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CHAPITRE III : LES BILANS D'ENERGIE 1. Les chaleurs de réaction La combustion est la réaction exothermique des éléments constituant les combustibles avec de l'oxygène pris dans l'air, dans le but de produire des actions calorifiques nécessaires à la réalisation d'un grand nombre d'opérations industrielles, au chauffage des locaux et à la production de travail mécanique par des installations motrices thermiques. Les éléments actifs des combustibles sont le carbone, l'hydrogène et le soufre, ce dernier n'étant pas souhaité mais souvent présent en faible proportion. Ces éléments forment des composés contenant également de l'oxygène et de l'azote. Ils brûlent conformément au formalisme des équations de la chimie, formalisme permettant d'identifier le nombre de kmoles d'oxygène nécessaire, le nombre de kmoles des divers corps produits, et la quantité de chaleur dégagée par la combustion d'une kmole de constituant. On écrit ainsi, pour les principaux combustibles simples : Cgraphite + O2 → CO2 + 393400 kJ H 2 + 0.5 O2 → H 2Ovap + 241800 kJ H 2 + 0.5 O2 → H 2Oliq + 286860 kJ S + O2 → SO2 + 296930 kJ CH 4 + 2 O2 → CO2 + 2 H 2Ovap + 802400 kJ CH 4 + 2 O2 → CO2 + 2 H 2Oliq + 892520 kJ C3 H 8 + 5 O2 → 3CO2 + 4H 2Ovap + 2044400 kJ C3 H 8 + 5 O2 → 3CO2 + 4H 2Oliq + 2224640 kJ CO + 0.5 O2 → CO2 + 282400 kJ Cette écriture hybride est en fait une forme condensée, combinant la stœchiométrie et le bilan d'enthalpie standard. Elle exprime que la différence entre l'enthalpie des réactifs pris en leur état standard et celle des produits pris en leur état standard constitue la chaleur de réaction du système. Il s'agit là de l'application du premier principe de la thermodynamique au système ouvert évoluant de façon isobare de l'état initial 1 (les réactifs) à l'état final 2 (les produits). Pour un tel système, on doit en effet écrire l'équation de conservation de l'enthalpie totale H 0 sous la forme : H 20 − H 10  ∆ H 0 = Σ Q p MECA 2160 2003 39 où Σ Q p désigne la somme des effets calorifiques appliqués au système isobare par le monde 0 extérieur. L'enthalpie totale H 0 étant la somme de l'enthalpie standard H 273 et de l'enthalpie sensible h  ∫ T 273.15 c p dT , le choix de l'état initial et de l'état final aux conditions standard annule les valeurs d'enthalpie sensible, et conduit donc à réécrire la relation ci-dessus sous la forme : p 0 0 0 H 273 ( 1 ) − H 273 ( 2 )  −∆ H 273 = −Σ Q273 p Sous cette dernière forme, le terme −Σ Q273 est l'effet calorifique effectué par le système sur le monde extérieur, les produits de la réaction étant revenus aux conditions standard prévalant pour les réactifs. C'est cette valeur −Σ Q27p 3 qui est portée dans le membre de gauche des équations symboliques ci-dessus, la valeur positive de ce terme correspondant bien entendu à des réactions exothermiques. Les valeurs des enthalpies molaires standard ont été tabulées pour la plupart des substances à 0 25 °C (298.15 K) et sont habituellement désignées par le symbole H 298 . Ces valeurs ne 0 diffèrent de celles de l'enthalpie standard H 273 que par le terme d'enthalpie sensible, conformément à la relation : 0 0 H 298 = H 273 +∫ 298.15 273.15 c p dT Il est donc aisé d'exprimer les chaleurs de réaction à 0°C à partir des tables d'enthalpie standard à 25°C , conformément à l'expression suivante : p 0 0 −Σ Q273 = −∆ H 273 = − ∆ H 298 −∫ 273.15 298.15 ∆c p dT l'opérateur ∆ étant le symbole de la différence entre les produits de la réaction (état final 2) et les réactifs (état initial 1). On peut d'ailleurs généraliser cette expression au calcul des chaleurs de réaction à température T quelconque : −Σ QTp = −Σ QTp0 − ∫ ∆c p dT T T0 Cette relation est connue sous le nom de formule de Kirchhoff. MECA 2160 2003 40 L'incidence de la pression sur les valeurs des chaleurs des réactions intervenant dans la combustion peut généralement être négligée. Cette incidence est en effet d'une part strictement nulle en vertu de la loi de Joule, dans le calcul des enthalpies des réactifs et produits gazeux, dont on peut assimiler le comportement à celui du gaz idéal, et est d'autre part quasi insignifiante pour la contribution au bilan d'enthalpie des réactifs et produits solides et liquides. Cette remarque justifie que l'on