Mécanique des Structures
et
Approximations Numériques
janvier 2016
S. Drapier
Département Mécanique et Procédés d’Elaboration
Centre Science des Matériaux et des Structures & LGF UMR CNRS 5307
École Nationale Supérieure des Mines de Saint-Étienne
158, cours Fauriel
42023 Saint-Étienne Cedex 2
bureau J3-15, tél :00-79
Introduction générale
La mécanique des milieux continus, ou MMC, est la base de la résolution de problèmes en mécanique des solides et mécanique des fluides. Si la MMC permet de traiter
tout type de problème, la résolution analytique simultanée des 3 équations d’équilibre en
tout point du domaine considéré, devient vite insurmontable pour être utilisée directement
dans le dimensionnement des produits industriels courants. Dans le cas de la mécanique
des solides, les ingénieurs ont isolé des cas particuliers de la MMC, où via certaines hypothèses sur les géométries et le chargement, la résolution peut se faire plus aisément. Ce
domaine de la mécanique des solides se nomme la mécanique des structures et se définit,
par opposition à la MMC, comme la mécanique des solides de dimensions finies où une
des dimensions au moins est très faible devant les autres.
Les théories cinématiques qui sous-tendent la mécanique des structures ont été
mises au point dans les 2 derniers siècles pour le dimensionnement des structures. Dans
le même temps la résistance des matériaux, ou RdM, était mise en place comme un
cadre particulier de la mécanique où des hypothèses supplémentaires simplifient encore
les problèmes à traiter. Dans ce cours, la théorie des poutres sera plus particulièrement
développée (Figure 1) et ensuite étendue à la théorie des plaques, ceci principalement dans
le cadre de la RdM.
On verra, à travers cette introduction à la mécanique des structures, que bien
avant que les résolution numériques ne soient disponibles, le dimensionnement des
structures à l’aide de ces approches répondait, au moins en première approximation, à la
plupart des cas de la vie courante. On peut toutefois noter que pour les cas complexes,
les calculs s’alourdissent considérablement, et le bon sens de l’ingénieur doit primer dans
le choix des hypothèses à poser pour mener à bien ces résolutions, que ce soit de façon
analytique ou bien numérique.
L’introduction de la théorie des poutres en RdM peut être envisagée principalement de 2 façons différentes. Une première approche consiste à partir des considérations
particulières pour des grandes familles d’exemples. Une telle approche nécessite une bonne
connaissance et une bonne maîtrise de la modélisation des problèmes physiques à résoudre.
Une approche plus systématique, choisie ici, permet de poser la formulation rigoureuse
de la théorie des poutres à partir de considérations purement mécaniques. Cette théorie
tout à fait générale sera ensuite appliquée aux cas plus simples permettant d’isoler les
comportements linéaires en traction, flexion simple, et en torsion. Les comportements
non-linéaires seront ensuite abordés, et la mécanique des plaques sera décrite à partir
i
ii
d’une cinématique proche de celle des poutres. Au fur et à mesure des exemples traités,
le lien entre les problèmes physiques et leur formulation devra apparaître de plus en plus
naturellement.
Enfin, même si les solutions proposées dans le cas des structures simples restent
d’un grand intérêt, il apparaîtra rapidement, dans le cas des plaques notamment, que
la résolution analytique est de portée limitée. On comprend alors que la conception de
systèmes avancés, de plus en plus complexes et multi-physiques (aéroélasticité/structure,
thermo-mécanique, biomécanique, . . .) ne pourra se faire à l’aide de solutions simplifiées
seulement. Au contraire, la conception et le dimensionnement de structures doit s’appuyer
de façon systématique sur les 2 types d’approches, analytique pour accéder rapidement à
des ordres de grandeur, puis numérique pour prendre en compte plus finement des comportements extrêmes et/ou locaux. En effet, l’avancée conjointe des connaissances dans
le domaine du comportement des matériaux et de la puissance de calcul des ordinateurs
fait que le recours aux simulations numériques, et souvent au calcul intensif (massivement
parallèle), est dorénavant systématique et pointue. Il faut toutefois noter que l’utilisation
de ces simulations ne peut se faire sans connaissance avancée en mécanique, et notamment
en mécanique des structures qui reste la base dans la formulation des éléments finis structuraux largement répandus en conception. Seule une bonne connaissance de ces éléments,
et donc des hypothèses qui ont amené à leur formulation, ainsi que des méthodes de résolution numériques correspondantes, permet de mener à bien, de façon optimale et sûre,
des calculs de dimensionnement des structures. Une extension à la résolution numérique
des problèmes de mécanique est donc proposée en fin de ce cours, avec un accent particulier mis sur la mécanique numérique des structures. Ce chapitre représente également
un avant-goût du module 2 mis en place à la rentrée 2009-2010 dans l’option Matériaux
et Mécanique, intitulé ’Mécanique numérique’, et qui se concentre exclusivement sur les
méthodes numériques et la simulation en mécanique.
Quelques ouvrages de référence
— Introduction à la mécanique des milieux continus, P.Germain et P.Muller, Éd.
Masson 1995, collection Enseignement de la physique,
— Mécanique des Structures, Tome 2 Poutres, S.Laroze et J.-J. Barrau, Éd. Masson 1991,
— Cours de Mécanique des Milieux Continus de 1ère année de l’École Nationale
Supérieure des Mines de Saint-Étienne, R. Fortunier, 2000 et H. Klöcker, 2003.
— Theories of elastic plates, V.Panc, Éd. Noordhoff International Publishing 1975,
collection Mechanics of Structures.
— Finite element simulations of heat transfers, J.-M. Bergheau et R. Fortunier,
ISTE - J. Wiley, ISBN 9781848210530, 2008.
iii
(a)
(b)
(c)
(d)
Figure 1: Exemples de structure : (a) poutre ventrale en composite carbone/époxyde d’un
Airbus A340 : 16 mètres de long pour 1600 kg, (b) la plus grande pale d’éolienne au
monde (LM61.5 par LMGlasfiber) : 61,5 m de long pour 17,7 tonnes ; composite verre /
époxyde. (c) exemple de tablier de pont soumis à des charges de roulement et une poussée
aérodynamique, et (d) caisson central de voilure A380 - concept et réalisation
Table des matières
1 Théorie des poutres
2
1.1
Rappels de MMC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
1.2
Mécanique des structures et RdM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
1.2.1
Définition des structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
1.2.2
Résistance des Matériaux
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5
1.2.3
Hypothèses des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6
Cinématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
8
1.3
1.4
1.5
1.6
1.7
1.3.1
Torseur des déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.3.2
Bilan de la cinématique de poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
Contraintes et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.4.1
Torseur des efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
1.4.2
Énergie de déformation
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
Élasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.5.1
Loi de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.5.2
Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
Méthode de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
1.6.1
Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre . . . . . . . . . . 21
1.6.2
Calcul des déplacements et des rotations . . . . . . . . . . . . . . . 28
1.6.3
Calcul des états de contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
Bilan de la théorie des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
2 Théorie des poutres droites
2.1
34
Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan
. . . . . . . . . . . . . . 35
2.1.1
Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées dans
ce plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.1.2
Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques . . . . . . . 36
2.1.3
Prise en compte du cisaillement transverse . . . . . . . . . . . . . . 37
2.1.4
Formulation des problèmes de flexion-tension . . . . . . . . . . . . . 38
v
vi
2.2
2.3
Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.2.1
Tension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.2.2
Flexion simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
2.2.3
Flexion déviée
2.2.4
Sollicitation composée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
2.2.5
Torsion
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3 Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
3.1
3.2
62
Rappels - calcul du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.1.1
Simplifications dans le cadre de la RdM . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.1.2
Travail dans le cas des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
Théorèmes énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3.2.1
Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti
. . . . . . . . . . . . 67
3.2.2
Théorème de Castigliano . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.3
Hyperstatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
3.4
Résolution des systèmes hyperstatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
3.4.1
Principe de superposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
3.4.2
Théorème de Ménabréa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
4 Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
4.1
4.2
4.3
78
Flambage des poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
4.1.1
Équations non-linéaires de la statique des poutres droites . . . . . . 81
4.1.2
Application à une poutre droite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
4.1.3
Extension aux calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88
Modes et fréquences propres de vibration en flexion dans les poutres droites 90
4.2.1
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
4.2.2
Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen . . . . 90
4.2.3
Vibrations libres - application à la flexion simple . . . . . . . . . . . 91
4.2.4
Vibrations libres - calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . 95
Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre . . . . . . . . . . . . . . . 96
4.3.1
Poutre homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
4.3.2
Poutre sur fondation élastique à deux paramètres . . . . . . . . . . 102
vii
5 Plaques
5.1
5.2
5.3
110
Plaques et coques - généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
5.1.1
Définition d’une plaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
5.1.2
Cas des coques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
Plaques planes de Love-Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
5.2.1
Cinématique en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114
5.2.2
Champ de déplacement complet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116
5.2.3
Déformations et contraintes généralisées . . . . . . . . . . . . . . . 117
5.2.4
Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122
5.2.5
Introduction des efforts tranchants . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
5.2.6
Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion . . . . . . . . . . . 131
Plaques de Hencky-Mindlin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
5.3.1
Cinématique et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
5.3.2
Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
5.3.3
Lois de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
6 Approximations numériques
140
6.1
Notions de base sur les approximations numériques en mécanique . . . . . 141
6.2
Approximations numériques les plus courantes en élasto-statique . . . . . . 142
6.3
6.4
6.2.1
Résidus pondérés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
6.2.2
Formulation intégrale faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
6.2.3
Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148
Applications à la mécanique des structures : Barre soumise à son poids propre149
6.3.1
Solution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151
6.3.2
Résolution par différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152
6.3.3
Méthodes de collocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153
6.3.4
Méthode de Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
6.3.5
De la méthode de Galerkin aux éléments finis . . . . . . . . . . . . 163
Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique des structures . . . 173
7 Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.1
176
Rappel sur les torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177
7.1.1
Définition d’un torseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177
7.1.2
Produit scalaire de deux torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178
1
7.1.3
7.2
7.3
7.4
7.5
Dérivation d’un torseur dans un repère mobile . . . . . . . . . . . . 178
Calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
7.2.1
Extremum d’une intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
7.2.2
Condition d’Euler-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181
7.2.3
Cas où la dérivée seconde intervient . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182
7.2.4
Importance des conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
7.2.5
Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en temps et
en espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
7.2.6
Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I . 185
Cinétique - Dynamique - Énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
7.3.1
Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps . . . . 185
7.3.2
Théorème de Huygens-Koënigs
7.3.3
Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes . . . . . . . . . . . 188
7.3.4
Cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189
7.3.5
Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192
7.3.6
Principe Fondamental de la Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . 192
7.3.7
Théorème de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187
Principe des puissances virtuelles - P P V - et lien avec les autres principes
de la mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
7.4.1
Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour les
systèmes discrets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195
7.4.2
Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets . . . . . . 198
7.4.3
Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs . . . . . . . . 199
7.4.4
Principe de Hamilton pour les systèmes continus
7.4.5
Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans les milieux
continus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
. . . . . . . . . . 201
Concepts de stabilité des équilibres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
7.5.1
Stabilité des équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
7.5.2
Définition d’un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210
7.5.3
Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre . . . . . . 210
7.5.4
Stabilité d’un équilibre paramétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . 211
7.5.5
Linéarisation des énergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213
1.
Théorie des poutres
Sommaire
1.1
Rappels de MMC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3
1.2
Mécanique des structures et RdM . . . . . . . . . . . . . . . .
4
1.3
1.4
1.5
1.6
1.7
1.2.1
Définition des structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4
1.2.2
Résistance des Matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5
1.2.3
Hypothèses des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6
Cinématique
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
8
1.3.1
Torseur des déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
12
1.3.2
Bilan de la cinématique de poutres . . . . . . . . . . . . . . . .
13
Contraintes et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
14
1.4.1
Torseur des efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
14
1.4.2
Énergie de déformation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
17
Élasticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
18
1.5.1
Loi de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
18
1.5.2
Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
19
Méthode de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
20
1.6.1
Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre
. . . . . . .
21
1.6.2
Calcul des déplacements et des rotations . . . . . . . . . . . . .
28
1.6.3
Calcul des états de contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . .
28
Bilan de la théorie des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . .
31
2
Théorie des poutres
3
Dans ce chapitre, la théorie des poutres est présentée d’un point de vue général.
Une grande partie des développements, notamment concernant la définition des grandeurs
cinématiques et statiques en 3D, est tirée du document Mécanique des milieux continus
présenté en première année du cycle ICM de l’ÉNSM.SE par le professeur H.Klöcker
(centre SMS).
1.1
Rappels de MMC
La mécanique des milieux continus permet de caractériser le comportement physique de milieux continus, solides ou fluides (schématisé Figure 1.1), soumis à des solli→
−
→
−
citations extérieures (forces de volume f ou ponctuelles F d (ou forces surfaciques), ou
−
déplacements →
u d ). Dans la résolution d’un problème, des équations d’équilibre définissent
l’équilibre de tout élément de matière occupant un domaine Ω (Eq. 1.2). Sur ses frontières
(∂Ω) le milieu est en contact avec l’extérieur. Dans le cas des solides (Figure 1.1), ces
contacts peuvent correspondre à des efforts imposés (sur ∂ΩF Eq. 1.3) ou des déplacements imposés (sur ∂Ωu Eq.1.1). Finalement, la loi de comportement (Eq. 1.4) permet de
−
relier les 2 grandeurs duales que sont les contraintes, notées ici σ(→
x ), et les déplacements
→
−
dont dérivent les déformations, notées ici ǫ( x ). Le problème est alors complètement posé
(fermé) et peut être résolu, en utilisant les équations rappelées ci-dessous dans le cadre
de la dynamique des milieux continus (Eqs 1.1 à 1.4).
Figure 1.1: Représentation générale d’un solide occupant un domaine Ω, de frontière ∂Ω
(∂Ω = ∂Ωu ∪ ∂ΩF et ∂Ωu ∩ ∂ΩF =Ø), soumis à des sollicitations extérieures.
On rappelle qu’un champ de déplacement vérifiant les conditions aux limites cinématiques est dit cinématiquement admissible ou C.A.. Un champ de contraintes vérifiant
les équations d’équilibre au bord ou conditions aux limites statiques et les équations
Théorie des poutres
4
d’équilibre intérieur est dit statiquement admissible ou S.A.. On comprend bien alors que
la résolution d’un problème posé en déplacements est plus simple car la famille de champs
de déplacements C.A., à laquelle appartient la solution, est simple à poser. Par contre,
résoudre un problème posé en contraintes est plus complexe puisque la famille des champs
S.A, à laquelle le champ de contraintes solution appartient, doit vérifier à la fois les conditions aux limites statiques et les équations d’équilibre intérieur. Il est donc peu aisé de
poser a priori des familles de champs de contraintes solution.
1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.
→
−
−
−
−
−
u (→
x , t) = →
u d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂Ωu
(1.1)
−
∂σij (→
x , t)
−
−
−
+ fi (→
x , t) = ρüi (→
x , t) , ∀ →
x ∈Ω
∂xj
(1.2)
2. Équilibre intérieur
3. Équilibre au bord
−
−
−
−
σij (→
x , t)nj (→
x ) = Fid (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂ΩF
(1.3)
4. Loi de comportement
σij = Lijkl ǫkl
1.2
1.2.1
(1.4)
Mécanique des structures et RdM
Définition des structures
La mécanique des structures se définit comme la mécanique des solides de dimensions finies où une des dimensions au moins est faible devant les autres. La mécanique
des structures couvre donc un grand nombre de géométries dont les plus courantes sont
les poutres (1D), les plaques et coques (2D), et les solides axisymétriques (2D) (Figure
1.2). En observant la géométrie des structures étudiées, des hypothèses peuvent être
faites quant à la cinématique qui prévaut dans ces solides. Toute la difficulté de ce type
d’approche réside dans le choix judicieux de cette cinématique qui doit être suffisamment
riche pour observer tous les phénomènes rencontrés durant l’utilisation des structures
considérées, mais assez simple pour permettre des résolutions analytiques. Ce point sera
vu en détail dans ce cours.
On peut remarquer que ces structures sont également utilisées dans les simulations
numériques, telles que les simulations par éléments finis par exemple. Dans ce cas, comme
lors de la résolution analytique d’ailleurs, les temps de calcul nécessaires à la résolution
d’un problème sont amplement plus faibles que si le même problème était traité avec une
approche de type MMC (3D dans un calcul par éléments finis).
Théorie des poutres
5
Figure 1.2: Type de structures
1.2.2
Résistance des Matériaux
La résistance des matériaux est un cadre restreint, mais utilisable pour la plupart des applications courantes, pour traiter des problèmes de mécanique des structures.
Principalement, les hypothèses simplificatrices de la RdM portent sur des conditions de
réversibilité et de linéarité. Les études en RdM sont conduites sous les hypothèses suivantes :
— cadre de l’HPP : petites déformations, petits déplacements (pas de flambage
ou de striction par exemple),
— les matériaux constitutifs sont élastiques linéaires isotropes,
— les problèmes appartiennent au domaine de la statique, ou sont supposés quasistatiques,
— principe de Saint-Venant : loin de son point d’application, une sollicitation
extérieure peut être remplacée par son torseur équivalent,
— principe de superposition : quelque soit l’ordre d’application des efforts extérieurs sur un solide, l’état final est invariant.
Sous ces hypothèses, la RdM permet de traiter des problèmes de poutres, plaques,
coques, ... Il faut maintenant introduire la notion de modélisation géométrique des solides.
Ceci fait l’objet du paragraphe suivant qui traite plus particulièrement de la théorie des
poutres.
Théorie des poutres
1.2.3
6
Hypothèses des poutres
Les hypothèses sur la géométrie des poutres permettent de représenter un solide
3D élancé par sa ligne moyenne. Ceci s’applique également aux plaques et coques où cette
fois-ci l’épaisseur étant faible devant les autres dimensions le solide est remplacé par le
feuillet moyen correspondant.
Définition d’un poutre
Une poutre est un solide engendré par une aire plane S qui est déplacée dans
l’espace, de sorte que durant son mouvement le centre de gravité G de la section S
parcourt une ligne donnée L, et que l’aire se maintienne constamment normale à cette
surface (Figure 1.3). De plus, la section peut varier au cours de ce parcours, mais de façon
continue, i.e. le profil ne doit pas présenter de discontinuités. La ligne L est appelée fibre
moyenne de la poutre. Une poutre est dite :
— gauche si la ligne L suit une courbe gauche,
— plane si la ligne L suit une courbe plane,
— droite si la ligne L suit une droite.
Figure 1.3: Définition géométrique d’une poutre
Une poutre à plan moyen est une poutre dont la section S possède un plan de
symétrie. Cette hypothèse est finalement peu restrictive et permet de traiter de trés nombreux cas (Figure 1 page iii). Enfin, si la fibre moyenne est une courbe fermée, on parlera
d’anneau (les sections droites initiale et finale sont confondues).
Finalement, les hypothèses permettant de classifier un solide comme étant une
poutre sont les suivantes :
L
L2
> 5 et
≤ 10 (L2 et L3
— un élancement de la poutre suffisant :
sup{L2 , L3 }
L3
−
étant les dimensions caractéristiques respectivement selon les directions →
x2 et
→
−
x3 ),
— un rayon de courbure de L grand devant les dimensions transversales,
Théorie des poutres
7
— un profil sans discontinuité.
Remarque : des problèmes complexes associant un grand nombre de poutres ont été largement utilisés au cours des 2 derniers siècles. Ces structures sont dites structures réticulées
ou treillis. Les cas les plus typiques sont par exemple la Tour Eiffel, constituée de treillis
à plusieurs échelles, imbriqués pour former des structures de plus en plus imposantes,
et finalement constituant la Tour elle-même. De nombreux autres exemples d’application existent pour ces approches où des méthodes de calcul propres ont été développées
spécifiquement (méthode graphique de Crémona par exemple). Dans le cadre de cette introduction à la RdM, seules les poutres seront étudiées, offrant suffisamment d’exemples
d’application pour donner une vision rapide mais détaillée de la RdM.
Grandeurs physiques
La théorie élastique des poutres est basée sur celle des milieux curvilignes. Une
position sur la poutre sera caractérisée uniquement par l’abscisse curviligne l d’un point
sur la fibre moyenne L. Le reste de la géométrie, c’est-à-dire la section S, sera caractérisé
en chaque point G(x1 ) de la fibre moyenne, pour un matériau constitutif homogène, par :
— la section S de la poutre obtenue sous la forme :
Z
Z
dx2 dx3
ds =
S(x1 ) =
S(x1 )
S(x1 )
— des moments d’ordre 1 nuls puisque le point G de la fibre moyenne est le centre
de gravité de la section S :
Z
Z
x3 ds = 0
x2 ds =
S(x1 )
S(x1 )
— des moments d’ordre 2, ou moments quadratiques (plans) :
Z
Z
2
I2 (x1 ) =
x3 ds et I3 =
x22 ds
S(x1 )
S(x1 )
— un moment produit, différent de 0 pour les sections non-symétriques ou dont
−
−
les axes de symétrie (→
x2 ,→
x3 ) ne sont pas confondus avec le repère global :
Z
I23 (x1 ) =
x2 x3 ds
S(x1 )
— un moment de giration ou moment quadratique polaire :
Z
(x22 + x23 )ds = I2 (x1 ) + I3 (x1 )
I0 (x1 ) =
S(x1 )
4
Par exemple, pour une section S circulaire, de rayon R, on a I2 = I3 = πR4 et
I23 = 0, tandis que pour une section rectangulaire, de hauteur L2 et largeur et L3 , on a
L2 L33
L32 L3
I2 = 12
, I3 = 12
et I23 = 0.
Théorie des poutres
8
Repère de Frenet
Dans le cas général d’une poutre paramétrée par son abscisse curviligne s, on peut
→
−
−
−
définir pour des raisons de commodité un trièdre direct, le repère de Frenet (→
τ ,→
n, b )
(Table 1.1). Les grandeurs locales peuvent être exprimées dans ce repère, et les dérivations
locales suivent les règles indiquées ci-après, avec les rayons de courbures R1 et R2 définis
→
−
−
−
−
dans les plans (M, →
τ ,→
n ) et (M, →
τ , b ) respectivement.
(s)
t
−
→
−
→
−′
d→
τ
n
=τ =
ds
R1
→
−
−
→
−
→
−′
d→
n
τ
b
= n =−
−
ds
R1 R2
→
−
→
−
→
−′
n
db
= b =
ds
R2
M
b
n
Repère de Frenet.
Table 1.1: Définition du repère de Frenet pour une abscisse courante s.
Avertissement : Dans la première partie de ce cours, nous établirons les équations dans
le cas plus particulier des poutres où les courbures restent faibles. L’extension, aux
poutres quelconques, de la théorie développée ici passe par le prise en compte des courbures dans la dérivation des grandeurs cinématiques et statiques par rapport à l’abscisse
curviligne s, selon les règles rappelées ici. Ceci ne modifie pas fondamentalement les résultats présentés dans cette première partie, mais introduit une complexité qui n’est pas
nécessaire pour poser les bases des théories de poutre ; cette complexité apparaît dans les
couplages des comportements, tels que le couplage traction-flexion par exemple dans les
poutres courbes. Il en est de même pour les coques vis-à-vis des plaques.
0
→
−
τ
1
d →
−
n = −
R1 (s)
ds
→
−
b
0
1.3
1
R1 (s)
0
1
R2 (s)
0
1
−
R2 (s)
0
→
−
τ
→
−
n
→
−
b
Cinématique
Dans ce document, nous nous limiterons à la cinématique des déplacements issue de l’hypothèse de Navier. D’autres cinématiques existent, elles sont dites ’enrichies’
et répondent à une besoin de précision accrue dans la prise en compte du cisaillement
notamment. Certaines de ces théories sont présentées dans le cas spécifique des matériaux composites, au Chapitre 5 du support de cours ’Mécanique des Composites Hautes
Théorie des poutres
9
Performances’ disponible à l’adresse http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/
CoursPDF/Composites/Composites-Drapier-2014.pdf.
Selon l’hypothèse de Navier, au cours de la déformation de la poutre, la section
droite S reste droite (elle ne subit aucun gauchissement). Cette section S subit donc :
— un mouvement de corps rigide,
— une déformation dans son plan.
Mouvement de corps rigide de S
Figure 1.4: Hypothèse cinématique de Navier
La Figure 1.4 illustre la caractérisation du mouvement de corps rigide de la section
−
−
S par un vecteur de déplacement →
u et un vecteur de rotation →
r appliqués à son centre
de gravité G (voir également Figure 1.5). Le déplacement d’un point M de la section S
−−→
−
−
(GM = x2 →
x2 + x3 →
x3 ) dû à ce mouvement de corps rigide sera de la forme :
−−−−−→ →
−−→
−−→ −−→
u(M, x1 ) = −
u M (x1 ) = u(G)(x1 ) + M G ∧ r(G)(x1 )
−−→ −
−
= →
u (x1 ) + M G ∧ →
r (x1 )
ce qui peut encore se mettre sous la forme du torseur des déplacements exprimé au point
G (voir ’Rappel sur les torseurs’ page 177), dont les éléments de réduction au point G
−
−
sont les vecteurs →
u et →
r représentant respectivement le déplacement et la rotation de la
section S en ce point :
{UM (x1 )} =
→
−
r (x1 )
−−→ →
−→
→
−
−
uM (x1 ) = u (x1 ) + M G ∧ r (x1 )
(1.5)
(M )
On voit ici l’intérêt de la théorie des poutres, où le déplacement d’un point M quelconque
de la poutre s’exprime complètement à partir des déplacements et rotations du centre
de gravité de la section S contenant ce point. Les déplacements de tous les points de
Théorie des poutres
10
ce solide 3D sont donc représentés par les déplacements et les rotations des centres de
gravité, ramenant le problème tridimensionnel à une modélisation unidimensionnelle.
−−→
Dans l’hypothèse des petites perturbations le vecteur GM (position d’un point
courant par rapport au centre de gravité de la section) est contenu, avant et après dé−
−
formation, dans le plan formé par les vecteurs →
x 2 et →
x 3 portés par la section S. Les
→
−
composantes du vecteur u M s’écrivent donc dans le repère local de la section S :
→
−
uM =
u1
r2 x 3 − r3 x 2
u2 + −r1 x3
u3
r1 x 2
Dans l’hypothèse des petites perturbations, on calcule le tenseur des déformations
au point M , ǫM (x1 ), comme la partie symétrique du tenseur gradient des déplacements
−
−
u et →
r s’appliquent au point G de la
en ce point, dM (x1 ) (Eq. 1.6). Comme les vecteurs →
section S, et donc sur la ligne L, ils ne dépendent que de l’abscisse curviligne l sur cette
ligne. Les seuls gradients non nuls pour ces vecteurs sont donc ceux mettant en jeu la
première coordonnée x1 , tandis que la dépendance en x2 et x3 est donnée explicitement
par l’équation précédente. Dans la suite, nous noterons x′ la dérivée de toute quantité x
par rapport à la première coordonnée. Ceci permet d’écrire :
u′1 + r2′ x3 − r3′ x2 −r3 r2
dM (x1 ) = u′2 − r1′ x3
0
−r1
u′3 + r1′ x2
r1
0
(1.6)
On peut remarquer dans cette équation que les dérivée mises en jeu sont des dérivées totales, résultant de la formulation unidimensionnelle de la cinématique de poutre.
Mais dans le cas d’une poutre courbe par exemple, ces dérivées devront prendre en compte
−
−
−
le fait que le repère (→
x 1, →
x 2, →
x 3 ) "tourne" lorsque l’on parcourt la fibre moyenne L. On
recourt alors à une définition prenant en compte les courbures, tel que dans le repère de
Frénet.
À partir du tenseur gradient des déplacements dM (x1 ), on peut maintenant obtenir
le tenseur des déformations ǫM (x1 ) par sa partie symétrique. On constate que ce tenseur ne
possède que trois termes non nuls qui sont une déformation normale (ǫ11 ) et 2 glissements
qui sont le double des cisaillements entre deux sections voisines (2ǫ12 , 2ǫ13 - Figure 1.5) :
′
′
′
ǫ11 = u1 + r2 x3 − r3 x2
2ǫ12 = u′2 − r1′ x3 − r3
2ǫ = u′ + r′ x + r
13
2
3
1 2
Le mouvement de corps rigide de la section S ne produit donc pas directement de
déformations dans le plan de cette section (la section ne peut "s’écraser" ni se cisailler
dans son plan). Les seules déformations existantes correspondent au déplacement relatif
des sections d’abscisses curvilignes consécutives (Figure 1.5).
Théorie des poutres
11
Figure 1.5: Déformations dans les sections.
Figure 1.6: Illustration des contraintes normales nulles sur les faces d’une poutre à section
prismatique.
Déformation dans le plan de S
−
−
Le plan de la section S contient les vecteurs →
x 2 et →
x 3 . Il s’ensuit qu’une déformation dans son plan (une déformation plane) ne produira que des déformations ǫ22 , ǫ23 et
ǫ33 . Ces déformations doivent permettre de satisfaire les conditions aux limites au bord
de la section. En effet, sur ces bords libres de contraintes extérieures, on doit vérifier que
le vecteur contrainte relatif à la normale sortante à la section soit nul. Dans le cas d’une
−
−
section prismatique, les vecteurs contraintes par rapport aux normales →
x 2 et →
x 3 sont
→
−
→
−
→
−
bien nuls (σ · n ( x ) = 0 ) (Figure 1.6). Cette condition conduit à σ22 = σ23 = σ33 = 0 en
−
x 2 et σ13 = 0 sur la
x2 = ± L22 ∩ x3 = ± L23 . On a également σ12 = 0 sur la face de normale →
→
−
face de normale x 3 . Toutefois ces dernières conditions sont difficilement vérifiables avec
les théories classiques des poutres, mais sont acceptables dans les cas les plus courants
comme nous le verrons sur un exemple en TD dans le chapitre 2.
Dans le cas de poutres homogènes, on fait souvent l’hypothèse que les contraintes
Théorie des poutres
12
σ22 , σ33 et σ23 sont nulles dans toute la section S. Pour cette composante du cisaillement,
cette condition est bien vérifiée pour un matériau isotrope (σ23 ⇔ ǫ23 = 0). Pour les
contraintes normales, ceci peut se justifier compte-tenu de l’épaisseur et de la largeur de
la section qui sont des dimensions faibles. Les contraintes étant nulles sur les bords, elles
ne peuvent se développer sur des dimensions aussi faibles, et sont donc également nulles à
l’intérieur de la section. En considérant un matériau à comportement élastique isotrope,
cette hypothèse nous donne les valeurs suivantes pour les déformations dans la section S
(λ et µ sont les coefficients de Lamé du matériau 1 ) :
(
2µǫ22 + λ(ǫ11 + ǫ22 + ǫ33 ) = 0
ǫ23 = 0
⇒
2µǫ23 = 0
λ
ǫ11
ǫ22 = ǫ33 = − 2(λ+µ)
2µǫ + λ(ǫ + ǫ + ǫ ) = 0
33
11
22
33
On constate que, dans ce cas, les déformations normales ǫ22 et ǫ33 de la section S
dans son plan sont complètement déterminées à partir de la composante ǫ11 calculée à
partir de son mouvement de corps rigide. Ces déformations résultent uniquement de l’effet
de Poisson induit par des déformations normales ǫ11 , et sont donc faibles puisque la plus
1
grande dimension de la section doit être au plus de 10
de la longueur de la poutre, soit
ν sup(L2 ,L3 )
3
< 100 . Ces déformations sont donc bien
pour un matériau courant (ǫ22 , ǫ33 ) ≃
L
négligeables devant les déformations engendrées par le déplacement relatif des sections
(ǫ11 ,ǫ12 ,ǫ13 ). C’est là tout l’intérêt de la théorie des poutres qui permet de simplifier
considérablement les problèmes à résoudre, les ramenant du 3D au 1D.
Degrés de liberté
Les résultats précédents nous montrent que le mouvement du solide peut être
−
−
complètement déterminé à partir des vecteurs →
u et →
r de la Figure 1.4. La cinématique
des déplacements ainsi mise en place permet de concentrer les inconnues du problème sur
la fibre moyenne L de la poutre. Le solide tridimensionnel est remplacé par la ligne L.
Chaque point de la ligne dispose de six degrés de libertés au lieu de trois (les déplacements
dans les trois directions). Ces six degrés de liberté sont :
— les déplacements dans les trois directions du point G de la ligne L, représentés
−
par le vecteur →
u , de composantes u1 , u2 et u3 ,
−
— la rotation de la section S, représentée par le vecteur rotation →
r , de composantes r1 , r2 et r3 , appliqué au point G.
1.3.1
Torseur des déformations
Les hypothèses faites sur la cinématique des déplacements dans la poutre nous
conduisent au tenseur symétrique suivant des déformations en un point M quelconque
1. σij = 2µǫij + λǫpp δij et ǫij =
cisaillement du matériau isotrope
1+ν
E σij
−
ν
E σpp δij
avec E le module d’Young et G le module de
Théorie des poutres
13
d’une section S :
ǫM
ǫ11 = u′1 + r2′ x3 − r3′ x2
ǫ12
ǫ13
λ
ǫ11
ǫ23 = 0
= ǫ12 = 21 (u′2 − r1′ x3 − r3 ) ǫ22 = − 2(λ+µ)
λ
ǫ31 = 21 (u′3 + r1′ x2 + r2 )
ǫ23 = 0
ǫ33 = − 2(λ+µ)
ǫ11
Ce tenseur des déformations ne comporte que trois termes indépendants : ǫ11 , ǫ12 et ǫ13 . En
RdM, ces termes sont associés sous la forme d’un vecteur −
e→
M , appelé vecteur déformation :
ǫ11 (M, x1 )
−
e→
M (x1 ) = 2ǫ12 (M, x1 )
2ǫ13 (M, x1 )
Le vecteur −
e→
M contient une dilatation dans la direction de la fibre moyenne comme
premier terme, puis des glissements (doubles des cisaillements entre deux sections voisines). Il représente la déformation du milieu curviligne au point M . Cette déformation
−
peut à son tour être exprimée en fonction d’une déformation →
e dite de membrane et d’un
→
−
gradient de rotation appelé courbure κ au point G sous la forme :
−−→ →
−
→
−
−
e→
M (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ κ (x1 )
−
−
où →
e et →
κ , éléments de réduction de la déformation au point G de S, constituent le
torseur des déformations défini par :
r1′
u′1
−
−
→
−
−
−
−
κ (x1 ) = →
r ′ (x1 ) = r2′
e (x1 ) = →
u ′ (x1 ) + →
x1∧→
r (x1 ) = u′2 − r3 et →
r3′
u′3 + r2
(1.7)
ce qui peut encore s’écrire de façon similaire au déplacement en un point M de la section
(Eq. 1.5) :
→
−
κ (x1 )
{ǫM (x1 )} =
−−→ →
−
→
→
−
−
eM (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ κ (x1 )
(M )
1.3.2
Bilan de la cinématique de poutres
— déplacements :
{UM (x1 )} =
→
−
r (x1 )
−−→ →
−→
→
−
−
uM (x1 ) = u (x1 ) + M G ∧ r (x1 )
(M )
Théorie des poutres
14
— déformations :
{ǫM (x1 )} =
→
−
κ (x1 )
−−→ →
−
→
−
−
e→
e (x1 ) + M
G ∧
κ (x1 )
M (x1 ) =
′
0
r1′
u1
= u′2 − r3 + −x2 ∧ r2′
′
′
−x3
r3
u 3 + r2
(M )
On peut remarquer que l’écriture avec des torseurs permet également d’écrire directement
d
les déformations par dérivation du torseur cinématique {ǫM } =
{UM }, voir Eq. 7.2
dx1
’Rappel sur les torseurs’ page 177.
1.4
1.4.1
Contraintes et déformations
Torseur des efforts
L’hypothèse de Saint-Venant, présentée précédemment, consiste à supposer que
loin de leur point d’application les efforts agissant sur S peuvent être schématisés par le
→
−
torseur des efforts équivalent {τ (x1 )}, dont les éléments de réduction sont une force R (x1 )
−
→
et un moment M (x1 ), appliqués au centre de gravité G de S (Figure 1.7). Dans le cas
d’efforts extérieurs appliqués à la poutre, à l’abscisse xi , le torseur des actions extérieur
peut par exemple (Figure 1.7) être :
→
−
R (xi )
{F(xi )} =
(1.8)
−
→
M (xi )
(Gi )
Pour les efforts intérieurs, les éléments de réduction se déduisent naturellement de
l’intégration des contraintes induites par les sections voisines sur la section S considérée
(Figure 1.8). D’après les hypothèses faites sur les contraintes dans le plan d’une section
S, les seules contraintes non nulles dans le solide sont σ11 , σ12 et σ13 . En RdM, ces
−
→
contraintes sont associées dans un vecteur tM , appelé vecteur contrainte, qui représente
les efforts de cohésion ou efforts intérieurs. Par convention, on définit ces efforts internes
entre 2 sections voisines, comme les efforts exercés par une section de gauche (S−) sur
une section de droite (S+) (Figure 1.8) en comptant les abscisses curvilignes croissantes
−
selon →
x1 :
σ11 (M, x1 )
−
→
tM (x1 ) = σ12 (M, x1 )
σ13 (M, x1 )
−
Comme la normale à S est le vecteur →
x 1 (dans le cadre des petites perturbations
la configuration finale est confondue avec la configuration initiale), on peut remarquer que
Théorie des poutres
15
Figure 1.7: Illustration du principe de Saint-Venant : (a) chargement sur la poutre, et (b)
torseur équivalent sur la ligne moyenne.
−
→
le vecteur contrainte tM (x1 ) coïncide avec celui défini en mécanique des milieux continus,
agissant sur un élément de surface contenu dans S.
Figure 1.8: Définition des efforts intérieurs, torseur des efforts intérieurs.
Dans le cas des efforts intérieurs à la poutre, les efforts agissant sur S résultent de
l’intégration du vecteur contrainte sur la section, et sont appelées contraintes généralisées.
On distingue les contraintes généralisées de membrane et de flexion résultant respectivement de l’intégration des contraintes sur la section et de l’intégration des contraintes
prenant en compte l’éloignement du point considéré par rapport au centre de gravité de
la section. Les efforts de membrane sont définis ci-dessous par les relations 1.9 et sont
illustrés sur la Figure 1.9 :
Théorie des poutres
→
−
R (x1 ) =
Z
16
−
→
tM (x1 )ds
S(x1 )
effort NORMAL :
−
effort TRANCHANT / →
x2 :
=
→
−
effort TRANCHANT / x3 :
N (x1 ) =
T2 (x1 ) =
T3 (x1 ) =
Z
σ11 (M, x1 )ds
ZS(x1 )
ZS(x1 )
(1.9)
σ12 (M, x1 )ds
σ13 (M, x1 )ds
S(x1 )
Figure 1.9: Contraintes généralisées de membrane.
Les moments sont définis par les relations 1.10 et illustrés sur la Figure 1.10 :
−
→
M (x1 ) =
Z
−−→ −
→
GM ∧ tM (x1 )ds
S(x1 )
moment de TORSION :
moment de FLEXION /
=
moment de FLEXION /
Mt (x1 ) =
→
−
x2 :
→
−
x3 :
Z
Mf 2 (x1 ) =
Mf 3 (x1 ) =
(x2 σ13 (M, x1 ) − x3 σ12 (M, x1 ))ds
S(x1 )
Z
ZS(x1 )
x3 σ11 (M, x1 )ds
−x2 σ11 (M, x1 )ds
S(x1 )
Figure 1.10: Contraintes généralisées de flexion.
(1.10)
Théorie des poutres
17
Finalement, le torseur des efforts intérieurs s’écrit en fonction de l’abscisse du point considéré le long de la ligne moyenne G(x1 ) :
N
(x
)
1
→
−
R
(x
)
=
T
(x
)
1
2 1
T
(x
)
3
1
{τ (x1 )}(G) =
Mt (x1 )
−
→
M
(x
)
=
M
(x
)
1
f
2
1
Mf 3 (x1 )
(G)
1.4.2
Énergie de déformation
En élasticité, l’énergie de déformation du solide de volume V peut s’écrire W =
→
−
−
σ( x ) : ǫ(→
x )dv. En RdM, puisque les hypothèses portant sur la géométrie et la ciV
nématique ont conduit à formuler un problème purement unidimensionnel, cette énergie
peut être écrite simplement à l’aide des composantes des torseurs des efforts et des déformations. En effet, en utilisant la définition des vecteurs déformation −
e→
M (x1 ) et contrainte
−
→
tM (x1 ), on obtient :
1
2
R
Z Z
1
→
−
→
−
−
−
σ(→
σ( x ) : ǫ( x )dV =
x ) : ǫ(→
x )dsdl
2 L S
ZV Z
−
→
tM (x1 ).−
e→
= 21
M (x1 )dsdl
L
S
Z Z
−−→
−
→
−
−
1
= 2
tM (x1 ).(→
e (x1 ) + →
κ (x1 ) ∧ GM )dsdl
ZL S
Z
Z
−−→ −
1
−
→
→
→
−
→
−
=
e (x1 ). tM (x1 )ds + κ (x1 ). GM ∧ tM (x1 )ds dl
2 L
S
S
−
−
W (→
u (→
x )) =
1
2
Z
(1.11)
↓ (par définition des éléments de réduction)
1
=
2
Z
→
−
−
→
−
−
( R (x1 ).→
e (x1 ) + M (x1 ).→
κ (x1 ))dl
L
→
−
Ceci montre que les forces R (x1 ) agissant sur la fibre moyenne L sont associées
−
→
−
à la déformation →
e (x1 ) de membrane, tandis que les moments M (x1 ) sont associés à
−
sa courbure →
κ (x1 ) (gradient de la rotation). Cette dualité résulte de l’intégration des
grandeurs physiques sur la section S(x1 ) de la poutre, et reste également valable dans
les structures de type plaques et coques. On trouvera dans certaines approches de la
mécanique des structures, ces grandeurs appelées contraintes généralisées pour le torseur
des efforts et déformations généralisées pour le torseur des déformations. L’énergie de
déformation de la poutre (Eq. 1.12) peut s’écrire en utilisant le produit scalaire de torseurs
définit par la somme des produits croisés des éléments de réduction des torseurs considérés,
Théorie des poutres
18
dépendant seulement de la position x1 (voir Eq. 7.1 dans ’Rappel sur les torseurs’ page
177) :
Z
1
→
−
{τ (x1 )} · {ǫ(x1 )} dl
W ( u (x1 )) =
2 L
Z
1
=
(N u′1 + T2 (u′2 − r3 ) + T3 (u′3 + r2 ) + Mt r1′ + Mf 2 r2′ + Mf 3 r3′ ) dl
2 L
(1.12)
1.5
Élasticité
La RdM peut s’appliquer à beaucoup de matériaux constitutifs différents. Généralement, en première approximation les matériaux sont supposés homogènes élastiques
linéaires isotropes (HELI). La loi de comportement permet de relier les contraintes aux
déformations, dernier élément nécessaire à la résolution de tout problème en mécanique.
→
∂σ (−
x ,t)
−
x , t) = 0).
Le cadre de la statique sera adopté ici ( ij∂xj + fi (→
1.5.1
Loi de comportement
La connaissance des déformations en tout point M du milieu curviligne permet
d’obtenir les contraintes en utilisant la loi de comportement. Nous nous sommes limités
au cas d’un comportement élastique linéaire isotrope. En notant λ et µ les coefficients de
Lamé du matériau constituant la poutre, on a donc :
µ(3λ+2µ)
′
′
′
σ11 = λ+µ ǫ11 = Eǫ11 = E(u1 + r2 x3 − r3 x2 )
σ12 = 2µǫ12 = G(u′2 − r1′ x3 − r3 )
σ = 2µǫ = G(u′ + r′ x + r )
13
13
2
3
1 2
(1.13)
Dans cette équation, E désigne le module d’Young du matériau et G le module de cisaillement associé. À partir de ces contraintes, il est possible de calculer les éléments de
réduction des efforts appliqués en un point G quelconque de la ligne L sous la forme :
Z
σ11 ds = ESu′1 = ESe1
ZS
→
−
σ12 ds = GS(u′2 − r3 ) = GSe2
R (x1 ) =
ZS
σ13 ds = GS(u′3 + r2 ) = GSe3
S
Z
(x2 σ13 − x3 σ12 )ds = GI0 r1′ = GI0 κ1
ZS
−
→
x3 σ11 ds = E(I2 r2′ − I23 r3′ ) = E(I2 κ2 − I23 κ3 )
M (x1 ) =
ZS
−x2 σ11 ds = E(−I23 r2′ + I3 r3′ ) = E(I3 κ3 − I23 κ2 )
S
Théorie des poutres
19
On constate alors que le torseur des efforts s’écrit relativement simplement en
fonction du torseur des déformations sous la forme :
N
T2
T
3
=
Mt
Mf 2
M
f3
ES 0
0
0
0
0
0 GS 0
0
0
0
0
0 GS 0
0
0
0
0
0 GI0
0
0
0
0
0
0
EI2 −EI23
0
0
0
0 −EI23 EI3
.
e1
e2
e3
κ1
κ2
κ3
(1.14)
Cette loi de comportement peut se réécrire en utilisant les sous-matrices 3 × 3
ci-dessous (Eq. 1.15). On constate que pour les poutres homogènes considérées ici les
comportements en membrane et en flexion sont totalement indépendants ([B] = [0]).
