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Contribution à la topographie historique de la ville d'Epinal LES FOUIL.LES ARCHEOLOGIQUES DE LA PLACE DES VOSGES Charles KRAEMER 1- Stratigraphie A une profo ndeur variant d 'l mètre à 1,20 mèt re par rapport au niveau du sol actuel, un limon naturel ocre (n' VII) , résultat d'un colluvionnement post-glaciair e d' origine fluviale, surmonte une couche de plusieurs mètres d' épai sseur con stituée essentiellement de galets de petites dimensions, arrondis et mêlés à un sable très fin. Ce limon, dont le penda ge décline insensiblement de -0,78 mètre à l' extrémité sud de la place (près du pilier présumé du xnr' siècle) à 1,15 mètre sous le niveau du sol, dans l' angle est (à proximité du café du Commerce) et à -1,32 mètre au vois inage de la maison du Bailli, sert de socle à l'empilement des dépots anthropiques (niveau de fréquentati on, couches d ' occupati on et remblai s divers) décapés sur environ 0,40 mètre d' épai sseur pour les besoins du réam énagement de la place. La relative homogénéité de la stratigraphie et des séquences stratigraphiques observée sur l'en sembl e de la zone fouillé e est ponctuellement contredite par des bouleversement s provoqu ant des inversions de couches ou des lacunes qui seront mentionnées et décrite s au cas par cas. Partant du haut, la prem ière couche tassée et compacte, composée de sable et de chaux (n' 1), présente un profil subhorizontal dont l' épaisseur moyenne varie de 10 à 15 centimètres. Elle devait vrais emblablement servir de support à un pavage et a fourni un mobilier rare , essentiellement de la faïence blanche et quelques fragments de céramique vernissée vert. Sousjacente, une couche hétérogène (n' II) de couleur brungris, d'une quinzaine de centimètres d ' épaisseur, est mélée ponctuellement de lentilles de charbon de bois (reste de foyer) , de limon ocre, de gravier, de mortier et de sable. Elle renferme éga lement des tessons de faïence blanche , de céramique cuite en atmosphère oxyd ante ou réductrice, vernissé e ou non , des os, de nombreux clou s et d'autres fragments métalliques ainsi que trois monnaies dont deux, en billon, ont pu être identifiées et datées de la fin du xnf -début Xlv" siècle . Trois fosses, creusées ju squ 'au x couche s naturelle s, expliquent sans doute les inclu sions de limon et de gravier trouvées dan s les couches superficielles; deu x sont remplies de pierres inorganisées, de mortier de chaux et de terre brune (cf. coupe s n" 2 et 4) ; elles renferm ent un matériel céramique comparable à celu i déjà évoqué avec une prédominance de faïence, deux monn aies du xvnr' siècle et une de la période révoluti onnaire. La troisième fosse, au contraire, estoccup ée par un massif de maçonnerie dessinant un Emplacement de la fouille L'aménagement de la Place des Vosges à Epinal a permis , du 18 au 26 août 1989, une fouille de sauveta ge urgent 1. La situation de cette place , à quelque s dizaines de mètre s seulement du cours actuel de la Moselle , a condu it les historien s et érudits locaux à la considérer comme l'emplacement du marché. Fond é au cours du xe siècle , puis confirmé en 983 par l 'empereur Othon II en ces termes : et mercatum quem nostro licitu in loco qui spinal dicitur primus elevavit, ce lieu d'é changes et de comm erce deven ait ainsi, avec le château et le monastère, le troisième pôle qui conditionna l'épanou issement de la cité au moyen -âge . Un terra ssement profond et inopiné qui mit en relief un alignement de poteau x offrait ainsi l'occasion, outre de mesurer l'importance des accumulations anthrop iques, d' étayer cette hypoth èse en mettant au jour des structures nécessaires à cette activit é. Il devenait ar ailleurs possible de véri fier l' existence de la tour Poiron , voire d 'un « podium », symbole s de la vie publiqu e et pol itique de la cité, desquels, selon la documentation historique, étaient proclamées les sentence s et édits communaux. Les contraintes imposées par l' évoluti on des travaux conj ùguées à leur état d 'a vancem ent n' ont toutefois pas perm is de fouiller plus de 100 m 2. 