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Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 67 (2019) 121–129
Article original
La créativité, ressource potentielle de l’enfant et l’adolescent, à évaluer,
révéler et développer
Creativity, a potential resource for children and adolescents to evaluate, reveal and develop
T. Lubart a,∗ , M. Besançon b , B. Barbot c
a
Université Paris Descartes, France
Université Rennes 2, Rennes, France
c Pace University, New York, Etats Unis
b
Résumé
La créativité prend une place de plus en plus importante dans notre société et il est donc important de l’évaluer afin d’encourager son développement, et ceci, dès le plus jeune âge. La créativité est la capacité à générer des productions originales et adaptées dans leur contexte. Cet article
présente le concept de haut potentiel créatif qui se distingue de celui de haut potentiel intellectuel. Nous présentons ensuite la batterie d’Évaluation du
Potentiel Créatif (EPoC) qui permet d’évaluer le potentiel créatif dans deux types de pensée (divergente-exploratoire vs convergente-intégrative),
et ceci dans plusieurs champs d’application (verbal-littéraire vs graphique-artistique). Les normes de cette batterie ont été développées auprès
d’enfants scolarisés en école élémentaire et de nouvelles normes sont en cours de développement pour les élèves de collège (pour les domaines
d’application verbal-littéraire, graphique-artistique et social). L’intérêt de cette batterie pour les psychologues et psychiatres est discuté dans le
contexte du bilan psychologique et le suivi thérapeutique.
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Haut Potentiel ; Créativité ; Intelligence ; Évaluation
Abstract
Creativity is increasingly important in our society, so it is important to evaluate it and develop it from the youngest age. Creativity refers to
the ability to generate productions that are original and meaningful in their production-based context. This article presents the concept of high
creative potential, which can be distinguished from high intellectual potential. We then present the Evaluation of Creative Potential (EPoC) battery,
which allows creative potential to be measured in two types of thinking (divergent-exploratory vs. convergent-integrative) in several domains of
application (verbal-literary vs. graphic-artistic). Norms for elementary school children are available, and new norms are under development for
middle school children (for applications within the fields of verbal-literary, graphic-artistic and social domains). The interest of this battery for
psychologists and psychiatrists is discussed in the context of both the psychological assessment and therapeutic tracking.
© 2019 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Giftedness; Creativity; Intelligence; Assessment
Dans notre société, jusqu’à encore très récemment, les compétences mises en avant étaient surtout liées aux compétences
techniques, aux connaissances dures (« hard skills »). Toutefois,
∗
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : todd.lubart@univ-paris5.fr (T. Lubart).
https://doi.org/10.1016/j.neurenf.2019.02.004
0222-9617/© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
notre société en perpétuelle évolution nécessite le développement d’autres compétences qui sont de plus en plus recherchées
dans le profil des personnes, nommées « soft-skills ». Ces
compétences de nature transversale sont utiles dans différents
domaines parce qu’elles permettent une plus grande adaptabilité
des personnes. Dans ces compétences, il est possible d’y intégrer les compétences communicationnelles, interpersonnelles,
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Fig. 1. Représentation de l’approche multivariée de la créativité (d’après [6]).
émotionnelle, coopératives. Ainsi, selon un rapport de l’OCDE
[1], afin de faire face aux défis du 21e siècle, il est important
pour les enfants d’apprendre à maîtriser un ensemble de compétences cognitives, sociales et émotionnelles dans lesquelles la
Communication, la Coopération, la Pensée Critique et la Créativité prennent une place très importante, que ce soit dans le milieu
scolaire ou, plus tard, dans le domaine professionnel. Selon une
étude menée auprès des PDG de 1500 grandes entreprises dans
le monde, la créativité ressort comme une capacité recherchée
à cause de son implication forte dans le processus d’innovation
[2]. De la même façon, une étude publiée par Adobe auprès
d’enseignants et parents d’élèves de plusieurs pays, cite la créativité comme une compétence qu’il faut développer à l’école
[3–5].