Dans le cas de poutres constituées de matériaux composites par exemple, dont les axes
d’orthotropie ne sont pas confondus avec les axes des sections, ces comportements ne sont
pas indépendants. :
) "
# (
( →
−
[A] [B]
R (x1 )
=
·
−
→
[B] [D]
M (x1 )
→
−
e (x1 )
→
−
κ (x )
1
)
⇔ {τ (x1 )} = [L] {ǫ(x1 )}
(1.15)
Remarque : en cisaillement l’approximation faite sur la distribution des déformations,
supposées constantes dans la section, conduit à surestimer la rigidité. Par des considérations énergétiques, on introduit un coefficient correcteur, dit coefficient de correction
en cisaillement qui permet de prendre en compte la répartition parabolique (contrainte
nulle sur les faces et non-nulle au centre de la section) réelle à l’aide d’une répartition
constante sur la section. Ce coefficient est noté généralement kα , avec α = 2, 3, il est égal
à 56 pour une section rectangulaire (voir §5.3.3). La loi de comportement en cisaillement
s’écrit donc :
Tα (x1 ) = kα GS eα (α = 2, 3)
1.5.2
Conditions aux limites
Nous avons vu que, selon l’hypothèse de Navier (sections droites), chaque point
du milieu curviligne (sur la fibre moyenne) possède six degrés de libertés. Ces degrés de
liberté servent à représenter :
−
— le déplacement de la fibre moyenne (vecteur déplacement →
u ),
→
−
— la rotation de la section droite (vecteur rotation r ).
De même, selon l’hypothèse de Saint-Venant (efforts concentrés), les efforts internes (de
cohésion) dans un milieu curviligne sont représentés par deux vecteurs, et donc six composantes, qui sont :
→
−
— les forces de cohésion de la fibre moyenne (vecteur force R ),
Théorie des poutres
20
−
→
— les moments de cohésion de la fibre moyenne (vecteur moment M ).
Les conditions aux limites sur une poutre porteront donc sur ces six degrés de
liberté et ces six efforts de cohésion. La frontière ∂Ω (2D) sur laquelle s’appliquent ces
conditions dans un milieu 3D (Figure 1.1), sera donc remplacée par des abscisses sur
la fibre moyenne (1D) pour les poutres. En chacun de ces abscisses, six informations
doivent apparaître explicitement. Le nombre de degrés de liberté et d’efforts connus, et
leur combinaison, dépend essentiellement du type de liaison rencontré. Les conditions aux
limites en déplacements les plus communes sont les suivantes :
— l’encastrement : si une poutre est encastrée à l’une de ses extrémités, alors en
→
−
−
→
→
−
−
−
ce point on a →
u =→
r = 0 , et les efforts résultants R et M sont inconnus.
→
−
−
— la rotule : une rotule empêche tout déplacement en ce point, →
u = 0 , mais
laisse les rotations libres. En contre-partie, les moments transmissibles en ce
−
→ →
−
point sont nuls, soit M = 0 , tandis que les forces de réaction sont inconnues.
— l’appui simple : un appui simple empêche un déplacement dans une direction,
par exemple u3 = 0, et laisse libre les autres degrés de liberté. Le seul effort de
cohésion non nul sera alors T3 .
Ces conditions aux limites sont d’une grande importance pour l’intégration des
équations d’équilibre (obtention des efforts internes) et de la cinématique (obtention des
déplacements). Pour déterminer les conditions aux limites en efforts, il est important de
se fixer un sens de parcours de la ligne moyenne L. En effet, le torseur des efforts {τ (x1 )}
−
→
est lié au vecteur contrainte tM , et donc à la normale à la section S. Comme la normale à
considérer est toujours sortante, le torseur des efforts sera affecté d’un signe opposé entre
les deux côtés de la poutre. En général, la convention de signe suivante est adoptée (voir
par exemple l’expression des termes de bords dans le principe des travaux virtuels - Eq.
1.20-b). En parcourant la ligne L de la gauche vers la droite :
— le torseur des efforts est affecté d’un signe + à droite du segment considéré sur
−
la poutre (la normale sortante de S est →
x 1 ),
— le torseur des efforts est affecté d’un signe − à gauche du segment considéré
−
sur la poutre (la normale sortante de S est −→
x 1 ).
1.6
Méthode de résolution
La résolution du problème de poutre peut avoir des buts différents, ce qui conditionne en grande partie la stratégie de résolution à adopter. On peut par exemple souhaiter connaître des informations ponctuelles, comme un déplacement maximum ou les
contraintes en des points précis. Dans ce cas, la résolution complète du problème n’est
pas toujours nécessaire, et des méthodes seront présentées ultérieurement pour obtenir
ces informations ponctuelles. Dans la plupart des cas par contre, le lieu des déplacements
ou contraintes maximales n’est pas connu à priori, ce qui nécessite de caractériser complètement les champs de déplacements et contraintes solutions.
Théorie des poutres
21
Il faut noter dés à présent que l’équilibre extérieur de la poutre étudiée, vis-à-vis
des sollicitations et des conditions aux limites cinématiques imposées, peut être vérifié
par un bilan des forces extérieurs, sans nécessité de connaître les efforts de cohésion ou
efforts internes qui règnent à l’intérieur de la poutre. À l’opposé, dans l’optique d’un
dimensionnement nous chercherons à connaître ces efforts de cohésion, définissant les
contraintes dans les sections. Dans ce cas, les efforts extérieurs de réaction, résultant
des conditions cinématiques imposées, seront inutiles pour vérifier l’équilibre intérieur
et pourront être connus a posteriori. Par contre les développements pourront devenir
rapidement lourds. Le point clef de la résolution des problèmes de RdM passe de toute
manière par la connaissance de ces efforts internes à la poutre. La stratégie de résolution
permettra de connaître ces efforts avec plus ou moins de développements, et sera souvent
la combinaison de l’équilibre extérieur et de l’équilibre intérieur de la poutre.
Pour le moment, la recherche des efforts intérieurs, en vue de dimensionner les
poutres, sera notre objectif unique. Dans ce cas, la résolution du problème peut se baser
sur la connaissance des équations d’équilibre intérieur de tronçons de poutre représentatifs. Nous nous proposons dans cette partie d’établir ces équations dans le cadre le plus
général possible, et de les utiliser dans le chapitre suivant pour résoudre les problèmes de
poutre. L’identification des efforts internes par transport des efforts extérieurs est également présentée rapidement.
1.6.1
Calcul des efforts internes - Équations d’équilibre
Dans le cas général, la résolution du problème passe par la détermination des
efforts internes. La méthode la plus rigoureuse pour déterminer ces efforts est similaire
à la résolution d’un problème de MMC : intégration des équations d’équilibre en veillant
à avoir autant de conditions aux limites que nécessaire. Pour des problèmes simples, tels
que ceux introduits dans le chapitre suivant consacré à la théorie des poutres à plan
moyen, ces équations peuvent se dériver de l’équilibre de tronçons de poutres de longueur
élémentaire. Pour une approche générale, un des moyens les plus systématiques pour
parvenir à exprimer ces équations d’équilibre et les conditions aux limites correspondantes
consiste à utiliser le Principe des puissances virtuelles ou PPV.
On rappelle que le PPV (Eq. 1.16) exprime l’équilibre, c’est à dire l’égalité entre la
−
∗ →
puissance virtuelle développée par les efforts intérieurs Pint
(u∗ ) et la puissance virtuelle
−
∗ →
développée par les efforts extérieurs Pext
(u∗ ) dans un champ de déplacement virtuel quel→
−
conque u∗ . Ainsi, il y équivalence entre le PPV et l’expression des équations d’équilibre
et des conditions aux limites statiques associées. Les conditions aux limites cinématiques
sont quant à elles incluses dans le PPV si le champs virtuel est CA. Dans notre cas, on
−
définit un champ de déplacements virtuel →
u ∗M , qui se traduit par un torseur de déplace−
−
ment virtuel {U ∗ (x1 )} d’éléments de réduction →
u ∗ (x1 ) un déplacement virtuel, et →
r ∗ (x1 )
une rotation virtuelle sur la fibre moyenne L. Ce déplacement virtuel produit un champ
Théorie des poutres
22
de déformations virtuel ǫ∗M dans chaque section S (Figure 1.11).
Figure 1.11: Segment d’une poutre où l’on applique le principe des travaux virtuels : passage
du solide 3D à la description de type poutre.
On étudie ici les efforts internes à la poutre, c’est-à-dire les efforts de cohésion dans
un tronçon de poutre libre de tout chargement extérieur. On verra plus tard, que chaque
effort ou déplacement imposé nécessite de découper notre poutre en autant de tronçons
→
−
libres de sollicitations extérieures. On note t dM le vecteur contrainte qui règne sur les
sections terminales, et qui représente l’action des tronçons voisins sur le tronçon isolé.
Toutefois, ce vecteur contrainte peut tout aussi bien être imposé par l’extérieur si l’une
des surfaces extrémités S1 et S2 est une surface terminale de la poutre. Pour ce tronçon
de poutre, comme seules ces surfaces extrémités S1 et S2 sont soumises à un chargement
extérieur, l’intégration du travail virtuel des efforts extérieurs sur la frontière du volume
V se traduit par une intégrale sur la surface S aux points extrémités du segment de L
considéré. On remarque que sur S1 (Figure 1.11), la normale sortante à la section est
−
forcément opposée au sens de parcours de la fibre moyenne (vecteur −→
x 1 ). Cela donne
l’expression suivante du principe des travaux virtuels :
Théorie des poutres
−
|
Z
ǫ∗M dv
σM :
V
{z
−
∗ →
Pint
( u∗ )
}
23
+
+
Z
|V
→
− →
f v .−
u ∗M dv +
Z
→
−d →
u ∗M ds −
t M .−
S2
{z
−
∗ →
Pext
( u∗ )
Z
S1
→
−d →
u ∗M ds
t M .−
}
→
−
= 0, ∀u∗
→
−
= 0, ∀u∗
(1.16)
Contribution des efforts extérieurs
→
−
Dans cette équation 1.16, t dM est le vecteur contrainte appliqué sur la section S
considérée (avec une normale sortante). Les deux derniers termes de la puissance virtuelle
des efforts extérieurs peuvent donc être calculés assez simplement en remplaçant le champ
−
virtuel →
u ∗M par la cinématique issue de l’hypothèse de Navier (torseur des déplacements
virtuels {U ∗ (x1 )}). On obtient pour une section St quelconque (soit S1 , soit S2 ), au signe
négatif prés pour S1 :
Z
St
Z
−−→
→
−d →
−
t M .(−
u∗+→
r ∗ ∧ GM )ds
St Z
Z
−−→ →
−
→
−d
→
−
→
−
∗
∗
GM ∧ t dM ds
t M ds + r .
= u .
St
→
− −S∗t −
→ −∗
= R d .→
u + M d .→
r
= F d . {U ∗ }
→
−d →
t M .−
u ∗M ds =
(1.17)
→
−
De même, l’intégrale sur V des forces de volume f v devient :
Z
S(x1 )
Z
→
− →
−−→
−
f v .(−
u∗+→
r ∗ ∧ GM )ds
S Z
Z
−
→
−
−−→ →
→
−
→
−
∗
∗
f v ds + r . GM ∧ f v ds
= u .
→
− →
f v .−
u ∗M dv =
S
S
(1.18)
−
−
−
−
−c (→
−
−
−
=→
p (→
x 1 ).→
u ∗ (→
x 1) + →
x 1 ).→
r ∗ (→
x 1 ))
v
∗
= {F } . {U }
−
−
−c (→
−
Les vecteur →
p (→
x 1 ) et →
x 1 ) ainsi introduits, éléments de réduction du torseur des efforts
linéiques, représentent respectivement :
−
— une force par unité de longueur répartie sur la fibre moyenne (pour →
p ),
→
−
— un couple par unité de longueur réparti sur la fibre moyenne (pour c ).
Remarque : En toute rigueur, des forces réparties peuvent s’appliquer sur les faces de
la poutre (cf Figure 1.11). La contribution de ces efforts peut être calculée de la même
Théorie des poutres
24
façon que pour les forces de volume ci-dessus :
Z
Z
→
− →
→
− →
−−→
−
−
∗
f s . u M ds =
f s .(−
u∗+→
r ∗ ∧ GM )dΣ
∂S(x1 )
∂S Z
Z
→
−
−
−−→ →
→
−
→
−
∗
∗
= u .
f s dΣ + r .
GM ∧ f s dΣ
∂S
∂S
Toutefois, la présence de ces efforts est extrêmement rare compte tenu des hypothèses qui
conduisent à considérer une structure comme une poutre. Nous négligerons les contributions correspondantes dans la suite des calculs qui viendraient simplement s’ajouter aux
−
−c définis ci-dessus.
efforts extérieurs répartis →
p et →
Contribution des efforts intérieurs
En utilisant la même méthode que pour l’équation 1.11 (calcul de l’énergie de
déformation), puis la définition du torseur des déplacements, puis enfin une intégration
par parties, le premier terme de l’expression à annuler dans le principe des travaux virtuels
s’écrit de la façon suivante :
Z
V
σM :
ǫ∗M dv
Z
→
−
−
→
−
−
( R (x1 ).→
e ∗ (x1 ) + M (x1 ).→
κ ∗ (x1 ))dl
L
′
′
′
Z
R1 u∗1 + R2 (u∗2 − r3∗ ) + R3 (u∗3 + r2∗ )
=
′
′
′
+M1 r1∗ + M2 r2∗ + M3 r3∗
L
Z
Z
′
↓ Théorème de la divergence x ydl = −
=
L
=
Z
L
dl
xy ′ dl + [xy]ll21
−R1′ u∗1 − R2′ u∗2 − R3′ u∗3
−M1′ r1∗ − (M2′ − R3 )r2∗ − (M3′ + R2 )r3∗
L
→
−
→
−
−
−
+ R (l2 ).→
u ∗ (l2 ) − R (l1 ).→
u ∗ (l1 )
−
→
−
→
−
−
+M (l2 ).→
r ∗ (l2 ) − M (l1 ).→
r ∗ (l1 )
Z l2
→
− −∗
−
→ −
→
− −∗
= −
( R ′ .→
u + (M ′ + →
x 1 ∧ R ).→
r )dl
l1
→
−
→
−
−
−
+ R (l2 ).→
u ∗ (l2 ) − R (l1 ).→
u ∗ (l1 )
−
→
−
→
−
−
+M (l2 ).→
r ∗ (l2 ) − M (l1 ).→
r ∗ (l1 )
Z l2
d
{τ } . {U ∗ } dl + [{τ } . {U ∗ }]ll21
=−
dx
1
l1
dl
(1.19)
Théorie des poutres
25
On montre en effet que l’expression de la dérivée d’un torseur, et notamment du torseur
des efforts internes, s’écrit au centre de gravité de la section G (Eq. 7.3 page 179) :
→
−′
R
(x
)
1
d
{τ (x1 )}(G) =
−→
→
−
−
dx1
x1 ∧ R (x1 )
M ′ (x1 ) + →
(G)
Équations d’équilibre d’un tronçon de poutre
En utilisant l’ensemble de ces résultats (Eq 1.19= Eq 1.17+Eq1.18+Eq??), le principe des travaux virtuels s’écrit simplement de la façon suivante (Eqs 1.20) sur tout segment de la fibre moyenne ne contenant pas d’effort ponctuel :
−
−
∀(l1 , l2 ) ∈ L, ∀(→
u ∗, →
r ∗)
Z l2
→
−
−
→ −
→
− − →
−
−
(R′ + →
p ).→
u ∗ + (M ′ + →
x1∧ R +→
c ).−
r ∗ dl
(1.20a)
l1
+
h→
−d →
−
→ − ∗ →
− −∗ −
→ − ∗ il2
R .−
u ∗ + M d .→
r
u + M .→
r
− R .→
=0
l1
(1.20b)
ou en écriture torsorielle :
∀(l1 , l2 ) ∈ L, ∀ {U ∗ } ,
Z
l2
l1
l2
d
d
v
{τ } + {F } . {U ∗ } dl +
F − {τ } . {U ∗ } l1 = {0}
dx1
Cette équation doit être vérifiée sur tout segment, et pour tout champ de déplacement
virtuel, i.e. pour tout torseur {U ∗ }. Sachant que l’intégrale ne peut être nulle que si la
quantité intégrée est nulle si elle est continue (voir Annexes- Chapitre 7, §7.2.2 page 182),
on choisit le champ virtuel nul au bord et non-nul à l’intérieur de la poutre. De l’équation
(1.20a) on déduit les équations d’équilibre des milieux curvilignes (Eq. 4.13), à comparer
−→ −
→
− −
→
−
à l’équilibre des milieux continus (divσ(→
x ) + f (→
x ) = 0 ). C’est à partir de ces équations
que tout problème de poutre peut être résolu de manière rigoureuse :
Équations d’équilibre intérieur des poutres
d
{τ } + {F v } = {0} ⇔
dx1
( →
−′
→
−
−
R (x1 ) + →
p (x1 ) = 0
−
→
→
−
−
−
−c (x ) = →
M ′ (x1 ) + →
x 1 ∧ R (x1 ) + →
0
1
(1.21)
Théorie des poutres
26
Les équations d’équilibre sont deux équations vectorielles. Elles conduisent à six
équations différentielles scalaires qui traduisent l’équilibre mécanique du milieu unidimen−
sionnel. Les forces volumiques sont représentées par les vecteurs →
p (forces réparties sur
→
−
le segment) et c (couples répartis sur le segment). L’intégration de ces équations différentielles nécessite six conditions aux limites. Ces conditions sont obtenues aux points
d’abscisse l1 et l2 , extrémités du segment considéré, à partir de l’expression des termes
de bord du PPV (Eq. 1.20b) en choisissant un champ de déplacement virtuel nul à l’intérieur de la poutre et non-nul aux bords. Ces équations (Eq. 1.22) traduisent simplement
le fait que les efforts internes doivent être égaux aux efforts imposés aux même endroits
→
−d −
→
−
→
x→
(σ(−
F ) · n = t (xF ) en MMC) :
(1.22)
{τ }(li ) = F d (li )
En complément de ces conditions aux limites, si un torseur d’efforts {F i }(Gi ) , d’éléments
de réduction Ri (Gi ) et M i (Gi ), est imposé sur la section Si du tronçon considéré (Figure
1.12), une équation des discontinuités apparaît. Cette équation peut s’exprimer à l’aide
du PPV, modifié par la contribution de ces efforts : [| {τ } |](xi ) le saut des efforts internes
dans la puissance virtuelle des efforts internes, et {F i }(xi ) dans la puissance virtuelle des
efforts imposés. On n’a plus alors simplement égalité entre les efforts internes et les efforts
imposés, mais ces efforts viennent se superposer aux efforts extérieurs. Cette superposition
donne lieu à un saut des efforts intérieurs qui peut s’exprimer en considérant 2 sections
infiniment proches. Ce saut s’écrit, en prenant en compte le sens de parcours de la poutre :
−
[| {τ } |](xi ) = τ (x+
i ) − τ (xi ) . Finalement cette équation de discontinuité s’écrit :
i
−
(1.23)
[| {τ } |](xi ) = τ (x+
i ) − τ (xi ) = − F (xi )
Figure 1.12: Torseur d’efforts extérieurs appliqué sur une section Si du tronçon étudié.
On notera que les équations d’équilibre au bord de la poutre (Eq. 1.22) se déduisent
de cette condition (Eq. 1.23) en écrivant que τ (l1− ) et τ (l2+ ) sont nuls, soit τ (l1+ ) =
− {F 1 }(x1 ) et τ (l2− ) = {F 2 }(x2 ) .
Théorie des poutres
27
Identification des efforts internes par transport des efforts extérieurs
Les efforts internes peuvent être identifiés rapidement, en recourant à l’équilibre
extérieur de la poutre. En effet, chaque tronçon de la poutre isolé doit être en équilibre
sous l’action, d’une part des efforts de cohésion, et d’autre part des efforts extérieurs
imposés (Figure 4.20). Il suffit donc de procéder par la pensée à des coupes successives
le long de l’abscisse curviligne, et de vérifier l’équilibre de ces tronçons pour identifier les
efforts internes en tout point de l’abscisse.
Figure 1.13: Identification des efforts internes qui règnent dans une section située en A
par transport des efforts extérieurs à cet abscisse.
Considérons un tronçon de poutre en équilibre sous l’action d’un torseur d’actions
terminales en li dont les éléments de réduction sont définis en ce point : F d (li ) (li )
(Figure 4.20). Effectuons une coupure imaginaire de ce tronçon en un point A de l’abscisse
curviligne. La section située en A est donc en équilibre sous l’action d’une part des actions
extérieures terminales s’exerçant en li , et d’autre part sous l’action des efforts de cohésion
qui règnent en A ({τ }(A) ) et qui représentent l’action de la section voisine située en
x1 = A− (par définition des effort internes, efforts de la section de GAUCHE sur la
−
section de DROITE). Rappelons que la normale sortante est dans ce cas −→
x1 . Finalement,
l’équilibre s’écrit simplement, en prenant soin de transporter en A le torseur des actions
extérieures :
− {τ }(A) + F d (A) = 0
(1.24)
d
⇒ {τ }(A) = F (A)
Les efforts intérieurs sont rapidement identifiés par transport des efforts extérieurs s’exerçant sur le tronçon isolé. Cette identification permet de traiter rapidement les problèmes
simples, mais rappelons que la vérification de l’équilibre extérieur est un préalable incontournable pour cette identification. Cet équilibre peut poser des problèmes, notamment
dans le cas des problèmes hyperstatiques pour lesquels une surabondance d’inconnues sta-
Théorie des poutres
28
tiques ne peut être levée sans recourir à des méthodes complémentaires telles que celles
présentées dans le chapitre 3 de ce document.
1.6.2
Calcul des déplacements et des rotations
La connaissance du torseur des efforts intérieurs {τ (x1 )}(G) sur le segment permet, par la loi de comportement, d’obtenir les éléments de réduction (déformations de
−
−
membrane →
e (x1 ) et de courbure →
κ (x1 )) du torseur des déformations dans la poutre. Ce
−
torseur est relié au torseur des déplacements (vecteur déplacement →
u (x1 ) et vecteur ro→
−
tation r (x1 )) par les relations introduites précédemment (Eq. 1.7). L’intégration des six
équations différentielles ainsi obtenues permet de connaître le torseur des déplacements
en tout point de la fibre moyenne de la poutre, et donc le champ de déplacement par
la cinématique introduite. Lors de l’intégration, il est nécessaire d’utiliser six conditions
aux limites cinématiques, qui s’ajoutent aux six conditions aux limites en efforts utilisées
précédemment (Eq. 1.22). Globalement, sur chaque segment considéré, les conditions aux
limites (aux points d’abscisse l1 et l2 ) que l’on doit appliquer sont au nombre de douze.
Ceci correspond aux six degrés de liberté de chaque côté du segment. En chaque point
d’abscisse l1 et l2 , on doit donc connaître :
(u1 ou N ) ET (u2 ou T2 ) ET (u3 ou T3 )
ET (r1 ou Mt ) ET (r2 ou Mf 2 ) ET (r3 ou Mf 3 )
En pratique, il arrive que certaines conditions aux limites proviennent de considérations de symétrie. Dans ce cas, les conditions portent sur la continuité des déplacements
et/ou de leurs dérivées . Par exemple, en flexion trois points sur une poutre à plan moyen
(voir exercice Flexion 2), par des considérations physiques on écrira la continuité des
−
−
−
déplacements (→
u ), des pentes (→
u ′ ) et des rotations (→
r ) au centre.
1.6.3
Calcul des états de contraintes
Il est souvent essentiel de pouvoir connaître les contraintes qui règnent dans les sections, par exemple pour vérifier que les limites à rupture ou la limite d’élasticité n’ont pas
été dépassées. Comme la théorie des poutres est basée sur l’intégration de ces contraintes
sur les section (Eqs. 1.9-1.10), les contraintes locales doivent être déduites des informations
moyennes.
Pour ce faire, on peut utiliser d’une part la loi de comportement de la structure,
notée [L], qui relie le torseur des efforts internes au torseur des déformations (Eq. 1.14),
et d’autre part la loi de comportement matériau qui relie les contraintes aux déformations
locales (Eq. 1.13). En effet, les déformations qui règnent dans la section sont calculées à
partir des éléments de réduction du torseur des déformations connus au centre de gravité
Théorie des poutres
29
de la section. On peut donc recalculer les déformations en tout point de la section et en
déduire les contraintes correspondantes.
Contrainte normale
La contrainte normale est directement reliée à la déformation normale (Eq. 1.13)
par le module d’Young dans le cas d’un matériau isotrope. Par ailleurs l’effort normal
est relié d’une part à la déformation de membrane (e1 ) et d’autre part aux courbures de
flexion (κ2 et κ3 ). En résumé, on a :
(
−
σ11 (→
x ) = Eǫ11
N (x1 ) = ESu′1 (x1 )
= Eu′1
+ E(r2′ x3 − r3′ x2 )
|{z}
|
{z
} et Mf 2 (x1 ) = EI2 r′ (x1 ) − EI23 r′ (x1 )
2
3
f →
m →
= σ11
(−
x) +
σ11
(−
x)
Mf 3 (x1 ) = −EI23 r2′ (x1 ) + EI3 r3′ (x1 )
Contribution de la déformation de membrane Pour le terme de membrane, l’expression de
la contrainte est évidente, et recoupe le résultat classique où la contrainte est directement
égale à l’effort appliqué rapporté à la surface de la section sollicitée :
−
σ m (→
x)
N (x1 )
N (x1 )
m
m
=
⇒ σ11
(M, x1 ) = σ11
(x1 ) =
u′ (x1 ) = 11
E
ES(x1 )
S(x1 )
Contribution de la déformation de flexion Cette part de la contrainte normale est évaluée
assez simplement dans le cas où les moments produits sont nuls, c’est-à-dire pour des
sections à plan de symétrie et des efforts appliqués dans ce plan (pour une expression plus
compl !te, voir Eq. 2.6 page 51)). Dans ce cas :
f
σ11
(x1 , M ) =
Mf 3 (x1 )
Mf 2 (x1 )
x3 −
x2
I2 (x1 )
I3 (x1 )
Pour des sections non-symétriques ou des efforts appliqués hors de ce plan de
symétrie, on a alors de la flexion déviée, introduite au §2.2.3 pour les poutres droites.
Expression complète de la contrainte normale Finalement la contrainte normale est la
somme des contributions des termes de membrane et de flexion (Figure 1.14), et s’écrit
de manière générale :
σ11 (x1 , M ) =
Mf 3 (x1 )
N (x1 ) Mf 2 (x1 )
+
x3 −
x2
S(x1 )
I2 (x1 )
I3 (x1 )
Dans les cas courants, la contrainte est maximale sur les fibres extrêmes des sections, i.e.
en x2 = ± L22 et x3 = ± L23 . La ’rigidité de tension’ est directement liée à la surface de la
section transverse, tandis que la ’rigidité de flexion’ dépend des moments quadratiques
de la section, c’est-à-dire de la forme de la section. Ce dernier point est abordé en détails
dans les exercices sur la flexion simple.
Théorie des poutres
30
Figure 1.14: Représentation plane de la contrainte normale : contributions de (a) membrane et (b) flexion.
Contraintes de cisaillements
Comme dans le cas de la contrainte normale, les contraintes de cisaillements dépendent de termes de membrane (e2 et e3 ) et de courbure (κ1 ) :
−
σ12 (→
x ) = Gǫ12 = G(u′2 − r3 ) + Gr1′ x3
| {z }
| {z }
T2 (x1 ) = GS(u′2 (x1 ) − r3 (x1 ))
→
−
→
−
m
t
= σ12 ( x )
+ σ12 ( x )
et
T3 (x1 ) = GS(u′3 (x1 ) + r2 (x1 ))
→
−
′
′
σ13 ( x ) = Gǫ13 = G(u3 + r2 ) + Gr1 x2
{z
}
|
|
{z
}
Mt (x1 ) = GI0 r′ 1(x1 )
−
−
m →
t →
=σ (x)
+ σ (x)
13
13
(1.25)
Si les termes de membrane s’expriment simplement, par contre la contribution des
contraintes de cisaillement dans la torsion ne s’exprime simplement que dans le cas de
sections circulaires où les contributions de σ12 et σ13 sont identiques (notée σ1r (x1 , r)).
Au final, les contraintes de cisaillements sont :
m
σ12
(x1 ) =
T2 (x1 )
T3 (x1 )
m
σ13
(x1 ) =
S(x1 )
S(x1 )
t
t
τ (x1 , r) = σ1r (x1 , r) = f (σ12
(x1 , r), σ13
(x1 , r))(Rc ) =
Mt (x1 )
r
I0 (x1 )
avec r la position radiale du point M dans un système de coordonnée cylindrique (Rc )
attaché à la section circulaire centrée en G, et τ (r, x1 ) la contrainte de cisaillement dans
ce repère. La contrainte due à la torsion seule sera établie plus précisément dans le cas
d’une poutre droite soumise à un moment de torsion terminal (58). On remarque que
pour la partie membrane des contraintes de cisaillement, seule la section transverse est
importante, tandis que pour la torsion le moment quadratique polaire représente la rigidité
’géométrique’ de la section.
Théorie des poutres
1.7
31
Bilan de la théorie des poutres
Le dimensionnement des poutres passe généralement par la résolution des équations
d’équilibre intérieur (Eq. 1.27). Pour intégrer ces équations différentielles en efforts, on
dispose des conditions aux limites cinématiques (Eq. 1.26), utilisables via la loi de comportement (Eq. 1.29), ainsi que des conditions d’équilibre au bord (Eq. 1.28). Les équations
des discontinuités sont également nécessaires si des efforts sont appliqués ailleurs qu’aux
extrémités de la poutre (Eq. 1.28). Enfin, lorsque les déplacements sont connus les déformations peuvent être calculées (Eq. 1.30) et les contraintes évaluées en tout point à partir
des efforts internes (Eq. 1.31).
Théorie des poutres
32
Bilan de la théorie des poutres
1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.
2. Équilibre intérieur
{U}(li ) = U d
d
{τ }+{F v } = {0} ⇔
dx1
(1.26)
, ∀ li ∈ {l1 , l2 }
(li )
( →
−′
→
−
−
R (x1 ) + →
p (x1 ) = 0
−
→
→
−
− , ∀x1 ∈ [0, L]
−
−c (x ) = →
M ′ (x1 ) + →
x 1 ∧ R (x1 ) + →
0
1
(1.27)
3. Équilibre au bord et discontinuités
{τ }(li ) = F d (li ) , ∀ li ∈ {l1 , l2 }
−
i
[| {τ } |](xi ) = τ (x+
i ) − τ (xi ) = − {F }(xi ) , ∀ xi ∈ [0, L]
4. Loi de comportement
) "
# (
( →
−
[A] [B]
R (x1 )
=
·
−
→
[B] [D]
M (x1 )
→
−
e (x1 )
→
−
κ (x )
1
)
⇔ {τ (x1 )} = [L] {ǫ(x1 )}
5. Relations utiles :
— Relations déplacements/déformations
(
→
−
−
r ′ (x1 ) = →
κ (x1 )
→
−
→
−
−
−
′
u (x1 ) + x 1 ∧ →
r (x1 ) = →
e (x1 )
(1.28)
(1.29)
(1.30)
— Expressions des contraintes en fonction des efforts internes
m
tension : σ11
(x1 ) =
N (x1 )
S(x1 )
f
flexion : σ11
(x1 , M ) =
Mf 3 (x1 )
Mf 2 (x1 )
x3 −
x2
I2 (x1 )
I3 (x1 )
Tα (x1 )
m
(α = 2, 3)
cisaillement : σ1α
(x1 ) =
S(x1 )
t
torsion : τ (x1 , r) = f (σ1α
(r, x1 ))(Rc ) =
Mt (x1 )
r
I0 (x1 )
(1.31)
2.
Théorie des poutres droites
Sommaire
2.1
Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan . . . . . . .
2.1.1
2.2
2.3
35
Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées
dans ce plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
36
2.1.2
Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques . . . . .
36
2.1.3
Prise en compte du cisaillement transverse . . . . . . . . . . . .
37
2.1.4
Formulation des problèmes de flexion-tension . . . . . . . . . .
38
Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
40
2.2.1
Tension . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
40
2.2.2
Flexion simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
42
2.2.3
Flexion déviée
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
51
2.2.4
Sollicitation composée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
58
2.2.5
Torsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
58
Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
60
34
Théorie des poutres droites
35
Généralement, les poutres présentent des sections et des courbes moyennes dont les
particularités peuvent être utilisées pour réduire la complexité des problèmes traités. Dans
la plupart des cas en effet, les sections présentent des symétries, c’est la cas en particulier
des poutres à plans moyens. De plus, les poutres droites sont les plus largement utilisées.
2.1
Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan
Dans le cas des poutres courbes, la rotation du repère de la section par rapport au
repère de référence doit être pris en compte, par exemple en utilisant un repère de Frénet.
Les poutres droites ont la particularité de posséder une ligne moyenne rectiligne. Dans ce
cas les axes du repère de référence et du repère attaché aux sections sont confondus, et le
−
−
−
restent dans le cadre HPP. On notera dorénavant ce repère R(O, →
x ,→
y ,→
z ).
Comme il a été défini au début de ce document, les poutres à plans moyens sont
des poutres dont la section présente un plan de symétrie (Figure 2.1). Généralement ces
poutres sont chargées dans le plan de symétrie de la section, on parle alors de poutres à
plan moyen chargées dans leur plan. Des sections à plan moyen plus particulières peuvent
être utilisées, il s’agit des profils creux ou de profils ouverts (Figure 2.1). Dans le cas des
−
profils ne possédant pas de plan de symétrie par rapport à →
y , le centre de gravité n’est
plus confondu avec le centre géométrique, il y a donc apparition de flexion déviée. De plus
dans le cas des profils ouverts, des théories spécifiques doivent être utilisées, notamment
pour prendre en compte le cisaillement qui peut se développer dans les parois minces des
sections. Dans cette introduction à la RdM, nous nous limiterons aux sections fermées
présentant 2 plans de symétrie (xGy et xGz), telles que les 3 premières sections de la
Figure 2.1.
Figure 2.1: Exemples de sections à plans moyens et section ouverte.
Ces hypothèses de symétrie conduisent à des problèmes beaucoup plus simples que
les cas généraux présentés jusqu’alors. En effet dans ce cas, les moments produits des
sections sont nuls, il n’y a donc pas de couplage entre les 2 déformations de flexion (voir
Eq. 1.14). On supposera de plus que le chargement s’applique dans le plan de symétrie de
la section, ce qui évite notamment la prise en compte de la flexion déviée.
Théorie des poutres droites
2.1.1
36
Simplifications dans le cas des poutres à plan moyen chargées dans ce plan
Lorsqu’une poutre à plan moyen est chargée dans son plan, les efforts internes en
tout point d’abscisse x (qui joue ici le rôle de l’abscisse curviligne l) sont contenus dans
le plan du chargement et sont :
→
−
— une réaction R dans le plan xOy, donc avec deux composantes,
−
→
— un moment M dirigé selon Oz, donc avec une composante.
→
−
Les deux composantes de R sont alors notées N (effort normal) et T2 = T (effort tran−
→
chant), tandis que la composante non nulle de M est notée M3 = M (moment de flexion).
De même, les déplacements de tout point de la poutre (y compris des points situés
hors de la ligne moyenne) sont représentés par :
−
— un vecteur déplacement de la fibre moyenne →
u dans le plan xOy,
→
−
— un vecteur rotation r de la section selon Oz.
−
Les deux composantes non nulles de →
u sont notées ux = u (déplacement normal) et
−
u = v (flèche), tandis que la composante non nulle de →
r est notée r = φ (rotation).
y
z
Nous voyons dans ce cas que nous travaillons sur trois degrés de liberté (au lieu de six).
Les équations d’équilibre (Eqs. 4.13) deviennent dans ce cas fonctions des efforts N , T ,
et M , eux-même fonctions de l’abscisse x sur la poutre. Elles s’écrivent :
′
N (x) + px (x) = 0
T ′ (x) + py (x) = 0
M ′ (x) + T (x) + c (x) = 0
z
On remarque dans ces équations que les charges et couples répartis sur la fibre
moyenne de la poutre (issus des forces volumiques) se réduisent à :
−
— une force par unité de longueur →
p avec seulement deux composantes non nulles
px et py ,
−c porté par l’axe z.
— un couple par unité de longueur →
Le problème à traiter dans le cas des poutres droites à plan moyen chargées dans ce
plan est totalement plan, et grandement simplifié par rapport au cas des poutres courbes
dans l’espace. On note que la torsion n’apparaît pas ici, c’est en effet un mécanisme qui
fait intervenir une rotation hors du plan de symétrie des sections (κ1 (x1 ) = r1′ (x1 )). Cette
sollicitation sera traitée séparément.
2.1.2
Interprétation des grandeurs cinématiques et statiques
Dans ce cas plan de la théorie des poutres, on peut donner aisément une interprétation physique simple des quantités telles que la rotation des sections. Les hypothèses de
poutre ont conduit à poser une cinématique dans laquelle le déplacement de tout point
Théorie des poutres droites
37
M de la section s’exprime en fonction des déplacements plans du centre de gravité (u(x)
et v(x)) de la section et d’une rotation (φ(x)) de cette section (Figure 2.2).
Figure 2.2: Cinématique de poutre, sans cisaillement (Bernoulli) et avec cisaillement (Timoshenko).
2.1.3
Prise en compte du cisaillement transverse
Dans la cinématique sans cisaillement ou de Bernoulli, les sections sont supposées
). Dans ce cas, la connaissance du déplarester normales à la ligne moyenne (φ(x) = dv(x)
dx
cement de la ligne moyenne suffit, par des considérations géométriques simples, à définir
complètement les déformations de membrane et de courbure. Dans la cinématique avec
cisaillement ou de Timoshenko, la rotation totale de la section (φ(x)) est indépendante
de la rotation de la section due à la flexion ( dv(x)
) . Cet effet peut-être schématisé simdx
plement en flexion pure : la flèche totale est la somme de la flèche de la poutre possédant
uniquement une rigidité de flexion et de la flèche de la même poutre possédant cette fois-ci
une rigidité de cisaillement uniquement (Figure 2.2). Dans cette théorie, le cisaillement
(γ(x)) est donc la différence de la rotation totale (φ(x)) et de la rotation due à la flexion
( dv(x)
). Ou vu autrement, pour une flèche donnée, le cisaillement provoque une rotation
dx
totale moindre par rapport à la flexion seule. Ce point sera abordé plus en détails dans
les applications ci-dessous. Finalement, les théories avec et sans cisaillement reposent sur
Théorie des poutres droites
38
les cinématiques suivantes :
Bernoulli - sans cisaillement
dv(x)
uM (x, y) = u(x) − y
dx
v (x, y) = v(x)
M
Timoshenko - avec cisaillement
uM (x, y) = u(x) − yφ(x)
vM (x, y) = v(x)
γ(x) = dv(x) − φ(x)
(2.1)
dx
Pour la théorie avec cisaillement, l’introduction du cisaillement nécessite de corriger la contribution de cette rigidité. En effet, compte-tenu de l’hypothèse de répartition
constante du cisaillement dans l’épaisseur de la poutre (γ fonction de x seul), la répartition réelle qui est parabolique (maximum au centre et condition de contraintes nulles sur
les bords) est légèrement surestimée. On introduit un coefficient de correction, souvent
noté k, qui permet d’ajuster cette approximation. Ce coefficient est calculé à partir de
considérations énergétiques, il est égal à 65 pour une section prismatique (voir §5.3.3). La
loi de comportement en cisaillement s’écrit donc : T (x) = kGSγ(x)
2.1.4
Formulation des problèmes de flexion-tension
Au final, les problèmes de flexion-tension pour les poutres droites tels que représenté sur la Figure 2.3, sont complètement formulés grâce aux équations suivantes données
pour la théorie avec cisaillement.
Figure 2.3: Poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan : conditions aux limites en
x1 et x2 et chargements répartis et concentrés en xi .
Théorie des poutres droites
39
Bilan de la théorie des poutres droites chargées dans leur plan moyen
1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.
u(xi ) = ud , v(xi ) = v d , φ(xi ) = φd
2. Équilibre intérieur
N ′ (x) + px (x) = 0
T ′ (x) + py (x) = 0
M ′ (x) + T (x) + cz (x) = 0
3. Équilibre au bord et discontinuités
−
d
N (xj ) = N d (xj ) N (x+
i ) − N (xi ) = −N (xi )
−
d
T (xj ) = T d (xj )
T (x+
i ) − T (xi ) = −T (xi )
−
d
M (xj ) = M d (xj ) M (x+
i ) − M (xi ) = −M (xi )
4. Loi de comportement
N (x) = ES
du(x)
dx
T (x) = kGSγ(x)
M (x) = EI
dφ(x)
dx
5. Relations utiles :
— Relations déplacements/déformations
ǫ(x) = u′ (x) − yφ′ (x)
γ(x) = v ′ (x) − φ(x)
— Expressions des contraintes en fonction des efforts internes
m
tension : σxx
(x) =
N (x)
S(x)
f
flexion : σxx
(x, y) = −
M (x)
y
I(x)
cisaillement : σxy (x) =
T (x)
S(x)
En pratique, la contribution du cisaillement dans la rigidité de la poutre est souvent
négligée. En effet, ce terme est très souvent d’un ordre de grandeur inférieur au terme de
rotation φ(x) lors du calcul de la flèche v(x). Ceci est illustré dans les second et troisième
Théorie des poutres droites
40
exemples de flexion traités ci-dessous (exercice Flexion 2 et Flexion 3 ). On remarque
finalement que, en négligeant la contribution du cisaillement, et en dérivant la dernière
équation d’équilibre, on obtient une équation différentielle en v(x) et M (x). Cette équation
est souvent utilisée pour obtenir rapidement la flèche de la poutre en fonction du moment
M (x) calculé par transport des actions extérieures en un point x quelconque de l’abscisse.
La méthode est appelée double intégration de la ligne élastique :
EIv(x)′′ = M (x)
2.2
Applications
Les sollicitations des poutres droites à plans moyens étudiées ici sont soit de la
tension ou de la flexion, ou leur combinaison. Ces 2 sollicitations, imposées dans le plan
de symétrie de la poutre, sont étudiées à travers des exercices. La torsion est ensuite
abordée séparément, pour des arbres cylindriques.
2.2.1
Tension
Dans le cadre de la théorie en HPP présentée jusqu’alors, dans une poutre sollicitée
en tension, seule la contrainte normale est non nulle. On sait de plus que cette contrainte
est constante dans l’épaisseur de la poutre.
Tension 1 : exemple de base On considère une poutre à plan moyen de longueur l
−
chargée dans son plan en tension par un effort normal ponctuel (vecteur Fx .→
x ) appliqué
en B (Figure 2.4). On notera E le module d’Young du matériau constitutif et S la section
de la poutre constante ici.
Figure 2.4: Poutre droite à plan moyen chargée en tension par un effort terminal normal.
Théorie des poutres droites
41
1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités
cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner le déplacement longitudinal de la poutre en tout point x, en prenant
en compte les conditions aux limites cinématiques.
— Tracer le profil de la contrainte normale le long de la poutre.
— Choisir une section rectangulaire de poutre, pour une largeur b fixée, telle
que la limite élastique σ0 du matériau constitutif ne soit pas dépassée.
Tension : utilisation des continuités et discontinuités On considère la même
poutre, mais le chargement est ici un chargement réparti d’intensité constante P qui
s’applique seulement sur une partie [AB] de la poutre (Figure 2.5).
Figure 2.5: Poutre droite à plan moyen soumise à un chargement réparti.
1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités
cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner le déplacement longitudinal de la poutre en tout point x.
— Tracer le profil des contraintes le long de la poutre.
— Quelle est la contrainte maximale dans cette poutre ?
Théorie des poutres droites
42
— Choisir une section de poutre, pour une largeur b fixée, telle que la limite
élastique σ0 du matériau constitutif ne soit pas dépassée.
2.2.2
Flexion simple
Les équations d’équilibre ont été présentées ci-dessus, il reste à expliciter les
contraintes engendrées par la flexion des poutres. En se rappelant que la cinématique
s’exprime par rapport aux grandeurs mesurées au centre de la section, on en déduit que
la répartition de la contrainte normale à travers l’épaisseur est linéaire.
Flexion 1 : Flexion simple d’une poutre console
Considérons la poutre représentée sur la Figure 2.6 sollicitée par une force ponc−
→
tuelle (vecteur Fy (l)) en son extrémité B (x = l). On notera E le module d’Young du
matériau, G son module de cisaillement, S la section de la poutre et I son moment d’inertie
par rapport à l’axe Oz.
Figure 2.6: Flexion simple d’une poutre à plan moyen
1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités
cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x, en utilisant la
méthode de la double intégration, et donner leur profil.
3. Influence du cisaillement
Théorie des poutres droites
43
— Montrer que la contribution de l’effort tranchant peut être négligée dans
v lex
), dans le cas des
les expressions des déplacements obtenues ci-dessus ( vfcis
matériaux isotropes. On notera r le degrés d’anisotropie (r = E
).
G
— Évaluer la limite d’utilisation de la théorie de Timoshenko, pour ce problème. On notera que le degrés d’anisotropie peut atteindre une valeur limite supérieure à 35 pour des matériaux composites isotropes transverses
de type carbone/époxyde.
4. Choix d’une section en fonction de sa rigidité de flexion
— Évaluer et comparer les moments quadratiques des sections (a) et (b) présentées sur la Figure 2.7.
