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Entretien avec Fausto Fraisopi : Questions sur la philosophie de la question – ACTU PHILOSOPHIA
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philosophes – Révélatio…
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Tome II
Entretien avec Fausto Fraisopi : Questions sur la
philosophie de la question
Posted on 29 juin 2023 by Jean-Baptiste Fournier
Introduction : Question, sens et mathesis (par Jean-Baptiste
Fournier)
Il peut ne pas paraître évident, pour le lecteur de Philosophie et
demande[1] se prenant au jeu de la construction des différentes
dimensions de la nouvelle mathesis dont ce livre ambitieux se
met en quête, de saisir le rôle qu’y joue la phénoménologie de la
question. Plus généralement, on peut s’étonner que la méthode
Isaac de l’Étoile : Lettres
sur l’âme, Lettres sur le…
Patrick Wotling : « Oui,
l’homme fut un essai ». …
Cyrille Michon : Répondre
de soi. Enquête sur la…
Patrick Wotling :
Nietzsche. La conquête…
Tocqueville : La
démocratie à l’épreuve…
phénoménologique puisse s’élever au traitement d’objets
métaphilosophiques, et redouter, non sans raison, qu’à ce jeu,
elle finisse par se perdre. Telles ont été mes premières réactions
lorsque j’ai préparé cet entretien : si l’idée même d’une
phénoménologie de la question ne me paraissait pas aller de
soi, je n’avais pas non plus compris qu’il s’agissait là, en réalité,
de la voie d’accès la plus directe aux développements de
Philosophie et demande.
Une des difficultés que pose l’entreprise de Fausto Fraisopi est
en effet de comprendre pourquoi la reprise du projet d’une
mathesis (encore universalis?) s’impose – et cela d’autant plus
que la description du réel que donne l’auteur semble
particulièrement peu compatible avec un tel projet, ce que
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suggère d’ailleurs l’expression
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hautement paradoxale de
« mathesis des instabilités ».
C’est précisément pour
comprendre la nécessité de la
mathesis que le passage par la
phénoménologie de la question
s’impose et prend tout son sens.
La nécessité de la mathesis
s’inscrit dans la demande de
sens qui surgit dans le sujet
confronté à la complexité
radicale et inassimilable du réel –
la nécessité de la métaphilosophie prend donc sa source dans la
très concrète et très existentielle question : « qui/que suis-je ? ».
Mais précisément, aborder directement cette question du point
de vue métaphilosophique, ce serait risquer de la perdre dans
une analyse d’emblée abstraite. Au contraire, la
phénoménologie ouvre ici un champ de phénomènes dans
lequel se fait jour un certain niveau de sens : non pas le sens
déjà constitué, ni même le « sens-se-faisant », mais le sens
seulement demandé ou exigé. La sphère du sens non encore fait
constitue l’objet propre de la phénoménologie de la question et
le fonds phénoménal de la métaphilosophie.
Il est donc particulièrement éclairant d’aborder Philosophie et
demande à partir de cette sphère de phénomènes nouvelle,
inextricablement liée à la conception du réel comme
irréductiblement complexe, et où la nécessité de la mathesis
viendra ultimement prendre sens. Or, entre les notions en jeu ici
se nouent des relations complexes, et c’est pour dénouer ce
nœud que j’ai proposé à Fausto Fraisopi de tirer quelques fils et
de l’inviter, à l’occasion de mes questions, à développer
quelques points qui me paraissaient essentiels. Dans les pages
qui suivent, nous commençons ainsi par aborder de manière
très générale l’idée d’une phénoménologie de la question, en
prenant ancrage dans le phénomène le plus simple du
questionnement : question enfantine, question socratique…
J’interroge ensuite Fausto Fraisopi sur le rôle que joue la
méthode phénoménologique dans Philosophie et demande,
avant d’aborder plus frontalement les problèmes que pose son
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livre etQui
auxquels
la phénoménologie
de la question offre une voie
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d’accès. Nous tâchons ensuite de déterminer la structure du
champ ainsi ouvert en nous interrogeant sur le statut insigne de
la question première : « qui/que suis-je ? ».
Jean-Baptiste Fournier : Un des apports majeurs de
Philosophie et demande est de mettre la question en question –
entendons par là, de poser à nouveaux frais et à la lumière de la
science et de la philosophie contemporaines la question
socratique : de quoi s’enquiert-on lorsqu’on pose une question
? La philosophie doit en un sens commencer par poser la
question de la question. Or pour vous, poser une question, ce
n’est pas tant interroger l’essence d’une chose ; ce n’est pas
tant expliciter ce qui est déjà là en déployant la triade « Gefragte
»/« Befragte »/« Erfragte »[2] ; une question se définit plutôt chez
vous par rapport à une demande de sens.
Il me semble qu’il y ait là une définition forte de ce qu’est une
question, et cela bien au-delà du cadre théorétique dans lequel
se déploient vos analyses. Ainsi, si on s’intéresse aux questions
enfantines – à la genèse, donc, des questions –, on ne peut que
constater le caractère prégnant de la demande de sens qui s’y
fait jour. Parce que donner sens, pour l’enfant, c’est se rassurer,
se raccrocher à quelque chose, tout comme le bébé qui, à la
naissance, demande un regard à sa mère pour s’accrocher à
quelque chose, se repérer. Plus tard, l’enfant demande très
explicitement du sens en constituant son langage et interrogeant
les adultes autour de lui : derrière le « ça s’appelle comment ? »
émerge la demande de sens. Ensuite encore, le « pourquoi »
remplace les simples questions de dénomination, mais fait
toujours fond sur la même exigence de sens, et l’adulte est
requis pour y répondre.
Ma première question porte donc sur ce rapport intime entre
question et demande de sens, qui me semble être une porte
d’entrée très importante dans Philosophie et demande. Ainsi,
quel lien voyez-vous exactement entre question, demande, sens
et, pourrait-on dire, assurance ? En outre, comment votre
propos se situe-t-il par rapport au schéma heideggérien, et plus
généralement à ce que pourrait être une phénoménologie de la
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question
? Enfin, le modèle
de la question enfantine vous paraîtQui sommes-nous ?
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il apte à saisir ce qu’il y a d’essentiel dans une question ou fautil adopter un autre point de vue pour rendre compte du rapport
entre question et demande de sens ?
Fausto Fraisopi: Avant de répondre à votre question, il me
faudrait davantage développer quelques considérations par
rapport
1. à la question socratique;
2. au fait lui-même de mettre en question la question;
3. au cas, peut-être métonymique, de la demande enfantine.
Par rapport au premier point, je voudrais répondre résolument
par une réponse négative. Tout simplement parce que je ne sais
point quelle est la “question socratique”. Par le fait d’être
constamment en confrontation avec, plongé dirais-je dans la
culture antique, je ne saurais identifier la question socratique ni
l’élever à une sorte de paradigme d’une pensée philosophique
en tant que telle. Je pense très modestement que pour arriver à
caractériser une telle figure, bien avant d’en faire quoi que ce
soit, il faudrait composer – si cela est possible – le Socrate de
Platon, de Xénophon et d’Aristophanes, pour ensuite arriver à
réduire cette figure multiforme à levier d’une philosophie.
Je serais bien plus intéressé par la saisie de l’évolution de la
figure socratique au sein de la philosophie platonicienne, à
savoir son rôle modulaire et absolument plastique dans la toute
première fondation d’une protè epistème. Mais cela nous
amènerait trop loin, mais certainement loin aussi de ce que
j’appelle dans le livre un “socratisme vide”[3] qui se fonde sur un
motto assez fastidieux: si la métaphysique a procédé aux
réponses, il faut occulter la métaphysique pour redécouvrir les
questions. C’est trop simple, trop immédiat, une recette
finalement rhétorique.
Par rapport au deuxième point, et sans retomber dans un
regressus in infinitum, il faudrait sincèrement demander, au point
où nous en sommes, c’est-à-dire sur la base de notre culture
(aussi philosophique) ce que “mettre en question la question”
veut effectivement dire, et le faire en soulignant justement “des
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nos jours
et philosophiquement”.
Peut-être va-t-on discuter
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ensuite d’une telle nécessité et de la nécessité de le faire à partir
de la phénoménologie.
Car, en effet, on pourrait tout simplement répéter, ou renouer
avec la problématologie de Michel Meyer, qui se définit une
science de la question[4]. Mais ce n’est pas le cas ni le but. Pour
arriver tout simplement à saisir philosophiquement la question,
en tant que telle – car autrement la linguistique nous en donne
une définition épistémique bien plus claire – tout d’abord et
davantage en tant qu’acte d’un individu orienté à savoir, il fallait,
il faudrait la ramener “sur terre”. Cela équivaut à dire qu’il
faudrait la soustraire à la fausse abstraction, à l’abstraction
essentiellement factice, d’un questionner purement théorique,
ou d’un questionnement lequel, pour être tel, n’est que
purement théorique, orienté uniquement aux objets célestes que
la philosophie de fois en fois reconnaît.
Or, déjà un tel acte de saisie suffirait à relativiser ou à révoquer
l’isolement (prétendu sur la base d’une sorte de supériorité ou
de dignité) des questions philosophiques ou scientifiques plus
abstraites et/ou plus fondamentales. Cela arriverait à re-inscrire
l’acte de questionner (en toute sorte) au sein d’une histoire,
d’une genèse et d’une concrétion de sens des orientations
problématiques qui mènent aux questions. L’inscription du
questionnement philosophique au sein d’une praxis implique,
tout d’abord, d’inscrire, ou de savoir reconnaître le
questionnement comme praxis et, du point de vue
philosophique, de tirer la leçon tout d’abord de Wittgenstein et
ensuite de Dewey par rapport au questionnement.
Cela nous ramène – en quelque sorte – au troisième point, à
savoir le caractère épigénétique des questions clairement
théoriques, un caractère épigénétique qui peut être entendu
aussi bien du point de vue onto- que phylo-génétique. En
considérant que l’on n’a que des morceaux de phylogénése
d’un questionner – dans les textes des grandes religions par
exemple, ou dans l’épos ou encore dans la tragédie – ces
morceaux, il faudrait les interpréter. Une telle interprétation est
largement acceptée: elle dit, en bref, que bien loin d’y avoir une
sorte de kairos, d’événement de la theôria (Burnet) et, donc du
questionnement proprement théorique qui est celui de
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l’épistème
grecque, il y a bel
et bien une genèse (Cornford,
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Vernant et d’autres) qui conduit de l’interrogation sur ce que,
avec Scheler, on peut définir “die Stellung des Menschen im
Kosmos” (une interrogation propre à toutes les grandes religions
de l’antiquité, de la Chine à Gilgamesh à Homère, en passant
par le Bhagavadgita, les Upanishad et toutes les traditions
initiatiques) au questionnement théorique, à la theôria et à
l’épistème grecques. Cette interrogation est demande de sens,
dans la mesure où on n’a pas de “theoretische Einstellung” qui
soit (encore) définie, ou du moins explicite et codée dans une
praxis.
Cela rend d’autant plus intéressant de retracer ces morceaux de
phylogenèse au niveau onto-génétique, à savoir – justement
comme vous le faites remarquer – dans la question enfantine.
Cela ne signifie pas que les schémas (onto-génétique et phylogénétique) soient parfaitement superposables, ni que l’on
n’arrive pas à commettre un grand erreur en les superposant.
Cela démontre au moins que tout de même il y a une
correspondance singulière – et rarement interrogée – entre
l’émergence de la theôria et son questionnement du point de
vue phylogénétique et l’instauration d’un régime d’intérrogativité
théorique chez l’enfant: tous les deux sont relativement tardifs, à
savoir qu’il y a bien avant une phase dans laquelle questionner
c’est demander. La réponse n’est pas nécessairement, pour
l’enfant qui questionne, saillante du point de vue de son contenu
strictement théorique, mais saillante en vertu d’une assurance,
d’une donation de stabilité (phonétique, verbale, nominative etc.)
et, comme vous l’affirmez, on pourrait même se pousser à
affirmer qu’au niveau anté-prédicatif il y a une ouverture vers un
milieu incertain. Au sein de ce milieu flou, incertain, le sens est
donné par la croisée du regard maternel ou paternel sans qu’il y
ait réponse du tout. Le questionnement définitionnel (“qu’est-ce
que cela?” proféré ou tout simplement induit par une indication
déictique) et le questionnement explicatif-causal sont – du
moins du point de vue ontogénétique – tardifs, en retard par
rapport à l’origine, tout comme au sens phylogénétique. Il ne
faut pas en faire un absolu, donc un commencement absolu,
comme si – en dehors de toute Lebensform, en dehors et
indépendamment de toute praxis – il arrive, de façon
miraculeuse, presque divine, le questionner théorique.
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A ce point
je pourrais être Mentions
en mesure
de répondre à votre
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question, à savoir la question du rapport intime entre question et
demande de sens via le demander – ce qui n’est pas à négliger.
Car après ces considérations liminaires, qui n’épuisent point la
complexité et la difficulté du thème, il est quand-même légitime
d’envisager un lien plus profond de la question théorique avec
une activité plus basale, plus enracinée dans la praxis de
plusieurs formes de vie, qui consiste à vouloir obtenir quelque
chose par une demande. Ce demander se trouve dans le
questionner, mais il est parfois occulté par la nature technique
de la question, par sa consistance, par sa texture conceptuelle
hyper-fine, hyper-abstraite. Il demeure tout de même actif,
opératif, en acte. Et cela dans la mesure où la “simple” question
est un acte pratique, ou si l’on veut, praxiologique, par lequel on
fait quelque chose. Qu’est-ce l’on fait au juste? On ouvre un
champ de saisie, où la saisie de ce qui est en question devient
plus claire, plus définie. Par cette ouverture on déploie une
dynamique de “prise” plus précise, plus fine, ou plus vaste.
