Un numéro d'Émulations. Revue de sciences sociales, qui paraîtra en 2023 aux Presses universitair... more Un numéro d'Émulations. Revue de sciences sociales, qui paraîtra en 2023 aux Presses universitaires de Louvain, sera consacré au thème « Les mondes des politiques publiques du corps sain », sous la direction de Ghislaine Gallenga (AMU-IDEMEC) et Jérôme Soldani (UPV-SENS). Argumentaire https://ojs.uclouvain.be/index.php/emulations/announcement/view/743
« Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour ». « Manger Bouger ». Ce sont là quelques injonctions issues de la campagne du Programme national nutrition santé (PNNS) lancée par le gouvernement français en 2001 et visant à améliorer, de manière générale, l'état de santé de la population. Il est question d'agir sur la nutrition qui est elle-même définie par l'équilibre entre les apports liés à l'alimentation et les dépenses occasionnées par l'activité physique. À partir de 2019, il est notamment recommandé d'augmenter et de régulariser l'activité physique, tout en réduisant la sédentarité. Ces campagnes sont le fruit d'un long processus amorcé par les théories hygiénistes du XIX ème siècle (Bourdelais, 2001 ; Jorland, 2010) et souvent associées aux discours nationalistes et à la construction de la nation à travers la régénérescence (ou l'amélioration) supposée d'un groupe social, voire d'une « race », à travers la culture d'un corps sain dont l'obtention passe non seulement par des conceptions liées aux normes de propreté, mais surtout par une alimentation et une activité physique appropriée (Morris, 2004). Cependant les discours hygiénistes correspondent à certaines normes sociales et culturelles. En effet, les politiques de santé sanitaires ou économiques s'ancrent généralement dans des systèmes de représentations et dans une manière de penser l'autonomie de la personne (Fainzang, 2011 : 123-124). Aussi bien dans le temps que dans l'espace, certains modèles associent le corps gros à un corps sain quand d'autres assimilent le corps sain à un corps mince. Les canons de beauté et les conceptions locales de l'hygiène peuvent contredire d'autres normes (Andrieu, Boëtsch, 2013) comme, par exemple, l'idéal de blancheur de la peau qui limite parfois drastiquement la pratique d'activités physiques en extérieur (Assayag, 1999 ; Bonniol, 1995) ou, ailleurs, la pratique du gavage des femmes qui contredit l'idéal biomédical d'un corps sain, mince et musclé (Musée de l'Homme, 2019). Car les politiques publiques apparaissent généralement, en amont, comme le produit de représentations sociales et culturelles, y compris quand elles brandissent le drapeau de la science pour se légitimer. Il en découle que ces logiques se heurtent parfois à des réalités radicalement différentes, notamment quand ces politiques, venues des Nords, se diffusent dans les Suds. Il est donc possible de s'interroger sur la nature des décalages ainsi induits, mais aussi sur la façon dont ces politiques se réajustent en fonction de ces contraintes, dans un processus de réappropriation de ces modèles. En retour, il est profitable de se questionner sur comment les sociétés des Nords tendent à s'inspirer des épistémologies des Suds pour tenter d'améliorer leurs propres politiques publiques du corps sain. Au gré des transformations du service public, dont découlent les politiques publiques, le domaine de la santé voit sa surface publique diminuée au profit d'une concurrence et d'une recherche de profit. Dans ce cadre de recherche de diminution des coûts récurrents, la prévention a toujours été un invariant et une variable d'ajustement. Comme le décrivent Christine Détrez (2002) et Didier Fassin (1996), le modèle de santé publique repose sur un paradoxe : la conception de la santé collective passe par une prise en charge individuelle de la prévention. Les politiques publiques finissent par s'incarner dans les individus à travers leur quotidien et la santé relève désormais de la responsabilité individuelle. Les réseaux sociaux magnifient le corps jeune,
L’œuvre de Condominas, avant-gardiste des critiques textualistes des post-modernes, ne cesse d’in... more L’œuvre de Condominas, avant-gardiste des critiques textualistes des post-modernes, ne cesse d’inspirer les jeunes générations d’ethnologues. De la notion d’« ethnocide » à celle d’« espace social », son travail couvre un spectre conceptuel qui va au-delà de l’ethnologie, sa discipline. Cet ouvrage met l’accent sur une partie de son œuvre, les dimensions attenantes à l’enquête ethnographique, que ses élèves appellent « la méthode Condo ». Les différents chapitres qui composent cet ouvrage s’attachent ainsi à éclairer une problématique actuelle de l’anthropologie qu’est l’enquête ethnographique en vue de rendre hommage au travail pionnier de Georges Condominas. Il s’agit d’explorer différents aspects de l’œuvre de l’auteur : la méthode ethnographique – ethnographie –, les conséquences politiques et relationnelles de l’immersion – immersion –, l’actualisation et les prolongements de sa réflexion – temporalités. Autrement dit, nous souhaitons, en donnant la plume à des chercheurs qui ont connu et côtoyé Georges Condominas et à d’autres qui s’en inspirent, proposer des réflexions autour de son héritage et de l’actualité de l’expérience ethnographique. L’ ouvrage ne se restreint pas à l’Asie du Sud-Est, aire géographique dont il était le spécialiste incontesté, il met en tension l’apport de Condominas avec d’autres aires géographiques (Haute Asie, Europe, Moyen-Orient).