— Comparer les moments quadratiques et les masses des sections en I et sandwich par rapport à la section pleine en fonction de k. On considérera de
l’acier, et de la mousse PUR pour l’âme du sandwich, avec un rapport de
a
= 5 · 10−2 .
rigidité E
Ep
Figure 2.7: Profils de section considérés : (a) section rectangulaire pleine, (b) section en
I, et (c) matériau sandwich.
Théorie des poutres droites
44
Remarques sur la rigidité en flexion des sections de type profilé et sandwich
On note Ihom le moment d’inertie de la section homogène (Figure 2.7-a) :
Z
Ihom/G =
b/2
−b/2
Z
h/2
2b
y dy =
3
−h/2
2
3
h
2
(2.2)
Pour la poutre en I (Figure 2.7-b), le moment quadratique est calculé en 2 parties. Il faut
tout d’abord évaluer la contribution de la partie centrale (l’âme dans les sandwichs), puis
celle des deux peaux. Pour l’âme, le calcul est similaire à celui de la poutre homogène
(Eq. 2.2), avec une largeur kb pour la section en I et b pour le sandwich. Pour les deux
peaux (les voiles dans la section en I), on utilise soit une intégrale de bornes ayant pour
origine le centre de section, soit le théorème d’Huyghens qui permet de rapporter le calcul
du moment d’inertie par rapport à la ligne moyenne d’une peau à la ligne moyenne de
la poutre sandwich (Eq. 2.3). Ainsi, un terme supplémentaire apparaît dans le calcul du
moment d’inertie des peaux (des voiles). Il est constitué du produit de l’aire de la section
transverse des peaux par le carré de la distance entre la ligne moyenne d’une peau et
celle du sandwich. La rigidité équivalente de flexion de la poutre sandwich < EI >sand est
proche de celle de la section en I, calculée en deux parties, mais ici le matériaux constitutif
n’est pas le même dans toute la section de la poutre (Eq. 2.4).
II/G
= Iame/G + 2Ipeau/G
=
ou
=
Z
Z
kb/2
−kb/2
kb/2
−kb/2
2kb
3
Z
Z
h/2+kh)
y 2 dy + 2
−(h/2−kh)
(h/2+kh)
2
y dy + 2
−(h/2−kh)
3
h
− kh
2
< EI >sand/G =
Z
b/2
−b/2
2Ea b
=
3
+2
Z
Z
Z
b/2
−b/2
b/2
−b/2
Z
Z
h/2
y 2 dy
(h/2−kh)
kh /2
!
2
y dy + bkh
−kh /2
b(kh)3 bkh
+
(h − kh)2
12
4
h − kh
2
2 !
(2.3)
h/2
E(y) y 2 dy = Ea Iame/G + 2Ep Ipeau/G
−h/2
h
− kh
2
3
+ 2Ep
b(kh)3 bkh
+
(h − kh)2
12
4
(2.4)
Les matériaux sandwich généralement rencontrés dans les applications industrielles possèdent les caractéristiques suivantes (Eq. 2.5) (hp est l’épaisseur des peaux et ha est
l’épaisseur de l’âme).
hp
< 0, 1
ha
Ea
< 0, 02
0, 001 <
Ep
0, 02 <
(2.5)
Théorie des poutres droites
45
Figure 2.8: Effet sandwich : rigidité et masse du sandwich d’épaisseur ha + 2hp rapporté
à la section d’épaisseur 2hp (Epeau = 103 Eame et ρame = 0, 09ρpeau ).
Ainsi, en considérant ces ordres de grandeurs pour les rapports des épaisseurs et
des modules, on montre que le troisième terme de la relation (2.4) est prépondérant devant
les deux autres. En effet, si on note respectivement < EI >is (i = 1..3) les trois termes
composant la rigidité équivalente de flexion de la poutre sandwich (Eq. 2.4), les rapports
suivants peuvent être établis :
< EI
< EI
< EI
< EI
Ea ha
>1s
1
≃
<
3
>s
6Ep hp
6
2
2
kh
1
>s
≃ 2 <
3
>s
3ha
300
La rigidité de flexion propre des peaux rapportée à la ligne moyenne du sandwich
constitue donc le terme prépondérant de l’expression de la rigidité globale de flexion
(< EI >sand ). C’est donc l’assemblage des deux constituants qui confère à l’ensemble une
rigidité équivalente conséquente en flexion, c’est l’effet sandwich. Pour illustrer cet effet,
on calcul la rigidité du sandwich formé par des peaux d’épaisseur hp séparées par une âme
d’une épaisseur ha . On vérifie aisément que la rigidité du sandwich est beaucoup plus élevée
que la rigidité de la section constituée des mêmes peaux seules, formant un matériau massif
d’épaisseur 2hp (Figure 2.8), et ceci pour une masse sensiblement identique. La rigidité
de membrane est, quant à elle, très peu modifiée. On voit ici tout l’intérêt de l’utilisation
de ce type de section, notamment dans le secteur des transports où l’allégement est un
souci constant.
Plus généralement, on peut "gagner de la matière" en utilisant ce type de section,
Théorie des poutres droites
46
ou de manière équivalente des profils creux, en utilisant les matériaux les plus rigides le
plus loin du centre de flexion de la section. L’intérêt de ces sections peut être mis en
évidence en représentant la rigidité de flexion et la masse de la section en I (Figure 2.9-a)
et de la section sandwich (Figure 2.9-b), rapportées à la rigidité de flexion et la masse
de la section de même dimension mais homogène. Sur la Figure 2.9 (k est le rapport des
épaisseurs de peaux par rapport à l’épaisseur totale dans les sections en I (Figure 2.7-b) et
sandwich (Figure 2.7-c)) on peut voir que pour un gain de masse appréciable, on obtient
des rigidités très proches de celles de la section homogène.
Théorie des poutres droites
47
(a)
(b)
Figure 2.9: Rigidités et masse des sections (a) en I, et (b) matériau sandwich (Epeau =
103 Eame et ρame = 0, 09ρpeau ) .
Théorie des poutres droites
48
Flexion 2 : Flexion trois points
La Figure 2.10 représente une poutre à plan moyen sollicitée en flexion trois points
−
→
dans son plan par une force Fy . Par symétrie, nous allons utiliser le segment 0 ≤ x ≤ l/2
pour traiter le problème, en posant des conditions de symétrie en x = l/2. Du fait de
−
→
cette symétrie, la sollicitation ponctuelle Fy est diminuée de moitié. Une théorie avec
cisaillement sera utilisée pour résoudre ce problème.
Figure 2.10: Flexion trois points d’une poutre à plan moyen.
1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités
cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
Donner la flèche et la rotation maximale ainsi que les abscisses de ces
maxima.
— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
Attention aux réactions aux appuis ! ! !
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x, et tracer leur
profil.
3. Influence du cisaillement
— Montrer que la contribution de l’effort tranchant peut être négligée dans
v lex
), dans le cas des
les expressions des déplacements obtenues ci-dessus ( vfcis
).
matériaux isotropes. On notera r le degrés d’anisotropie (r = E
G
— Évaluer la limite d’utilisation de la théorie de Timoshenko, pour ce problème. On notera que le degrés d’anisotropie peut atteindre une valeur limite supérieure à 35 pour des matériaux composites isotropes transverses
de type carbone/époxyde.
Théorie des poutres droites
49
On a vu que le cisaillement peut être négligé dans le cas des matériaux courants
(r ≃ 2, 6), mais doit être pris en compte dans le cas des matériaux dont le rapport d’orthotropie est élevé. C’est le cas des matériaux composites par exemple, où le cisaillement
n’est plus une fonction du module d’Young et du coefficient de Poisson, et pour lesquels
le rapport peut atteindre des valeurs élevées, de l’ordre de 35. Il faut également préciser
que plus la poutre est élancée, plus le cisaillement est négligeable. On utilise d’ailleurs
un essai dit Short Beam Shear Test pour déterminer la résistance en cisaillement interlaminaire dans les poutres composites. Il s’agit d’un essai de flexion 3 points, tel que celui
présenté ci-dessus sur la Figure (2.10), mais dont les appuis sont si rapprochés (l = 5h)
que le cisaillement contrôle en grande partie la réponse de la poutre.Dans la suite des
applications, le cisaillement sera négligé afin d’alléger les développements analytiques.
La flexion 3 points est un essai couramment utilisé dans l’industrie pour caractériser les matériaux. Pourtant, cet essai, s’il a l’avantage d’être simple à mettre en œuvre,
pose de nombreux problèmes pour des mesures de résistance. En effet, le profil des efforts
tranchants et des moments fléchissants montre clairement que ces 2 grandeurs sont maximales au centre de la poutre. De plus, sous l’appui central, la poutre subit un écrasement
transverse (ǫyy ). La concomitance de ces valeurs extrêmes au centre de la poutre conduit
systématiquement à une rupture sous l’appui central, rendant difficile l’identification du
mode de rupture et l’état de contraintes à l’intérieur de la poutre au moment de la rupture. Un moyen simple de pallier à cette rupture ’incontrôlée’ est de mettre en œuvre un
essai de flexion 4 points (Figure 2.11), traité ci-dessous.
Flexion 3 : Flexion quatre points
Nous allons étudier la flexion quatre points d’une poutre à plan moyen. Les caractéristiques mécaniques et géométriques de la poutre étudiée sont identiques à celles
utilisées dans les exemples précédents (voir Figure 2.11). Dans ce problème, une théorie
sans cisaillement sera considérée. Il faut noter qu’il est possible d’étudier avec cette théorie
l’évolution de la contrainte de cisaillement le long de la poutre. En effet, l’effort tranchant
existe, et il va engendrer des contraintes de cisaillement, mais qui ici ne vont pas influer
sur la rotation des sections et donc la flèche. Simplement, aucune loi de comportement ne
permet de dériver la déformation de cisaillement à partir de l’effort tranchant.
1. Résolution complète
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités
cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Résoudre complètement le problème en intégrant les équations d’équilibre.
— Tracer les profils des efforts tranchants et des moments fléchissants.
— Tracer la déformée.
— Comparer ces répartitions avec celles de l’essai de flexion 3 points.
2. Résolution par transport des efforts extérieurs
Théorie des poutres droites
50
Figure 2.11: Flexion 4 points d’une poutre à plan moyen.
— Donner l’expression du torseur des efforts internes en tout point de la poutre.
— En déduire le torseur des déformations.
— Donner la flèche et la rotation de la poutre en tout point x.
Flexion 4 : Poutre d’égale résistance Les poutres en flexion sont très répandues
dans les applications technologiques courantes. On peut souhaiter avoir des poutres dites
d’égale résistance, c’est-à-dire que l’état de contrainte soit le même partout dans la poutre.
Ceci assure une homogénéité dans toute la poutre, et donne l’assurance qu’en tout point de
la poutre la résistance du matériau constitutif ne sera pas dépassée si le dimensionnement
est effectué correctement.
Nous allons appliquer ce principe à la poutre console vue précédemment (Figure
2.6) qui est chargée dans un premier temps par un effort ponctuel terminal comme dans
l’exercice Flexion 1 , puis dans une autre configuration avec cette fois-ci un effort réparti
vertical d’intensité py constante (Figure 2.12). La section de cette poutre est rectangulaire,
de largeur b et de hauteur h.
Figure 2.12: Poutre console soumise à une charge répartie py constante.
1. Résolution du problème posé sur la Figure 2.12
Théorie des poutres droites
51
— Poser le problème à résoudre pour déterminer complètement les quantités
cinématiques et statiques (équations d’équilibre + conditions aux limites).
— Exprimer les déplacements en tout point x.
— Tracer le diagramme des efforts tranchants et des moments fléchissants.
2. Expliciter, pour les 2 cas de chargements, la contrainte normale maximale, en
fonction du moment de flexion maximum et des dimensions de la section qui
peuvent dépendre de x.
3. Donner le profil de la poutre si la largeur b est fixe (variation de la hauteur
h(x)).
4. Donner le profil de la poutre si la hauteur h est fixe (variation de la largeur
b(x)).
2.2.3
Flexion déviée
La flexion déviée se produit lorsque les moments produits de la section ne sont
pas nuls. Ce peut être le cas par exemple lorsque les directions principales d’inertie de
la section ne sont pas confondues avec les axes du repère de référence, ou bien pour
les sections ne possédant pas de plans de symétrie. On retrouve alors le résultat énoncé
précédemment (Eq. 1.14), où le moment fléchissant Mfz est dû pour une part à la flexion
−
−
selon →
z , mais également à de la flexion selon →
y . Ce qui donne dans une théorie sans
cisaillement :
Mfz (x) = EIGz v ′′ (x) − EIGyz w′′ (x)
où IGy , IGz et IGyz sont respectivement le moment quadratique de la section par rapport
−
−
à l’axe →
y , par rapport à l’axe →
z , et le moment produit. w′′ est la courbure due à la flèche
−
selon →
z . Dans ce cas la contrainte normale se calcule en prenant en compte les grandeurs
suivant les 2 axes concernés.
L’expression de la contrainte normale s’établit à partir des lois de comportement
en flexion (Mfz = f (v ′′ , w′′ ) et Mfy = f (v ′′ , w′′ )), en explicitant les courbures et en les
introduisant dans l’expression de la contrainte normale, telle qu’exprimée par exemple
dans l’équation 1.25 page 29. Au final, l’expression complète de la composante de flexion
de la contrainte normale s’écrit :
f
σxx
(x) = −Mfz (x)
zIGy − yIGyz
yIGy − zIGyz
+ Mfy (x)
2
2
IGy IGz − IGyz
IGy IGz − IGyz
(2.6)
Poutre à section quelconque
Considérons une section quelconque mais constituée d’un matériau homogène. On
comprend bien que les directions principales dites d’inertie 1 de cette section ne seront pas
1. En fait ces propriété dites - abusivement - d’inertie ne sont pas liées directement au comportement dynamique, mais par extension représentent les propriétés géométriques et matériaux de la section
Théorie des poutres droites
52
directement confondues avec les axes du repère global (Figure 2.13-a). Pour le montrer
plus rigoureusement, déterminons dans un premier temps les coordonnées du centre de
gravité de cette section. Ensuite, les directions principales d’inertie seront déterminées en
−
−
diagonalisant le tenseur d’inertie de cette section, dans le plan (G, →
y ,→
z ).
y'
y
(S1)
z'
(s)
y
α
y
G
e
h
G
z
G
G
y
G
O
z
z
O
G
(S3)
(S2)
z
b
(a)
(b)
Figure 2.13: Description géométrique de la section : (a) centre de gravité et directions
principales d’inertie pour une section quelconque, et (b) section en L.
−
−
Dans le plan (O, →
y ,→
z ), les coordonnées du centre de gravité se calculent par la
définition même de ce point particulier de la section, qui est tel que :
centre de gravité en 3D
Z Z Z
−
Ω
x→
G (x) = Z Z Z
→
−
x dΩ
Ω
ρdΩ
centre d’une section homogène en 2D
Z Z
Z Z
y ds
z ds
S(x)
S(x)
yG (x) = Z Z
zG = Z Z
ds
ds
S(x)
(2.7)
S(x)
Le terme au numérateur est appelé le moment statique de la section par rapport à l’origine
du repère O, on le notera JOz et JOy ci-dessous. Ce moment est évidemment nul lorsqu’on
le calcule par rapport au centre de gravité G.
Lorsque les coordonnées du point G sont déterminées, les moments quadratiques
et produit peuvent être calculés par rapport à ce point, et relativement aux axes du
−
−
repère global, dans le repère centré en G par exemple (RG = (G, →
y ,→
z )). D’après les
relations page 7 rappelées ci-dessous, on obtient le tenseur d’inertie de la section (en 2D)
par rapport au centre de gravité, appelé alors tenseur central d’inertie :
Z Z
Z Z
2
yzds
z ds
−IGyz = −
IGy =
S(x)
S(x)
Z
Z
Z
Z
(2.8)
I(G, S)
=
(RG )
2
y ds
yzds
IGz =
−IGyz = −
S(x)
qualifiant son comportement mécanique en termes de rigidité
S(x)
→
→
(G,−
y ,−
z)
Théorie des poutres droites
53
Ces moments peuvent également se calculer par rapport à un système d’axes
−
orthogonaux centré en G, formant un angle α par rapport à l’axe →
z par exemple →
−
\
−
α=→
z G z ′ - tel que représenté sur la Figure 2.13. En introduisant le changement de base
→
−
−
(G, →
y , z)
(G, y ′ , z ′ ) avec le tenseur P
de changement de base (orthogonal si
′ )
(RG →RG
→
−
les bases sont orthonormées directes) tel que x′ = P (R
P (R
′
G →RG )
"
cos α − sin α
=
sin α cos α
′
G →RG )
#
−
·→
x en 2D :
′ )
(RG →RG
et en notant que le tenseur d’inertie est d’ordre 2, ce changement de base s’écrit :
T
· P (R →R′ )
I(G, S) ′ = P (R →R′ ) · I(G, S)
(RG )
G
G
(RG )
G
G
ce qui conduit finalement aux expressions des moments par rapport à ce nouveau système
d’axe :
1
1
IGy′ = (IGy + IGz ) + (IGy − IGz ) cos 2α − IGyz sin 2α
2
2
1
1
IGz′ = (IGy + IGz ) + (IGz − IGy ) cos 2α + IGyz sin 2α
2
2
1
−IGy′ z′ = (IGz − IGy ) sin 2α − IGyz cos 2α
2
RR
Remarque : Les moments produits sont stockés sous la forme −IGyz = − S(x) yzds,
il faut être très attentif au signe, selon qu’on écrit la forme tensorielle ou non. Ici on a
exprimé le terme hors-diagonal de la forme tensorielle, soit −IGy′ z′ pour être cohérent.
On en déduit encore, que inversement, l’angle α entre le repère RG et le repère prin′
cipal d’inertie RG
, tel que le moment produit est nul, s’exprime en fonction des moments
caractéristiques de la section
2 IGyz
tan 2α =
IGy − IGz
Plus généralement, déterminer les axes principaux de la section, pour lesquels le moment
produit est nul, se fait par diagonalisation du tenseur d’inertie. Il s’agit de déterminer
−
les vecteurs propres →
xi associés aux valeurs propres Ii de ce tenseur. Ces valeurs propres
représentent la projection du tenseur sur les directions propres associées, soit I(G, S)
·
(RG )
→
−
−
x =I ·→
x . Ou encore, pour que la solution triviale ne soit pas solution :
i
i
det
i
"
IGy − Ii −IGyz
−IGyz IGz − Ii
#!
→
→
(G,−
y ,−
z)
2
=0
= Ii2 − (IGy + IGz ) Ii + IGy IGz − IGyz
d’où on déduit les valeurs prises par les moments d’inertie principaux, solution de l’équation du second degré en I
s
2
IGz − IGy
IGy + IGz
2
±
+ IGyz
I(max,min) =
2
2
Théorie des poutres droites
54
Sans entrer dans les détails, ces valeurs propres sont réelles et distinctes, et les vecteurs
propres correspondant sont donnés par
q
!
2
→
−′
IGy − IGz − (IGy − IGz )2 + 4IGyz
z1 =
−2IGyz
−
→−
→
q
!(G, y , z )
2
2
→
−′
IGy − IGz + (IGy − IGz ) + 4IGyz
z2 =
−2IGyz
→
→
(G,−
y ,−
z)
Illustration sur la cas de la poutre console - TP
Pour illustrer ces calculs de propriétés géométriques de sections, et pour étudier
la flexion déviée, considérons une section en L telle que présentée sur la Figure 2.13, de
hauteur h, de largeur b, et d’épaisseur de voile e, constituée d’un matériaux homogène de
type PVC :
— Dimensions : e=3,5 mm, h=3 cm et b=2 cm ; longueur ℓ = 70 cm
— Propriétés mécaniques : module d’Young 0, 35 GP a < E < 2, 5GP a. Ici E =
1 GP a
1. Pour ce cas de la cornière en L (Figure 2.13), nous allons procéder comme indiqué ci-dessus dans le cas général. On pourra raisonner en termes de 3 surfaces
composant cette cornière, telles que présentées sur la Figure 2.13 : 2 rectangles
composant les ailes - (S1 )/(z, y) ∈ [0, h] × [0, e] et (S2 )/(z, y) ∈ [0, b] × [0, h]) auxquels on retranchera le carré (S3 )/(z, y) ∈ [0, e] × [0, e] :
(a) Calculer la position du centre de gravité. Pour cela déterminer d’abord la
surface S puis les moments statiques JOz et JOy de la section
Réponses
yG =
S3
S2
S1
− JOz
+ JOz
JOz
=
S1 + S 2 − S3
e
2
(h2 + be − e2 )
e (h + b − e)
zG =
e
2
(he + b2 − e2 )
e (h + b − e)
A.N.
S = 162, 75 mm2
yG = 10, 3 mm
zG = 5, 3 mm
(b) Déterminer les moments quadratiques par rapport à l’origine du repère IOz ,
IOy , et IOyz puis par rapport au centre de gravité IGz , IGy et IGyz - utiliser
le théorème de Huygens par exemple. On rappelle (Eq. 7.32), à toutes fins
utiles, que ce théorème permet d’exprimer le tenseur d’inertie d’un solide par
rapport à n’importe quel axe en connaissant le tenseur d’inertie exprimé en
son centre de gravité calculé par rapport à un axe colinéaire. Pour la section
de poutre étudiée ici, la relation inverse donne donc :
2
zG
−yG zG
IG
(2.9)
= IO
−S
2
(RG )
(RG )
−yG zG
yG
(RG )
Théorie des poutres droites
55
Réponses
S3
S2
S1
=
− IOz
+ IOz
IOz = IOz
IOy =
IOyz =
e 3
(h + be2 − e3 )
3
e
(he2 + b3 − e3 )
3
e2 2
(b + h2 − e2 )
4
A.N.
IOz = 31.735 mm4
IOy = 9.712 mm4
IGz =
(b − e)e3 + eh3
2
− yG
S
3
IGy =
eb3 + (h − e)e3
2
− zG
S
3
−IGyz = −
IOyz = 3.943 mm4
e2 2
(b + h2 − e2 ) + yG zG S
4
A.N.
IGz = 14.475 mm4
IGy = 5.143 mm4
IGyz = −4.936 mm4
(c) Calculer les directions principales et valeurs des moments principaux pour
exprimer le tenseur central d’inertie.
Réponses A.N. On associe la plus petite valeur propre Imin au premier
→
−
vecteur propre z1′ et la plus grande valeur propre Imax au second vecteur
→
−
propre z2′ :
!
→
−′
→
−
→
−′ →
−′
→
−
\
0, 396
−
→
→
→
→
z2 (G,−
et z1′ (G,−
α2 = →
z G z2′ = 23, 3˚
y ,−
z) =
y ,−
z ) / = z1 · z2 = 0
0, 918
Imax = 16.601 mm4
Imin = 3.016 mm4
2. Afin de comparer ces prévisions avec le comportement réel de la poutre, réaliser
les mesures suivantes avec le montage mis à disposition :
(a) Mesurer le déplacement l’extrémité de la poutre (déplacement latéral et/ou
le déplacement le long de l’axe portant l’effort), en fonction de l’angle de la
sollicitation par rapport à la poutre. En déduire les directions principales
d’inertie.
Théorie des poutres droites
56
(b) Comparer les grandeurs prévues par la théorie des poutres appliquée au
cas de la poutre console prenant en compte la flexion déviée, aux valeurs
relevées avec le TP de poutre console.
F x3
x2
IGy
−l
v(x) =
2
E 6
2 IGy IGz − IGyz
x2
IGyz
F x3
−l
w(x) =
2
E 6
2 IGy IGz − IGyz
Norme du déplacement de l'extrémité
Sur la Figure 2.14 est représenté la norme du déplacement de l’extrémité de la
→
−
\
−
poutre console en fonction de l’angle α = y ′ G→
y entre la direction de la sollicitation et la
→
−′
direction principale y (voir Figure 2.13). On vérifie bien que le déplacement maximum
correspond à la plus petite valeur propre Imin associée à l’angle α = −66, 7˚, et que
le déplacement minimum correspond à la seconde valeur propre Imax associée à l’angle
α = 23, 3˚. On rappel que la rigidité en flexion d’une poutre s’exprime par rapport à l’axe
perpendiculaire au plan contenant la déformée - Mfz = f (v ′′ , Iz ).
23,3°
-66,7°
angle entre la sollicitation et le repère principal dela section
Figure 2.14: Déplacement de l’extrémité de la poutre console en fonction de l’angle α entre
la sollicitation et la direction principale de la section en L de la Figure 2.13.
Les évolutions des déplacements correspondants au problème résolu sont également
représentés sur la Figure 2.15, en coordonnées polaires.
Pour information, les industriels fournissent des données géométriques pour les
profils qu’ils commercialisent. La Figure 2.16 présente un exemple de données pour un
profilé en L, fourni par exemple par Arcelor-Mittal.
Théorie des poutres droites
57
y
y
x
−3
−2
−1
0
(a)
1
2
3
3
3
2
2
1
1
0
x
0
−1
−1
−2
−2
−3
−3
4
−3
−2
−1
0
1
2
3
4
(b)
Figure 2.15: Représentation polaire des déplacements à l’extrémité de la poutre console à
section en L - les échelles sont les mêmes : (a) déplacement selon l’axe d’application de
l’effort, et (b) dans la direction perdendiculaire.
Figure 2.16: Données pour une poutre à section en L - source Arcelor-Mittal.
Théorie des poutres droites
58
Figure 2.17: Poutre sollicitée en flexion et en tension
2.2.4
Sollicitation composée
Expliciter l’état de contraintes (σxx ,σxy ) qui règne dans la poutre ci-dessous (Figure
2.17) sollicitée en flexion-tension.
2.2.5
Torsion
La torsion est une sollicitation rencontrée trés fréquemment, et plus spécialement
dans les arbres de transmission par exemple. Ces arbres sont dans la plus grande partie
des applications de section cylindrique à section circulaire, creuse ou pleine. Les sections
carrées remplissent la même fonction mais servent le plus souvent à transmettre les moments de torsion en évitant d’utiliser des accouplements. En tenant un raisonnement
analogue à celui qui permet d’expliquer l’avantage des poutres en I en flexion, on comprend bien qu’en torsion les fibres matérielles périphériques sont les plus sollicitées. Dans
l’exercice ci-dessous, on démontre sur un cas simple l’intérêt d’utiliser des tubes creux
pour transmettre des couples.
On rappel que les expressions des contraintes de cisaillement font apparaître les
contributions des termes de membrane et des termes de courbure, appelée torsion dans
ce cas particulier (Eqs. 1.25). C’est le différentiel de contraintes de cisaillement de part et
d’autre du centre de gravité qui va induire de la torsion. Ceci est illustré sur la Figure 2.18,
−
−
−
d’abord (Figure 2.18-a) dans un repère cylindrique Rc = (G, →
x ,→
er , →
eθ ) où ces contraintes
→
−
→
−
sont contenues dans un plan (G, x , er ) invariant par rotation autour de l’axe de la poutre,
et également dans une section prismatique (Figure 2.18-b) où la torsion apparaît par
exemple si des contraintes de cisaillement σxy (x, M ) opposées en intensité règnent en
−
−
−
z dans le plan (G, →
x ,→
y ). Pour simplifier les calculs, dans le repère cylindrique les
± 2b .→
contraintes de cisaillement σxr (x, r) s’écrivent :
t
σxr (x, r) = Gǫm
xr (x) + Gǫxr (x, r)
Théorie des poutres droites
59
y (x2)
γxr
er
eθ
Mt
M
dω
M'
r
dx
G
x
x
G
z
(x3)
dx
(a)
(b)
Figure 2.18: Longueur élémentaire de poutre soumise à de la torsion : (a) section circulaire, et (b) section prismatique.
En considérant une sollicitation de torsion pure, notons la rotation entre 2 sections voisines
−
−
r1 . →
x = ω.→
x et la déformation correspondante ǫtxr (x, r) = γxr (x, r), tels qu’illustrés sur la
Figure 2.18-a. La déformation de cisaillement induite par la torsion peut alors s’exprimer
géométriquement sur ce tronçon de poutre de longueur dx, en calculant la longueur de
l’arc de cercle caractérisant le déplacement d’un point M initial vers un point M ′ final,
à une distance r du centre de gravité G, pour une rotation élémentaire dω. En petites
perturbations, on a la relation :
dω
γxr (x, r)
=
.
r
dx
Comme dans le cas de la flexion, il suffit alors d’exprimer la courbure en fonction des
grandeurs agissant à l’échelle de la poutre, et d’introduire cette courbure dans la loi
de comportement locale du matériaux en cisaillement pour obtenir l’expression de la
contrainte de cisaillement locale, en torsion pure, en fonction du moment de torsion et du
moment quadratique polaire :
Mt (x) = GI0
dω
dx
σxr (x, r) = Gγxr (x, r) = G
dω
Mt (x)
r=
r
dx
I0 (x)
Dans le cas plus général où la poutre est soumise à un effort tranchant, comme en flexion
la contrainte totale est la somme des contraintes de cisaillement de membrane et de flexion
(torsion).
Passons à une application du problème de torsion. Soit une poutre de section
circulaire, soumise à un moment de torsion d’intensité Mt en son extrémité l et encastrée
à son autre extrémité O (Figure 2.19). Cette poutre de moment polaire I0 est constituée
d’un matériau homogène isotrope élastique linéaire de module de cisaillement G.
1. Déterminer pour les 2 sections considérées (diamètres D1 et D2 extérieur / kD2
intérieur) les moments d’inertie polaires I01 et I02 .
Théorie des poutres droites
60
Figure 2.19: Poutre sollicitée en torsion. 2 sections circulaires sont considérées (a) pleine
et (b) creuse.
2. Calculer pour ces 2 sections les contraintes de cisaillement dans les arbres.
3. La contrainte limite τ0 est la même pour les 2 sections. Déterminer le rapport
de leur diamètre puis de leur masse.
4. Calculer ces rapports des diamètres et des masses pour k = 0, 7.
2.3
Bilan
Au travers de ces applications, nous avons mis en évidence 2 façons de résoudre
les problèmes de RdM :
— utiliser le transport des torseurs des efforts extérieurs pour exprimer le torseur
des efforts internes dans les sections. Les contraintes peuvent alors être obtenues
directement à partir de ces efforts internes, et les déplacements sont connus en
intégrant,
— résoudre complètement les équations d’équilibre intérieur de la poutre en utilisant les conditions aux limites cinématiques, les conditions d’équilibre au bord,
et les équations de discontinuités.
Dans le premier cas, la connaissance des efforts extérieurs réduit les développements
nécessaires à la résolution, mais l’équilibre extérieur doit être connu et peut se révéler
indéterminé dans certains cas, par exemple dans les cas hyperstatiques où les liaisons
avec l’extérieur sont surabondantes. Ces cas sont traités dans le chapitre suivant. Dans
le second cas, les développements peuvent rapidement devenir lourds mais permettent
de résoudre certains problèmes dont l’équilibre extérieur n’est pas connu. Finalement,
au cours des exemples traités, les problèmes ont pu être résolus de manière optimale en
mixant ces 2 méthodes.
Dans ces exemples, la sollicitation de tension a d’abord été abordée, et ne pose
pas de problème majeur. Dans le cas de la flexion on a pu observer que le cisaillement
peut être négligé dans la plupart des cas, et que par conséquent une théorie de Bernoulli
peut être utilisée en première approximation. Cette théorie, si elle ne permet pas de
Théorie des poutres droites
61
prendre en compte la rigidité de cisaillement, permet tout de même de caractériser l’état
de contrainte de cisaillement. Quant à la rigidité de flexion, l’utilisation de sections creuses
ou de sandwichs est tout à fait pertinente puisque ce sont les fibres matérielles les plus
éloignées de l’axe neutre qui donnent la rigidité de flexion de la section. Il en va de
même dans le cas de la torsion. Enfin, pour les sollicitations combinées, compte-tenu des
hypothèses de réversibilité et de linéarité de la RdM, les effets des sollicitations sur les
différents axes se superposent.
3.
Théorèmes énergétiques Hyperstatisme
Sommaire
3.1
3.2
Rappels - calcul du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
63
3.1.1
Simplifications dans le cadre de la RdM . . . . . . . . . . . . .
63
3.1.2
Travail dans le cas des poutres . . . . . . . . . . . . . . . . . .
64
Théorèmes énergétiques
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
66
3.2.1
Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti . . . . . . . . . .
67
3.2.2
Théorème de Castigliano . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
70
3.3
Hyperstatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
72
3.4
Résolution des systèmes hyperstatiques . . . . . . . . . . . . .
74
3.4.1
Principe de superposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
74
3.4.2
Théorème de Ménabréa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
76
62
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
63
Comme nous l’avons vu dans les exemples précédents, la résolution complète des
problèmes de plus en plus réalistes devient vite lourde. Qui plus est, la connaissance
du champ de déplacement complet n’est pas toujours nécessaire, par exemple pour le
dimensionnement qui se base sur les contraintes maximales rencontrées dans la structure.
Il existe des méthodes pour connaître ponctuellement une information telle qu’un déplacement, et donc une contrainte. La connaissance de cette information peut également
s’avérer nécessaire dans le cas des problèmes ’ouverts’ tels que les cas hyperstatiques par
exemple, dans lesquels les seules équations d’équilibre extérieur ne sont plus suffisantes
pour la résolution.
Les théorèmes énergétiques permettent de connaître assez rapidement des informations ponctuelles. Ils se basent sur le bilan énergétique du problème posé, ce bilan étant
fortement simplifié dans le cadre des hypothèses de la résistance des matériaux : pas de
dissipations, cadre de travail statique et hypothèse des petites perturbations, matériaux
élastiques linéaires (homogènes). Ces techniques sont basées sur la connaissance du bilan
énergétique du système étudié, via le calcul du travail produit par les efforts extérieurs.
3.1
Rappels - calcul du travail
Considérons, pour des raisons de simplicité, un système d’efforts appliqué sur la
frontière ∂ΩF d’un solide, tel que dans le cas général représenté sur la Figure 1.1 page
→
−
3 par exemple. Le travail produit entre deux instants t1 et t2 par ces efforts F d dans le
→
− −
champ de vitesse u̇ (→
x ) est défini par :
Z t 2 Z
→
−d →
→
− →
→
−
→
−
−
−
W ( u ( x , t)) =
F ( x , t) · u̇ ( x , t) dΩF dt
(3.1)
t1
3.1.1
∂ΩF
Simplifications dans le cadre de la RdM
Dans le cadre de la RdM, l’intensité des efforts est indépendante du temps, leur
point d’application peut par contre être en mouvement. Toutefois, dans le cadre de l’hypothèse des petites perturbations, cette position est confondue avec la position dans l’état
initial (sauf dans de le cas des problèmes non-linéaires géométriques sur lequel nous reviendrons dans le chapitre 4). Le champ cinématique est de plus la dérivée par rapport
→
− −
−
−
u (→
x , t). On peut alors calculer le
au temps du champ des déplacements : u̇ (→
x , t) = dtd →
travail fournit par le système d’efforts entre l’état initial et l’état final, états qui peuvent
être définis par les positions du système à ces instants. Pour un effort ponctuel, ce travail
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
64
s’écrit :
−
−
W (→
u (→
x ), t)) =
Z
t2
→
−d →
→
− −
F (−
x , t) · u̇ (→
x , t) dt =
t1
Z
−
→
x (t2 )
−
→
x (t1 )
−
→−
→
−d →
F (−
x ) · du(→
x , t)
→
− −
→
− − →
−
−
−
−
↓ en HPP et si →
x (t1 ) = 0 : →
x (t2 ) = →
x (t1 ) + →
u (→
x (t1 )) = 0 + →
u (−
x)
=
3.1.2
Z
−
→
→
u (−
x)
→
−d →
−
F (−
u ) · d→
u
0
Travail dans le cas des poutres
Dans le cas des poutres, les efforts extérieurs sont définis par des efforts et des moments, respectivement résultante et moment du torseur des actions extérieures {F(x1 )}(M )
appliqué sur la ligne moyenne, tel que défini dans l’équation 1.8 page 14 par exemple. Dans
ce cas, le travail des efforts extérieurs s’exprime en faisant intervenir le torseur des déplacements de la ligne moyenne {U}(M ) tel que défini dans l’équation 1.5 page 9. On peut
alors calculer le travail fourni par le système d’efforts entre l’état initial et l’état final
défini par le torseur des déplacements :
W (U (x1 )) =
Z
U (x1 )
0
{F(U )}(M ) ·{dU}(M ) =
Z
−
→
r (x1 )
−
→− →
M (→
r )·d−
r (x1 )+
0
Z
−
→
u (x1 )
0
→
− →
−
R (−
u )·d→
u (x1 )
(3.2)
À partir de cette dernière forme du travail (Eq. 3.2), on peut alors calculer le
travail d’un système d’efforts. On distingue deux cas, selon que les efforts dépendent des
déplacements ou non.
Efforts indépendants des déplacements
Le calcul est direct et se ramène au produit scalaire des efforts et des déplacements
de leurs points d’application. Par exemple, pour un système discret de n efforts et n
moments, on a :
−
W (U (→
x )) =
n
X
→
− →
−
→→
−
→
−
→
−
−
→
−
→
−
F ( x i ) · u ( x i ) + M ( x i ) · ri ( x i )
(3.3)
i=1
Efforts dépendants des déplacements (et inversement)
S’il existe une relation entre les efforts et les déplacements, cette relation ne peut
être que linéaire en RdM compte-tenu du cadre HPP et de l’élasticité linéaire. Dans ce
cas le calcul du travail fait apparaître un coefficient 21 provenant de l’intégration de cette
relation linéaire. Le cas typique de base est celui d’un ressort unidimensionnel linéaire
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
65
de rigidité k qui fournit un effort de rappel proportionnel au déplacement imposé à son
extrémité libre u(x) :
Z u(x)
1
k ξ dξ = k u(x)2
W (u(x)) =
2
0
— pour un ensemble d’efforts extérieurs, on peut définir un tenseur de rigidité, noté
Le , reliant l’effort appliqué et le déplacement résultant du point d’application, et
de la même manière un tenseur de compliance, noté Me , reliant ce déplacement
à l’effort imposé correspondant. Ces tenseurs seront précisés dans la partie
suivante. Pour un système d’efforts ponctuels discrets, le travail s’écrit :
n
→→
→→
1 X −
−
→
−
−
i −
W (U ( x )) =
Fe ( xi ) · Me · Fe ( xi ))
2 i=1
n
1 X →
−
−
−
−
=
u (→
xi ))
u (→
xi ) · Lie · →
2 i=1
(3.4)
Ce calcul du travail des efforts extérieurs s’étend sans difficulté aux efforts
répartis et moments ponctuels et répartis.
— pour les efforts intérieurs, une relation similaire a été définie préalablement par
la relation 1.15 dans le cas des poutres. Comme il s’agit de quantités internes à
la poutre, la relation entre le torseur des efforts intérieurs (contraintes intégrées
sur la section) et les déformations aux points correspondants, c’est à dire les
déplacements par unité de longueur de la poutre, est appelée loi de comportement : {τ (x1 )} = [L] {ǫ(x1 )}. Le travail produit par ces efforts dans le champ
de déplacement correspondant est alors appelé énergie de déformation interne
ou élastique dans le cas de l’élasticité. Dans le cas des poutres, en utilisant la
loi de comportement définie en 1.14, pour une section symétrique, cette énergie
de déformation par unité de longueur s’écrit :
−
−
−
−
→
1 →
d W (→
u (→
x ))
−
−
R (x1 ).→
e (x1 ) + M (x1 ).→
κ (x1 )
=
d x1
2
(3.5)
Mf22 Mf23
1 N2
T22
T32
Mt2
+
+
+
+
+
=
2 ES GS GS GI0
EI2
EI3
Coefficients d’influence
Certaines démonstrations des théorèmes énergétiques que nous allons étudier sont
facilitées en recourant à des coefficients dits coefficients d’influence, permettant de relier
les efforts imposés et les déplacements résultants en tout point du solide sollicité. Ces
coefficients se définissent intuitivement, par analogie avec les ressorts, tout comme dans
le cas de la méthode des éléments finis.
−
→
Par exemple si on applique un effort F1 au point M1 d’un solide, cet effort induit
un déplacement de ce point d’application. Le travail effectué par cet effort dans le déplacement de son point d’application étant le produit scalaire de l’effort et du déplacement
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
66
résultant, considérons simplement le déplacement dans la direction de l’effort imposé. Ce
déplacement est relié à l’effort par le coefficient d’influence u11 qui a donc la dimension
d’une souplesse (’inverse de la raideur’) :
u1 (M1 ) = F1 u11
On en déduit alors facilement l’expression du travail de cet effort F1 dans le déplacement
u1 :
1
1
WF1 = F1 u1 = F12 u11
2
2
Ceci se généralise aisément si le déplacement en un point Mi dans la direction de l’effort
Fi correspondant du solide considéré, résulte de l’application d’un ensemble de n efforts
Fj :
ui =
n
X
uij Fj
j=1
Donc le travail effectué par l’effort Fi dans ce déplacement est :
W Fi
n
1 X
= Fi
uij Fj
2
j=1
Finalement, le travail développé par l’ensemble des n efforts Fi dans le déplacement résultant est :
n
n
n
X
1X
1X
WT =
F i ui =
Fi
Fj uij
(3.6)
2 i=1
2 i=1
j=1
On montrera ci-dessous la symétrie des coefficient uij qui forment, dans une écriture
vectorielle de discrétisation du système, une matrice dite matrice de souplesse symétrique
et définie positive.
3.2
Théorèmes énergétiques
Compte-tenu des hypothèses simplificatrices de la RdM, notamment concernant
d’une part les vitesses de chargement supposées suffisamment lentes pour ne pas engendrer de dissipations, et d’autre part les matériaux élastiques, le bilan énergétique est
extrêmement simple : le travail fourni par les sollicitations extérieures est intégralement
stocké en énergie de déformation élastique à l’intérieur de la structure se déformant sous
le chargement imposé. Ceci permet, connaissant le système des actions extérieures, de
déduire des informations précieuses quant à l’état de déformation interne de la structure.
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
3.2.1
67
Théorème de réciprocité ou de Maxwell-Betti
L’idée de base de ce théorème consiste à utiliser le principe de superposition :
quelque soit l’ordre d’application des actions extérieures, l’état final du système est identique (hypothèses de linéarités géométriques et matériaux). L’utilisation de ce théorème
fait souvent appel à des chargements fictifs, sur la géométrie étudiée, de façon à faire
travailler le terme inconnu recherché (souvent un déplacement).
Illustration sur un exemple
Considérons l’exemple de la poutre console représenté sur la Figure (1) du Tableau
3.1 page 68, sollicitée en flexion par un effort −FC appliqué en C à l’abscisse lC . Les
caractéristiques de la poutre sont celles utilisées jusqu’ici : l, E, S, I. On souhaite connaître
la flèche v(x = l) = vB de l’extrémité de cette poutre. La résolution simultanée des
deux équations différentielles du quatrième ordre caractérisant l’équilibre intérieur de ce
problème conduit à l’expression de la flèche de l’extrémité de cette poutre :
vB =
FC lC2
(lC − 3l))
6 EI
Cette résolution nécessite des calculs assez longs. Par contre, ce résultat peut être déterminé presqu’immédiatement en montrant que les coefficients d’influence vBC = vCB .
C’est-à-dire que le déplacement du point B induit par l’application d’un effort unitaire
en C est identique au déplacement du point C lorsque qu’un déplacement unitaire est
appliqué en B. L’intérêt étant ici que ce dernier cas de chargement est connu et déjà
résolu (cf exercice Flexion 1).
Considérons pour cela le cas de cette poutre que l’on charge par l’effort FC et
également par un effort terminal FB qui permet de faire ’travailler’ le terme inconnu
recherché vB (Tab. 3.1). On vient superposer un problème fictif associé sur le chargement
réel.
Dans le premier cas (Tab. 3.1-(1) et (1’)), on sollicite la poutre console successivement par l’effort FC en C (1) puis par un effort terminal FB en B (1’). Le travail total
W1T ot est la somme de trois termes, le premier dû au travail de l’effort C dans le déplacement résultant de son application (1), le second est le travail produit par l’effort B dans
le déplacement résultant de son application (1’), et enfin le troisième terme correspond au
travail produit par l’effort FC dans le déplacement résultant de l’application de FB (1’).
On notera que dans ce dernier terme, le déplacement du point d’application C ne dépend
pas de l’effort FC . Dans le second cas (Tab. 3.1-(2) et (2’)), on considère la même poutre
console chargée cette fois-ci d’abord par l’effort terminal FB puis par l’effort FC . De part
le principe de superposition, le travail total doit être identique pour ces deux scénari. Il
en découle que les termes suivants ne peuvent être qu’identiques :
W1T ot = W2T ot ⇔ FB .vBC .FC = FC .vCB .FB ⇒
vBC = vCB
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
68
(1)
(2)
1
W1 = FC2 .vCC
2
1
W2 = FB2 .vBB
2
(1’)
(2’)
1
W1′ = FB2 .vBB + FB .vBC .FC
2
1
W2′ = FC2 .vCC + FC .vCB .FB
2
1
1
W1T ot = FC2 .vCC + FB2 .vBB + FB .vBC .FC
2
2
1
1
W2T ot = FB2 .vBB + FC2 .vCC + FC .vCB .FB
2
2
Table 3.1: Illustration du théorème de Maxwell-Betti
Finalement, connaissant la flèche du point C sous un chargement unitaire appliqué
en B, on obtient directement la flèche du point B sous un chargement quelconque appliqué
en C. On a établi précédemment que pour la poutre console telle que représentée sur la
Figure 2.6 page 42, le déplacement v § (x) de tout point de cette poutre sollicitée par un
x2
(x − 3l). Donc dans notre cas, on obtient
effort terminal d’intensité −F est v § (x) = F6EI
directement la flèche pour un effort d’intensité −FC :
FC lC2
(lC − 3l) = vB
6EI
ce qui correspond bien au résultat qu’on peut obtenir en résolvant le problème par les
équations d’équilibre. On notera toutefois que ce résultat est une information ponctuelle
v § (x = lc ) =
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
69
qui ne possède pas l’attrait de la solution complète permettant de connaître le déplacement
en tous points et surtout l’état de contrainte le long de l’abscisse.