écrive : −Σ QTp = − ∆ H T0 pour une valeur quelconque de la pression, alors même que les enthalpies standard sont définies à la pression de référence p0 = 100 kPa . Les corps simples ayant par convention une enthalpie molaire nulle, et les produits d'oxydation complète CO2 et H 2O ayant pour enthalpie standard : = −393400 kJ / kmole 0 H 273 ( CO2 ) H 0 273 ( H 2O gaz ) = −241800 kJ / kmole il est aisé de calculer les chaleurs de réaction de combustibles composés pour autant que l'on en connaisse l'enthalpie standard. Ainsi, il est intéressant de noter que le "carbone" considéré comme combustible n'est jamais pur et ne se présente donc en pratique sous aucune des deux formes cristallines (graphite ou diamant) auxquelles se réfèrent les valeurs de son enthalpie standard. Les complexes carbonés les plus proches d'un carbone pur sont les charbons anthraciteux naturels, les cokes minéraux obtenus par dévolatilisation de houille ou comme résidu de raffinage du pétrole, et le coke végétal (charbon de bois) obtenu par pyrolyse des ligno-celluloses. L'évolution géologique naturelle lente des houilles anthraciteuses leur confère une structure cristalline graphitique troublée par la présence d'hydrogène qui en est "l'impureté" majeure (quelques % en fraction massique). La structure macroscopique lamellaire typique du graphite est nettement moins perceptible pour les cokes, car leur élaboration porte sur une échelle de temps incomparablement plus courte que celle de la géologie. Les cokes se présentent dès lors comme des agglomérats anarchiques spongieux où l'on peut retrouver le "squelette" de la structure primitive du corps dévolatilisé. Les cokes les plus purs comportent encore de l'ordre de 1% d'hydrogène en fraction massique. Ils répondent ainsi à une formulation stœchiométrique CH s avec une valeur MECA 2160 2003 41 0.10 < s < 0.20 . Leur enthalpie standard est donnée avec une assez bonne approximation par la relation : 0 H 273 ( CH s ) = 10860 s kJ / kmole La stœchiométrie d'oxydation complète d'un tel coke s'écrit : CH s + ( 1 + s s ) O2 → CO2 + H 2O 4 2 Il en résulte pour la chaleur d'oxydation complète de ce coke la valeur : p − SQ273 = 10860 s + 393400 + 241800 s = 393400 + 131760 s kJ / kmole 2 Suivant la valeur de s, on obtient donc pour 1 kg de coke, une chaleur de réaction allant de 33500 à 34300 kJ/kg Enfin, si l'on suppose que les réactions considérées ont lieu non pas sous pression constante, mais bien dans un volume constant, les chaleurs de réaction résultent alors de la différence entre les énergies internes U T0 ( 1 ) des réactifs et celles U T0 ( 2 ) des produits, conformément à la relation de conservation de l'énergie totale (en l'absence de termes d'énergie cinétique ou potentielle) : U 20 − U 10 = ∆U 0 = Σ QV ce qui donne bien : U T0 ( 1 ) − U T0 ( 2 ) = −∆U T0 = −Σ QTV Comme l'enthalpie et l'énergie interne sont liées par la relation de définition H = U + pV il en résulte que − ∆ H T0 = −∆U T0 − ∆( pV ) On aboutit ainsi à la relation duale liant la chaleur de réaction sous pression constante −Σ QTp à la chaleur de réaction sous volume constant −Σ QTV : MECA 2160 2003 42 −Σ QTp = −Σ QTV − V ∆ pT −Σ QTV = −Σ QTp + p∆VT La première de ces relations signifie que la chaleur de réaction sous pression constante −Σ QTp peut se calculer a partir de celle sous volume constant −Σ QTV en déduisant de celle- ci le produit du volume constant V sous lequel la réaction a été menée, par la variation de pression ∆ pT qui en a résulté en considérant une même température T avant et après réaction. La seconde signifie que la chaleur de réaction −Σ QTV peut se calculer a partir de celle −Σ QTp en ajoutant a celle-ci le produit de la pression constante p sous laquelle la réaction a été menée, par la variation de volume ∆VT qui en a résulté en considérant une même température T avant et après réaction. On notera que les formules ci-dessus sont valables en toute généralité, et ne postulent aucune hypothèse sur la nature des systèmes considérés. Si, dans ceux-ci, les termes de variation de volume ou de pression à prendre en compte sont relatifs à des constituants se comportant comme des gaz idéaux, les relations duales ci-dessus se réduisent à la forme unique : ( −Σ QTp ) − ( −Σ QTV ) = −∆( ng ℜT )T = −ℜT ∆ ng où ℜ est la