Paysages énergétiques
> ERIC LUYCKX
Chercheur�associé E�OPIA, travaille chez MÉ�ADE�IGN, im�li�ué dans les
asbl NÉGAWA��, PA��EUR� D’ÉNERGIE, �RAVAUX�PUB�IC�
usages
eric.luyckx@metadesign.be
stoc�er
stoc�er
agriculture
éclairer
chauffer transformer outils
�esticides
engrais
transformer
énergie
loisirs
éclairer
chauffer
manger
éclairer
chauffer
usage domesti�ue
�roduire
transformer
conditionner
stoc�er
industrie
éclairer
chauffer
vendre
transformer
stoc�er
commerce,
services
éclairer
chauffer
trans�ort
Poser la question de l’énergie revient à s’engager dans un dédale de
considérations qui déroute plus d’un « café du commerce ». Energie
consommée, disponible, accessible, négociable, soutenable…
Inévitablement, sur ces questions, on croise le fer, souvent avec une
vue partielle de la problématique. Comment dans ces conditions envisager un futur énergétique réaliste et soutenable ? Petit survol de ce
paysage énergétique belgo-européen, histoire de créer une vue d’ensemble de quelques concepts.
153
extraire
raf�ner
distribuer
Paysage énergétique
à quoi consomme-t-on de l’énergie ?
Usages
Dans notre société, toute activité présente une « signature » énergétique. L’énergie est une sorte de « traceur » (cumulatif) de l’activité. La
sophistication constante des biens et services que nous consommons se
traduit par une cascade de dépenses énergétiques.
• consommation directe
• consommation d’énergie «grise»
extraction
production
distribution
utilisation
déchet
tri
traitement
ré-utilisation
recyclage
En rouge � énergie consommée �ar l’utilisateur, en vert � énergie «grise»
Cette revue que vous lisez, suppose des matières premières mais surtout beaucoup d’énergie pour arriver entre vosE���mains.
Vous la lisez
L����� �� ������� ����
peut-être sous un éclairage dédié… Elle finira sur une étagère où elle
consommera de l’espace que vous chauffez jusqu’au jour où, obsolète,
elle deviendra un déchet à traiter. Le fait de la lire implique donc deux
concepts assez distincts, l’énergie grise « inscrite » dans le cycle de vie
de l’objet, et l’énergie « directe » au point de consommation (énergie
finale) repérée par vos compteurs.
In fine, nous utilisons l’énergie pour quatre fonctions majeures : thermique (chauffage, cuisson, séchage…), mécanique (transport, machines…), électromagnétique (éclairage, électroménager, électronique…) et
chimique (alimentation, engrais…).
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à quoi consomme-t-on de l’énergie ?
Rapport de grandeur
L’énergie grise consommée par un ménage belge moyen représente
deux fois l’énergie « directe ».
• quelques chiffres
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E��� L����� �� ������� ����
Si on se réfère à l’empreinte écologique idéale (selon le WWF entre
1,6 et 1,8 hectare/habitant), on constate que la Belgique projette une empreinte 10 fois supérieure à sa surface réelle. Autrement dit, la ville de
Bruxelles nécessite une superficie égale à la Belgique entière pour satisfaire « durablement » à ses besoins (entre autres énergétiques). Outre la
question de savoir à qui on emprunte les 9 dixièmes restants (générations
futures, populations du globe), on se rend immédiatement compte que
l’idée même d’autonomie énergétique belge ou wallonne tient, pour un
certain temps encore, de l’utopie. Partant de ce constat, l’énergie verte
doit être envisagée dans un contexte d’utilisation rationnelle de l’énergie
et sur une aire plus étendue, celle de l’Europe par exemple. Et à l’échelle
européenne, les avis s’accordent pour considérer qu’avec les technologies
éprouvées et disponibles, le potentiel d’énergie verte est de plus ou moins
25% de l’énergie consommée aujourd’hui.
155
Filières énergétiques
principe
dequantité
�li�red’énergie consommée est bien sûr fonction
L’impact
de cette
de l’efficacité de la chaîne de production tout au long du cycle de vie des
produits et services mais aussi de celle de la « filière énergétique ».