Exemple 2
Considérons un second exemple représenté sur la Figure 3.1-(a). On cherche le
déplacement du point central D d’une poutre sollicitée en flexion trois points par un
effort situé à une distance lC < 2l . De nouveau, la résolution de ce problème est longue.
On connaît par ailleurs la solution d’un problème de flexion trois points classique avec
un effort central. On peut donc utiliser cette sollicitation fictive pour faire ’travailler’ le
déplacement central (Figure 3.1-(b)).
Figure 3.1: Poutre en flexion trois points avec chargement excentré : (a) problème réel et
(b) problème fictif associé.
L’expression v § (x) de la flèche pour la flexion trois points avec chargement central
a été établie dans l’exemple Flexion 2 du chapitre précédent. On a donc immédiatement
la solution de notre problème de flexion trois points excentré :
vD = v § (x = lC ) = F.vDC =
F lC
3l2 − 4lC2
48EI
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
70
Exemple 3
La poutre console étudiée précédemment est maintenant sollicitée par 3 efforts
ponctuels F1 , F2 et F3 , tel que présenté sur la Figure 3.2. On cherche la flèche à l’extrémité
de cette poutre v(x = l) = vB . La résolution des quatre équations d’équilibre interne
conduit à déterminer 16 constantes d’intégration. Comme dans le premier exemple, en
utilisant le chargement fictif associé appliqué en B, on peut résoudre très facilement ce
problème.
Figure 3.2: Poutre console sous 3 charges.
La flèche v § (x) étant connue pour la poutre console chargée à son extrémité, on
détermine aisément les coefficients d’influence de notre problème et donc la flèche totale
vB :
l2
F1 .vBA1 = F1 1 (l1 − 3l)
6 EI
+
l2
F2 .vBA2 = F2 2 (l2 − 3l)
6 EI
+
l2
F3 .vBA3 = F3 3 (l3 − 3l)
6 EI
vB =
3.2.2
1
(F1 l12 (l1 − 3l) + F2 l22 (l2 − 3l) + F3 l32 (l3 − 3l))
6 EI
Théorème de Castigliano
Ce théorème, d’une utilisation triviale, fournit un précieux outil pour traiter les
problèmes de RdM, notamment les problèmes hyperstatiques sur lesquels nous reviendrons
plus loin dans ce document. Son utilisation nécessite le calcul de l’énergie de déformation
du système. C’est en minimisant cette énergie de déformation qu’une relation est établie
entre un effort, respectivement un moment, et le déplacement du point d’application dans
la direction de cet effort, respectivement l’angle de rotation correspondant. En reprenant
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
71
l’expression du travail proposée dans l’équation 3.6 qui permet de faire apparaître clairement toutes les dépendances des efforts par rapport aux déplacements, on démontre très
aisément le théorème de Castigliano à l’aide des coefficients d’influence. La minimisation
de l’énergie de déformation, ou du travail des efforts extérieurs donnés, par rapport à un
effort par exemple donne :
∂WT
∂Fi
n
n
X
1X
Fj uij
Fi
2 i=1
j=1
∂
=
∂Fi
!
=
1 ∂
(F 2 u11 + + . . . + F22 u22 + Fn2 unn + 2F1 F2 u12 + . . .)
2 ∂Fi 1
= F1 u1i + F2 u2i + . . . + Fi uii + . . . + Fn uni
n
X
=
Fk uik
k=1
↓ par définition
= ui
soit le déplacement du point d’application de cet effort. Comme l’énergie de déformation
interne est égale strictement au travail produit par les efforts extérieurs, on a finalement
les relations suivantes :
∂Wint ({U})
∂W (F1 , . . . , Fn )
=
= ui
∂Fi
∂Fi
Remarque : il faut, lorsqu’on utilise l’énergie de déformation du système, faire apparaître
tous les efforts extérieurs, même si un ou plusieurs peuvent s’exprimer en fonction des
autres.
L’application de ce théorème au cas de la poutre console sollicitée en son extrémité
(Figure 2.6 page 42) permet de déterminer rapidement la flèche de l’extrémité. Il faut noter
que l’effort est négatif et donc que pour obtenir le déplacement dans la direction positive,
il faut prendre l’opposé de la minimisation de l’énergie de déformation par rapport à
l’effort F :
Z
2
Z l
Z l
1
1
2
dx =
EI
M (x) dx =
[F (x − l)]2 dx
Wint
2 EI 0
2 EI 0
0
3
∂Wint
∂Wint
−F l
֒→ v(x = l) =
=−
=
∂(−F )
∂F
3 EI
1
=
2
l
d2 v
dx2
Bien évidemment, dans ce cas, le travail des efforts extérieurs ne peut être utilisé puisque le
déplacement recherché est nécessaire pour le calcul de ce travail. En pratique, on recourra
au travail des actions extérieures essentiellement dans le théorème de Ménabréa qui repose
sur la nullité du travail produit par les efforts de réactions. Ceci est présenté plus loin
dans ce document.
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
3.3
72
Hyperstatisme
Un système est dit hyperstatique si certaines liaisons sont surabondantes, c’està-dire si leur suppression ne remet pas en cause l’équilibre statique du système, et les
mouvements de corps rigides sont supprimés. Le degrés d’hyperstatisme est défini par le
nombre de liaisons surabondantes qu’a le système avec l’extérieur. Ceci se traduit par un
nombre insuffisant d’équations pour résoudre le problème de l’équilibre statique extérieur :
q = n − p avec q le degré d’hyperstatisme, n le nombre de liaisons avec l’extérieur, et p le
nombre d’équations de la statique.
De nombreux exemples existent dans la pratique, les systèmes isostatiques étant
très peu nombreux dans la vie courante (pourquoi mettre systématiquement quatre pieds
aux tables, alors qu’on sait pertinemment que la patte surabondante doit être réglable ! !).
Dans notre cas des poutres, on trouve souvent des arbres de transmission reposant sur plus
d’appuis que nécessaires, ceci bien souvent dans un but de sécurité, ou de réduction des
dimensions (réduction des portées) ou encore de modification du spectre des vibrations
qui est lié à la longueur libre. Pour ce qui nous concerne, voici sur la Figure 3.3 deux
exemples de problèmes de poutres hyperstatiques d’ordre 1, la liaison surabondante est
représentée en pointillés.
Figure 3.3: Problèmes hyperstatiques d’ordre 1 : exemple 1 (a) et exemple 2 (b).
Considérons par exemple le cas de la Figure 3.3-(a). Si on veut caractériser l’équilibre statique global de la poutre, on a à disposition les équations de la statique, et comme
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
inconnues les efforts appliqués sur la poutre :
— bilan des efforts
donnés enC et en E :
0
−F
FE
FC
τ ext→ S
τ ext→ S (C) =
0
(C)
73
(E)
=
0
−F
0
(E)
— bilan des efforts deréactionaux appuis en Mi où Mi = {A, B, D} :
0
Ri
Ri
τ réact→ S (Mi ) =
0
(Mi )
Les réactions constituent donc les inconnues, et sont donc au nombre de 3. Pour résoudre
le problème, on dispose des équations de la statique qui caractérisent l’équilibre extérieur :
X→
−
0
= 0
— forces :
F ext→ S =
RA − F + RD − F + RB
X−
→
−→ X −−→ FM
→
— moments :
M (−
=
MP +
P M ∧ τ ext→ S (P ) avec {M, P } ∈
F ext→ S ,P )
{A, B, C, D, E} et M 6= P . Quelque soit le choix de M et P pour calculer les
moments, on a toujours une seule équation.
Au final, on a donc 2 relations pour 3 inconnues. Il faut trouver une équation
supplémentaire pour caractériser la solution de l’équilibre extérieur. C’est à ce niveau
que les théorèmes énergétiques peuvent être utilisés idéalement, comme nous le verrons
ci-dessous. Lorsque cette équation supplémentaire est trouvée, il suffit alors d’exprimer
les moments de flexion, puis la flèche par intégration de la ligne élastique par exemple.
On peut toutefois remarquer que si l’équilibre extérieur ne peut être caractérisé
pour ces cas hyperstatiques, en revanche l’équilibre intérieur peut être vérifié. Par exemple,
la résolution de l’exemple 2 (Figure 3.3) est possible à partir des équations d’équilibre
intérieur, en recourant aux quatre équations de discontinuité qui permettent de déterminer
quatre des huit constantes résultant de l’intégration des deux équations différentielles du
quatrième ordre pour les deux zones. Les constantes restantes étant déterminées par les
2 conditions cinématiques et statiques aux bords de la poutre, soit 4 conditions :
l
0 < x ≤ 2l
<x≤l
2
F
5 x3 5 lx2
l3
11 x3
F
2
2
v(x) =
− 3lx
−
+
−l x+
v(x) =
32 EI
3
8 EI
12
4
6
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
3.4
74
Résolution des systèmes hyperstatiques
La résolution des systèmes hyperstatiques est comparable à la résolution d’un système isostatique lorsque le nombre d’équations suffisant est explicité, voir Tableau 3.2.
On a deux moyens de déterminer ces équations supplémentaires qui sont les théorèmes
énergétiques, et le principe de superposition lui-même.
système ISOSTATIQUE
système HYPERSTATIQUE
→ résolution complète
→ résolution complète
- équilibre intérieur → M (x) et v(x)
- équilibre intérieur + éq. de (dis)continuité
limitée et fastidieuse → M (x) et v(x)
- équilibre global → M (x) → intégration → v(x)
souvent PLUS RAPIDE
- équilibre global IMPOSSIBLE
+
th. énergétique ou superposition
|
{z
}
֒→ M (x) → intégration → v(x)
→ une donnée
théorème énergétique - RAPIDE
→ une donnée
théorème énergétique
Table 3.2: Synthèse de la résolution d’un problème de poutre en flexion.
3.4.1
Principe de superposition
Dans notre cadre linéaire (HPP et élasticité linéaire), le problème hyperstatique
peut être décomposé en problèmes isostatiques dont les solutions sont connues. Ensuite,
par application du principe de superposition, la flèche du problème initial est déterminée.
Dans le cas de l’exemple 1, présenté sur la Figure 3.3-(a), on superpose une poutre
soumise à de la flexion quatre points (Figure 3.4-1), et la même poutre en flexion trois
points soumise à un effort central d’intensité (Figure 3.4-2) RD égal à la réaction produite
par l’appui central du problème initial. La flèche totale étant la superposition de ces deux
problèmes, le déplacement au centre doit être nul pour satisfaire la condition cinématique
imposée par l’appui central. Cette condition conduit finalement à une relation permettant
de déterminer l’effort de réaction, et donc par suite d’expliciter les moments et donc les
flèches :
l
11 F l3
RD l 3
11 F
+
= 0 ⇒ RD =
v(x = ) = vD = vD1 + vD2 = −
2
384 EI 48 EI
8
Pour l’exemple 2 le même type de décomposition peut être utilisé (Figure 3.5).
L’effort de réaction est déterminé de façon similaire à l’exemple 1 :
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
75
Figure 3.4: Décomposition de l’exemple 1 en problèmes isostatiques de solution connue.
v(x = l) = vB = vB1 + vB2 = −
5 F l3
RB l 3
5F
+
= 0 ⇒ RB =
48 EI
3 EI
16
(3.7)
Figure 3.5: Décomposition de l’exemple 2 en problèmes isostatiques de solution connue.
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
3.4.2
76
Théorème de Ménabréa
Un des inconvénients majeurs de cette technique de superposition est la connaissance des problèmes isostatiques simples. Il existe, avec les théorème énergétiques, un
moyen plus rapide de déterminer une de ces informations sans connaître la solution des
problèmes fictifs introduits. Dans le cas des appuis par exemple, le théorème de Ménabréa
est commode à utiliser. Il s’agit simplement d’un cas particulier du théorème de Castigliano où le déplacement déduit de la minimisation de l’énergie déformation est nul car
cette minimisation a lieu par rapport à des efforts de réaction dont le travail est nul dans
le déplacement réel cinématiquement admissible. Ces efforts de réaction étant considérés
comme un chargement extérieur à part entière.
L’énoncé du théorème de Ménabréa est le suivant : soit un système hyperstatique
(S) et un système isostatique associé (S0 ). Considérons le système isostatique (S0 ) soumis
aux charges données Fi et aux réactions hyperstatiques Rj . L’état d’équilibre des deux
systèmes étant identique :
W (S) = W (S0 ) = f (Fi , Rj )
Aux points d’appui on a donc, d’après Castigliano :
∂WS0 (Fi , Rj ))
=0
∂Rj
Ce qui nous fournit autant d’équations supplémentaires que d’inconnues hyperstatiques.
Dans le cas de l’exemple 2 représenté sur la Figure 3.3-(b), le système isostatique associé
est obtenu en remplaçant l’appui terminal par un effort de réaction RB pris positif, de
façon similaire au principe de superposition schématisé sur la Figure 3.5. Mais ici les deux
efforts F et RB sont appliqués dans le même temps. L’énergie de déformation se calcule
alors à partir des moments de flexion exprimés dans les deux zones de la poutre à partir
de ces deux efforts :
0
R
B
l
{τext→ 1 }(M ) =
— zone 1 : 2 < x ≤ l
(l − x)RB
(M )
0
R
−
F
B
l
{τext→ 2 }(M ) =
— zone 2 : 0 ≤ x < 2
l
(l − x)RB − 2 − x F
(M )
L’énergie de déformation peut être calculée, et la minimisation de cette énergie par rapport
Théorèmes énergétiques - Hyperstatisme
77
à l’effort de réaction nous fournit l’expression de cette réaction :
1
WS0 (F, RB ) =
2 EI
↓
1
∂WS0 (F, RB )
=0 =
∂RB
EI
⇓
5F
RB =
16
Z
Z
l
l
2
0
(l − x)RB −
2
Z l
l
1
−x F
dx +
[(l − x)RB ]2 dx
2
2 EI 2l
1
(l − x) RB dx −
EI
2
0
Z
l
2
0
l
(l − x)( − x)F dx
2
ce qui, fort heureusement, correspond bien au résultat obtenu par le principe de superposition (Eq. 3.7).
4.
Extension aux problèmes non-linéaires
et dynamiques
Sommaire
4.1
4.2
4.3
Flambage des poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
79
4.1.1
Équations non-linéaires de la statique des poutres droites . . .
81
4.1.2
Application à une poutre droite . . . . . . . . . . . . . . . . . .
85
4.1.3
Extension aux calculs numériques . . . . . . . . . . . . . . . . .
88
Modes et fréquences propres de vibration en flexion dans les
poutres droites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
90
4.2.1
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
90
4.2.2
Équations de la dynamique des poutres droites à plan moyen .
90
4.2.3
Vibrations libres - application à la flexion simple . . . . . . . .
91
4.2.4
Vibrations libres - calculs numériques
. . . . . . . . . . . . . .
95
Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre . . . . . . . .
96
4.3.1
Poutre homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
97
4.3.2
Poutre sur fondation élastique à deux paramètres . . . . . . . .
102
78
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
4.1
79
Flambage des poutres droites
Introduction générale
En Résistance des Matériaux "classique", il n’existe pas de couplage entre les comportements en tension, flexion ou encore torsion. Cette hypothèse, qui peut sembler très
restrictive, permet de résoudre un très grand nombre de cas concrets de structures génériques supportant des charges de fonctionnement courantes. On peut, pourtant, dans
certains cas vouloir dimensionner des structures contre des comportements non-linéaires
d’une point de vue géométrique. Par exemple, une surcharge rencontrée ponctuellement
(séisme, accident, ..) ne devra pas générer des distorsions géométriques susceptibles d’altérer la géométrie et donc les propriétés de la structure, de telle sorte que le fonctionnement
normal sera assuré pour la durée de vie prévue. Ces distorsions peuvent par exemple être
générées, pour des poutres, par une flèche trop importante qui engendrerait de la torsion
appelée déversement.
Pour illustrer ces phénomènes, nous nous concentrerons sur un type de non-linéarité
géométrique, le flambage qui apparaît sous un chargement de compression axiale pour une
poutre ou dans le plan pour une plaque. Lorsque ce chargement déstabilisant augmente et
atteint une valeur dite critique, le comportement va alors devenir instable. Le phénomène
de flambage va apparaître, caractérisé par le passage d’un état où règne principalement de
la compression (terme de membrane), à une configuration où la flexion est prépondérante
(courbure).
Il existe de nombreux exemples de comportements de type flambage, et l’étude de
ces phénomènes instables donne lieu à de nombreuses études tant analytiques que numériques ou expérimentales. On peut noter que les études analytiques s’appuient sur des
outils mathématiques trés pointus qui permettent par exemple de prévoir le comportement post-bifurqué des structures simples, c’est-à-dire la (non)stabilité qui caractérise le
comportement après l’apparition du flambage. À titre d’illustration, on peut voir sur la
Figure 4.1 le mode (la déformée) de flambage d’origine thermique d’un rail soumis à un
gradient de température élevé (-40◦ ;40◦ C dans les pays nordiques) et le mode de flambage
d’un cylindre en compression axiale. Ces 2 structures représentent 2 grands types de comportement qui sont respectivement sur-critiques, où la structure est encore susceptible de
supporter le chargement imposé, et sous-critique où la ruine de la structure survient dès
que l’instabilité se produit.
Le phénomène de flambage
Le cas typique de la règle que l’on comprime illustre parfaitement le phénomène de
flambage (voir Figure 4.2 page 81 et Figure 4.3 page 83). Pour appréhender ce comportement, traçons l’évolution de la flèche au centre de cette poutre en fonction du chargement
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
(a)
80
(b)
Figure 4.1: (a) Flambage d’origine thermique d’un rail,(b) flambage en compression axiale
d’un cylindre isotrope
(Figure 4.2). On constate que dans la première partie du chargement, en l’absence de défaut géométrique, avant le point de bifurcation le chargement augmente sans donner lieu à
de la flexion. La poutre est en compression et subit un raccourcissement proportionnel au
= −F
). Lorsque la charge imposée atteint la charge critique Fc , la flexion
chargement ( ∆l
l
ES
apparaît et la flèche tend vers l’infini sans accroissement de l’effort. En réalité, cette flèche
est limitée car la réponse complète charge-déplacement est de type parabolique (Figure
4.2).
D’un point de vue pratique, la rupture de la poutre intervient lorsque la limite
à rupture du matériau est dépassée. C’est donc la caractérisation de cet effort critique
qui est primordiale, car l’apparition de l’instabilité est généralement associée à un état
instable. Ceci est d’autant plus vrai dans les cas d’instabilités sous-critiques rencontrés
dans les problèmes de type coque, où le point de bifurcation correspond à l’effondrement
de la structure (cf boîte métallique de boisson, ou Figure 4.1-b). De plus on voit qu’en
présence de défauts (Figure 4.2), la charge à laquelle apparaît l’instabilité diminue. Donc la
réponse de la structure réelle sera majorée par cette force critiques. L’influence des défauts
peut engendrer des baisses trés importantes, jusqu’à 70 - 80 % de la charge critique. Le
dimensionnement des structures vis-à-vis du flambage est une problème extrêmement
délicat, du fait de la nature instable de ce phénomène, ce qui en fait un des principaux
facteurs de dimensionnement.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
81
(a)
(b)
Figure 4.2: Poutre libre-libre en compression : (a) montage de flambage rotulé , (b) réponse charge-déplacement vertical : réponse fondamentale et en présence d’imperfections
géométriques.
4.1.1
Équations non-linéaires de la statique des poutres droites
Nous nous intéresserons ici plus particulièrement à la caractérisation analytique
du flambage des poutres droites à plan moyens chargées dans ce plan (en abrégé poutres
droites à plan moyen). La théorie utilisée sera de type Bernoulli, i.e. ne prenant pas en
compte le cisaillement qui est tout à fait négligeable ici. Nous verrons que les charges
critiques et les modes de flambage dépendent à la fois des caractéristiques mécaniques
(rigidité = module d’Young E), géométriques (section S et moment quadratique par
−
rapport à →
z , I) de la poutre, mais également des conditions aux limites du problème
traité. Les principes exposés ici restent valables dans le cas de structures plus complexes,
mais la détermination de la charge critique fait alors appel à des méthodes de résolution
numériques.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
82
Origine de la non-linéarité géométrique dans le cas du flambage
Dans la formulation classique HPP, on considère que la géométrie initiale est
confondue avec la géométrie finale, ce qui permet d’écrire toutes les grandeurs dans un
repère unique. Ceci est valable lorsque les déplacements, ou plus rigoureusement les déformations, restent infinitésimales. Lorsqu’on passe en grandes déformations et/ou en grands
déplacements, il faut prendre en compte la nouvelle géométrie et l’actualiser. C’est cette
dépendance de la géométrie vis-à-vis des déplacements qui induit la non-linéarité géométrique. Numériquement, dans les codes de calculs par éléments finis par exemple, on résout
le problème de manière incrémentale, en recalculant à chaque itération les positions de
−
→ →
− →
−
tous les points (→
xi = −
x−
i−1 + u ( xi )). D’un point de vue analytique, on essaie de linéariser le problème à résoudre. C’est cette démarche que nous adoptons ici, en justifiant les
hypothèses qui conduisent au problème linéaire associé.
Dans le cas du flambage des structures, on se restreint à prendre en compte un
seul terme non-linéaire, appelé rotations modérées, valable pour des rotations des sections
< 10◦ , c’est-à-dire à mi-chemin entre les rotations infinitésimales et les grandes rotations.
C’est par ce terme que la déformation de membrane, classiquement reliée uniquement à
−
−
la déformation due au déplacement u(→
x ), va dépendre également de la flèche v(→
x ).
On montre qu’en première approximation, le phénomène de flambage se produit
à contrainte constante (Figure 4.2). En effet, pour une poutre inextensible sur appuis
simples (poutre elastica, Euler 1745 ) un accroissement de l’effort de 81 % correspond à
l’augmentation de l’angle de rotation des sections de 0,01 rad (0, 57◦ ), cette rotation
étant identique en tous points pour une courbure constante. On peut donc estimer que la
détermination de la charge critique peut se faire à l’aide d’un modèle linéarisé dans lequel
la contrainte axiale est supposée constante dans la poutre. Bien évidemment, la réponse
lorsqu’on s’éloigne du point de bifurcation, doit être recherchée à l’aide d’un modèle plus
raffiné.
D’un point de vue de la MMC, ce terme de rotation modérée est une des composantes de la partie non-linéaire du tenseur des déformations de Green-Lagrange, notée
−
u ), que l’on rappelle ci-dessous :
γ N L (→
1 −
1 −
−
−
−
−
−
u + ∇t →
u · ∇t →
γ(→
u ) + ∇→
u = ǫ(→
u)
u ) = (∇→
u ) + γ N L (→
2
2
(4.1)
Déformation de membrane incluant les rotations modérées
Nous avons vu dans le cadre de la statique que les équations des poutres quelconques peuvent se déduire, via le Principe des Puissances Virtuelles, de la formulation
générale de l’équilibre statique des milieux continus. Dans le cas qui nous intéresse ici, plutôt que de passer par les déformations des milieux continus, nous allons chercher la forme
de la déformation de membrane qui permet de relier le raccourcissement de la poutre à
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
83
l’état de flexion. C’est par cette composante du tenseur des déformations, que le couplage
tension-flexion est introduit dans le problème linéarisé.
Considérons la poutre ci-dessous (Figure 4.3) en appui simple, soumise à un char−
−
gement de compression F.→
x en X = 0 et bloquée en translation le long de →
x en X = l.
→
−
→
−
Un point situé à l’abscisse X sera après flambage situé en x :
Position initiale
→
−
X =
(
X
0
Position après flambage
)
→
−
x =
(
X + u(X)
v(X)
)
du(X)
dx = dX + dX dX
−
⇒ d→
x =
dy = dv(X) dX
dX
Figure 4.3: Poutre sur appuis simples en compression
Raccourcissement et déformation non-linéaire Le problème de flambage est intrinsèquement non-linéaire, mais de part la formulation adoptée, la non-linéarité va disparaître. En effet, conformément à la remarque sur la contrainte dans la poutre pour des
charges proches de la charge critique, on considère que la contrainte dans la poutre ne
varie pas le long de l’axe de la poutre : le flambage se produit à contrainte, et donc déformation, constante. Cette hypothèse est vérifiée expérimentalement pour des structures
élancées, c’est-à-dire lorsque les effets de bords sont négligeables. Elle est intégrée dans la
formulation choisie, c’est elle qui permet de linéariser le problème.
−
Le raccourcissement local correspondant à la déformation de membrane ǫ(→
x ) de
→
−
la fibre moyenne s’exprime en fonction des déplacements du point X intégrés le long de
l’abscisse (curviligne). Ce raccourcissement est dû pour une part à l’effet du chargement
de compression, et d’autre part à l’apparition de la flexion. On sait que le raccourcissement
total de la poutre s’écrit :
Z
Z
l
l
ds −
δ=
0
dX
0
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
84
en supposant que la déformation est constante dans la poutre, on peut exprimer la déformation moyenne, et donc la déformation locale :
Z l
ds
ds
δ
0
−1=
−1
ǫ= = Z l
l
dX
dX
0
ce qui finalement conduit à l’expression de la déformation locale. En utilisant les expressions des incréments dx et dy cette déformation de membrane s’écrit :
ds
′ 2
′2
2
2
2
2
ǫ=
− 1 avec ds = dx + dy = dX (1 + u ) + v
dX
Simplifications Finalement, l’expression de la déformation est connue, et peut se simplifier en première approximation :
′
′
p
ds
2u′ + u 2 + v 2
= 1 + 2u′ + u′ 2 + v ′ 2 ≃ 1 +
dX
2
On a donc l’expression de la déformation. Des simplifications peuvent encore être faites en
comparant les ordres de grandeurs des différents termes intervenant dans cette expression.
En effet, l’apparition du flambage induit des rotations des sections qui, bien qu’étant
faibles, sont plus grandes que le raccourcissement de membrane dû à la compression :
u′ , v ′ << 1
u′ << v ′
et θ ∼ tan θ =
′
v2
ds
≃ 1 + u′ +
⇒
dX
2
′
v2
⇒ǫ=u +
2
′
dy
dθ
v′
dθ
′
≃
v
⇒
courbure
=
≃
= v”
dx
1 + u′
ds
dX
Remarque on notera que cette expression peut être calculée à partir de l’expression du
tenseur des déformations non-linéaires des milieux continus (Eq.4.1) appliqué aux poutres,
en prenant en compte les simplifications faites ci-dessus.
Finalement, l’énergie de déformation s’écrit toujours de la même façon, mais avec
une expression de la déformation de membrane qui dépend de la flèche ǫ(u′ , v ′ ) :
Wint
1
=
2
Z l
0
ESǫ2 (u′ , v ′ ) + EIv
′′ 2
ds
(4.2)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
85
Équations d’équilibres
En utilisant l’expression de la déformation de membrane établie ci-dessus (ǫ =
′2
v
u′ +
), on peut déduire les équations d’équilibre du problème en utilisant le Principe
2
des Puissances Virtuelles. On considérera ici le cas d’une poutre sur laquelle le système
d’efforts appliqué se limite à un effort ponctuel de compression qui agit en x = l (Fi∗
= −F u∗ (l). On introduit
gure 4.4). Donc le travail virtuel des efforts extérieurs est Wext
les notations classiques pour l’effort normal (N (x) = ESǫ(x)) et le moment de flexion
d2 v(x)
(M (x) = EI
). Il faut noter que le terme de rotation modérée, introduit dans la dédx2
formation virtuelle, prend en compte la non-linéarité du phénomène. La rotation virtuelle
′
v ∗ est en effet en produit avec un terme représentant le moment induit par le décalage
de l’effort normal par rapport à la ligne moyenne de la poutre (N v ′ ) :
Z l
′
′′
′ ′
N (x) u ∗ + v v ∗ + Mz (x)v ∗ dx + F u∗ (l) = 0, ∀(u∗ , v ∗ )C.A.
0
après intégration par parties, on exprime tous les termes en fonction des déplacements
virtuels :
Z
l
(−N ′ (x)u∗ (x) + {−(N (x)v ′ (x))′ + M ′′ (x)} v ∗ (x)) dx+
0
′
N u∗ + N v ′ v ∗ + M v ∗ − M ′ v ∗
l
0
+ F u∗ (l) = 0, ∀(u∗ , v ∗ )C.A.
En choisissant judicieusement les champs virtuels, on arrive aux équations d’équilibre
intérieur suivantes, les équations aux bords étant fonction des conditions aux limites.
Dans le cas traité ici, on a N (l) = −F :
Équilibre intérieur
N ′ (x) = 0
(N (x)v ′ (x))′ − M ′′ (x) = 0
4.1.2
C.L cinématiques
+ statiques
u = 0 ou N = 0(= N d )
x = (0, l) v = 0 ou M ′ − N v ′ = 0
v ′ = 0 ou M = 0(= M d )
Application à une poutre droite
Poutre droite sur appuis simples
Nous étudions le cas de la poutre sur appuis simples présentée sur la Figure 4.4.
1/ Montrer que le système à résoudre s’écrit (equation 4.3) :
EI
d4 v(x)
d2 v(x)
+
F
=0
dx4
dx2
(4.3)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
86
Figure 4.4: Poutre sur appuis simples en compression
2/ Donner les conditions aux limites correspondant au problème de la Figure 4.4.
F
3/ Montrer que le champ de déplacement solution s’écrit, en posant k 2 =
EI
v(x) = A + Bx + C cos kx + D sin kx
4/ Montrer que ce problème possède 2 solutions : une solution droite et une solution
fléchie.
5/ Montrer que la pulsation de rang n solution est :
k=
nπ
,n ∈ Z
l
6/ Montrer que la charge critique et le déplacement solutions sont :
F = EI
nπ 2
l
v(x) = D sin
nπx
l
7/ Tracer les courbes charge-déplacement ainsi que la déformée correspondant aux
3 premiers modes.
Poutre droite encastrée-encastrée Nous étudions maintenant la même poutre, mais
cette fois-ci les conditions aux limites sont de type encastré à ses 2 extrémités (Figure
4.5). On recherchera les solutions symétriques par rapport à x = 2l .
1/ Donner les conditions aux limites permettant de résoudre ce problème.
Finalement, on constate que la charge critique de flambage dépend à la fois du
matériau constitutif, mais aussi de la géométrie de la poutre. En effet, c’est le rapport
entre la rigidité de tension et la rigidité de flexion qui représente la capacité de la poutre à
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
87
Figure 4.5: Poutre droite encastrés-encastrée en compression
supporter la compression
directe sans fléchir, ce qu’on caractérise par le rayon de giration
q
de la section : r = SI . On peut exprimer la solution pour le cas de la poutre homogène
traité ci-dessus, en fonction des conditions cinématiques imposées aux limites de la poutre
(Eq. 4.4). En effet, on peut constater expérimentalement que la charge évolue en fonction
de ces conditions, comme illustré sur la figure 4.6.
Figure 4.6: Illustration de la charge de flambe pour une même poutre possédant différentes
conditions aux limites.
Ainsi, la charge de flambage est connue en fonction du paramètre α qui prend en compte
les conditions aux limites (Tableau 4.1). Ce qu’on retrouve dans les expériences présentées
sur la figure ci-dessus (Figure 4.6).
Fc (α) = απ 2
EI
L2
(4.4)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
Cond. Lim.
λ
Rotulé-Rotulé
88
Coefficient α
1
λ
Encastré-Rotulé
2.05
λ
Encastré-Encastré
4
λ
Encastré-Libre
1/4
Table 4.1: Valeurs du coefficient α (Eq. 4.4) en fonction des conditions aux limites
appliquées à la poutre homogène.
Remarque 1 Dans certains ouvrages, la notion de longueur équivalente est introduite.
Il s’agit de remplacer la longueur de la poutre par une longueur telle que les conditions
aux limites sont intégrées, sans avoir à modifier les relations donnant la force critique.
Ceci revient simplement à intégrer le coefficient α utilisé ci-dessus, soit Le = √Lα .
Remarque 2 Le flambement dans l’espace implique que la plus petite des rigidités de
la poutre devra être considérée, i.e. le flambage se produira dans le plan contenant cette
plus petite rigidité.
Remarque 3 La présence d’un défaut géométrique va abaisser la charge critique, comme
illustré schématiquement sur la Figure 4.2-b. Le défaut le plus délétère sera celui dont
la forme correspondra au premier mode ; ceci est valable quelle que soit la structure
considérée. Dans le cas des poutres, un défaut d’amplitude v0 sur le premier mode conduit
à l’expression de la relation charge-déplacement suivante, qui correspond à l’augmentation
de ce défaut en fonction du chargement :
F (v) = Fc 1 −
4.1.3
1
v
1+
v0
(4.5)
Extension aux calculs numériques
Lien avec les calculs aux valeurs propres
Les problèmes de flambage, ainsi que les problèmes de calculs vibratoires sont trés
souvent résolus, en première approche grâce à des calculs aux valeurs propres. On rappelle
que ces calculs sont de la forme : [A] − λ[B] = [0].
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
89
Notre problème de flambage dans les poutres droites s’écrit :
Z l
′
′′
′ ′
N (x) u ∗ + v v ∗ + M (x)v ∗ dx + F u∗ (l) = 0, ∀(u∗ , v ∗ )C.A.
0
ce qui peut encore se simplifier en utilisant les relations N ′ (x) = 0 et N (l) = −F = N (x).
On peut alors réécrire le problème à résoudre sous la forme :
kel (v, v ∗ ) − F kσ (v, v ∗ ) = 0, ∀v∗ ∈ C.A.
Z l
′′
∗
EIv ′′ (x)v ∗ (x)dx
kel (v, v ) =
0
avec
Z
l
′
kσ (v, v ∗ ) =
v ′ (x)v ∗ (x)dx
0
dans ces expressions on reconnaît la rigidité élastique de flexion kel , et une nouvelle rigidité
qui exprime l’influence de la géométrie sur la rigidité de la structure kσ , appelée rigidité
géométrique.
Cette formulation est celle utilisée dans les codes de calculs par éléments finis,
aussi bien pour les milieux continus que pour les structures, ou encore la mécanique des
fluides. On utilise dans ces codes des calculs aux valeurs propres qui fournissent les charges
critiques d’apparition des instabilités, mais aussi les modes propres associés définis à une
constante multiplicative prés.
États de contraintes associés au flambage
Si on veut connaître l’état de contraintes dans une structure, les calculs de valeurs
propres ne suffisent pas puisque les modes propres associés sont définis à une constante
multiplicative près. Il est donc nécessaire de mener un calcul complet non-linéaire en
augmentant le chargement progressivement, jusqu’à atteindre le point de bifurcation qui
caractérise le passage d’une configuration stable à une configuration instable (voir Figure
4.2 page 81). D’un point de vue numérique, ce point de bifurcation correspond à l’annulation de l’un des pivots de la matrice de rigidité du système, qui alors n’est plus inversible.
Il faut donc, pour passer ou seulement détecter ce point, introduire un défaut géométrique
de sorte qu’on s’éloigne légèrement de la branche fondamentale de la réponse.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
4.2
4.2.1
90
Modes et fréquences propres de vibration en flexion
dans les poutres droites
Introduction
Dans les problèmes traités dans le cadre de la statique, on suppose que le chargement imposé (déplacement, efforts, température, ...) passe instantanément de sa valeur
initiale à sa valeur finale, faisant ainsi passer le milieu considéré d’une configuration initiale stable à une autre configuration contrainte mais stable. Les paramètres à calculer
(contraintes, déformations, déplacements, réactions, ...) sont relatifs à l’état final et par
conséquent ne dépendent pas du temps.
Dans le cadre de la dynamique au contraire les chargements imposés peuvent varier
dans le temps. De plus, même dans la configuration initiale le milieu peut être caractérisé par des fonctions du temps (conditions de position et de vitesse). Les paramètres
à calculer sont donc également des fonctions du temps, et de nouvelles grandeurs apparaissent pour caractériser le mouvement, c’est-à-dire la variation de configuration dans
le temps. Ce sont les paramètres cinématiques tels que les vitesses, les accélérations, les
fréquences, ... qui n’existent pas dans le cas de la statique. Ce domaine de la dynamique
des solides et des structures est un vaste champs de l’ingénierie. La démarche spécifique
appliquée ici aux poutres est détaillée dans le cadre des systèmes discrets et continus
dans le support de cours http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/
Dynamique-3A/Dynamique-SDrapier-janvier2012.pdf.
Nous nous intéresserons ici plus particulièrement aux vibrations libres des poutres
droites à plan moyens chargées dans ce plan (en abrégé poutres droites à plan moyen,
Figure 2.2), c’est à dire la réponse vibratoire caractérisée par les modes et pulsations
propres. Ces caractéristiques intrinsèques aux structures considérées dépendent à la fois
des caractéristiques mécaniques (rigidité = module d’Young E), géométriques (section S
−
et moment quadratique par rapport à →
z I) et de masse (masse volumique ρ).
4.2.2
Équations de la dynamique des poutres droites à plan
moyen
Nous avons vu dans le cadre de la statique que les équations des poutres quelconques peuvent se déduire, via le Principe des Puissances Virtuelles, de la formulation
générale de l’équilibre statique des milieux continus.
Dans le cadre de la dynamique, la démarche est similaire. Elle fait cette foisci intervenir les accélérations, c’est à dire les variations dans le temps des vitesses des
sections des poutres. Pour les poutres droites à plan moyen, le vecteur des déplacements
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
91
d’un point M d’une section de la poutre représentée sur la Figure 2.2 page 37 est dans le
cadre de la dynamique :
(
−
−
−
uM ( →
x , t) = u(→
x0 , t) − yφ(→
x0 , t)
→
−
−
u (→
x , t) =
→
−
→
−
vM ( x , t) = v(x0 , t)
Donc les accélérations correspondantes s’écrivent :
(
−
−
−
üM (→
x , t) = ü(→
x0 , t) − y φ̈(→
x0 , t)
→
−
→
−
γ ( x , t) =
→
−
→
−
v̈M ( x , t) = v̈(x0 , t)
∂ 2X
où la notation utilisée est définie par Ẍ =
. De façon similaire, on définit les dérivées
∂t2
∂X
.
partielles par rapport à x, X ′ =
∂x
Finalement, en intégrant sur la section de la poutre la puissance virtuelle développée par le terme d’origine inertielle des équations de la dynamique des milieux continus
(ρ est la masse volumique du milieu constitutif supposé homogène dans toute la section) :
Z l Z h
Z
i
→
− →
−
→
−
−
∗ →
ü − y φ̈ (u∗ − yφ∗ ) + (v̈v ∗ ) dl
ρ
ρ ü ( x , t) u ( x , t)dΩ =
Ω
Z0 l S
∗
∗
∗
ρS [üu + v̈v ] + ρI φ̈φ dl
=
0
on arrive aux équations d’équilibre dynamique des poutres (Tableau 4.2-b, page 92) :
4.2.3
Vibrations libres - application à la flexion simple
Calcul de vibrations libres
Le calcul des modes et fréquences propres d’une poutre est très utilisé dans l’analyse
vibratoire de ces éléments de structure. Il permet de déterminer la réponse intrinsèque à
la structure, c’est à dire qui ne dépend pas des sollicitations extérieures, et qui définit le
spectre des fréquences et déformées (modes) qu’il faudra éviter de solliciter si l’on veut
que la structure n’ait pas un comportement critique.
Notamment, la connaissance des fréquences propres permet de dimensionner les
sections de manière à éviter les phénomènes de résonance. Ce phénomène bien connu de
résonance survient lorsque la fréquence d’une ou plusieurs sollicitations extérieures est
en phase, ou très peu déphasé (proche), d’une des fréquences propres du système. On a
alors, en l’absence d’amortissement, l’amplitude de la déformée qui tend rapidement vers
l’infini, ce qui conduit généralement à la ruine de la structure. Pour exemple, on peut
citer le décret interdisant les marches militaires sur les ouvrages civils tels que les ponts,
ceci suite à l’effondrement d’un pont sous les pas cadencés d’un régiment.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
92
(a)
(b)
⇓
⇓
1/ Champ C.A. - C.I.
→
− − →
−
−
. →
u (→
x , t) = ud (→
x , t)−
x ∈ ∂Ωu , ∀t
(
→
−
−
−
u (→
x , tj ) = →
u (j)
−
.
∀ →
x
→
−
→
− →
u̇ (−
x , tj ) = u̇ (j)
2/Équilibre intérieur
−
∂σij (→
x , t)
−
−
+ fi (→
x , t) = ρüi (→
x , t)
∂xj
1/ Champ C.A. - C.I.
. u(xi , t) = udi (t), v(xi , t) = vid (t), φ(xi , t) = φdi (t) , ∀t
(
u(x, tj ) = u(j) , v(x, tj ) = v (j) , φ(x, tj ) = φ(j)
−
.
, ∀→
x
u̇(x, tj ) = u̇(j) , v̇(x, tj ) = v̇ (j) , φ̇(x, tj ) = φ̇(j)
2/ Équilibre intérieur
∂ 2 u(x, t)
∂N (x, t)
+ px (x, t) = ρS
∂x
∂t2
∂ 2 v(x, t)
∂T (x, t)
+ py (x, t) = ρS
∂x
∂t2
∂ 2 φ(x, t)
∂M (x, t)
+ T (x, t) + cz (x, t) = ρI
∂x
∂t2
3/Équilibre au bord
−
−
−
σij (→
x , t)nj (→
x ) = Fid (→
x , t)
→
−
∀ x ∈ ∂ΩF
3/ Équilibre au bord
N (xi , t) = N i (t), T (xi , t) = T i (t), M (xi , t) = M i (t)
4/Loi de comportement
σij (x, t) = Lijkl ǫkl (x, t)
4/ Loi de comportement
∂u(x, t)
N (x, t) = ES
∂x
T (x, t) = kGSγ(x, t) γ(x, t) =
M (x, t) = EI
∂v(x,t)
∂x
− φ(x, t)
∂φ(x, t)
∂x
Table 4.2: Correspondances des équilibres dynamiques d’un milieu continu et d’une poutre
droite à plan moyen.
Lorsque le spectre des fréquences propres est connu on peut, en modifiant la géométrie ou la masse volumique des sections, décaler le spectre ou bien modifier son étendue.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
93
Dans le cadre de la vibro-accoustique par exemple, la note émise par un diapason dépend
de la géométrie (longueur, section) des branches aussi bien que du matériau employé.
Le calcul de modes propres est quant à lui notamment utilisé dans le domaine de
l’analyse modale qui consiste à exprimer le déplacement quelconque d’un structure dans
la base (infinie dans le cas des milieux continus) formée par ses vecteurs propres. C’est
une technique couramment employée au niveau analytique aussi bien que dans les codes
de calculs par éléments finis par exemple, qui permet de réduire considérablement la taille
du système à résoudre. La connaissance de cette base modale permet également d’étudier
la stabilité d’une structure soumise à une excitation proportionnelle à un ou plusieurs
modes propres.
Vibrations libres d’une poutre en flexion simple
Nous étudions plus spécifiquement les vibrations libres d’une poutre en flexion
simple. Les déformations de cisaillement seront négligées. On montre par ailleurs que le
−
terme inertiel relatif à →
z (ρI φ̈(x, t)) peut être négligé devant les effets engendrés par
l’accélération due au déplacement transverse (ρSv̈(x, t)).
Dans le cadre de la flexion, seules les équations d’équilibre relativement aux
−
−
vecteurs →
y et →
z de la base de référence sont utilisées. Les vibrations libres de la poutre
sont analysées lorsque l’ensemble des efforts est nul. Pour la suite de cette approche, le
cisaillement sera négligé dans les poutres.
1/ Montrer que le système à résoudre s’écrit (équation 4.6) :
∂ 2 v(x, t)
EI ∂ 4 v(x, t)
=
−
∂t2
ρS ∂x4
(4.6)
2/ On recherche la solution de ce problème spatio-temporel sous la forme découplée
suivante v(x, t) = ψ(x)β(t). En désignant par ω la pulsation propre du système, montrer
que ce problème (Eq. 4.6) se met sous la forme d’une équation différentielle à variables
ρS
séparables (Eq. 4.7) où α4 = ω 2
est une constante positive :
EIz
d4 ψ(x)
= α4 ψ(x)
4
dx
{z
}
|
(I)
d2 β(t)
+ ω 2 β(t) = 0
2
dt
{z
}
|
(II)
3/ Montrer que la solution générale est de la forme :
v(x, t) = (B1 sin αx + B2 cos αx + B3 sinh αx + B4 cosh αx) A cos (ωt − ϕ)
(4.7)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
94
Figure 4.7: Poutre droite sur appui simple.
Poutre sur appuis simples
La poutre considérée repose sur 2 appuis simples, comme indiqué sur la Figure 4.9.
1/ Donner les conditions aux limites, en déduire les équations en espace qui permettront de résoudre le problème.