constante universelle (molaire) du gaz idéal, de valeur 8,3143 kJ/kmole.K, et où ∆ ng désigne la variation ng ( 2 ) − ng ( 1 ) du nombre de kmoles de gaz idéal engendrée par la réaction. La relation duale entre −Σ QTV et −Σ QTp est connue sous le nom de formule de Hess. En combinaison avec la formule de Kirchhoff, elle permet de calculer la chaleur de réaction sous n'importe quelle pression ou dans n'importe quel volume, à une quelconque température. Nous pouvons en illustrer l'application à la combustion du CO en CO2 , pour laquelle les tables d'enthalpies standard permettent le calcul immédiat de p − SQ273 = 282400 kJ / kmole La stœchiométrie de la réaction normée à la kmole du corps combustible ( le CO ) est : MECA 2160 2003 43 CO + 0.5 O2 → CO2 Tous les constituants en sont des gaz assimilables au gaz idéal à 00C et 100 kPa (l'approximation est excellente pour CO et O2 , un peu moins bonne pour CO2 ). On peut donc écrire ∆ng = 1 − 1.5 = −0.5 Il en résulte qu'à 273.15 K, on a donc : V − SQ273 = 282400 − 1135 = 281265 kJ / kmole V p L'écart entre −Σ Q273 et −Σ Q273 est de moins de 0.5 % , alors même qu'il s'agit d'un des cas les plus sensibles qui se puisse rencontrer. 2. Les pouvoirs calorifiques On appelle pouvoir calorifique d'un combustible l'action calorifique que peut produire la combustion complète de l'unité de quantité de ce combustible. Le pouvoir calorifique se détermine en principe à 0°C, suivant les méthodes de la thermochimie et de la thermodynamique, en mesurant l'action calorifique ou la chaleur obtenue par le refroidissement jusqu'à 0°C des produits résultant de la combustion, celle-ci étant réalisée en prenant initialement le combustible et le comburant à la température 00C. Si la combustion et la mesure consécutive ont lieu en maintenant le système sous une pression constante, le pouvoir calorifique est dit à pression constante : nous le désignerons alors par PCp. Si la combustion et la mesure consécutive ont lieu en maintenant le volume du système constant, le pouvoir calorifique est dit à volume constant; nous le désignerons alors par PCV. Défini par ces conditions précises, les pouvoirs calorifiques PCp et PCV correspondent aux p V chaleurs de réaction −Σ Q273 et −Σ Q273 de l'oxydation complète du combustible telles que définies ci-dessus. Enfin, suivant que l'unité de quantité considérée est la kmole , le kg ou le mN3 (uniquement pour les gaz), le pouvoir calorifique sera molaire, massique ou volumique. Dès lors, en application de la formule de Hess, on peut écrire pour les pouvoirs calorifiques comme pour les chaleurs de réaction : MECA 2160 2003 44 V PC p = PCV − V ( p2 − p1 )273 p PCV = PC p + p(V2 − V1 )273 Dans cette formulation, valable en toute généralité, les indices 1 et 2 sont relatifs aux états initial et final des pressions ou des volumes associées à la mise en oeuvre de l'unité de quantité du combustible. Comme précédemment pour les chaleurs de réaction, on peut en simplifier l'écriture si les réactifs et produits responsables des variations respectives de pression ou de volume peuvent être considérés comme des gaz idéaux. En désignant ici par ∆ ng la variation n2 − n1 du nombre de kmoles de gaz idéal résultant de la mise en oeuvre de l'unité de quantité du combustible choisi, on obtient, à la température de référence T = 273.15 K , la formule : PC p − PCV = −2270 ∆ ng Les pouvoirs calorifiques massiques ( kJ / kg ) kJ / unité résultent évidemment de la division des chaleurs de réaction à 0°C par la masse molaire M ( kg / kmole ) des substances considérées. Pour les combustibles gazeux, les pouvoirs calorifiques volumiques ( kJ/mN3 )se trouvent en divisant les chaleurs de réaction par le volume 22.710 mN3 de la kmole à l'état normal (0 °C et 100 kPa) Il en va évidemment de même pour le calcul de la valeur de ∆ng intervenant dans la formule de Hess. On peut dès lors calculer les pouvoirs calorifiques à partir des chaleurs de réaction à 0°C, telles qu'elles ont été indiquées au paragraphe 1, en recourant aux tables des enthalpies standard. Pour les combustibles qui contiennent de l'hydrogène, les produits de la combustion comportent de l'eau. Il faut donc préciser si cette eau est ramenée complètement à l'état liquide ou si elle est supposée rester à l'état de vapeur pendant