De tout temps, la créativité a guidé l’évolution de l’homme.
Au cours de la Préhistoire, nos ancêtres homo habilis, ont
inventé des outils de chasse, les ont améliorés, dans une
perspective d’innovation, pour s’adapter à leur environnement
(chasser, accomplir des missions de survie). C’était il y a 2 millions d’années, et c’est une part de notre héritage illustrant
l’importance de la créativité pour l’évolution de l’homme. Un
peu plus récemment, il y a 40 000 années, les hommes ont continué à faire preuve de créativité à travers les peintures murales
retrouvées dans les grottes de Lascaux, qui illustrent une nouvelle innovation majeure dans la sphère de la communication,
possible avec des images.
Tout comme il est possible de contraster l’homo sapienssapiens marqué par son intelligence—une sorte d’expert du
maniement des connaissances—de « l’homo creativus », marqué
par sa créativité et son esprit d’innovation [6], il est possible de
distinguer le Haut Potentiel Intellectuel du Haut Potentiel Créatif
[7–9]. Le Haut Potentiel est défini le plus souvent par l’obtention
de scores de Quotient Intellectuel supérieurs à 2 écart-types de
la performance moyenne (i.e., au-delà de 130) bien que ce seuil,
fixé de manière arbitraire, ne soit pas nécessairement idéal [10].
L’objectif de cet article est de présenter le Haut Potentiel Créatif
et de décrire un outil permettant d’évaluer ce potentiel créatif et
son intérêt dans une perspective pratique.
1. Qu’est-ce que la créativité ?
La créativité correspond à la capacité à produire un contenu
nouveau et adapté dans son contexte [6,11–13]. Il ne s’agit pas de
produire des idées bizarres, hors sujet, mais des idées originales,
qui ont un sens et une certaine valeur dans leur contexte de production. Il est souvent plus simple d’être créatif dans un contexte
où il y a quelques contraintes plutôt que dans un contexte où il
n’y en a pas. En effet, si quelqu’un vous demande d’ouvrir une
porte, vous allez tout simplement utiliser votre main et cela n’est
pas du tout créatif ! Mais si cette même personne vous demande
d’ouvrir cette porte sans utiliser vos membres supérieurs, alors
vous pourrez certainement faire preuve de créativité en ouvrant
la porte avec votre menton, votre genou ou encore vos fessiers !
Nous voyons ici, que même dans notre quotidien, la créativité de
tout individu peut s’exprimer et elle ne relève pas nécessairement
de grandes productions illustres.
La créativité peut être envisagée à plusieurs niveaux de réalisation [14]. (1) L’individu met en œuvre sa créativité dans
son développement. Ainsi, on parle de créativité mini « c »,
c’est-à-dire une idée créative reconnu par le milieu de l’individu
(avec ses copains, dans sa famille, dans sa salle de classe). (2)
L’individu propose une production reconnue comme originale
dans un champ professionnel, comme le champ littéraire ou
scientifique. Si un individu invente une histoire reconnue dans le
monde littéraire, il s’agit d’une production professionnelle (Proc) (3) L’individu réalise une production reconnue dans le monde
entier comme très importante et majeure – il s’agit d’un cas de
créativité éminente (Big C).
2. Contrastes entre Créativité et Intelligence
Nous proposons de contraster les apports de Binet [15] avec
ceux de Guilford [16]. Tous deux ont une place importante
dans l’histoire de la psychologie : grâce à Binet [15], les tests
d’intelligence ont vu le jour, ce qui permet notamment de distinguer les personnes dans la norme des personnes présentant un
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Fig. 2. Exemple de productions d’un enfant de CM2 sur une épreuve de pensée divergente graphique.
divergente avec d’autres facettes de traitement d’information.
