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Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
31 mai matin
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie :
une réinterprétation
Pascal Bertran
Inrap, 156 avenue Jean Jaurès, 33600 Pessac (pascal.bertran@inrap.fr), Université de Bordeaux, CNRS-UMR 5199 « PACEA », Avenue des
Facultés, 33405 Talence cedex
1. Introduction
- Ces accumulations sont très dilatées et sont donc
susceptibles d’enregistrer de manière détaillée les
variations paléoenvironnementales au cours de certaines
périodes, en particulier des phases glaciaires. De telles
accumulations n’ont que peu d’équivalents en milieu
continental (par exemple les loess).
Les accumulations détritiques en porche de grottes et
abris-sous-roche ont depuis longtemps focalisé l’attention
des quaternaristes et des préhistoriens. Depuis le début
du siècle dernier, ces dépôts et les niveaux archéologiques
associés ont progressivement permis d’établir la
succession des cultures paléolithiques en France et
d’obtenir des données sur les paléoenvironnements
physiques et biologiques contemporains des derniers
cycles climatiques pléistocènes. L’intérêt porté à ces
séquences s’est cependant quelque peu réduit dans
les dernières décennies parallèlement aux progrès
réalisés dans l’étude d’autres types d’enregistrements
paléoclimatiques, notamment les archives marines,
lacustres et glaciaires ainsi que les spéléothèmes, qui se
sont révélés être à la fois plus continus, plus à même
de livrer des données paléoclimatiques quantiiées et
offrant souvent une meilleure résolution chronologique,
mais aussi avec la multiplication des découvertes de sites
paléolithiques de plein air, plus simples à appréhender
que les sites multi-occupations en porche de grottes
et d’abris et dans lesquels les problèmes d’ordre
taphonomique sont souvent moins complexes. Si
l’exploitation de ces autres archives a été très fructueuse
et a relégué l’étude des séquences en porche de grottes
et d’abris à l’arrière-plan, celle-ci reste néanmoins d’un
grand intérêt. Cet intérêt tient principalement aux points
suivants :
- Les archives marines et glaciaires n’apportent pas de
données précises sur les milieux physiques continentaux
et le recours à l’étude des sédiments reste le meilleur
moyen de caractériser les paléoenvironnements
terrestres.
- Le statut et la fonction des sites archéologiques en
porche de grottes et d’abris ne sont pas nécessairement
identiques à ceux des sites de plein air, avec lesquels ils
ont peut-être été occupés en alternance. L’analyse de ces
sites reste donc nécessaire pour appréhender de façon
globale les sociétés paléolithiques.
L’une des dificultés majeures inhérente à l’analyse
des dépôts en porche de grottes et d’abris réside
dans la complexité des processus sédimentaires qui
interviennent dans leur édiication et des facteurs qui
contrôlent ces processus. Néanmoins, la compréhension
de ces mécanismes a récemment beaucoup progressé
grâce à de nombreux travaux sur la dynamique des
talus dans les milieux actifs (Bertran et al., 2004).
L’abri de la Ferrassie, où les coupes ouvertes dans les
Figure 1 : Localisation du site de la Ferrassie.
Périgueux
0°
e
r
zè
l'Isle
Bordeaux
la
Vé
Paris
Laugerie-Haute
la Dord
ogne
la Ferrassie
Abri Pataud
Bergerac
45°
La Ferrassie
50 km
100 km
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie : une réinterprétation 65
A l’occasion des fouilles de Delporte, une première
étude stratigraphique et sédimentologique a été
entreprise par Laville (1975, 1984). Ces travaux ont
été par la suite repris par Texier (2004), qui a mis
en doute la validité des variations paléoclimatiques
décrites par son prédécesseur, établies sur les variations
de la granularité des dépôts. Dans ce nouveau schéma,
qui fait plus largement référence aux données sur la
dynamique sédimentaire des talus dans les milieux
actifs, les variations de faciès observés sont interprétées
comme de simples luctuations latérales des zones
de sédimentation dans l’abri, sans signiication
paléoclimatique particulière. Pour lever les points
d’interrogation soulevés par ces interprétations
contradictoires, de nouvelles analyses ont été réalisées
et permettent ici de proposer une réinterprétation des
dépôts du point de vue de la dynamique sédimentaire,
des caractères des paléosols et de la chronologie.
4,5 m supérieurs du talus détritique donnent accès aux
événements qui se sont produits pendant une vingtaine
de millénaires à la in du stade isotopique marin (SIM)
3 et au début du SIM 2, a été réinterprété à la lumière
de ces données, à l’échelle macro- et microscopique
(micromorphologie). Parallèlement, l’altération des
dépôts et la pédogenèse ont également fait l’objet de
nouvelles investigations à travers l’étude des argiles,
de la susceptibilité magnétique, des microfaciès et de
la composition de la matière organique (Bertran et
al., 2008). Cette présentation reprend les conclusions
obtenues à l’occasion de cette étude.
L’abri de la Ferrassie est localisé sur la commune de
Savignac-de-Miremont, à 3,5 km au nord de la ville
du Bugue (Dordogne), dans un petit vallon sec afluent
de la Vézère (fig. 1). Découvert à la in du XIXe siècle à
l’occasion de la construction d’une route, ce site est un
gisement clé pour la préhistoire paléolithique. C’est en
effet sur lui que s’appuie la stratigraphie des cultures
du Paléolithique supérieur ancien (Châtelperronien,
Aurignacien, Gravettien) depuis les travaux de Peyrony
(1934) et Delporte et al. (1984). Il a également livré huit
individus néandertaliens en sépultures. L’abri est ouvert
au pied d’une paroi calcaire d’âge Crétacé supérieur
(Coniacien) et résulte probablement du recoupement
d’une ancienne cavité karstique suite à l’enfoncement du
réseau hydrographique pendant le Pléistocène (Texier,
2004).
2. Stratigraphie
Deux principaux types de faciès sont observables
(Texier, 2004). Ils comprennent (fig. 2 et 3) :
1) faciès A : dépôts caillouteux stratiiés (photo 1). Ces
dépôts, qui atteignent 2,8 m d’épaisseur et forment la
partie médiane de la séquence (unité 2), sont constitués
par une alternance de lits caillouteux semi-ouverts, qui
La Ferrassie - Coupe longitudinale
B4
unité 1
B6
B1
B2
C1
1m
D2a
B3
B5
unité 2
D2c
D2e
C4
C2
D2a
D2γ
E1
D2ε
E1b
E1d
G0
G1
G1
G2a
unité 3
H
I1
H
I1
I1
J
J
K3
L1e
L
L3a
L3b
L2c
Figure 2 : Stratigraphie schématique de la coupe
longitudinale, d’après Delporte (1984) et Texier
(2004) modifié.
couche détritique ouverte
couche à support matriciel
blocs à support clastique
sables laminés
horizon A humique
horizon B cambique
accumulation secondaire de carbonates
D2a couche archéologique (Delporte, 1984)
66
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
Figure 3 : Stratigraphie schématique de la coupe
frontale.
.
La Ferrassie - Coupe frontale
1m
C2
C3
D1
D2
E1
E4
F3
F3
G1
H1
G3
I2
H2
I1
J
K2front
K3g
K4a
1
3
Photo 1 : Vue des dépôts de versant stratifiés (faciès A).
Photo 2 : Vue des alternances de niveaux détritiques et d’horizons
humifères plus ou moins décarbonatés (faciès B).
2
4
Photo 3 : Structure lamellaire à coiffes dans le niveau L3b. La
largeur de la photo fait 5 mm.
Photo 4 : Nodule carbonaté à porosité racinaire remanié dans le
niveau J. La largeur de la photo fait environ 5 mm.
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie : une réinterprétation 67
4.1. Faciès A
L’organisation des dépôts indique clairement qu’ils
ne proviennent pas de la simple éboulisation de la
paroi mais qu’ils ont été redistribués par des processus
de versant au fur et à mesure de leur accumulation.