l'opération de la mesure du pouvoir calorifique. Suivant le cas, l'enthalpie standard de l'eau est différente, et donc aussi le pouvoir calorifique. En effet, le passage de l'eau de l'état liquide à l'état vapeur absorbe l'enthalpie de vaporisation hlv ,273 telle que l'on ait : 0 H 273 ( H 2O gaz 0 ) − H 273 ( H 2O liq ) = hlv ,273 MECA 2160 2003 45 On obtient pour les chaleurs de réaction à considérer comme pour les pouvoirs calorifiques correspondants, deux valeurs différant entre elles de la valeurs de la chaleur hlv ,273 affectant l'eau contenue dans les produits de la combustion. On appelle pouvoir calorifique supérieur celui calculé en supposant ramenée à l'état liquide l'eau contenue dans les produits de la combustion, et pouvoir calorifique inférieur celui calculé en supposant que cette eau reste à l'état de vapeur. Nous affecterons le pouvoir calorifique supérieur du suffixe S, le pouvoir calorifique inférieur du suffixe I. Les quatre pouvoirs calorifiques qui peuvent donc se présenter seront désignés par PCS p , PCI p , PCSV et PCIV .Parmi eux, c'est le pouvoir calorifique inférieur à pression constante PCI p qui est le plus important : • • d'une part, la plupart des combustions industrielles ont lieu à pression constante d'autre part on ne peut en pratique guère récupérer la chaleur de vaporisation de l'eau contenue dans les produits de la combustion. La valeur de l'enthalpie de vaporisation de l'eau hlv ,273 est : hlv ,273 = 45060 kJ / kmole = 2501 kJ / kg = 1984 kJ / mN3 Il en résulte que l'on peut écrire les relations suivantes entre PCS p et PCI p : PCS p − PCI p = 45060 nH 2O = 2501 mH 2O = 1984 VH 2O kJ / unité suivant que l'on comptabilise l'eau des produits de combustion en nombre de kmoles nH 2O , en masse mH 2O ou en volume normal VH 2O par unité de quantité du combustible. Si l'on s'intéresse aux pouvoirs calorifiques sous volume constant, en application de la formule de Hess, les valeurs ci-dessus deviennent, en se référant vaux énergies internes : 0 U 273 ( H 2O avec gaz 0 ) − U 273 ( H 2O liq ) = ulv ,273 ulv ,273 = 42790kJ / kmole = 2375 kJ / kg = 1884 kJ / mN3 MECA 2160 2003 46 ce qui donne PCSV − PCIV = 42790 nH 2O = 2375 mH 2O = 1884 VH 2O On notera que si la différence relative entre kJ / unité PC p et PCV est toujours très faible en pratique, celle entre PCI et PCS peut s'avérer assez importante. On remarquera encore que la différence entre PCI p et PCIV n'est pas la même qu'entre PCS p et PCSV : l'écart entre ces deux différence a pour valeur nH 2O ℜT = 2270 nH 2O ( kJ / unité ) , c'est à dire l'effet de la disparition de l'eau de la phase gazeuse, en conformité avec la formule de Hess. 3. Le calcul du pouvoir calorifique des combustibles complexes Comme la pression n'affecte pas en pratique les chaleurs de réaction, la quantité de chaleur dégagée par la combustion de 1kg d'un combustible complexe est égale à la somme des actions calorifiques qu'on obtiendrait en brûlant séparément chaque composé chimique constituant ce combustible. Le pouvoir calorifique d'un combustible complexe peut donc être calculé si l'on connaît la composition chimique de celui-ci. Ceci n'est guère le cas que des seuls combustibles gazeux, dont le faible nombre de composants essentiels en rend l'identification et le dosage faciles. Il n'en va pas de même des combustibles liquides, que l'on ne décrit le plus souvent que par les familles de composés qui les constituent tant ces composés sont nombreux. Enfin, les combustibles solides ont une structure tellement complexe et une telle variabilité qu'il n'est possible que d'en estimer le pouvoir calorifique sur une base statistique en se référant à leur composition élémentaire. Combustibles gazeux Ces combustibles sont des mélanges dont la fraction combustibles est constituée principalement d'hydrogène H 2 , de monoxyde de carbone CO et d'hydrocarbures Cn H m où n ≤ 4 . On peut y ajouter l'hydrogène sulfuré H 2 S , le plus souvent indésirable et qu'on s'efforce d'éliminer. Cette fraction combustible est, dans la plupart des cas, accompagnée de constituants considérés comme inertes pour la combustion, tels N 2 , CO2 et H 2O , voire d'oxygène O2 comburant. Ces derniers corps n'interviennent pas dans la valeur du pouvoir calorifique MECA 2160 2003 47 inférieur PCI , lequel s'exprime en pratique en kJ / mN3 , conformément à la relation utilisant les fractions molaires ou volumiques [ ] : PCI = [ H 2 ] PCI H 2 + [ CO ] PCI CO + Σ [ Cn H m ] PCI Cn H m + [ H 2 S ] PCI H 2 S On notera que les pouvoirs calorifiques volumiques se déduisent directement des chaleurs de réaction qui ne sont autre chose que des pouvoirs calorifiques molaires, en notant que pour les gaz, 1 kmole = 22.710 mN3 Combustibles liquides Les principaux combustibles liquides proviennent de la distillation du pétrole. Ils sont essentiellement constitués d'un mélange en proportions variables d'hydrocarbures divers, paraffiniques, oléfiniques, naphténiques et aromatiques. On peut se faire une opinion sur leur pouvoir calorifique en raisonnant sur les enthalpies standard relatives aux familles qui les constituent. Ainsi : • l'enthalpie standard d'une paraffine Cn H 2n + 2 est : 0 H 273 = −23030 n − 33980 kJ / kmole son pouvoir calorifique est donc : • PCI = 612270 n + 207820 kJ / kmole l'enthalpie standard d'une oléfine Cn H 2n est : 0 H 273 = −23030 n + 84185 kJ / kmole son pouvoir calorifique est donc : PCI = 612270 n + 84185 kJ / kmole • l'enthalpie standard d'un cycloalcane Cn H 2n est : 0 H 273 = −23030 n kJ / kmole MECA 2160 2003 48 son pouvoir calorifique est donc : PCI = 612270 n kJ / kmole • l'enthalpie standard du benzène C6 H 6 est : 0 H 273 = 6 × 7800 kJ / kmole son pouvoir calorifique est donc : PCI = 6 × 522200 kJ / kmole Les valeurs qui viennent d'être établies conduisent à la conclusion que la dispersion des pouvoirs calorifiques massiques de tous les hydrocarbures liquides Cn H m , avec n ≥ 5 , est très faible. Ce fait est en grande partie dû au terme d'enthalpie standard −23300 n kJ / kmole commun à tous les hydrocarbures, à l'exception des aromatiques (le benzène), et qui reflète la présence du maillon fonctionnel − CH 2 − constituant la chaîne hydrocarbonée. Même les isomères paraffiniques très nombreux ont un pouvoir calorifique peu différent, bien que légèrement plus petit que celui des substances à chaîne normale. Par ailleurs, les produits pétroliers contiennent dans une proportion très faible d'autres constituants, oxygénés, azotés, sulfurés dont la présence dans la molécule tend à réduire le pouvoir calorifique. Les formules ci-dessus conduisent au fait bien connu que les combustibles liquides dérivés du pétrole ont des pouvoirs calorifiques massiques situés dans un fourchette étroite, le PCI diminuant progressivement de quelque 44000 kJ/kg à environ 42000 kJ/kg à mesure que l'on considère des fractions plus lourdes, et tendant vers 40000 kJ/kg pour les aromatiques . Cette diminution est la conséquence d'une part de l'influence de la longueur de la chaîne moléculaire, bien mise en évidence pour les paraffines et les oléfines, d'autre part de la teneur en impuretés, qui s'accumulent dans les fractions lourdes. Il peut encore être intéressant de noter que la masse volumique ρ (kg/m3) des combustibles pétroliers est fonction croissante de la longueur des chaînes hydrocarbonées. On a ainsi pu établir une corrélation assez précise entre les pouvoirs calorifiques et cette masse volumique ( formule de Mauss) : MECA 2160 2003 49 PCI = 46290 + 3380 ρ 1000 − 8790( ρ 1000 )2 Combustibles solides Les combustibles solides sont des mélanges de grosses molécules organiques contenant H, C, O et subsidiairement N et S, dans des proportions variables. Ces éléments sont pratiquement tous liés chimiquement. Il est quasi impossible d'en connaître la composition chimique détaillée et par conséquent de leur appliquer la règle de simple addition des pouvoirs calorifiques des composants. Il est par contre relativement aisé d'en connaître la composition élémentaire hors matières minérales, azote et soufre, soit CH y Ox et de se référer à cette composition pour l'estimation de leur pouvoir calorifique. En se basant sur des données relative à la pyrolyse, on peut ainsi proposer de décomposer tout combustible complexe en constituants simples dans lesquels on retrouve des groupes C = O , O − H et C − H . On peut ainsi répartir tout d'abord l'oxygène sur le carbone sous forme de CO et sur l'hydrogène sous forme de H 2O , puis répartir l'hydrogène restant sur le carbone restant formant du CH 4 et laissant un résidu de carbone