Cette dimension sous-jacente de la question permet de
réconfigurer également l’approche du schéma heidéggerien et
nous permet, par ce schéma, de rejoindre une phénoménologie
de la questio. Par rapport à ce schéma, et au § 2 d’Être et
temps[5] il y aurait beaucoup (beaucoup trop) à dire. Tout
d’abord, ce que l’on passe souvent sous silence, est le fait :
que la structure formelle de la question n’est qu’un vide qui,
pour Heidegger, s’applique à toute question – en tant
précisément que structure formelle –
et que, pour la comprendre de façon adéquate en relation au
sens de l’être il faut parcourir tout l’analytique du Dasein pour
qu’elle nous dise quelque chose.
Tout de même, des problèmes demeurent, car ici question
(Frage) – comme modalité du “chercher” [Suchen] – trouve sa
direction préalable dans le “cherché”. Or, pour la question du
Sens (de l’être), si le cherché théorétiquement est le Sens (de
l’être) et non pas l’être, car cela n’aurait aucun sens, le
Sens n’est pas nécessairement un cherché théorétiquement, ou
ne l’est pas à titre ultime (tout comme le cosmotheoros de Le
visible et l’invisible de Merleau-Ponty ne l’est en pas à titre
ultime[6]). Y a-t-il vraiment un Sens de l’être, ou un Sens tout
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court,Qui
quesommes-nous
l’on peut chercher
(éventuellement, par la
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Seinsfrage)? N’est-elle cette situation déjà une idéalisation
philosophique, sinon métaphysique, par laquelle la pensée (qui
se croit dépositaire d’un tel questionner) rate l’essentiel tout en
prétendant le saisir (à savoir LE SENS, ou l’unique)?
On pourrait de façon philosophiquement plus lucide et plus
pertinente affirmer que, si le question (même comme chercher)
est un acte par lequel on cherche…à combler un vide, car tout
d’abord et premièrement demande, ce vide n’est pas un unique,
ou il ne se laisse pas ramener nécessairement à un pròs hèn
comme les significations de l’étant à un Sens de l’être (au sein
de la tradition métaphysique, notamment à partir de Suarez). Le
fait d’être en demande de sens, par plusieurs modalités
d’approches au réel, n’est pas, n’est plus un idole métaphysique
caché sous les dépouilles d’une interrogation existentielle. Il est
en revanche le signe d’une situation privative constitutive sans
possibilité d’unité pléromatique. Il s’agit de la condition
humaine, si l’on veut, dans et par laquelle le vide d’un Sens se
manifeste par nos attitudes de demande de rémplissement. Cela
renforce l’actualité et la radicalité de l’approche
phénoménologique à la question développée premièrement
dans les Leçons sur la synthèse passive – dont Heidegger était
certainement informé – qui se placent en amont de la
radicalisation heideggerienne et pour cette raison développent
une radicalité d’interrogation immanente aux formes
d’expérience sans être affectés par le besoin d’un Unique, soit-il
le Sens, soit-il le Sens de l’être. Tout comme la question
enfantine, la question théorique – même celle qui fait semblant
d’être “fondamentale” – est constitutivement ramenée au champ
de l’immanence de notre expérience du réel et de notre vie en
commerce avec ce réel sans que l’indication d’un Sens unique
soit donnée.
Jean-Baptiste Fournier : On comprend bien à vos réponses
que poser la question de la question, c’est en un sens poser la
question du sens telle que la pose la phénoménologie – à savoir
l’extension du sens au-delà de la pure sphère de l’expression
linguistique, vers un niveau, justement, plus « fondamental ». Et
aborder votre livre au prisme de la phénoménologie de la
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question
est en effet une manière
de faire ressortir l’originalité de
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ce mode de saisie du sens, non pas en tant que « sens-sefaisant », mais au moment où, justement, il ne se fait pas
encore, mais où apparaît l’attente ou la demande de sens.
Cela m’amène à une double question : tout d’abord, comme
vous le remarquiez, que veut dire pour vous « mettre en question
la question » et surtout quelle est la pertinence de poser cette
question dans un cadre phénoménologique ?
En outre, cela m’amène à me demander de manière plus
générale quel est votre rapport à la phénoménologie ? La
redéfinition phénoménologique du sens vous semble-t-elle
particulièrement apte à mettre au jour cette demande de sens
dont vous soulignez le caractère prégnant ?
Cette question se pose en fait à plusieurs niveaux :
1. en particulier, il me paraît utile à la compréhension de votre
projet de vous interroger sur l’évolution de votre rapport à la
phénoménologie ? Je suis en effet frappé par l’évolution que
semble marquer la traduction de « Philosophie und Frage»
par « Philosophie et demande » : je vois dans cet écart entre
les deux titres le signe d’une insistance plus marquée vers la
dimension phénoménologique, une orientation plus
thématique sur le concept phénoménologique de sens. Cette
évolution vous paraît-elle significative et va-t-elle dans le
sens d’une prise de conscience plus aiguë de la pertinence
de la méthode phénoménologique pour aborder les
problèmes qui vous occupent et pour poser la question, non
seulement de la question, mais aussi de votre objet plus
direct, la mathesis ?
2. Et à l’inverse, quel est, du point de vue de votre relation à la
phénoménologie, le rapport entre les analyses métaphilosophiques que vous menez dans ce premier tome de
Philosophie et demande et les analyses qui occuperont dans
le second tome ?
Fausto Fraisopi: Le rapport de Philosophie et demande avec la
phénoménologie (tout comme avec Kant et l’Idéalisme
Allemand) aussi bien dans sa version Française qu’Allemande
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est enQui
effet
prédominant et,
si l’on veut, constituant, même en
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laissant de côté le glissement sémantique entre le titre en
Français et en Allemand. En effet, “Philosophie und Frage”
(comme titre!) exprimait de façon plus vague ce que le titre
Français exprime de façon plus claire, c’est-à-dire, cela peut
paraitre paradoxal, équivoque. Car “demande” en Allemand
peut-être exprimé aussi bien comme “Anfrage”, “Nachfrage”
que comme “Forderung”, tandis que “demande” fixe cette
équivocité dans un seul terme. L’expression “Philosophie und
Frage”, au lieu de “Philosophie und Anfrage” (ou Nachfrage ou
Forderung) correspond tout simplement à une nécessité d’ordre
“esthétique” et il ne trahit aucune instance plus marquée vers la
dimension phénoménologique dans l’édition Française. Certes,
au fil des années nécessaires de travail (extrêmement dense)
dont j’ai eu besoin pour amener le premier volume à une forme
“acceptable” du point de vue spéculatif – je me réfère
notamment à la seconde partie du premier volume en Français –
et surtout grâce à mes Vorlesungen et séminaires de recherches
à Freiburg, la relation à la phénoménologie s’est définie de façon
encore plus marquée. Et cette relation consiste, notamment par
rapport aux enjeux philosophiques de notre temps, sur lesquels
je reviendrai, à considérer la phénoménologie – pour citer un
article remarquable et remarquablement clair de Julien Farges
récemment paru – comme “philosophie du sens”[7].
A cette thèse il faudrait tout de même ajouter un long
éclaircissement théorique, sur lequel je travaille en duo
actuellement (pour un livre sur les structures fondamentales de
l’expérience: Topoi der Erfahrung. Noema, Horizont, Eidos aus
der gegenwartigen Perspektive). Qu’est-ce que cela signifie?
Cela signifie que la phénoménologie, notamment chez Husserl
mais on pourrait très bien étendre la thèse à toute la tradition
successive, n’interroge premièrement ni des structures
ontologiques ou gnoséologiques mais le Sens de l’expérience
au sein de laquelle peuvent s’esquisser des structures
ontologiques et/ou gnoséologiques. Ces dernières ne sont donc
jamais un primum. Le plus fondamental pour la phénoménologie
est le plus horizontal et visible, notre expérience du monde: la
nôtre justement, pas celle d’une entité cognitive anonyme (aussi
bien du point de vue de l’individu que de la communauté, aussi
bien du point de vue ontogénétique que phylogénétique).
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Si l’onQui
prend
par exemple Mentions
les concepts
que je viens de
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mentionner, il “suffit” de se concentrer sur le couple conceptuel
“noema-horizon” qui n’a aucun équivalent ailleurs, et
notamment dans la philosophie analytique (qui était)
hégémonique : le noème c’est ni tout simplement le Sinn ni tout
simplement la Bedeutung d’héritage frégéen, ni une synthèse
qui vienne aprés. La coappartenance entre ce qui peut être
conçu de façon abstractive comme la Bedeutung (objectale) et
ce qui peut être conçu de façon abstractive comme le Sinn est
décisive et change toute l’approche aussi bien à une ontologie
qu’à une épistémologie. Et surtout l’ouverture thématique à
l’intérieur de laquelle on en fait expérience de ce “ceci dans son
comment”, n’est ni une compléxion simplement sémantique ni
un référence simplement ontologique. Elle n’est pas un simple
“contexte” sémantique du parlant, ni un espace
ontologiquement individué mais l’expression la plus claire d’une
situationnalité plus riche, plus complexe du point de vue de la
description qui pourrait se définir uniquement de façon
topologico-structurale.
Cette richesse se traduit – sans abandonner la rigueur, tout au
contraire!!! – dans une orientation de travail tout simplement
différente. Sans vouloir affirmer que, par là, on est exceptés des
apories fondamentales qui affectent cette orientation de pensée,
il faut tout simplement avouer que le choix de s’inscrire dans
cette perspective de questionnement est clairement “métaphilosophique” ou “extra-philosophique” et ce “méta-” ou cet
“extra-” se laissent très clairement caractériser par le “ni-ni”. Si
l’on veut aboutir ou bien à une théorie de la connaissance et rien
d’autre ou à déterminer, comme dans l’ontologie métaphysique
analytique, l’inventaire du monde, la phénoménologie ne sert
tout simplement à rien: elle est trop fine, vibratile, en soi (si vous
me le permettez) dialectique, en vertu de ses équilibres
instables, précaires, qu’elle ne laisse pas aboutir à des
annonces triomphalistes (car justement encore de bout en bout
métaphysiques). Marc Richir, phénoménologue avec lequel je
n’ai ni j’ai jamais eu trop d’affinité – mais dont il faut reconnaître
tout de même la puissance et la radicalité – formule cela avec
une clarté foudroyante:
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dans
ses profondeurs
les plus révolutionnaires, la
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phénoménologie n’a rien d’une ontologie et rien d’une
métaphysique. Peut-être, énigmatiquement, a-t-elle encore
quelque chose à voir avec la philosophie puisqu’elle est,
dans notre tradition, le prolongement de la praxis du
penser. Et peut-être, non moins énigmatiquement, peut-on
préciser, en ce sens, qu’elle n’est pas une mathesis
universalis, mais une mathesis, qui s’apprend et se change
à mesure qu’elle avance, de l’instabilité et des
mouvements inextricablement complexes de cette praxis.
[8]
Or, laissons pour un instant de côté la question – il faudrait
toutefois la poser, et de façon radicale, systématique – de savoir
dans quelle mesure, et selon quels développements
nécessaires, une telle mathesis des instabilités peut et doit
regagner la dimension du savoir contemporain, tout fait
d’instabilités ou de stabilités non figées dans une ontologie
définitive. Si je ne suis pas ou je n’arrive pas à être sympathisant
avec la façon de Richir de radicaliser la phénoménologie, je le
suis beaucoup avec la reprise de thèmes richiriens faite par
Alexander Schnell, et, notamment pour le premier, avec la
tentative de ramener l’approche phénoménologique en rapport
constructif avec la tradition de l’Idéalisme Allemand. Cela nous
ramène bien évidemment, après le ni-ni (ontologique et
épistémologique) au “rien d’écart”[9] formulé par Schnell
justement par rapport au “Sens se faisant” et au fait d’aborder le
problème du Sens par le prisme de la question (abordée
phénoménologiquement).
De ce point de vue, si l’on veut, je n’essaye point de saisir le
sens mais de montrer comment, bien loin de la perspective d’un
Sens se faisant, il n’y a pas UN Sens qui se fait mais DES SENS
qui se font et que nous ramenons, de façon inavertie, à la
notion, tributaire encore d’une métaphysique du fondement
unique, au singulier, au Sens. Or, le fait de définir une mathesis
des instabilités, ou pour mieux dire des transformations (qui sont
des transformations structurelles) de notre expérience
épistémique et pré-épistémique du monde, implique de se
placer justement là où ce qui est fait du Sens (ou des Senses) se
faisant ne fait justement plus sens, c’est-à-dire là où nous place
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la question
fondamentale,Mentions
et fondamentalement
préQui sommes-nous ?
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philosophique “Que/qui suis-je?” “Qui sommes nous? “Que
sommes-nous devenus? »[10] comme première cristallisation,
encore libre de présupposés philosophiques, de la demande de
Sens.
Car s’il y a une demande de Sens, dans toutes ses formes
possibles, cela signifie que ce qui est phénoménologiquement,
existentiellement et épistémologiquement premier n’est pas le
Sens se faisant comme Sinnbildung, mais des concrétions de
Sens, Sinnbildungen (ici le pluriel est nécessaire et décisif) à
partir desquelles l’existence fait expérience d’un défaut
(apparemment) indépassable d’unité. C’est à partir de cette
expérience d’éparpillement que ressort la theôria – justement
comme projet et comme ouverture thématique sur un horizon
dans lequel les parties n’ont qu’une unité justement horizontale.