Parmi tous les modèles de stratiication des dépôts
de versant connus, celui des coulées de soliluxion à
front pierreux décrit par Francou (1988) et Bertran et
alii (1995) permet le mieux d’expliquer les principales
caractéristiques sédimentologiques du faciès A observé à
la Ferrassie (fig. 4). La soliluxion est une lente reptation
du sol typique des milieux périglaciaires, qui affecte les
sols sur quelques dizaines de centimètres d’épaisseur.
Elle est provoquée par les alternances de gonlement
et d’affaissement du sol liés à la cristallisation de glace
en lentilles (cryoreptation), par le soulèvement et la
reptation des graviers dus à la formation d’aiguilles
de glace en surface (pipkrakes), ainsi que par les
déformations liées à la sursaturation en eau du sol
au dégel (géliluxion) (Washburn 1979, Harris et al.
1997). La soliluxion donne naissance à des coulées
ou des banquettes qui progressent sur les versants
à une vitesse de quelques centimètres par an. Dans
les milieux faiblement végétalisés, la cryoexpulsion,
c’est-à-dire l’éjection progressive des cailloux vers la
surface par le gel, conduit à la formation de fronts
pierreux et de pavages à la surface des coulées (photo 5).
L’empilement de coulées successives génère des dépôts
stratiiés, constitués par une alternance de couches
diamictiques, correspondant au cœur des coulées, et
de couches caillouteuses ouvertes qui représentent les
pavages et les fronts enfouis (photo 6). Les principales
igures sédimentaires caractéristiques de ces mécanismes
sont un débit en feuillets des lits riches en matrice
(structure lamellaire), qui témoigne de la cristallisation
1m
mouvement vers l'aval
1 à 5 cm.an -1
1
2) faciès B : blocs hétérométriques, à support clastique
ou semi-ouverts, mal organisés, brun vif (7,5YR 5/6),
avec des intercalations sableuses triées, localement
à structure entrecroisée. Ces dépôts apparaissent au
sommet de la stratigraphie (unité 1), où ils forment
une couche d’extension très limitée marquant la in du
colmatage de l’abri (couche archéologique A, Delporte
et al., 1984), et à la base (unité 3), où ils atteignent près
de 5 m de puissance maximale (couches archéologiques
D à L). D’une manière générale, l’abondance de la
matrice croît de la partie centrale du talus vers la paroi.
Dans l’unité basale, des lits riches en matrice, plus
ou moins humifères, de couleur brun foncé (7,5YR
3/3) à gris sombre (5YR 4/1) ou brun rouge (5YR
4/6) s’interstratiient dans les matériaux grossiers
(photo 2). Ces lits ont des limites généralement nettes
et sont affectés par des déformations (étirement et
dédoublement sur la pente du talus, involutions dans
la partie peu pentue proche de la paroi). Leur teinte
tend également à s’assombrir à proximité de la paroi. A
l’échelle de la lame mince, une structure lamellaire est
observable dans l’ensemble des échantillons (photo 3).
Des vestiges d’une porosité d’origine biologique sont
parfois conservés à l’intérieur de nodules carbonatés
(photo 4). Les traces d’altération des débris calcaires et
la décarbonatation de la matrice sont plus importantes
dans les niveaux humifères que dans les couches
détritiques. La susceptibilité magnétique et les cortèges
argileux, caractérisés par des interstratiiés riches
en smectite et une décroissance de la proportion de
mica, plaident également en faveur d’une altération
signiicative.
4. Interprétation : dynamique sédimentaire et
pédogenèse
m
présentent fréquemment un granoclassement vertical
normal ou inverse et localement une imbrication des
débris, et de lits diamictiques à support clastique ou
matriciel, de couleur brun vif (7,5YR 5/8). Les cailloux
montrent une orientation préférentielle de leur grand
axe dans la pente. Une structure lamellaire et des coiffes
limoneuses sur les graviers sont bien visibles dans les
niveaux diamictiques. L’épaisseur des lits est de 10 à 35
cm et leur inclinaison varie entre 18 et 22°. A proximité
de la paroi, les lits riches en matrice disparaissent et
ce faciès passe à un matériel caillouteux non organisé,
avec localement des lentilles sablo-graveleuse triées,
concaves vers le haut. Des revêtements d’argile
limoneuse brun rouge colmatent partiellement les vides,
notamment dans les niveaux pauvres en matrice. Ce
faciès correspond aux couches archéologiques B et C de
Delporte et al. (1984). Il est également caractérisé par
une susceptibilité magnétique et des cortèges argileux
(mica, interstratiiés riches en illite, kaolinite) proches de
celui du calcaire encaissant qui suggèrent une altération
faible des débris.
couche à support mariciel
Figure 4 : Bloc-diagramme de dépôts stratifiés édifiés par
des coulées de solifluxion à front pierreux.
couche grossière ouverte
68
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
Photo 5 : Coulées de solifluxion à front pierreux près de la Brèche de Roland (Pyrénées), altitude 2800 m.
Photo 6 : Coupe dans une coulée de solifluxion à front pierreux active (Brèche de Roland) montrant la stratification des dépôts.
de glace en lentilles dans le sol (Van Vliet-Lanoë, 1985),
une stratiication relativement continue en coupe
longitudinale, la présence de granoclassements verticaux
bien développés dans les lits caillouteux ouverts, soit
de type inverse (les cailloux les plus grossiers sont
situés au sommet du lit), en liaison avec l’effet de tamis
qui se produit dans les pavages, soit de type normal,
provenant de l’enfouissement des fronts des coulées, et
des évidences de transferts importants de limons dans
les dépôts (coiffes sur les graviers), liés aux percolations
importantes qui se produisent au cours de la fonte des
neiges et de la glace du sol. La disposition imbriquée
des cailloux et l’orientation préférentielle de leur grand
axe dans la pente (fabrique linéaire) sont également
caractéristiques de l’action de la soliluxion (Van Steijn
et al., 1995).
Le passage latéral entre les dépôts stratiiés et les dépôts
caillouteux mal organisés visibles contre la paroi
rocheuse s’interprète comme le résultat du blocage des
fronts grossiers des coulées et de leur lavage par les
percolations. Dans les milieux actifs, des accumulations
similaires, essentiellement caillouteuses et mal stratiiées,
sont observées dans la partie aval de certains versants
de soliluxion, dans des secteurs à faible pente où les
fronts sont peu mobiles et où la concentration des
eaux de fonte des neiges entraîne le lavage des coulées.
La présence locale de lentilles sablo-graveleuses triées
indique également que les écoulements, probablement
canalisés contre la paroi, ont pu localement acquérir
une compétence sufisante pour inciser les dépôts et trier
le matériel détritique.
4.2. Faciès B
A l’exception des niveaux humifères, ce faciès est
interprété comme témoignant essentiellement de
l’accumulation gravitaire de débris tombés de la paroi.
La géométrie des couches indique que l’apex du talus,
vraisemblablement situé à l’avant de l’abri sous le
surplomb rocheux, s’est progressivement déplacé vers
le nord, c’est-à-dire vers le fond de l’abri actuel, suivant
en cela la dégradation et le retrait progressif de la paroi.
Par comparaison avec le faciès A, les processus de
redistribution des débris sur le talus restent peu marqués
et sont en grande partie attribuables au ruissellement.
La matrice sableuse lavée forme des colmatages entre les
blocs ou localement des lentilles d’extension métrique,
interprétées comme des petits épandages sableux
à la surface du talus aux points de débouché des
écoulements entre les blocs. La présence de structures
lamellaires ines dans les zones riches en matrice
montre également que la mise place de ce faciès s’est
accompagnée de cycles de gel-dégel et témoigne d’un
environnement périglaciaire. Les observations réalisées
sur des talus d’abris et de porches de grottes en milieu
périglaciaire humide dans les Pyrénées centrales (TMA
= 0/-1°C, P ~ 1800 mm) montrent que la genèse de ce
type de faciès est probablement fortement inluencée
par le rôle de la neige. Le ralentissement du vent au
niveau des cavités provoque généralement la formation
de congères, qui peuvent dans certains cas obturer
totalement leur ouverture. Cette suraccumulation de
neige a plusieurs effets sur le régime thermique et la
dynamique du talus. En premier lieu, elle joue un rôle
d’isolant thermique et minimise ainsi les variations de
températures subies par le sol. Le nombre de cycles de
gel-dégel est d’autant plus limité que la fonte complète
du manteau neigeux intervient tardivement du fait de
son épaisseur. Les températures minimales atteintes
dans le sol sont également plus élevées qu’en l’absence
de congère. Ce type de situation est défavorable à
la formation d’un pergélisol ou de corps de glace
important dans le sol. En second lieu, La fusion de cette
masse de neige assure une bonne alimentation en eau du
talus pendant une grande partie du printemps et de la
saison estivale. L’eau percole à travers les dépôts et tend
à redistribuer la fraction ine en profondeur mais aussi
latéralement. Les débits restent cependant sufisamment
faibles pour qu’aucun tri granulométrique n’apparaisse,
sauf lorsque les écoulements sont concentrés dans des
petits ravins pénétrant latéralement dans la cavité.
