Communication au colloque international « Les fournisseurs de l’armée. Du lit de camp au sous-marin nucléaire : objets, productions, techniques » organisé à l’Hôtel d’Assézat, Toulouse, 14 octobre 2023

Le secret et les mensonges autour des essais nucléaires menés en Polynésie et de leurs effets délétères n'ont cessé de nourrir suspicion et rancoeur à l'égard de l'État en raison des entorses faites à la démocratie dans les territoires issus de la colonisation. Pendant la IVe République, le programme français d'armement atomique reste secret. Si de Gaulle place l'atome militaire en pleine lumière, au centre de son projet

Avec Renaud Meltz (CNRS), communication au 6e Congrès bisannuel de l’AEGES organisé à l’Université de Bordeaux, 9 juin 2023

En 1971, la France dispose de la force de dissuasion planifiée au début de la Ve République : des Mirage IV dotés de bombes de 60 kt (quatre fois la puissance déployée à Hiroshima), des missiles sol-sol au plateau d’Albion (150 kt), ceux de la force océanique, embarqués dans des sous-marins, d’une puissance nominale de 500 kt. À quel prix ? Les 193 essais aériens puis souterrains, réalisés au Centre d’Expérimentation du Pacifique de 1966 à 1996 n’ont pas seulement impacté l’écosystème des atolls de Moruroa et Fangataufa où ils ont été tiré : ils ont bouleversé la vie de l’ensemble des Polynésiens, qu’ils aient été concernés, travailleurs et riverains des sites, par les retombées radioactives, ou que leur mode de vie ait été transformé par la gigantesque entreprise qui a mobilisé une centaine de milliers d’hommes et des milliards de francs, des Marquises à Bora-Bora. Écrire l’histoire d’un deuxième contact, après la « découverte » de la Polynésie, et les différentes facettes de cette rencontre entre deux mondes, voici l’ambition de ce livre.

Associating and Concealing. Nuclear Testing in French Polynesia, a “Second Contact” Between Secrecy and Lies In 1963, France created the Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP), where it carried out 193 tests over 30 years: 46 atmospheric explosions from 1966 to 1974, then 147 underground firings from 1975 to 1996. The choice of site, and then the management of the risk, were based on secrecy, in contradiction with the desire to involve the local population in the construction work and then in the conduct of the tests. The solitary development of a bomb, which strengthened France’s vocation to resist the imperialism of the main Cold War powers, did not prevent the tests from being conducted according to a colonial logic, which once again led to asymmetry of information. Secrecy becomes a form of lying by omission when the risks are concealed and preventive measures are not publicised. Unpredictable events led to urgent decisions to conceal the fallout from the first firing, setting in motion a lasting mechanism. Recently declassified resources document the debate on the advisability of evacuating the inhabitants of the Gambiers after the Aldébaran blast (2 July 1966): the decision-makers’ assessment of the respective risks induced by the fallout or an evacuation shows that the lie is based on an approach that is dissociated from the rationality of the players (the rationality of the experts, the irrational beliefs of the local residents and those carrying out the work). The durability of these representations can be questioned in the light of the current communication from CEA managers, who are still resisting the presidential injunction to declassify their archives.