Je n’affirmerais pas qu’à ce moment, le moment onto- et
philogénétique de l’émergence de la theôria, le sens ne se fait
pas encore: ce qui ne se fait pas encore c’est justement la
présupposition que ces unités éparpillées soient susceptibles
d’être ramenées à l’unité. Ce qui ne se fait pas encore à ce
point, ou qui demeure (encore) inhibé, c’est le geste
métaphysique (soit-il un geste métaphysique classique,
ontologique, ou bien phénoménologique).
Pour cette raison je me demande toujours et avec plus
d’insistance si une métaphysique phénoménologique (laquelle
bien évidemment ne peut pas être ontologique en premier chef
mais qui doit regagner l’ontologie), et si le fait de se déclarer
comme appartenant à la phénoménologie sont finalement
nécessaires. Cela ne l’est pas tout d’abord pour éloigner les
apories ou pour poursuivre un projet qui la dépasse.
Je dirais que la grandeur de la phénoménologie husserlienne se
laisse saisir à mesure qu’on s’en éloigne (critiquement), à
mesure que l’on prend conscience du fait que le projet de raison
dont nous avons besoin aujourd’hui la dépasse largement.
Ce projet ne la dépasse pas – comme ils aimeraient faire croire
un prétendu “réalisme spéculatif” – en vertu de la centralité de la
corrélation au sein de la phénoménologie transcendantale. Cette
corrélation est en revanche essentielle, fondamentale, pour
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interroger
le savoir tel qu’ilMentions
se fait aujourd’hui.
Ce projet la
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dépasse car, si l’on veut en faire une prôte épistème, il faut
prendre conscience des seuils que le savoir, le monde et leurs
structurations entremêlées ont franchi depuis la formulation de
son projet initial. Ce dépassement n’est pas aisément
négligeable – mais cela appartient à un autre ordre de
considération – même s’il ne révoque pas la puissance et la
plasticité du projet phénoménologique comme projet de
rationalité, et d’interrogation du réel. Tout comme pour la
philosophie analytique (de Frege-Russell à Carnap), un projet qui
a été défini entre le dix-neuvième et le vingtième siècle, la
phénoménologie doit inévitablement passer par une révision
massive et radicale de ses textures conceptuelles théoriques
fondamentales, plutôt qu’être faite l’objet d’un histoire
récapitulative. Et, compte-tenu du fait que je suis encore
convaincu – à la suite de Kant – que les systèmes
philosophiques aient leur origine par generatio aequivoca[11], je
pense qu’à l’époque actuelle la phénoménologie, son approche
et sa méthode doivent être ré-fusionnés dans quelque chose
d’autre pour arriver à redonner expression au projet
radicalement rationaliste des origines. Peut-être, et c’est ainsi
que je la conçois, la radicalisation de la phénoménologie est-elle
justement une radicalisation de son rationalisme[12] plutôt
qu’une radicalisation en direction d’une figure fondamentale,
toujours plus fondamentale.
Pour revenir à votre dernière
question, dans le second tome il
arrive précisément cela, un
matériau qui appartient très
clairement aux structures (à
certaines structures) définies par
la phénoménologie est fusionné
à nouveaux frais – de façon
déductive et non simplement
introductive comme dans le
premier, qui assume la forme
d’une “spekulative Darstellung” –
dans une forme de mathesis
structurelle des transformations. Cette dernière garde, comme
matrice fondamentale, l’ouverture de l’existentiel à
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l’épistémique.
Cette ouverture
est le questionnement sur le sens
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du connaitre, un sens théorique (dans l’exposition aux
phénomènes qui se sont avérés être “autre chose”, un
multiversum) mais aussi un sens éthico-politique (dans
l’exposition de l’homme à un monde qui a perdu la physionomie
du monde Euro-centré et, cataclysme après cataclysme, s’est
façonné dans le monde actuel). Cette matrice se traduit dans
l’impératif, politique, que la mathesis doit avoir comme fin la
paideia.
Jean-Baptiste Fournier : Votre réponse indique bien ce qui me
paraît être le problème fondamental de Philosophie et demande,
à la fois son coeur et la difficulté qui ne manque pas de se poser
lorsqu’on le lit : l’articulation de la mathesis avec la conception
du réel qui est inextricablement liée à la mise au jour d’un niveau
phénoménologique fondamental où le sens ne se fait pas encore
mais est simplement demandé ou exigé (au triple sens de la
Frage, de l’Anfrage et de la Forderung). Vous évoquez d’ailleurs
vous-même dans votre réponse la nécessité de poser cette
question frontalement et radicalement. Je vous la pose
donc. Tout d’abord, pourriez-vous éclaircir le sens que vous
prêtez à l’instabilité, la complexité du réel ?
Il me semble que c’est là pour vous la définition même du réel –
ce qui ne se laisse pas saisir, ce qui est toujours en excès par
rapport à la theôria : le diffus, le complexe. Ce qui est
passionnant dans votre analyse, c’est que cette définition de la
réalité (ou ce niveau de réalité) est strictement corrélée à la
“phénoménologie de la question”, parce que précisément il
s’agit d’un niveau où le réel ne se laisse pas saisir sous la forme
de jugements mais seulement de questions qui sont
nécessairement des questions fondamentales, pré-théoriques,
celles que se pose nécessairement le sujet confronté à la
complexité grandissante du réel : “que/qui suis-je ?”, en
particulier. Il est intéressant que votre analyse, dans Philosophie
et demande, commence par cette question orientée
subjectivement alors que ce qui est en jeu, c’est la notion même
de réel. Doit-on y voir le constat d’échec d’un certain
cartésianisme ? La perte de repère du sujet dans le réel et son
besoin de se ressaisir, ou plutôt de ressaisir son sens dans un
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réel qui,
fondamentalement,
n’en a pas ? L’échec d’une
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mathesis et la nécessité d’en élaborer une autre ? Mais quoi qu’il
en soit, la complexité du réel, la Forderung de sens, l’exigence
ou la demande qu’en fait le sujet, et enfin, sur le plan
métaphilosophique, la phénoménologie de la question, tout cela
semble inextricablement lié.
Mais la question est alors : pourquoi donc introduire ici le
concept de mathesis ? Reconnaître la complexité inhérente à la
notion de réel, et la reconnaître de façon radicale comme vous le
faites, reconnaître le caractère non-encore-sensé de
l’expérience primordiale du monde dans lequel le sujet semble
de prime abord se perdre et qu’il ne peut qu’interroger et non
saisir théoriquement, n’est-ce pas mettre au jour quelque chose
qui, par principe, échappe à toute mathesis ? En d’autres
termes, comment articulez-vous le réalisme très particulier qui
est le vôtre, dans sa dimension non spéculative justement, avec
l’émergence d’une mathesis des instabilités ?
Il ne me semble pas en effet qu’il y ait dans cette articulation de
la mathesis au réel instable une simple reprise d’une théorie
carnapienne qui ferait de la theôria une simple Nachkonstruktion
logique, ne serait-ce que parce que l’Aufbau carnapien suppose
l’unité fondamentale du monde, ce qui ne me paraît pas être un
présupposé de votre analyse. En d’autres termes, comment
articulez-vous l’instabilité du réel et la mathesis, et
corrélativement la phénoménologie de la question et la mise au
jour des structures que vous résumez très clairement à la fin de
l’ouvrage ? Et si cette mathesis est bien une mathesis de
l’instabilité, et pas une reconstruction ou post-construction
logique qui ramènerait cette instabilité à une stabilité rassurante
et constituerait la réduction de la complexité du réel à des
éléments simples, alors quelle est sa source ? Et comment les
différentes branches de cet arbre que vous substituez à celui
des Principes de Descartes tiennent-elles les unes avec les
autres ? Qu’est-ce qui structure la mathesis dans un monde
dont le caractère essentiellement et radicalement complexe a
été reconnu ?
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Fausto
: Merci
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QuiFraisopi
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?
pour
cettelégales
série de questions
Mentions
fondamentales, auxquelles je vais essayer de répondre. Tout
d’abord, je voudrais – de façon très bienveillante mais autant
radicale – rejeter la thèse selon laquelle quoi que ce soit, dans
ma perspective, indique « le constat d’un échec d’un certain
cartésianisme ». Mais pour que ce rejet soit conceptuellement
clair, la réponse aux autres questions est nécessaire, et j’espère,
à la fin, d’arriver à une clarté conceptuelle suffisante.
1) Tout d’abord, pourriez-vous éclaircir le sens que vous
prêtez à l’instabilité, la complexité du réel?
Venons tout d’abord à des remarques préliminaires. Tout
d’abord, au sujet de ce que vous définissez comme «
l’articulation de la mathesis avec la conception du réel », en y
ajoutant une demande d’éclaircissement, plus précisément du
sens que je prête à l’instabilité, la complexité du réel.
Or, il y a ici strictement rien de subjectif ou qui relève de quelque
chose d’arbitraire. C’est justement une prise en compte,
absolument lucide et détachée, des seuils franchis par le savoir
depuis un siècle et demi: tant pour le définir par des extrêmes
de Riemann (1854 ca.) au Nobel pour la Physique assigné en
2021 en passant par le problème des trois corps de Poincaré, la
mécanique quantique, la crise du Weltbild mise en avant par
Bohr et Heisenberg, les systèmes hors équilibre etc. Comme
l’affirme Cliff Hooker, bien que les choses aient changé un peu
depuis 2011 (en philosophie des sciences):
The impact of complex systems on science is a recent,
ongoing and deep revolution. But a few honorable
exceptions, it has largely been ignored by scientists and
philosophers alike as an object of a rejective study[13].
C’est cela qu’on a tendance à oublier aujourd’hui, c’est-à-dire
le travail, long, difficile, du point de vue de la philosophie
théorique, sur une révolution ou plusieurs révolutions dans la
science. Ces révolutions ont radicalement métamorphosé le
paysage de notre savoir et de notre existence, de notre être au
monde. Il s’agit de changements dont l’école
phénoménologique mainstream d’un côté, ou les réverbères
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spéculatifs
des dernières années
de l’autre n’ont pas voulu
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entendre parler, pour donner lieu à des formes de
“métaphysique”, phénoménologique et/ou réaliste qui ne
peuvent ni ne veulent se heurter aux savoirs positifs. Elles ne
veulent pas surtout se heurter aux problèmes que ces savoirs
posent aussi seulement à l’élaboration, à la formulation claire
d’une idée de mathesis aujourd’hui. Il ne s’agit pas d’une
sympathie personnelle envers la “pensée complexe” (à l’égard
de laquelle je suis et j’ai toujours été très critique). Il s’agit d’une
prise de conscience, d’un prendre acte de seuils franchis.
Il n’y a pas donc aucun sens à prêter aux résultats scientifiques
provenants des sciences qui abordent les systèmes complexes.
Le sens est clair: la notion de monde lui-même – comme
còsmos, ordre – a été entièrement révoquée. Non parce qu’il n’y
aurait plus aucun ordre ou aucune mesure possible – comme si
on retombait dans l’affirmation d’un chaos originaire. Ce que
nous disent les savoirs positifs à ce sujet, par des dispositifs
bien rigoureux, est que l’ordre est dépourvu de toute
caractéristique ontologico-fondamentale et holistique (en d’autre
mots: l’ordre n’est plus le chiffre du réel ni la notion
paradigmatique du savoir du réel). Le désordre n’est plus bruit
de fond, noise, perturbation mais incubateur local de
l’émergence d’un ordre localisé. Des îlots d’ordre et de stabilité
sont spatialement relatifs (là où par “spatialement” on conçoive
le seul espace dans lequel l’ordre est saisissable, l’espace des
phases d’un système dynamique) et émergents, c’est-à-dire
temporellement relatifs. Si l’on considère que la notion de
monde vient de celle de còsmos et que còsmos signifie
premièrement ordre, quelque question philosophique
fondamentale faudrait bien se la poser, un jour ou l’autre.
Cela a un correspondant épistémologique
[erkenntnistheoretisch] et ontologique bien radical, génialement
résumé par Jocelyn Benoist (comme est de son usage) dans la
Préface à La complexité et les phénomènes:
1. le complexe se modélise, c’est-à-dire qu’il “apparait”
uniquement dans le contexte d’une certaine pratique
épistémique de “mise-en-image” [Abbildung]. Cette pratique
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n’est
pas un milieu neutre
ou illusoire, trompeur, parmi deux
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dimensions veritatives (la pensée, le réel) mais la matrice à
partir de laquelle l’expérience (aussi épistémique) du monde
trouve forme et saillance: le complexe ne se représente pas,
il se modélise. C’est que, contrairement à ce qui se passe
dans le cas du « représenté » classique, la façon que le
complexe a d’être « représenté » est partie intégrante de sa
constitution et donc il ne peut jamais être représenté sans
reste.
2. Le complexe ne se laisse pas ramener, ou à réduire à
l’ontologie:“l’objet n’est pas le format adéquat à la
complexité. Il ne sert à rien, de ce point de vue, de
compliquer à l’envi les formes d’ Un objet compliqué reste un
objet, et comme tel, épistémologiquement simple : possible
corrélat d’un acte de l’esprit, si abstrait et stratifié puisse
s’avérer celui-ci. […. Il est impossible de faire rentrer le
réellement complexe dans un tel lit de Procuste, non pas
parce qu’il serait intrinsèquement trop petit ou trop grand
pour cela – l’ontologie sait étendre ou amputer
adéquatement ce qu’elle veut mesurer – mais tout
simplement parce que cela n’a pas de sens. Situer quelque
chose dans le cadastre de l’ontologie, c’est en effet,
essentiellement, le mettre à plat. Or le complexe,
définitionnellement, est ce qui ne peut se mettre à plat”[14].