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie : une réinterprétation 69
Dans certaines conigurations, des débits sufisamment
importants pour trier les sédiments proviennent des
versants qui surmontent la paroi et pénètrent dans
le talus au niveau de la ligne d’égouttement. Un tel
mécanisme explique probablement le faciès d’éboulis
à support clastique classiquement observé sous le
porche des cavités dans ce type d’environnement, alors
que des apports substantiels de matériaux ins sont
souvent visibles en surface. Ces apports consistent
essentiellement limons nivéo-éoliens et en coulées de
débris déclenchées par les orages estivaux.
4.3. Niveaux humifères
Différents niveaux de couleur sombre, colorés par
de la matière organique, sont observés dans le faciès
B. Depuis le siècle dernier, tous les auteurs ont
considéré que cette matière organique avait une origine
anthropique et qu’elle provenait de la dégradation
des déchets amenés par les hommes préhistoriques sur
leur habitat. Plusieurs arguments suggèrent ici que
cette hypothèse n’est valable que très partiellement
et que la matière organique témoigne d’un couvert
végétal naturel. Les couches brunes doivent donc être
considérées comme des sols enfouis.
En premier lieu, anthropisation et présence de matière
organique sont des phénomènes clairement dissociés.
Ces horizons humifères sont observés aussi bien dans les
sites paléolithiques que dans des dépôts hors contexte
archéologique ; leur préservation semble étroitement
liée à la présence de milieux carbonatés, qui entraînent
une stabilisation rapide des composés humiques dans le
proil et les protègent de la dégradation (Duchaufour,
1983). La formation d’un horizon humifère nécessite
l’accumulation d’une grande quantité de matière
organique fraîche, seule une fraction minime échappant
à la biodégradation complète. Les données rassemblées
par Gobat et alii (1998) permettent de proposer un
ordre de grandeur. La production annuelle de litière
aérienne atteint 0,1 à 0,4 kg/m2.an pour une toundra
et 7,5 kg/m2.an pour une prairie tempérée. S’y ajoute
la production de litière souterraine (rhizodéposition +
racines mortes), équivalente à 2 à 5 fois la production
aérienne. Au total, la quantité de matière organique
fournie au sol serait de l’ordre de 0,3 à 2,4 kg/m2.an
pour une toundra et de 2,2 à 4,5 kg/m2.an pour une
prairie. En 100 ans, cette quantité est donc considérable
et peut être estimée de 30 à 240 kg/m2 dans le premier
cas et 220 à 450 kg/m2 dans le second. L’accumulation
d’une telle quantité de matière organique sous la seule
action de l’homme au cours de l’occupation sporadique
des cavités paraît improbable. Les observations
concernant les abris et les entrées de grottes dans
différents milieux bioclimatiques actuels indiquent en
revanche que le développement d’horizons humifères
est un phénomène usuel dans les environnements
végétalisés, même si leurs caractères et les processus
d’accumulation de matière organique diffèrent parfois
sensiblement de ceux observés dans les sols normaux.
En raison de la raréfaction des plantes sur la partie
interne du talus, qui est faiblement éclairée par la
lumière, les apports organiques se limitent souvent à la
litière végétale amenée à la surface du sol par le vent,
les écoulements et le passage des animaux (renards,
blaireaux…), ainsi qu’à la desquamation des croûtes
cryptogamiques (algues, lichens, mousses) qui colonisent
les parois. La décomposition de cette matière organique
sous l’action des bactéries, des champignons et de la
faune du sol est plus ou moins rapide en fonction de
l’humidité disponible. Dans les milieux favorables, un
humus biologiquement très actif peut se développer
loin de l’entrée de la cavité. Il peut néanmoins présenter
des caractéristiques sensiblement différentes de celles
du sol extérieur. Le rôle des phénomènes physiques tels
que les alternances de gel-dégel et le retrait-gonlement
lié aux alternances d’humectation et de dessiccation
du sol s’atténue également vers l’intérieur de la cavité.
A l’étage alpin, la neige joue un rôle important sur la
pédogenèse comme sur la dynamique sédimentaire.
La formation de congères à l’entrée des cavités
constitue un facteur limitant pour le développement
des végétaux supérieurs, qui tendent à être remplacés
par une croûte cryptogamique (photo 7). Par ailleurs,
la fonte progressive de la neige pendant une grande
partie de la saison estivale favorise le maintien de
conditions hydromorphes, un ralentissement de la
dégradation et la mélanisation de la matière organique.
Ces facteurs, associés à la reptation supericielle du
sol liée aux cycles de gel-dégel, contribuent à donner
naissance à des humus bruts épais et très sombres
sur la partie interne des talus (photos 8, 9). L’étude
des lipides extraits des différents niveaux humifères
de la Ferrassie est intéressante du fait de la présence
de molécules permettant d’identiier l’origine et les
conditions d’évolution de la matière organique. Trois
grandes familles ont été identiiées, les hydrocarbures,
les alcools et les acides gras. La matière organique des
différents niveaux est majoritairement d’origine végétale
bien que cette contribution varie d’un niveau à l’autre.
La distribution des composés longs est proche de celle
observée dans les sols calcaires. Le mode court (<C20),
parfois abondant, est plus inhabituel. La présence de
cette famille de molécules, très biodégradables, pourrait
indiquer une contamination des échantillons par
l’activité biologique récente qui s’est développée sur les
coupes. Mis à part les composés en C18, dont l’origine
est incertaine, aucun marqueur de combustion (par
exemple les hydrocarbures aromatiques polycycliques
HAP) n’a été détecté avec les techniques employées.
Dans ce but, des techniques plus spéciiques telles que la
GC/MS-MS devront être mises en œuvre.
L’origine pédologique de la matière organique est
également en accord avec une plus forte altération des
niveaux humifères que dans le reste de la séquence (fig. 5
et 6). La décarbonatation s’accompagne de l’apparition
d’une teinte rouge plus ou moins marquée (7,5 à 5YR),
probablement liée aux argiles héritées d’altérites et
de sols anciens afleurant sur le plateau qui domine
70
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
le site. Différents types de proils sont observés à la
Ferrassie dans l’unité stratigraphique 3 : i) des horizons
humifères carbonatés brun gris (niveaux D2, E1, G0,
G1 et I1), ii) des horizons humifères décarbonatés,
brun rouge foncé (niveaux K3 et J) et iii) des proils
plus complexes associant un horizon humifère et un
horizon d’altération brun rouge (niveaux K3 et J dans
la zone proche de la paroi, niveau L3). En lames minces,
des vestiges d’horizons recarbonatés sont également
observés, sous la forme de nodules micritiques à
porosité d’origine racinaire.
Une partie des caractères de ces paléosols est secondaire
et a probablement été acquise au cours de leur
enfouissement. Ces caractères consistent en :
7
1) des contacts nets associés à des étirements sur la
pente ou des involutions dans la zone peu pentue
en fond d’abri. Ces déformations témoignent
respectivement de l’action de la soliluxion et de la
cryoturbation, liées à des cycles de gel-dégel (photo
10). L’abondance de la matrice ine dans ces niveaux,
favorable à la formation de glace de ségrégation
8
Photo 7 : Croûte cryptogamique (mousse, lichens) à l’entrée d’une cavité près
de Gavarnie. La fonte tardive de la couverture neigeuse qui forme des congères
devant les cavités tend à inhiber la croissance des végétaux supérieurs et favorise
la formation de ces croûtes.
