur deartibussequanis.fr (consulté le )
- « Maurice Gibb victime d'une occlusion », sur Libération.fr, (consulté le )
- « CLAUDE DAUPHIN », sur cinememorial.com (consulté le )