1. Y ont participé : Christophe Douche. Fabienne Douche, Pierre Felet, J.-Jacques Gaffiot, Catherine Larri ère, J.-Marc Maucotel, J.-Louis Miclot, Pascale Kraemer, Eric Pommageot. Sylvie Thi ébaut, Rémy Th iriet. tous bénévo les et membres du Groupe de Recherche Archéologiqu e des Hautes-Vo sges. Qu'ils trouvent ici l' expression de mes remerci ements 125 EPINAL - PLACE AOUT NE DES VOSGES 1989 SW S' E 1 1 , 1 1 L- - - - - -- - -,.- - - --- - 0 ,5 0 -1,00 -- - -l, 5 0 Coupe n"! S'W _N' E N-W S- E - 0 ,50 - - - - 1, 0 0 - - -- Coupe n- \ Coupe n' 3 S-W -l, 5 0 ,,N'E ,, f , 1 セ MLN][イ M M MM MQ ⦅ i -_ -0 , 5 0 1 -- - -- Coupe n' 5 '" • n JIll ' 126 - 1, 0 0 carré d'environ 0,65 mètre de côté qui affleure à -0.73 m ètre. Sa , plus large, repose à -1.71 mètre, sur la couche naturelle de galets de Moselle qui lui assure une bonne assise (cf. coup e n" 2). La strate suivante (n" III), premi ère à être interrompue par ces différentes fosses, de couleur plus foncée que la précédente mais de composition quasi identique, est formée de plusieurs sous-couche s ; elle mesure environ 20 à 25 centimètres d'épaisseur et culmine entre -0.65 mètre et -0.70 mètre. Son niveau supérieur est ponctué de trous, sortes de nids de poule de profondeurs et de dimensions variables, le plus souvent comblé s par des recharges de sable (cf. coupe n" 3) ; c'est à proximité de l'un d'eu x et à la surface de cette couche qu 'un jeton de marchand allemand du XVIe-XVIIe siècle fut ramassé à -0.72 mètre . Plusieurs autres monnaies, dont deux fragments d'une même pièce distants de quelques mètre s, furent trouvées entre -0.81 et -0.87 mètre ; toute s furent émi ses à la fin du XIIIe .ou au début du XIve siècle tandis qu'une autre , exhumée à -0.92 mètre , date de la fin du XIve ou du début du xv" siècle. Parmi le mobilier archéologique, peu abondant toute fois, on dénombre plusieurs morceaux de poteries cuites en atmosphère réductrice en même temps que de la poterie rouge, vernis sée, munie ou non de décor s en relief. En trois endroits, dans et sur cette couche, ont été mis au jour, entre -0.73 et -0.79 mètre , des pierre s plates de grès, mal organis ées, qui pourraient néanmoins correspondre aux seuls vestiges d'un empierrement recouvrant partiellement ou en total ité la place. Sous cette couche, en même temp s que sous un remblai stérile de sable rose et jaunâtre, appar aît, entre -0.90 et -1.00 mètre, une terre noire et compacte, épais se tout au plus d'urie diza ine de centimètres. Elle repose, à l'est, sur une couche de limon dont le relief accidenté contraste avec la relative horizontalité du secteur occidental tandis qu 'à l'ouest, elle recouv re un niveau de petits galets parfaitement agencés, identifiable à un pava ge (cf. photo ci-dessous). Une terre grise en comble les interstices et recouvre simultanément, sous forme d 'un e fine pellicule, la surface plane de la nappe alluviale. La cun aire au centre du sondag e, cette strate est remplac ée par un « sol » de terre battue mêlée de tuilot pilé ou de grès concas sé. Les travaux de terrassement n'ont malheureusement pas permis de connaître l 'étendue de cette surface , limitée par plusieurs traces de poteaux qui lui semblent associés. Elle culmine au nive au des galets et semble avoir servi à étanchéifier le sommet de la couche sousjacente. Cette dern ière, compo sée de limon et de terre brune meuble (vase) rempli ssait , sur 25 centimètres, une dépre ssion d 'orientation sud-est/nord-ouest, taillée dan s la couche naturelle. L'ensemble a fourni un mobilier relat ivement peu abondant qui con siste essentiellement en esquilles d' os de faune, fragments de cuivre ou de bronze, tessons de céramique noire , grise ou beige et en monnaies ramassées sur le