Avant le voyage du président de la République en Polynésie française fin juillet 2021, des échanges ont eu lieu à Paris pour tenter d’aplanir les différends sur les conséquences sanitaires des 193 essais nucléaires français entre 1966 et 1996 dans l’archipel. La France et la Polynésie française ont tenté, jeudi 1er et vendredi 2 juillet, de tourner la page des 193 essais nucléaires réalisés entre 1966 et 1996 à Moruroa et Fangataufa, dans l’archipel des Tuamotu. Le président de la République, Emmanuel Macron, les ministres de la santé, de la mémoire et des outre-mer se sont exprimés à Paris face à la délégation Reko Tika (la parole droite, vraie, en paumotu, la langue des Tuamotu), emmenée par le président de la Polynésie française, Edouard Fritch. Tout est parti d’un livre, Toxique (ed. PUF, 15 euros, 192 pages), publié en mars. Cette sur les essais nucléaires français en Polynésie a été écrite par un chercheur, Sébastien Philippe, et un journaliste du média d’investigation Disclose, Tomas Statius. Selon eux, « la France connaissait précisément les risques et les impacts de ses essais (…) cachés sous le sceau du secret-défense, pendant plus de trente ans » et « ce mensonge originel empoisonne toujours le débat public en Polynésie ».Nous ne pouvons que souscrire aux commentaires d’Oscar Temaru qui réduisent la Table ronde sur les essais nucléaires en Polynésie à une opération de comm’. Les opposants aux essais nucléaires en Polynésie ont toujours en mémoire les conclusions de Toxique, livre témoignage sur les conséquences sanitaires et environnementales de ces 193 essais nucléaire français entre 1966 et 1996. Comment pourrait-il en être autrement quand le rapport de l’INSERM a confirmé la situation accablante de l’archipel des Gambiers, où la majorité des malades souffrant de maladies radio-induites se trouvent, conséquence des retombées radioactives des essais atomiques français, avec notamment plusieurs centaines d’enfants et d’adolescents victimes de cancers de la tyroïde ? Comment la ministre Darieussecq peut-elle proférer de telles contre-vérités et proclamer publiquement que la France n’a rien à se reprocher, ni rien à payer aux victimes des retombées radioactives ? Comment continuer ainsi dans le déni officiel ? Comment ne pas amender la Loi Morin pour permettre une meilleure équité et une prise en charge réelle des malades et des victimes de ces retombées radioactives ? Pourquoi cette danse du ventre « un pas en avant, deux pas en arrière » pour essayer de réduire au maximum si ce n’est interdire l’accès aux documents classés « Secret-Défense » nucléaires par leur déclassification permettant un libre accès aux historiens et scientifiques voulant établir une vérité objective sur les 193 essais nucléaires français entre 1966 et 1996 ? Comment ne pas comprendre que cette politique d’autruche est la pire quand il s’agira d’établir le legs historique de la France en Polynésie ? Que ce soit sous l’égide de l’ONU ou sous celle des historiens et scientifiques français, mais aussi et surtout, sous celle des habitants des Vanuatu, des Gambiers, des Marquises ? Comment ne pas comprendre leur projet d’autodétermination légitime, au vu des conséquences historiques tragiques, sanitaires, sociales et environnementales de la présence française et de sa colonisation de ces territoires ?

La variété des régimes d’’appropriation de l’espace par le CEP, en Polynésie française, mers cartographiées, terres occupées, cieux sillonnés par les KC 135 et scrutés par les radars, se combine avec l’inconnu de la durée du CEP. Cette incertitude dilate le Deuxième Contact en ouvrant un vaste éventail de possibles – et de réactions de la part des populations polynésiennes, qui ne sont pas négligées. Aux sciences et techniques des expérimentateurs, s’ajoute l’usage informel de l’ethnographique, discipline dont la scène originelle s’est largement jouée en Océanie. Les récits d’explorateurs de la Polynésie, au XVIIIe siècle, ont alimenté spéculations et disputes philosophiques et initié les premières enquêtes ethnographiques constitutives de la discipline anthropologique, elle-même auxiliaire de la domination européenne, l’Océanie étant à la fois une porte d’entrée dans la construction des sciences de l’homme et un laboratoire de son instrumentalisation.

Projection-débat « Voix.(es) d’Océanie. Environnement, culture, souveraineté » par visioconférence pour la 11e édition de « Regards comparés » de l’Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), Paris, 20 novembre 2023

This is a study of four families in the Peloponese from the Augustian period to the end of the second century AD. The studied families are : The Statilii, the Volussenni, the Pompeii and the Memmii. I presented here another view of theirs genealogies (new members added) and a suggestion about the dating process (several corrections). (text in french)