Issues of morality have penetrated all sub-fields of anthropology. The same is true for the field... more Issues of morality have penetrated all sub-fields of anthropology. The same is true for the field of business studies, where new forms of applied ethics have emerged. These contemporary challenges pose new anthropological questions and thus offer new frameworks with which to approach ethics within the disciplines of both anthropology and business studies. Ethics can be seen as the search for an optimal balance. Defining such balance inevitably creates conflicts between diverging interests. In the anthropology of business ethics, this tension is twofold: the manager is torn between two imperatives―ethics versus efficiency―while the researcher is caught up between scientific neutrality and social engagement. This dilemma is highlighted in this collection of papers.
Un numéro d'Émulations. Revue de sciences sociales, qui paraîtra en 2023 aux Presses universitair... more Un numéro d'Émulations. Revue de sciences sociales, qui paraîtra en 2023 aux Presses universitaires de Louvain, sera consacré au thème « Les mondes des politiques publiques du corps sain », sous la direction de Ghislaine Gallenga (AMU-IDEMEC) et Jérôme Soldani (UPV-SENS). Argumentaire https://ojs.uclouvain.be/index.php/emulations/announcement/view/743
« Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour ». « Manger Bouger ». Ce sont là quelques injonctions issues de la campagne du Programme national nutrition santé (PNNS) lancée par le gouvernement français en 2001 et visant à améliorer, de manière générale, l'état de santé de la population. Il est question d'agir sur la nutrition qui est elle-même définie par l'équilibre entre les apports liés à l'alimentation et les dépenses occasionnées par l'activité physique. À partir de 2019, il est notamment recommandé d'augmenter et de régulariser l'activité physique, tout en réduisant la sédentarité. Ces campagnes sont le fruit d'un long processus amorcé par les théories hygiénistes du XIX ème siècle (Bourdelais, 2001 ; Jorland, 2010) et souvent associées aux discours nationalistes et à la construction de la nation à travers la régénérescence (ou l'amélioration) supposée d'un groupe social, voire d'une « race », à travers la culture d'un corps sain dont l'obtention passe non seulement par des conceptions liées aux normes de propreté, mais surtout par une alimentation et une activité physique appropriée (Morris, 2004). Cependant les discours hygiénistes correspondent à certaines normes sociales et culturelles. En effet, les politiques de santé sanitaires ou économiques s'ancrent généralement dans des systèmes de représentations et dans une manière de penser l'autonomie de la personne (Fainzang, 2011 : 123-124). Aussi bien dans le temps que dans l'espace, certains modèles associent le corps gros à un corps sain quand d'autres assimilent le corps sain à un corps mince. Les canons de beauté et les conceptions locales de l'hygiène peuvent contredire d'autres normes (Andrieu, Boëtsch, 2013) comme, par exemple, l'idéal de blancheur de la peau qui limite parfois drastiquement la pratique d'activités physiques en extérieur (Assayag, 1999 ; Bonniol, 1995) ou, ailleurs, la pratique du gavage des femmes qui contredit l'idéal biomédical d'un corps sain, mince et musclé (Musée de l'Homme, 2019). Car les politiques publiques apparaissent généralement, en amont, comme le produit de représentations sociales et culturelles, y compris quand elles brandissent le drapeau de la science pour se légitimer. Il en découle que ces logiques se heurtent parfois à des réalités radicalement différentes, notamment quand ces politiques, venues des Nords, se diffusent dans les Suds. Il est donc possible de s'interroger sur la nature des décalages ainsi induits, mais aussi sur la façon dont ces politiques se réajustent en fonction de ces contraintes, dans un processus de réappropriation de ces modèles. En retour, il est profitable de se questionner sur comment les sociétés des Nords tendent à s'inspirer des épistémologies des Suds pour tenter d'améliorer leurs propres politiques publiques du corps sain. Au gré des transformations du service public, dont découlent les politiques publiques, le domaine de la santé voit sa surface publique diminuée au profit d'une concurrence et d'une recherche de profit. Dans ce cadre de recherche de diminution des coûts récurrents, la prévention a toujours été un invariant et une variable d'ajustement. Comme le décrivent Christine Détrez (2002) et Didier Fassin (1996), le modèle de santé publique repose sur un paradoxe : la conception de la santé collective passe par une prise en charge individuelle de la prévention. Les politiques publiques finissent par s'incarner dans les individus à travers leur quotidien et la santé relève désormais de la responsabilité individuelle. Les réseaux sociaux magnifient le corps jeune,