limon dont les dates d' émi ssion vont du début du xn r' siècle à la fin du xve ou début XVIe siècle . Il - Les poteaux Toute s ces strates, sauf les deux supérieures, présentent des perforations consécuti ves à l'installation de poteaux ou piquet s. Une étude comparative, qu i n' a malheureusement pas été possible pour l' ensemble des structures, 45 au total, a été réali sée à partir des trois critères stratigraphique, altimétrique et céramique. Plusieurs groupes sont ainsi apparus. Le premier, correspond aux poteaux 19, 22, 32 et 35 qui affleurent au sommet de la couch e III et la traversent ou qui contiennent des tessons de céramique comparables à ceux trouvés dans cette même couche. Le deu xième lot recen se les empreintes 13, 29, 30, 34, 40, 44 et 45 qui perforent uniquement la couche d 'oc cupation IV et qui culminent entre -0.86 mètre et -1.00 mètre ; le 13 et le 40, dont la particularité commune est de border la surface horizontale, d éterminent un axe sensiblement perpendiculaire à celui formé par les trous 29, 30, 44 et 45 . Le troisième ensemble 127 _ ""Î »> EPINAL- Place PLAN DES des Vosges - TROUS 1989 DE POTEAUX -- \ ---- »> .> \ ---- 1 19 セ a 1 2 ! ! , - _ ---- ---- 0 セ 15 o o CY eu o \ 7 2 \ 0 03 \ • 0 0 22 35 0 d3 43 1 1 1 1 1 , 5 1 026 1 d .3 2 4 00 セ 14 0 dr::P 3 y 1 1 BA SILI QUE \ 0 18 13 RUE LA 1 1 Il ln cr 80 DE 17 ---12 41 o »>: »> »> l 'J 00 1.........- .> .> - -" , 29. T RA NCHE E 0 2 8 27_ 1 _44 1 37 0 38 0 36 REALI SEE UNE PAR P ELLE M E CA N IQ UE FOU ILLE LA AVANT \ ----. 40 -- "- -- -__ c セ「 セM]L ← ャ ・ c T ⦅ イ ゥ セ ]M L N セ ⦅ MBL セ Nセ -:-.""U ._-- " セ _ regro upe esse ntielle men t les fantômes de poteaux masqu és par le lit de galets à l' ouest du sondage; il lui est par conséquent antérieur, sans qu 'il soit possible d' apporte r plus de précisions. Le dernier comprend les numéro s 3 1, 33 et 42 qui sont apparus, au raz de la couche naturelle, après décapage du mé lange de terre brune et de limon. III - Le matériel L 'ensemble des couches archéologiques a livré un matériel céra mique, métallique et ostéologique en quantité relativement faible. La céramique Particulièrement pe u abon dante , la poterie recueillie est à la fois fragme ntée et fragmentaire . Elle n 'a perm is aucune reconstitution de forme archéologiquement complète. Les strates supérieures (n" II et III), d'origine médiévale mais perturbées puis nivelées à l 'époque modern e, ren ferment un ensemble céramique hétérogène , représentatif de ces périodes. Il s'agit d 'un morce au de porcelaine exhum é d'une de s fosses, de fragments de faïence blanche ornés pour certai ns de moti fs bleutés , de deu x éclats de grès gris-beige dont un provient de la poche creusée dans les couches inférieure s jusqu' au limon (fig. 3, coupe 4), de tesson s de poteries cuites en atmosphère oxydante qui constituent le lot le plus important ; la pâte rouge, plutôt grossière, est souvent enduite à l'intérieur et/ou à l'extérieur d ' une glaçure brune, verte, orangée ou ocre, plu s ou moi ns couvra nte . Les formes remarquables, rares et très frag mentées , se résument à six fonds plats (fig. 7. 1) forma nt avec la panse un angle aigu ou à peine supérieur à 90°, huit lèvres de types différents (fig. 5.1) et un fragment d'a nse de section circ ulaire. Quant au décor, deux tessons sont munis d'une pastille en sur-impression tandis qu'un troisième est orné d'une ligne brisée finement incisée. Enfin, de la céramique grise, cuite en atm osphère réductrice, en quantité moin dre, form e néanm oins un lot significatif qui ne comporte aucun e trace visible de glaçure; quatre lèvres (fig. 5.2), deu x anses et deux fonds (fig. 7.2) constituent l'essentiel des fragments typique s. Une lèvre se distingue cependant de cet ense mble par sa pâte plus fine, sa patine lustrée et sa partie supérieure aplatie en « bandeau ». Deu x tuyaux de pipe, deux carreaux de poële, un pion et un dés à jo uer sont les seuls