Photo 8 : Cavité à développement oblique, Gavarnie, vers 2300 m. Un petit névé
subsiste sous le porche. Sa fonte assure une bonne alimentation en eau du sol et
des affleurements rocheux en début d’été. Une coupe du sol immédiatement à l’aval
du névé est figurée sur la photo 9.
9
Photo 9 : Profil de sol brun calcaire humifère développé dans le secteur du
porche d’une cavité. Les dépôts sont alimentés par l’éboulisation, la solifluxion
et le ruissellement diffus. L’horizon Ah, à structure grumeleuse très fine, a une
couleur très sombre, brun noir, probablement en raison de l’hydromorphie liée à la
présence du névé. Il est recouvert par un pavage caillouteux. Dans l’horizon Sca,
les cailloux portent des coiffes limoneuses sur leur face supérieure.
Photo 10 : Coulée de solifluxion sous pelouse, Estaubé, 1800 m d’altitude. La
pelouse alpine couvre de manière continue le sol, qui forme de gros bourrelets de
solifluxion. Le matériel de la coulée est un diamicton à stratification rudimentaire,
marqué par des lentilles caillouteuses plus ou moins distinctes. Il recouvre
un paléosol étiré dans la pente. L’horizon A superficiel, brun foncé, atteint 30
cm d’épaisseur à proximité du front de la coulée. Il possède une structure
microgrumeleuse à grumeleuse d’origine biologique dans les 15 premiers
centimètres, lamellaire fine (ségrégation de glace) en dessous. L’horizon S,
brun jaune vif, très argileux et en partie décarbonaté, a une structure lamellaire
moyenne. La couleur brun noir de l’horizon A enfoui est lié à l’hydromorphie. La
pente moyenne est d’environ 15°.
10
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie : une réinterprétation 71
(Van Vliet-Lanoë, 1985 ; Yershov, 2004), explique
vraisemblablement pourquoi les processus cryogéniques
sont bien exprimés dans les paléosols, alors qu’ils le
sont peu dans les couches détritiques caillouteuses ou
sableuses. Les horizons carbonatés (Cca) ont été détruits
par les processus cryogéniques et ne subsistent plus que
sous forme de nodules dispersés.
conditions thermiques estivales ne permettent pas
une pénétration profonde de la faune du sol. Dans
la plupart des échantillons analysés ici, l’absence
de porosité biologique et l’épaisseur millimétrique
des agrégats lamellaires indiquent qu’il s’agit d’une
structure épigénétique, qui s’est formée à une certaine
profondeur dans le sol. En effet, dans les sols soumis
à un engel, l’espacement des lentilles de glace s’accroît
progressivement avec la profondeur, en raison de la
diminution du gradient thermique. La comparaison
avec les structures observées dans des sédiments alpins
actuels (Bertran et al., 1995) permet d’estimer que la
surface affectée par les cycles de gel-dégel était située
plusieurs décimètres plus haut dans le proil.
2) à l’échelle microscopique, la présence de structures
lamellaires due à la cristallisation de glace en lentilles
dans le sol et de coiffes limoneuses sur les graviers,
qui témoignent de percolations intenses à la fonte de
la glace du sol et de la neige. Ces igures sont typiques
des sols en contexte périglaciaire ; des microstructures
comparables ont été décrites dans les horizons
A des sols arctiques et alpins (Brewer et Pawluk,
1975 ; Van Vliet-Lanoë, 1988) où les médiocres
2,5
Carbone Organique Total (%)
Figure 5 : Diagramme des teneurs en Carbone
Organique Total en fonction des teneurs en
carbonate et position des différents types de
niveaux.
2
I1
horizons A
décarbonatés
D2
1,5
horizons A
riches en
carbonates
E1
K3
J
1
L3a
horizons B
décarbonatés
L3a
J
0,5
G1
moderne
L3b
couches détritiques
L3b
0
0
10
20
30
40
50
60
70
80
carbonate (%)
90
susceptibilité magnétique κ (SI)
Figure 6 : Susceptibilité magnétique volumique en
fonction de la teneur en Carbone Organique Total.
80
79
horizons
bruns
humifères
70
60
κ
C+
TO 2
6
0,8
6,0
=4 r=
16,
50
40
horizons
brun rouge
décarbonatés
30
20
couches détritiques
10
0
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1
1,2
Carbone Organique Total (%)
1,4
1,6
1,8
72
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
40
39
38
36
34
32
30
28
26
24
22
20
Gravettien
(Noailles)
B4
0
B7
Gravettien
(Font-Robert)
D2
D2γ
E/E1
E1s
F
Aurignacien IV
Aurignacien III-IV
G0
G1
2
Aurignacien III
I1
I2
3
J
K2
K3a
K3b
K4
K5
K6
L3a
Aurignacien I
Châtelperronien
M2e
Mousterien
Aurignacien II
40
39
38
4
36
34
32
30
28
26
24
22
20
âge14 C (ka BP)
coupe longitudinale
coupe frontale
coupe non connue
date 14 C (conventionnelle)
date AMS-14 C
dates retenues
âge minimal
Figure 7 : Dates radiocarbone disponibles et attribution culturelle des différents niveaux d’après Delporte (1984).
profondeur relative (m)
niveaux archéologiques
1
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie : une réinterprétation 73
5. Datations numériques
Trente sept dates radiocarbone ont été obtenues à
l’occasion de différentes campagnes de prélèvements
par Delibrias (1984) et Mellars et al. (1987) à partir de
vestiges fauniques récoltés en fouille et dans le cadre
de ce travail sur des échantillons récoltés dans les
coupes. Ces dates, reportées sur la igure 7, montrent
une dispersion relativement importante. Trois types
d’explication ont été données pour rendre compte de
cette dispersion : i) des corrélations stratigraphiques
hasardeuses entre les différents niveaux dans lesquels
ont été prélevés les échantillons, les dates obtenues
par Delibrias sur la coupe sagittale étant souvent plus
jeunes que celles provenant de la coupe frontale (Texier,
2001 ; Delpech et Rigaud, 2001), ii) des problèmes
liés à la méthode de datation, en particulier dus à une
élimination imparfaite de la pollution organique récente
(Mellars, 1987), iii) des problèmes de taphonomie
(remaniement sédimentaire ayant affecté les éléments
soumis à la datation, dont l’âge n’indique pas celui de
la couche dans laquelle ils ont été prélevés) (Texier,
2001). Le réexamen des coupes et l’ensemble des
dates actuellement disponibles permettent en partie
de réévaluer certains de ces facteurs. La première
hypothèse peut ainsi être en grande partie rejetée, dans
la mesure où plusieurs lits ont pu être suivis d’une coupe
à l’autre et laissent donc penser que les corrélations
stratigraphiques proposées par Laville (1984) sont
globalement valides. Par ailleurs, les nouvelles dates
14
C-AMS ne mettent pas en évidence de lien particulier
entre l’âge d’une couche et la coupe sur laquelle elle
a été échantillonnée. C’est notamment le cas pour
les niveaux G1 et I1. En accord avec Mellars et al.
(1987), l’hypothèse d’une élimination incomplète de
la pollution par du carbone récent paraît en revanche
très vraisemblable et concerne en particulier de
nombreuses dates obtenues sur l’Aurignacien. Une telle
interprétation est soutenue par la présence de lipides
d’origine bactérienne et fongique dans les échantillons
de matière organique analysés.
Après étude critique des dates, il apparaît que seules
trois peuvent être considérées comme valides. Ce sont :
(1) 29.0 ka 14C BP pour le niveau D2h, (2) 30,9 ka 14C
BP pour le niveau G1 et (3) 33,6 ka 14C BP pour le
niveau K3. A l’exception d’un âge minimal de 35,0 ka
14
C BP pour le niveau K6, la base de la séquence reste
mal contrainte dans la chronologie.
6. Signification paléoenvironnementale
Le faciès A (dépôts caillouteux stratiiés) résulte de
l’activité de coulées de soliluxion à front pierreux.