Ainsi, il n’est pas aussi aisé de distinguer conceptuellement
les notions de créativité et d’intelligence, bien que dans les
faits et dans la manière dont ces concepts sont maniés, il est
tout à fait possible de les dissocier. Lorsque nous mesurons
l’intelligence par des tests permettant d’obtenir un score de QI et
que nous corrélons ce score avec des notes de mesures de créativité, des corrélations faibles sont obtenues. La méta-analyse
de Kim [18] a trouvé une corrélation moyenne de 0,17 entre
l’intelligence et la créativité. Cela a donc amené Renzulli [19]
dans son modèle en trois anneaux, ainsi que d’autres auteurs
(comme Gagné[20] ou Sternberg, [21]) à distinguer le haut
potentiel intellectuel, d’une part, et le haut potentiel créatif,
d’autre part.
3. Quels sont les ingrédients du potentiel créatif ?
Fig. 3. Exemple de production sur une épreuve de pensée convergente graphique
(Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable
autorisation des Éditions Hogrefe France1 ).
haut potentiel intellectuel (dans le contexte actuel des échelles
d’intelligence de Wechsler, il s’agit d’un QI supérieur à 130).
Cependant, à partir des travaux de Guilford [16], différentes
épreuves ont vu le jour pour évaluer la pensée créative, notamment à travers des épreuves de pensée divergente (ex. [17]).
Dans ce dernier cas, comme ce qui a été proposé pour les tests
d’intelligence, les mesures permettent de distinguer les personnes présentant un potentiel de génération d’idées moyen, de
celles présentant un haut potentiel créatif.
Toutefois, l’histoire est un peu plus compliquée étant donné
que Binet [15] avait intégré quelques items d’imagination créatrice dans ses premières versions de tests, et que Guilford [16]
a développé une théorie de l’intelligence qui associe la pensée
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La Fig. 1 présente le modèle multivarié de la créativité
[6,22], qui est à la base de nombreuses de nos recherches.
Les quatre types d’ingrédients de la créativité y sont représentés. Un premier ingrédient prend en compte la cognition,
comme la flexibilité mentale ou la capacité d’association. Au
sein de la cognition, il y a également les connaissances générales et les connaissances spécifiques aux champs disciplinaires.
Le deuxième ingrédient concerne les facteurs conatifs incluant
certaines facettes de la personnalité, comme la prise de risque
par exemple, et la motivation. Un troisième ingrédient porte
sur l’émotion ; ainsi avoir des émotions idiosyncrasiques, être
dans un état émotionnel positif par exemple, contribue au potentiel créatif. Enfin, l’environnement (qu’il soit familial, scolaire,
culturel, régional) représente la dernière catégorie d’ingrédient
dans ce modèle. Un enfant ou adolescent disposera d’un certain potentiel créatif qui peut se décliner comme plus ou moins
important selon les champs de déploiement, c’est-à-dire qu’il
peut avoir un potentiel assez important dans le domaine artistique, visuel, et peut-être moins verbal par exemple. C’est
comme dans votre cuisine, les différents ingrédients en votre
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Fig. 4. Exemple de production sur une épreuve de pensée convergente graphique (Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable
autorisation des Éditions Hogrefe France2 ).
possession vous donnent le potentiel de faire différents types
de gâteaux (ainsi, si vous avez beaucoup de chocolat et peu
de citron, vous aurez plus de potentiel pour faire un gâteau au
chocolat).
La mise en action de ces ingrédients correspond au processus créatif qui permet des accomplissements et productions plus
ou moins réussis. Si nous avons tendance à réaliser ces accomplissements de façon répétée et très créative, nous parlerons du
talent créatif.