énergie utile
�ertes
énergie utile
énergie utile
�ertes
�ertes
�rocessus
lam�e
voiture
(transformation)
(incandescence)
(trans�ort)
Nous transformons l’énergie pour des usages précis (se chauffer, transporter, éclairer, manger…), la quantité d’énergie utilisée à ce stade est
l’énergie finale, utile ou énergie consommée (donc juste avant l’ultime
transformation). Cette transformation n’est malheureusement pas efficace à 100%, une partie de l’énergie se perd (la plupart du temps en chaleur). Une ampoule classique à incandescence ou halogène, par exemple,
plafonne à 5-10 % de transformation utile (rayonnement lumineux) et
dissipe le reste en chaleur.
En partant de ce point d’usage final, remontons la filière énergétique.
A de rares exceptions près, l’énergie a été transformée en vecteur pour
notre facilité (essence, électricité…), c’est l’énergie secondaire. Or, à chaque transformation : transports, stockage, extraction… correspond une
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perte. A la source de la filière, on obtient une consommation d’énergie
primaire qui est le cumul de l’énergie finale et de toutes les pertes, c’est
l’emprise réelle sur la ressource.
Equipements et comportements « end of pipe »
En remontant les filières, on perçoit clairement l’effet démultiplié de la
principe de �li�re
performance au point d’utilisation ou de la filière choisie sur la ressource.
CHAUFFAGE AU MAZOUT
énergie utile
confort thermi�ue � ��
�ertes
remonter
la �li�re
�rocessus
(transformation)
�ertes
isolation
�ertes �
chaudi�re
confort thermi�ue � ��
�ertes �
transformation
�ertes �
trans�ort,
stoc�age
�ertes �
extraction,
raf�nage
CHAUFFAGE ÉLECTRIQUE
�uantité
d’énergie �uisée
dans la ressource
nécessaire
chauffage
électri�ue
Les progrès ont eu à cet égard des effets
contradictoires :chauffage
d’une part
ressource
�
au mazout
na��e
de �étrole
ressource
l’évolution de la performance intrinsèque
de� la plupart des
technolona��e de �étrole
gies permet d’atteindre une augmentation de l’efficacité énergétique
réellement significative, mais d’autre part, trois phénomènes compensent largement cette évolution : la sophistication des produits et
services qui pour une même fonction offrent un bon nombre de caractérisitiques accessoires, l’amélioration des process qui fait baisser
les coûts de production multipliant le nombre de consommateurs et
enfin l’obsolescence programmée (jetable, phénomène de modes …)
qui accélère le remplacement.
157
Du fait de l’impression d’une nature inépuisable et externalisée, la
performance relative « toujours mieux » est culturellement moins valorisée que la performance absolue, « le toujours plus ». La finitude
n’est perçue que par les visions globalisantes, la nôtre, homo-centriste
et instrumentalisante, n’en explore même pas les rapports.
Réseaux
Les filières se déploient dans l’espace sous la forme de réseaux. Ces
réseaux s’imbriquent, s’interconnectent les uns aux les autres (le réseau électrique domestique est relié au réseau éléctrique du distributeur, qui l’est à celui de la distribution de gaz pour ses centrales,
mais aussi au réseau européen…). La structure (historique, technique,
politique…) de ces réseaux influence en retour l’efficacité de la filière,
sa stabilité d’approvisionnement, sa capacité à introduire des sources
alternatives etc. En Belgique, le réseau électrique, par exemple, est
pour des raisons historiques (opérateur d’état) et techniques (nucléaire) très centralisé. Les conséquences directes sont, entre autres, une
difficulté d’accès au réseau pour d’autres opérateurs, des lignes à très
hautes tensions qui sillonnent le pays, une fragilité structurelle (ex. :
tempêtes de 99 en France)…
Vecteurs
Au travers des réseaux, l’énergie circule. Les quatre fonctions énergétiques ont des vecteurs correspondants : thermique (vapeur, eau
chaude…), mécanique (ressorts, arbre moteur, fluides…), électromagnétique (électricité, lumière, magnétisme), chimique (carburants, aliments…). Cependant l’électricité et les vecteurs chimiques sont les plus
utilisés. L’électricité pour ses vertus liées au transport (vitesse, silence…), les autres pour celles liées au stockage (composés assez stables).
L’électricité, par exemple, est le vecteur idéal pour les énergies vertes
« mécaniques » : l’éolien, l’hydraulique. Certaines filières passent successivement d’un vecteur à l’autre, par exemple pour le stockage.