Ces coulées caractérisent actuellement l’étage nival des
montagnes des latitudes basses et moyennes. Différentes
études ont montré qu’elles apparaissent lorsque la
température moyenne annuelle est inférieure à -1/2°C, dans des environnements où la végétation est très
réduite, en contexte de pergélisol ou de gel saisonnier
profond (Harris, 1982 ; Bertran et al., 1995). Dans
les régions continentales, où la végétation peut se
développer à des températures annuelles plus basses en
raison du moins grand nombre de cycles de gel-dégel
pendant la saison végétative, ces formes n’apparaissent
que dans des milieux sensiblement plus froids. A la
Ferrassie, l’apparition de ces dépôts, qui témoignent
donc de conditions très rigoureuses de type (semi-)désert
périglaciaire, est comprise entre environ 28 et au moins
~25 ka 14C BP et coïncide approximativement avec le
début du stade isotopique 2, c’est-à-dire au maximum
de froid du dernier pléniglaciaire (Grousset, 2001). La
faune récoltée montre la présence quasi-exclusive du
renne (Delpech, 1984 ; Delpech et al., 2000).
Le faciès B, principalement représenté à la base de la
séquence, correspond à des processus sédimentaires
relativement azonaux (éboulisation, ruissellement) et
donc peu informatifs sur les paléoclimats. Néanmoins,
l’activité des cycles de gel-dégel syngénétique et le rôle
probablement important joué par la neige suggèrent
que ce faciès relète un environnement périglaciaire
moins drastique et moins marqué par l’aridité que
pour les dépôts du faciès A. La mise en place des
dépôts est interrompue par une série de paléosols,
dont l’âge s’étage entre ~ 35 ka 14C BP (date minimale)
et 28 ka 14C BP. Deux grands types de paléosols sont
observés : des sols à proil simple de type Aca ou
Aci – C et des sols à proil plus complexe, avec un
horizon d’altération plus ou moins bien développé.
Le premier type de sols peut être classé en première
approximation dans les rendosols (A carbonaté) et les
rendisols (A décarbonaté) de la classiication française
(Baize et Girard, 1995). Ces sols, que l’on rencontre
dans des environnements bioclimatiques très variés,
sont étroitement liés aux roches-mères carbonatées.
Leur développement indique une stabilisation du talus
et le développement d’un couvert végétal, dont la durée
est d’ordre pluricentennale ou millénaire (Duchaufour,
1983 ; Gobat et al., 1998). Des informations
paléoenvironnementales complémentaires sont fournies
par la grande faune d’ongulés associée à ces niveaux. A
la Ferrassie, les horizons humifères D2 sont dominés par
une association forestière à cerf, chevreuil et sanglier. Le
renne et des formes de montagne, bouquetin et chamois,
sont néanmoins présents ; elles indiquent un climat plus
froid que les conditions actuelles et un environnement
de type taïga (Delpech, 1984, Delpech et al., 2000). Les
niveaux G livrent quant à eux une faune dominée par le
renne associé au chamois et à des bovinés, qui relèterait
un environnement de steppe subarctique avec des zones
boisées.
Le deuxième type de sols peut être classé dans les
calcosols ou les fersialsols. Ils marquent un plus
long arrêt de la sédimentation (d’ordre millénaire ou
pluri-millénaire) et/ou des conditions plus tempérées,
accompagnées d’une importante transformation des
dépôts sous l’action des processus pédologiques. Les
74
associations fauniques trouvées dans les horizons
humifères de ces paléosols (J, K3 et L3a) sont dominées
par les bovinés (Bos ou Bison), le cheval et des espèces
forestières (cerf, sanglier). L’ensemble témoignerait d’un
environnement de type forêt-steppe tempérée.
La présence de paléosols alternant avec des couches
détritiques montre que le talus a enregistré une succession
de phases caractérisées par des environnements de type
(semi-)désert périglaciaire et de phases correspondant
à des milieux plus humides et/ou plus tempérés. Cette
alternance témoigne des luctuations altitudinales des
étages bioclimatiques en relation avec l’évolution du
climat. Pendant les premières, la sédimentation détritique
a été très active en pied de paroi ; les processus de
redistribution des débris sur les talus étaient dominés
par la soliluxion et le ruissellement. La faible teneur en
matière organique des dépôts (régosols) suppose que
le couvert végétal était très clairsemé, probablement
en raison de températures basses et d’un climat sec.
Pendant les secondes, des sols se sont développés
sur les accumulations détritiques en liaison avec le
développement du couvert végétal. La signiication
climatique de ces paléosols est large ; ils peuvent
correspondre soit à des milieux de type alpin/arctique,
avec une végétation essentiellement herbacée, soit à
des milieux plus tempérés et arborés, comme semblent
l’indiquer la faune associée.
Le site de La Ferrassie montre une évolution remarquable
des sols de la in du SIM 3 au début du MIS 2, qui
relète une réduction progressive de la durée des
périodes de pédogenèse au proit de la cryogenèse et
de la sédimentation (fig. 8). Les cycles pédogenèse –
sédimentation qui jalonnent cette séquence trouvent
ainsi leur correspondance dans les cycles de DansgaardOeschger des enregistrements paléoclimatiques glaciaires
et marins (Dansgaard et al., 1993 ; Grousset, 2001) ainsi
que dans les séquences loessiques du nord de la France et
d’Europe de l’Est (Antoine et al., 2001, 2003 ; Haesaerts
et al., 2005). Cependant, en l’absence d’un maillage serré
de dates 14C iables, le calage chronologique précis des
différents événements enregistrés reste encore dificile à
effectuer. Cette séquence montre, de la base de la partie
actuellement visible jusqu’au sommet :
Un fersialsol avec un horizon décarbonaté relativement
épais, qui indique une longue phase d’arrêt de la
sédimentation. L’horizon A (couche archéologique
L3a) contient une industrie châtelperronienne, ce qui le
situerait dans l’intervalle 35-41 ka 14C BP.
Deux horizons humifères décarbonatés, brun rouge
foncé (couches K3 et J), contenant des industries
aurignaciennes. Leur âge est compris entre 31 et 27 ka
14
C BP. Ces horizons s’épaississent et deviennent très
sombres vers le fond de l’abri ; ils sont alors associés à
un horizon d’altération brun à brun rouge. Ces paléosols
indiquent des phases de pédogenèse plus courtes que
la précédente. Un niveau additionnel (K4) apparaît
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
sur la coupe frontale sous K3 et contient également de
l’Aurignacien.
Neuf horizons humifères carbonatés, brun gris
(couches I1, G1, G0, E1d, E1b, E1, D2e, D2c et
D2a), contenant des industries aurignaciennes ou
gravettiennes (âge compris entre 31 et 24 ka 14C BP).
Plusieurs de ces horizons fusionnent localement et
peuvent représenter un même sol étiré et redoublé par
la soliluxion. La décarbonatation incomplète suggèrent
qu’ils correspondent à des épisodes de pédogenèse
relativement brefs et/ou que les conditions d’humidité
et de température ou encore la dynamique sédimentaire
(apports de débris calcaires de la paroi, soliluxion) lui
étaient peu favorables.
7. Conclusions
La stratigraphie du site de la Ferrassie, un site clé pour
le Paléolithique supérieur ancien en France, constitue
un enregistrement important pour documenter la
dynamique de versant et les paléoenvironnements au
début du dernier Pléniglaciaire en Aquitaine. Pendant
la in du stade MIS 3, la présence de paléosols alternant
avec des couches d’éboulis ruisselé montre que le talus
a enregistré une succession de phases caractérisées
par des environnements de type périglaciaire et de
phases correspondant à des milieux plus humides et/
ou plus tempérés, associées au développement de la
végétation. Ces cycles pédogenèse – sédimentation
relètent probablement les cycles climatiques de
Dansgaard-Oeschger décrits à partir des enregistrements
paléoclimatiques glaciaires et marins. Pendant le
maximum de froid au début du stade MIS 2, la
dynamique du talus est caractérisée par des coulées
de soliluxion à front pierreux comparables à celles
que l’on observe actuellement dans les (semi-)déserts
périglaciaires d’altitude. Cette observation conirme
celles précédemment réalisées sur le site des Peyrugues
dans le Lot (Bertran, 2005) et démontre le caractère très
inhospitalier de la région pendant certaines périodes du
dernier Pléniglaciaire, entre ~ 28 et 21 ka 14C BP.
