Christian Bromberger
Agé de 71 ans, Christian Bromberger est professeur émérite d’anthropologie à l'Université d’Aix-Marseille où il a fondé et dirigé de 1988 à 2006 l'Institut d'Ethnologie Méditerranéenne et Comparative. Il a été membre senior de l'Institut Universitaire de France (chaire d'ethnologie générale) de 1995 à 2005 et professeur invité dans plusieurs universités étrangères. Il a dirigé de février 2006 à septembre 2008 l'Institut français de recherche en Iran à Téhéran.
Ses travaux de recherche (260 publications environ: livres, articles, contributions à des ouvrages collectifs) portent sur l’Iran (en particulier la province du Gilân), sur les modalités et les significations de l'engouement populaire pour les clubs et les matchs de football, sur la gestion sociale et culturelle de la pilosité.
Parmi ses principaux ouvrages : Le match de football. Ethnologie d'une passion partisane à Marseille, Naples et Turin, Paris, Editions de la Maison des Sciences de l'Homme (traduit en italien : La partita di calcio, Editori Riuniti), Football, la bagatelle la plus sérieuse du monde, Paris, Bayard et Pocket Agora (traduit en grec et en portugais) ; Germaine Tillion, une ethnologue dans le siècle, Arles, Actes Sud ; Trichologiques. Une anthropologie des cheveux et des poils, Paris, Bayard (réédité sous le titre Les sens du poil, Paris, Creaphis. Un autre Iran. Un ethnologue au Gilân, Paris, Armand Colin.
Ses travaux de recherche (260 publications environ: livres, articles, contributions à des ouvrages collectifs) portent sur l’Iran (en particulier la province du Gilân), sur les modalités et les significations de l'engouement populaire pour les clubs et les matchs de football, sur la gestion sociale et culturelle de la pilosité.
Parmi ses principaux ouvrages : Le match de football. Ethnologie d'une passion partisane à Marseille, Naples et Turin, Paris, Editions de la Maison des Sciences de l'Homme (traduit en italien : La partita di calcio, Editori Riuniti), Football, la bagatelle la plus sérieuse du monde, Paris, Bayard et Pocket Agora (traduit en grec et en portugais) ; Germaine Tillion, une ethnologue dans le siècle, Arles, Actes Sud ; Trichologiques. Une anthropologie des cheveux et des poils, Paris, Bayard (réédité sous le titre Les sens du poil, Paris, Creaphis. Un autre Iran. Un ethnologue au Gilân, Paris, Armand Colin.
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Papers by Christian Bromberger
Rappeler les pratiques de mixité, les épisodes heureux de coexistence, les valeurs partagées d’une rive à l’autre ne doit pas masquer la vigueur vécue des antagonismes. Une voie pour les surmonter est de prendre conscience de la relativité de ces différences, d’en récuser le caractère absolu. Ce voyage en Méditerranée, dans l’espace et dans le temps, invite à ce pas de côté.
Réflexions anthropologiques sur la crédibilité.
Héritage pluriséculaire et réalités contemporaines dans les sports, les rituels et les rêves
Le sport est un révélateur des changements dans l’Iran contemporain. Le sport national a longtemps été la lutte qui s’adosse à la pratique coutumière du zurkhâne, et dont les champions sont réputés être des javanmard, des héros chevaleresques, libres, dévoués, désintéressés. La lutte est un sport en déclin et c’est le football, porté par la globalisation et incarnant les « valeurs » internationales en vogue (réussite, compétition, individualisme…) qui est devenu le sport le plus populaire. S’y expriment encore un attachement exacerbé à la patrie mais aussi des revendications identitaires ; s’y manifeste également, dans la tenue des joueuses comme à travers l’interdiction des femmes dans des stades où se déroulent des championnats masculins, une ségrégation sexuelle contestée.
Les rituels dolorisants de moharram témoignent aussi de cette intrication entre hypertraditionalisme et hypermodernité ; hypertraditionalisme car les scènes du drame de Kerbalâ sont revécues avec une sincérité dépourvue de tout scepticisme ; hypermodernité car les rituels sont exécutés en ville par les jeunes hommes sous les ordres d’un DJ à la mode islamique ; sono, instruments de musique dernier cri, écran géant… tout cela emprunte à une culture mondialisée où le rituel devient show. Le statut des femmes se rejoue aussi sur la scène rituelle ; jadis spectatrices affligées des processions masculines de pénitents, voici qu’ici et là, en ville, elles se flagellent avec des chaînes comme les hommes.
J’analyserai enfin le rêve d’un Iranien venu en France pour un court séjour et bien décidé à partager, sans retenue, le mode de vie de ses hôtes. Mais le voici rattrapé dans son rêve, ou plutôt son cauchemar, par Abol Fazl (le demi-frère de l’imam Hoseyn) qui l’enjoint de respecter les interdits.