Si l’on veut, le seul sens que je me suis permis de prêter à
l’instabilité (N.B.: telle qu’elle est fixée par les savoirs par des
dispositifs rigoureux!) est de la reconnaître comme un défi
énorme (s’il ne s’agit pas d’une catastrophe) pour notre idée de
connaissance du monde (justement “mathesis”) et de être. Car
toute l’histoire de l’ontologie (peut-être exception faite pour
Hegel) est fondée sur la caractérisation d’une stabilité
ontologique sous-jacente aux processus physiques. Pour
confirmer cela, on pourrait poser un simple défi à ceux qui,
aujourd’hui prétendent faire de la métaphysique en toute forme.
Et la métaphysique, si l’on se tient à la rigueur de l’histoire de la
philosophie (voir en France Courtine, Marion, Brague) est
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toujours une métaphysique
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ontologique (!). Pour parler en
termes analytiques: “no
metaphysics without
ontological commitment”.
Comme le disait de façon
extrêmement claire J.-L.
Marion dans un entretien,
donné à KTOTV: “Quand vous
êtes un philosophe
métaphysique votre intérêt
c’est d’expliquer les choses
qui sont. C’est-à-dire c’est de
poser très vite la question […]: “est-ce ce que je sais, ce que je
pense savoir, est-ce c’est ou est-ce ça n’est pas?” […] Et
évidemment il tranche, il est là pour ça: il dit “ça n’est pas ou
mieux cela ne peut pas être. […] On se bat pour fixer une
frontière et pour faire le tri selon le critère de l’être“[15]
La question/défi à poser au métaphysicien est la suivante:
“Essayez de caractériser un écosystème ou une crise
économique ou même l’agrégation de l’espace dans la gravité
quantique du point de vue ontologique”! Il n’y a aucune
métaphysique phénoménologique, ni analytique qui peuvent le
faire, car justement c’est la possibilité de caractérisation selon
une ontologie de base (ou fondamentale) qui fait défaut.
Je me rends bien compte que cela paraisse bien difficile et fasse
presque objet d’un refus. C’est difficile non seulement à saisir
dans sa forme conceptuelle mais à accepter tout d’abord au
niveau archétypal. Ce dernier est le niveau qui dépasse a parte
ante la métaphysique occidentale et un grand nombre de formes
de cosmogonies (et de religions) qui font de la mise à l’écart du
chaotique l’acte premier d’émergence de l’ordre du monde (par
quoi et/ou par qui cette émergence est opérée s’avère être ici
secondaire). Au stade de notre savoir, il n’y a pas un chaos
holiste qui est écarté ou ordonné ni un chaos (autant holiste,
donc autant métaphysique) qui régit le réel. Ce qui se manifeste
est un réel hybride, subsistant entre des états chaotiques et des
états ordonnés par des bifurcations.
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C’est Qui
cette
situation que j’ai
essayé de résumer en forme de
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récit (ou de généalogie) dans deux paragraphes de Philosophie
et demande[16]. Et un des facteurs essentiels de cette
généalogie est la libération finale de la phénoménalité de la
métaphysique qui la subjuguait en en faisant nécessairement (et
donc préjudiciellement) un ordre cosmique de nature strictement
et inéluctablement ontologique.
Il est alors évident que la mathesis est inextricablement liée à la
mise au jour d’un niveau phénoménologique fondamental, mais,
encore une fois, pas de façon arbitraire, comme pour un plaisir à
traiter la chose selon un penchant pour une philosophie plutôt
que pour une autre.
Le niveau phénoménologique émerge là où l’ouverture de la
vision, de la theôria, est libérée de l’emprise de la métaphysique,
et donc d’une ontologie (nécessairement holiste). Pour avancer
un parallélisme, dans le domaine anglo-saxon ce niveau
phénoménologique se manifeste au sein du pragmatisme
(notamment Dewey). Tout au plus, le choix d’assumer ce niveau
phénoménologico-existentiel – spéculaire et correspondant au
niveau épistémique, car tous les deux subsistent au-delà d’un
effondrement – et de l’analyser avec des catégories qui
proviennent de la philosophie husserlienne, cela relève d’un
choix, que je revendique. Ce choix a affaire à la rigueur des
descriptions structurelles que la grammaire husserlienne nous
met en mesure d’accomplir et, de l’autre, comme pour la
réponse précédente, à la pertinence de nombreux concepts clé.
Ce qui est – à mon avis – extrêmement passionnant est
justement la dialectique entre la demande de sens (qui demeure
encore demande de stabilité) des individus et des formes du
“collectifs” (groupes religieux, confessions, sociétés) et la
dissolution de ce même sens prétendu et supposé comme
possible de la part de l’épistémè: il s’agit là d’une dialectique
fondamentale, récurrente, qui a fait de l’histoire du savoir une
histoire positive, et constructive, d’émancipation.
Cette dialectique – vous avez raison – se cristallise et émerge
toujours à nouveau dans la question pré-théorique (ou en tout
cas pré-philosophique) “que/qui sujs-je?”, question
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nécessairement
et pour cause
équivoque, justement en tant que
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cristallisation d’une dialectique fondamentale.
Ce n’est pas étonnant alors si, dans le double mouvement
subsistant entre le premier et le second volume, cette question
se représente a fortiori une fois esquissées les formes de
mathesis et une fois fournie une structure du réel complexe anontologique et méta-métaphysique.
2) N’est-ce pas mettre au jour quelque chose qui, par
principe, échappe à toute mathesis?
Toutefois, lorsque vous affirmez que deux “reconnaissances”
ont lieu, celle “de la complexité du réel” et celle du caractère
“non-encore-sensé de l’expérience primordiale du monde”, et
que cela échappe à toute mathesis, je rencontre de sérieux
problèmes.
Le premier est dans la définition ou tout simplement dans la
nomination d’une “expérience primordiale”. Très franchement je
ne trouve pas qu’ici on ait affaire à quelque chose de primordial,
comme à un Abgrund. L’absence d’un sens unitaire de notre
expérience du monde, surtout et d’autant plus lorsque on en fait
expérience dans toute sa complexité, n’indique pas un
primordial, indique tout simplement une résistance du réel à se
laisser enfermer dans le Sens que nous prétendrions lui attribuer
en vertu de notre besoin de stabilité. Cela est encore trop
métaphysique. Rien de primordial, juste la dialectique, le conflit
– peut-être irrésolu au-delà des dogmes ou des systèmes
métaphysiques – d’une demande qui persiste en vertu de notre
situation dans l’existence, notre exposition au monde, et les
structures de compréhension épistémique de ce monde. Elles
font que ce prétendu Sens – unitaire, englobant, rassurant – soit
un Non-Sens du point de vue du savoir. Mais qui a dit qu’une
mathesis, ou que des formes de mathesis sont possibles
uniquement lorsqu’elles absorbent dans les mathèmata toute
sorte d’aspect du réel?
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C’est Qui
le préjugé
métaphysique
par excellence! Il s’agit d’un point
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à l’apparence très fort (de la métaphysique) qui s’avère enfin être
son point le plus faible, le Trieb de devoir à tout prix faire de la
connaissance humaine quelque chose qui dispose absolument
tout dans l’espace de la theôria. En revanche il n’est pas ainsi,
car le savoir n’est pas un système religieux qui doit englober le
còsmos pour donner sens à l’existence du croyant ou de
l’adepte, ni un panlogisme architectonique, ni un produit tout fait
délivré par une ousine…ou un inventaire. Il y a savoir – et donc
mathesis et donc aussi paideia – aussi là où, par une démarche
spéculative, on sait qu’il y a des irréductibilités aux formes
d’épistème, et que les formes d’épistème s’enracinent sur un
terrain qui ne se laisse pas absorber entièrement dans les
démarches mises en places par les structures qui décrivent les
invariants de la phénoménalité. Ceci est le sens de la citation
aristotélicienne qui se trouve au debout et qui revient à la
conclusion du premier volume[17]
Pour cette raison une mathesis s’articulant selon des formes
dont chacune, comme dans Philosophie et demande (ou dans la
perspective qu’il introduit), admet nécessairement un “blind
spot”, un point aveugle, n’est point la réfutation d’une mathesis,
mais peut-être uniquement la tentative de penser la mathesis en
dehors de la métaphysique, en dehors d’un holisme ou des
holismes. Car ce holisme ou bien est une idole – c’est à dire un
simple postulat métaphysique – ou bien est incomplet, donc ex
definitione contradictoire.
3) En d’autres termes, comment articulez-vous le réalisme
très particulier qui est le tien, dans sa dimension non
spéculative justement, avec l’émergence d’une mathesis des
instabilités ?
Tout d’abord laissez-moi dire que quelqu’un aurait une certaine
difficulté, à la lecture de certains passages de Philosophie et
demande, qui se trouvent vers la fin de la longue construction
des formes de mathesis, à caractériser mon “réalisme”, et à le
caractériser comme “non-spéculatif”. Je ne suis pas tout
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simplement
le porteur d’unMentions
“Réalisme”
en philosophie, un
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réalisme non spéculatif ou spéculatif. Je cite les passages:
“Une telle « texture du réel » ne se dévoile pas à l’œil nu.
Cette texture peut se laisser saisir, peut se laisser toucher
du doigt uniquement à partir de la consistance de ces
images spéculaires, à partir de leur épaisseur spéculative.
Toute tentative de ramener le réel à un cadre, de l’enfermer
dans une catégorie, échoue. Cet échec du «concept» de la
métaphysique à capturer sa nature protéiforme,
représente, du point de vue spéculatif, une telle
consistance, une telle épaisseur”[18].
“L’épaisseur de la singularité « réelle » est une épaisseur
spéculative ou n’est pas. L’épaisseur de cette singularité
laisse découvrir, comme profondeur, les dimensions à
l’intérieur desquelles, et les dynamiques par lesquelles elle
peut se laisser comprendre, voir, toucher du doigt. En
dépit de ce que voudrait faire le réductionnisme, la
singularité n’est pas annulée – ex-pliquée, donc aplatie –
par sa réduction méréologique”[19]
Pour trancher, je n’arrive point à comprendre –
philosophiquement – ce que réalisme, spéculatif ou pas, veut
dire lorsqu’on le ramène à l’épreuve des structures par lequel il
prétend d’atteindre le réel. J’arrive bien à comprendre l’instance
réaliste avancée par Jocelyn Benoist, une instance qu’il venait
de construire patiemment bien avant que cette “bulle
spéculative” du réalisme explose. Car cette instance, que j’ai
intégrée pendant des années (des décennies dirais-je) est une
instance qui vise le réel – comme vous les disiez avant par
rapport à ma perspective – par contraste, dans la résistance à
une forme de prise conceptuelle. Toutes les autres formes de
“nouveau réalisme”, de retour aux choses en soi, m’échappent.
Tout comme m’échappent les critiques formulées par ces
nouveaux réalismes aux auteurs qui sont censés être, pour ses
auteurs, les porte-feux d’un anti-réalisme corrélationiste. Pour y
être depuis trente ans désormais, quand je lis les descriptions
de Descartes, de Kant, d’Hegel, d’Husserl fournies par ces
approches néo-réalistes, je ne les reconnais pas, tout
simplement. Je n’arrive pas à comprendre, plus en particulier,
comme la corrélation modélisante représente une condition
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négative
à la saisie du réelMentions
(Michel légales
Bitbol non plus d’ailleurs[20]);
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je n’arrive pas à comprendre comment le fait de développer des
cadres toujours théoriquement plus fins de saisie (épistémique
donc aussi philosophique) de la phénoménalité représente un
anti-réalisme, même si ces cadres appartiennent à une
dimension modélisante, donc intérieure à et présupposant la
corrélation.
Pour revenir à votre question, je me sentirais d’affirmer – en
dehors de toute prise de position pro ou contra le réalisme –
qu’uniquement là où on a développé (et, pour le lecteur on a
parcouru) le chemin de construction et d’agencement des
formes de mathesis, on peut arriver à saisir l’instabilité
constitutive qui caractérise la phénoménalité à laquelle nous
sommes irrémédiablement exposés: comme individus, comme
sociétés et, à l’époque de l’Anthropocène, comme humanité.
Car dans cette perspective – laquelle, je le répète, intègre
l’étude et l’assimilation des savoirs tels qu’ils se font aujourd’hui
– l’instabilité du monde phénoménal, sa non-stabilité
ontologique (ou dislocation constante par rapport à une
ontologie de référence) – est saisie par des structures, qui
relèvent des formes de mathesis. Ce n’est pas affirmée en vertu
d’un sentiment personnel, ou d’un seul agencement de thèses à
l’intérieur d’une démarche doxographique. C’est cela qui est
difficile et indigeste.
La mathesis des instabilités – une mathesis qui se place au-delà
de la métaphysique, (méta-métaphysique) et qui pense
nécessairement au-delà de l’ontologie fondamentale[21] ou d’une
ontologie singulière élevé à paradigme de saisie du réel (donc
aussi méta-ontologique) – émerge dans et par sa construction.
Le savoir est construction, pas entièrement peut-être mais en
grande partie. C’est uniquement en ayant suivi avec un oeil
critique la construction que l’on peut arriver à y voir en
transparence une forme de réalisme (et, si on en a tellement
besoin, tirer d’une démarche, l’indication consolatrice d’une
réalité). Toutefois, compte-tenu du fait que justement la métamétaphysique se développe à partir de l’équivocité constitutive
de la question réaliste, la question sur le réel (Chap. V et IX), je
ne pense pas que le lecteur à la recherche d’UN réel ou DU réel
(ou des deux à la fois) soit réellement satisfait. Il devrait, avant
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de rechercher
de telles réponses,
prendre conscience – s’il lui
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est possible – de l’équivocité de sa demande de sens
transformée en demande/question réaliste.