Nous allons illustrer chacun de ces ingrédients impliqués
dans la créativité. Prenons l’exemple de Charles Darwin avec
ses études des espèces d’oiseaux dans les îles Galápagos pour
illustrer les facteurs cognitifs. Gruber [23] a analysé ses cahiers
de notes, et il a constaté que Darwin a beaucoup utilisé le processus de pensée métaphorique afin de développer sa théorie
de l’évolution de l’espèce. De même, Martin Cooper, qui est
l’inventeur du téléphone mobile a expliqué comment il a eu son
idée. En fait, il a détecté les signes faibles, que personne n’avait
vu, indiquant que les consommateurs voulaient plus se rendre
dans une cabine téléphonique mais plutôt que chaque consommateur souhaitait avoir sa propre cabine téléphonique. Il a fait
preuve de flexibilité et il a proposé que plutôt que d’aller vers
les cabines téléphoniques, les personnes devenaient leur propre
cabines téléphoniques !
Un autre facteur important dans la créativité est de ne pas
se conformer à ce que tout le monde fait afin de se différencier. Dans une étude [24] une situation de conformité et
de pression sociale a été proposée afin de voir si le partici-
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pant parmi les autres personnes présentent dans une pièce (des
acteurs donnant des réponses établies) va se plier ou non aux
normes sociales. Les résultats font apparaître que, à cause de la
pression sociale, les participants ont parfois peur d’exprimer
une idée originale, différente des autres. Ainsi, la pression
sociale serait un frein à la créativité. Ce type de recherche a
été répliqué dans de nombreux pays (ex. : [25]) y compris en
France.
Simonton [26,27] s’est intéressé à de nombreux personnages
éminents de la créativité, comme Einstein. Ainsi, à partir de
l’analyse de 192 créateurs éminents, il a déduit qu’ il existe une
relation inverse (courbe en forme de U inversé) entre le niveau
d’éminence et le nombre d’années passées à l’école [26]. De
plus, lorsque nous corrélons les notes scolaires avec des mesures
de pensée divergente, les corrélations observées dans nos propres
recherches vont de +0,10 à −0,20. Ces corrélations tendent donc
à mettre en évidence une absence de lien entre ces deux variables,
voire que plus les participants ont de bonnes notes à l’école et
moins bonnes sont leur performance aux épreuves de pensée
divergente (ou tout au moins ont des scores faibles). Une métaanalyse récente [28] indique que le lien observé le plus souvent
entre pensée divergente et performance scolaire est positive mais
faible (r = 0,22).
Besançon et Lubart [29] ont mis en évidence que la pédagogie
à laquelle les enfants, âgés entre 6 et 11 ans (école élémentaire),
sont confrontés, a un effet sur le développement de leur potentiel
créatif. Ainsi, les enfants scolarisés dans des écoles Montessori ou Freinet obtiennent de meilleures performances dans les
épreuves de pensée divergente et celles de pensée convergente,
dans les domaines graphique et verbal. De la même façon, [30]
ont mis en évidence que la mise en place d’une pédagogie dans
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Fig. 5. Exemple de production sur une épreuve de pensée convergente graphique (Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable
autorisation des Éditions Hogrefe France3 ).
laquelle les enfants de 4-6 ans étaient plus en mouvement permettait aux enfants de développer de manière significative leur
potentiel créatif en pensée divergente, notamment au niveau de
la flexibilité. Depuis 2015, OCDE mène une recherche dans
10 pays, dans laquelle le potentiel créatif des enfants est évalué au début et à la fin de l’année. Entre ces deux mesures, des
actions en faveur de la créativité sont mises ou non en place afin
de vérifier s’il est possible de développer la créativité des enfants
à travers des pratiques pédagogiques particulières.
Tous ces ingrédients se mêlent et contribuent au développement du processus créatif qui englobe notamment deux phases :
une phase de divergence qui correspond à l’exploration de
l’espace conceptuel, et une deuxième phase de convergence
qui correspond à l’intégration, la synthèse originale. Ces phases
s’entremêlent tout au long du processus de création.