éléments qui se distinguent de la céramique domes tique plu s courante. Les couches inféri eures (n' IV, V et VI) ne comptent, pour l'essentiel, que des fragments de céramique noire, grise ou beige ; mais là encore, la rareté du mobilier ainsi que son caractère fragmenté et fragmentaire, n'ont perm is ni recons tituti on ni restitution graphique. Les formes spécifiques, peu nombreuses, se limitent à quelques lèvres génér alement éve rsées, quelqu es fond s plat s ou bomb és qui dessinent avec la panse un angle obtu et deux fragments d'anses plates . Parmi les cas particuliers ont été dénombrés un tesson de poterie cuite en atm osphère réductrice recouvert d 'u ne glaçure verte et, ponctuellement, quelques tesson s rouges, vernis ou non. Cette différence de contenu entre les couches supérieures et inférieures n 'est pas sans rapp eler le seuil céramique observé dan s les fouille s du châtea u d 'Epinal 2. Poteau n' 32 En résumé , ces différents groupes appartiennent à des période s successives d'occupation de la place des Vosges; aucun d' ent re eux pourt ant ne révèle l'e xistence d 'u ne constructio n délibérée, sauf peut-être le deu xième dont les éléments peuvent être mis en relatio n avec la couche tassée de terre mêlée de tuilot. Cet aspect anarchique est d ' autre part ampl ifié par la diversité des diamètres (de 3 à 32 cm) que l' on peut regrouper en trois caté gorie s : perche s, piquets' et poteaux évoquant des fonctions spécifi ques mais indéterminées. Quant aux poteaux qui, par manqu e d'inform ation s, n 'ent rent dans aucune de ces classes, seules des analy ses de leur rempli ssage aura ient permis, sinon d'établir des rela tions structurelles, d ' apporter au moin s des précision s d 'ordre chronologique. Quo i qu 'il en soit, compte-tenu des résultats précédents, il est peu prob able d' en trou ver qui soient antérieurs au xur' siècle. 2. 129 M. Bur, Fouilles au château d' Epinal, Anna/es de la Société d'Emulation du départem ent des Vosges. 1988. p. 36. Fig. 5. 1 - Lévrcs pro ven ant des co uc he supé rie ure ... : cui sson en atmo sphère ox ydante Oj ] iG Mセ M Mセ / \. MG Mセ Mイ M 1 \ \. セ ,- f 11 Il Fig . 6 - Lévures provenant des co uches inférieures : c uisso n en atmo sphère réductrice , - t---=1 1 11 o 5 cm '\ \ / 11 / \ \ Fig. 7.1 - Fond s prove na nt des couch es supéri eures cuisson en atm o sphère oxydante _ -=- . ... =1II.a:- '-.-_lN \\ Fig. 7.2 - Fonds provenant des couches -upc ric un..·",: cui- von en atmosp hère réduc trice \. - セL \. \. \. 130 \\ Il セ Les objets métalliques La faune Un rapide examen des os, matériel archéo logique le plus abondamm ent recueilli, permet d 'emblée de les assimile r à des déchets de boucherie provenant sans doute de ce lle située à proximité de la place et détruite au cours du xvur' siècle . Rares sont en effet les os qui évoq uent des morcea ux de choix, mais des phalanges, des extrémités dystales et proximales d'os long s (têtes fémora les), des os craniens, y compris des mandibules et des maxilaires, compo sent l'essentiel du lot. Nombre d' entre eux présentent d'ai lleurs des traces de coupere t ou de déchamement. L' examen des ces esquilles a perm is de détermi ner les espèces an imales domes tiques qui, en partie au moins, entraie nt alors dans l' alimentation. Outre un âne et un cheval, respectivement observés par un sabot et deux phalanges en connex ion anatomique, bovidés , capridés et porcs représe ntent l'essentiel de la consommatio n carnée. En plus de quelqu es nodules ferreux, probables résidus de fonderie, ont été relevées de nombreuses et infimes particu les de bronze dont l' association à du charb on de bois épar s suggère l' exis tence d' un atelier de bronzier. Cette activité reste toutefois difficile à dater compte-tenu de l' ampl eur chronologique, de la fin du XIIIe au XV Ie siècle , de la couche dans laquell e ce matériel fut préle vé. La fouille a par ailleurs permis de