Venons aux dernières questions, avant de revenir à l’échec
mentionné d’un cartésianisme.
4) Il ne me semble pas en effet qu’il y ait dans cette
articulation de la mathesis au réel instable une simple reprise
d’une théorie carnapienne qui ferait de la théoria une simple
Nachkonstruktion logique, ne serait-ce que parce que l’Aufbau
carnapien suppose l’unité fondamentale du monde, ce qui
ne me paraît pas être un présupposé de votre analyse.
Oui, en effet il y a une prise de distance essentielle,
épistémologiquement décisive, de Carnap pour la raison que
vous mentionnez, à savoir le présupposé carnapien de l’unité
fondamentale du monde. Ce présupposé s’est affaibli jusqu’à
l’inconsistance aussi bien par le travail interne au sillage
carnapien (je me réfère notamment à Quine et Goodman) et par
le travail externe, celui, bien plus massif, des savoirs. Par
rapport au premier, par des raisons théoriques à mon avis
difficilement contestables, cette unité fondamentale demeure
chez Quine encore possible en vertu de son naturalisme, mais
elle est affaiblie à partir du moment où on prend conscience
d’une relativité ontologique constitutive. Chez Goodman ce
présupposé n’a plus lieu d’exister justement en vertu de
l’inconsistance théorique du naturalisme lui-même, qui se voit
attribuer une fonction non plus fondatrice comme chez Quine.
Quelle est alors, ou sur quoi devrait reposer cette unité
fondamentale du monde? Sur la perception sensorielle ou plus
généralement expérimentale? En ce cas, ce serait une unité bien
restreinte et limitée. L’unité du “Monde” ne peut donc être
qu’une unité horizontale, qui n’en est une que si l’on prend en
compte la façon par laquelle nous la projetons – juste pour
revenir à ce méchants philosophes, Descartes, Kant, Husserl
dont on se soucie de mettre en lumière l’anti-réalisme. Par cela
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je ne veut
pas dire que l’unité
du monde est factice, mais
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uniquement qu’elle se laisse saisir dans le jeu extrêmement fin
de notre exposition aux phénomènes et de nos pratiques
épistémiques qui réalisent des formes d’unité, des
correspondances dont la robustesse n’est point liée à un
présupposé de type métaphysique ou ontologique. Car si
l’expression “l’unité fondamentale du monde” ne cache pas un
présupposé ontologique ou métaphysique, il faudrait
m’expliquer comment elle est aussi seulement possible.
Du point de vue de la science, la chose est encore plus
éclatante. Car l’essor du savoir à partir de la fin du XIX siècle ne
fait qu’épuiser ce présupposé fondamental, sans pour autant
affaiblir le savoir lui-même, mais en le renforçant ! Plutôt que
s’interroger sur l’unité fondamentale du monde et de persister
dans le deuil de sa perte, il faudrait poser la question suivante:
sommes-nous en mesure d’ouvrir une perspective pour le savoir
(mais aussi pour l’émancipation humaine) à l’intérieur duquel
l’unité du monde est l’unité – jamais définitive, jamais conclue,
toujours horizontale et plastique – qui subsiste entre notre
expérience des phénomènes et les formes de mathesis qui leurs
fournissent des formes de stabilité (c’est-à-dire d’intelligibilité)
théorique? Cette specularité, comme forme d’unité, exclut la
possibilité que la mathesis soit tout simplement [bloß] une postconstruction, en l’inscrivant dans une démarche plutôt
transcendantaliste (mais reformée!) et en inscrit le projet dans
une dimension qui n’est plus débitrice d’une forme de
métaphysique.
Comment cela se fait, pourrait peut-être émerger dans la suite
de notre dialogue. Il est tout de même certain que pour se faire,
elle devra garder la plasticité et l’horizontalité ouverte qui est la
marque constitutive aussi bien de l’existence que du savoir.
Cela nous ramène, avec des simplifications nécessaires,
inévitables hélas, à un de ces méchants philosophes dont on
veut à chaque pas suspendu marquer l’échec, Descartes. Je me
permet de composer les deux questions que vous posez :
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5) “Il est
intéressant que
votre analyse,
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dans Philosophie et
demande, commence par cette question orientée
subjectivement alors que ce qui est en jeu, c’est la notion
même de réel. Doit-on y voir le constat d’échec d’un certain
cartésianisme?”
6) “Et comment les différentes branches de cet arbre que
vous substituez à celui des Principes de Descartes tiennentelles les unes avec les autres ?”
Or, une petite prémisse est nécessaire: j’ai été formé aux études
d’histoire de la philosophie “ancienne école”, la plus dure,
apparemment ennuyeuse, acribique, presque claustrophobique.
Notamment, dans le cas des études cartésiennes, par des
fréquentations directes qui s’étalent sur 25 ans (T. Gregory tout
d’abord, M.E. Scribano, M. Fichant, J.-L. Marion, F. De Buzon) et
par un intérêt toujours croissant, sans solution de continuité (et
plein d’admiration) par les études cartésiennes notamment en
France (au-delà des fréquentations personnelles, Gueroult,
Alquié, Beyssade, Kambouschner, Mehl et beaucoup d’autres).
En vertu de ma formation en histoire de la philosophie – et pas
pour la sympathie pour telle ou telle autre figure de l’histoire de
la philosophie – je suis presque physiologiquement incapable de
prononcer de formules comme: “échec du cartésianisme”, “pour
en finir avec Descartes”, “goodbye Kant” et choses de telle
sorte. Au-delà de la dimension pathologique actuelle du slogan
pour se donner un certain air de radicalité, je n’arrive pas à les
comprendre, tout comme je trouve un peu comique, ou
pathétique, cet acharnement des prétendus “penseurs du
complexe” à la suite de Morin (volens nolens) contra Descartes
(j’en fait aussi mention, ironique, dans Philosophie et
demande[22]).
Si en revanche on a les outils, les moyens et le courage pour se
plonger dans ce processus extrêmement complexe et
majestueux qui est la sédimentation de la Modernité jusqu’à
(mais surtout et principalement grâce à) Descartes, ces thèses
apparaissent pour ce qu’elles sont, des slogans, rien de plus.
Donc aucune intention de mise en échec du cartésianisme, ou
d’un cartésianisme, tout simplement parce que sans ces
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méchants
rationalistes (Galilée,
Kepler, Descartes)
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corrélationistes, idéalistes on serait encore à s’interroger sur
quel monde il fallait construire et si la science devait encore
suivre Aristote. Mais pour revenir à votre question, ce qui
m’interroge est la prémisse:
7) “Philosophie et demande, commence par cette question
orientée subjectivement alors que ce qui est en jeu, c’est la
notion même de réel”.
Pourquoi, en est-il autrement chez Descartes, non seulement
dans les Méditations mais dans toute son oeuvre? On arrive
vraiment à penser, pas vous bien évidemment mais plusieurs le
font, que le maître d’armes, le voyageur, le scientifique, celui qui
rédige les Méditations l’année de la mort de son père et de sa
fille bien-aimés (de surcroît sur un parchemin bien connu, celui
des Exercices spirituels de Loyola) épuise toute dimension
existentielle et toute question orientée vers l’humanité et vers les
hommes que nous sommes, pour présenter un corpus de
thèses simplement théoriques? Le savoir ressort d’une question,
d’une demande de sens orientée vers nous-même et vers notre
exposition à un monde dont la forme (se métamorphosant) nous
échappe et qu’il faut redessiner par le savoir (et l’action). En fait
Descartes, par sa grandeur philosophique et spirituelle
immense, à mon avis le seul (avec Platon et Marx) à pouvoir être
considéré comme un philosophe “welthistorische” [à la Hegel],
enterre toujours ses fossoyeurs.
Mais venons aux raisons plus strictement théoriques. Bien
évidemment la science que l’on vient de mentionner à fait un
pas au-delà de Descartes, un pas au-delà de la science de
l’ordre et de la mesure, un pas au-delà du mécanisme universel,
mais aurait-elle pu le faire sans le codage galiléen-cartésien de
la science? C’est impensable! Juste un exemple: sans le fameux
passage des Regulae selon lequel “tout est modélisable par des
dimensions” on n’aurait même pas l’idée de pouvoir modéliser
un système dynamique, donc on n’aurait pas l’idée d’attracteur,
donc pas non plus l’idée d’attracteur étrange, donc pas de
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butterfly
effect (qui est – il Mentions
faut le savoir
– à l’image de
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l’attracteur étrange de Lorenz, pas du gentil papillon en chair et
en os!) et aucune idée de multiversum.
De façon correspondante mais cette fois relative à Philosophie
et demande:
bien évidemment le cogito anti-métaphysique que je formule
et ensuite j’explique se place au-delà de Descartes,
simplement dans la mesure qu’il énonce l’identité du Je et de
l’horizon (“Je suis un horizon – nous sommes des
horizons”[23]) c’est-à-dire de deux figures qui échappent à
l’ontologie en échappant à toute substantialisation. Ce qui
est le plus important, est que sur la base de ce “cogito antimétaphysique” on peut construire une mathesis métaégologique qui modélise et affirme la référence à soi-même
comme la concrétion génétique d’une multi-dimensionalité.
Cette dernière est plastique et évolutive, dans des formes
singulières, duales, communautaires[24].
Bien évidemment la mathesis méta-théorique développe une
idée plutôt rhizomique qu’arborescente du savoir, en pensant
(et modélisant!!!) les théories comme réseaux évolutifs et
plastiques, s’entremêlant[25], donc encore une fois au-delà
de Descartes et de toute forme d’architectonique
d’inspiration kantienne[26].
Bien évidemment au-delà de Descartes, et des toutes les
ontologies “monistes”, la mathesis méta-ontologique
applique la modélisation algébrique non plus à l’étant mais
aux ontologies elles-mêmes[27] dans une dimension de
relativité ontologique indépassable[28].
Bien évidemment, pour conclure, la mathesis métamétaphysique – qui résulte de la spécularité et de
l’articulation modulaire des autres[29] – prend les trois formes
de mathesis pour en faire une mathesis des instabilités et des
transformations (grâce aux mathématiques – catégoriales –
qui ont été développées entretemps[30]).
Cela marque-t-il l’échec du cartésianisme ou d’un certain
cartésianisme? A mon avis marque le triomphe de l’esprit plus
profond de Descartes, de son rationalisme, qui persiste même
au-delà de la mise en écart, épistémique ou philosophique,
donc toujours a fortiori rationnelle, des thèses locales.
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Ensuite
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8) Et comment les différentes branches de cet arbre que tu
substitues à celui des Principes de Descartes tiennent-elles
les unes avec les autres ?
Tenons-nous dans le cadre métaphorique: mon intention n’est
pas de procéder à des implants d’ordre botanique, pour ainsi
dire. Donc je n’arrive même pas à concevoir une telle
substitution. Dirais-je, toujours dans le même cadre
métaphorique, qu’il faudrait considérer cet arbre, et la vie de cet
arbre, de façon systémique, c’est-à-dire eco-systémique. En
d’autre mots: pas d’implants botaniques, pas d’ingénierie
végétale transgénique, mais une vision élargie qui ne considère
pas l’arbre comme isolé d’un écosystème mais comme le lieu ou
l’attracteur d’un éco-système et qui considère la dynamique
complexe de cet écosystème, toujours robuste et précaire à la
fois, sensible aux variation de l’environnement, symbiotique.
Donc la mathesis, pour revenir à une autre de vos questions, ne
peut que structurer des dimensions. Tout d’abord, de façon
nucléaire, la dimension existentielle et expérientielle de notre
exposition aux phénomènes et la dimension épistémique de
stabilisation de l’intelligibilité de ces phénomènes. Ensuite, à
l’intérieur de cette spécularité ou dans l’horizon décrit par cette
spécularité, les quatre formes de mathesis qu’il faut développer
pour penser l’entremêlement pluriel de ces dimensions.
Jean-Baptiste Fournier : Je rebondis sur cette question des
formes de mathesis et des dimensions qu’elles structurent, et il
me semble essentiel d’insister sur la dimension “existentielle” de
ce que vous appelez “l’exposition aux phénomènes”. En effet, à
lire Philosophie et demande, on ne peut qu’être frappé par le fait
que l’ouverture de la mathesis s’effectue à partir du sujet qui se
découvre dans la question “qui/que suis-je ?” ; et à lire votre
livre comme nous le faisons à partir du point de vue d’une
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phénoménologie
de la question,
on ne peut laisser ininterrogé le
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fait que cette question, précisément, soit la première.
Évidemment, il y a toujours dans un livre des contraintes
extérieures diverses qui poussent à adopter un certain ordre
d’exposition et je me méfie toujours de la tendance à
surinterpréter l’ordre dans lequel les choses sont présentées.
Mais il n’y a rien à mes yeux d’anodin dans le fait que la
question “qui/que suis-je ?” et la découverte du sujet comme
celui qui est fondamentalement exposé aux phénomènes soient
premières – je dirais même qu’il y a là, une fois encore, la preuve
d’une inscription très forte de votre propos dans une forme de
post- ou de néo-cartésianisme. D’où une question très simple,
pour finir par le commencement : quelle est la spécificité, quel
est le statut de la question “qui/que suis-je ?” dans l’économie
de votre livre, dans la mathesis dont vous ouvrez les principales
dimensions, et dans la phénoménologie de la question en
général ?