2/ Montrer que la nieme pulsation propre du système est :
s
2 2
nπ
EIz
ωn = 2
l
ρS
(4.8)
3/ D’après la formulation qui conduit à l’équation (4.6), on obtient désormais un
système qui caractérise l’équilibre pour toute pulsation de rang n. Écrire la solution de ce
système :
vn (x, t) = ψn (x)βn (t)
4/ La solution exacte de ce problème étant la somme des solutions particulières de
rang n, montrer qu’elle s’écrit sous la forme :
v(x, t) =
∞
X
n=1
Bn sin
nπx
cos (ωn t − ϕn )
l
où les Bn sont des constantes, les modes étant définis à une constante multiplicative prés.
Les déphasage ϕn sont déterminés grâce aux conditions initiales (à t = 0).
5/ Tracer les premiers modes propres en fonction de x en prenant B1 = 1.
La solution générale des vibrations libres étant connue, un calcul d’analyse modale
permettra, par exemple, de connaître facilement la réponse de la structure à une sollicitation générale. Par exemple, si la poutre étudiée est sollicitée en son milieu par une
impulsion, les modes propres pairs ne seront pas "actifs", car le déplacement résultant ne
pourra être qu’impair : pas de point d’inflexion au centre, sous la charge.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
4.2.4
95
Vibrations libres - calculs numériques
La détermination des calculs de modes et fréquences propres de vibration fait
également appel à ces calculs aux valeurs propres. En effet, la formulation du problème
dynamique à résoudre en flexion (avec ρ la masse volumique du matériau constitutif) est :
∂ 2 v(x, t) EI ∂ 4 v(x, t)
−
=0
∂t2
ρS ∂x4
En prenant une solution de la forme v(x, t) = V (x)eiωt , on peut reformuler le problème à
résoudre :
Z l
∗
2
kel (V, V ) − ω
ρSV (x)V ∗ (x)dx = 0
0
2
où ω est l’ensemble des fréquences propres recherché.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
4.3
96
Extension : réponse post-bifurquée d’une poutre
Nous venons de caractériser le point critique où des poutres simples en compression
passent de la solution fondamentale (équilibre comprimé a = 0) à une solution secondaire
(équilibre fléchi). La détermination des charges critiques est possible grâce à la résolution
du problème d’équilibre linéarisé, elles constituent en effet les valeurs propres de ce problème. Cependant, il parait indispensable de caractériser plus complètement le comportement de cette poutre ou d’une structure après le "dépassement" d’un point de bifurcation.
Le cadre linéaire est abandonné, il est alors nécessaire de travailler sur la formulation nonlinéaire de l’équilibre, seule capable de caractériser l’équilibre non-linéaire géométrique du
système. L’objectif principal de cette étude non-linéaire doit être de discuter la nature de
la branche bifurquée (symétrique ou non-symétrique) et surtout sa stabilité (comportement sur-critique (Figure7.5-(a)) ou comportement sous-critique (Figure 7.5-(b))).
λ!
(0,!λc)!
défaut
croissant
λ!
(0,!λc)!
branche
secondaire
branche
fondamentale
a!
a!
Figure 4.8: Comportements post-bifurqués sur-critique (a) et sous-critique (b).
La résolution complète du problème non-linéaire est néanmoins très délicate. C’est pourquoi, des résultats analytiques ne seront accessibles qu’en simplifiant le problème nonlinéaire près du point de bifurcation afin de connaître le comportement initial de la branche
bifurquée. Ce résultat local est très important puisque nous allons voir que l’équation proposée pour la branche bifurquée est aussi valable loin du point de bifurcation lorsqu’une
comparaison avec les éléments finis est effectuée. Deux approches sont présentées ici et
nous verrons que leur "philosophie" générale est très semblable ainsi que leur résultat
dans notre cadre simple, l’objectif de ces méthodes étant de présenter un développement
de la charge appliquée et de la déformée près du point de bifurcation. Le comportement
post-bifurqué de la poutre homogène sera traité à l’aide de la réduction de Lyapounov et
Schmidt présentée de manière très rigoureuse dans [Léger et al., 1998]. Pour la poutre sur
fondation élastique, une méthode classique de perturbation est présentée, à l’aide d’un
développement en séries de la charge et de la déformée.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
4.3.1
97
Poutre homogène
Résolution du problème linéarisé
Pour connaître le comportement post-flambé d’une poutre homogène, c’est-à-dire
caractérisée par une longueur L et une rigidité en flexion EI, la modélisation la plus
simple est celle de la poutre elastica proposée par Euler en 1745. L’hypothèse principale
de la poutre elastica est de supposer que l’allongement de la ligne moyenne est nul. La
variable cinématique caractérisant le comportement de la structure est alors tout simplement l’angle de rotation des sections de la poutre par rapport à la position initiale, noté
θ tel que schématisé sur la Figure 4.3.
L’énergie de déformation de la poutre se limite donc à la seule écriture de son
énergie de flexion. Dans le cas présenté, la longueur de la poutre ne variant pas, on peut
.
écrire directement ds = dx, ce qui conduit à une expression de la courbure simplifiée dθ
ds
L’énergie de flexion est donc donnée par l’équation (4.9).
1
Wf =
2
Z
L
EI
0
dθ
dx
2
(4.9)
dx
Le travail des efforts extérieurs est simplement donné par le produit du chargement
extérieur λ avec le raccourcissement ∆ dû à la flexion de la poutre (Eq. 4.10).
Wext = λ∆ = λ
Z
L
(4.10)
(1 − cos θ)dx
0
d’où l’écriture de l’énergie potentielle (Eq. 4.11).
E(λ, θ) = Wf − Wext
1
=
2
Z
L
EI
0
dθ
dx
2
!
− 2λ(1 − cos θ) dx
(4.11)
Le calcul de la variation de l’énergie potentielle conduit à l’équation (4.12) qui doit
être nulle à l’équilibre compte tenu de la stationnarité de E(λ, θ).
δE(λ, θ) =
Z
L
(EIθ′ δθ′ − λ sin θδθ) dx = 0
(4.12)
0
Une intégration par parties sur le premier terme de (4.12) conduit à l’écriture de
l’équation d’équilibre à l’intérieur de la poutre (Eq. 4.13).
EIθ′′ + λ sin θ = 0
(4.13)
L’équation (4.13) n’est pas linéaire et compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il suffit de linéariser cette équation pour obtenir la charge critique. Ce qui est
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
98
possible en écrivant qu’au premier ordre, sin θ = θ. L’équation linéarisée est alors la
suivante (Eq. 4.14).
EIθ′′ + λθ = 0
(4.14)
La résolution de (4.14) est classique et la charge critique est obtenue en posant
θ(x) = Θ cos(πx/L), ce qui conduit à l’expression suivante pour la charge critique (Eq.
4.15) :
λc =
π 2 EI
L2
(4.15)
Comportement post-bifurqué
Réduction de Lyapounov et Schmidt Le cadre général de la théorie du postflambage est un système élastique caractérisé par la fonctionnelle énergie potentielle
E(u, λ) et par l’ensemble des déplacements cinématiquement admissibles (C.A.). Comme
nous avons pu déjà le voir, les équations d’équilibre du problème sont obtenues à partir
de la stationnarité de l’énergie potentielle (Eq. 4.16).
δE(λ, u) = 0
∀ δu C.A.(0)
(4.16)
On peut donc définir un opérateur différentiel f (λ, u) de l’espace vectoriel C.A.(0),
défini par la relation (4.17). Il peut s’écrire sous la forme d’une somme d’un terme linéaire
(L(λ)u), quadratique (Q(u, u)) et d’ordre supérieur (Eq. 4.18). A l’équilibre cet opérateur
est nul car δE est linéaire par rapport à δu.
< f (λ, u), δu >= δE(λ, u)
(4.17)
f (λ, u) = L(λ)u + Q(u, u) + r(λ, u)
(4.18)
On peut noter que le terme linéaire provient directement de la seconde variation
de l’énergie potentielle (< L(λ)u, δu >= δE2 (λ, u)). Ainsi, tant que L(λ) est inversible, la
branche fondamentale (u = 0) sera solution, un point de bifurcation va apparaître lorsque
L(λ) ne sera plus inversible, ce qui revient à résoudre le problème classique linéarisé. Cette
résolution conduit à obtenir une charge critique λc et le but de l’analyse post-flambage
est d’étudier les solutions de l’équation f (λ, u) = 0 au voisinage de λc . La première étape
consiste à donner un développement de Taylor de l’énergie potentielle pour u et (λ − λc )
petits (Eq. 4.19).
E(λ, u) = E0 + E2 (λ, u) + E3 (λc , u) + θ((λ − λc )u3 + u4 )
(4.19)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
99
En identifiant avec les termes présentés dans l’équation (4.18), on peut écrire :
< L(λ)u, δu >= δE2 (λ, u; δu)
< Q(u, u), δu >= δE3 (λc , u; δu)
r(λ, u) = θ((λ − λ )u2 + u3 )
c
(4.20)
On note U l’élément qui génère le noyau de l’opérateur linéaire (dim=1), on a
donc L(λc )U = 0. L’idée de la méthode de Lyapounov et Schmidt est de décomposer
l’inconnue "u" du problème en une partie proportionnelle au noyau de L(λc ) et une partie
orthogonale à ce noyau (Eq. 4.21). En effet, on admet que l’équation L(λc )u = f admet
une solution si et seulement si "f " est orthogonal au mode de flambage U , c’est-à-dire que
la projection de v sur le noyau est nulle (Eq. 4.22). On utilise donc l’inversibilité partielle
de L(λc ) pour décomposer l’écriture de u près du point de bifurcation.
u = aU + v
Z
a ∈ R, v ∈ U ⊥
(4.21)
L
f (x)U (x)dx = 0
(4.22)
0
On peut de même définir un opérateur de projection sur U ⊥ (Eq. 4.23).
Z
L
u(x)U (x)dx
0
P (u) = u(x) − U (x) Z
(4.23)
L
2
U (x)dx
0
La première étape consiste à donner une expression approchée de v. L’idée est de
projeter l’équation f (λ, u) = 0 sur U ⊥ à l’aide du projecteur P afin d’utiliser l’inversibilité
de L(λc ) dans l’espace vectoriel U ⊥ (corollaire du théorème du rang). L’équation ainsi
projetée permet d’obtenir localement une solution unique pour v grâce au théorème des
fonctions implicites (Eq. 4.24).
v(a, λ) = a2 v2 + θ(a(λ − λc ) + a3 ) avec v2 = −L−1 (λc )P (Q(U, U ))
(4.24)
Le problème projeté sur U ⊥ peut en fait être interprété comme un problème de
minimisation partielle de l’énergie par rapport à v. La deuxième étape consiste à reporter
la solution trouvée pour v dans la forme de l’énergie potentielle qui sera alors appelée
énergie potentielle réduite et qui va dépendre de a et λ. Cette énergie sera notée F (λ, a).
La dernière équation du problème est obtenue en écrivant que l’énergie potentielle réduite
est stationnaire, ce qui conduit à la relation (4.25).
∂F
(λ, a) = 0
∂a
(4.25)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
100
Au voisinage d’un point critique, nous n’avons qu’une approximation de v mais qui
est suffisante, en général, pour discuter la nature de la bifurcation. L’étude du système est
ainsi ramenée à celle d’une seule équation scalaire que l’on appelle équation de bifurcation.
Celle-ci peut être présentée sous une forme un peu plus explicite pour la discussion de la
nature de la branche bifurquée.
En effet, si on part de la forme donnée par l’équation (4.26) pour l’énergie potentielle, on peut lui donner une expression approchée en faisant apparaître les déplacements
connus U et v2 .
E(λ, u) = E0 + E2 (λ, u) + E3 (λ, u) + E4 (λ, u)
(4.26)
La forme approchée de l’expression (4.26) est donnée par l’équation (4.27) avec E2′
la dérivée de E2 par rapport à λ.
F (λ, a) = (λ − λc )a2 E2′ (λc , U ) + a3 E3 (λc , U ) + a4 (E4 (λc , U ) − E2 (λc , v2 ))
(4.27)
D’où l’équation de la branche bifurquée qui peut se mettre localement sous la forme
(4.28) avec les coefficients Ci définis par les relations (4.29).
λ = λc + C1 a + C2 a2
C1 = −
(4.28)
3E3 (λc , U )
2E2′ (λc , U )
(4.29)
2(E4 (λc , U ) − E2 (λc , v2 ))
C2 = −
E2′ (λc , U )
La symétrie (C1 = 0 ou C1 6= 0) et la stabilité (signe de C2 ) de la branche peuvent
ainsi être discutées.
Application au cas de la poutre homogène Si on reprend l’exemple de la poutre
homogène traité dans le premier paragraphe de cette section, l’énergie potentielle pouvait
se mettre sous la forme suivante (Eq. 4.30) :
1
E(λ, θ) =
2
Z
L
EI
0
dθ
dx
2
!
− 2λ(1 − cos θ) dx
(4.30)
Par analogie avec la forme de l’énergie potentielle donnée dans l’équation (4.26),
une forme approchée de (4.30) est déterminée (Eq. 4.32) grâce au développement limité
de cos θ, pour θ petit (Eq. 4.31).
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
cos θ = 1 −
θ2 θ4
+
2
24
E(λ, θ) = E2 (λ, θ) + E4 (λ, θ)
101
(4.31)
(4.32)
avec
!
2
dθ
EI
+ λθ2 dx
dx
0
Z L
1
λθ4 dx
E4 (λ, θ) = −
24 0
1
E2 (λ, θ) =
2
Z
L
Comme cela a été présenté dans la résolution du problème linéarisé, l’expression du
mode de flambage est donnée par θ(x) = a cos(πx/L) et la charge critique est celle de la
relation (4.15). Ainsi, l’équation de la branche bifurquée présentée dans le cadre théorique
précédent peut être évaluée. Il faut tout d’abord déterminer une expression approchée
de v2 (Eq. 4.24) qui dans notre cas est très simple puisqu’en première approximation,
elle est nulle (Q(θ, θ) = 0). Les coefficients Ci peuvent ainsi être déterminés en prenant
U = cos(πx/L), v2 = 0 et λc = π 2 EI/L2 (Eqs. 4.33).
C1 = 0
car E3 (λ, u) = 0
Z
π 2 EI L
π 2 EI 3L
cos4 (πx/L)dx
2
2
π 2 EI
2E4 (λc , U )
12L 0
C2 = − ′
= 12L 8 =
=
Z L
1L
E2 (λc , U )
8L2
1
cos2 (πx/L)dx
22
2 0
(4.33)
L’équation de la branche bifurquée est donc la suivante (Eq. 4.34) :
λ = λc +
π 2 EI 2
a
8L2
(4.34)
Cette branche est symétrique et son comportement est stable (C2 > 0). Un résultat
identique est trouvé en raisonnant sur le déplacement transverse de la poutre au lieu de
considérer l’angle θ. La constante C2 est alors donnée par C2 = π 4 EI/(8L4 ). Le produit
π 2 /L2 supplémentaire dans cette expression provient de la première approximation de θ
qui est en fait la dérivée de la flèche.
Ce qui est plus remarquable, c’est que l’équation de la branche construite dans
un cadre restreint, c’est-à-dire près du point de bifurcation, est aussi valable pour des
déplacements a important. Ce point est mis en évidence grâce à une comparaison avec
des résultats éléments finis obtenus par une analyse non-linéaire sous ABAQU S T M . Nonseulement la validité locale de l’équation (4.34) est indéniable prés du point de bifurcation,
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
102
Figure 4.9: Comportement post-bifurqué pour une poutre homogène : comparaison branche
théorique et calculs E.F. non-linéaires.
mais elle est aussi soulignée pour des valeurs élevées de a (Fig. 4.9). Outre la courbe
théorique, la courbe E.F. présentée correspond à un calcul sur une poutre dont la valeur
du défaut sur le premier mode de flambage est 0.001 mm.
Un autre point important est de signaler que dans ce cas simple, la partie orthogonale au mode est nulle, l’étude aurait pu donc se faire en considérant seulement que la
déformée après flambage correspondait à un accroissement du premier mode de flambage
(θ(x) = Θ cos(πx/L)). Des résultats identiques auraient donc été trouvées en réinjectant
directement ce mode dans la forme de l’énergie potentielle et en minimisant par rapport
au paramètre a. Cette méthode est une méthode approchée, elle est parfois utilisée et
correspond en fait à une méthode dite de Ritz où la difficulté majeure consiste à postuler
dés le départ une représentation correcte du champ de déplacement. Dans notre exemple
simple, l’accroissement du mode constitue le terme prépondérant du champ de déplacement après le passage du point de bifurcation et donc la méthode de Ritz constitue une
très bonne approximation.
4.3.2
Poutre sur fondation élastique à deux paramètres
Le cas du flambage d’une poutre sur une fondation élastique est très répandu et
largement utilisé. En effet, ce cas générique permet de représenter de nombreux états
limites de l’ingénierie, par exemple le comportement de couches minces sur des substrats,
... Dans ces modèles, contrairement au cas de la poutre homogène vu ci-dessus, la solution
bifurquée résulte de l’équilibre entre la propension de la poutre à fléchir et la rigidité de
la fondation qui s’oppose (ou accompagne) ce mouvement. On trouvera donc une solution
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
103
du mode critique (lors du passage du point de bifurcation) de forme harmonique, mais
cette fois avec des harmoniques de rangs plus grandes que 1.
Comme nous avons pu le voir, la réduction de Lyapounov et Schmidt a été élaborée
dans un cadre très rigoureux et très formel. La difficulté principale réside dans la détermination de l’expression approchée de la partie orthogonale au mode (v). Pour le cas de
la poutre sur fondation élastique, une autre méthode est présentée mais la "philosophie
générale" reste sensiblement la même. Elle est appelée méthode régulière de perturbation
et consiste à écrire le champ de déplacement et la charge appliquée sous forme de séries
valides près du point de bifurcation (Eq. 4.35) où w(x) représente le déplacement trans−
verse de la poutre selon →
x3 conformément à la Figure 4.10, et a l’amplitude du premier
mode de flambage.
w(x) = aw1 (x) + a2 w2 (x) + a3 w3 (x)
(4.35)
2
λ = λc + aλ1 + a λ2
e3
1.e2
.e3
e1
Figure 4.10: Modèle de poutre sur fondation élastique, de rigidité normale k et de rigidité
en cisaillement k1 .
Contrairement à l’exemple précédent de la poutre homogène, nous allons travailler
directement sur l’équation d’équilibre de la poutre sur fondation, celle-ci étant obtenue
bien entendu par la stationnarité de l’énergie potentielle. L’équation non-linéaire (4.36)
traduit l’équilibre de la poutre en grandes déformations ou k représente la rigidité transverse de la fondation et k1 la rigidité en cisaillement transverse (le ’ correspond à la dérivée
par rapport à x). Cette équation a déjà été présentée par de nombreux auteurs ([Lee &
Waas, 1996], [Wu & Zhong, 1999]).
1
1
EI(w′′′′ + 4w′′′ w′′ w′ + w′′3 ) + λw′′ (1 − w′2 )− 2 + kw(1 − w′2 ) − k1 w′′ (1 − w′2 )− 2 = 0 (4.36)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
104
Résolution du problème linéarisé
La résolution du problème linéarisé va nous conduire à l’expression de la charge
critique de la poutre sur fondation, il suffit pour cela de conserver les termes linéaires
présents dans (4.36). L’équation d’équilibre linéarisée est alors la suivante (Eq. 4.37).
EIw′′′′ + λw′′ + kw − k1 w′′ = 0
(4.37)
Afin de résoudre cette équation différentielle du quatrième ordre, on pose les notations suivantes, α12 = (λ − k1 )/EI et α2 = k/EI. La solution de l’équation (4.37) est
donnée par (4.38).
(4.38)
w(x) = A cos(ω1 x) + B sin(ω1 x) + C cos(ω2 x) + D sin(ω2 x)
avec
p
α14 − 4α2
ω12 =
2
p
α12 − α14 − 4α2
2
ω2 =
2
α12 +
La prise en compte des conditions aux limites (w(0) = w(L) = w′′ (0) = w′′ (L) = 0)
conduit au système matriciel suivant :
1
0
1
0
cos ω1 L
sin ω1 L
cos ω2 L
sin ω2 L
2
2
−ω1
0
−ω2
0
2
2
2
2
−ω1 cos ω1 L −ω1 sin ω1 L −ω2 cos ω2 L −ω2 sin ω2 L
A
B
=
C
D
0
0
0
0
Pour ne pas avoir la solution triviale (A = B = C = D = 0), le déterminant de la
matrice 4 × 4 doit être nul, ce qui conduit à la condition (4.39).
sin(ω1 L) = 0
ou
sin(ω2 L) = 0
(4.39)
Ces deux conditions conduisent à la même relation (Eq. 4.40) avec n ∈ N qui
correspond en fait au nombre de demi-ondes le long de la poutre.
α12 = α2
L2
n2 π 2
+
n2 π 2
L2
(4.40)
En remplaçant α12 et α2 par leur expression respective, la charge critique est écrite
sous la forme (4.41) avec ω = nπ/L.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
105
k
+ k1
(4.41)
ω2
Cette charge critique sera minimale pour nc > 1, la valeur de nc est obtenue par
minimisation de (4.41) par rapport à n (Eq. 4.42).
λc = EIω 2 +
L
nc =
π
r
4
k
EI
(4.42)
Comportement post-bifurqué
On adopte donc la décomposition en séries (Eqs. 4.35) du champ de déplacement
transverse et de la charge appliquée, w(x) et λ sont alors remplacés par ces expressions
dans la forme non-linéaire de l’énergie potentielle (Eq. 4.36). On rappelle que a est un
petit paramètre qui matérialise l’amplitude du premier mode. Dans la forme approchée
de l’équation d’équilibre ainsi obtenue, seuls les termes en a, a2 et a3 sont conservés et
trois équations sont ainsi déduites en regroupant chacune des puissances de a (Eqs. 4.43).
EIw1′′′′ + λc w1′′ + kw1 − k1 w1′′ = 0
(4.43a)
EIw2′′′′ + λc w2′′ + kw2 − k1 w2′′ = −P1 w1′′
(4.43b)
3
EIw3′′′′ + λc w3′′ + kw3 − k1 w3′′ = −EI(4w1′′′ w1′′ w1′ + w1′′ ) − λ1 w2′′
(4.43c)
k1
λc
2
2
2
−λ2 w1′′ − w1′′ w1′ + kw1 w1′ + w1′′ w1′
2
2
Il reste maintenant à résoudre chacune de ces trois équations afin de déterminer
les différents termes de la série. Pour l’équation (4.43a), la résolution est simple car on
retrouve l’équation d’équilibre linéarisée, la solution w1 (x) associée est donc la suivante
(Eq. 4.44).
w1 (x) = sin(ωx)
(4.44)
Pour la deuxième équation (Eq. 4.43b), la solution w1 déjà trouvée peut être reportée dans le second membre. La seule solution possible pour w2 est de poser w2 (x) =
b sin(ωx), ce qui conduit à la condition de nullité de λ1 et donc à la solution triviale
w2 (x) = 0 pour w2 .
bEIω 4 − bλc ω 2 + bk + bk1 ω 2 = λ1 ω 2
=⇒
b (EIω 4 − λc ω 2 + k + k1 ω 2 ) = λ1 ω 2
{z
}
|
=0
=⇒
(
λ1 = 0
w2 (x) = 0
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
106
La résolution de la troisième équation (Eq. 4.43c) passe tout d’abord par l’évaluation du second membre (Eq. 4.45) qui est maintenant possible grâce aux résolutions des
deux premières équations.
k1
λc
−EI(4w1′′′ w1′′ w1′ + w1′′ 3 ) − λ1 w2′′ − λ2 w1′′ − w1′′ w1′ 2 + kw1 w1′ 2 + w1′′ w1′ 2
2
2
3
EI 6 3 2
2
2
6
= − ω + kω + λ2 ω sin(ωx) + (kω − 3EIω ) sin(3ωx)
8
8
8
(4.45)
Comme pour la résolution de (4.43b), on retrouve la nullité du coefficient multiplicatif de sin(ωx), ce qui permet de déterminer λ2 (Eq. 4.46).
λ2 =
EI 4 3
ω − k
8
8
(4.46)
L’équation à résoudre (Eq. 4.43c) peut donc être réécrite afin de déterminer le
dernier terme du développement de w(x) (Eq. 4.47).
3
EIw3′′′′ + λc w3′′ + kw3 − k1 w3′′ = (kω 2 − 3EIω 6 ) sin(3ωx)
8
(4.47)
D’où l’expression de w3 (x) obtenue facilement en posant w3 (x) = c sin(3ωx) et en
identifiant la constante c (Eq. 4.48).
3ω 2
w3 (x) =
64
k − 3EIω 4
9EIω 4 − k
sin(3ωx)
(4.48)
Ainsi, l’écriture complète du déplacement transverse et de la charge appliquée près
du point de bifurcation est la suivante (Eq. 4.49) :
2
k − 3EIω 4
3 3ω
w(x) = a sin(ωx) + a 64 9EIω 4 − k sin(3ωx)
EI 4 3
2
ω − k
λ = λc + a
8
8
(4.49)
On retrouve ainsi l’équation de la branche bifurquée qui comme pour la poutre
homogène est symétrique, la stabilité de celle-ci sera fonction du signe de λ2 . Pour déterminer le signe de λ2 , il est nécessaire de trouver son expression lorsque λc est minimum
et donc correspond à la charge critique de la poutre. La minimisation de λc par rapport à
n, déjà établie pour déterminer nc (4.42) conduit à la condition (4.50), ce qui permet de
déterminer λ2 (Eq. 4.51).
ω4 =
k
EI
(4.50)
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
107
k
k 3k
−
=−
8
8
4
(4.51)
λ2 =
Ainsi, lorsque la charge critique est minimale, le comportement post-bifurqué est
instable. Le second terme de λ2 , lié à la rigidité de la fondation, est prépondérant devant
le terme de flexion de la poutre. Il est de plus intéressant de noter que ce terme de flexion
correspond exactement au terme déjà trouvé dans le cadre de la poutre homogène avec
n = 1. Les deux méthodes conduisent donc aux deux mêmes résultats concernant la
détermination du comportement post-flambage près du point de bifurcation.
Une autre remarque concerne le terme d’ordre 3 du champ de déplacement transverse qui est complètement négligeable devant a. En effet, des estimations numériques
montrent que même pour une valeur de a assez importante devant la longueur L de la
poutre (a/L = 0.04), l’amplitude de ce terme n’atteint pas 1% de la valeur de a. De
plus, on remarque que λ2 est indépendant de k1 , ce qui montre que le cisaillement ne joue
aucun rôle dans le comportement post-bifurqué de la poutre, cependant celui-ci joue un
rôle relativement important pour la valeur de la charge critique λc .
Figure 4.11: Comportement post-bifurqué pour une poutre sur fondation à un paramètre :
comparaison branche théorique et calculs E.F. non-linéaires (EI = 1.12 107 mm4 , L =
400 mm, k = 100 N.mm−2 ).
Comme pour la poutre homogène, un très bon accord avec un calcul non-linéaire
E.F. est mis en évidence (Fig. 4.11). Pour ce calcul, la fondation a été modélisée grâce à
l’option ∗F OU N DAT ION qui permet d’appliquer des charges linéiques proportionnelles
à une constante le long d’une poutre. Cette constante est directement associée au paramètre k déjà introduit. Les calculs présentés dans la figure (4.11) sont ceux d’une poutre
sur fondation à un paramètre mais nous avons vu que le terme de cisaillement n’intervenait
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
108
pas dans le comportement post-bifurqué. Outre la courbe théorique, les autres courbes
proviennent de calculs effectués à partir d’un défaut initial sur le mode pour trois valeurs
différentes (a0 = 0.001mm; 0.005mm; 0.01mm).
Références bibliographique
Lee & Waas, 1996 Lee, S. and Waas, A. (1996). Initial post-buckling behavior of a
finite beam on an elastic foundation. Int. J. Non-Linear Mechanics, 31(3) :313–
328.
Léger et al., 1998 Léger, A., Combescure, A., and Potier-Ferry, M. (1998). Bifurcation, flambage, stabilité en mécanique des structures. Technical report, IPSI.
Wu & Zhong, 1999 Wu, B. and Zhong, H. (1999). Postbuckling and imperfection
sensitivity of fixed-end and free-end struts on elastic foundation. Archive of
Applied Mechanics, 69 :491–498.
Extension aux problèmes non-linéaires et dynamiques
109
5.
Plaques
Sommaire
5.1
5.2
5.3
Plaques et coques - généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
5.1.1
Définition d’une plaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
112
5.1.2
Cas des coques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
112
Plaques planes de Love-Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
5.2.1
Cinématique en flexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
114
5.2.2
Champ de déplacement complet . . . . . . . . . . . . . . . . . .
116
5.2.3
Déformations et contraintes généralisées . . . . . . . . . . . . .
117
5.2.4
Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
122
5.2.5
Introduction des efforts tranchants . . . . . . . . . . . . . . . .
125
5.2.6
Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion . . . . . . . .
131
Plaques de Hencky-Mindlin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134
5.3.1
Cinématique et déformations . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
134
5.3.2
Équations d’équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
135
5.3.3
Lois de comportement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
137
110
Plaques
111
Nous avons vu que les poutres, solides monodimensionnels, dérivaient de simplifications géométrique et cinématique d’un milieu 3D. Le principe de base est que, comptetenu des faibles dimensions des sections par rapport à la dimension principale de la ligne
moyenne, le déplacement de tout point de la poutre peut être exprimé simplement en fonction des déplacements et rotations des sections mesurés en leur centre de gravité. Dans le
cas des plaques et coques, cette fois seule une des dimensions est faible devant les autres.
L’idée reste la même que dans les poutres, à savoir que le déplacement, dans l’espace,
de tout point de la plaque peut s’exprimer en fonction des déplacements et rotations des
sections (brins) qui se comportent comme des solides (barres) indéformables. Mais cette
fois, les sections (voisines) sont reliées entre elles par un feuillet moyen (Figure 5.1), donc
dans le plan, et non plus le long d’une ligne moyenne.
La différence entre plaque et coque peut être comparée à la distinction qui est faite
entre poutres droites et poutres courbes. Si bien que les problèmes de coques deviennent
assez vite complexes à traiter du fait de l’expression des grandeurs physiques, et donc
des équilibres statiques, par rapport à la courbure locale. Les modèles de plaque et de
coques font encore actuellement l’objet de nombreux développements scientifiques, essentiellement pour représenter le plus finement possible les effets ’3D’ avec le moins d’efforts
de calculs. Dans notre cas, les théories ’classiques’ sont développées et assimilées dans le
cas des plaques.
À travers ce chapitre, on recourra systématiquement au Principe des Puissances
Virtuelles pour établir les équations d’équilibre intérieur et aux bords. Pour cela, on partira
de la cinématique posée qui nous permettra d’exprimer les déformations par dérivation.
Ensuite, les contraintes seront déduites, via la loi de comportement qui prendra une
forme particulière. Finalement, le PPV pourra être explicité complètement, et le choix
particulier du champ de déplacement virtuel conduira aux équations d’équilibres. L’intérêt
de l’utilisation du PPV dans le cas des plaques et coques devient vite évident comptetenu de la complexité des équilibres, notamment sur les bords qui peuvent être aussi bien
rectilignes que courbes. Dans ce dernier cas, l’intuition seule du mécanicien peut être
rapidement mise en défaut.
5.1
Plaques et coques - généralités
Il existe différentes configurations de plaques. Dans la littérature, les plaques sont
très souvent classées selon leur géométrie (plaque plane, circulaire), la sollicitation subie
(charges ponctuelles, réparties), mais également selon leur comportement type (membrane, flexion) et la prise en compte ou non du cisaillement transverse. Pour ce dernier
aspect, on distingue les plaques sans cisaillement (souvent minces et homogènes dans leur
épaisseur), dites plaques de Love-Kirchhoff, et les plaques prenant en compte le cisaillement (souvent épaisses et/ou hétérogènes dans leur épaisseur), dites plaques de HenckyMindlin. On peut rapprocher ces théories des cinématiques de poutres, respectivement
Plaques
112
Bernoulli et Timoshenko.
5.1.1
Définition d’une plaque
On appelle plaque un corps solide dont une des dimensions (appelée épaisseur) est
petite devant les autres. Typiquement, le rapport de la taille caractéristique de la plaque
sur l’épaisseur est : Rh > 5. La surface moyenne de la plaque, appelée également feuillet
moyen, est plane. On note ω le domaine de l’espace
plaque
occupé
par le plan moyen de la
!
x
1
x1
h
(Figure 5.1). Le corps occupe le domaine Ω = x2 /
∈ ω, |x3 | ≤ 2 .
x2
x
3
Figure 5.1: Définition d’une plaque et système d’efforts associé.
Comme dans le cas des poutres, les grandeurs vont maintenant être définies non
plus en 3D, mais dans le plan et selon l’épaisseur de la plaque. Nous allons donc distinguer
les grandeurs (déplacements, déformations, efforts, contraintes, ...) relatives au plan de la
plaque et dans la direction transverse. Posons, par convention, que les indices grecques
(α, β, δ, γ, . . .) prennent les valeurs de 1 à 2, les indices romains (i, j, k, l, m, . . .) étant
réservés aux sommations de 1 à 3. Dans ce cas, les efforts par exemple (volumiques et
surfaciques) seront décomposés de la façon suivante (voir Figure 5.1) :
→
− −
−
−
−
−
x ) = fα (→
x )→
x α + f3 (→
x )→
x3
f (→
α = 1, 2
−d →
→
−
−
→
−
−
→
−
d →
d →
F ( x ) = F α ( x ) x α + F 3 ( x ) x3
5.1.2
Cas des coques
Dans le cas général des coques, le plan moyen est courbe (Figure 5.2). Il en résulte
que toutes les grandeurs s’expriment par rapport aux courbures locales. On distingue
Plaques
113
alors divers cas selon que la coque est simplement courbée, à courbure double, ou encore
cylindrique.
Figure 5.2: Définition d’une coque et repère local.
5.2
Plaques planes de Love-Kirchhoff
Dans le cas des plaques de Love-Kirchhoff, le cisaillement transverse est négligé,
principalement du fait l’épaisseur supposée très petite devant la taille caractéristique du
plan de la plaque. Cette théorie s’applique donc en premier lieu aux plaques minces,
c’est-à-dire dont le rapport de la taille caractéristique sur l’épaisseur Rh ≥ 10.
Pour cette étude des plaques, nous nous plaçons dans le cadre de la RdM et faisons
les hypothèses classiques des petites déformations et des petits déplacements (HPP). Dans
ce cadre, la configuration géométrique finale sera confondue avec la configuration initiale
(pas de forces suiveuses par exemple). Le matériau constitutif de la plaque est homogène
élastique linéaire isotrope.
Hypothèses de Love-Kirchhoff et flexion pure
Le cadre des plaques de Love-Kirchhoff repose sur les hypothèses suivantes :
Hyp. L-K1 Dans le cadre de l’hypothèse de Love-Kirchhoff, la cinématique d’un brin
de matière normal au plan moyen s’apparente au mouvement d’un corps solide (pas de
déformation transverse possible). Ceci équivaut à l’hypothèse de Navier dans les poutres.
Hyp. L-K2 La seconde hypothèse de Love-Kirchhoff est que ce ’brin’ isolé par l’esprit
reste perpendiculaire au plan moyen tout au long de la déformation. Ceci équivaut à
Plaques
114
l’hypothèse de Bernoulli pour les poutres, conduisant à négliger les déformations de cisaillement.
À partir de la première de ces hypothèses, on déduit que le déplacement perpendiculaire à la plaque est indépendant de la variable x3 de l’épaisseur. Il est égal au
déplacement du centre de gravité du brin :
u3 (x1 , x2 , x3 ) = u3 (x1 , x2 , 0) = w(x1 , x2 )
5.2.1
(5.1)
Cinématique en flexion
Afin de simplifier la mise en place de la théorie des plaques de Love-Kirchhoff,
dans un premier temps nous considérerons uniquement le cas de la flexion simple. Dans
ce cadre, on suppose que les efforts imposés sont uniquement des efforts transverses, c’est−
−
à-dire qu’aucune sollicitation statique volumique (fα (→
x ) = 0) ou ponctuelle (Fαd (→
x) =
0), et aucun déplacement de membrane qui pourrait donner lieu à des déplacements de
membrane, n’est imposé dans le plan moyen. Les seuls chargements sont, pour le moment,
−
−
f3 (→
x ) 6= 0, F3d (→
x ) 6= 0 et des moments appliqués sur le bord de la plaque.
Nous avons établi la forme du déplacement transverse en tout point de la plaque
(Eq. 5.1), on peut alors définir le champ de déplacement 2D caractérisant le déplacement
de tout point de la plaque. Toujours dans le cas de la flexion pure, pour définir ce champ
de déplacement, on peut raisonner de deux façons différentes.
Intégration des déformations
On suppose que les efforts imposés restent faibles. On en déduit directement que les
conditions de bord libre sont vérifiées pour la surface :
−
−
−
→∈ω
σ(xα , x3 = ± h2 ) · →
n = 0 avec →
n =→
x3 , ∀−
x
α
(5.2)
֒→ σ13 = σ23 = σ33 = 0 ⇔ σi3 = 0
D’après la minceur supposée de la plaque, on peut penser que ces contraintes vont être
nulles également à l’intérieur de la plaque. Pour un matériau constitutif élastique linéaire,
ceci correspond à des déformations εα3 ≈ 0 (σα3 = 2µεα3 ) :
∂uα
∂w
+
∂x3 ∂xα
↓ on intègre en x3
2εα3 ≈ 0 =
∂w
+ O(x23 )
∂xα
Comme pour l’instant seule la flexion est considérée, le déplacement de membrane du
feuillet moyen uα (x1 , x2 , 0) est pris nul. Finalement, le champ de déplacement de flexion
֒→ uα (x1 , x2 , x3 ) = uα (x1 , x2 , 0) − x3
Plaques
115
en HPP s’écrit simplement : uα (x1 , x2 , x3 ) = −x3
∂w(x1 , x2 )
.
∂xα
Construction géométrique
On peut également observer le déplacement des brins matériels entre l’état initial et
l’état final, comme représenté sur la Figure 5.3. Dans le cas de la flexion pure, les points
Figure 5.3: Rotation des brins due à la flexion seule.
de la ligne moyenne ne subissent pas de déplacement dans le plan, mais seulement des
déplacements transverses tels que précisés dans l’Eq. 5.1. Considérons les rotations des
−
−
−
−
sections dues à la flexion dans les deux plans (O, →
x1 , →
x3 ) et (O, →
x2 , →
x3 ), telles que présentées
respectivement sur les Figures 5.4-a et 5.4-b.
−
−
Considérons la rotation des sections dans le plan (O, →
x1 , →
x3 ), représentée sur la Figure 5.4−
a. Le déplacement d’un point M a donc deux composantes dans ce plan : →
u (x1 , x2 , x3 ) =
−−−→′
−−−→′
→
−
w(x1 , x2 )x3 + M M . Cette distance M M se calcule à partir de l’angle φ2 et de l’altitude
du point M , ce qui dans notre cas conduit à :
!
−−−→′
x3 sin φ2
MM =
x3 (1 − cos φ2 )
−
→−
→
(O,x1 ,x3 )
Compte-tenu de l’hypothèse des petites rotations, cette expression se simplifie : sin α ≈ α
−−−→
−
et cos α ≈ 1. Ce qui conduit à M M ′ = x3 φ2 →
x1 .
L’angle de rotation φ2 est, grâce à l’hypothèse L-K2, par construction géométrique
−
directement égal à la variation du déplacement transverse le long de →
x1 . On notera que
pour avoir une rotation positive, il est nécessaire d’imposer un déplacement transverse
négatif, comme illustré sur la Figure 5.4-a. Au final, le déplacement résultant s’écrit alors
Plaques
116
(a)
(b)
Figure 5.4: Rotation des sections dans (a) le plan (O, x1 , x3 ) et (b) dans le plan (O, x2 , x3 )
pour une plaque en flexion pure.
simplement en fonction de l’altitude et du gradient de déplacement transverse :
φ2 (xα ) = −
∂w(x1 , x2 )
∂x1
∂w(xα )
−
u1 ( →
x ) = −x3
∂x1
(5.3)
−
−
En considérant les mêmes hypothèses dans le plan (O, →
x2 , →
x3 ), on aboutit au champ
de déplacement complet pour les plaques minces en flexion pure (Eq. 5.4). On notera que,
conformément à la Figure 5.4-b, la rotation φ1 est positive pour un déplacement transverse
positif :
∂w(x1 , x2 )
−
uα ( →
x ) = −x3
→
−
→
−
∂xα
u(x)=
w(→
−
x ) = w(x , x )
1
(5.4)
2
Dans la suite, on pourra noter, pour des raisons de concision, les dérivées partielles avec
∂f
= f,i .
des indices : ∂x
i
5.2.2
Champ de déplacement complet
Les déplacements étant établis pour la flexion seule, nous pouvons aisément étendre
ce champ de déplacement de façon à représenter tous les déplacements dans l’espace de
tout point de la plaque. Comme dans le cas des poutres droites à plan moyen (Eq. 2.1),
le torseur de déplacement de tout point de la plaque s’écrit simplement à partir des
déplacements de membrane et des rotations du centre de gravité du brin considéré. Mais
ici, les rotations et les déplacements de membrane se décomposent selon les deux directions
→
−
−
−
−
−
−
du plan de la plaque : φ (xα ) = φ1 (xα )→
x1 + φ2 (xα )→
x2 et →
u (xα ) = u1 (xα )→
x1 + u2 (xα )→
x2 .
Plaques
117
Le déplacement peut se mettre sous la forme d’un torseur des déplacements :
w,2 (xα )
→
−
φ
(x
)
=
−w
(x
)
α
,1
α
0
→
−
−
−
→
−
→
→
−
uM (xα ) = u (xα ) + M G ∧ φ (xα )
{UM (xα )} =
u1 (xα )
0
w,2 (xα )
=
∧ −w,1 (xα )
u2 (xα ) + 0
w(x
)
−x
0
α
3
u
(x
)
−
x
w
(x
)
α
α
3
,α
α
=
w(xα )
(5.5)
(M )
5.2.3
Déformations et contraintes généralisées
Connaissant le champ de déplacement, le tenseur des déformations se déduit simplement dans le cas des plaques. La loi de comportement permet ensuite d’en déduire les
contraintes, puis les contraintes généralisées.
Déformations
es déformations s’écrivent donc simplement, en petites déformations, comme la
partie symétrique du gradient des déplacements. En petites déformations et dans notre
cadre 2D , dans un repère cartésien le tenseur gradient des déplacements est :
∂ 2 w(xα ) ∂u1 (xα )
∂ 2 w(xα )
∂u1 (xα )
− x3
− x3
0
∂x
∂x21
∂x2
∂x1 ∂x2
1
2
2
→
−
∂u2 (xα )
∂ w(xα ) ∂u2 (xα )
∂ w(xα )
(5.6)
∇( u ) =
− x3
0
2
∂x1 − x3 ∂x2 ∂x1
∂x
∂x
2
2
0
0
0
Compte-tenu de la forme de ce tenseur, on l’écrit généralement directement sous une
forme 2D simplifiée. On peut, de plus, faire apparaître les tenseurs de déformations de
membrane, noté e(xα ), et de courbure, noté κ(xα ), mais en 2D :
∂u1 (xα )
∂x1
ε2D (xα ) =
sym
|
=
1
2
∂u1 (xα ) ∂u2 (xα )
+
∂x2
∂x1
∂u2 (xα )
∂x2
{z
e(xα )
∂ 2 w(xα )
∂ 2 w(xα )
−
− ∂x2
∂x1 ∂x2
1
+ x3
2
∂ w(xα )
sym
−
∂x22
}
|
{z
}
+
x3 κ(xα )
(5.7)
Plaques
118
ou encore sous forme indicielle, ces déformations s’écrivent :
2
∂ w(xα )
1 ∂uα ∂uβ
2D
+ x3 −
+
εαβ (xα ) =
2 ∂xβ ∂xα
∂xα ∂xβ
|
|
{z
}
{z
}
=
eαβ (xα )
+
x3 καβ (xα )
Contraintes généralisées
Connaissant les déformations généralisées, il est très simple d’expliciter les
contraintes via la loi de comportement du matériau constitutif, puis les contraintes généralisées. Ces contraintes généralisées résultent, par définition, de l’intégrale sur l’épaisseur
de la plaque du torseur résultant du transport du vecteur contrainte (relativement à la
normale courante) au centre de gravité du brin considéré. On définit, comme dans le cas
des poutres 3D, les contraintes généralisées de membrane (Eq. 5.8a) et de courbure (Eq.
5.8b), qui ont respectivement la dimension de force par unité de longueur et de moment
par unité de longueur :
Z
2D
Nαβ (xα ) =
σαβ
(xα )dx3
(5.8a)
x3
Mαβ (xα ) =
Z
x3
2D
x3 σαβ
(xα )dx3
(5.8b)
On peut représenter ces contraintes généralisées sur une plaque, comme sur la Figure
−
−
5.5 dans le cas d’une plaque rectangulaire, possédant donc deux normales →
x1 et →
x2 . Les
contraintes généralisées de membrane sont représentées aisément (Figure 5.5-a). Les moments de flexion M11 et M22 sont également représentés assez intuitivement, par contre le
moment de torsion M12 dû aux contraintes de cisaillements est plus délicat à représenter,
il tend en fait à gauchir le plan de la plaque (Figure 5.5-b).