mettre au jour quantité d'obj ets métalliques , en fer ou en bronze, ainsi que de nombr euses monnaie s. Parmi les premiers, non identifiables pour la plupart en raison de la gangue d 'oxydation qui les enrobe, se disti nguent essentiellement, outre des clous de fer, quelques boucles de ceinture, avec ou sans ardillon, ainsi que des éléme nts de paru re, le plus remarquable étant une petite charnière finement ciselée (long ueur 4 cm). Aucun d 'en tre eux n'apporte cependant de précision sur la chronologie et la durée de fréquentation de la Place des Vosges . IV - Les acquis de la fouille En bref, si le matériel archéologique ne permet en aucune manière de conclure à la fréquentation de cet espace anté rieurement au XII{ siècle, l' analyse stratigraphique autorise quelque s rema rques complémentaires. L' absence d'accumulation anthropique peut être la consé quence d'u ne activité hum aine de moindre importance du XII{ au XVIe siècle; mais elle pourrait être due aussi, compte-tenu de la proximité de la Mose lle, à un balayage systéma tique de cette zone, soumise régulièreme nt aux crues de la rivière et favorisant de la sorte un remplissage limoneu x des cre ux observés à la surface de la couche nature lle. A ces deux conjec tures, qui ne sont d'a illeurs pas incompatibles, s'ajoute ce lle d'un nivellement intenti onnel , détruisant les couches antérieures jusqu 'au limon tout en préservant un mobilier archéologique résiduel et des empreintes de poteaux. Cette opération, qui pourrait avoir été entrepri se au XVIe siècle, aurait permi s la mise en œuvre, sur un niveau ferme et horizontal , d 'un empierrement de petit s galets dont la fonction reste encore à définir. Situé dans l' axe de la rue de la Basilique, ce revêtement en était peut-être le prolongeme nt. Mais on peut raisonnablement supp pose r qu 'il servait à matérialiser des espaces entretenus et reservés à l'implantation d 'étaux, participant ainsi à l' organ isation et à la gestion du commerce spinalien, particulièrement florissant de 1560 à 1630 3. Mis à part les couches de sable stériles, les strates supérieures II et III semblent appartenir , au vu du mobilier notamment monétaire qu' elles renferment, à des niveaux d 'occupation méd iévale, pert urbés puis reman iés en remblai de nivellement. Cett e notion de remblai est d' ailleur s sensible pour la couche III laquelle a livré, à plusieur s mètres de distance, deu x fragments d'une même monnaie émise sous Philippe le Bel. Ce surhaussement délibéré du niveau de fréquentation, avec des apports de terre dont l'origine méconnue n' exclut pas celle de la Place des Vosges ou de son voisinage , s' est opéré en deux étapes, au cours du XVIIe siècle ou, au plus tôt à la fin du XV{ puis, postérieurement au comblement des fosses, vers la fin du XVIIIe siècle, ce qu'atteste une monn aie révolutionna ire. Un dernier reman iement, avant ceux connu s du xx" siècle, conce rne la réali sation du véritable premie r pavage suggéré par la couche de sable fin et de chaux qui lui serva it d ' assise. Les monnaies Les vingt-cinq monnaies y con tribuent mieux. Recueilli es dans tous les ho rizons stratigraphiques, elles restent glob alement conce ntrées autour de deux niveaux, dans la couche III, entre - 0,80 et -0,90 mètre, ainsi que sous les galets et, plus généra lement, sur le limon. Leur nettoyage , impossi ble pour huit d' entre elles en raison de corro sion trop import ante, a permi s de déterm iner leur période d 'émi ssion qui s'éc helo nne du début du xm" à la fin du xvnr' siècle. Parmi les cinq monnaies trouvées sur le limon, trois provie nnent de la parti e ouest du sondage après démontage du lit de galets. La plus ancienne est attribuée à Hugues IV, duc de Bourgogne de 1218 à 1272 ; deu x autres sont des anonymes de l' archevêché de Vienne, en Provence, et de celui de Besançon, datées respectiv eme nt du XIVe et du début du xv" siècle. Les autres, frappées en