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énergie primaire, vecteurs, énergie �nale
électromagnéti�ue
électro, électroni�ue, télécom…
usage
électri�ue
mécani�ue
(énergie �nale)
(énergie �nale)
(énergie �nale)
chimi�ue
alimentation
thermi�ue
cuisson, chauffage, industrie
mécani�ue
moteurs
électricité
(vecteur)
trans�ort
électricité
(vecteur)
(vecteur)
électromagnéti�ue
électricité, magnétisme, lumi�re
chimi�ue
carburants, aliments
thermi�ue
va�eur, eau chaude
granulés
���������
��sso��
(vecteur)
extraction
éolien � vent
bois
(énergie �rimaire)
(énergie �rimaire)
(énergie �rimaire)
renouvelables
non renouvelable
Stockage
Sans aborder les effets de marché induits, le stock est un élément clef de la
filière énergétique qui d’absorber les écarts entre l’offre et la demande. Comme toute transformation il génère des pertes. Principaux types de stockage :
P��f��m���� d� �t��k�g� : ���d�m��t
�t�b���té
����g�� m���q��
Retenue ou �om�age hydrauli�ue
Air com�rimé
Volant d’inertie
> conversion électri�ue
+
�
+
+
+
�
+
�
+��
+
+
?
�
?
����g�� th��m�q��
Inertie thermi�ue de matériaux (eau, béton, �ierre, terre…)
Changement de �hase (sel, �ara�ne…)
> conversion mécani�ue
����g�� é�é�t��q��
Condensateurs
�u�raconducteurs
> conversion mécani�ue, chimi�ue
����g�� �h�m�q��
Biomasse (�li�re bois, biocarburants, biogaz…)
Hydrog�ne
Electrochimi�ue (accumulateurs…)
> conversion thermi�ue, électri�ue
159
+
+
�
+
+
�
réponse
à la
Réponse
à la demande
demande
cycles
(annuel�
�uotidien)
offre variable
demande variable
offre com�lémentaire
stoc�age
mix énergie
modi�er demande
étendue géo
Illustration des interactions demande � offre. A �o��� ��� �� �o����� �s� �d�������
po�� ��� off�� �o������ (�yp� ���������), ��s ��s ������s��s ������� �� j�� �v��
��� �������� ���d���� à o�����s�� ��� d����d� ��� �bso�b� �� s��p�od����o� d�s
p���od�s (d� d����d�) «����s�s». Fo�d d’����� : �o��b� d� �� d����d� ����������
s�� 24�, E���.
Tous les processus, de la production à l’utilisation, suivent leur propre cycle, leurs propres aléas. Dès lors, pour absorber ces différences, il
faut diversifier, stocker, étendre les couvertures géographiques et donc
les réseaux… ou modifier la demande elle-même. Si ces mesures relèvent de la précaution à l’échelle du particulier, elles deviennent stratégiques à l’échelle d’un pays (ou d’un grand groupe industriel). Avec la
double contrainte de la culture du flux tendu (logique de marché pour
laquelle la demande est prioritaire sur l’offre, d’où une très grande variabilité), et de la fragilité inhérente à tout réseau, la réponse actuelle
privilégie la surcapacité. Du moins chez nous, ailleurs on hésite pas à
« délester » tout un quartier de ville pour satisfaire un pic de demande
industrielle par exemple.
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Cycles
Le caractère renouvelable des énergies vertes est très étroitement lié à
leur cycle. À titre de comparaison, les énergies fossiles sont consommées
un million de fois plus vite que le temps qu’il a fallu pour les constituer.
Il faut 10 jours pour renouveler l’eau dans l’atmosphère, 1 à 30 ans pour
la biomasse…
Disponibilité, accès et dépendance
Le sujet même de ce dossier, «après le pétrole» laisse entendre la dimension cruciale de l’accès à l’énergie, de sa disponibilité, de notre dépendance, a fortiori quand cette énergie représente l’essentiel de notre
consommation. A l’échelle nationale voire européenne, soulignons que à
part quelques réserves de charbon, toutes les sources indigènes sont des
énergies vertes. On écornera en passant l’idée d’un Uranium local qui
nous assurerait une indépendance énergétique alors qu’il vient de l’autre
côté de la planète. Par ailleurs, certaines énergies vertes garantissent une
stabilisation du coût de l’énergie (solaire, éolien, hydraulique). Le prix du
kWh étant fonction de l’investissement dans l’installation, de son entretien et non de la source d’énergie.