C . Il vient ainsi, par équipartition de l'oxygène : CH y Ox ⇔ et en deuxième étape : x x x CO + 0.5 y H 2O + ( 1 − ) CH y 1 + 0.5 y 1 + 0.5 y 1 + 0.5 y CH y ⇔ 1 − y y C + CH 4 4 4 ce qui donne globalement : x x x y y CH y Ox ⇔ CO + 0.5 y H 2O + ( 1 − )( 1 − C + CH 4 ) 1 + 0.5 y 1 + 0.5 y 1 + 0.5 y 4 4 Connaissant alors les PCI suivants : PCI CO = 282400 kJ / kmole PCI C = 393400 kJ / kmole PCI CH 4 = 802400 kJ / kmole il est aisé de calculer la valeur recherchée, qui correspond à la formule suivante : MECA 2160 2003 50 PCI CH y Ox ≈ 393400 + 102250 y − x ( 111000 + 102250 y ) ( kJ / kmole ) 1 + 0.5 y Influence des impuretés et de l'humidité Suivant ce que révèle leur analyse sommaire, les combustibles complexes peuvent comporter, outre la fraction massique de matière organique, une fraction massique ( Ce ) de matières minérales inertes qui fourniront les cendres, et une fraction massique ( H 2O ) d'eau à l'état liquide constituant l'humidité. Les pouvoirs calorifiques du combustible brut sont évidemment affectés par la présence de ces matières. En ce qui concerne PCS , les matières minérales et l'humidité jouent le même rôle de dilution de la matière active qui constitue le combustible pur (débarrassé de ses matières minérales inertes) et sec (débarrassé de son humidité). Par kg de combustible brut, on ne compte en effet que 1 − ( Ce ) − ( H 2 O ) kg de combustible pur et sec, ce qui fournit la relation : PCS BRUT = ( 1 − ( Ce ) − ( H 2O )) PCS PUR&SEC Il est à noter que l'on peut exprimer la composition en rapportant les fractions massiques au combustible pur et sec, au moyen des symboles ( Ce )'' et ( H 2 O )'' , dont la signification est que, par kg de combustible pur et sec, l'on compte 1 + ( Ce )'' + ( H 2O )'' kg de combustible brut. Le passage de PCS PUR&SEC à PCS BRUT ressortit alors à la relation : PCS BRUT = PCS PUR&SEC 1 + ( Ce )'' + ( H 2 O )'' En ce qui concerne PCI , l'humidité joue en outre un rôle négatif lié à sa chaleur de vaporisation lors de son passage dans les fumées. Avec les notations précédentes, on doit donc écrire que : PCI BRUT = ( 1 − ( Ce ) − ( H 2 O )) PCI PUR&SEC − 2501( H 2O ) kJ / kg ou que : MECA 2160 2003 51 PCI BRUT = PCI PUR&SEC − 2501( H 2 O )'' 1 + ( Ce )'' + ( H 2O )'' kJ / kg On voit donc que l'humidité d'un combustible en dégrade très rapidement le PCI. A titre d'exemple, si un bois pur et sec a un PCI PUR&SEC de 18500 kJ/kg, ce bois comptant ( H 2 O ) = 20 % d'humidité sur matière brute, soit ( H 2 O )'' = 25 % d'humidité sur matière sèche, n'a plus qu'un PCI BRUT de 14300 kJ/kg. L'effet de l'humidité est une dégradation de la valeur énergétique portée par la matière sèche, à laquelle elle soutire sa chaleur de vaporisation qui n'est alors plus disponible pour l'effet calorifique utile attendu de la combustion. 4. Le bilan thermique de la combustion L'usage de la référence à 0°C pour la définition du pouvoir calorifique simplifie en pratique l'écriture des bilans thermiques relatifs à la combustion. Parmi les grandeurs qu'il est important de déterminer, celle de température théorique de combustion adiabatique joue un rôle particulièrement important. Dans un processus de combustion adiabatique, la conservation de l'enthalpie totale conduit en effet au transfert du pouvoir calorifique, forme "latente" de l'enthalpie du système présente dans les réactifs avant combustion, en enthalpie sensible des produits de la combustion, conformément à l'équation : ∆ H 0  H T0 ,P − H T0 ,R = 0 2 1 exprimant la conservation de l'enthalpie totale du système au cours de son évolution des réactifs (indice R) vers les produits (indice P) 0 Explicitant l'enthalpie totale comme la somme de l'enthalpie standard H 273 et de l'enthalpie sensible h  ∫ T 273.15 c p dt , il vient, pour l'ensemble des constituants : 0 Σ H 273,P +∫ TP 0 Σ c p ,P dT = Σ H 273,R +∫ 273.15 P P TR Σ c p ,R dT 273.15 R R ce qui fournit la valeur de l'enthalpie sensible des produits de la combustion adiabatique supposée complète, sous la forme : ∫ TP Σ c p ,P dT = ∫ 273.15 P TR 0 0 ) Σ c p ,R dT + ( Σ H 273,R − Σ H 273,R 273.15 R R P MECA 2160 2003 52 On reconnaît dans le dernier terme du membre de droite de cette relation la définition même du pouvoir calorifique. On peut réécrire cette relation en utilisant la notion