4. Comment évaluer la créativité ?
Comment peut-on mesurer la créativité, et plus précisément
le potentiel créatif ? Une première question concerne ce qu’on va
mesurer, à savoir le potentiel créatif ou l’accomplissement. Ce
dernier représente les productions de l’enfant réalisée au cours de
sa vie, son dossier de travaux effectués. Le potentiel représente
quelque chose que l’enfant peut faire. Une seconde question
concerne la spécificité ou la généralité de la mesure : mesuret-on par domaine (comme les domaines artistique, littéraire,
mathématique. . .) ou mesure-t-on une sorte de facteur général ?
En fait, le facteur général de créativité peut être mis en évidence, mais c’est une toute petite part de variance dans la sphère
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de la créativité. Typiquement, les chercheurs préfèrent mesurer la créativité dans différents domaines d’application [6] ainsi
que le potentiel créatif, notamment chez les enfants et les adolescents qui n’ont pas eu forcément toutes les occasions d’exprimer
et de montrer tous les accomplissements possibles. Quand la
performance de l’enfant est évaluée, soit l’enfant réalise une production qui sera évaluée (ex. : les épreuves de Torrance, [17]),
soit il s’auto-évalue sur sa capacité à créer (ex. : [31,32]).
En ce qui nous concerne, nous avons pris le parti, en élaborant la batterie de l’Évaluation du Potentiel Créatif (EPoC,
[33]) de mettre en situation les enfants et de leur demander
de produire des idées, des dessins, des compositions littéraires.
Dans les différentes tâches proposées, l’enfant va engager sa
pensée divergente et sa pensée convergente intégrative avec
toutes ses ressources, sa personnalité, sa motivation, et ses compétences cognitives. La batterie EPoC s’est progressivement
développée depuis les années 2000 en prenant appui sur les
recherches menées préalablement. L’enfant va s’engager dans
le processus de création avec des tâches de pensée divergenteexploratoire (où l’enfant doit produire de nombreuses idées
à partir d’un stimulus), et des tâches de pensée convergenteintégrative (où l’enfant doit produire une seule solution
intégrant plusieurs éléments), et ce, dans deux domaines, verballittéraire et graphique-artistique. L’enfant va réaliser les tâches
à deux moments espacés d’une semaine environ afin de neutraliser les fluctuations normales des capacités créatives de
l’enfant.
La Fig. 2 présente les productions proposées par un enfant
dans une épreuve de pensée divergente graphique-artistique.
Cet enfant a donc réalisé 10 dessins dans le temps imparti.
Est-ce que cet enfant est dans la norme ? Afin de vérifier cela, il
est nécessaire de prendre en considération l’âge de l’enfant afin
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Fig. 6. Exemple de production sur une épreuve de pensée convergente graphique
(Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable
autorisation des Éditions Hogrefe France4 ).
de comparer ses performances à celles d’autres enfants de son
âge (en France). En CM2, réaliser 10 productions est habituel,
ainsi cet enfant a un potentiel en pensée divergente moyen pour
les enfants de cet âge.
Dans une des épreuves de pensée convergente-intégrative,
plusieurs photographies d’objets sont présentées à l’enfant et il
a pour consigne d’en intégrer au moins 4 dans un dessin. Sur
la Fig. 3, le dessin présente une petite scène assemblant ces
objets dans un dessin unique (convergence-synthèse) pas très
original compte-tenu du fait que de nombreux enfants ont l’idée
de reproduire une petite chambre avec les objets posés par terre
ou sur des meubles. De la même manière, la Fig. 4 présente
une scène de pêche, mais à nouveau ce n’est pas une idée très
originale compte tenu des stimuli présentés. Ainsi, dans les deux
cas, une note faible ou moyenne est attribuée sur cette épreuve
de pensée convergente-intégrative graphique.
Par contre, sur la Fig. 5, la production proposée par l’enfant va
plus loin, étant donné que les objets sont détournés, par exemple
l’ampoule est devenue le corps d’une personne ou encore que le
chapeau s’est transformé en parasol.