L’œuvre de Condominas, avant-gardiste des critiques textualistes des post-modernes, ne cesse d’in... more L’œuvre de Condominas, avant-gardiste des critiques textualistes des post-modernes, ne cesse d’inspirer les jeunes générations d’ethnologues. De la notion d’« ethnocide » à celle d’« espace social », son travail couvre un spectre conceptuel qui va au-delà de l’ethnologie, sa discipline. Cet ouvrage met l’accent sur une partie de son œuvre, les dimensions attenantes à l’enquête ethnographique, que ses élèves appellent « la méthode Condo ». Les différents chapitres qui composent cet ouvrage s’attachent ainsi à éclairer une problématique actuelle de l’anthropologie qu’est l’enquête ethnographique en vue de rendre hommage au travail pionnier de Georges Condominas. Il s’agit d’explorer différents aspects de l’œuvre de l’auteur : la méthode ethnographique – ethnographie –, les conséquences politiques et relationnelles de l’immersion – immersion –, l’actualisation et les prolongements de sa réflexion – temporalités. Autrement dit, nous souhaitons, en donnant la plume à des chercheurs qui ont connu et côtoyé Georges Condominas et à d’autres qui s’en inspirent, proposer des réflexions autour de son héritage et de l’actualité de l’expérience ethnographique. L’ ouvrage ne se restreint pas à l’Asie du Sud-Est, aire géographique dont il était le spécialiste incontesté, il met en tension l’apport de Condominas avec d’autres aires géographiques (Haute Asie, Europe, Moyen-Orient).
Issues of morality have penetrated all sub-fields of anthropology. The same is true for the field... more Issues of morality have penetrated all sub-fields of anthropology. The same is true for the field of business studies, where new forms of applied ethics have emerged. These contemporary challenges pose new anthropological questions and thus offer new frameworks with which to approach ethics within the disciplines of both anthropology and business studies. Ethics can be seen as the search for an optimal balance. Defining such balance inevitably creates conflicts between diverging interests. In the anthropology of business ethics, this tension is twofold: the manager is torn between two imperatives―ethics versus efficiency―while the researcher is caught up between scientific neutrality and social engagement. This dilemma is highlighted in this collection of papers.
Les exigences de l’anthropologie, sa capacité d’aborder les sujets les plus variés, la précision ... more Les exigences de l’anthropologie, sa capacité d’aborder les sujets les plus variés, la précision et la qualité de ses résultats lui procurent naturellement une place dans l’aide à la décision. Cependant, cette situation suscite certaines tensions entre les connaissances académiques et les besoins pratiques, les délais nécessaires, les lieux et objets d’investigation, les diverses finalités et les différents exercices de la discipline. Les réponses à ces paradoxes doivent conduire à la mise en place de nouvelles formes de professionnalisation. Les participants à ces actes de colloque ont voulu proposer un état des lieux qui pourra permettre d’ouvrir la voie à de nouvelles enquêtes et contribuer à préciser les tâches qui s’imposent aujourd’hui à l’anthropologie
L’ancien bassin minier de Provence et plus precisement la ville de Gardanne (Bouches-du-Rhone) co... more L’ancien bassin minier de Provence et plus precisement la ville de Gardanne (Bouches-du-Rhone) constituent un territoire revelateur et emblematique de la transition energetique. A partir d’une recherche pluridisciplinaire associant anthropologues, geographes, et sociologues, il s’agira de montrer dans cette communication comment la transition energetique prend corps et se decline a l’echelle locale en mariant les angles de vues: les salaries de la centrale thermique, les menages nouvellement installes, la politique municipale, les petits entrepreneurs.Ainsi, nous nous proposons d’eclairer la problematique de la transition energetique en s’interessant aux strategies, pratiques et representations de differentes categories d’acteurs qui interagissent sur ce territoire.Ces acteurs sont-ils a proprement parler des relais volontaristes des mots d’ordre politiques? Contribuent-ils a la dynamique d’un marche d’equipements de substitution? Adaptent-ils leur consommation energetique a ces nou...