Un marché
Sujet aux influences croisées de tous ces concepts, un marché hautement stratégique et sensible pèse à l’échelle mondiale… et locale. Du fait
de notre dépendance (+de 95%) et de notre consommation énergétique
élevée, notre économie y est particulièrement sensible. Notons le contexte particulier de la libéralisation des deux derniers marchés de l’énergie :
l’électricité et le gaz. On peut lire cette libéralisation comme une formidable opportunité pour les énergies vertes. Encore faut-il régler le risque
de dumping de la part de SUEZ qui a sous le coude un parc industriel
dont il jouit seul (alors que nous l’avons financé) et lui permet de vendre
à un prix plus que compétitif tout en tirant des marges substantielles.
161
Energies vertes, on est nés sous une bonne étoile
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(�erre��une)
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fusion
cycles
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rayonnement
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attraction
(�oleil��erre)
moteur
thermodyna�
mi�ue
(climati�ue)
marins
eau
«vent»
���������
cycles relief
(annuel��uotidien)
����
attraction
marées
courants
houle
hydro
éolien
solaire �
biochimie
biomasse
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(minéraux, gaz)
gravité
solaire �
carbone
oxyg�ne
hydrog�ne
…
���������
géothermie
�ssion (noyau)
atelier_SER_01.indd 1
L’énergie disponible sur Terre vient du rayonnement solaire (force
électromagnétique issue de la fusion nucléaire au cœur du Soleil), de l’attraction universelle (force gravitationnelle liée à l’interaction entre elles
des masses du Soleil, de la Terre, de la Lune et des corps à la surface de la
Terre) et pour une part plus faible du rayonnement du noyau de la Terre
(énergie thermique liée à la fission nucléaire au sein du noyau). Deux
grands phénomènes sont issus des influences complexes de ces forces :
d’une part un formidable « moteur climatique » (mécanico- et thermodynamique) et d’autre part une énorme « usine biochimique ».
Le moteur climatique produit les cycles marins, de l’eau, les vents; il
influence l’ensoleillement, la biomasse. L’usine biochimique produit la
biomasse qui influence également le moteur climatique.
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26/11/06 14:40:12
Sur l’échelle du temps, leurs cycles de renouvellement varient très fortement : semi-diurne pour les marées, diurne pour l’ensoleillement, saisonnier pour l’ensoleillement et la biomasse…
Une part du f lux solaire se stocke naturellement, essentiellement
sous forme hydraulique (en eau dans l’atmosphère et sur le relief),
thermique (effet de serre naturel) et de biomasse (dans les tissus des
végétaux).
Du fantasme à la rationnalité
Outre les apects technologiques (voir l’article de Michel Huart),
les énergies vertes comportent une dimension culturelle très riche,
propre à faire vibrer la fibre pragmatique «ingénieur» largement répandue en Belgique et qui explique en partie la séduction liée à la
« maîtrise » du nucléaire ou plus récemment autour du projet ITER.
Séduction largement exploitée dans l’argumentation pro-nucléaire.
Si depuis les années 70, le passionné «énergie verte» passait pour
un indécrottable soixante huitard, il est depuis peu de plus en plus
évident que, parallèlement à l’argumentation chiffrée assez démonstrative des « techno-convaincus », se profile un comportement basé
sur une valorisation sociale de la posture du « pionnier énergétique »,
qui part d’une reconnaissance du geste sociétalement responsable (à
l’instar du commerce équitable, du bio…).
Aussi, alors que la plupart des projections sur la part des énergies renouvelables sont plutôt « conservatrices » (technologies éprouvées, évaluations prouvées, projets engagés…), le modèle culturel émergent pourrait doper les prévisions. Il n’est déjà, en effet, plus absurde de payer 3
fois le prix pour une chaudière verte ou d’investir 40000 euros dans du
photovoltaïque avec un retour sur 15 ou 20 ans(les acteurs financiers
s’intéressent d’ailleurs de près à ces nouveaux profils).