Lorrain e, furent émises par Mathieu de Bitche , entr e 1210 et 1217, et par Ferry III, entre 1251 et 1260. Dans les couches supérieures, les monnaies exhumées se répartissent en deu x groupes. Un atteste leur origine médiév ale tandis que l'autre préci se leur utilisation en couche de nivellement à l'Epoque Moderne. Dans ce dernier cas, outre un jeton de marchand allemand des XVIe -XVII e siècles, toutes les pièces furen t frappées au cours du XVIIf siècle. Il s' agit d 'un liard émi s entre 17 10 et 17 17 par le comte de Montb éliard , Léopold Eberard, d 'une monn aie du type « Helier » de 1780 et d'u n centime du Directoire. Des huit autres, sept prov iennent de Philippe IV le Bel, roi de France de 1285 à 1314 tand is qu 'une porte l' embl ème du duc de Lorraine , Charles II (1390-1431). Elle s confirme nt, s' il en était beso in, l'import ance , au XIVe siècle, des relatio ns commerciales entre Epinal et le royaume. 3. 131 J.-M. Dumont. Le trafic spi nalien de 1560 à 1630. 10.r Co ngrès National des Sociétés Sa vantes. Nancy-M etz. 1978. Philol . et hist.. p. 285-286 dicitur Spinal, c'est selon toute vraisemblance dans J'enceinte primitive, fortifiée ou non, du noyau pré-urbain, et plus spécifiquement entre la basilique et le château qu 'i l nous le faut chercher. L'étude du parcellaire spinalien révèle, à l'e mplacement occupé dès 1632 par le couvent des Annonciades, un espace susceptible de remplir cette fonction. La proximité de la halle médiévale renforce d'ailleurs cette hypothèse. Reste le pilier présumé du x m" siècle pour lequel la datation n'a pu être confortée par le sondage pratiqué à sa base. Sa fondation repose sous 30 à 40 centimètres de couches bouleversées et sa construction, ex nihilo, est attestée par l'absence de reprise en maçonnerie. Un seul objet découvert, une lampe à huile d 'un usage courant du Moyen-Age à l' Epoque Moderne, ne permet aucune datation satisfaisante. Quant aux textes, dont deux feraient allusion à de quelconques arcades, leur relecture conduit à d' autres interprétations. Le plus ancien mentionne en effet la vente, en 1219 セ L de maisons situ ées . près larvot » qu ' il convient de situer, en raison du cimetière auquel elles sont associées, du côté de l 'actuelle place de l' Atre. Rien ne prouve d 'ailleurs l'e xistence de telles structures. malgré l'étymologie de ce mot, dont l' acceptation a évolué en pass age couvert, escalier voûté , embrasure , enfonce ment ou niche 6. La deuxième citation, de 1276 7, devient, quant à elle caduque si l' on redonne tout son sens au mot « arve », c'e st-à-dire celui de « champ » 8. C'est donc sur d 'autres sources qu 'il faudra s' appuyer pour démont rer la présence, au XIIIe siècle, d'arcades sur la place des Vosges, l' archéologie étant muette sur ce point et les archives historiques connues ne résistant pas à la critiquer. Quoi qu 'il en soit, il paraît aujourd 'hui évident qu 'u ne meilleure connaissance de la ville et de sa topograph ie passe par une réelle poursuite de la recherche archéologique, complément indispensable de l'app roche historique. v - Conclusion Pour une topographie historique L'absence des substructures supposées de la tour Poiron ou de l'escalier monumental, qu 'é voque à plusieurs reprises la documentation historique, tendait à reléguer au rang de l 'anecdote ce sondage urgent souhaité voire cautionné par les édiles municipaux. Il s'inscrit cependant dans la philosophie générale de ce type d 'interventions lesquelles, limitées dans leur étendue et dans leur délai d'e xécution, ont pour objet essentiel de mesurer l'importance et la nature d 'un site en recueillant le plus grand nombre d' informatio ns, même fragmentaires. L'analyse de cette fouille permit ainsi d 'observer que l'actuelle place des Vosges résulte indubitablement d'une conquête des berges inondable s et marécageuses de la Moselle au cours du XIIIe siècle. Elle confirme en cela les quelques textes, certes laconiques, qui attribuent l'extension de l'enceinte urbaine à l'évêque de Metz, Jacques de Lorraine et invite à placer ailleurs l'i mplantatio n du premier marché de la ville. S'appuyant sur l' étude de B. Houot 4 et tenant compte d 'un document du xe siècle qui situe, on l'a vu, ce marché in loco qui 4. 