Sur les Fig. 6 et 7, les enfants ont mis ensemble les objets
dans une synthèse plus originale : pour la Fig. 6, nous avons
la valise représentant le corps du petit lapin avec des ampoules
pour les pieds tandis que sur la Fig. 7, nous avons un guerrier
samouraï dont le corps est composé d’une ampoule, sa tête d’un
poisson avec une valise attachée comme sorte de bras et l’épée
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Fig. 7. Exemple de production sur une épreuve de pensée convergente graphique
(Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable
autorisation des Éditions Hogrefe France5 ).
faite d’une carotte. Ce dernier dessin est très original et comporte
une très grande intégration des différents éléments.
Les productions des enfants sont évaluées par rapport à celles
des enfants de l’étalonnage sur une échelle de notation pour les
épreuves de pensée divergente-exploratoire et pour les épreuves
de pensée convergente-intégrative, dans les différents domaines
d’expression du potentiel créatif.
Pour plus de simplicité, nous avons opté pour le même système de notation que dans les tests de Quotient Intellectuel (QI),
avec une moyenne de 100 et un écart type de 15 points, quand
nous comparons la performance d’un enfant à son groupe de
référence. Ainsi, des scores supérieurs à 130 pour les indices
de pensée divergente-exploratoire ou de convergence-intégrative
correspondent à un haut potentiel créatif.
De plus, chaque enfant a un profil par rapport à ces performances obtenues à chaque type de tâche. La Fig. 8 présente
le profil d’un enfant qui est relativement fort en divergence
graphique, un peu moins fort en divergence verbale, fort en intégration graphique, et moins fort en intégration verbale, c’est un
profil mettant en valeur un potentiel en créativité graphique.
La grande majorité des enfants présentent un profil créatif hétérogène avec un haut potentiel dans un domaine, mais
pas dans tous. La Fig. 9 présentent les différents profils types
observés auprès des enfants de l’échantillon d’étalonnage en
France : un enfant peut donc avoir un haut potentiel créatif dans le
verbal ou dans le graphique et un autre enfant peut être bon en
divergence et pas en intégration.
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Fig. 8. Exemple d’un profil d’un enfant (Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable autorisation des Éditions Hogrefe France6 ).
Si un enfant obtient de bonnes performances en divergence
et pas en intégration, c’est comme un moteur qui marche à moitié. Pour parler de haut potentiel créatif, les performances de
l’enfant doivent être supérieures dans les deux formes de pensée
« divergente-exploratoire » et « convergente-intégrative ». Ce
modèle est validé sur le plan statistique (ex. : [33,34]) puisque les
différentes épreuves se regroupent en quatre facteurs (Divergent
Graphique, Divergent Verbal, Intégratif Graphique et Intégratif
Verbal), et qu’à un niveau sur ordonné, ces facteurs se regroupent
par domaine (verbal vs graphique) qui peuvent donc venir déterminer un haut potentiel créatif dans un domaine.
Toutefois, les domaines verbal et graphique ne sont pas
complètement déconnectés, et les scores des différents domaines
sont en lien. En effet, dans une épreuve donnée, l’enfant peut
mélanger la créativité verbale et visuelle car lorsqu’il réalise
une épreuve de pensée intégrative graphique, il peut tout à fait
exprimer une histoire qui vient expliciter son dessin.
Nous avons commencé par le développement de deux
domaines (verbal-littéraire et graphique) et nous travaillons
à l’élaboration d’autres domaines (social, scientifique, mathématique, musical. . .). Par exemple, en pensée divergente dans
le domaine mathématique, l’enfant devra, à l’aide d’une
calculatrice, construire des séquences qui vont chaque fois
aboutir au chiffre de 8 et donc pendant 10 min l’enfant va
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réaliser autant de séquence que possible. Dans un des pays
faisant parti de l’OCDE, la moyenne était de 13,5 séquences.