163
Du geste adapté aux nouveaux mythes
Si la réalité nous rappelle prosaïquement que la logique de l’économie du geste adapté reste la seule approche réellement durable, elle nous
transmet aussi en héritage les travers d’une posture largement dispendieuse. Nos pionniers énergétiques font encore le grand écart entre leurs
nouveaux mythes et le terrain. Mais soit ! Ils assument et c’est là, le nouveau message. S’ils assument, c’est qu’un feedback leur parvient, et donc
que ce feedback leur est lui-même socialement construit.
Lors de la présentation d’un exercice d’atelier d’écriture, un professeur
fut surpris par cette récente évolution. L’exercice consitait à rédiger un communiqué de presse annonçant que Philippe et Mathilde choisissaient de
construire une maison bioclimatique. Présentation des arguments princiers,
technologiques, sociaux etc. Sur une cinquantaine d’étudiants, la grande
majorité a cru l’événement réel. L’essentiel n’est pas qu’ils aient cru la chose
possible mais qu’ils aient adhéré à l’idée de force de l’exemple, du modèle.
A l’extrême, apparaissent aussi des projets, parfois excentriques, revisitant le sport, la culture, la science, l’industrie avec un message (de
valorisation ?) écologique. Peu importe en définitive, ils participent au
faisceau de convergences qui favorise le changement de comportement.
Projet Venturi Astrolab, véhicule autonome «hybride électrosolaire» (venturi.fr)
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164
Quelques scenarii… Postures complémentaires.
Axe 1 - la culture
- Les énergies vertes comme moteur de changement comportemental
Dans le contexte du changement, le soutien de la motivation (réf lexive) vis-à-vis des choix portés passe par l’image plus ou moins
positive que ceux-ci arrivent à faire résonner dans la sphère sociale. Dès lors la promotion des énergies renouvelables et leurs images
positives peuvent constituer le point de départ d’un changement
de comportement assumé. L’autovalorisation engageant le processus du next step, on prêchera un(e) convaincu(e) pour les étapes
suivantes même si rationnellement on aurait dû commencer par
celle-ci. L’exemple du chauffe-eau solaire est caractéristique : quel
est l’intérêt rationnel de se pencher prioritairement sur moins de
3 % de sa consommation d’énergie ? Comportementalement pourtant, il construit peu à peu une conscience énergétique entraînant,
entre autres une attitude économe…
- Information, réseaux de partage de bonne pratique, construction de nouvelles identités
Le repérage des nouvelles identités culturelles, de l’information
adéquate… n’est pas évident pour le quidam puisqu’elles se projettent dans une sphère qui interfère peu avec la sienne.
Dès lors, il faut lui offrir des points d’entrée explicites (ex : thématiques intégrées dans les medias, agitateurs de premier plan
—A. Gore, N. Hulot, A. Hubert, primes, publications officielles,
salons, réseaux…) et organiser derrière ceux-ci l’information, les
relais, le partage de bonnes pratiques, des argumentaires de supports vulgarisés…
165
Axe 2 - l’énergie grise
- Intensité énergétique : gestion de la demande et efficacité énergétique (structurelle et technologique)
C’est le gisement des négawatts et c’est celui qui est aussi le plus instable. L’analyse de l’évolution des comportements montre une érosion
cyclique des réflexes d’économie d’énergie sans doute face à l’apparition
de nouveaux produits ou contextes de consommation. D’autre part, l’efficacité énergétique, elle, se cumule dans le temps - pour autant que de
nouveaux comportements ne la réduisent à néant.
Axe 3 - le marché
- Substitution (de filière et/ou de vecteur) par effet de marché
Aujourd’hui, l’énergie fossile offre le kWh à un prix qui reste exceptionnellement bas. Les énergies alternatives sont difficilement concurrentielles. Mais le marché est très sensible. Une variable est perturbée (ex
statut des réserves…) et le rapport peut changer. Le premier « réflexe »
est le remplacement du vecteur concerné par le substitut le plus proche,
une forme d’adéquation structurelle qui permet de maintenir le réseau de
distribution. D’où l’engouement sur la biomasse dans le contexte de pénurie pétrolière qui tient au fait que les vecteurs (biocarburants) supposent relativement peu de modification de la filière aval. Le développement
s’engage sur un marché potentiel indépendamment des capacités réelles
en amont : superficie disponible à la production, concurrence sur les sols,
impact sur la biodiversité (culture intensive, ogm)…
- Substitution (de filière et/ou de vecteur) plannifiée, régulée
Si le seuil de rentabilité paraît trop éloigné, on peut modifier les paramêtres artificiellement (choix politiques) : aides, (dé)taxation, internalisation de coûts « colatéraux », certificats verts, lois… Ainsi le nucléaire
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166
est devenu concurrentiel car l’état a injecté des ressources financières
énormes en recherche, en soutien industriel, en couverture de risques…
de même, la loi de sortie du nucléaire (ré)ouvre le champs à d’autres sources d’énergie (pas forcément vertes d’ailleurs).