Loi de comportement
Nous pouvons maintenant relier les contraintes aux déformations, puis les
contraintes généralisées au torseur des déformations (Eq. 5.7). Considérons pour cela un
matériau constitutif isotrope élastique linéaire. La loi de comportement ’matériau’ s’écrit
donc classiquement, en raideur ou en souplesse :
ν
σ11
− (σ22 + σ33 )
ε11 =
σ
=
(λ
+
2µ)ε
+
λε
+
λε
11
11
22
33
E
E
ν
σ22
σ22 = λε11 + (λ + 2µ)ε22 + λε33
ε22 =
− (σ11 + σ33 )
E
E
σ
ν
33
σ33 = λε11 + λε22 + (λ + 2µ)ε33
ε33 =
− (σ11 + σ22 )
E
E
σ12
σ
=
2µε
12
12
ε12 =
2G
σα3 = 2µεα3
εα3 = σα3
2G
Plaques
119
(a)
(b)
Figure 5.5: Contraintes généralisées (a) de membrane et (b) de flexion sur une surface
élémentaire de plaque.
On rappelle que les conditions de bords libres se traduisent par σi3 = 0 (Eq.
5.2). Nous avons vérifié σα3 = 0 pour établir la cinématique des plaques minces. Par
contre, il reste à vérifier σ33 = 0. Cette condition conduit, via la loi de comportement
écrite en souplesse, à une déformation normale transverse ε33 non nulle, ce qui va à
l’encontre de la cinématique établie qui donne une composante 33 nulle pour le tenseur
de déformations (Eq. 5.6). En fait, cette déformation normale transverse à la plaque est
induite par effet de Poisson, elle est donc proportionnelle aux déformations de membranes :
−
−
−
ε33 (→
x ) = −νε22 (→
x ) = −νε11 (→
x ). La déformation normale transverse est donc, pour les
matériaux courants, de l’ordre de 30% des déformations dans le plan. Mais, compte-tenu
Plaques
120
1
de la taille caractéristique du plan,
de l’épaisseur de la plaque qui est au maximum de 10
3
la variation de l’épaisseur de la plaque est donc très faible, en l’occurrence : νRh < 100
.
L’erreur commise en utilisant la cinématique négligeant cette déformation est donc
très faible. On peut toutefois, sans problème, prendre en compte cette déformation. En
se plaçant dans une hypothèse de contraintes planes valable pour des plaques fines, la
condition de contrainte normale transverse nulle en surface de la plaque est vérifiée, et
une relation entre la déformation normale transverse ε33 et les déformations normales ε11
et ε22 dans le plan en découle :
σ33 = λε11 + λε22 + (λ + 2µ)ε33 = 0 ⇒ ε33 = −
λ
(ε11 + ε22 )
λ + 2µ
(5.9)
La loi de comportement en contraintes planes s’exprime simplement :
1
(σ11 − νσ22 )
E
1
ε22 =
(σ22 − νσ11 )
E
{z
}
|
↓
1 − ν2
ε11 + νε22 =
σ11
E
1 − ν2
σ22
ε22 + νε11 =
E
ε11 =
(5.10)
ce qui se met classiquement sous la forme matricielle suivante :
2D
σαβ
=
E
2D
(1 − ν)ε2D
αβ + νεγγ δαβ
2
1−ν
(5.11)
La loi de comportement de la plaque s’exprime simplement, en introduisant la loi
de comportement en contraintes planes (Eq. 5.11) dans les expressions des contraintes
généralisées (Eqs. 5.8a et 5.8b) :
Z
E
2D
(1 − ν)ε2D
Nαβ (xα ) =
αβ + νεγγ δαβ dx3
2
x3 1 − ν
Mαβ (xα ) =
Z
x3
E x3
2D
(1 − ν)ε2D
αβ + νεγγ δαβ dx3
2
1−ν
Dans le cas le plus général, où le matériau constitutif peut varier à travers l’épaisseur de la plaque, comme dans le cas des matériaux composites stratifiés par exemple, on
obtient comme dans le cas des poutres 3D (Eq. 1.15) une expression générale :
(
Nαβ (xα )
Mαβ (xα )
)
=
"
[A] [B]
[B] [D]
# (
·
eαβ (xα )
καβ (xα )
)
(5.13)
Plaques
121
où les sous-matrices [A], [D] et [B] représentent respectivement les rigidités de membrane,
de flexion, et le couplage entre les comportements de membrane et de flexion. Pour une
plaque homogène possédant des propriétés mécaniques identiques dans toute son épaisseur, la sous-matrice [B] est nulle et les comportements de membrane et de courbure sont
indépendants. Les rigidités de membrane et flexion se réduisent à des scalaires :
Nαβ (xα ) =
Mαβ (xα ) =
E(xα ) h
[(1 − ν)eαβ + νeγγ δαβ ]
1 − ν 2 (xα )
| {z }
Z h
2
E(xα )
A(xα ) =
dx3
2 (x )
1
−
ν
α
−h
2
E(xα ) h3
[(1 − ν)καβ + νκγγ δαβ ]
12(1 − ν 2 (xα ))
|
{z
}
Z h
2
E(xα ) x23
D(xα ) =
dx3
2 (x )
1
−
ν
α
−h
2
(5.14a)
(5.14b)
avec A(xα ) la rigidité de membrane et D(xα ) la rigidité de flexion qui peuvent le cas
échéant dépendre de la position sur la plaque. Comme dans le cas des poutres, la rigidité de
membrane dépend essentiellement de la surface latérale de la plaque, tandis que la rigidité
de flexion dépend essentiellement de l’épaisseur de la plaque. On retrouve également des
lois de comportement de forme similaire à celles des poutres pour une section symétrique
par exemple : N (x1 ) = ESe1 (x1 ) et Mf α (x1 ) = EIα κα (Eqs. 1.14).
Remarque : afin d’être consistant du point de vue de l’énergie issue des termes de
cisaillement, il est nécessaire de préciser la mesure du cisaillement considérée ainsi que
la façon d’exprimer la loi de comportement. Pour cela, comparons l’énergie de déformation en cisaillement caractérisant la plaque sous diverses formes. Partant de l’énergie de
déformation en cisaillement
Z
Z
1
1
→
−
→
−
→
−
→
−
−
−
(σ12 ( x )ǫ12 ( x ) + σ12 ( x )ǫ21 ( x )) dΩ =
2 σ12 (→
x )ǫ12 (→
x )dΩ
Wcis =
2 Z Ω Z
2
Ω
1
σ12 (xα )ǫ12 (xα ) dx3 dω
2
=
(5.15)
2 ω
x3
Z Z
Z
1
1
=
2
4 G h ǫ212 (xα )dω
2 G ǫ12 (xα ) ǫ12 (xα ) dx3 dω =
2 ω
2 ω
x3
et par définition de l’énergie de déformation en cisaillement dans le cas des plaques :
Z
Z
1
1
(N12 (xα ) e12 (xα ) + N21 (xα ) e21 (xα )) dω =
2N12 (xα ) e12 (xα )dω
Wcis =
2 ω
2 ω
avec la loi de comportement en membrane de la plaque qui s’écrit, pour un matériau
constitutif homogène isotrope élastique linéaire :
Nαβ (xα ) =
E(xα ) h
[(1 − ν)eαβ + ν eγγ δαβ ]
1 − ν 2 (xα )
N12 (xα ) =
Eh
e12 (xα ) = 2 G h e12 (xα )
1+ν
Plaques
122
l’énergie de déformation en cisaillement s’écrit alors :
Z
1
par définition de (5.15)
4 G h e212 (xα )dω −−−−−−−−−−−−−→ e12 = ǫ12
Wcis =
2 ω
Par contre, le stockage sous la forme de Voigt (passage d’un tenseur d’ordre 2 symétrique à un vecteur à 6 composantes) est tel que la contribution de l’effort de cisaillement
apparaît une seule fois :
e
N
×
×
×
11
11
= × × × ·
e22
N22
e
N
× × Gh
12
12
et dans ce cas la déformation considérée sera, en général, celle au sens de l’ingénieur
e12 = 2ǫ12 (et la courbure double κ12
2κ12 ) afin de ne pas modifier la structure de
la loi de comportement ’matériau’, et obtenir une énergie de cisaillement cohérente avec
l’expression (5.15) issue de l’expression générale :
Z
Z
1
1
N12 (xα ) e12 (xα )dω =
4 G h ǫ212 (xα )dω
Wcis =
2 ω
2 ω
5.2.4
Équations d’équilibre
Équilibre intérieur
Pour établir ces équations d’équilibre, nous allons recourir au PPV. Établissons
tout d’abord la puissance virtuelle des efforts intérieurs (défini en 1.19 page 24) en choisissant un champ virtuel de la forme de la cinématique de Love-Kirchhoff :
Z
−∗
∗ →
Pint (u ) = − σ M : ǫ∗M dΩ
Ω
Z Z
2D
2D ∗
(xα )dx3 dω
σ (xα ) : ǫ
= −
x3
ω
Z Z
2D
∗
∗
σ (xα ) : e (xα ) + x3 κ (xα ) dx3 dω
= −
x3
ω
Z Z
Z Z
2D
∗
2D
σ (xα )dx3 : e (xα )dω −
= −
x3 σ (xα )dx3 : κ∗ (xα )dω
ω
ω
}
{z
}
| x3 {z
| x3
N(xα )
M(xα )
(5.16)
En introduisant les tenseurs des contraintes généralisées de membrane (N(xα ) défini dans
l’Eq. 5.8a) et de flexion (ou moments fléchissants M(xα ) définis dans l’Eq. 5.8b) dans cette
expression de la puissance virtuelle des efforts intérieurs, on aboutit à
−
∗ →
Pint
( u∗ )
= −
Z
ω
Nαβ (xα )e∗αβ (xα ) + Mαβ (xα )κ∗αβ (xα ) dω
Plaques
123
L’écriture du PPV requiert l’écriture de la puissance virtuelle des actions extérieures. Pour cela, définissons la pression p(xα ) qui règne sur la plaque suivant la normale
→
−
x3 . Cette pression, définie dans l’Eq. 5.17a est la somme de l’intégration sur l’épaisseur des
forces de volume relativement à la normale à la plaque, mais aussi du différentiel d’efforts
surfaciques appliqués de part et d’autre de la plaque (Figure 5.6). Il existe d’autre part
des efforts répartis dans le plan de la plaque réunis dans un terme pα (xα ) (5.17b).
Z h
2
+
−
p(xα ) = F3 (xα ) + F3 (xα ) +
f3 (xα )dx3
(5.17a)
avec
pα (xα ) =
Z
(
−h
2
−
F3+ (xα ) = σ(xα , h2 ) · →
x3
−
−
−h
x3
F3 (xα ) = −σ(xα , 2 ) · →
h
2
−h
2
fα (xα )dx3
(5.17b)
Enfin des efforts et moments sont imposés sur le contour ∂ω de la plaque de normale
→
−
ν (xα ). La puissance virtuelle induite par ces termes de bord, qui sont des réactions
sur ∂ωu et des contraintes statiques sur ∂ωF , est un peu plus délicate à expliciter, nous
nous y intéresserons plus spécifiquement ultérieurement. Pour l’instant, regroupons la
→
−
∗
contribution de ces efforts imposés par le contact avec l’extérieur sous le terme Pcontact
(u∗ ).
Figure 5.6: Efforts extérieurs agissant sur une plaque.
Finalement, le PPV s’écrit pour les plaques de Love-Kirchhoff :
−
−
→
−
∗ →
∗ →
Pint
(u∗ ) + Pext
(u∗ ) = 0, ∀u∗
Z
Nαβ (xα )e∗αβ (xα ) + Mαβ (xα )κ∗αβ (xα ) dω+
⇔
−
Z ω
→
−
→
−
∗
(p(xα )w∗ (xα ) + pα (xα )u∗α (xα )) dω + Pcontact
(u∗ ) = 0, ∀u∗
ω
(5.18)
Plaques
124
Essayons d’exprimer ces quantités de façon homogène par rapport au déplacement virtuel.
Notamment la puissance virtuelle des efforts intérieurs peut être intégrée par partie pour
faire apparaître les grandeurs à l’intérieur de la plaque et sur ses bords :
Z
−∗
∗ →
Nαβ (xα )e∗αβ (xα ) + Mαβ (xα )κ∗αβ (xα ) dω
Pint (u ) = −
ω
↓ par symétrie des tenseurs des déformations
Z
∗
Nαβ (xα )u∗α,β (xα ) − Mαβ (xα )w,αβ
(xα ) dω
= −
ω
↓ intégration par parties en β
Z
Z
∗
∗
Nαβ,β uα − Mαβ,β w,α dω −
=
ω
∂ω
∗
νβ ds
Nαβ u∗α − Mαβ w,α
↓ intégration par parties en α
Z
Z
∗
∗
∗
Nαβ νβ u∗α − Mαβ νβ w,α
+ Mαβ,β να w∗ ds
(Nαβ,β uα + Mαβ,αβ w ) dω −
=
ω
{z
}
| ∂ω
Z
→
−∗
∗
(Nαβ,β u∗α + Mαβ,αβ w∗ ) dω −
Pint
=
bord ( u )
ω
(5.19)
La composante de la puissance virtuelle des efforts intérieurs le long du bord de la plaque,
→
−∗
∗
notée Pint
bord ( u ), sera utilisée ultérieurement pour expliciter les conditions statiques et
cinématiques sur ce bord.
Nous cherchons ici à établir les équations d’équilibre intérieur. Écrivons le PPV
(Eq. 5.18) en utilisant la nouvelle forme de la puissance virtuelle des efforts intérieurs (Eq.
5.19) :
Z
→
−
→
−
→
−
∗
∗
(Nαβ,β u∗α + Mαβ,αβ w∗ + pw∗ + pα u∗α ) dω − Pintbord
(u∗ ) + Pcontact
(u∗ ) = 0, ∀u∗
ω
(5.20)
En choisissant un champ virtuel nul au bord de la plaque et non nul à l’intérieur, on en
déduit aisément les équations d’équilibre locales qui sont découplées entre membrane et
direction transverse :
Nαβ,β (xα ) + pα (xα ) = 0
(5.21a)
Mαβ,αβ (xα ) + p(xα ) = 0
(5.21b)
Remarque : on notera la similitude de ces équations avec, par exemple, les équations
2 M (x)
d’équilibre des poutres droites de Bernoulli : dNdx(x) + px = 0 et − d dx
+ py = 0 en
2
l’absence de moments répartis.
Plaques
125
Équations de Navier
Ces équations d’équilibre en contraintes (Eqs. 5.21) peuvent s’exprimer en fonction
des déplacements seulement en y injectant les lois de comportement (Eqs. 5.14a et 5.14b),
ce sont alors les équations de Navier. Considérons le cas de la flexion pure par exemple,
pour une plaque dont les propriétés géométriques et mécaniques sont invariantes dans
l’espace : D(xα ),α = 0. Dans ce cas, les équations de Navier sont :
Mαβ,αβ (xα ) + p(xα ) = 0 ⇔ D {(1 − ν)καβ,αβ + νκγγ,αβ δαβ } + p(xα ) = 0
2
2
∂ καβ
∂ κγγ
+ν
δαβ + p(xα ) = 0
∂xα ∂xβ
∂xα ∂xβ
{z
}
|
∂ 2 κγγ
ν
∂x2α
∂ 2 κ12 (xα )
∂ 2 κ11 (xα ) ∂ 2 κ22 (xα )
∂ 4 w(xα )
en remarquant que 2
=
+
=
2
∂x1 ∂x2
∂x22
∂x21
∂x21 ∂x22
⇔ D
(1 − ν)
⇔ −D
↓
∂ 4 w(xα )
∂ 4 w(xα ) ∂ 4 w(xα )
+
2
+
∂x41
∂x21 ∂x22
∂x42
∆· =
∂ 2·
∂ 2·
+
∂x21 ∂x22
+ p(xα ) = 0
Laplacien en cartésien
⇔ −D ∆2 w(xα ) + p(xα ) = 0
(5.22)
Remarque : de nouveau, cette expression est comparable à l’équation d’équilibre local
4 v(x)
+ py = 0
d’une poutre droite de Bernoulli en flexion pure : −EI d dx
4
5.2.5
Introduction des efforts tranchants
Pour expliciter complètement le problème à résoudre, il reste à établir les conditions
d’équilibre au bord. Dans ce cas, il est nécessaire d’introduire les efforts tranchants qui
jusqu’ici n’ont pas été pris en compte. En effet, même si les déformations de cisaillement
transverse sont négligées, comme dans le cas des poutres de Bernoulli il est indispensable
de prendre en compte ces efforts tranchants susceptibles d’induire notamment de la flexion.
Par définition, les efforts tranchants résultent de l’intégration sur l’épaisseur des
contraintes de cisaillement :
Z
σα3 (xα )dx3
(5.23)
Qα (xα ) =
x3
Plaques
126
Pour caractériser l’équilibre de la plaque en prenant en compte ces efforts tranchants, considérons l’équilibre d’un élément de plaque en projection dans le plan et à
travers l’épaisseur :
∂σαβ ∂σα3
+
+ fα = 0
∂xβ
∂x3
∂σij
+ fi
(2D)
(5.24)
(3D)
∂xj
∂σα3 ∂σ33
+
+ f3 = 0
∂xα
∂x3
La seconde équation peut être intégrée directement :
Z
h
2
−h
2
(σi3,i + f3 )dx3 =
Z
h
2
−h
2
∂σα3 ∂σ33
+
+ f3 dx3 = 0
∂xα
∂x3
Z h
h
2
∂Qα
f3 (xα )dx3
=
+ [σ33 (x3 )]−2 h +
∂xα
2
−h
2
{z
}
|
= Qα,α +
p(xα )
=0
(5.25)
Cette équation traduit l’équilibre entre les effort répartis transverses et la variation des
efforts tranchants dans le plan.
Faisons maintenant apparaître les moments de flexion, tels que définis en 5.8b.
Pour cela considérons la première équation, qui caractérise l’équilibre dans le plan, et
intégrons son produit avec l’altitude à travers la plaque :
Z
h
2
−h
2
x3 (σαi,i + fα )dx3 =
∂
=
∂xβ
=
Z
|
h
2
−h
2
Z
x3 σαβ dx3 −
{z
}
∂
Mαβ −
∂xβ
h
2
−h
2
Z
|
x3
h
2
−h
2
∂σαβ ∂σα3
+
+ fα dx3 = 0
∂xβ
∂x3
h
1 × σα3 dx3 + [x3 σα3 (x3 )]−2 h
2
{z
}
{z
} |
Qα
+ 0(Eq. 5.2)
Finalement, les équations d’équilibre intérieur sont :
Équations d’équilibre intérieur des plaques de Love-Kirchoff
(5.26)
Plaques
127
Nαβ,β (xα ) + pα (xα ) = 0
(5.27a)
Mαβ,β (xα ) − Qα (xα ) = 0
(5.27b)
Qα,α (xα ) + p(xα ) = 0
(5.27c)
On note que les équations 5.27b et 5.27c combinées sont équivalentes à l’équation 5.21b
établie précédemment sans les efforts tranchants.
Remarque : on notera la similitude de ces équations avec, par exemple, les équations
d’équilibre des poutres droites de Bernoulli : dNdx(x) + px = 0, dMdx(x) + T (x) + cZ = 0, et
dT (x)
+ py = 0.
dx
Conditions au bord
Pour définir complètement le problème, il reste à exprimer les conditions aux limites
statiques et cinématiques, c’est-à-dire sur le bord ∂ω de la plaque. Afin de déterminer la
forme des efforts que l’on peut imposer sur le bord de la plaque, on propose d’utiliser les
termes de bord du PPV tel que définis dans l’Eq. 5.19. Considérons dans cet équilibre un
champ virtuel nul à l’intérieur du domaine. La nullité des puissances virtuelles développées
par les réactions aux appuis conduit à trois types de conditions aux limites s’excluant sur
les bords :
→
−
→
−
→
−
∗
∗
(Eq.5.20) → Pintbord
(u∗ ) = Pcontact
(u∗ ), ∀u∗ ∈ ∂ω
m
→
−
∗
Pcontact
( u∗ )
=
Z
∂ω
Nαβ νβ u∗α
m
Nαβ νβ = 0
Mαβ νβ = 0
Qα να = 0
ou
−
∗
Mαβ νβ w,α
∗
+ Mαβ,β να w ds
(5.28)
| {z }
Qα να d’après (5.27b)
uα (xα ) = 0
w,α (xα ) = 0
w(xα ) = 0
(5.29)
On peut donc affiner les types de conditions cinématiques et statiques que l’on
peut imposer sur la plaque, qui sont de la forme des conditions ci-dessus (Eq. 5.29). Il
suffit alors d’exprimer le travail des efforts de contact induits par les efforts extérieurs et
les réactions, soit :
Plaques
128
→
−
→
−
→
−
∗
∗
Pintbord
(u∗ ) = Pcontact
(u∗ ), ∀u∗ ∈ ∂ω
Z
m
∂ω
Nαβ νβ u∗α
−
∗
Mαβ νβ w,α
+ Qα να w
∗
ds =
Z
Z∂ωF
∂ωu
∗
Ndαβ νβ u∗α − Mdαβ νβ w,α
+ Qdα να w∗ (5.30)
ds +
d∗
d∗
Nαβ νβ ud∗
ds
α − Mαβ νβ w,α + Qα να w
(5.31)
Le travail virtuel produit par les efforts de réaction étant nul (Eq. 5.31), seul le terme
sur le bord ∂ωF est non nul (Eq. 5.30). On en déduit les conditions statiques sur le
bord en prenant un champ de déplacement virtuel non-nul sur ce bord, et les conditions
cinématiques se déduisent naturellement pour un champ cinématiquement admissible. Au
final, les conditions complètes sont :
d
uα (xα ) = udα (xα )
ν
=
N
−
N
β
αβ
αβ
→
−
d
d
ou champ u C.A.
Mαβ − Mαβ νβ =
w,α (xα ) = w,α
(xα ) (5.32)
Qα − Qdα να =
w(xα ) = wd (xα )
Il est essentiel de remarquer à ce point que l’intégration des équations de Navier en
flexion pure par exemple (Eq. 5.22) requiert quatre conditions aux limites. Or, nous avons
ici trois conditions aux limites sur chaque bord, soit une condition de plus que nécessaire.
−
−
Par exemple, pour un bord libre de normale →
ν =→
x 1 , on a les conditions qui se déduisent
de (5.29) :
M11 = 0
(5.33)
M12 = 0
Q =0
1
En fait cette forme de conditions aux limites (Eq. 5.28) a été initialement introduite par
Poisson, mais Kirchhoff a montré (en 1850 !) que ces trois conditions étaient redondantes,
et que deux seulement suffisaient pour déterminer complètement les flèches satisfaisant
les équations de Navier (Eq. 5.22). En fait ce problème se ramène à déterminer localement
les conditions aux limites à appliquer. En effet, la condition cinématique portant sur le
∗
gradient (w,α
) peut ne pas être triviale dans la plupart des cas. Et si on calcule ce gradient
par rapport au repère global, on ne dispose pas des bonnes informations pour poser les
conditions aux limites qui s’expriment par rapport au bord, et donc par rapport à la base
locale formée par les vecteurs tangent et normal à l’abscisse curviligne s. Calculons ce
gradient :
−−→
∂w(xα ) ∂s −
→ + ∂w(xα ) ∂ν −
→
x
x
grad (w(xα )) =
α
α
∂s
∂xα
∂ν
∂xα
| {z
| {z
}
}
∂w(xα )
∂w(x
)
α
→
−
→
−
=
τ
+
ν
∂s
∂ν
Plaques
129
∗
Donc la condition w,α
(xα ) se traduit par :
∗
w,α
(xα ) ⇔
∂w∗ (xα )
∂w∗ (xα )
τα +
να = 0
∂s
∂ν
Cette dernière condition n’étant pas triviale, essayons d’exprimer la puissance virtuelle des
efforts de bord en utilisant le calcul de ce gradient (Eq. 5.34). Considérons tout d’abord
l’expression faisant intervenir le gradient du déplacement transverse :
∗
Z
Z
∂w (xα )
∂w∗ (xα )
∗
τα +
να ds
Mαβ νβ
Mαβ νβ w,α ds =
∂s
∂ν
∂ω
∂ω
Z
Z
∂g
∂f
↓ remarque : le bord n’a pas de bord ! ⇒
f ds = −
gds
∂ω ∂s
∂ω ∂s
= −
Z
∂ω
∂
∂w∗
(Mαβ νβ τα w∗ ) − Mαβ νβ να
∂s
∂ν
ds
(5.34)
En utilisant cette expression pour expliciter la puissance virtuelle des actions de contact
(Eq.5.28), on aboutit aux conditions suivantes :
!
!
Z
∗
→
−
∂w
∂
∗
(Mαβ νβ τα ) + Mαβ,β να w∗ − Mαβ νβ να
Pcontact
( u∗ ) =
dS
Nαβ νβ u∗α +
∂s
∂ν
∂ω
{z
}
|
F (M, Q)
Nαβ νβ = 0
∂
(Mαβ νβ τα ) + Qα να = F (M, Q) = 0
∂s
M ν ν =0
αβ β α
ou
uα (xα ) = 0
w(xα ) = 0 (5.35)
∂w(xα ) = 0
∂ν
Dans ces équations d’équilibre au bord, la seconde quantité F (M, Q) est la plus difficile
à appréhender, elle correspond en fait à un effort vertical.
−
Considérons l’exemple de plaque ci-dessous (Figure 5.7), de dimension a selon →
x1
→
−
et b selon x et dont les faces référencées de 1 à 4 sont respectivement libre, encastrée,
2
en appui simple, et libre.
Plaques
130
Figure 5.7: Illustration des conditions aux limites.
Les conditions aux limites correspondantes se déduisent de 5.35 et s’écrivent :
Face 1 : xα ∈ {a, 0 ≤ x2 ≤ b}
−
−
−
−
normale →
ν =→
x 1 et →
τ =→
x2
N11 = N12 = 0
M12,2 + Q1 = 0
M =0
11
Face 3 : xα ∈ {0, 0 ≤ x2 ≤ b}
−
−
−
−
normale →
ν = −→
x 1 et →
τ =→
x2
N11 = N12 = 0
w=0
M =0
11
Face 2 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, b}
−
−
−
−
normale →
ν =→
x 2 et →
τ =→
x1
u = u2 = 0
1
w=0
∂w
=0
∂x2
Face 4 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, 0}
−
−
−
−
normale →
ν = −→
x 2 et →
τ =→
x1
N22 = N12 = 0
M12,1 + Q2 = 0
M =0
22
(5.36)
Plaques
5.2.6
131
Exemples de plaque de Love-Kirchhoff en flexion
Comme les équations d’équilibre deviennent rapidement complexes à résoudre analytiquement dans le cas des plaques, nous allons traiter deux cas simples. Le premier cas
est une plaque circulaire soumise à un champ de pression. La formulation du problème
en coordonnées cylindriques du problème ramène la résolution à un problème 1D dont
la solution s’exprime analytiquement. Dans le second cas, une plaque carrée est considérée. La solution est plus complexe, et on propose une approximation de Galerkin pour
l’expliciter.
Flexion d’une plaque circulaire
On considère la plaque circulaire représentée sur la Figure 5.8, de rayon R, d’épaisseur h, constituée d’un matériau homogène élastique linéaire isotrope de module d’Young
E et de coefficient de Poisson ν. La plaque étant suffisamment mince par rapport à son
rayon, et dans un état de flexion pure, on se placera dans le cadre de la théorie de LoveKirchhoff. Les conditions aux limites appliquées sur le contour de la plaque seront précisées
ultérieurement.
Figure 5.8: Plaque circulaire soumise à un champ de pression uniforme.
On rappelle qu’en coordonnées cylindriques, dans le cas des plaques, les gradients,
les courbures, et les laplaciens d’un scalaire sont les suivants :
−−→
∂U (r, θ) →
1 ∂U (r, θ) →
−
−
grad U (r, θ) =
er +
eθ
∂r
r ∂θ
−
−
= u→
e +u →
e
r r
θ θ
−−→
κ(r, θ) = −grad grad w(r, θ)
et
∂ur 1 ∂ur uθ
−
−−→
r
−grad grad U (r, θ) = − ∂r r ∂θ
∂uθ 1 ∂uθ ur
+
→
→
−
→
∂r r ∂θ
r (−
e r ,−
e θ ,x
3)
2
1 ∂
∂U
1∂ U
△U (r, θ) =
r
+ 2 2
r ∂r
∂r
r ∂θ
Plaques
132
1. Équilibre : écrire les équations d’équilibre en déplacement.
2. Le problème étant entièrement axisymétrique (chargement, matériau et géométrie), indiquer la condition que doit vérifier le déplacement transverse w(r, θ).
3. Montrer que l’équilibre de la plaque, écrit en déplacement, s’exprime :
∂△w
∂
pr
r
=−
D
∂r
∂r
4. Montrer que la solution de cet équilibre s’écrit :
p r4
+ B1 r2 ln r + B2 r2 + B3 ln r + B4
64 D
5. Proposer les conditions aux limites permettant de déterminer B1 et B3 . Notamment, quelles valeurs vont prendre la flèche w et le moment Mrr au centre
de la plaque ?
w(r) = −
6. Résoudre le problème dans le cas d’un bord encastré. Représenter la solution.
−
Pour cette même plaque mais simplement appuyée, avec un couple −c.→
eθ réparti sur son
pourtour, la solution est :
p
r 2 − R2
p R2
4
4
w(r) = −
r −R +
c+
(3 + ν)
64 D
2D(1 + ν)
8
Approximations cinématiques
On considère maintenant la plaque carrée représentée sur la Figure 5.9, de dimensions 2a×2a, d’épaisseur h, constituée d’un matériau homogène élastique linéaire isotrope
de module d’Young E, coefficient de Poisson ν et de densité ρ. La plaque est complètement encastrée sur son pourtour extérieur et soumise à son propre poids. La plaque étant
suffisamment mince par rapport à ses autres dimensions, et dans un état de flexion pure,
on se placera dans le cadre de la théorie de Love-Kirchhoff.
Figure 5.9: Plaque carrée encastrée sur son contour et soumise à son propre poids.
Dans ce cas, la solution ne peut plus être trouvée analytiquement. Nous allons donc
recourir à une approximation cinématique de Galerkin. On rappelle que ce type d’approximation du champ de déplacement solution doit vérifier les conditions cinématiques qu’il
faut donc expliciter.
Plaques
133
1. Expliciter la force qui s’exerce par unité de surface.
2. Indiquer l’ensemble des champs de déplacement cinématiquement admissibles.
3. Approximation de Galerkin
(a) Quelles sont les conditions que doivent satisfaire les constante C et k pour
que f (x, y) = (1 + C cos kx) (1 + C cos ky) soit C.A.
(b) Dans la suite on ne considérera que les fonctions f1 et f2 , où
fn (x, y) =
1 + (−1)1+n cos n πa x 1 + (−1)1+n cos n aπ y . Représenter
f1 (x, 0) et f2 (x, 0)
On rappelle que l’approximation de Galerkin repose sur la formulation faible
du problème (voir le chapitre suivant pour plus de détails) pour laquelle
l’inconnue et la fonction test sont choisies dans un base de fonctions vérifiant
les conditions aux limites naturelles du problème, d’où la sélection de la base
de fonctions que nous venons d’effectuer. Dans cette formulation faible, qui
correspond ici au principe des puissances virtuelles tel qu’explicité dans l’Eq.
5.18 par exemple, l’inconnue (le champ de déplacement réel) est recherchée
comme une combinaison des n fonctions de la base retenue, et la fonction
test (le champ de déplacement virtuel) est successivement prise égale aux n
fonctions de cette base.
w(x, y) =
n
X
fi (x, y)Qi et w∗ (x, y) = f1 , f2 , ..., fn
i=1
Au final, on aboutit à un système algébrique symétrique de n équations à
résoudre, qui peuvent se mettre aisément sous forme matricielle. C’est ce
type d’approche qui a donné lieu aux approximations de type éléments finis,
qui ont comme avantage supplémentaire de donner aux coefficients inconnus
une signification physique (degrés de liberté de la discrétisation) :
Dans notre cas, montrer que le PPV se réduit à :
Z
Z
∗
Mαβ καβ dω + ρghw∗ dω = 0, ∀w∗ C.A(0)
ω
ω
(c) Montrer, en introduisant l’approximation, que le système à résoudre est de
la forme :
Z
− ρghf1 dω
Q1
W (f1 , f1 ) . . . W (f1 , fn )
ω
.
.
..
.
.
.
.
.
.
.
·
=
.
.
.
.
Z
Qn
W (fn , f1 ) . . . W (fn , fn )
− ρghfn dω
{z
}
| {z }
|
ω
|
{z
}
[A]
·
{Q}
=
{F }
Plaques
134
avec W (fi , fj ) = D
Z
{(1 − ν)fi,αβ fj,αβ + νfi,γγ fj,γγ } dω
ω
(d) En considérant une seule fonction f1 (x, y) (et donc un seul coefficient Q1 ),
montrer que la solution de notre problèmes est :
w(x, y) =
−4a2 ρgh
f1 (x, y)
2W (f1 , f1 )
avec W (f1 , f1 ) = D [7π 4 (1 − ν) + 6π 4 ν] l’énergie de déformation correspondant au terme A11 de la matrice de rigidité du système.
5.3
Plaques de Hencky-Mindlin
Nous avons étudié les plaques de Love-Kirchhoff, plaques dont l’épaisseur est faible
devant les dimensions caractéristiques du plan de la plaque. Dans le cas des plaques dites
’épaisses’, cette théorie est mise en défaut et s’éloigne des solutions de la mécanique 3D.
En effet, le cisaillement transverse devient essentiel dans ces plaques, ou bien lorsque
le matériau constitutif est de type orthotrope, ou encore dans le cas des sanwichs où
le cisaillement se développe de façon privilégiée. Ces considérations sont identiques à
celles rencontrées dans les poutres, et la théorie de Love-Kirchhoff correspond à celle de
Bernoulli pour les poutres, tandis que la théorie de Hencky-Mindlin que nous étudions ici
correspond à celle de Timoshenko dans les poutres.
Les plaques dites épaisses peuvent être définies pour des rapports 5 ≤ Rh ≤ 10,
R étant la taille caractéristique du plan de la plaque. Ces plaques sont plus largement
utilisées dans les applications numériques, notamment parce que la représentation du
milieu 3D par ces modèles de plaque est plus réaliste.
5.3.1
Cinématique et déformations
Par rapport aux plaques de Love-Kirchhoff, la cinématique de ces plaques varie
par l’expression des angles de rotation des sections qui cette fois ne sont plus directement
égaux au gradient de déplacement transverse, comme dans l’Eq. 5.3, mais sont des quantités indépendantes. Dans ce cas le champ de déplacement s’écrit, par analogie avec la
Plaques
135
cinématique de Love-Kirchhoff :
→
−
θ (xα ) =
−→
uM (xα )
{UM (xα )} =
φ1 = θ2 (xα )
φ2 = −θ1 (xα )
0
−
−−→ →
−
= →
u (xα ) + M G ∧ θ (xα )
u1 (xα )
0
θ2 (xα )
=
∧ −θ1 (xα )
u2 (xα ) + 0
w(xα )
−x3
0
uα (xα ) − x3 θα (xα )
w(xα )
=
(5.37)
(M )
d’où l’on tire les déformations associées, notées HM , composées des déformations de type
Love-Kirchhoff dont les courbures dépendent maintenant directement des angles (ε2D
αβ ), et
des déformations de cisaillement (εα3 ) :
−
→ −
→
−
→ →
−
εHM (xα ) = ε2D
αβ (xα ) xα ⊗ xβ + εα3 (xα ) xα ⊗ x3
avec
1 ∂uα ∂uβ
∂θβ
1 ∂θα
2D
εαβ (xα ) =
+
+
− x3
2 ∂xβ ∂xα
2 ∂xβ ∂xα
|
|
{z
}
{z
}
=
eαβ (xα )
+
x3 καβ (xα )
(5.38)
(5.39)
et
2εα3 =
∂w
− θα
∂xα
Le tenseur des contraintes dans cette cinématique doit être complété en conséquence puisque les déformations de cisaillement transverses sont maintenant non nulles :
σ11 σ12 σ13
(5.40)
σ HM = ” σ22 σ23
”
”
0
5.3.2
Équations d’équilibre
Utilisons le PPV pour établir les équations d’équilibre. La puissance virtuelle des
efforts intérieurs s’écrit, en notant que les contraintes de cisaillement sont doubles pour
Plaques
136
obtenir le travail effectué en 3D (2σα3 εα3 = σα3 εα3 + σ3α ε3α ) :
Z
−∗
∗ →
Pint (u ) = − σ M : ǫ∗M dΩ
Ω
Z Z
Z
∗
2D
2D ∗
σ (xα ) : ǫ
= −
σα3 (xα )εα3 (xα )dx3 dω
(xα )dx3 + 2
x3
ω
x3
Z
N(xα ) : e∗ (xα ) + M(xα ) : κ∗ (xα ) + 2Qα (xα )ε∗α3 (xα ) dω
= −
(5.41)
ω
ce qui peut encore se mettre sous une forme incluant des déplacements et rotations uniquement (en notant la symétrie des déformations de membrane et de courbure), et qu’on
intègre ensuite par parties pour faire apparaître l’équilibre intérieur et les actions de
contact :
Z
−∗
∗
∗
∗ →
Nαβ (xα )u∗α,β (xα ) − Mαβ (xα )θα,β
(xα ) + Qα (xα ) w,α
− θα∗ dω
Pint (u ) = −
ω
↓ intégrations par parties en α et β
Z
=
(Nαβ,β u∗α − (Mαβ,β − Qα ) θα∗ + Qα,α w∗ ) dω−
ω
Z
(Nαβ νβ u∗α − Mαβ νβ θα∗ + Qα να w∗ ) ds
| ∂ω
{z
}
Z
→
−∗
∗
(Nαβ,β u∗α − (Mαβ,β − Qα ) θα∗ + Qα w∗ ) dω − Pint
=
bord ( u )
ω
(5.42)
et la puissance des efforts extérieurs s’écrit :
Z
−∗
→
−
∗ →
∗
(p(xα )w∗ (xα ) + pα (xα )u∗α (xα )) dω + Pcontact
Pext (u ) =
( u∗ )
ω
On identifie immédiatement les équations d’équilibre intérieur. Elles correspondent
aux équations des plaques de Love-Kirchhoff lorsque les efforts tranchants sont pris en
compte (Eqs. 5.27a, 5.27b, et 5.27c), obtenues plus directement ici. Ces équations sont
rappelées ci-dessous.
Nαβ,β (xα ) + pα (xα ) = 0
Mαβ,β (xα ) − Qα (xα ) = 0
Qα,α (xα ) + p(xα ) = 0
En ce qui concerne les équations d’équilibre au bord, on obtient cette fois des conditions
Plaques
137
plus simples que pour les plaques de Love-Kirchhoff
Nαβ νβ = 0
ou
Qα να = 0
Mαβ νβ = 0
:
uα (xα ) = 0
w(xα ) = 0
θα (xα ) = 0
Les conditions aux limites sont donc plus ’naturelles’ ici, et pour l’exemple de la
plaque traité précédemment (Figure 5.7, page 130), elles deviennent :
Face 1 : xα ∈ {a, 0 ≤ x2 ≤ b}
−
−
−
−
normale →
ν =→
x 1 et →
τ =→
x2
N11 = N12 = 0
Q1 = 0
M =M =0
11
12
Face 3 : xα ∈ {0, 0 ≤ x2 ≤ b}
−
−
−
−
normale →
ν = −→
x 1 et →
τ =→
x2
N11 = N12 = 0
w=0
M =M =0
11
12
5.3.3
Face 2 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, b}
−
−
−
−
normale →
ν =→
x 2 et →
τ =→
x1
uα = 0
w=0
θ =θ =0
1
2
(5.44)
Face 4 : xα ∈ {0 ≤ x1 ≤ a, 0}
−
−
−
−
normale →
ν = −→
x 2 et →
τ =→
x1
N22 = N12 = 0
Q2 = 0
M =M =0
22
12
Lois de comportement
Les lois de comportement reliant les efforts et moments généralisés aux déformations et courbures généralisées, respectivement 5.14a et 5.14b, restent valables. Il faut
simplement introduire ici la loi de comportement qui relie les efforts tranchants aux déformations de cisaillement, comme dans le cas des poutres de Timoshenko.
Dans les plaques minces, nous avons posé que εα3 est indépendant de x3 , de plus on a la
relation de comportement au niveau d’un élément de matière σα3 = Gεα3 . Par définition
(éq. 5.23) on a donc l’effort tranchant qui s’écrit :
Z
∂w
Qα (xα ) = 2G
− θα
εα3 dx3 = Gh
∂xα
x3
mais σα3 ne peut pas être constant dans l’épaisseur de la plaque puisque cette composante
est nulle sur les faces libres de la plaque, et non nulle dans la plaque. En utilisant l’équation
Plaques
138
−
d’équilibre en contraintes selon les axes →
x α (éqs 5.24), on a :
∂σαβ
∂σα3
= −
∂x3
∂xβ
↓
en flexion pure
= −x3
12 ∂Mαβ
h3 ∂xβ
↓ d’après (5.27b)
= −x3
12
Qα
h3
donc σα3 est parabolique dans l’épaisseur de la plaque, et plus précisément est de la forme
(σα3 (x3 = ±h/2) = 0)
4 x23
3
σα3 (xα ) = 1 − 2
Qα (xα )
(5.45)
h
2h
Pour obtenir la ’bonne’ loi de comportement en cisaillement, il faut comparer
l’énergie de déformation que l’on aurait en 3D et celle qu’on a dans notre théorie des
plaques :
wcis =
1
2
Z
h
2
−h
2
2 σα3 (xα )εα3 (xα ) dx3
2
Z h
2
1
4 x23
3
=
1− 2
dx3 Qα Qα
2G − h2
h
2h
1
5
Qα Qα
=
6 2Gh
(5.46)
on a donc un rapport de 65 entre les distributions de la théorie des plaques et une théorie
qui serait 3D. On reconnaît ce rapport déjà introduit dans les poutres de section rectangulaire et appelé coefficient de correction en cisaillement. Donc la loi de comportement en
cisaillement s’écrit :
∂w
5
(5.47)
− θα
Qα (xα ) = Gh
6
∂xα
6.
Approximations numériques
Sommaire
6.1
Notions de base sur les approximations numériques en mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
6.2
Approximations numériques les plus courantes en élastostatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
6.3
6.4
6.2.1
Résidus pondérés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
144
6.2.2
Formulation intégrale faible . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
146
6.2.3
Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
148
Applications à la mécanique des structures : Barre soumise
à son poids propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149
6.3.1
Solution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
151
6.3.2
Résolution par différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . .
152
6.3.3
Méthodes de collocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
153
6.3.4
Méthode de Galerkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
157
6.3.5
De la méthode de Galerkin aux éléments finis . . . . . . . . . .
163
Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique des
structures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173
140
Approximations numériques
141
Dans ce chapitre, on propose de présenter assez succinctement les approximations
numériques utilisées couramment en mécanique. Si les éléments finis sont aujourd’hui
largement utilisés dans le monde industriel, en fonction des domaines scientifiques
dont sont issus les problèmes à résoudre, d’autres approximations numériques restent
également employées. Par exemple, les volumes finis sont largement répandus en chimie
car cette méthode est basée sur la notion de bilan des flux de matière circulant à
travers un volume, notion courante en chimie. De la même manière, les différences
finies présentent de nombreux avantages dans les domaines de la physique tels que la
thermique par exemple. On note également que les couplages de différentes méthodes
numériques est souvent de mise, soit parce que les problèmes sont de nature de plus en
plus multi-physiques, soit parce que la résolution peut être mieux adaptée en fonction
de la nature des équations à résoudre. C’est le cas par exemple en dynamique des
structures où la résolution en espace est généralement réalisée par éléments finis alors
que l’intégration de la réponse en temps est réalisée par différences finies. Nous nous
intéresserons plus particulièrement ici aux méthodes qui ont donné naissance aux éléments finis pour finir par la méthode des éléments finis qui sera vue dans un cadre statique.
Ce chapitre constitue la base de l’UP ’Mécanique numérique’ du master Mécanique
et Ingénierie, parcours Modélisation et Simulation Numérique, et qui se concentrera exclusivement sur les méthodes numériques et leurs applications en mécanique. Ce domaine
constitue un thème de recherche industriel et académique en constant renouvellement
depuis les années 90, il est connu et plus compréhensible sous le vocable Computational
Mechanics, c’est-à-dire le lien entre l’informatique, les mathématiques appliquées, et la
mécanique, et couvre un vaste champ d’application allant du calcul intensif à l’intégration
d’outils spécifiques dans de grands codes industriels.
6.1
Notions de base sur les approximations numériques
en mécanique
Les notions d’approximation de la solution en mécanique sont de diverses natures.
Comme dans le cas des structures, ces approximations peuvent porter sur la simplification
’géométrique’ conduisant à une simplification de la cinématique. C’est le cas des théories
de poutres, plaques, coques, ... Les approximations peuvent également porter sur le comportement du milieu étudié, le comportement idéal le plus basique étant de type Hookéen.
Enfin, si malgré ces diverses simplifications le problème ne peut toujours pas être résolu
de façon simple, c’est-à-dire que le champ solution ne peut être trouvé analytiquement, on
effectue alors des approximations semi-analytiques, ou plus généralement des approximations qui de par la taille des systèmes engendrés sont presque systématiquement résolus
Approximations numériques
142
de façon numérique.