1 - Tour le voue, 2 - Basilique, 3 - Cloître , 4 - Couvent des Annonciades, 5 - Ancienne Emplacement de l'an cienne boucheri e, 7 - Place des Vosges 5. - e A.D. Vosges G 106, 2 lay., n' 4 : le pape Honoriu s III confirme la donation faite au セ ct'Epinal de maisons situées « près larvot » ct sur l' âtre. 6. 7. B. Houot, Fondation et origine de la ville d 'Epinal, Bulletin de la Société lorraine des Etudes locales. 1976. 1 et 2, p. 7-8 ; id' . ASEV, 1983. 8. 132 ".. セ Godefroy, Dictionnaire d'an cien f rançais A.D. M.-M., B 676, f 47v-48 r : Etevig non et Beatrisette sa fame ont retenu en lor partie les deeI. maisons aux arves et dix sols et trois perdrix... id Godefroy Monna ies lorrain es Catalogue des monnaies Etude réalisée par Ch, Douche (1) N' : 26 Type : Denie r Autor ité: Mathieu de Bitche, évêque de Toul de 119ï à D T Da le : 1210 - 1217 Ate lier: Château de Clermont? Légend e Dr oit: MA HI US écrit à rebourg dans DU gréœës Champ d roit: Edifice crénelé surmont é d 'un toit Champ revers: Croix ancrée dans un grénetis ct C'3IUCDlée de o._"" " ïb Mé ta l : Argent Dia mèt re: 15,0 - 15,2 t!f Référen ce : Quintard, R éflextions sur des deniers lou/où t2s n" 4 ; Heinrich, une découv erte monétaire à TouL l %!. i'- 1 -_- _ セ 31:5 i セ Co mme nta ire : Cette monnai e a pu être frappée au セ dans lequel Mathieu s' était retiré après sa déposition en 1210 ' Ionnaies françaises y Z セ T ype : Double Parisis Auto r ité : Philippe IV le Bel (1285-131 4) Da te : 1295- 1303 Atelier : Inconnu Lége nde Dr oit: + PHIL P(PUS REX) entre deux grénetis champ dr oit : Croix fleu ronnée Léa ende re ver s: ( + MO NETA) DUPLEX (0 long) entre deux gréneti s Champ r ever s: REG(A / LIS) en deux lignes sous une fleu r de lis "'éta l : Bas billon Dia m ètre : 17,8 - 18,7 Référ ence : Lafa urie, Les monnaies des rois de Fran ce , 195 1, 1, p. 32 Commenta ir e : Sur cet exe mplaire il manquerait le "1" de PHIL"I"PPUS ac....: Y : 8, 10 et 30 Type: Double tournois Autori té : Philippe IV le Bel (1285 -13 14) Date : n' 8 : 1295 ; n' 10 : 1295·1303 ; n' 30 : 1303 At elier : Inconnu Lég ende droit : + PHILI PPUS REX entre deux grénetis Cha m p dr oit : Cro ix pattée cantonnée d' une fleur de lis dans le 2' quad rant (n' 8) ou dans le 4' (n' 10) Lég ende re ver s : + MON . DUPLEX . REGAL (0 long) ent re deux grénetis Cham p reve rs: Faîte de châtel tourn ois avec la base annelée, le sommet est accosté de deux fleurs de lis -' l éta l : Billon Dia mètre : 19,0 - 2 1,5 Référe nce: Lafauri e, Les monnaies des rois de France, 195 1, I, p. 33, n' 234 Com menta ir e : La monnaie n" 8 était brisée en deux fragment s qui furent retouv és à plus ieurs mètres ct' intervalle N' : 28 Ty pe : Denier Auto ri té : Ferri Ill, duc de Lo rraine (125 1-1303) Date: 125 1-1260 Ate lier: Nancy Légende Droit : FER .R..1. dans un grénetis Champ droit : Ecu de Lorraine Cha mp revers : NAN / CEl dans les cant ons supérieurs 、 une fleur de lis dans chacun des cantons inférieurs M étal : Argent Diamètre : 14,5 - 15,6 Référ ence: de Sa ulcy, Recherches sur les monnai es des '"'-'=_ _ "- c:o.... '*'a ,ilS"';;""'''''. :-;': 9 Type : Denier tournois Zi ゥ]Mセ⦅ Z。N[ セ N' :ll T ype : Qua rt de gros Autorité : Charles II , d uc de Lorra ine (1390 - QセS 1) Dat e : 1390 - 143 1 Ate lier: Nancy o I ] 、oャョ セ Légende Droit: (KARO LUS .) DUX . Hl oth Cha mp droit : Cavalier arme à gauche portant DU hea=>e . . . 0=Lég ende rev ers : (MON * TA.FC • A.IN.N * a Iセ ceQ • セ 。