Toutefois cette moyenne de fluidité ne reflète pas la grande
variabilité qu’il existe entre les enfants puisqu’un enfant en
a produit 54 et un autre une seule séquence. En termes
d’originalité, nous constatons là encore des disparités. La
séquence « 5 + 4−1 = 8 » qui apparaît très fréquemment donc
n’est pas originale tandis que la séquence « 2 + 6 × 2−8 = 8 »
est très peu fréquente, donc celle-ci est originale. Dans les
épreuves de pensée convergente-intégrative dans le domaine des
mathématiques, l’enfant doit utiliser toutes les valeurs numériques et plusieurs opérateurs afin de faire une seule séquence
qui atteint une valeur mathématique souhaitée. La séquence
proposée par l’enfant est enregistrée et on évalue ensuite si
cette séquence est originale ou pas selon le principe décrit
précédemment.
5. Conclusions : Quels apports dans la pratique
clinique ?
Dans la pratique clinique, il est possible d’avoir des demandes
de parents pour la réalisation d’un bilan en raison des difficultés rencontrées par leur enfant dans le milieu scolaire. Les
parents s’interrogent donc sur l’origine des difficultés observées
et pour trouver une réponse, avant même de prendre un RDV,
ils recherchent les informations sur Internet. De là, après avoir
établi par eux-mêmes le diagnostic de leur enfant, ils prennent
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Fig. 9. Représentation des profils trouvés dans l’échantillon français (Copyright© 2011, Éditions Hogrefe France. Figure reproduite avec l’aimable autorisation des
Éditions Hogrefe France7 ). DG= Divergente graphique, DV= divergente verbale, IG = Intégrative graphique, IV= intégrative verbale.
rendez-vous, pour que le psychologue ou psychiatre corrobore
leur diagnostic. En effet, lors du premier rendez-vous, les parents
peuvent vous expliquer qu’ils se sont rendus compte que leur
enfant présentait de nombreuses caractéristiques d’un enfant à
Haut Potentiel (avec souvent un léger biais de confirmation).
Après la passation du bilan (échelle d’intelligence et test de
personnalité), les résultats obtenus à l’échelle de Wechsler ne
vont pas toujours dans le sens des parents, ce qui peut être difficile à entendre. Toutefois, lors de l’entretien, lorsque les parents
parlent de leur enfant comme ayant une grande imagination,
débordant d’idées souvent dans la lune ou encore comme un
enfant ayant un profil plus artistique que scolaire, nous leur proposons en complément la passation de la batterie EPoC. Dans
certains cas, le Haut Potentiel Intellectuel n’est pas avéré mais
il l’est au niveau du Potentiel Créatif. Si on a calculé des corrélations entre le QI et les différents indices du test EPOC, nous
obtenons des corrélations positives mais plutôt faibles, qui corroborent les résultats des recherches précédentes menées chez
les adultes (ex. :[18]). Ainsi, une meilleure connaissance de ce
potentiel intellectuel et créatif, peut aider le jeune, notamment
au collège et au lycée pour l’aiguiller dans ses choix préprofessionnels.
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Un autre intérêt à l’utilisation de cette batterie est l’emploi
d’EPoC Social qui demande à l’enfant ou l’adolescent de se
positionner, de trouver des solutions pour résoudre des situations sociales. Ainsi, les réponses apportées par l’enfant ou
l’adolescent permettent au clinicien d’avoir une vision plus large
sur les habiletés sociales de l’enfant ou l’adolescent. Cela peut
apporter un nouvel éclairage aux compétences sociales d’un
patient, qu’il soit ou non à Haut Potentiel Intellectuel.
Enfin, cette batterie peut également être utilisée comme
source de médiation lors d’un suivi thérapeutique ou éducatif
pour aider l’enfant ou l’adolescent à développer ses capacités
créatives qui viendront enrichir son profil lors de son orientation
future. La pensée créative est en soi une ressource psychologique
à ne pas négliger dans tout travail clinique du développement
chez l’enfant et l’adolescent [35,36].
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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