Fausto Fraisopi: La question me parait bien fondamentale, et
cruciale. Deux remarques préliminaires sont nécessaires. Tout
d’abord sur la primauté (du moins dans l’ordre d’exposition) de
la question “que/qui suis-je?”.
Je conviens avec vous sur le fait que des livres sont soumis à
“des contraintes extérieures diverses qui poussent à adopter un
certain ordre d’exposition” et que, en bon lecteur, il faut se
méfier “toujours de la tendance à sur-interpréter l’ordre dans
lequel les choses sont présentées”. Bien heureusement,
toutefois, cela n’est pas le cas dans cette démarche, au sens
que ce que je mentionnais comme “structuration des
dimensions de la mathesis” obéit, et ne peut qu’obéir, à une
logique constructive, dont les premiers passages sont
essentiels. En d’autres mots: cette introduction (bien que
longue) à une nouvelle dimension, en tant que forme de
Besinnung, notamment dans les premiers cinq chapitres, ne se
soumet pas à de contraintes extérieures. Pourrait-on demander:
extérieures à quoi? Justement à la “chose même”, à la “Sache”.
Peut-être c’est la hybris à laquelle s’expose cette entreprise –
c’est-à-dire de ne s’en tenir qu’à la Sache et à sa morphologie.
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Et étant
donné qu’il s’agit Mentions
d’une dimension,
ou de l’ouverture de
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dimensionnalités qui se croisent et s’entremêlent, le point de
départ est essentiel, crucial.
Le point de départ toutefois n’est pas la question “que/qui suisje” mais le chemin (progressif et régressif) à la fois qui mène à
individuer – ou à reconnaitre – cette question comme
“première”. Et en ce sens, au sens du chemin progressif et
régressif qui s’ouvre au premier chapitre – et qui a été déployé
de façon plus analytique dans les premier deux chapitres de
Philosophie und Frage II[31] – deux affirmations de votre question
se rejoignent:
qu’il “rien à mes yeux d’anodin dans le fait que la question
“qui/que suis-je ?” et la découverte du sujet comme celui qui
est fondamentalement exposé aux phénomènes soient
premières”;
et qu’il s’agit bien une indication – je n’utiliserais pas le mot
“preuve” – de l’inscription très forte de ce propos dans une
forme de post- ou de néo-cartésianisme.
Pour fournir clarté au premier point, je vais essayer tout d’abord
d’éclaircir ce dernier.
Tout comme pour la réponse précédente, je suis à des années
lumière d’inscrire mon propos dans une forme ou une autre de
néo- ou post-cartésianisme mais vous avez saisi exactement le
point dont il s’agit. Dans la figure du “Je-horizon”- difficile à
saisir de premier abord, car pour cela il faut déjà
l’acheminement – saisissable uniquement par la question et son
auto-suspension, il y a, aussi bien du point de vue de la saisie
conceptuelle directe, que du point de vue des recherches qui y
ont amené, une référence essentielle à quelque chose que l’on
pourrait indiquer comme subjectivité.
Mais la situation est encore plus “stratifiée” (pour ne pas utiliser
le mot “complexe”) de ce qu’il parait. Cela dans la mesure où ils
convergent ici cinq figures, l’étude – pluridécennale – sur
lesquelles est condensée dans ce mouvement progréssifregréssif: la theôria grecque et St. Augustin comme son
dépassement historique, Descartes, Kant, Husserl (ou plus
précisément l’opposition entre la libre décision de l’epoché
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husserlienne
et l’évènement
de la totalité du monde dans son
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détachement du sens par l’angoisse chez Heidegger[32]).
Or, malheureusement, je ne peux démêler ici toute l’intrication
conceptuelle – bien que cela soit par ailleurs nécessaire.
Toutefois, il ne s’agit pas seulement de reprendre le cogito
cartésien tel quel (qu’est-ce que vraiment?) mais de le faire
passer à travers au moins deux stations fondamentales. La
première est la saisie de l’horizon phénoménal qui se donne à
partir de l’expérience du sublime chez Kant – et qui est
strictement liée à la dynamique de l’auto-affection des §§ 24-26
de la Deduction B (de 1787)[33]: encore une fois saisie de soi-
même comme être rationnel, affectant de l’intérieur la sensibilité,
par le biais de (la phénoménalisation de) l’idée d’infini. La
seconde est la figure phénoménologique de l’auto-affection, lue
au sein de son évolution à partir d’Husserl jusqu’à Michel Henry.
Toutefois, ce qu’il faut – il faudrait – retenir est un chiasme, un
switch de Gestalt qu’Husserl remarque avec clarté remarquable
dans les études du volume XV d’Husserliana: “Le dedans
intentionnel [das intentionnale Innen] est en même temps le
dehors [Aussen]”[34].
La dynamique de cette équivalence m’a occupé pour
longtemps, et notamment par rapport à ce que je mentionnais
auparavant, à savoir la question d’où et comment nous arrivons
à la saisir. De surcroit, s’il s’agit d’une équivalence structurale:
quand, dans quelle forme d’expérience pouvons-nous la voir à
l’œuvre? Heidegger mais aussi Hegel affirment une sorte
d’émergence de la conscience de cette identité – qui est
d’ailleurs l’identité, mystérieuse (pôs…) déjà affirmé par
Aristote[35] . Il s’agit (il s’agirait) d’un arriver du sujet à saisir et à
se saisir (pour Hegel comme “Raison”[36]): à partir d’un parcours
chez Hegel ou à partir de l’événement d’une situation émotive
chez Heidegger. Dans les deux cas, il s’agit de la saisie
indépendante de la volonté d’un sujet singulier déjà orienté de
façon épistémique et/ou philosophique. Le sujet philosophique
ne peut que cristalliser l’émergence de cette conscience
d’identité dans une décision au savoir (à la theôria). Il s’agit très
clairement de la situation germinale à partir de laquelle on peut
remonter, de la situation du “magna quaestio mihi factus sum”[37]
à une situation plus sauvage, plus barbare,
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phénoménologiquement
etMentions
transcendalement
pure[38], plus
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précisément celle de l’émergence de la theôria.
Toutefois toute cette stratification problématique, se laisse
ramener – peut-être de façon (trop) esthétique – à une situation
“anthropologique” bien particulière, que Karl Jaspers synthétise
de façon magistrale dans une entretien (et que nous pouvons
retrouver ensuite aussi dans l’abécédaire de Deleuze[39]): la
contemplation de la mer. La mer, l’horizon sont : “cet au-delà, le
miroir de ce dont nous avons besoin quand nous dépassons la
finitude de notre condition. Cette expérience élémentaire, pour
ainsi dire barbare…”[40].
Ce passage, peut-être brutal, choquant, de l’hyper-stratification
conceptuelle à la situation élémentaire de l’exposition de chacun
à l’horizon des phénomènes, à la situation elle-même,
esthétiquement (et émotivement) déterminée, nous indique
néanmoins la Sache et la structure qu’il faut y chercher. Car, au
fond et au-delà de l’érudition philosophique (pourtant nécessaire
et inéludible pour donner forme, voix, structure à cette situation)
il y a une Sache pré-philosophique et nécessairement
experiencielle.
L’esthétisation expériencielle d’une telle situation – qui peut se
retrouver aussi dans les peintures du mouvement romantique
allemand (Friedrich, Böcklin) ou magistralement formulé chez
Leopardi (L’infini) – correspond à une Sache, porte à expression
cette Sache mais ne peut pas en être la source (comme le disait
très bien Kant par rapport au sublime mais aussi Heidegger par
rapport au sentiment d’angoisse): le sublime et l’angoisse ne
sont que des points de manifestation. Et cette Sache est
justement le fait qu’il y a une structure fondamentale qui fait de
l’Innen et de l’Aussen une identité, une identité sui generis….de
quelque façon (pôs, pour reprendre Aristote). De cette identité
on fait expérience, avant tout partage entre idéalisme et
réalisme, empeiria et epistème.
La question était, encore une fois, comment arriver à fixer cette
Sache, en travaillant sur les structures. Ce travail, originairement
orienté à saisir la structure d’horizon, a trouvé sa convergence
vers la question “que/qui suis-je?” tout simplement en se posant
une autre question – à l’apparence dépourvue de sens – par
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rapport
à deux thèmes fondamentaux
(de la phénoménologie
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mais, par translation, de la philosophie transcendantale en tant
que telle):
la dynamique du remplissement dans la réécriture de la
sixième recherche logique (qui donne lieu à la formulation
cohérente de la structure d’horizon) et
la topique du phénomène fournie dans Etant donné, qui
“ordonne” les phénomènes selon leur caractère de
remplissement jusqu’à la forme du phénomène saturé.
La question était la suivante: et si on allait chercher le chiffre de
l’expérience non tant vers la saturation mais dans la direction
inverse?[41]
Qu’y aurait-il à l’opposé de la saturation du point de vue
phénoménologique et épistémique de l’évidence?
N’y aurait-t-il l’extrême détresse intuitive d’un quelque chose
d’expériencé selon une modalité bien particulière d’expérience,
en défaut presque absolu d’évidence (et de remplissement
intuitif)?
En fait, tous ces éléments ont convergé vers la question
“que/qui suis-je?”, c’est-à-dire, pour caricaturer brutalement,
vers quelque chose qu’on a toujours eu sous les yeux – du
moins philosophiquement, à partir de la toute première
configuration de la theôria Grecque, en passant par la Gnose et
le “quaestio mihi factus sum” d’Augustin – sans y prêter
attention.
Elle est quelque chose qui a été philosophiquement toujours
sous nos yeux.
On n’y a pas prêté attention lorsque on a lu les passages sur
l’angoisse dans Sein und Zeit ou des passages du tome XV de
Husserliana[42], en se focalisant uniquement sur ce qui nous
avait été mis sous les yeux, sans interroger la situation
fondamentale qui le rendait possible, que ce soit dans la forme
du sujet transcendantal (Husserl) ou dans la forme du Dasein
(Heidegger). On n’y a pas prêté attention lorsqu’on a considéré
le passage mentionné de la raison dans la Phénoménologie de
l’esprit, car on se concentrait sur le principe de l’idéalisme et
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non pas
sur l’état neutre, pré-philosophique
qui pouvait le
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rendre éventuellement possible.
On n’y a pas prêté attention lorsqu’on a considéré la quatrième
des questions kantiennes qui structurent architectoniquement
l’entreprise critique. On n’y a pas prêté attention lorsque on a lu
et relu, commenté et recommenté (et souvent aussi
misinterpreté) le “je suis, j’existe” de Descartes.
En-déca de toutes ces figures réside la question, la question qui
les organise autour de la réflexion philosophique sur la
subjectivité mais laquelle, en tant que situation plus originaire,
est tellement familière qu’on n’y prête pas attention. Elle indique
une Sache et une structure nécessaire à toute prise de position
philosophique sur le sujet, soit elle celle de l’empirisme radical
de James (“all that!”[43]) ou de l’idéalisme hégélien.
Et cette Sache, j’ai fait des recherche à ce sujet, n’est pas non
plus dépendante de la structure interrogative des langues indoeuropéennes[44], comme l’ontologie et l’hypostase de l’òn à
partir de la copule. Cette Sache indique que il y a un “se tenir
ensemble (de l’expérience)” déterminé, comme “se-tenirensemble”, ouverture thématique et synoptique, par la
suspension du sens de validité de cette unité. Et cette
suspension – donc aussi ce qu’elle détermine, c’est-à-dire
l’ouverture thématique et synoptique – se manifeste dans la
question elle-même, ou dans le moment où l’on persiste dans
cette question, on (se) regarde dans le miroir de cette question,
on fait expérience par cette question.
La question a toujours été là, à la base de nos existences, de
nos cultures, dans plusieurs formes[45], il fallait uniquement la
considérer comme forme d’expérience dans et par laquelle on a
accès à une Sache. Une fois fait cela, il n’était pas difficile la
mettre en relation avec quelque chose d’autre, une structure, qui
demeure occultée par les formes “responsives” de
caractérisation de l’homme et du sujet, toujours explicitement
ou implicitement métaphysiques.
Cette structure est le “Je-horizon” – pas le Je qui a un horizon
mais le Je qui est un horizon – une structure qui réside en-déca
de toute prise de position philosophique sur le sujet. Et si on
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l’appelle
“field of consciousness”
à l’anglo-saxonne, la chose ne
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change pas, on appauvrit uniquement les potentialités
d’interprétation philosophique de la chose elle-même. Le
problème ce n’est pas le nom, mais le fait qu’il y ait une unité à
l’intérieur de laquelle se placent des lambeaux, des unités de
sens.
Le fait de faire expérience de la question révèle en fait un
plenum d’expérience (au-sens du “all that” de l’empirisme
radical jamesien) tenu ensemble par quelque chose, et ce
quelque chose est l’orientation thématique de la question sur ce
quoi ou qui je suis. Ce n’est pas le Moi (Ich) qui est saisi, ce
n’est pas le (plenum du) Monde qui est saisi – tous les deux des
termes métaphysiques bien postérieurs. Dans la visée du “Je”
suspendu dans la question neutralisée “que/qui suis-je?”, ce qui
est saisi est l’unité synoptique et thématique de toute ouverture
à quelque chose. Cette Sache, comme intentionnellement
dedans et dehors, est l’horizon que nous sommes.
La question “que/qui suis-je?” est donc première? Certainement
elle n’est ni première au sens ontogénétique ni au sens
phylogénétique: au sein de toutes nos existences et au sein de
toutes nos cultures on a du passer pour une infinité de
questions avant d’arriver tout simplement à les formuler.