Dans cet entretien, Ghislaine Gallenga propose une reflexion sur la notion d’ethique en anthropol... more Dans cet entretien, Ghislaine Gallenga propose une reflexion sur la notion d’ethique en anthropologie. Elle met en resonance l’emergence des questionnements moraux et l’importance accrue donnee a cette notion au sein de la discipline avec les mutations politiques globales des societes occidentales ces dernieres annees. Elle revient ainsi sur cette fameuse transformation des questions sociales en questions morales. Elle enjoint de faire une sociologie pragmatique des mises en discours et en pratiques de l’ethique par les anthropologues, tout en mettant en garde contre une derive bureaucratique et cosmetique de la valorisation pretendument recente de l’ethique de/dans la discipline.
Journal Des Anthropologues Association Francaise Des Anthropologues, Jun 2, 2014
Journal des anthropologues n° 136-137, 2014 Résumé Dans cet entretien, Ghislaine Gallenga propose... more Journal des anthropologues n° 136-137, 2014 Résumé Dans cet entretien, Ghislaine Gallenga propose une réflexion sur la notion d’éthique en anthropologie. Elle met en résonance l’émergence des questionnements moraux et l’importance accrue donnée à cette notion au sein de la discipline avec les mutations politiques globales des sociétés occidentales ces dernières années. Elle revient ainsi sur cette fameuse transformation des questions sociales en questions morales. Elle enjoint de faire une sociologie pragmatique des mises en discours et en pratiques de l’éthique par les anthropologues, tout en mettant en garde contre une dérive bureaucratique et cosmétique de la valorisation prétendument récente de l’éthique de/dans la discipline. Abstract Thinking Through the Mirror of Ethics In this interview, Ghislaine Gallenga shares discusses the notion of ethics in anthropology. She correlates the emergence of moral issues and the increased importance given to this concept of ethics within the discipline with the global political changes at stake in Western societies. Thus, the author addresses the famous transformation of social issues into moral issues. She invites to a pragmatic sociology of the anthropologist’s “ethical discourse and practices”, while cautioning against a certain bureaucratic and cosmetic shade of the alleged recent appreciation of ethics by/in the discipline.
Moussons Recherche En Sciences Humaines Sur L Asie Du Sud Est, Jun 15, 2013
"The entrepreneurship ethics is widely mobilized in business and enterprise milieu in South-... more "The entrepreneurship ethics is widely mobilized in business and enterprise milieu in South-East Asia where it is most often presented as a set of moral, ideological or religious precepts that local actors designate by the term «Asian values». The purpose of this introduction is to put these so called values in the context of entrepreneurship on the basis of seminal works dealing with South-East Asian entreprises. We will see that in most cases these works oscillate between two poles: first, Max Weber’s sociology of industrial capitalism through the prism of religious ethics, and secondly the substantivist approach of Karl Polanyi. If the analytical tools of these debates have been applied mostly to entrepreneurs from the Chinese Diaspora, it is the question of the entrepreneurs’ dominant ideology through the prism of philosophical and religious currents which serve as benchmarks. How values and ideologies are perpetuated, adapted or implemented by company management? How do they fit also in micro-strategies of local actors? How does entrepreneurial ethics decline in business of various statutes and in entrepreneurs’ families? What images these families do build, and what are the values involved in the construction of this ethics? In other words, we mean to observe existing practices in this part of the world and understand their logic through anthropological analysis. Thus, contri- butions of this issue provide both some answers and open to other ideas to contribute to outline what “entrepreneurship ethics” can be in the region of South-East Asia expanded to Sino-Indian margins. L’éthique entrepreneuriale est une notion largement mobilisée dans le milieu des affaires et des entreprises en Asie du Sud-Est où elle est présentée le plus souvent comme un ensemble de préceptes moraux, idéologiques ou religieux que les acteurs locaux rassemblent sous le vocable « valeurs asiatiques ». L’objet de cette