Ces approximations numériques sont nombreuses, nous verrons ici le cas des approximations les plus courantes basées sur la formulation de type Résidus pondérés du
problème posé. De façon très grossière, ce type de formulation consiste à minimiser un
résidu (une fonction à valeur réelle) en cherchant à annuler le produit de ce résidu avec
des fonctions de pondération bien choisies. Toute la problématique est présente dans
ce terme bien choisies. En effet, partant d’une formulation donnée du problème de mécanique, ces approximations numériques diffèrent par les contraintes imposées au champ
solution et au champ test (fonctions de pondération). En imposant des contraintes de
dérivabilité forte sur le champ solution recherché, on formule le problème de façon forte.
Par contre en partant de la formulation faible, i.e. en partageant les contraintes de dérivabilité sur le champ réel et le champ test, on formule la plupart des approximations
numériques rencontrées dans les sciences pour l’ingénieur. Seule la méthode des éléments
de frontière diffère de cette formulation faible, puisqu’on va rejeter le problème à résoudre
sur ses frontières, ceci en imposant les contraintes de dérivabilité sur les fonctions test.
Cette section 6.1 présentant les approximations numériques les plus répandues
s’inspire du premier chapitre de l’excellent ouvrage de J.-M Bergheau (ENISE) et R.
Fortunier (EMSE) intitulé ’Finite Element Simulation of Heat Transfer’(ISTE Ltd and
John Wiley & Sons Inc, ISBN-10 : 1848210531). Les applications numériques sont en
partie adaptées de cet ouvrage. Un grand merci aux auteurs !
6.2
Approximations numériques les plus courantes en
élasto-statique
L’exemple de résolution d’un problème élasto-statique simple permet de mettre en
évidence les grandes notions que nous verrons en détails dans ce chapitre. Considérons
le problème classique d’équilibre mécanique (Figure 6.1) formulé à partir de l’équation
Approximations numériques
143
d’équilibre d’un élément de volume et des conditions aux limites associées cinématiques
(Dirichlet ou en déplacement) et statiques (Neumann ou en contraintes/efforts) :
Figure 6.1: Représentation générale d’un solide occupant un domaine Ω, de frontière ∂Ω
(∂Ω = ∂Ωu ∪ ∂ΩF et ∂Ωu ∩ ∂ΩF =Ø), soumis à des sollicitations extérieures.
→
− −
−→ →
−̈
−
−
u i (→
x , t) , ∀ →
x ∈Ω
x , t) + f (→
x , t) = ρ→
divσ(−
avec
les conditions aux limites
→
−
−
−
−
−
u (→
x , t) = →
u d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂Ωu
→
− −
−
−
−
−
σ(→
x , t)→
n (→
x ) = F d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂ΩF
(6.1)
et la loi de comportement correspondante
−
−
−
x , t) = L(→
x , t) : ε(→
x , t)
σ(→
L’équilibre mécanique peut également s’écrire en fonction du champ de déplacement seulement sous la forme dite ’en déplacement’ appelées équations de ’Lamé-Clapeyron’ ou de
’Navier’. En effet, en introduisant la loi de comportement, la divergence des contraintes
s’écrit en fonction des déformations qui sont la partie symétrique du gradient du déplacement. Pour un milieu homogène isotrope obéissant à une loi de comportement linéaire,
et dans un cadre HPP, on obtient facilement l’équilibre en statique :
→
−−
−−→
→
− −
→
−
−
µ△→
u + (λ + µ)grad (div→
u ) + f (→
x)= 0
(6.2)
avec λ et µ les coefficients de Lamé du matériau constitutif. On voit que ce problème
est par nature elliptique et fait intervenir un laplacien, soit des dérivées d’ordre 2 de
l’inconnue. Ceci va guider le choix des méthodes d’approximation à utiliser.
Approximations numériques
144
On peut proposer une forme plus générale de ce problème de mécanique (Eq.
6.1) en introduisant un opérateur A agissant sur le champ de déplacement recherché.
Compte-tenu des hypothèses restrictives posées, cet opérateur est linéaire dans notre cas.
La résolution de cette équation conduit bien évidemment à l’expression du champ de
déplacement, dont on déduit aisément les déformations, puis les contraintes via la loi de
comportement. Le problème à résoudre s’écrit donc :
−
Trouver une fonction →
u ∈ U telle que
→
−
→
−
−
−
R(→
u ) = A→
u + f = 0,
−
∀→
x ∈Ω
avec
les conditions aux limites
→
−
−
−
−
−
u (→
x , t) = →
u d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂Ωu
→
− −
−
−
−
−
σ(→
x , t)→
n (→
x ) = F d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂ΩF
(6.3)
où U est un espace de fonctions vérifiant les conditions aux limites de Dirichlet, soit
des fonctions C.A. (cinématiquement admissibles), dont on précisera ultérieurement les
contraintes en termes de dérivabilité / intégration notamment.
6.2.1
Résidus pondérés
Pour résoudre ce problème, qui sauf dans quelques cas particuliers n’a pas de
−
solution analytique, on se propose d’intégrer cette équation d’équilibre, le résidu R(→
u ),
sur tout le domaine Ω et d’en calculer le produit avec des fonctions tests continues.
Pour que cette équation soit identiquement nulle, le produit avec n’importe laquelle de
ces fonctions doit rester nul. On notera qu’à ce stade, la seule condition que doivent
remplir ces fonctions tests est qu’elles soient intégrables sur le domaine. Notons V cet
espace de fonctions. Par contre, le champ solution doit être au moins 2 fois différentiable,
conformément à la remarque précédente sur la présence d’un laplacien du déplacement
dans les équations de Lamé-Clapeyron (Eq. 6.2). En ce sens, la formulation est dite forte.
R
En introduisant le produit scalaire tel que Ω (f · g) dΩ = hf, gi, dont la définition plus
précise nécessiterait de s’attarder sur l’analyse fonctionnelle, le problème à résoudre est
donc :
−
Trouver une fonction →
u ∈ U telle que
D→
E
− →
→
−
→
−
→
−
→
−
−
−
hR( u ), v i = hA u , v i + f , v , ∀→
v ∈ V
avec
les conditions aux limites
→
−
−
−
−
−
u (→
x , t) = →
u d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂Ωu
→
− −
−
−
−
−
σ(→
x , t)→
n (→
x ) = F d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂ΩF
(6.4)
Approximations numériques
145
Partant de cette formulation, le choix des fonctions test va nous permettre de
formuler 3 formes d’approximations de ce problème que nous détaillerons dans la suite
de ce chapitre : collocation par points, collocation par sous-domaine, et volumes finis qui
seront mis en œuvre par la suite sur des exemples plus précis :
1. Si V est un ensemble de distributions de Dirac, on formule la résolution par
collocation par point, c’est à dire qu’on cherche la solution en des points
donnés :
→
V = {δ−
xi , i = 1..n}
D→
E
−
→
−
→
−
→
−
−
→
−
→
֒→ hR( u ), v i = hA u , δxi i + f , δxi = 0
−
→
→
= R(→
u )|−
x =−
xi = 0,
(6.5)
∀ i = 1..n
2. Si V est une base de fonctions constantes par sous-domaine, on formule la résolution par collocation par sous-domaine ce qui revient à chercher les fonctions qui vérifient l’équilibre sur des sous-domaines disjoints mais dont l’union
forme le domaine Ω :
V = {δΩi , i = 1..n}
D→
E
−
−
−
−
֒→ hR(→
u ), →
v i = hA→
u , δ Ωi i + f , δ Ωi = 0
↓ Par définition du produit scalaire
Z
Z
→
−
−
R( u ) · δΩi dΩi =
=
R(→
u ) dΩi = 0,
Ω
∀ i = 1..n
Ωi
−
= R(→
u )|Ω=Ωi = 0,
∀ i = 1..n
(6.6)
3. Partant de cette dernière forme de champ test, en utilisant le théorème de la divergence (ou Ostrogradsky) appliqué à l’équilibre mécanique écrit en contraintes
(Eq. 6.1), on formule la résolution par volumes finis. Globalement, on vérifie que le flux de contraintes sur la frontière du sous-domaine Ωi , appelé alors
volume de contrôle, est équilibré par les forces volumiques imposées :
V = {δΩi , i = 1..n}
−
֒→ R(→
u )|Ω=Ωi = 0, ∀ i = 1..n
Z
→
−
−→
divσ + f dΩi = 0, ∀i = 1..n
=
Ωi
Z
Z
→
−
→
−
f dΩi = 0, ∀i = 1..n
= −
σ · n dωi +
∂Ωi
Ωi
(6.7)
Approximations numériques
6.2.2
146
Formulation intégrale faible
Le problème initial, écrit en 6.3 sous une forme générale peut être reformulé pour
donner une formulation intégrale faible à résoudre. Cette formulation, équivalente au
principe des puissances virtuelles (Eq. 7.79) introduit précédemment pour les poutres
(Eq. 1.16) puis les plaques (Eq. 5.18), a l’avantage de requérir des conditions de dérivabilité moindre sur les fonctions issues de l’espace des solutions U tout en augmentant les
contraintes de dérivabilité sur les fonctions de l’espace test V .
Partant du problème à résoudre, utilisons le théorème de la divergence pour ’reporter’ les dérivations du champ réel vers le champ test dans le terme d’équilibre des
contraintes. Nous supposons ici que l’opérateur hA·, ·i est un opérateur auto-adjoint (ou
−
−
−
−
hermitien), i.e. il vérifie hA→
u ,→
v i = h→
u , A→
v i, ce qui est le cas quasi-systématiquement
en physique ’classique’, et que les propriétés du milieu sont homogènes :
Z
−→ →
→
−
→
−
−
−
hA u , v i =
divσ(−
x)·→
v (→
x ) dΩ
Ω
Z
−→
→
−
→
−
−
−
div L( x ) : ε( x ) · →
=
v (→
x ) dΩ
Ω
Z
−→
→
−
→
−
→
−
−
−
div L( x ) : ∇( u ( x )) · →
=
v (→
x ) dΩ
Ω
Z
Z
→
−
→
−
−
→
−
→
−
→
−
→
−
→
−
−
−
−
t→
L( x ) : ∇ u ( x ) · →
n ·→
v (→
x ) dω
= − ∇ u ( x ) : L( x ) : ∇ v ( x ) dΩ +
Ω
∂Ω
(6.8)
On constate que le terme représentant l’équilibre intérieur est maintenant symétrique en
ce qui concerne les contraintes de dérivabilité des fonctions issues de U et V . Sans entrer
dans les détails, la régularité requise correspond maintenant au premier espace de Sobolev,
généralement noté H 1 (Ω), regroupant les fonctions de carré intégrable sur Ω et dont les
dérivées sont également de carré intégrable.
Un aspect important de cette formulation faible consiste à aboutir à une expression
unique contenant l’équilibre et les conditions aux limites essentielles (en déplacement) et
naturelles (en contraintes). Dans ce cas, le parallèle avec le PPV est valable pour un PPV
formulé en déplacements. Une des différences majeures de la formulation faible par rapport
aux différentes méthodes vues jusqu’ici est que les conditions essentielles sont introduites
en imposant que les fonctions de l’espace U vérifient ces conditions aux limites, soit :
−
−
−
−
−
−
U= →
u ∈ H 1 (Ω)/→
u (→
x , t) = →
u d (→
x , t) , ∀ →
x ∈ ∂Ωu .
D’autre part, les fonctions test sont choisies telles qu’elles s’annulent sur la frontière
−
∂Ωu où les conditions de Dirichlet sont imposées. En effet, toute fonction →
u affectée
d’une perturbation reste admissible tant que les conditions essentielles sont vérifiées
−
−
−
−
−
(→
u +→
v = →
ud ⇒ →
v = 0 ,∀ →
x ∈ ∂Ωu ). D’un point de vue mathématique, le cadre
du calcul des variations conduit au même résultat, ce qui revient à considérer que les
Approximations numériques
147
−
−
fonctions de pondération →
v expriment les variations du champ réel →
u (voir Eq. 6.12). Il
résulte de ces considérations que l’espace des fonctions tests est tel que
−
−
−
−
V = →
v ∈ H 1 (Ω)/→
v (→
x , t) = 0 , ∀ →
x ∈ ∂Ωu .
On en déduit immédiatement que l’intégrale de surface (second terme de l’Eq. 6.8) se
limite alors à l’intégrale des contraintes sur la surface ∂ΩF , soit le flux de déplacement :
Z
Z
→
−
→
−
→
−
→
−
→
−
→
−
−
−
−
−
σ(→
L( x ) : ∇ u ( x ) · n · v ( x ) dω =
x)·→
n ·→
v (→
x ) dω
∂ΩF
∂Ω
Z
(6.9)
→
−d →
−
→
−
→
−
F ( x ) · v ( x ) dω
=
∂ΩF
Le problème à résoudre s’écrit alors :
−
−
Trouver→
u ∈ U tel que pour tout→
v ∈ V :
Z
Z
Z
→
− →
→
−
→
−
→
−
−
→
−
−
→
−
→
−
t→
f ( x ) · v ( x ) dΩ +
− ∇ u ( x ) : L( x ) : ∇ v ( x ) dΩ +
Ω
Ω
→
−d →
−
−
F (−
x)·→
v (→
x ) dω = 0
∂ΩF
−
−
−
−
−
−
avec U = →
u ∈ H 1 (Ω)/→
u (→
x)=→
u d (→
x ) ,∀ →
x ∈ ∂Ωu
−
−
−
−
et V = {→
v ∈ H 1 (Ω)/→
v (→
x ) = 0 ,∀ →
x ∈ ∂Ω }
u
(6.10)
Ce type de formulation continue se prête extrêmement bien au calcul numérique
car elle permet de manipuler des fonctions scalaires. D’autre part, trouver la solution de
cette nouvelle formulation (Eq. 6.10) d’un problème mécanique peut être vu comme la
recherche d’un extremum. On montre en effet que la solution minimise et rend stationnaire
une fonctionnelle (fonction de fonction), strictement convexe dans un cadre linéaire, donc
possédant un minimum unique, appelée Énergie Potentielle. Le théorème de l’Énergie
Potentielle que nous ne détaillerons pas ici permet de montrer que l’équilibre (stable
ou instable) correspond au champ annulant la première variation de cette fonctionnelle
formée par la différence entre l’énergie de déformation du système et le travail des efforts
donnés :
−
Trouver→
u ∈ U qui minimise :
Z
Z
Z
→
− →
→
−d →
1
→
−
−
→
−
−
−
−
→
−
→
−
→
−
→
−
→
−
t→
Π( u ) =
F (−
x)·→
u (→
x ) dω
f ( x ) · u ( x ) dΩ −
∇ u ( x ) : L( x ) : ∇ u ( x ) dΩ −
2 Ω
Ω
∂ΩF
−
−
−
−
−
−
avec U = →
u ∈ H 1 (Ω)/→
u (→
x)=→
u d (→
x ) ,∀ →
x ∈ ∂Ωu
(6.11)
Approximations numériques
148
Quelques notions de calcul des variations sont rappelées en Annexe-Chapitre 7 §7.2 page
180. En quelques mots, le principe du calcul variationnel consiste à chercher à minimiser
−
l’écart entre la solution réelle, ici →
u (x), et une solution perturbée, représentée par une fa−
−
mille de fonctions proches de la solution, δ →
u (x) = α→
v (x) avec α → 0, qui se superposent
à cette solution réelle. On comprend bien alors pourquoi cette variation doit s’annuler sur
le bord ∂Ωu . On retiendra finalement que la recherche du minimum d’une fonctionnelle
convexe correspond à trouver le champ qui annule sa première variation, c’est à dire qui
rend nulle la valeur prise par la fonctionnelle pour une faible perturbation autour de la
solution, montrant qu’un extrémum est bien atteint. Pour revenir à notre cas, la minimisa−
tion de l’énergie potentielle conduit à chercher le champ de déplacement →
u ∈ U annulant
→
−
→
−
−
la première variation δΠ( u ) de Π( u ), ceci pour toute variation admissible δ →
u ∈ V , i.e
CA(0) :
−
−
Trouver→
u ∈ U tel que pour tout δ →
u ∈ V :
−
δΠ(→
u) =
Z
−
−
−
−
−
x ) : ∇t δ →
u (→
x ) : L(→
u (→
x ) dΩ
∇→
Ω
Z
Z
→
− →
→
−d →
−
−
−
→
−
→
−
F (−
x ) · δ→
u (→
x ) dω = 0
f ( x ) · δ u ( x ) dΩ −
−
Ω
(6.12)
∂ΩF
−
−
−
−
−
−
avec U = →
u ∈ H 1 (Ω)/→
u (→
x)=→
u d (→
x ) ,∀ →
x ∈ ∂Ωu
→
−
→
−
→
−
→
−
1
et V = {δ u ∈ H (Ω)/δ u ( x ) = 0 , ∀ x ∈ ∂Ωu }
Cette expression unique intégrant les équations d’équilibre et les conditions aux
limites permet de résoudre numériquement l’équilibre mécanique, elle correspond au principe des puissances virtuelles formulé en déplacement en prenant le champ virtuel égal
à la variation du champ réel (Eqs. 1.16 et 5.18). C’est à partir de cette expression que
les approximations de type Galerkin, Ritz-Galerkin, et finalement les éléments finis (en
déplacements) sont formulés.
6.2.3
Galerkin
Partant de l’expression variationnelle de l’équilibre mécanique tel que présenté en
6.12, des méthodes numériques, donc approchées, ont été construites. La plus répandue
de ces méthodes est la méthode de Galerkin (Boris. G. Galerkin, mathématicien Russe,
1871-1942). Il s’agit ici de travailler sur des sous-espaces de dimension finie U n et V n issus
de U et V respectivement, conduisant à un système discret. La méthode de Galerkin
→
−
utilise la propriété que tout élément ũ de U peut être construit à partir d’un seul élément
−
particulier →
u ⋆ de cet espace, perturbé par une fonction issue de l’espace de test V (noté
→
−
→
−
−
−
u ici), soit : ũ = →
u ⋆ + α→
u avec α ∈ R∗ petit. Il s’agit donc de construire un problème
approché où l’approximation de la solution et les fonctions test sont issues d’un même
sous-espace de dimension finie :
n
o
→
−
−
−
−
−
Un = →
(6.13)
u ∈ H 1 (Ω)/ ũ = →
u⋆+→
u avec →
u ∈Vn
Approximations numériques
149
On notera que si le terme particulier u⋆ dépend x, il sera intégré à la résolution du
problème. Généralement, ce terme exprime des conditions particulières que le champ de
déplacement solution doit vérifier (Dirichlet en particulier), il s’écrit donc par rapport à
des données du problème. Ce terme sera donc présent dans le problème à résoudre comme
une partie du second membre. Ceci est illustré dans l’exemple d’application (6.3.4 page
158)
En introduisant cette approximation dans la formulation faible (Eq. 6.10 ou 6.12),
et notamment dans le terme de puissance virtuelle des efforts intérieurs, on aboutit au
problème discret de dimension n à résoudre :
→
−
−
Trouver ũ ∈ U n tel que pour tout→
v ∈ Vn :
Z
Z
Z
→
− →
→
− →
−
→
−
−
→
−
−
→
−
→
−
t→
− ∇ ũ ( x ) : L( x ) : ∇ v ( x ) dΩ +
f ( x ) · v ( x ) dΩ +
Ω
Ω
→
−d →
−
−
F (−
x)·→
v (→
x ) dω = 0
∂ΩF
o
n→
−
→
−
→
−
−
−
−
−
−
−
avec U n = ũ ∈ H 1 (Ω)/ ũ = →
u⋆+→
u ,∀ →
x ∈ Ω, avec →
u ∈ V n et ũ = →
u d, ∀ →
x ∈ ∂Ωu
−
−
−
−
et V n = {→
v ∈ H 1 (Ω)/→
v (→
x ) = 0 ,∀ →
x ∈ ∂Ω }
u
(6.14)
Lorsque la dimension du problème discret augmente, on tend vers la solution
exacte. On retrouve ici, écrit de façon tout à fait générale, la méthode qui est utilisée
pour résoudre le second exercice sur les plaques (cf §5.2.6). De plus, nous verrons sur
l’exemple ci-dessous que la méthode des éléments finis est un cas particulier de choix de
ces fonctions d’approximation, où la solution va être approchée par une combinaison de
fonctions dont les valeurs sont connues en des points particuliers. L’intérêt de cette méthode pour les ingénieurs est double, il s’agit d’une part de la coïncidence entre découpage
physique (maillage) et découpage nécessaire à la résolution à l’aide de polynômes d’ordre
peu élevé, et d’autre part du sens physique des résultats qui sont des grandeurs prises en
ces mêmes points particuliers, les valeur nodales.
6.3
Applications à la mécanique des structures : Barre
soumise à son poids propre
Afin de mettre en pratique les notions introduites ci-dessus, nous allons considérer
un exemple en mécanique des structures, une barre en tension-compression. Ce problème
offre une résolution très simple, ceci nous permettra d’évaluer la pertinence des approximations numériques utilisées dans un second temps. Nous allons d’abord envisager une
résolution directe par différences finies, puis par les méthodes de collocation à partir de
la formulation de type ’Résidus Pondérés’, et enfin grâce à la formulation faible qui nous
permettra d’aboutir à la formulation d’un élément fini en tension.
Approximations numériques
150
Considérons une poutre droite à plan moyen chargée dans ce plan telle que vu au
§2.1. Cette poutre de section constante (section S = largeur b x hauteur h) et constituée d’un matériau homogène élastique isotrope (module d’Young E, masse volumique ρ)
travaille uniquement en tension-compression. Comme indiqué sur la Figure 6.2, elle est
bloquée en déplacement à son origine u(x = 0) = 0 et soumise à une déplacement donné à
son extrémité u(x = l) = ud . Cette poutre est soumise à un effort linéïque correspondant
à son poids propre (ρgS). Les équations caractérisant cet équilibre s’écrivent :
Figure 6.2: Poutre droite soumise à son propre poids et un déplacement imposé.
1. Conditions aux limites cinématiques - champ C.A.
u(0) = 0 et u(x = l) = ud
2. Équilibre intérieur
dN (x)
+ ρgS = 0
dx
3. Équilibre au bord et discontinuités
4. Loi de comportement
N (x) = ES
du(x)
dx
Approximations numériques
151
5. Relations utiles : tension :
m
σxx
(x) =
6.3.1
N (x)
S(x)
Solution analytique
La solution analytique de ce problème est facilement déduite de la résolution analytique, elle est représentée sur la Figure 6.3 ci-dessous et s’écrit :
ud x ρgx
u(x) =
−
(x − l)
(6.15)
l
2E
Pour la suite des applications numériques, nous considérons les valeurs suivantes pour les
grandeurs physiques du problème :
— longueur de la poutre l = 1 m
— section de la poutre h = 20 mm et b = 10 mm
— module d’Young du matériau constitutif E = 210 · 103 N.m−2
— masse volumique du matériau rho = 7, 8 · 103 kg.m−3
— accélération de la pesanteur g = 9, 8m.s−2
— déplacement imposé ud = 5 cm ;
Solution analytique
0.09
0.08
Déplacement (m)
0.07
0.06
0.05
0.04
0.03
0.02
0.01
0
0
0.2
0.4
0.6
0.8
1
x (m)
Figure 6.3: Solution analytique pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure
6.2.
Approximations numériques
6.3.2
152
Résolution par différences finies
La méthode des différences finies est une méthode de résolution directe, au même
titre que l’intégration analytique des équations. Cette méthode bien connue consiste à
remplacer les dérivations, soit les variations d’une quantité par rapport à une longueur ou
un temps élémentaire (infinitésimale), par des différences de cette même quantité évaluée
en des points précis éloignés d’une distance (d’un temps) finie connue. On effectue un
’découpage’ du problème à résoudre.
Dans notre cas, considérons n + 1 points également répartis le long de l’axe de la
poutre (entre x = 0 et x = l), tels que l’abscisse d’un point xi = i∆x (avec ∆x = nl
et i = 0, . . . , n) est connue à partir de l’indice i. En ces points xi , le déplacement, noté
ui , est recherché. Comme indiqué, cherchons à exprimer la différentielle totale d’ordre 2
caractérisant l’équilibre de notre problème aux points intérieurs du domaine (i = 1, ..n −
1) comme la différence de ces déplacements pris à des points distants de ∆x, soit une
différence centrée d’ordre 2. Finalement, notre problème s’écrit :
d
dx
du(x)
ES
+ ρgS = 0 , ∀x ∈ [0, l] et u(0) = 0, u(l) = ud
dx
n−1
X
ui+1 − 2ui + ui−1
ES
+ ρgS = 0 et u0 = 0, un = ud
2
∆x
i=1
(6.16)
Concernant les conditions aux limites, elles doivent être prises en compte directement dans le système à résoudre. Les conditions de Dirichlet sont prises en compte en
imposant la valeur donnée à l’inconnue au point correspondant. Ici, il s’agit de u0 = 0 et
un = ud . Si une condition de Neumann devait être imposée (N (l) = N d par exemple), il
faudrait alors raisonner à l’aide d’une différence finie prenant en compte la valeur connue
ES
la plus proche : u0 et u1 ou un−1 et un (N (l) = N d
(un − un−1 ) = N d ).
∆x
Finalement, le système discret à résoudre est linéaire, de la forme
−ui+1 + 2ui − ui−1 =
ρg
∆x2 ,
E
ce qui conduit au système algébrique de forme tribande suivant dont la résolution fournit
Approximations numériques
les déplacements ui :
1
0
0
−1 2 −1
0 −1 2
.
..
..
..
.
.
0
0
0
0
0
0
0
0
0
|
153
u0
u1
u2
..
..
..
..
..
·
. .
.
.
.
u
. . . 2 −1 0
n−2
un−1
. . . −1 2 −1
un
... 0
0
1
{z
}
| {z
[K]
·
{Q}
...
...
...
0
0
0
0
0
0
0
0
0
}
=
=
|
0
ρg
∆x2
E
ρg
∆x2
E
..
.
ρg
2
∆x
E
ρg
2
∆x
E
d
u
{z
}
{F }
(6.17)
La résolution de ce système fournit les solutions représentées sur la Figure 6.4 où
sont tracés les déplacements pour un nombre d’intervalles le long de la poutre correspondant à n = 5, n = 10, n = 20, et n = 50. On vérifie bien que la solution approchée
tend vers la solution exacte. La particularité ici est que la solution exacte est polynômiale d’ordre 2, donc assez facile à approcher. Si le calcul des contraintes est envisagé,
il est réalisé à partir de cette solution approchée en prenant des valeurs de déplacements
ponctuelles, les ui .
En conclusion, l’intégration par différences finies de ce problème simple peut donner
satisfaction, en notant que le système est à réécrire quand les conditions aux limites
changent. Par contre, pour des problèmes plus complexes, avec des variations fortes de la
réponse, la taille du problème pour aboutir à une convergence convenable peut devenir
conséquente puisqu’en toute rigueur on tend vers la solution réelle quand n tend vers
l’infini.
6.3.3
Méthodes de collocation
Les méthodes de collocation permettent de résoudre le problème initial, tel que
posé en 6.3 page 144, mais reformulé à l’aide des résidus pondérés (Eq. 6.4 page 144). Si
nous appliquons la même approche à notre cas particulier de barre, nous arrivons à la
formulation équivalente, utilisant un espace de fonctions test à définir et qui s’écrit :
Trouver une fonction u ∈ U (C.A.)/∀v ∈ V
Z
l
v·
0
d
dx
du(x)
ES
dx
+ ρgS
avec les conditions aux limites
u(0) = 0 et u(l) = ud
dx = 0
(6.18)
Il reste maintenant, dans cette formulation intégrale, à préciser l’espace V dans
lequel les fonctions test vont être choisies, ce qui conduira à une résolution par collocation
Approximations numériques
154
0.08
0.07
Déplacement (m)
0.06
Solution analytique
n=50
n=20
n=10
n=5
0.05
0.04
0.03
0.02
0.01
0
0
0.2
0.4
0.6
0.8
1
x (m)
Figure 6.4: Solution analytique et par différences finies pour le cas d’une poutre droite
correspondant à la Figure 6.2.
par point et collocation par sous-domaine, comme indiqué de façon générale précédemment.
Collocation par points
Pour résoudre, comme par différences finies nous allons réaliser un découpage de
la géométrie, et ramener la résolution en des points particuliers. Conservons le découpage
tel que la solution soit recherchée en n + 1 points également répartis le long de l’axe de
la poutre (entre x = 0 et x = l), d’abscisse xi = i∆x (avec ∆x = nl et i = 0, . . . , n)
connue à partir de l’indice i. Choisissons comme espace V des fonctions test, l’ensemble
→
des distributions de Dirac associé à ces points : V = {δ−
xi , i = 0..n}. La résolution consiste
donc à trouver une approximation de la fonction u(x) différentiable 2 fois, satisfaisant
−
→
→
les conditions aux limites, et annulant le résidu en chacun des points xi : R(→
u )|−
x =−
xi =
0, ∀i = 0..n. Puisqu’on travaille sur une approximation de u(x) et non pas sur des valeurs
ui comme dans le cas des différences finies par exemple, on obtient alors n + 3 équations
correspondant à l’équilibre écrit en les n + 1 points, complétés par les conditions aux
Approximations numériques
155
limites ; soit pour des propriétés constantes de la barre :
Z
l
0
du(x)
d
ES
+ ρgS dx = 0
v·
dx
dx
n
X
d2 u
ES 2 |xi + ρgS = 0 et u(x0 ) = 0 , u(xn ) = ud
dx
i=0
(6.19)
Si les grandeurs physiques dépendent de la position le long de la barre, elles seront donc
évaluées en les abscisses xi , les points de collocation.
Choisissons maintenant pour l’espace des solutions U l’espace des polynômes du
type u(x) = a0 + a1 x + . . . + ap xp . Compte-tenu des contraintes de dérivabilité fortes sur
cette solution, on doit au minimum avoir des polynômes d’ordre 2. Les 3 coefficients de ces
polynômes seront donc déterminés par les n + 3 relations, donc n = 0, ce qui correspond
à une collocation en un seul point. Il s’agit du minimum pour que l’approximation ait un
sens. Dans ce cas, le système à résoudre s’écrit :
1 0 0
0
a0
ρg
(6.20)
=
−E
a1
0 0 2 ·
d
2
u
a2
1 l l
on en déduit immédiatement la solution : a0 = 0, a1 =
x
solution exacte : u(x) = udl x − ρg
(x − l).
2E
ud
l
− a2 l et a2 = − 2ρgE soit la
De façon générale, l’espace U doit correspondre aux polynômes d’ordre n + 2 (avec
n ≥ 0 le nombre d’intervalles). Avec une approximation du type u(x) = a0 + a1 x + a2 x2 +
. . . + an+2 xn+2 le système à résoudre dépend bien des valeurs prises par les grandeurs
mises en jeu dans l’équation à résoudre, et notamment la dérivée seconde du déplacement
évaluée aux xi , il s’écrit :
a
1 0 0
0
...
0
0
0
ρg
0 0 2 6x1 . . . (n + 2)(n + 1)xn
−
a
1
E
1
ρg
−
..
.. .. ..
..
..
E
. . .
.
.
.
..
·
(6.21)
=
.
0 0 2 6xn . . . (n + 2)(n + 1)xnn
a
n
− ρg
E
ρg
0 0 2 6xn+1 . . . (n + 2)(n + 1)xnn+1
a
−
n+1
E
d
2
3
n
u
1 l l
l
...
l
an+2
Comme on peut le constater, le système est relativement mal conditionné (pas de
propriété remarquable de [K] comme pour les différences finies par exemple). De plus,
lorsque la géométrie devient complexe, la taille du système augmente considérablement,
ainsi que l’ordre des polynômes. On peut alors, par connaissance du problème, travailler
sur une distribution non-régulière de points dans les zones de fort gradient par exemple.
Approximations numériques
156
C’est d’ailleurs le choix de la position et du nombre de ces points où sont évaluées les
quantités qui peut être problématique. On notera enfin que dans ce type de méthode le
choix de l’approximation doit être consistante avec le choix du nombre de points, i.e.
il doit conduire à un système inversible, comportant donc un nombre de relations égal
au nombre de coefficients à identifier. Ici, le choix des polynômes d’ordre n + 2 permet
d’aboutir à un système de n + 3 équations à n + 3 inconnues.
Collocation par sous-domaines
Le découpage du domaine sur lequel le problème doit être résolu conduit ici à définir
des volumes de contrôle, ou des longueurs dans notre cas 1D. Comme précédemment, ces n
segments de longueur ∆x = nl sont délimités par les n+1 points d’abscisse xi−1 = (i−1)∆x
et xi = i∆x pour i = 1, . . . , n. Le déplacement ui supposé constant sur chaque longueur
de contrôle li = [xi−1 , xi ] sera supposé positionné en son centre. Comme indiqué en début
de ce chapitre, choisissons comme espace V des fonctions test V = {δΩi , i = 1..n}, soit
des fonctions tests constantes sur chaque sous-domaine et non nulles uniquement sur
ce sous-domaine. Finalement, la résolution consiste à trouver la distribution des ui (x),
satisfaisant les conditions aux limites, et annulant le résidu sur chaque sous-domaine li :
−
R(→
u )|Ω=Ωi = 0, ∀i = 1..n.
Les dérivées peuvent, par exemple, être calculées par différences finies. On rappelle que les fonctions de pondération sont choisies constantes sur chaque longueur de
contrôle. On obtient alors n équations linéaires qui expriment le résidu sur chaque sousdomaine. Si les grandeurs physiques (propriétés, chargement extérieur, . . .) dépendent de
la position sur chaque longueur de contrôle, il faut évidemment calculer les intégrales
correspondantes. Dans notre cas, le problème à résoudre formulé en 6.18 devient :
Z l
d
du(x)
v·
ES
+ ρgS dx = 0
dx
dx
0
(6.22)
n−1 Z xi
X
ui+1 − 2ui + ui−1
d
+ ρgS dx = 0 et u1 = 0, un = u
ES
2
∆x
x
i−1
i=2
qu’on exprime sous la forme d’un système linéaire intégrant les conditions aux limites
associées :
Approximations numériques
1
0
0 ...
−1 2 −1 . . .
0 −1 2 . . .
157
0
0
0
0
0
0
0
0
0
..
.
..
.
..
.
..
.
..
.
..
.
..
0
0
0
0
0
0
0
0
0
. . . 2 −1 0
. . . −1 2 −1
... 0
0
1
{z
|
.
u1
u2
u3
[K]
·
..
.
un−1
un
}
| {z
·
{Q}
}
R x2
x1
R
x3
x2
=
ρg
∆x
dx
E
ρg
∆x
dx
E
0
..
.
R xn−1 ρg
∆x dx
xn−2 E
ud
{z
|
=
{F }
(6.23)
}
Dans notre cas, les grandeurs sont constantes, et leur intégration conduit à un
second membre constant. Les résultats sont présentés sur la Figure 6.5. On vérifie que
plus le nombre de domaines augmente plus l’approximation tend vers la solution exacte.
Si les résultats semblent moins précis, à taille de système équivalente, que la collocation
par points par exemple, ce type d’approximation est pourtant fréquemment utilisée, ceci
pour 2 raisons essentielles. Tout d’abord, dans des cas complexes la collocation par sousdomaines est plus simple d’utilisation car plus systématique puisque les contraintes de
dérivabilité n’apparaissent pas ici, il n’y pas pas non plus de polynôme à choisir en fonction
du problème à résoudre. En second lieu, la collocation par sous-domaines conjugue une
formulation simple de type différences finies avec la notion de bilan par volume élémentaire
très répandu dans des domaines telles que la chimie ou la thermique où les inconnues
scalaires sont facilement manipulées connaissant les flux.
6.3.4
Méthode de Galerkin
Comme indiqué précédemment, la méthode de Galerkin telle qu’utilisée dans le
second exercice sur les plaques (§5.2.6 page 132), est à l’origine de la méthode par éléments
finis. Formulons notre problème de barre conformément à la formulation Eqs. 6.14
Trouver ũ ∈ U n tel que pour tout v ∈ V n :
Z l
0
dũ(x) dv(x)
−ES
+ ρgS v(x)
dx dx
dx = 0
avec U n = ũ ∈ H 1 ([0, l])/ũ = u⋆ + u , ∀ x ∈ [0, l], avec u ∈ V n et ũ(0) = 0 , ũ(l) = ud
et V n = {v ∈ H 1 ([0, l])/v(0) = v(l) = 0}
(6.24)
Voyons maintenant le choix qui peut être réalisé pour les espaces de dimension
finie U et V n .
n
Approximations numériques
158
0.08
0.07
Déplacement (m)
0.06
0.05
Solution analytique
n=20
n=50
n=100
0.04
0.03
0.02
0.01
0
0
0.2
0.4
0.6
0.8
1
x (m)
Figure 6.5: Solution analytique et par collocation par sous-domaines pour le cas d’une
poutre droite correspondant à la Figure 6.2.
Fonctions polynômiales
Le choix des bases de fonctions d’approximation, définissant les espaces U n et V n ,
est guidé par la contrainte de vérifier les conditions essentielles. Considérons, de façon
générale, que ces fonctions C.A. forment une approximation du type :
v(x) =
n
X
βi φi
(6.25)
i=1
où les βi sont n paramètres scalaires. La quantité à annuler correspondant au système
6.24 sous forme discrète devient alors la somme de n quantités :
Z l
n
X
dũ(x) dφ(x)i
i
−ES
βi
(6.26)
+ ρgS φ(x) dx = 0, ∀ βi
dx
dx
0
i=1
Ces n quantités devant s’annuler quelles que soient les fonctions tests, soit quels que soient
les coefficients βi , on abouti à n équations indépendantes en u(x) à résoudre. Choisissons
maintenant l’espace U n des fonctions d’approximation de la solution construites à partir
Approximations numériques
159
de la somme d’une solution particulière, vérifiant notamment les conditions aux limites
cinématiques, et de fonctions de l’espace des fonctions test V n , soit une approximation
du type de celle proposée de façon générale en 6.13, où les paramètres scalaires αi sont
les inconnues à déterminer :
ũ(x) = u⋆ +
n
X
αj φ(x)j
(6.27)
j=1
On notera que si le terme particulier u⋆ est une fonction de x, il dépend de données du
problème telles que des déplacement imposés, et sera donc présent dans le problème à
résoudre comme une partie du second membre. Ceci est illustré ci-dessous.
On aboutit finalement à un système linéaire carré symétrique de dimension n × n
avec les inconnues αj solution de :
n Z l
X
j=1
0
dφ(x)j dφ(x)i
ES
dx
dx
dx αj =
Z
l
i
ρgS φ(x) dx −
0
Z
l
ES
0
du⋆ (x) dφ(x)i
dx
dx
dx
(6.28)
Illustrons maintenant une des difficultés de cette méthode : le choix de la base
d’approximation. Dans notre cas particulier, les conditions aux limites cinématiques sont
u(0) = 0 et u(l) = ud . On doit donc considérer l’espace V n engendré par les polynômes
ayant pour racine x = 0 et x = l. Par exemple :
v(x) =
n
X
βi (x (x − l))i/2
(6.29)
i=1
où les βi sont n paramètres scalaires. Il en découle que l’approximation du champ réel
s’écrit :
n
X
ud x
ũ(x) = 2 (x + l) +
αj (x (x − l))j/2
2l
j=1
(6.30)
car ce champ doit être C.A et vérifier, notamment, u(l) = ud . Le système finalement
obtenu s’écrit donc :
Z l
n Z l
X
ij
i/2+j/2−2
2
ES
ρgS (x (x − l))i/2 dx
(2x − l) (x (x − l))
dx αj =
4
0
0
j=1
Z l
d
i u
(2x + l) (2x − l) (x (x − l))i/2−1 dx, ∀ βi
−ES
2
0 2 2l
(6.31)
Afin de simplifier les calculs, considérons le cas de cette même barre, mais dont
l’origine du repère est décalée de −l : 0
−l et l
0, et sur laquelle un effort Rd
d
gl
d’intensité ρ2E
+ ul est appliqué en x = −l. La solution dans ce cas est solution du
Approximations numériques
160
problème reformulé pour faire apparaître également le travail de l’effort terminal Rd affecté
−
d’un signe − car la normale sortante est orientée vers les →
x négatifs :
x ρgx
−
(x + l) .
(6.32)
u(x) = ud 1 +
l
2E
et la formulation intégrale faible devient :
Trouver ũ ∈ U n tel que pour tout v ∈ V n :
Z
0
−l
dũ(x) dv(x)
−ES
+ ρgS v(x)
dx dx
dx − Rd v(−l) = 0
avec U n = ũ ∈ H 1 ([0, l])/ũ = u⋆ + v , ∀ x ∈ [0, l], avec v ∈ V n et ũ(0) = ud
et V n = {v ∈ H 1 ([0, l])/v(0) = 0}
(6.33)
On vérifie que cet effort R appliqué en x = −l correspond bien à la condition u(−l) = 0.
Finalement, ceci nous donne comme condition essentielle u(0) = ud et comme condition
naturelle N (−l) = Rd . La condition C.A.(0) pour les fonctions tests, soit u(0) = 0 ici,
nous permet d’utiliser une approximation par des monômes xi (i = 1, . . . , n) :
d
v(x) =
n
X
βi xi
(6.34)
i=1
La quantité à annuler correspondant au système 6.33 sous forme discrète devient alors la
somme de n quantités :
n
X
βi
i=1
Z
0
−l
dũ(x)
−ES
i xi−1 + ρgS xi
dx
d
dx − R (−l)
i
=0
(6.35)
L’espace U n est construit à partir de fonctions C.A. complétées par des fonctions issues
de l’espace des fonctions test V n , soit :
ũ(x) = ud +
n
X
α j xj
(6.36)
j=1
où les paramètres scalaires αi sont les inconnues à déterminer. En introduisant cette approximation dans l’expression (6.35) valable pour tout coefficient βi , on aboutit finalement
à un système linéaire carré symétrique de dimension n × n :
n Z
X
j=1
0
ES j i x
−l
i+j−2
dx αj =
Z
0
ρgS xi dx − Rd (−l)i
−l
(6.37)
Approximations numériques
161
ou encore, sous une forme proche de celle des approximations précédentes :
Z 0
Z 0
Z 0
Z0
n−1
Rd
ρg
nx
dx
2x
dx
.
.
.
dx
x
dx
−
(−l)
α1
ES
−l E
Z 0−l
Z−l0
Z −l
0
Z 0
n
2
Rd
ρg 2
α
2nx
dx
4x
dx
.
.
.
2x
dx
2
x dx −
(−l)2
E
ES
−l
−l
−l
−l
·
.. =
..
..
..
..
...
.
.
.
.
.
Z
Z 0
Z 0
Z 0
α
0
ρg n
Rd
n
2 2n−2
n
n−1
x dx −
(−l)n
n x
dx
2n x dx . . .
nx
dx
ES
| {z }
−l E
|
{z
−l
−l
| −l
{z
}
[K]
·
{Q}
=
{F }
(6.38)
avec les composantes des matrices du système discret :
Z 0
ES j i xi+j−2 dx
Kij =
−l
Qi = α i
Z 0
ρgS xi dx − Rd (−l)i
Fi =
(6.39)
−l
La résolution de ce système conduit aux résultats présentés sur la Figure 6.6 cidessous. Pour n = 1, soit une approximation linéaire, on ne vérifie que les conditions aux
limites évidemment, et pour n = 2, on retrouve la solution exacte qui est parabolique
(Eq. 6.32).
On voit que la convergence vers la solution exacte dépend de la dimension n des
espaces choisis. Les avantages de cette méthode sont nombreux. En premier lieu, elle permet de proposer une écriture assez systématique pour les grandeurs [K] et {F }. D’autre
part le système obtenu est symétrique défini positif, ne posant donc pas de problème
particulier pour être résolu par des solveurs directs standards. Par contre, pour des problèmes même simples, on peut arriver rapidement à des systèmes de taille conséquente.
La prise en compte de gradients, ou d’effets locaux, est notamment difficile avec ce type
d’approches car l’interpolation doit être suffisamment riche, ce qui implique que la taille
du système croît extrêmement rapidement. D’autre part, dans le cas de problèmes bi ou
tri-dimensionnels la recherche de solution approchée vérifiant les conditions aux
limites essentielles s’avère souvent impossible. Pour pallier à ces inconvénients,
l’utilisation de polynômes d’ordre élevé peut être remplacée par l’utilisation de plusieurs
fonctions définies sur des sous-domaines. Ceci correspond notamment à la méthode des
éléments finis étudiée ci-dessous.
Méthode de Ritz
Pour être complet, il faut indiquer qu’une méthode aboutissant au même système
(Eq. 6.38) est souvent rencontrée dans la littérature sous le nom de méthode de Ritz
}
Approximations numériques
162
0.08
0.07
Déplacement (m)
0.06
Solution analytique
n=1
n=2
0.05
0.04
0.03
0.02
0.01
0
−1
−0.8
−0.6
−0.4
−0.2
0
x (m)
Figure 6.6: Solution analytique et par approximation polynômiale dans la méthode de
Galerkin pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure 6.2.