La question n’est pas non plus originaire, ou n’est pas originaire
au sens ontologique ou en quelque sorte sotériologique. En quel
sens elle est donc première? Elle est première peut-être au sens
de l’Urphänomen de Goethe, un phénomène marginal, auquel
on ne prête pas forcement attention mais qui recèle en lui-même
une structure fondamentale (donc transcendantale) de
l’expérience[46]. La question est donc première tout d’abord au
sens métonymique, car comme Urphänomen ou (dans sa
modification de neutralité, dans sa suspension), phénomène
transcendantal originaire[47], montre en-deçà de toute prise de
position philosophique (donc ontologique, donc métaphysique)
la Sache. Elle montre le “fait” – pour s’exprimer avec Heidegger
le “phänomenologischer Tatbestand”[48] – que, en tant que pure
situation, je suis infiniment plus étendu, au sens que je suis
projeté en profondeur thématique, que moi-même comme point.
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Et cetQui
êtresommes-nous
projeté comme
horizon n’est que la structure
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fondamentale (je-horizon), expérienciée de façon auto-affective
par la question, la structure qui tient ensemble ce qui se montre
au sein de toute ouverture thématique possible. Autrement dit: je
suis déjà assigné à moi-même sous la figure d’horizon, ce qui
résiste à la puissance extreme, à la ruse et à la malice qui ne
sont pas celles du malin génie mais du réel lui-même qui se
transforme et se soustrait à l’uni(ci)té de notre compréhension
épistémique[49].
D’un autre coté la question est première car elle est la souche
germinale d’une crise épistémique profonde. Et cela me ramène
à une autre question que vous avez posé, celle de la présence
d’une question qui pourrait être vulgairement prise comme
(uniquement) existentielle pour une démarche qui conduit à la
définition de formes de mathesis.
Or, ce fait est étrange si l’on ne considère pas deux facteurs,
l’un général (externe, dirais-je, à la démarche en question),
l’autre particulier (ou interne à la démarche de Philosophie et
demande).
Le premier est le fait que toute connaissance demeure toujours
et constitutivement une science faite par l’homme, sans que
cela représente la dérive dans une sorte de relativisme ou de
négation de l’objectivité des sciences. Toutefois – au-delà des
fausses interprétations dans la direction heideggerienne et
vulgairement herméneutique de la révolution anti-copernicienne
en phénoménologie[50], ou aussi de certaines naïvetés (un peu
réactionnaires dirais-je) d’Husserl sur la relativité einsteinienne
ou pire sur la mécanique quantique – le savoir demeure un fait
“humain”, que l’on ne peut pas déléguer à un ordinateur (car
l’ordinateur justement n’est pas en demande de sens) ni l’on
peut dérubriquer à simple activité formelle-computationnelle (les
recettes de cousine comme prétendait Croce). Cela équivaut à
affirmer que si, à bon droit, l’épistémologie peut devenir
épistémologie de telle ou telle autre science – sur l’arrière-plan
d’une épistémologie générale, cela n’est pas permis à une prôte
epistème. Cela ne doit point représenter l’apologie de
l’ignorance d’une telle démarche à l’égard du savoir qui se fait et
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qui s’est
fait, mais ne peutMentions
pas nonlégales
plus faire comme si le savoir
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ne prenne point départ d’une demande radicalement humaine
(de savoir, de sens) et qu’elle ne revienne pas à structurer,
transformer, révolutionner cette Lebenswelt à partir de laquelle
trouve et a toujours trouvé son essor.
Or, il est clair que ce “trouver essor” et ce “revenir” du savoir, de
l’épistème à la Lebenswelt ne doit à tout jamais signifier une
réduction de l’évidence au subjectif. Elle ne doit toutefois non
plus signifier une mise à l’écart de l’étude (soigneuse) sur les
positivité comme formes qui ont une teneur de stabilité
radicalement indépendante de la subjectivité singulière ou duale
ou plurielle qui les saisit ou les amène à la lumière du jour. Mais
la tache d’une telle prôte épistème spéculative (mais non
métaphysique telle que je la définis) a le grand problème, qu’elle
excède la “simple” interprétation de la demande de sens de
l’existence telle que peut se déployer au niveau strictement
basal, horizontal, de l’ouverture de la Lebenswelt.
Cette ouverture de la Lebenswelt comme multidimensionnalité
qui se montre par la demande “que/qui suis-je?” peut être lue
bien évidemment comme le point de départ mais ne peut pas
être lue comme seule et exclusive dimension de Philosophie et
demande. Si l’on veut, la question “que/qui suis-je?”, par sa
dynamique interne, fournit la toute première ouverture intuitive à
cette dimensionnalité plurielle et intriquée, de cette multidimensionnalité plastique. La saisie de la teneur
épistemiquement “informe” (ou non clairement structurée) de la
Lebenswelt du point de vue de la mathesis (d’une prôte
épistème non-métaphysique), telle qu’elle s’annonce au stade
de la question, ne dois pas être tenue par exclusive. Tout au
contraire! Elle est fonctionnelle à une construction dans et par
laquelle on s’éloigne progressivement de cette saisie informe
pour donner forme et structure à des formes d’expérience et de
mathesis nouvelles. Ces formes, tout en émergeant de cette
dimension, ne peuvent qu’en s’éloigner pour la retrouver ensuite
dans la forme, transfigurée, de “chora épistémique”[51]. Cette
dernière est celle qui rend possible toute méta-ontologie
constructive, dans la mesure où – sans vouloir rentrer dans des
détails épistémiques fort ennuyeux – aujourd’hui et notamment
pour la modélisation des phénomènes complexes, les
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dichotomies
comme “nature-esprit”,
“physique-social” etc. ne
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sont pas seulement dépassées mais posent des obstacles à la
saisie épistémique. La Lebenswelt abandonnée mais surtout
retrouvée aussi comme “chora épistémique” nous laisse aussi
comprendre comment la dimension essentiellement complexe
de cette ouverture expériencielle peut être portée à intelligibilité
de façon toujours épistémiquement plus pertinente sans
pourtant y être épuisée.
L’éloignement progressif des formes de mathesis se fait
toutefois par des formes de questionnement – qui résident, par
leur dynamique interne, à la base des autres formes de mathesis
– et qui gardent en elles une trace de la demande originaire.
Cela dans la mesure où elles représentent le résultat d’un
processus spéculatif qui relève de la même demande et la pose
à l’intérieur d’un horizon qui a changé, s’est métamorphosé (tout
comme la vision qui doit l’explorer).
Or, pour expliquer ce processus il faudra beaucoup plus de
pages qu’il a fallu pour éclaircir a minima ce premier passage. Il
suffit toutefois de remarquer, comme il est fait dans Philosophie
et demande, que la demande de sens du savoir – qui réside à la
base de et ouvre la dimension de la mathesis métathéorique –
garde en elle-même, comme relevée, la question “que/qui suisje?” . Elle se laisse comprendre à partir d’un moment critique, de
rupture, de perte de sens d’une forme de vie laquelle, à son tour,
se laissera comprendre uniquement à partir de la mathesis
méta-égologique. De même pour la question “ti tò òn;” laquelle
transfigure la demande de sens au niveau d’un horizon
théorique à l’intérieur duquel l’être du théorique arrive au
questionnement nécessaire de l’être de la theôria elle-même. La
question “que/qui suis-je?” se retrouve enfin retraduite, relevée
donc et transfigurée au début de la mathesis métamétaphysique dans la mesure où la question “qu’est-ce que (le)
réel?” pose, en régime de relativité ontologique, la demande de
sens d’une rationalité à l’intérieur d’un horizon qui n’est plus
structuré par un présupposé/primat ontologique.
Il ne s’agit pas d’un mouvement linéaire, uni-dimensionnel,
prototype auquel notre idée de démonstration demeure
illusoirement attachée. En étant l’ouverture constructive de
dimensions du savoir, l’enchainement de ces questions doit être
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pensé,Qui
à chaque
fois, comme
ouverture d’un espace nouveau à
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l’intérieur de cette dimension par le point aveugle, par
l’incomplétude qui l’affecte, un point aveugle, une béance, un
Umschlag à partir desquels s’ouvre un autre espace thématique
et se définit cette forme de mathesis qui lui est appropriée. Ce
qui tient ensemble, et qui laisse croiser ces dimensions est un
fait, essentiel: l’impossibilité structurelle que cette première
question – expression nue de la demande de Sens – même dans
ses sublimations épistémiques, ne peut pas trouver,
théorétiquement, réponse.
Cela nous fais revenir à mon avis, avec un regard plus pertinent,
à vos questions précédentes concernant la mathesis.
D’un coté vous affirmiez, à bonne raison, que
“Philosophie et demande, commence par cette question
orientée subjectivement alors que ce qui est en jeu, c’est la
notion même de réel”.
“Il me semble que c’est là pour vous la définition même du
réel – ce qui ne se laisse pas saisir, ce qui est toujours en
excès par rapport à la theôria: le diffus, le complexe”.
Pour enfin demander:
et si cette mathesis est bien une mathesis de l’instabilité […]
alors quelle est sa source ?
Je voudrais revenir sur le premier point, car on pourrait penser
que la question orientée subjectivement et la notion même de
réel soient ou bien aux antipodes ou bien incompatibles. Or, cela
dépend de l’horizon de pensée à l’intérieur duquel l’on pense
cette relation, et de la texture intime de la démarche de pensée
qui les mets en relation et/ou en opposition. Bien évidemment
on peut penser l’opposition comme un choix nécessaire à
prendre pour developper ou bien une pensée d’orientation
existentielle ou bien la construction ou la définition d’une
construction épistémique du réel tel qu’il est saisi par les savoirs
positifs.
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Sauf que
c’est à mon avisMentions
l’opposition
elle-même qui est
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fallacieuse et le fait de penser en régime de suspension de la
notion de “philosophie” suspend aussi cette dichotomie et nous
fait retrouver une corréspondance perdue en vertu d’une simple
prise de position arbitraire. Car la compléxité du réel se
manifeste oui, de façon “structurée”, au niveau épistémique
mais elle apparait aussi et simplement, de façon germinale, sur
l’arrière-plan de la question que plus de toutes énonce
l’impossibilité de se retrouver dans la compléxité de ce réel.
Cette question, sur laquelle nous avons déjà dit beaucoup – par
rapport à son rôle au sein de “Philosophie et demande” – est et
ne peut qu’être la question “que/qui suis-je?”.
Donc plutôt que la penser comme une opposition, je concevrais
la relation entre “notion du réel” et la “question orientée
subjectivement” comme un rapport de spécularité. En fait, dans
une telle spécularité, ce que vous définissez comme “question
orientée subjectivement” ne s’avère qu’une ouverture
thématique, interrogative vers un horizon du monde, du réel
auquel nous n’arrivons pas à prêter une physionomie fixe, lequel
ne se manifeste selon l’unité de Sens à partir duquel pouvoir y
penser notre existence.
De même, la “notion du réel” – que je ne définirais point comme
le point d’arrivée d’un tel parcours – fait “sens” uniquement pour
un individu, pour une communauté, pour notre humanité. Une
telle notion est vraiment ce qui fait constitutivement défaut dans
Philosophie et demande car elle serait, comme notion, statique.
En revanche la façon par laquelle la phénoménalité complexe à
la quelle nous sommes tous exposés peut se fixer dans sa
réalité (ou dans ses réalités), et uniquement par là faire sens, est
ce qui motive seulement Philosophie et demande.
Le but de Philosophie et demande – mais, on pourrait aussi dire
de La complexité et les phénomènes, dans la mesure où il en
représente l’approche propédeutique nécessaire – est d’arriver à
définir un cadre à l’intérieur duquel la pensée puisse faire
expérience de la métamorphose de sa vision. Une telle
métamorphose n’est pas optionnelle, elle est demandée pour
comprendre la complexité de l’ouverture phénoménale à la
quelle toute forme d’existence est nécessairement exposée.
Cela équivaut à déployer non seulement une multiplicité de
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concepts
nouveaux ou d’individuer
des structures ou de cadres
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relativement nouveaux (qui se cristallisent dans les thèses sur
les formes de mathesis aux Chapp. VI-IX). Cela équivaut aussi et
surtout à les inscrire au sein d’une expérience (de pensée). C’est
pour cette raison que l’expression “mathesis des instabilités”
par elle-même ne représente pas grand chose. Pour mieux dire
elle est équivoque, dans la mesure où on la peut prendre:
aussi bien comme l’expérience des instabilités du sens de
notre expérience singulière du réel;
que comme connaissance des instabilités qui se montrent
dans des approches épistémiques au complexe (bifurcations,
théorie des catastrophes, systèmes chaotiques etc.).
Le premier problème est ici que, si on prend la relation dont on a
fait mention auparavant comme une opposition, à savoir comme
un choix philosophique indépassable, on aboutira toujours à une
mathesis amputée (ou bien de sa consistance épistémique ou
bien de sa signification “humaine”, pour les hommes et pour la
communauté humaine que nous sommes). Un second problème
est que c’est uniquement dans la transition d’une dimension
(l’existentiel) à l’autre (l’épistémique), du particulier (de
l’expérience de chacun) à l’universel de la structure
(épistémique) que peuvent faire face des dimensions qui
structurent une telle spécularité. Ce qui se métamorphose dans
cette transition, et dans/par les construction qu’elle demande en
vertu d’une logique et d’une cogence interne point arbitraire, est
la theôria elle-même. Que la transition nécessaire pour instituer
cette spécularité soit difficile, même douloureuse dirais-je, est le
prix à payer pour une pensée dans laquelle le singulier se reflète
dans l’universel et l’universel (d’un savoir, mais plus
généralement d’un sens de l’être-au-monde) se reflète au sein
de la singularité dans sa capacité de transformation.