La poursuite de l’étude des dépôts et des paléosols
préservés dans les séquences carbonatées d’abris et de
porche de grotte aquitains est susceptible d’apporter de
nouvelles données sur deux points importants :
L’évolution des paléoenvironnements continentaux
aux cours des derniers cycles climatiques. Le potentiel
informatif de ces séquences est probablement équivalent
à celui des loess. Au delà de l’aspect purement
descriptif, des données quantiiées pourront être
obtenues grâce à l’analyse isotopique de la matière
organique (Hatté et al., 1999) et la susceptibilité
magnétique. La recherche de biomarqueurs organiques
devrait également faire progresser la caractérisation des
paléosols.
Dynamique sédimentaire et paléopédogenèse à La Ferrassie : une réinterprétation 75
Les relations entre peuplement, cultures paléolithiques
et climat. Les paléosols peuvent en effet servir de
niveaux stratigraphiques repères dans les sites
paléolithiques. L’intérêt de tels niveaux repères pour
les périodes antérieures à 20-25 ka 14C BP, où les
datations radiocarbone ne permettent pas d’avoir
un calage chronologique sufisamment précis pour
établir des corrélations avec les courbes isotopiques,
apparaît évident. Ces données devraient également
pouvoir contribuer à clariier le débat concernant le
développement de certaines cultures et ses relations avec
le climat (cf. Demars, 2000 ; D’Errico et Sánchez Goñi,
2003).
Figure 8 : Corrélation proposées entre les stratigraphies des Peyrugues et de la Ferrassie avec la courbe isotopique glaciaire NGRIP.
76
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78
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
31 mai matin
Reprise des fouilles dans la partie ouest du gisement
de la Ferrassie, Savignac-de-Miremont, Dordogne :
problématique et premiers résultats
Alain Turq1, Harold Dibble2, Paul Goldberg3, Shannon J.-P. McPherron4, Dennis Sandgathe5, Norbert Mercier6,
Laurent Bruxelles7, Diane Laville8, Stéphane Madelaine8
1
Musée National de Préhistoire, 24620 Les Eyzies-de-Tayac-Sireuil (Dordogne), PACEA, UMR 5199, Université de Bordeaux, CNRS,
avenue des facultés, 33405 Talence cedex (alain.turq@ culture.gouv.fr)
2
Department of Antropology, University Philadelphia, Pennsylvania Museum of Archeaology and anthropology (hdibble@sas.upenn.edu)
3
Department of Archaeology, Boston University, 675 Commonwealth Ave, Boston, MA 02215 (paulberg@bu.edu)
4
Department of human evolution, Max Plank Institute for Evolutionary Anthropology, Leipzig. (mcpherron@eva.mpg.de)
5
Department of Anthropology, University of Pennsylvania, European section of the Museum of Anthropology (dmsandg@sfu.ca)
6
CRPAA, UMR 5060, Université de Bordeaux, CNRS, maison de l’Archéologie, 33607 Pessac cedex (nmercier@bordeaux3.fr)
7
INRAP, UMR Traces, Université de Toulouse et GAES, University of Witwatersrand, Johannesburg (laurent.bruxelles@inrap.fr)
8
Musée National de Préhistoire, 24620 Les Eyzies-de-Tayac-Sireuil, PACEA, UMR 5199, Université de Bordeaux, CNRS, avenue des facultés,
33405 Talence cedex (stephane.madelaine@ culture.gouv.fr)
1. Introduction
C’est suite à la lecture du master de D. Laville
(2007) consacré au site sépulcral moustérien de La
Ferrassie et à l’exposition « Première humanité : gestes
funéraires des néandertaliens » (Vandermeersch et al.
2008) qu’a été engagée une rélexion préalable à une
éventuelle reprise des fouilles dans ce site classique.
Si la partie supérieure du gisement (renfermant des
occupations castelperroniennes, aurignaciennes et
gravettiennes) a fait l’objet dans le secteur est, de fouilles
récentes, de datations (Delporte 1984) et d’approches
sédimentologiques (Texier 2009 ; Bertran et al. 2008),
la base de la séquence (contenant les occupations
moustériennes) n’a pas été revisitée depuis les fouilles
de D. Peyrony (1934). Le contexte sédimentaire,
la chronologique des sept squelettes néandertaliens
et de l’industrie à bifaces de la base de la séquence
(position inhabituelle en Périgord ou ce faciès se place
généralement au sommet) ne sont encore aujourd’hui
connus qu’à travers les données des premiers fouilleurs
(Capitan et Peyrony, 1905, 1909, 1910, 1911, 1912a et
b, 1921).
Avant de concevoir le moindre projet, il convenait
de retrouver un témoin dans un secteur où existait
l’industrie à biface et où avait été mise au jour une
sépulture. La seule zone remplissant ces conditions était
la partie ouest du gisement, près de la sépulture 2, le seul
squelette pour lequel nous avons encore aujourd’hui du
sédiment original (le pied droit ayant été prélevé en bloc).
En 2009 une analyse minutieuse des lieux, des archives,
des publications nous a permis de localiser un témoin
potentiel sous le chemin communal de La Ferrassie.
L’année 2010 a été consacrée à vériier cette hypothèse.
La réalisation d’une tranchée et l’enlèvement des déblais
des anciennes fouilles au niveau de la première tranchée
sondage de D. Peyrony ont mis au jour une partie
préservée du gisement et de la séquence décrite (Capitan
et Peyrony, 1912a et b). Ces travaux ont également
permis, d’une part de préparer dans les meilleures
conditions possibles le programme de datation (une
vingtaine de dosimètres ont été installés et laissés en place
durant une année) et d’autre part de faire une exploration
préliminaire du témoin découvert. Seule la base de la
stratigraphie a pu être vue sur quelques mètres carrés.
Cette petite fenêtre nous a permis quelques observations :
Contrairement à la stratigraphie classique publiée
(op. cit.) nous n’avons pas retrouvé le rocher de base
mais nous avons rencontré un remplissage stérile d’au
minimum un mètre de puissance ;
Le moustérien à biface (couche A des anciens fouilleurs)
a été fouillé. C’est une industrie dans laquelle coexiste
un débitage Levallois et un débitage discoïde. L’outillage
retouché est essentiellement composé de racloirs,
encoches et de denticulés. Le façonnage bifacial est
représenté par des bifaces et quelques éclats de taille de
biface. Les matières premières lithiques utilisées sont
d’origine locale mais proviennent de différents gites, pied
de falaise, altérites et alluvions de la Vézère. Notons la
présence de quelques pièces en silex du Bergeracois.
L’opération 2010 a mis en évidence la présence d’une
partie du remplissage initial dans sa partie ouest,
zone où L. Capitan et D. Peyrony ont mis au jour
les squelettes 1 et 2. Nos recherches en archives ont
Reprise des fouilles dans la partie ouest du gisement de la Ferrassie, Savignac-de-Miremont, Dordogne 79
Figure 1 : La Ferrassie : extrait du rapport d’activité 1912 écrit par D. Peyrony et transmis rapport transmis à son ministère de tutelle le 12 mars
permis de découvrir dans le rapport fait par D. Peyrony
en 1913, concernant les fouilles qu’il a exécuté en
Dordogne en 1912 -rapport transmis à son ministère
de tutelle le 12 mars 1913- l’existence, à l’ouest du
site d’un témoin. Le document précise sa localisation
(sous le chemin de La Ferrassie) soit à l’endroit où nous
l’avions localisé et où nous l’avons retrouvé (fig. 1).
2. Problématique
Pour les spécialistes travaillant sur l’Homme de
Neandertal, les questions importantes entrant dans
les problématiques actuelles et ayant une répercussion
au niveau national et international sont au nombre de
quatre :
1) Quel est l’âge des sépultures néandertaliennes ?