de chaleur molaire ou massique moyenne c p t = ∫ c p dt et en utilisant l'échelle Celsius des températures notée t : t t 0 0 Σ c p ,P 0 t P = Σ c p ,R 0 t R + PCI tP tR P R ce qui rend possible le calcul de la température des produits de la combustion . On notera que cette formule ne fait référence qu'au seul PCI , car les températures atteintes par les produits de la combustion sont incompatibles avec la condensation de l'eau. On obtient ainsi pour la température t P des produits de la combustion l'expression : tP = Σ c p ,R 0 t R + PCI tR R Σ c p ,P 0 tP P qui montre l'intérêt que l'on a de minimiser la quantité des produits de la combustion, dont l'effet est au dénominateur, pour obtenir le niveau maximum de température de combustion pour un PCI donné. Ainsi, la haute température atteinte par la flamme d'un chalumeau oxhydrique résulte de l'emploi d'oxygène pur comme oxydant en lieu et place d'air : on évite ainsi la dilution des produits de combustion par l'azote atmosphérique. D'autre part, les hautes températures nécessaires à certains procédés industriels (par exemple les opérations réalisées dans des fours), peuvent être obtenues par le préchauffage de l'air de combustion, porteur essentiel de l'enthalpie sensible des réactifs, ce qui a un effet au numérateur de l'expression ci-dessus. Ce préchauffage peut évidemment être avantageusement réalisé par récupération de la chaleur sensible des produits qui ne peuvent quitter la zone du procédé qu'à la haute température exigée par l'opération souhaitée. Enfin, il ne faut pas perdre de vue trois éléments qui peuvent plafonner la température de combustion : • d'une part, le degré d'avancement de l'oxydation peut être limité par effet d'équilibres chimiques stabilisant à haute température des produits de dissociation de CO2 et H 2O , tels que CO et OH . Ce phénomène est surtout sensible dans les combustions en prémélange de comburant et de combustible, qui atteignent en principe les plus hautes densités d'énergie. MECA 2160 2003 53 • • d'autre part, les produits présents dans la zone de combustion, portés à haute température, peuvent émettre par rayonnement une fraction non négligeable de la chaleur de combustion et introduire ainsi dans le bilan thermique un terme de non adiabatisme "à la source". Ce sont plutôt les systèmes de combustion en diffusion qui favorisent cet effet, par la présence de noyaux riches en carbone qui s'y développent et confèrent à la zone de combustion une émissivité importante. enfin, la recherche de la minimisation de la quantité de produits de combustion peut comporter le risque d'apparition d'imbrûlés par défaut de comburant. C'est alors la chaleur de réaction elle-même qui est affectée, une partie du pouvoir calorifique du combustible se transférant dans le pouvoir calorifique résiduel des produits de combustion. Quelle que soit la technique mise en œuvre, il va de soi que la recherche de températures de combustion élevées doit rester compatible avec une qualité chimiquement acceptable des produits de la combustion qui constituent in fine un effluent rejeté dans l'atmosphère 5. Les bilans énergétiques relatifs à la combustion La perte par imbrûlés La première notion de rendement énergétique relatif à la combustion est indépendante de la nature de l’utilisation de la chaleur produite par la combustion : il s’agit de ce que l’on pourrait appeler le rendement chimique, défini comme le rapport entre la chaleur de réaction de la combustion réellement effectuée et le pouvoir calorifique du combustible mis en œuvre, c’est-à-dire la chaleur de réaction de la combustion supposée complète du combustible. Si l’on désigne par mi la masse de produits incomplètement oxydés et donc porteurs d’un pouvoir calorifique PCIi qui résulte de la mise en œuvre d’une masse mc de combustible de pouvoir calorifique PCI, la perte relative par imbrûlés i répond à la formulation : i mi PCI i mc PCI où i désigne la perte relative par imbrûlés. Cette perte est à l’évidence en relation avec le coefficient k d’imbrûlés défini dans le bilan de matière. Ainsi, pour la combustion imparfaite d’un combustible hydrocarboné CHyOx conduisant à la formation des seuls imbrûlés CO et H2 , la valeur de i est donnée par l’expression : MECA 2160 2003 54 PCI CO + i=k y PCI H 2 4 PCI