Z B セ Zic N Cha mp r ever s : Croix fleuronnée au coeur en losange, c:hz;:.;.6: N セ セ .... :IIi""'..... ""';z, . .. chaque canton Méta l: Argent Diamètre : 20,0 R éférence : Ch. Robert, D escription de collec rion. 1886. DI. 3:' ES' セ de Saulcy, Recherches sur les monnaies de s duc s ィゥセ Autor ité : Philippe IV le Bel, roi de France (1285-1314) Da te: 1307 Atelier : Inconnu Légende Droit : + PHILIPPUS REX entre deux grénetis Cha m p droit: Cro ix patt ée Lég ende re vers: + TURONUS CIVIS (0 rond) dans un gréne tis Champ revers : Châtel tournois M êtal . Argent Diamè tre : 18,5-19 ,7 Référence : Lafaurie, id ., p. 32, n' 228 N': 13et 14 T yp e : Maille tourno is Auto r ité: Philippe le Bel, roi de France (1285-1314) Date : 1307 Atelier : Inconnu Lége nde Dr oit : + PHIL(IPPUS REX) entre deux grénetis Cha m p droit : Croix pattée Lég ende r evers : (+ TU )RONU (US CIVIS) (0 rond) dans un grén eis C ham p rev ers : Châtel tournois M éta l: billon Dia mè t re : 11,0 - Q U セ P Référ ence: Lafauri e, id ., p. 32, n' 229 * _ 0 Autr es Monna ies N': 18 Ty pe: Denier Autorité: Hugues IV duc de Bourgogne (12 18 - 1272) Date: 1218 - 1272 Atelier: Dijon Lége nde droit : + UGO DU X BURG: DIE entre <lem: セ Cha mp droit: Anille accostée à droite d'un astre et à gmc:be ë X:IimE Légende revers : + Dl VIONENSIS entre deux grènetis C ha mp revers : Croix pattée. cantonnée d 'un besantam: -:: el? Métal: Argent Diamètre: 15,0 - 16,7 Référence : Poey d 'A vant, Monna ies f éodales de France. 1- , nI. CXXX, n' 19 N' : 23 Ty pe : Un centime Autorité : Directoire Dat e : 1797-1799 Atelier : Paris Lég ende dr-olt : REPUBLI QUE FRACA ISE Cham p dr oit: Tête de la répub lique avec un bonne t phrygie n Lég ende rev er s: UN / CENTIME / L ' AN..! A inscrit sur quatre ligne s dans un grénetis Métal: Bronze Diamètre: 18,0 - 18,4 Référence: V. Gadoury , Monn aies fran çaises , 1933, p. 48 , n' 24 (1) ᄋセ ::10: , ....... Les clichés sont dus à R. GERAR D du Labo. photo de l' Université de Nancy II. 133 N' : 2 Type: Jeton de marchand Autor ité: Marchand allemand Date : XVI e ou xvnCsiècle Atelier : Nuremberg Légende Droit: ' GOT • ALEIN • N' : 29 Typ e : Denier Autorité: Anonyme de l'archevêché de Vienne (Provence) Date : XIVe siècle Atelier: Vienne Légende droit: + S. M. VIENNA entre deux grénetis C ha m p droit : tête de saint Maurice de profil gauche Légende rever s : MAXIMA GALL entre deux gréneti s IIIHKE • SEL entre deux grénetis Cha m p droit: Globe crucigère au centre Légende revers : *WOVLF LAUFER IN NURBE R entre deux grénetis Cham p revers: Croix à trois branches fleurdelisées , cantonn ée de troi s co uronnes Métal : Bronze Diam ètre : 20,8 - 22,8 Cha m p re ver s: Croix cantonnée de quatre besants Métal: Billon Diam ètr e : 16,0 - 17,0 Référence: Poey d 'Avant, id., 1862, Ill , p. 44, n 4826, (pl. CV!, n' 15) N' : 19 Type : Liard Autor ité: Léopold Eberard, comte de Montbéliard (1690 - 1723) Date : 1710 - 1717 Atelier : Montbéliard Légende Droit : D.G.L.E.D.W.M dans un grénetis Cham p droit: Buste à longs cheve ux de profil à droi te Légende revers: Cham p revers: * 1LIARD 1DEMa NT 1BELlARD 117.. sur cinq lignes Mé ta l : Bronze Diamètre : 20,7 - 21,0 Référence : Poey d 'Avant, Id .. 1862, Ill, p. 155, n' 5455 (pl. CXXV, n' 13) N': 17 Type: Denier Autorité : Anonyme de l'archevêché de Be sançon Date : Fin xv" - déb. XVIe Atelier : Besançon Légende Dro it : (PT)NOMAR(TIR) (0 rond) C ha mp droi t : Main bénissant très stylisée Légende revers : + (BI)SUNT1UM entre deux grénetis Champ re vers: Croix pattée Métal : Argent . Diam ètre : 15,4 - 16,2 Référence : Poey d 'Avan t, id., 1862, Ill , p. 138, n' 5379, (pl. cxxn, n' 10) Comme nta ire : Les denier s à 1'0 long ont du être frappés aux XIV e et XV C siècle; les denie rs à 1'0 rond sont d 'une fabrication postérieure ; en 1534, les prélats sont dépouillés de leurs droits monétaires N: 6 Ty pe: Helier Date : 1781 Légend e droit : Néant Cha mp droit : Armoirie Légend e revers: Néant Cha mp r ever s: • j • 1H HI HELL ER 117811* 1sur cinq lignes Métal : Bronze Diam ètr e : 16,8-17,0 134