Les sept sépultures néandertaliennes (soit près de 20%
de celles actuellement connues) qui ont contribué au
débat sur la capacité de ces populations à enterrer leur
mort, ne sont toujours pas datées. Les seuls éléments
que nous ayons sont la faune et le type d’industrie.
L’assemblage faunique est dominé par les Bovidés, le
Cerf, le Cheval, avec peu de Renne (Peyrony, 1934). Ce
type d’assemblage faunique existe dans les couches 33
à 35 (Moustérien de type Ferrassie) de Combe Grenal
(Guadelli, 1987) qui précèdent le maximum glaciaire
du stade isotopique 4, où le Renne est minoritaire par
rapport au Cerf ou aux Bovidés.
Dans le cadre du catalogue de l’exposition « première
humanité : gestes funéraires néandertaliens »
l’hypothèse selon laquelle l’âge des sépultures du site de
La Ferrassie devrait être reconsidéré (il est généralement
admis que ces sépultures ayant livré des restes de
néandertalien classique ont environ 50 000 ans, cf.
Vandermeersch, 1965) a été avancé (Turq et Jaubert
2008) en tenant en compte les arguments suivants :
Le Moustérien de type Ferrassie, en France, se place
toujours avant le stade isotopique 4 (dans le sud-est
de la France comme dans le sud-ouest). Par ailleurs
les progrès de nos connaissances technologiques nous
permettent d’identiier les débitages Levallois du stade
5 de ceux du stade 3 (celui de la Ferrassie est similaire à
celui du stade 5).
En conclusion, les sépultures néandertaliennes de
la Ferrassie pourraient être plus vieilles que les
sépultures néandertaliennes du Proche- Orient avec les
implications que cela entraîne.
2) Quel est l’âge de l’industrie à bifaces située à la base
de la séquence ?
Cette industrie roulée à bifaces, qui a été qualiiée de
Moustérien de Tradition Acheuléenne par D. Peyrony
(Capitan et Peyrony, 1920), se place sous le Moustérien
Ferrassie. Aujourd’hui les données disponibles montrent
que ce faciès est surtout présent en Aquitaine durant le
stade isotopique 3 et souvent en sommet de séquence,
Le Moustier, la Rochette, Combe-Grenal, Pech de l’Azé
I et IV… (Valladas et al., 1987 ; Guibert et al., 2008).
Pour l’heure seule la couche C’3 de Barbas décrite par
J. Guichard comme un MTA (Guichard 1976) mais
considérée par E. Boëda (2001) comme de l’Acheuléen
est antérieure. Il semble en être de même de la couche
XII du Moulin-du-Milieu (Turq, 2000), peut être de la
couche de base de l’abri supérieur du Moustier (couche
situé sur le bed-rock sous la couche de silex concassés
et bréchiiés) (Bourlon, 1905; Turq et Maureille, 2010).
Dater la couche de base de la Ferrassie permettrait donc
de faire avancer le débat sur l’origine du Moustérien de
Tradition Acheuléenne.
3) Qu’elle était la nature même du site ?
Pour se donner réellement les moyens de comprendre
le complexe archéologique de La Ferrassie (petit abri,
grotte et grand abri), il convient de le replacer dans son
contexte géomorphologique (fig. 2).
Il s’agit avant tout d’un ensemble karstique dont
le développement s’explique au moins pour partie
par l’implantation du gisement de La Ferrassie, à
2 kilomètres de la faille majeure de l’anticlinal de
Saint-Cyprien. Sur la igure 2, le compartiment situé
en bas à gauche est enfoncé de plusieurs dizaines de
mètres. Celui, en haut à droit a été très affecté par
les mouvements et contraintes, ce qui a facilité sa
karstiication. Notons qu’une faille passe dans le vallon
juste en avant (au sud) du gisement (fig. 3).
4) Quels sont les mécanismes de mise en place des
dépôts et leur degré de perturbation ?
L’observation des mécanismes de mise en place
des dépôts mais aussi des modiications postdépositionnelles est nécessaire pour une meilleure
compréhension des observations publiées sur les
80
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
Figure 2. La Ferrassie grand abri: potentiel karstique du site. Localisation de trois conduits, en bas celui qui pourrait être à l’origine du grand abri, au milieu la grotte,
en haut celui pouvant correspondre au petit abri (dessin A. Turq).
Fig. 3. La Ferrassie : localisation du site (étoile rouge) par rapport au réseau de faille. La faille majeure est celle de l’anticlinal de Saint Cyprien (ligne violette) (d’après
carte géologique du Bugue et St. Konich) (dessin A. Turq).
Reprise des fouilles dans la partie ouest du gisement de la Ferrassie, Savignac-de-Miremont, Dordogne 81
Figure 4 : Localisation de la sépulture 1 à partir de deux clichés (à gauche la
localisation de la sépulture cliché du 27 septembre 1909, à droite cliché pris
2011) à partir de points remarquables; rectangle rouge le bord de rocher au
niveau de la carrière qui a recoupé la paroi sud de la grotte ; rectangle jaune,
partie anguleuse d’une chambre de taille ; rectangle bleu trou de barre à
mine ; rectangle verte, concavité du rocher ; l’ovale bleu clair symbolise le lieu
de découverte (DAO Turq).
Figure 5 : localisation de la Ferrassie 1 sous la plaque aujourd’hui disparue (en
pointillés violets) et en bas à droite du débouché karstique (rectangle vert),
(DAO Turq).
la mise en évidence d’une nouvelle zone d’accrétion
dans la partie ouest du site et le quatrième sur la
conirmation de l’appartenance de la sépulture 2 au
Moustérien de type Ferrassie.
3.1. Localisation des sépultures
La reprise des fouilles s’est organisée autour des deux
sépultures d’adultes (La Ferrassie 1 et 2) qui par
ailleurs sont les mieux conservées. Il nous est paru donc
essentiel de les localiser avec le maximum de précision.
inhumations de La Ferrassie (Peyrony, op. cit. ;
Breuilh, 1921 ; Laville, 2007). Comment interpréter les
dépressions, les monticules et les foyers observés. Ceci
est d’autant plus important, qu’aujourd’hui le débat
semble se relancer entre préhistoriens américains et
européens (Sandgathe et al., 2011) sur la notion même
de sépulture pour le Roc-de-Marsal.
3. Les premiers résultats
Ils portent sur quatre points : le premier concerne la
localisation précise des sépultures 1 et 2, le second la
corrélation de la séquence publiée par D. Peyrony et
celle que nous avons retrouvée, le troisième porte sur
- La Ferrassie 1
Ce squelette a été mis au jour le 17 septembre 1909
a fait l’objet de plusieurs prises de vue dont la plus
connue et celle qui permet de le localiser avec le plus de
précision est celle de la igure 4 à gauche.
L’analyse des points remarquables (fig. 4) permet,
malgré les nombreuses modiications, de replacer sans
problème le lieu de découverte de la sépulture 1. Ce fait
est conirmé par la trace d’une plaque (fig. 5) indiquant
probablement dans le passé le lieu de découverte
(rectangle violet). Un point particulier à noter est la
présence à proximité d’un débouché d’un conduit
karstique qui semble relier le grand abri et la galerie de
la grande grotte située juste dessus (rectangle à bordure
verte).
82
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
Figure 6 : Localisation de la sépulture 2 à partir de deux clichés (à gauche la localisation
de la sépulture lors de sa découverte, à droite cliché pris en 2011) à partir de points
remarquables; ligne bleu foncé : rebord du rocher en second plan ; ligne jaune : rebord
du rocher en premier plan ; rectangle rouges souligne la trace laissée par un trou fait à
la barre à mine ; rectangle bleu clair : lieu de découverte (DAO Turq).
Figure 7 : Localisation des sépultures 1 et 2 sur le terrain, aujourd’hui (DAO Turq).
3.2. Corrélation stratigraphique
Les corrélations stratigraphiques du secteur ouest du
site sont synthétisées dans le tableau 1. Sont rappelées
la stratigraphie de D. Peyrony publié en 1934, les
attributions culturelles, au centre notre appellation des
couches rencontrées et explorées en 2010 et à droite
la lecture stratigraphique que nous avons pu faire
cette année. Actuellement nous ne sommes sûr des
correspondances stratigraphiques que pour la base de la
séquence et le sommet, les autres étant supposées mais
non vériiées.