introduction est de replacer ces valeurs dans le contexte de l’entreprise à partir de quelques travaux fondateurs de ce sujet en Asie du Sud-Est. Nous verrons que le plus souvent ils oscillent entre deux pôles : d’une part la sociologie wébérienne du capitalisme industriel par le prisme de l’éthique religieuse et d’autre part l’approche substantiviste de Polanyi. Si les grilles d’analyse nées de ces débats ont été appliquées en majorité aux entrepreneurs issus de la diaspora chinoise, c’est la question de l’idéologie des entrepreneurs qui prédomine à travers le prisme des courants philosophiques et religieux qui leur servent de repères. Comment des valeurs et des idéologies sont-elles perpétuées, adaptées ou transposées par les directions d’entreprise ? Comment s’insèrent-elles également dans les micro-stra- tégies des acteurs locaux ? Comment l’éthique entrepreneuriale se décline-t-elle dans des établissements de statuts divers et dans des familles d’entrepreneurs ? Quelles images ces dernières construisent-elles et quelles sont les valeurs (morales, religieuses, etc.) qui participent à la construction de cette éthique ? En d’autres termes, il s’agit d’observer des pratiques qui ont cours dans cette partie du monde et d’en comprendre les logiques au travers d’analyses anthropologiques. Ainsi, les contributions présentées dans ce numéro apportent à la fois des éléments de réponse et ouvrent d’autres pistes de réflexion pour concourir à esquisser ce que « éthique entrepreneuriale » peut recouvrir dans cette région du Sud-Est asiatique élargi aux marges sino-indiennes."
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Books by Ghislaine GALLENGA
https://ojs.uclouvain.be/index.php/emulations/announcement/view/743
« Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour ». « Manger Bouger ». Ce sont là quelques injonctions issues de la campagne du Programme national nutrition santé (PNNS) lancée par le gouvernement français en 2001 et visant à améliorer, de manière générale, l'état de santé de la population. Il est question d'agir sur la nutrition qui est elle-même définie par l'équilibre entre les apports liés à l'alimentation et les dépenses occasionnées par l'activité physique. À partir de 2019, il est notamment recommandé d'augmenter et de régulariser l'activité physique, tout en réduisant la sédentarité. Ces campagnes sont le fruit d'un long processus amorcé par les théories hygiénistes du XIX ème siècle (Bourdelais, 2001 ; Jorland, 2010) et souvent associées aux discours nationalistes et à la construction de la nation à travers la régénérescence (ou l'amélioration) supposée d'un groupe social, voire d'une « race », à travers la culture d'un corps sain dont l'obtention passe non seulement par des conceptions liées aux normes de propreté, mais surtout par une alimentation et une activité physique appropriée (Morris, 2004). Cependant les discours hygiénistes correspondent à certaines normes sociales et culturelles. En effet, les politiques de santé sanitaires ou économiques s'ancrent généralement dans des systèmes de représentations et dans une manière de penser l'autonomie de la personne (Fainzang, 2011 : 123-124). Aussi bien dans le temps que dans l'espace, certains modèles associent le corps gros à un corps sain quand d'autres assimilent le corps sain à un corps mince. Les canons de beauté et les conceptions locales de l'hygiène peuvent contredire d'autres normes (Andrieu, Boëtsch, 2013) comme, par exemple, l'idéal de blancheur de la peau qui limite parfois drastiquement la pratique d'activités physiques en extérieur (Assayag, 1999 ; Bonniol, 1995) ou, ailleurs, la pratique du gavage des femmes qui contredit l'idéal biomédical d'un corps sain, mince et musclé (Musée de l'Homme, 2019). Car les politiques publiques apparaissent généralement, en amont, comme le produit de représentations sociales et culturelles, y compris quand elles brandissent le drapeau de la science pour se légitimer. Il en découle que ces logiques se heurtent parfois à des réalités radicalement différentes, notamment quand ces politiques, venues des Nords, se diffusent dans les Suds. Il est donc possible de s'interroger sur la nature des décalages ainsi induits, mais aussi sur la façon dont ces politiques se réajustent en fonction de ces contraintes, dans un processus de réappropriation de ces modèles. En retour, il est profitable de se questionner sur comment les sociétés des Nords tendent à s'inspirer des épistémologies des Suds