Axe 4 - la technologie
- Décentralisation, « déconcentration » (réseaux)
Pour le développement, une question récurrente est l’intégration des
énergies vertes aux réseaux existants, créant une tension entre le « taux
de charge » sur la ressource locale et leur utilisation « in situ ». L’avantage
des réseaux réside dans l’effet d’échelle (géographique et diversité) sur
la production, le stockage… par contre, leurs contraintes financières ou
techniques peuvent amener au développement de solutions « off-grid ».
Avec la libéralisation, l’internalisation de tous les coûts, les incitants,
l’évolution technologique… on pourrait voir apparaître de nouveaux effets
de seuil en faveur de l’autoproduction (particulière, industrielle…) ou de
micro-réseaux à l’échelle d’un quartier
- La « recombinaison fonctionnelle » au point d’utilisation (analyse
systémique de la demande)
Très souvent, l’approche (analytique) classique nous conduit à choisir des réponses ponctuelles, segmentées, partielles : quelle énergie pour
le chauffage, puis idem pour l’éclairage, le déplacement… Or l’analyse
systémique de la demande permet de changer le périmètre de réflexion :
chauffage + eau chaude… puis + éclairage… + transport… + alimentation… + traitement des déchets… etc.
La cogénération, production combinée d’électricité et de chaleur, la
tri-génération (électricité+ chaleur + froid) sont des applications de cette
logique qui commence à être connues. Elles permettent de s’affranchir de
167
limites technologiques ou physiques. D’autres, plus confidentielles comme celles mises en œuvre dans les éco-quartiers (BedZed, Friburg, EcoZac…), permettent en analysant les rapports « toutes consommations » /
« toutes ressources » / « tous dispositifs », en recombinant les fonctions et
leurs interactions, de minimiser les intrants et les rejets, et donc augmenter l’autonomie du « périmètre ».
- La technologie appropriée
La recherche industrielle offre aujourd’hui, comme en retour, aux
technologies des énergies vertes des outils de développement inspirés par
l’écologie : éco-conception, éco-design, analyse du cycle de vie, modèles
de simulation des impacts (financiers, environnementaux, sociaux)…
Dans le modèle actuel, la technologie risque de piéger l’utilisateur en
l’asservissant au dispositif de production et/ou de suivi. Les Etats-Unis,
par exemple, possèdent la majorité des brevets sur les énergies vertes, la
Chine est un des pays qui investit le plus dans l’industrie verte, le marché
des technologies vertes est bien en passe de devenir une foire d’empoigne. Dès lors qu’il faut un PC pour règler une simple chaudière à bois,
on peut se demander quel accès à l’autonomie nous réserve le nécessaire
renouvellement du parc des systèmes énergétiques utilisés. Doit-on alors
soutenir l’autoconstruction qui met dans la balance plus d’autonomie et
moins de rendement ?
- La recherche comme vecteur culturel
Bouclons la boucle, la recherche est un formidable vecteur de communication dans notre société. Des professeurs «Tournesol» à d’autres
plus émérites, de la recherche fondamentale à celle (plus) appliquée, le
monde des énergies vertes est en effervescence. Qui le sait ? Des moyens,
certes démesurément faibles comparés au nucléaire, sont engagés dans
tous les labos de la planète. Qui en rapporte ? Des dépôts de brevets, des
découvertes, des constructions de prototypes ont lieu chaque semaine.
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Le saviez-vous ? Or, toutes ces informations recèlent un parfum d’avenir, d’espoir autrement plus engageant qu’ITER par exemple, non ?
Extraits d’une veille sur internet des infos (en français) sur l’énergie verte
(et sujets connexes) ea www.enerzine.com, alertes Google…
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