CH y Ox Comme établi par l’étude des bilans de matière, la valeur de k décroît linéairement en fonction du coefficient d’excès d’air λ lorsque ce dernier prend partout une valeur λloc < 1 , conformément à l’expression : y − 2x 1+ 4 ( 1− λ ) k=2 pour λ < 1 y 1+ 4 On obtient dans ce cas pour la perte par imbrûlés la relation : y − 2x y PCI CO + PCI H 2 1 4 ( 1− λ ) 4 i=2 pour λ < y PCI CH y Ox 1+ ε 1+ 4 Cette perte est au contraire idéalement nulle lorsque le coefficient d’excès d’air prend partout une valeur λloc > 1 : 1 i =0 pour λ > 1− ε Le raccord entre ces deux domaines se fait sur un intervalle de valeurs de λ d’autant plus large de part et d’autre de λ que l’hétérogénéité du système combustible/comburant, qualifiée par la largeur de distribution ελ est importante, conformément à l’expression établie pour k dans l’intervalle des valeurs de λ donnant lieu aussi bien à λloc < 1 qu’à λloc > 1, et où le modèle à fonction de distribution rectangulaire donne lieu à l’expression du coefficient d’imbrûlés : 1+ ( 1 − λ( λ − ε ))2 k= 2ε λ pour 1 1 ≤λ≤ 1+ ε 1− ε Il correspond à cet intervalle une perte par imbrûlés de valeur : ( 1 − λ( λ − ε ))2 i= 2ε λ y − 2x y PCI CO + PCI H 2 4 4 y PCI CH y Ox 1+ 4 1+ pour 1 1 ≤λ≤ 1+ ε 1− ε La perte par enthalpie restante La notion de perte par enthalpie restante est liée à l’utilisation de la chaleur de combustion en vue de la production d’un effet calorifique utile. Cet effet peut résulter : MECA 2160 2003 55 • • • d’un transfert de chaleur par rayonnement des produits en cours de combustion vers l’entité utilisatrice d’un transfert ultérieur au processus de combustion, épuisant progressivement l’enthalpie sensible des produits de combustion, par convection et conduction vers l’entité utilisatrice d’une combinaison de ces modes de transfert Quoiqu’il en soit, l’épuisement de l’enthalpie sensible des produits de la combustion (les fumées) est limité par le niveau de température requis par l’entité utilisant la chaleur et ne peut donc de ce fait être complet. Si l’on désigne par hf l’enthalpie de la masse mf des fumées rejetées à l’atmosphère au sortir de l’utilisation et par mc la masse de combustible mis en œuvre, de pouvoir calorifique PCI et d’enthalpie sensible h0, tandis que ma désigne la masse d’air d’enthalpie ha puisé à l’atmosphère pour réaliser la combustion, on peut expliciter la valeur relative de la chaleur cédée en pure perte à l’atmosphère par l’expression : e m f h f − ma ha − mc h0 mc PCI Comme l’on peut encore écrire que : ma = λ ma ,1 mc m f = ( λ ma ,1 + 1 ) mc il vient, pour la perte par enthalpie restante : e λ ma ,1 ( h f − ha ) + h f − h0 PCI La perte pariétale L’enceinte dans laquelle s’opèrent la combustion et le transfert de la chaleur vers l’entité utilisatrice n’est jamais parfaitement adiabatique. Une partie Qp de la chaleur dégagée par la combustion de la masse mc de combustible de pouvoir calorifique PCI est donc toujours perdue par conduction, convection et rayonnement dans l’ambiance qui baigne cette enceinte. On est ainsi amené à définir un coefficient de perte pariétale défini par la relation : p Qp mc PCI MECA 2160 2003 56 Le rendement global de génération de chaleur utile Le rendement global de production de chaleur utile par combustion résulte des considérations des pertes séparées et s’écrit : ηG = 1 − i − e − p Comme permet d’en rendre compte la structure des formules qui précèdent : • • le rendement global de production de chaleur utile par combustion présente son optimum théorique à λ. = 1. le rendement global de production de chaleur utile par combustion est d’autant plus élevé que hf – ha et hf – h0 sont petits, ce qui justifie toutes mesures propres à minimiser l’enthalpie résiduelle des fumées, par exemple en l’épuisant au mieux dans un échangeur de réchauffage d’air avant rejet à la cheminée. En pratique, toutes autres choses étant inchangées, l’optimum énergétique correspond à un réglage d’excès d’air légèrement supérieur à 1, qui minimise la combinaison i + e de la perte par imbrûlés i, fonction décroissante de λ et de la perte par enthalpie restante e, fonction croissante de λ, comme illustré fig. 3.1 0.25 i+e 0.2 0.15 0.1 optimum 0.05 λ 0 0.8 0.9 1 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 Figure 3.1 MECA 2160 2003 57