pour tenter d'améliorer leurs propres politiques publiques du corps sain. Au gré des transformations du service public, dont découlent les politiques publiques, le domaine de la santé voit sa surface publique diminuée au profit d'une concurrence et d'une recherche de profit. Dans ce cadre de recherche de diminution des coûts récurrents, la prévention a toujours été un invariant et une variable d'ajustement. Comme le décrivent Christine Détrez (2002) et Didier Fassin (1996), le modèle de santé publique repose sur un paradoxe : la conception de la santé collective passe par une prise en charge individuelle de la prévention. Les politiques publiques finissent par s'incarner dans les individus à travers leur quotidien et la santé relève désormais de la responsabilité individuelle. Les réseaux sociaux magnifient le corps jeune,
https://ojs.uclouvain.be/index.php/emulations/announcement/view/743
« Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour ». « Manger Bouger ». Ce sont là quelques injonctions issues de la campagne du Programme national nutrition santé (PNNS) lancée par le gouvernement français en 2001 et visant à améliorer, de manière générale, l'état de santé de la population. Il est question d'agir sur la nutrition qui est elle-même définie par l'équilibre entre les apports liés à l'alimentation et les dépenses occasionnées par l'activité physique. À partir de 2019, il est notamment recommandé d'augmenter et de régulariser l'activité physique, tout en réduisant la sédentarité. Ces campagnes sont le fruit d'un long processus amorcé par les théories hygiénistes du XIX ème siècle (Bourdelais, 2001 ; Jorland, 2010) et souvent associées aux discours nationalistes et à la construction de la nation à travers la régénérescence (ou l'amélioration) supposée d'un groupe social, voire d'une « race », à travers la culture d'un corps sain dont l'obtention passe non seulement par des conceptions liées aux normes de propreté, mais surtout par une alimentation et une activité physique appropriée (Morris, 2004). Cependant les discours hygiénistes correspondent à certaines normes sociales et culturelles. En effet, les politiques de santé sanitaires ou économiques s'ancrent généralement dans des systèmes de représentations et dans une manière de penser l'autonomie de la personne (Fainzang, 2011 : 123-124). Aussi bien dans le temps que dans l'espace, certains modèles associent le corps gros à un corps sain quand d'autres assimilent le corps sain à un corps mince. Les canons de beauté et les conceptions locales de l'hygiène peuvent contredire d'autres normes (Andrieu, Boëtsch, 2013) comme, par exemple, l'idéal de blancheur de la peau qui limite parfois drastiquement la pratique d'activités physiques en extérieur (Assayag, 1999 ; Bonniol, 1995) ou, ailleurs, la pratique du gavage des femmes qui contredit l'idéal biomédical d'un corps sain, mince et musclé (Musée de l'Homme, 2019). Car les politiques publiques apparaissent généralement, en amont, comme le produit de représentations sociales et culturelles, y compris quand elles brandissent le drapeau de la science pour se légitimer. Il en découle que ces logiques se heurtent parfois à des réalités radicalement différentes, notamment quand ces politiques, venues des Nords, se diffusent dans les Suds. Il est donc possible de s'interroger sur la nature des décalages ainsi induits, mais aussi sur la façon dont ces politiques se réajustent en fonction de ces contraintes, dans un processus de réappropriation de ces modèles. En retour, il est profitable de se questionner sur comment les sociétés des Nords tendent à s'inspirer des épistémologies des Suds pour tenter d'améliorer leurs propres politiques publiques du corps sain. Au gré des transformations du service public, dont découlent les politiques publiques, le domaine de la santé voit sa surface publique diminuée au profit d'une concurrence et d'une recherche de profit. Dans ce cadre de recherche de diminution des coûts récurrents, la prévention a toujours été un invariant et une variable d'ajustement. Comme le décrivent Christine Détrez (2002) et Didier Fassin (1996), le modèle de santé publique repose sur un paradoxe : la conception de la santé collective passe par une prise en charge individuelle de la prévention. Les politiques publiques finissent par s'incarner dans les individus à travers leur quotidien et la santé relève désormais de la responsabilité individuelle. Les réseaux sociaux magnifient le corps jeune,