En ce sens, une “phénoménologie” de la question n’est jamais
fondamentalement une “phénoménologie” de la curiosité mais
arrive à toucher, de façon peut-être inattendue, par les
développements et les transformations qu’elle exige, la nature
même de la raison.
***
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[1]
Entretien avec Fausto Fraisopi : Questions sur la philosophie de la question – ACTU PHILOSOPHIA
F. Fraisopi,
Philosophie Mentions
et demande.
Sur la métaphilosophie,
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Paris, Classiques Garnier, 2021. Cfr. également Id., Philosophie
und Frage, vol. II, Untersuchungen über die Formen der
mathesis, Freiburg i.B. – München, 2016.
[2]
M. Heidegger, Sein und Zeit, HGA 2, Frankfurt a. M.,
Klostermann, 1977, § 2, pp. 6-12.
[3]
[4]
M. Meyer, De la problématologie, Paris, PUF, 2008.
[5]
Loc. cit.
[6]
Cfr. M. Merleau-Ponty, Le visible et l’invisible, Paris, Gallimard,
1964, p. 150.
[7]
J. Farges, Husserl: la phénoménologie comme philosophie du
sens. In: Philosophie,155, 2022, p. 18-37.
[8]
M. Richir, Métaphysique et phénoménologie. In: E. Escoubas
– B. Waldenfels (Hrsg.): Deutsche und französische
Phänomenologie, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 127.
[9]
A. Schnell, Le clignotement de l’être, Paris, Hermann, 2021, p.
169.
[10]
Clement d’Alexandrie, Excerpta ex Theodoto, 78.2, tr. Fr.
Extraits de Théodote, Paris, Cerf, 1976 ad. loc.
[11]
Cette question, absente dans la Critique de la raison pure [B
832 – A 804] s’ajoute dans la lettre de Kant à Stäudlin du 4 Mai
1793 [Ak. IX, p. 429]. Et la considération explicite de sa fonction
architectonique se trouve uniquement dans la Logik Jäsche, Ak.
IX, p. 25.
[12]
Cf. F. Fraisopi, Die Idee einer spekulativen Phänomenologie
(als Mathesis), in F. Fraisopi (Hg.), Radicalizing Phenomenology.
Neue Perspektiven – Nouvelles perspectives,
Phänomenologische Forschungen, 2021/2, p. 183-216, p. 186/7.
[13]
C. Hooker, Introduction to „Philosophy of Complex Systems“,
North-Holland, Elsevier, 2011, 3.
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[14]
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J. Qui
Benoist,
Que le complexe
n’est pas du simple plus
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compliqué, in F. Fraisopi, La complexité et les phénomènes.
Nouvelles ouvertures entre science et philosophie, Paris,
Hermann, 2012, p. 10.
[15]
https://www.youtube.com/watch?v=N-Bq6Ioji28&t=1558s
(min. 17 ff.)
[16]
Cf. Kôsmos et theôria: génealogie(s), in: Philosophie et
demande, op. cit., Chap. 6, pp. 125-130; Les plans des
dialectiques, Chap. 7, pp. 140-147.
[17]
Aristote, Métaphysique, IV, 1006 a.
[18]
Ibid., p. 205.
[19]
Ibid., p. 207.
[20]
M. Bitbol, Maintenant la finitude. Peut-on penser l’absolu?,
Paris, Flammarion, 2019.
[21]
Cf. Philosophie et demande, op. cit., p. 178-186. Cette
thématique est développée de manière analytique dans
Untersuchungen über die Formen der Mathesis, op. cit., §§ 8586, 459-470.
[22]
Philosophie et demande, op. cit., p. 222.
[23]
Ibid., p. 59.
[24]
Cf. à ce sujet, Chap. VI, pp. 112-130 et notamment “Thèses
sur la mathesis méta-égologique”, pp. 120-122.
[25]
Et, je voudrais le souligner sur la base d’acquis scientifiques
bien concrets qui se sédimentent depuis vingt ans et qui sont
largement acceptés et discutés. La pertinence de cette méthode
a été confirmée, récemment, par une publication dans la
Physical Review Letters du janvier 2018 (cfr. I. Iacopini, S.
Milojevic, V. Latora, Network Dynamics of Innovation Processes,
in Physical Review Letters, 120, 2018).
[26]
Cf. à ce sujet, Chap. VII, pp. 131-168 et notamment “Thèses
sur la mathesis méta-théorique”, pp. 120-122 et notamment
“Thèses sur la mathesis méta-théorique”, pp. 158-161.
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[27]
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EtQui
encore
une fois, surMentions
la base d’acquis
scientifiques bien
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concrets qui se sédimentent cette fois depuis trente ans ou plus:
M. Mahfoudh – G. Forestier – L. Thiry – M. Hassenforder,
Algebraic graph transformation for formalizing ontology changes
and evolving ontologies. In: Knowledge-Based Systems, Volume
73, 2015, p. 212-226. Cf. également G. Taentzer – F. Mantz – Y.
Lamo, Co-transformation of Graphs and Type Graphs with
Application to Model Co-evolution. In: Ehrig, H., Engels, G.,
Kreowski, HJ., Rozenberg, G. (eds) Graph Transformations.
ICGT 2012. Lecture Notes in Computer Science, vol 7562.
Springer, Berlin, Heidelberg, 2012.
[28]
Cf. à ce sujet, Chap. VIII, pp. 169-194 et notamment “Thèses
sur la mathesis méta-ontologique”, pp. 192-194.
[29]
Cf. à ce sujet, Chap. IX, pp. 195-218 et notamment “Thèses
sur la mathesis méta-métaphysique”, pp. 213-218.
[30]
Cf. à ce sujet, mais uniquement par rapport à la modélisation
de la complexité du vivant F. Bailly – G. Longo, Mathématiques
et sciences de la nature. La singularité physique du vivant, Paris,
Hermann, 2007, p. 217-20. A partir dette forme de modélisation
de formes “complexes” d’objectité [Gegenständlichkeit],
analysée dans La complexité et les phénomènes [op. cit., 92
passim] on avait esquissé une première forme de modélisation
méta-ontologique (ibid., p. 463-488).
[31]
Untersuchungen über die Formen der Mathesis, op. cit., §§
1-15, pp. 139-190.
[32]
Cette alternative, et précisément par rapport à l’émergence
de la theôria chez les premiers penseurs grecs, a été récemment
analysée par Klaus Held, Die Geburt der Philosophie bei den
Griechen. Eine phänomenologische Vergegenwärtigung, Alber
Verlag, Baden-Baden, 2022, p. 128-149.
[33]
Cfr. par exemple F. Fraisopi, L’ouverture de la vision. Kant et
la “phénoménologie implicite” de la Darstellung, G. Olms,
Hildesheim – Zürick – New York, 2009, pp. 275-301, 407-425; A.
Schnell, Zeit, Einbildung, Ich. Phänomenologische Interpretation
von Kants “Transzendentaler Kategorien-Deduktion”, V.
Klostermann, Frankfurt a.M., 2022, p. 118-129.
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[34]
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E. Qui
Husserl,
Intentionnalité
et être-au-monde, Hua. XV, p. 549sommes-nous ?
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556 (§ 8), tr. fr. in D. Janicaud (éd.), L’intentionnalité en question
entre phénoménologie et recherches cognitives, Paris, Vrin, p.
145.
[35]
Aristotelis De anima, 431b 20.
[36]
Vgl. G.W.F. Hegel, Phänomenologie des Geistes, in Hegels
Werke, Frankfurt a/M, Suhrkamp, Bd. 3, S. 179 : “Die Vernunft
ist die Gewißheit des Bewußtseins, alle Realität zu sein; so
spricht der Idealismus ihren Begriff aus. Wie das Bewußtsein,
das als Vernunft auftritt, unmittelbar jene Gewißheit an sich hat,
so spricht auch der Idealismus sie unmittelbar aus: Ich bin Ich, in
dem Sinne, daß Ich, welches mir Gegenstand ist, nicht wie im
Selbstbewußtsein überhaupt, noch auch wie im freien
Selbstbewußtsein, dort nur leerer Gegenstand überhaupt, hier
nur Gegenstand, der sich von den anderen zurückzieht,
welche neben ihm noch gelten, sondern Gegenstand mit dem
Bewußtsein des Nichtseins irgendeines anderen, einziger
Gegenstand, alle Realität und Gegenwart ist. Das
Selbstbewußtsein ist aber nicht nur für sich, sondern auch an
sich alle Realität erst dadurch, daß es diese Realität wird oder
vielmehr sich als solche erweist”.
[37]
Cfr. par exemple Augustinus, Confessiones, X, 6 : « et direxi
me ad me et dixi mihi, « tu qui es ? » et respondi « homo », et
ecce corpus et anima in mihi praesto sunt, unum exterius et
alterum interius. Quid homo est, inde quaerere debui deum
meum, quem iam quaesiveram per corpus a terra usque ad
coelum, quousque potui mittere nutais radias ocularum meum ?
».
[38]
Ce mouvement régressif s’est cristallisé tout d’abord dans
une étude plus courte, déjà publiée et ensuite dans une étude
plus longue qui va être intégrée dans la version Française des
Recherches sur la forme de la mathesis. (Die Schau und das
Spekulativ Der Verlust der griechischen Idee der « theôria » und
das Spekulativ bei Augustinus [De Trinitate XV]). Cf. à ce sujet
une version abrégée dans Horizon and Vision. The
Phenomenological Idea of Experience versus the Metaphysics of
Sight. In: Horizon. Studies in Phenomenology, 4 (1) 2015, p. 124-
145.
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[39]
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JeQui
mesommes-nous
réfère à l’anecdote
de la fillette du Limousin face à la
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mer, contenu dans l’abécédaire de Deleuze, E comme Enfance.
[40]
Karl Jaspers, Ein Selbstportät, Disponible sur YouTube:
https://www.youtube.com/watch?v=PQmR4nxk0AA
[41]
Philosophie et demande, op. cit., pp. 49-53.
[42]
Cfr. par exemple E. Husserl, Zur Phänomenologie der
Intersubjektivität, in Husserliana, Bd. XV, Den Haag, M. Nijoff,
1973, p. 153: “Die Frage, was bin ich, was ist der Mensch, die
Menschheit, beantwortet die Transzendentalphilosophie durch
ihre tiefste Auslegung der Subjektivität als sich selbst und Welt
konstituierender”.
[43]
W. James, A World of pure experience. In Essays in Radical
Empiricism, Cambridge (MA), Harvard University Press, 1976, p.
21-44, S. 36: “The instant field of the present is always
experienced in its pure state, plain unqualified actuality, a simple
that, as yet undifferentiated into thing and thought, and only
virtually classifiable as objective fact or as some one’s opinion
about fact”.
[44]
En Chinois, par exemple les deux questions, c’est-à-dire “qui
suis-je?” Et “qu’est-ce que je suis?” peuvent être formulées
comme
我是誰?(wo shi shui?) et comme 我是什么?(Wo shi
shen me?)
[45]
Y compris le bouddhisme, la pratique zen japonaise et
beaucoup d’autres formes qui n’appartiennent pas au code de
la pensée occidentale.
[46]
J. W. Goethe, Farbenlehre. In Werke, Bd. 13. X [Dioptrische
Farben], § 175, S. 376, tr. fr. Paris, Triades, 1980, p. 138/9: “ Les
phénomènes que nous percevons par nos sens ne sont le plus
souvent que des cas qui, avec quelque attention, peuvent être
rattachés à des rubriques générales connues empiriquement.
Celles-ci, à leur tour, se classent sous des rubriques
scientifiques qui elles-mêmes renvoient à un niveau supérieur et
ainsi portent à notre connaissance certaines conditions
indispensable du phénomène. C’est à partir de là que, peu à
peu, tous les phénomènes apparaissent soumis à des règles et
à des lois supérieurs qui se révèlent non par des mots et des
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hypothèses
à notre entendement,
mais par des phénomènes à
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notre vue intuitive. Nous nommons ceux-ci phénomènes
primordiaux [Urphänomene], car rien dans ce qui se manifeste
visiblement n’est au-dessus d’eux, et par contre ils sont
parfaitement aptes à nous faire revenir par degrés le long de la
voie par laquelle nous nous étions élevés jusqu’au cas le plus
commun de l’expérience quotidienne”.
[47]
Untersuchungen über die Formen der Mathesis, cit., § 16, p.
191-194.
[48]
M. Heidegger, Die Grundprobleme der Phänomenologie,
Frankfurt a. M., Klostermann, GA 24, 1997, p. 227.
[49]
Je cite et je paraphrase ici, pro domo mea, des
considérations que J.-L. Marion développe à propos de la
seconde Méditation dans une émission de France Culture dont
le titre est: “Qui suis-je?” de 2017. C’est une convergence
inconsciente (Philosophie und Frage est parue dans sa version
allemande en 2016) qui m’intrigue profondément.
[50]
Contre ces fausses interprétations on ne peut bien
évidemment que conseiller le livre et plus en général la
démarche de Dominique Pradelle. Cf. à ce sujet D.
Pradelle, Généalogie de la raison. Essai sur l’historicité du sujet
transcendantal de Kant à Heidegger, Paris, PUF, 2013.
[51]
Cf. Untersuchungen über die Formen der Mathesis, cit. §
115: Erfahrungsboden als epistemische Chora, p. 588-590.
Entretiens
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venez de publier chez Vrin un livre
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