Ces trois rapides évocations illustrent, à leur façon, les paradoxes de l’iranité aujourd’hui.
L'ethnologie, et en particulier l'ethnologie des sociétés européennes, est née sous le signe de la tradition, plus exactement de la tradition orale de ces savoirs, de ces croyances, de ces coutumes que l'on pensait transmises à l'identique de génération en génération dans les milieux populaires. Le folklore, disait Andrew Lang « ce sont les idées qui vivent dans notre temps mais ne sont pas de notre temps », « les débris des civilisations mortes dans une civilisation vivante ». La question que se posaient la plupart des folkloristes et des ethnographes qui collectaient des coutumes au XIXème siècle et au début du XXème siècle était : « D'où ça vient ? » et le but de leur recherche était d'en découvrir la paternité dans un lointain passé à l'origine de la communauté ethnique ou nationale. Les exemples de cette démarche abondent. Hermann Bausinger, dans son histoire de la Volkskunde allemande cite de nombreux exemples de cette tendance à « ramener toute chose à la cosmogonie germanique ou indo-germanique », à retracer « une tradition continue sur des millénaires » comme s'il s'agissait, je le cite, d' « un fleuve tranquille et régulier ». Cette idée de continuité n'est pas propre à la volkskunde. Elle anime les différentes écoles folkloriques nationales ou régionales et il n'est pas étonnant que les érudits du début du XIXème siècle se soient nommés « antiquaires » (« popular antiquities », tel était l'objet des recherches des folkloristes anglais à l'époque). Dans son ouvrage sur La tradition de danse en Béarn et en pays basque, Jean-Michel Guilcher cite ainsi un auteur basque du XIXème siècle, qui écrit : « Les Basques continuent de se réunir pour célébrer par les mêmes danses ces fêtes où trois cents ou quatre cents générations avaient successivement assisté dans les mêmes lieux ». Faut-il souligner cette quête obsessionnelle de la tradition, de cette recherche des origines dans les premiers temps de l'ethnologie européenne ? Les noms des
L'ethnologie, et en particulier l'ethnologie des sociétés européennes, est née sous le signe de la tradition, plus exactement de la tradition orale de ces savoirs, de ces croyances, de ces coutumes que l'on pensait transmises à l'identique de génération en génération dans les milieux populaires. Le folklore, disait Andrew Lang « ce sont les idées qui vivent dans notre temps mais ne sont pas de notre temps », « les débris des civilisations mortes dans une civilisation vivante ». La question que se posaient la plupart des folkloristes et des ethnographes qui collectaient des coutumes au XIXème siècle et au début du XXème siècle était : « D'où ça vient ? » et le but de leur recherche était d'en découvrir la paternité dans un lointain passé à l'origine de la communauté ethnique ou nationale. Les exemples de cette démarche abondent. Hermann Bausinger, dans son histoire de la Volkskunde allemande cite de nombreux exemples de cette tendance à « ramener toute chose à la cosmogonie germanique ou indo-germanique », à retracer « une tradition continue sur des millénaires » comme s'il s'agissait, je le cite, d' « un fleuve tranquille et régulier ». Cette idée de continuité n'est pas propre à la volkskunde. Elle anime les différentes écoles folkloriques nationales ou régionales et il n'est pas étonnant que les érudits du début du XIXème siècle se soient nommés « antiquaires » (« popular antiquities », tel était l'objet des recherches des folkloristes anglais à l'époque). Dans son ouvrage sur La tradition de danse en Béarn et en pays basque, Jean-Michel Guilcher cite ainsi un auteur basque du XIXème siècle, qui écrit : « Les Basques continuent de se réunir pour célébrer par les mêmes danses ces fêtes où trois cents ou quatre cents générations avaient successivement assisté dans les mêmes lieux ». Faut-il souligner cette quête obsessionnelle de la tradition, de cette recherche des origines dans les premiers temps de l'ethnologie européenne ? Les noms des
After the publication of Hobsbawm and Ranger's groundbreaking The Invention of Tradition and ten years after Noyes' essay, Tradition: Three Traditions, what do we, as specialists of European cultures, have to say about "tradition"? This forum invites a selection of scholars coming from various thematic fields and countries to think about the concept of tradition, considered as one of our first conceptual tools and ethnographic objects of investigation. The authors reflexively discuss in which ways their research experiences challenge their own perceptions, understanding, and reframing of tradition. More than mapping new and allegedly new - or better "recycled" - ways in which social, ethnic, religious, or political groups use and manipulate traditions, the authors also address their perplexities with the notion of tradition. They thus add a specific layer of reflection, touching on temporality, methodology, and theoretical frames, to their practices of folklore and ethnology today.