3.3. Mise en place des dépôts et mise en évidence
d’une nouvelle zone d’accrétion
- La Ferrassie 2
Ce squelette a été mis au jour un an après en septembre
1910. La même étude que celle concernant le squelette
de La Ferrassie 1 permet de situer avec précision son
lieu de découverte (fig. 6).
Les travaux sur le témoin du bord de route ont
apporté des éléments nouveaux sur la mise en place des
sédiments. Ces résultats modiient la compréhension
globale de la sédimentogenèse du site, apportent des
nouveaux éléments sur les sépultures.
L’analyse conduite ci-dessus permet aujourd’hui de
connaître avec certitude et précision la localisation
des deux sépultures (fig. 6). Les travaux menés dans ce
témoin stratigraphique permettront les comparaisons
souhaitées (fig. 7).
Cette nouvelle donnée s’appuie sur des observations
macroscopiques (pendage des couches) (fig. 8), des
données microscopiques (fig. 9) et l’analyse des fabriques
fig. 10, 11 et 12). L’ensemble des couches de ce secteur
a un pendage assez fort vers l’abri comme nous
Reprise des fouilles dans la partie ouest du gisement de la Ferrassie, Savignac-de-Miremont, Dordogne 83
Tableau 1 : synthèse des correspondances
stratigraphiques
D. Peyrony
Couche
archéologique
Couche F
Couche E
Couche D
Couche
C
Couche
B
Couche
A
Bed-rock
1934
Attribution
culturelle
Aurignacien
Chatelperronien
Moustérien type
La Ferrassie
Moustérien type
La Ferrassie
Moustérien
à biface
2010
Stratigraphie
temporaire
=
=?
=?
2011
Secteur
I
2011
Secteur
II
II - 1
II - 2
II – 3a
=?
3
2
1a
1b
?
=
=
=
=
II – 3b
I-1
I-2
I-3
I-3
?
?
II - 4
Bed-rock
Figure 8. Vue générale du secteur de fouille. Pour l’ensemble des
couches contre la paroi (notre secteur II) on voit un pendage important
vers le fond de l’abri, pour les couches correspondant au Moustérien
de type Ferrassie (II 3 et II4), couche II2 et l’Aurignacien (II1) (cliché
McPherron).
Figure 9. Microphoto de l’échantillon FER-10-5A et 5B correspondant
au Moustérien de type Ferrassie (Cliché Goldberg).
Pour les couches de base pour lesquelles nous n’avons
seulement une coupe perpendiculaire aux précédentes,
nous n’avons pas d’observations macroscopiques mais
les données de l’analyse des fabriques donnent des
résultats identiques.
pouvons le voir sur la igure 8. Ceci indique que la
zone d’accrétion se place à l’extérieur de l’abri, dans un
secteur aujourd’hui détruit par la création de la route
et par l’exploitation de la carrière située à l’avant de la
grotte.
Les observations microscopiques faites en 2010 pour
la couche II 3 (Moustérien de type Ferrassie) conirme
le pendage observé macroscopiquement. Sur la igure
ci-dessous (échantillon FER-10-5A et 5B), on voit très
bien le litage montrant des fragments d’os, dans lequel
les brûlés sont brun foncés.
L’analyse des fabriques donne des résultats identiques.
Nous disposons de données sur 2 couches, II-1
(Aurignacien) et II-3 (Moustérien de type Ferrassie).
Tout ceci indique l’existence d’une zone d’accrétion
située dans l’ouest du gisement, à l’opposé de celle
observée et analysée par J.-P. Texier dans la partie
est (fig. 24). Cette découverte et l’identiication de
l’origine des dépôts, des mécanismes de mise en place,
bouleversent nos connaissances et ont des implications
lourdes sur la compréhension du site, les industries,
mais aussi les sépultures LF1 et LF2 (fig. 13).
En conclusion, le grand abri de La Ferrassie contient
un remplissage qui correspond à deux zones majeures
d’accrétion, l’une issue de la partie ouest (notre
secteur de fouille) et l’autre correspondant à la zone
de la grande coupe sagittale sur laquelle a travaillé H.
Delporte, coupe qui a fait l’objet ces dernières années de
toute une série d’analyses.
84
Figure 10 : Fabriques des objets de la couche I-1 (Aurignacien) (DAO McPherron)
Figure 11 : Fabriques des objets de la couche II-3 (Moustérien de type Ferrassie) (DAO McPherron)
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
Reprise des fouilles dans la partie ouest du gisement de la Ferrassie, Savignac-de-Miremont, Dordogne 85
Figure 12 : Fabriques des objets de la couche I-2 (Moustérien de Tradition Acheuléenne) (DAO McPherron)
Figure 13 : La Ferrassie grand abri: en jaune la zone d’accrétion concernant la partie est du site et en rouge celle mise en évidence par nos travaux et concernant le
secteur ouest (dessin A. Turq).
3.4. Confirmation de l’appartenance de la sépulture de
La Ferrassie 2 au Moustérien de type Ferrassie
L’examen et la comparaison du sédiment contenant le
pied du squelette de La Ferrassie 2 avec ceux issus des
lames minces faites dans toutes les couches du témoin
stratigraphique découvert à moins de 2 m du lieu de la
sépulture, a pu être fait au Muséum d’Histoire Naturelle
de Paris en février dernier. Il a permis de conirmer
l’appartenance de ce squelette au moustérien de type
Ferrassie ce qui est en accord avec les écrits de fouilleurs
(fig. 14).
4. Conclusions
L’opération engagée sur la partie ouest du gisement de
La Ferrassie doit encore se poursuivre durant encore
trois années (2012 à 2015).
86
Quaternaire Continental d’Aquitaine, excursion AFEQ - ASF 2012
Figure 14 : Pied du squelette de La Ferrassie 2 encore conservé dans son
bloc de sédiment (cliché et collection Musée de l’Homme).
3) Sondage pour vériier si ce petit abri est
vraiment le débouché d’un réseau karstique ;
4) Exploration par géoradar du bas du coteau
dans lequel se développent ces karsts.
L’exploration des deux vallons limitant à l’ouest et
au sud le complexe archéologique de La Ferrassie
devrait permettre de préciser la morphologie
originelle du secteur du site et de ses proches
abords avant sa profonde modiication par les
carrières et la modiication due à la réalisation
de la route. La section concernant le vallon ouest
devrait nous informer sur la morphologie de la
base de la plateforme sur laquelle s’appuie la
route. Celle du vallon sud nous informera sur la
nature même du grand abri (ancienne grotte ou
abri-sous-roche). Elle permettra de connaître la
morphologie du substratum calcaire et, donc,
l’épaisseur du remplissage au niveau de la zone de
fouille.
Bibliographie
Dès cette année nous devrions disposer de nouveaux
éléments importants, les premières dates concernant à la fois
le moustérien à biface de la base et du Moustérien de type
Ferrassie donc des sépultures néandertaliennes La Ferrassie 1
et 2.
Pour les années à venir, l’examen attentif des processus
sédimentaires doit se poursuivre en prenant particulièrement
en compte le rôle joué par le karst à la fois en tant que
pourvoyeur de matériaux et agent érosif. Ceci nous amène
obligatoirement à travailler en plus de la zone de fouille
investie en 2010-2011 dans l’ensemble du karst situé au dessus
(petite grotte et petit abri) et d’étudier la morphologie et le
remplissage des deux vallons.
La reconnaissance du paléo-karst nécessite au moins
quatre opérations :
1) Suivi par nettoyage manuel du mur sud de la grotte dont la
partie haute a été détruite par une carrière. Ce travail a pour
but de préciser les relations entre cette cavité et le grand abri
au niveau de la plateforme d’où provient les sédiments et les
industries de la séquence ouest ;
2) Sondage dans la grotte pour vériier si le sol de la cavité
a été atteint par les fouilles anciennes et voir les potentielles
liaisons au niveau des entonnoirs entre la grotte et le grand
abri ;
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