(W. Ritz, mathématicien suisse, 1878-1909). Cette méthode est utilisée sous le nom de
Ritz-Galerkin en mécanique et dans une procédure itérative nommée Rayleigh-Ritz en dynamique/physique des ondes. Dans le cas qui nous intéresse, cette méthode variationnelle
consiste à rechercher la solution réelle dans un espace de dimension finie U n en partant
de l’énergie du système, soit l’énergie potentielle π(u) dans notre cas. L’approximation
de la solution est introduite dans cette énergie, et la solution qui rend stationnaire cette
énergie est celle qui annule sa première variation. On aboutit finalement à n équations à
n inconnues, équivalent au même système que celui de l’Eq. 6.26, et finalement au même
système carré défini positif que celui de la méthode de Galerkin (Eq. 6.37) :
Approximations numériques
π(u) ≃ π(ũ)
δπ(ũ) =
163
∂π(ũ)
δũ = 0, ∀δũ ∈ V n
∂αi
∂π(ũ)
= 0, i = 1, . . . , n
∂αi
!
!
!!
!
Z 0
n
n
n
X
X
X
∂
d
1
d
⇔
α i xi
αj xj − ρgS
ES
dx − Rd (−l)i = 0
α i xi
∂αi 2 −l
dx i=1
dx j=1
i=1
Z 0
j=n Z 0
X
ρgS xi dx − Rd (−l)i , i = 1, . . . , n
ES j i xi+j−2 dx αj =
⇔
⇔
j=1
−l
−l
⇔ (Eq. 6.37, Galerkin)
(6.40)
6.3.5
De la méthode de Galerkin aux éléments finis
Partant de cette méthode de Galerkin, nous allons dans un premier temps lever
une des difficultés qui porte sur l’ordre élevé de l’approximation, en travaillant sur des
sous-domaines sur lesquels l’approximation peut être plus basique. Conservons pour cela
le découpage utilisé pour la collocation par sous-domaine, et tel que la barre soit l’union
de n segments de longueur lx = nl délimités par n + 1 points. Afin de travailler sur ces
sous-domaines, l’espace des fonctions test est composé de fonctions continues qui varient
linéairement sur chaque segment li = [xi−1 , xi ], comme présenté sur la Figure 6.7 et définies
telles que :
x−x
i−1
si xi−1 ≤ x ≤ xi
lx
xi+1 − x
Ni (x) =
si xi ≤ x ≤ xi+1
lx
0 sinon
(6.41)
On notera que n + 1 fonctions sont générées ainsi, en prolongeant aux extrémités les
fonctions telles que N1 (−l) = Nn+1 (0) = 1, soit x0 = −(l + lx ) et xn+2 = lx .
L’espace des fonctions test choisi doit assurer que les fonctions sont C.A.(0)(v(0) =
Nn+1 (0) = 0 ici), prenons les niemes première fonctions Ni (x) (i = 1, . . . , n) :
v(x) =
n
X
βi Ni (x)
(6.42)
i=1
L’approximation d’ordre n ainsi obtenue est formée de la combinaison linéaire de valeurs
v1 , v2 , . . . , vn prises par les fonctions aux points x1 , x2 , . . . , xn . Entre ces points, la fonction
est interpolée linéairement par construction des fonction Ni (x). La quantité à annuler
représentant l’équilibre s’écrit alors :
Z 0
n
X
dũ(x) dNi (x)
−ES
βi
+ ρgS Ni (x) dx − Rd N1 (−l) = 0, i = 1, . . . , n
dx
dx
−l
i=1
(6.43)
Approximations numériques
164
Figure 6.7: Fonctions linéaires par morceaux.
l’information sur l’effort terminal apparaissant naturellement en x = −l, c’est-à-dire en
produit avec la fonction N1 (x) définie telle que N1 (−l) = 1. Comme précédemment, on
introduit dans cette quantité nulle pour tout βi l’approximation du champ solution qui est
de la forme ’champ C.A.’ + ’approximation issue de V n ’, où le champ C.A. est représenté
par le terme u⋆ = Nn+1 (x)ud avec Nn+1 (x) définie telle que Nn+1 (0) = 1 :
ũ(x) = Nn+1 (x)ud +
n
X
uj Nj (x)
(6.44)
j=1
où les paramètres scalaires ui sont les inconnues à déterminer. En introduisant cette
approximation dans l’expression 6.43 on aboutit finalement à un système linéaire carré
symétrique de dimension n × n de la forme du système 6.38 :
Z 0
n Z 0
X
dNj (x) dNi (x)
ES
ρgS Ni (x) dx − Rd N1 (−l), i = 1, . . . , n
dx uj =
dx
dx
−l
−l
j=1
(6.45)
ou encore, sous une forme proche de celle des approximations précédentes :
n
X
Kij Qj = Fi ,
i = 1, . . . , n
(6.46)
j=1
avec les composantes des matrices du système discret :
Z 0
dNj (x) dNi (x)
ES
Kij =
dx
dx
dx
−l
Z 0
ρgS Ni (x) dx − Rd N1 (−l)
Fi =
−l
Qi = ui ,les déplacements aux abscisses xi
(6.47)
Si on construit ce système, les calculs des composantes Kij et Fi se font en prenant
en compte le domaine de définition des fonctions de l’espace test V n . Ces fonctions sont
Approximations numériques
165
en effet définies telles que Ni (x) 6= 0 pour x ∈ [xi−1 , xi+1 ]. Les intégrales sont donc définies
sur ce même intervalle de longueur 2 lx et non plus sur toute la poutre. On se ramène
bien à une résolution locale. Par exemple :
Z 0
dNj (x) dNi (x)
ES
dx
Kij =
dx
dx
−l Z
(6.48)
min(xj+1 ,xi+1 )
dNj (x) dNi (x)
dx
= ES
dx
dx
max(xj−1 ,xi−1 )
car les fonctions sont définies par morceaux, comme illustré sur la Figure 6.8 ci-dessous.
Figure 6.8: Distribution des fonctions d’approximation pour notre problème de poutre.
En utilisant la définition des fonctions d’approximation (Eq. 6.41), on calcule les
termes de la matrice de rigidité. Par exemple, pour les premières fonction de forme
N1 (x)/x ∈ [x1 , x2 ] et N2 (x)/x ∈ [x1 , x3 ] :
Z x2
dN1 (x) dN1 (x)
dx
K11 = ES
dx
dx
x1
ES
=
lx
K22 = ES
= ES
Z
x3
Zx1x2
x1
2 ES
=
lx
Z
x2
dN2 (x) dN2 (x)
dx
dx
dx
Z x3
dN2 (x) dN2 (x)
dN2 (x) dN2 (x)
dx + ES
dx
dx
dx
dx
dx
x2
dN1 (x) dN2 (x)
dx
dx
dx
x
1
Z x2
−1
1
dx
= ES
lx
lx
x1
−ES
=
lx
K12 = ES
(6.49)
Approximations numériques
166
et ceux du vecteur des efforts extérieurs :
Z 0
ρgS N1 (x) dx − Rd N1 (−l)
F1 =
Z−lx2
x2 − x
− Rd
=
ρgS
l
x
x1
= ρgS l2x − Rd
(6.50)
Z
0
ρgS N2 (x) dx − Rd N2 (−l)
Z−lx2
Z x3
x − x2
x3 − x
ρgS
=
ρgS
dx +
dx
lx
lx
x1
x2
F2 =
= ρgSlx
On voit que les seuls termes non nuls de la matrice de rigidité, ceux pour lesquels
une partie de l’intervalle de définition des fonctions Ni (x) et Nj (x) est commun, sont les
termes de type |i − j| ≤ 1. Une explication ’mécanique’ peut être donnée à ceci, il s’agit
de l’assemblage des rigidités définies sur chaque intervalle, ce que nous verrons dans la
suite. Finalement, le système à résoudre est un système tri-diagonale de la forme :
1 −1 0 . . .
−1 2 −1 . . .
0
0
0
0
0
−1
2
...
0
0
..
.
..
.
..
.
..
.
..
.
..
.
... ... ... ...
2
−1
. . . . . . . . . . . . −1
2
·
u1
u2
u3
..
.
un−1
un
=
2
1 ρglx
2 E
−
2
ρglx
E
2
ρglx
E
..
.
2
ρglx
E
2
1 ρglx
2 E
R d lx
ES
(6.51)
Comme précédemment on vérifie sur la Figure 6.9 que plus la dimension de l’espace d’approximation est grande, plus on approche la solution exacte. Cette approximation correspond à une approximation de type éléments finis qui présente les mêmes
avantages qu’une approche de type Galerkin, i.e. conduit à un système carré symétrique
défini positif. Par contre une telle approche présente un double avantage par rapport
aux autres approximations : le découpage, ou maillage, du domaine étudié permet de
diminuer le degré des fonctions d’approximation par rapport aux approximations polynômiales recherchées sur le domaine d’étude, et les coefficients solution ont une signification
physique directement interprétable par l’ingénieur, il s’agit des valeurs prises par l’approximation du champ solution aux noeuds du maillage puisqu’en ces points les fonctions
Approximations numériques
167
0.08
0.07
Déplacement (m)
0.06
0.05
Solution analytique
n=2
n=5
n=10
0.04
0.03
0.02
0.01
0
−1
−0.8
−0.6
−0.4
−0.2
0
x (m)
Figure 6.9: Solution analytique et par éléments finis pour le cas d’une poutre droite correspondant à la Figure 6.2.
d’approximation sont unitaires. Enfin, le recours aux intégrations numériques permet de
rendre systématique l’utilisation de cette technique, ces intégrations numériques sont très
souvent du type intégration de Gauss.
Il reste, afin de rendre l’utilisation de ce type d’approximations plus ’intuitif’, à
donner un sens physique aux grandeurs intervenant dans l’équilibre écrit sur le domaine,
et considérés sur chaque sous-domaine. De plus, les conditions aux limites de Dirichlet,
qui peuvent s’avérer problématique à prendre en compte dans les cas complexes, doivent
être traitées de façon plus systématique. Une vision de ce type est proposée ci-dessous.
Les éléments finis en mécanique des structures
La méthode des éléments finis, pour être utilisable ’en routine’ doit être systématique dans son écriture, son implémentation, et son utilisation. Illustrons cela sur la
formulation d’un élément fini de barre en tension correspondant au problème de notre
barre soumise à son propre poids.
Approximations numériques
168
Soit un élément de barre défini par ses abscisses x1 et x2 et les déplacements u1
et u2 correspondants mesurés en ces points. On choisit, indépendamment des conditions aux limites de Dirichlet, une interpolation linéaire pour le déplacement, i.e. le
déplacement à l’intérieur de l’élément (x ∈ [x1 , x2 ]) est une combinaison linéaire des
déplacements nodaux u1 et u2 :
u(x) = u1 N1 (x) + u2 N2 (x)
= < N1 (x) , N2 (x) > ·
(
u1
u2
)
(6.52)
= < N (x) > · {u}
Ce type d’approximation basé sur la valeur du déplacement nodal nous assure également
que le déplacement est continu entre 2 éléments contigüs.
Pour des raisons de commodité de stockage, et également pour assurer une bonne
précision des intégrations numériques des quantités élémentaires, il est classique de recourir à un élément de référence. Cet élément fictif possède une géométrie fixe permettant
de ne pas faire apparaître explicitement les bornes d’intégration de l’élément réel dans les
calculs et également de s’assurer que la géométrie sur laquelle ces calculs sont réalisés ne se
déforme pas, ce qui assure une qualité optimale des intégrations numériques. Considérons
cet élément de référence défini pour la variable ξ ∈ [−1, 1] tel que présenté sur la Figure
6.10 ci-dessous.
Figure 6.10: Définition de l’élément réel et de l’élément de référence.
Dans ce cas, le passage entre l’élément réel et l’élément de référence se fait en
écrivant la position sur l’élément réel comme la combinaison linéaire des positions connues
aux extrémités de l’élément, soit :
x(ξ) = x1 N1 (ξ) + x2 N2 (ξ)
(6.53)
ce qui équivaut à une interpolation géométrique linéaire, tout comme l’interpolation en
déplacements. L’élément fini que nous formulons ici est dit isoparamétrique. Les expressions de ces fonctions d’interpolation s’établissent aisément en écrivant que d’après 6.52,
Approximations numériques
169
on a :
u(x1 ) = u1 N1 (−1) + u2 N2 (−1) = u1
u(x2 ) = u1 N1 (1) + u2 N2 (1) = u2
(6.54)
soit des fonctions d’interpolation :
ξ−1
N1 (ξ) = −
2
N2 (ξ) = ξ + 1
2
(6.55)
Revenons maintenant au problème de notre barre telle que présentée sur la Figure
6.2 page 150. Lorsque nous formulons l’élément fini, nous cherchons à résoudre le problème
de l’équilibre de cette barre dans son ensemble, écrit dans les Eqs. 6.24, et plus précisément
l’expression :
Z 0
dũ(x) dv(x)
+ ρgS v(x) dx = 0 , ∀v C.A.(0)+ cond. limites
−ES
dx dx
−l
Introduisons, comme dans la méthode de Galerkin, l’approximation du champ test v
dans cette expression. Cette approximation est de la forme proposée dans l’Eq.6.52, où
les déplacements nodaux u1 et u2 se réfèrent aux déplacements mesurés aux extrémités
de chacun des éléments de longueur le . Comme la barre est maintenant maillée par des
éléments de longueur le , l’intégrale sur la barre devient égale à la somme des intégrales
des grandeurs définies pour chaque élément e :
)!
(
Z
d
dũ(x)
v
1
dx . . .
< N1 (x) , N2 (x) > ·
−E e S e
dx
dx
e
v
2
l
(6.56)
)!
(
Z
v
1
dx
ρe gS e < N1 (x) , N2 (x) > ·
... +
e
v
2
l
Les conditions aux limites de Dirichlet et de Neumann seront introduites ultérieurement
dans le système. Pour simplifier les écritures, supposons que les grandeurs physiques ne
varient pas sur la longueur de l’élément. En introduisant enfin l’approximation de u(x)
par la même interpolation linéaire, nous aboutissons au système caractérisant l’équilibre
d’un élément :
)T
)
(
Z (
d
d
v
u
1
1
−E e S e
dx . . .
< N1 (x) , N2 (x) >T
< N1 (x) , N2 (x) >
dx
dx
v2
u2
le
)T Z
(
v
1
< N1 (x) , N2 (x) >T dx = 0 ,
. . . + ρe gS e
v2
le
)T
(
v1
C.A.(0)+ cond. limites + cond. raccord
∀
v2
(6.57)
Approximations numériques
170
Considérant que notre poutre est maillée avec des éléments numérotés de 1 à n et
que les n + 1 degrés de liberté correspondants sont numérotés de façon à ce que l’élément
i ait pour extrémités xi et xi+1 , l’équilibre discrétisé de notre poutre s’écrit :
−E 1 S 1
Z
x2
x1
(
(
v1
v2
)T
d
d
< N1 (x), N2 (x) >T
< N1 (x), N2 (x) >
dx
dx
(
u1
u2
)
dx
)T
)
(
d
d
u
2
dx . . .
−E 2 S 2
< N1 (x), N2 (x) >T
< N1 (x), N2 (x) >
dx
dx
u3
x2
)T
)
(
Z xn+1
d
d
v
u
n
n
< N1 (x), N2 (x) >T
< N1 (x), N2 (x) >
−E n S n
dx
dx
dx
un+1
vn+1
xn
)T
Z x2 (
v
1
+ρ1 gS 1
< N1 (x), N2 (x) >T
v2
x1
)T
Z x3 (
v
2
< N1 (x), N2 (x) >T . . .
+ρ2 gS 2
v3
x2
)T
(
Z xn+1
v
n
< N1 (x), N2 (x) >T dx = 0 , ∀{v}T C.A.(0)+ cond. limites
+ρn gS n
vn+1
xn
(6.58)
On voit bien, dans cette formulation que les noeuds ’intermédiaires’ vont contribuer 2
fois à la rigidité et aux efforts appliqués sur l’ensemble. Ceci rejoint la remarque sur les
intégrations des éléments de la matrice de rigidité dans la méthode de Galerkin (Eqs.
6.49 page 165) ci-dessus, où cette contribution apparaissait naturellement au travers du
domaine de définition des fonctions d’approximation. Ici, les éléments finis sont intuitivement assemblés par rapport aux degrés de liberté communs. Le système qui en découle
est très simple, tridiagonal symétrique carré et défini positif, identique aux conditions aux
limites prés au système issu de l’approximation de Galerkin (Eqs. 6.51 page 166) puisque
les interpolations sont linéaires également.
Z
x3
v2
v3
(
Notons que l’assemblage des grandeurs élémentaires, en 2D et 3D ou plus généralement dés que les connectivités deviennent multiples, ne conduit pas à ce type de système
car les noeuds peuvent être communs à plusieurs éléments. Il s’agit alors de stocker les
grandeurs globales du système de façon à minimiser la largeur de bande, caractéristique
du nombre d’inversions à effectuer pour calculer la solution.
Comme nous utilisons un élément de référence pour généraliser les calculs, définis-
Approximations numériques
171
sons les grandeurs élémentaires calculées sur un élément de longueur le :
Déplacements nodaux
Rigidité
Efforts extérieurs
qie = ui
Kije
Fie
e
= E S
e
Z
xi +1
Zxi1
dNj (ξ) dNi (ξ)
dx
dx
dx
dNj (ξ) dNi (ξ) 2
dξ
dξ
dξ
le
= E eS e
−1
E eS e
si i = j
le
=
e e
− E S si i 6= j
lZe 1
e
l
e e e
dξ
Ni (ξ)
= ρg S
2
−1e
l
= ρe g e S e
2
(6.59)
Figure 6.11: Barre en tension modélisée avec 2 éléments finis.
Posons le système à résoudre pour une discrétisation en 2 éléments de notre barre
en tension soumise à son propre poids, tel que sur la Figure 6.11-a. Les conditions aux limites du problème avec changement d’origine sont N (−l) = Rd et u(0) = ud . La condition
aux limites de Neumann est introduite directement dans le système puisque la contribution de cet effort ponctuel agit comme un force extérieure produisant un travail dans
le déplacement u1 . Comme dans le cas de la méthode de Galerkin, cette condition de
Neumann est prise en compte très facilement. La condition de Dirichlet est quant à elle
prise en compte par élimination, avec une méthode vue ci-après. Le système avec effort
terminal s’écrit donc :
1
−1
0
u1
E eS e
−1 1 + 1 −1 u2
le
u = ud
0
−1
1
3
e
e le
d
ρ gS 2 − R
=
ρe g e S e l e
ρe g e S e l e
2
(6.60)
La longueur le des éléments étant égale à la demi-longueur de la poutre réelle, et les
propriétés matériaux et géométriques étant les mêmes pour ces éléments, notre système
Approximations numériques
devient :
1 −1 0
u1
−1 2 −1 u2
u = ud
0 −1 1
3
172
l 2
1
2 ρg 2 −
2
=
ρg 2l
1
l 2
ρg
2
2
Rd l
ES 2
(6.61)
ce qui correspond bien au système (6.51) obtenu précédemment, en définissant des fonctions de forme locales sur chaque sous-domaine. Mais ici la présentation de la méthode
permet une approche plus physique, puisque les grandeurs globales que sont la rigidité et
le chargement extérieur peuvent être vues simplement comme la somme des contributions
de chaque élément à l’ensemble.
Il reste enfin à prendre en compte la condition aux limites de Dirichlet qui ici n’est
pas incluse dans l’espace des solutions. Pour simplifier les choses, revenons au problème
initial de la Figure 6.11-b tel que u(0) = 0 et u(l) = ud . Soit, en termes de degrés de
liberté (ddl) : u1 = 0 et u3 = ud . La condition homogène peut être traitée en réduisant
le système, i.e. en éliminant les contributions relatives à ce degrés de liberté. On obtient
bien une solution à ce problème qui n’est plus singulier puisqu’un mouvement de corps
rigide est bloqué, ce qui assure de pouvoir solliciter la structure. Mais dans les codes de
calcul industriels, l’assemblage des grandeurs élémentaires est une opération coûteuse, et
redimensionner le système obtenu est très rarement employé. On préférera garder la taille
du système en annulant les contributions correspondants au ddl et le terme diagonal à
l’unité :
1 0
0
u
0
1
l2
=
(6.62)
−1 u2
ρg 4
0 2
2
0 −1 1
u3 = ud
ρg l8
Dans le cas de conditions non-homogènes, on peut procéder de plusieurs façons, et notamment par élimination. Il s’agit de la solution la plus directe que nous utiliserons ici pour
des raisons de clarté, mais qui dans les codes industriels n’est jamais employée pour les
raisons de redimensionnement évoquées précédemment. On préférera plutôt procéder par
pénalisation (ou méthode du terme diagonal dominant) ou en introduisant des inconnues
supplémentaires appelées Multiplicateurs de Lagrange, le principe étant d’introduire des
grandeurs équivalentes aux efforts de réaction produits par ces ddls imposés.
De façon générale, si nD conditions de Dirichlet sont imposées, le système à résoudre
−
possède (en 3D), 3n − nD ddl car le champ test est C.A.(0) (équilibre ∀→
v C.A.(0)), i.e.
les déplacements imposés sont annulés. Ceci conduit à annuler le travail virtuel des efforts
de réaction. Considérons plutôt le cas où ce champ test est simplement C.A. L’équilibre
s’écrit alors :
(
) (
)T (
)
(
)
(
)T
T
[K
]
[K
]
bl
ll
{u
}
{v
}
{F
}
{v
}
{vl }
l
l
l
l
T
−
−{vb } {Rb } = 0 , ∀
C.A.
{ub }
{vb }
{Fb }
{vb }
{vb }
[K ] [K ]
bl
bb
où les termes de rigidité relatifs aux ddls libres notés {ul } sont regroupés dans une sousmatrice [Kll ] et un vecteur des efforts extérieurs connus {Fl }. De la même façon, les termes
Approximations numériques
173
relatifs aux nD ddls imposés notés {ub } sont regroupés dans la sous-matrice [Kbb ] et un
vecteur des efforts extérieurs connus {Fb } complété par les efforts de réaction {Rb }. La
sous-matrice [Kbl ] relie les contributions ’croisées’ des ddls imposés et inconnus.
La solution recherchée {ul } est donc solution de :
[Kll ] {ul } = {Fl } − [Kbl ]T {ub }
avec {ub } = ud . Dans notre cas, la condition u3 = ud conduit à résoudre :
K22 u2 = F2 − K23 ud
d
l2
⇔ u2 = ρg 8E
+ u2
soit la solution exacte en x =
sur la Figure 6.9 page 167.
l
2
(pour mémoire u(x) =
ud x
l
(6.63)
− ρgx
(x − l)) tel que représenté
2E
Pour information, l’utilisation d’une pénalité pour assurer u3 = ud reviendrait à
imposer une réaction R3 = α ud − u3 avec α un scalaire à choisir grand (de l’ordre de
105−8 , ou plus généralement ≫ max(Kij )). Le travail des efforts de réaction étant nul, la
condition sera d’autant mieux vérifiée que α sera grand. Par contre le système sera alors
mal conditionné car en introduisant ces efforts de réaction, le système à résoudre est :
(
) (
)
[Kbl ]T
[Kll ]
{Fl }
{ul }
=
(6.64)
{ub }
{Fb } + α ud
[Kbl ] [Kbb ] + α [I]
On remarquera par ailleurs que les réactions introduites n’apparaissent plus dans ce système final où α peut être assimilé à une rigidité.
6.4
Conclusions sur les méthodes numériques en mécanique des structures
On vient de voir, à travers un exemple simple, que la méthode des éléments finis
est la méthode idéale pour le dimensionnement dans une démarche de conception de
structures. Cette méthode s’appuie sur des méthodes générales plus anciennes mais qui
peuvent s’avérer assez lourdes, même pour des cas simples.
Par contre, il ne faut pas oublier que le dimensionnement des systèmes mécaniques
fait de plus en plus appel à des simulations multi-physiques dans lesquels diverses méthodes numériques peuvent être combinées. C’est d’ailleurs ces approches combinées qui
donnent lieu, aujourd’hui, au plus gros effort en simulation numérique chez les industriels.
Ces méthodes complexes et faisant appel à des calculs de grandes taille sur des calculateurs parallèle ou distribués, vont bien au-delà de l’objectif de cette courte introduction,
mais les principes de base restent les mêmes : résolution des équations de conservation
Approximations numériques
174
de masse, d’énergie, d’espèce chimique, de quantité de mouvement, ... Avec la question
de fond qui doit rester dans l’esprit de tout ingénieur : quelle est la qualité (représentativité) de la solution obtenue ? Une première idée peut être proposée à travers une solution
analytique du type de celles vues en début de ce document, ensuite des tests de convergence et stabilité doivent être conduits. Mais ceci relève des cours spécifiques du master
Mécanique et Ingénierie, parcours Modélisation et Simulation Numérique ...
Approximations numériques
175
7.
Rappels - Éléments et Principes de la
mécanique
Sommaire
7.1
7.2
Rappel sur les torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177
7.1.1
Définition d’un torseur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
177
7.1.2
Produit scalaire de deux torseurs . . . . . . . . . . . . . . . . .
178
7.1.3
Dérivation d’un torseur dans un repère mobile . . . . . . . . . .
178
Calcul variationnel
7.2.1
Extremum d’une intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
180
7.2.2
Condition d’Euler-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
181
7.2.3
Cas où la dérivée seconde intervient . . . . . . . . . . . . . . .
182
7.2.4
Importance des conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . .
183
7.2.5
Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en temps
et en espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
183
7.2.6
7.3
7.4
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I 185
Cinétique - Dynamique - Énergétique . . . . . . . . . . . . . . 185
7.3.1
Moments et autres caractéristiques du mouvement des corps . .
185
7.3.2
Théorème de Huygens-Koënigs . . . . . . . . . . . . . . . . . .
187
7.3.3
Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes . . . . . . . .
188
7.3.4
Cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
189
7.3.5
Dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
192
7.3.6
Principe Fondamental de la Dynamique . . . . . . . . . . . . .
192
7.3.7
Théorème de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . .
194
Principe des puissances virtuelles - P P V - et lien avec les
autres principes de la mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
7.4.1
Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour les
systèmes discrets . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
195
7.4.2
Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets . . . .
198
7.4.3
Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs
. . . . .
199
7.4.4
Principe de Hamilton pour les systèmes continus . . . . . . . .
201
176
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.4.5
7.5
7.1
7.1.1
177
Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans les
milieux continus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
206
Concepts de stabilité des équilibres . . . . . . . . . . . . . . . . 209
7.5.1
Stabilité des équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
209
7.5.2
Définition d’un équilibre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
210
7.5.3
Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre
. . .
210
7.5.4
Stabilité d’un équilibre paramétrique . . . . . . . . . . . . . . .
211
7.5.5
Linéarisation des énergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
213
Rappel sur les torseurs
Définition d’un torseur
Un torseur se définit en un point P et dans un repère (R) par ses éléments de
→
−
−
→
réduction qui sont la résultante ( R B ) et le moment (M B ) associé. La propriété essentielle
est que le moment, lorsqu’il est exprimé en un point différent, en un point A par exemple,
devient :
−
→
−
→
−→ →
−
M A = M B + AB ∧ R B
→
−
Par exemple le champ de vitesse V (P ∈ S) d’un solide (S) dans son mouvement
par rapport à un repère de référence (R0 ) est connu à travers le torseur cinématique
→
−
→
−
suivant, d’éléments de réduction Ω (S/R0 ) et V (P, S/R0 ), exprimé au point P de (S) :
→
−
Ω (S/R0 )
{VS }(P,S/R0 ) =
→
−
−−→ →
−
V (P, S/R0 ) = P M ∧ Ω (S/R0 )
(P,S/R0 )
Dans la suite, les torseurs seront supposés exprimés par rapport au repère de référence
du mouvement, ici R0 , et explicités dans ce même repère afin d’alléger les notations. Si ce
torseur est transporté au point A, la résultante reste inchangée mais le moment résultant
devient :
→
−
→
−
−→ →
−
V (A, S/R0 ) = V (P, S/R0 ) + AP ∧ Ω (S/R0 )
Le torseur cinématique exprimé en ce point devient alors :
→
−
Ω (S/R0 )
{VS }(A,S/R0 ) =
→
−
→
−
−→ →
−
V (A, S/R0 ) = V (P, S/R0 ) + AP ∧ Ω (S/R0 )
(A,S/R0 )
Ces propriétés, et celles énoncées ci-dessus, du torseur cinématique sont générales
et s’appliquent sans aucune restriction aux torseurs des efforts (statiques), torseur cinétique, dynamique, ou encore dans le cas des poutres aux torseurs des déformations ou des
contraintes.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.1.2
178
Produit scalaire de deux torseurs
On montre trés facilement (Eqs. 7.1 ci-dessous) que le produit de 2 torseurs se
ramène aux produits croisés des éléments de réductions des torseurs. Il en découle donc
que ce produit est indépendant du point où sont exprimés les 2 torseurs. Prenons par
exemple le produit du torseur des efforts par le torseur des déformations, soit l’équivalent
de l’énergie de déformation pour une poutre (voir §1.4.2, Chapitre 1, Théorie des poutres) :
{τM (x1 )} . {ǫM (x1 )} =
→
−
R (x1 )
=
−−→
−
→
−−→ →
−
MM (x1 ) = M (x1 ) + M G ∧ R (x1 )
→
−′
→
−
−−→
= R (x1 ).−
e→
M (x1 ) + MM (x1 ). r (x1 )
.
(M )
→
−
r (x1 )
−′
−−→ →
→
−
e→
−
M (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ r (x1 )
−
→
−
−
→
−
−−→ →
→
−−→ →
−
−
= R (x1 ). →
e (x1 ) + M G ∧ r′ (x1 ) + M (x1 ) + M G ∧ R (x1 ) r′ (x1 )
→
−−→ →
−−→ →
−
−′
→
−
−
→
−
→
−
→
−
→
−
= R (x1 ). e (x1 ) + R (x1 ). M G ∧ r (x1 ) + M G ∧ R (x1 ) . r′ (x1 ) +M (x1 ). r′ (x1 )
{z
}
|
→
−
→
−
−
→
−
= R (x1 ).→
e (x1 ) + M (x1 ). r′ (x1 )
=0
(7.1)
7.1.3
Dérivation d’un torseur dans un repère mobile
On démontre, à partir d’éléments de calculs tensoriels, que la dérivée d’un torseur
par rapport à un repère mobile s’écrit, par exemple pour les déformations {ǫM (x1 )} :
(M )
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
179
d
{UM }
dx1
→
−
r (x1 )
d
=
−−→ →
−→
→
−
−
dx1
uM (x1 ) = u (x1 ) + M G ∧ r (x1 )
{ǫM (x1 )} =
(M )
d →
−
dx r (x1 )
1
=
−−→
d
d →
−
−
−
−
u→
u (x1 ) + →
x1 ∧ →
r (x1 ) + M G ∧
M (x1 ) =
dx1
dx1
→
−′
r
(x
)
1
=
−′
−−→ →
→
−
e→
−
M (x1 ) = e (x1 ) + M G ∧ r (x1 )
−
d →
r (x1 )
dx1
(M )
(M )
(7.2)
pour les détails de la démonstration, on pourra se référer à l’ouvrage de
P.Germain&P.Muller, référencé en début de ce cours. L’illustration peut se faire avec
le torseur des actions intérieures d’une poutre écrit au centre de gravité de la section
courante,
→
−
R
(x
)
1
{τ (x1 )}(G) =
−
→
M (x1 )
(G)
En considérant les éléments de réduction en un point O fixe, la dérivée s’exprime en ce
même point O :
−
d →
dx R (x1 )
d
1
{τ (x1 )}(O) =
→
→
−
−→
−
d −
d →
dx1
−
M (x1 ) + →
x1 ∧ R (x1 ) + OG ∧
R (x1 )
dx1
dx1
(O)
Ce qui conduit aux éléments de réduction de la dérivée du torseur des efforts internes,
exprimé en G et tel que présenté au §1.6.1 dans la théorie des poutres :
→
−′
R (x1 )
d
(7.3)
{τ (x1 )}(G) =
−→
→
−
−
dx1
x1 ∧ R (x1 )
M ′ (x1 ) + →
(G)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.2
180
Calcul variationnel
Le calcul variationnel, ou calcul des variations, est une branche de l’analyse fonctionnelle qui consiste à rechercher des solutions conduisant à un optimum (maximum
ou minimum) d’un fonctionnelle, une fonction de fonction à valeur réelle. C’est un outil
puissant qui permet de caractériser une famille de solution, i.e. admissible au sens des
restrictions qui doivent être vérifiées en termes de régularité (C 1 ) et de conditions aux limites, naturelles (Neumann) et essentielles (Dirichlet) en mécanique des milieux continus
- voir Les Principes Variationnels par M. Bonvalet, collection Principes Mathématiques
de la Physique - 2, Ed. Masson 1993.
Ce type d’approche permet, par exemple, de caractériser une famille d’approximations dans les méthodes d’homogénéisation (cf support de cours de Mécanique des
Composites Hautes Performances). Plus de détails peuvent être trouvés dans d’autres
branches de la physique, par exemple dans l’ouvrage de M. Bonvalet cité ci-dessus.
7.2.1
Extremum d’une intégrale
On cherche l’extremum d’une intégrale de la forme :
Z x2
Φ(y, y ′ , x)dx
I (y(x)) =
(7.4)
x1
avec comme conditions aux limites y(x1 ) = 0 et y(x2 ) = 0. Ce problème est dit problème
de Lagrange, et nous comprendrons rapidement pourquoi dans la suite où il s’agira de
minimiser le Lagrangien d’un système, avec des conditions aux extrémités fixes.
On cherche parmi toutes les fonctions ȳ(x) possibles, celles qui conduisent à une
valeur extrêmale de I (y(x)). On note y(x) la famille des fonctions qui réalisent cet extrêmum. On peut exprimer toutes les fonctions possibles ȳ(x) en fonction des y(x), modulo
une famille de fonctions arbitraires η(x) :
ȳ(x) = y(x) + αη(x)
(7.5)
où α est une constante.
On voit clairement que la fonctionnelle I réalise un minimum lorsque la valeur
induite par la partie arbitraire η(x) de ȳ(x) est nulle. Dit autrement, la fonctionnelle
Ψ(α) = I(y(x) + αη(x)) vérifie l’inégalité (choisissons par commodité la notion de minimum pour l’extremum de cette fonctionnelle arbitraire) :
Ψ(0) ≤ Ψ(α)
pour tout α assez petit.
(7.6)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
181
On aura donc un minimum de I lorsque α est nul, ou encore la dérivée par rapport
à α est nulle quand α est nul (en réalité tend vers 0) :
(
dI
(ȳ(x))
η(x1 ) = 0
et les C.L.
(7.7)
δI = Ψ′ (0) =
dα
η(x2 ) = 0
α→0
ce qu’on peut également réécrire sous une forme plus classique, en introduisant un développement de Taylor
δI = lim
α→0
I (y(x) + αη(x)) − I(y(x))
α
= 0 et les C.L.
(
δy(x1 ) = 0
δy(x2 ) = 0
On définit ainsi la notion de variation, et on peut réécrire ȳ(x) = y + δy(x). En
introduisant cette notation, on peut désormais utiliser le formalisme habituel du calcul
différentiel (7.8) où δy est associé à y mais n’est pas sa différentielle ; elle représente
une famille de fonctions proches (voir figure 7.2.1). Finalement, le calcul des variations
de l’intégrale permet de rechercher "simplement" une fonction dont la forme conduit à
réaliser un extrêmum sur l’intervalle donné.
∂f
∂f
1
′
δy + ′ δy ′
f = k(y 2 + y 2 ) ⇒ δ(f ) =
2
∂y
∂y
= k(yδy + y ′ δy ′ )
(7.8)
— dy est un accroissement correspondant à y(x + dx) =
y(x) + dy
— δy est la valeur que prendra
une fonction voisine, en l’occurrence y +δy, pour une valeur unique de la variable x.
7.2.2
Condition d’Euler-Lagrange
En reportant dans l’expression de I (7.4), la forme générale des fonctions à tester
(7.5), on obtient une forme de I qui peut être développée selon le théorème de Taylor-Mac
Laurin en supposant que y et y ′ sont des fonctions indépendantes (voir 7.2.6) :
Z x2
Z x2
Z x2
∂Φ
∂Φ ′
′
′
′
η(x) + ′ η (x) dx +T.O.S.
Φ(y, y , x)dx + α
Φ(y + δy, y + δy , x)dx =
∂y
∂y
x1
x1
x1
⇔ I(ȳ) =
I(y)
+
δI(y, δy)
(7.9)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
182
avec le dernier terme δI qui est appelé première variation de I, et qui peut se réécrire par
intégration par parties en fonction des conditions aux limites :
Z x2
∂Φ
∂Φ ′
δI =
δy + ′ δy dx
∂y
∂y
x1
x2
Z x2
d ∂Φ
∂Φ
∂Φ
=
δy dx + α
−
η(x)
(7.10)
∂y
dx ∂y ′
∂y ′
x1
x1
x2
Z x2
d ∂Φ
∂Φ
∂Φ
δy dx +
δy
−
=
∂y
dx ∂y ′
∂y ′
x1
x1
Notons la propriété suivante,
Z appelée également Lemme fondamental du calcul
t2
des variations : Si l’intégrale
f (t) δf (t) dt est nulle pour toute fonction δf (t)
t1
continue et nulle au voisinage de t = t1 et t = t2 , alors la fonction f (t) est identiquement
nulle si elle est continue.
En repartant de l’expression précédente de la première variation de I, fonctionnelle
à minimiser, et avec les conditions aux limites précisées en (7.7), pour que I (y(x)) soit
extremum, il est nécessaire et suffisant que δI soit nul en tout point du domaine, donc :
∂Φ
d ∂Φ
= 0 (Condition d’Euler- Lagrange)
−
∂y
dx ∂y ′
7.2.3
(7.11)
Cas où la dérivée seconde intervient
I (y(x)) =
Z
x2
Φ(y, y ′ , y ′′ , x)dx
(7.12)
x1
aprés 2 intégrations par parties successives, on obtient la forme suivante de la première
variation de δI :
x2
Z x2
d ∂Φ
∂Φ
∂Φ
δy dx + α
η(x)
−
δI =
∂y
dx ∂y ′
∂y ′
x1
x1
x2
x2
Z x2 2
∂Φ ′
d ∂Φ
d ∂Φ
δy dx + α
η (x)
η(x)
−α
+
2
′′
∂y ′′
dx ∂y ′′
x1 dx ∂y
x1
x1
x
Z x2
2
∂Φ ′ 1
d ∂Φ
d ∂Φ
∂Φ
d ∂Φ
∂Φ
δy dx +
δy + ′′ δy
+
−
−
=
∂y
dx ∂y ′ dx2 ∂y ′′
∂y ′ dx ∂y ′′
∂y
x1
x2
= 0
(7.13)
ce qui conduit à la condition d’Euler-Lagrange suivante :
∂Φ
d2 ∂Φ
d ∂Φ
+
=0
−
∂y
dx ∂y ′ dx2 ∂y ′′
(7.14)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
183
et aux conditions aux limites associées :
∂Φ
d ∂Φ
|(x1 ,x2 ) = 0
−
∂y ′ dx ∂y ′′
∂Φ
|(x ,x ) = 0
∂y ′′ 1 2
7.2.4
(7.15)
Importance des conditions aux limites
Traitons le cas d’une barre homogène en flexion statique. Sans entre dans les détails,
l’énergie de déformation d’un tel système s’écrit sous la forme :
Z l
′′ 2
ky − 2ρy dx
(7.16)
I (y(x)) =
0
où y est un déplacement transverse à la poutre, k est une rigidité et ρ est une masse
linéique. Après intégrations par parties, la première variation de I est :
Z l
l
(ky ′′′′ − ρ) δydx + [−ky ′′′ (x)δy(x) + ky ′′ (x)δy ′ ]0
(7.17)
δI (y(x)) =
0
Ainsi, l’extrêmum de I conduit à vérifier que cette première variation est nulle en
tout point du domaine. On voit que le premier terme de cette expression, qui correspond à
la condition d’Euler-Lagrange (7.14), est bien nulle en tout point de ]0, l[, par conséquent
on a une équation du quatrième ordre en y à résoudre ce qui implique la connaissance
de 4 conditions aux limites. Comme l’expression de δI doit être nulle, les termes de bord
doivent donc s’annuler également pour toutes "fonctions test" δy et δy ′ . On a donc les
termes de bord, conformément à l’expression générale de (7.20), qui doivent s’annuler :
l
δI (y(x)) = [−ky ′′′ (x)δy(x) + ky ′′ (x)δy ′ ]0
soit au total quatre conditions portant soit sur y ′′ (x) ou y ′′′ (x) ou bien sur la fonction
test δy(x) ou δy ′ (x) qui, on le rappelle, sont supposées indépendantes (voir 7.2.6).
"Il ressort immédiatement de l’observation des situations précédentes que le calcul
des variations présente la précieuse caractéristique de mettre spontanément en évidence
le nombre exact de conditions aux limites auxquelles il est nécessaire de satisfaire, ce qui
est un élément de contrôle souvent très précieux dans le traitement de problèmes."
7.2.5
Cas d’une fonctionnelle faisant intervenir des dérivées en
temps et en espace
Dans le cas du principe d’Hamilton (cf §7.4.4 page 201), le Lagrangien du système fait intervenir des dépendances en espace et en temps. Nous proposons d’établir la
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
184
condition de minimisation d’Euler-Lagrange pour ce cas :
Z t 2 Z l
′
′
I (y(x)) =
Φ(y, y , ẏ, ẏ , x) dx dt
t1
(7.18)
0
La première variation de I est :
Z t 2 Z x2
∂Φ ′ ∂Φ
∂Φ ′
∂Φ
δy + ′ δy +
δ ẏ + ′ δ ẏ dx dt
δI (y(x)) =
∂y
∂y
∂ ẏ
∂ ẏ
x1
t1
(7.19)
En effectuant l’intégration par parties en espace,
Z t 2 Z x2
∂Φ
∂ ∂Φ
∂ ∂Φ
∂Φ
δI (y(x)) =
δy +
δ ẏ dx dt
δy −
δ ẏ + −
∂y
∂x ∂y ′
∂ ẏ
∂x ∂ ẏ ′
t1
x1
x1
Z t2
∂Φ
∂Φ
+
δy + ′ δ ẏ
dt
∂y ′
∂ ẏ
t1
x2
= 0
(7.20)
puis l’intégration par parties en temps :
Z t 2 Z x2
∂ ∂Φ
∂
∂ ∂Φ
∂ ∂Φ
∂Φ
−
+
δy dx dt
−
δI (y(x)) =
∂y
∂x ∂y ′
∂t ∂ ẏ
∂t ∂x ∂ ẏ ′
t1
x1
"
x1
t 1 # x1
Z t2
∂Φ
∂Φ
∂ ∂Φ
+
δy
dt +
δy −
δy
∂y ′
∂t ∂ ẏ ′
∂ ẏ ′
t1
x2
t2
x2
= 0
(7.21)
ce qui conduit à la condition de minimisation de d’Euler-Lagrange :
∂ ∂Φ
∂
∂Φ
∂ ∂Φ
∂ ∂Φ
−
= 0, ∀t, ∀x
+
−
∂y
∂x ∂y ′
∂t ∂ ẏ
∂t ∂x ∂ ẏ ′
(7.22)
et aux conditions aux limites associées, sachant que le champ virtuel est nul aux instants
t1 et t2 , ce qui annule le dernier terme de l’expression 7.21 :
x2
∂Φ
∂ ∂Φ
= 0, ∀t
(7.23)
δy −
∂y ′
∂t ∂ ẏ ′ x1
Si, de plus, des conditions sont imposées sur la valeur de la fonctionnelle à ses
bornes en espace du type [Φ(y, y ′ , ẏ, ẏ ′ , x)y]xx21 , comme c’est la cas par exemple dans les
solides de type barres, cordes, et poutres, pour les efforts et moments terminaux, les
conditions aux limites ci-dessus (7.23) sont complétées et deviennent :
x
∂Φ
∂Φ 2
∂ ∂Φ
+
−
= 0, ∀t
(7.24)
∂y ′ ∂t ∂ ẏ ′
∂y x1
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.2.6
185
Remarque : Indépendance des formes de y dans la fonctionnelle I
Le problème physique posé avec cette formulation a pour solution la fonction y(x)
dont la dérivée y ′ (x) dépend, bien évidemment. Quelle est alors l’hypothèse, si hypothèse
il y a, qui permet de supposer que y et y ′ sont indépendantes ?
On étudie maintenant le cas d’une fonctionnelle F qui dépend de y et d’une autre
forme de y, notée g(y). On a alors la différentielle de la fonctionnelle :
dF =
∂F (y, g(y), x)
∂F (y, g(y), x) dg(y)
dy +
dy
∂y
∂g(y)
dy
(7.25)
dy
= y ′ , alors la différentielle de
si, par exemple, g(y) est la différentielle telle que g(y) =
dx
F devient :
∂F (y, g(y), x)
∂F (y, g(y), x) d dy
dF =
dy +
dy
dy
∂y
dy dx
∂
(7.26)
dx
∂F (y, g(y), x)
∂F (y, g(y), x) ′
dy +
dy
=
∂y
∂y ′
par extension (7.7), il vient naturellement :
δI =
∂F (y, g(y), x)
∂F (y, g(y), x) ′
δy
δy +
∂y
∂y ′
(7.27)
Sans supposer aucune indépendance de y(x) et y ′ (x), on arrive naturellement aux
résultats connus (7.10). Il n’y a donc aucune hypothèse physique sous jacente, et cette
démarche calculatoire peut s’appliquer de façon systématique à toute fonctionnelle dépendant de n’importe quelle forme de fonctions.
7.3
7.3.1
Cinétique - Dynamique - Énergétique
Moments et autres caractéristiques du mouvement des
corps
On étudie un solide (S) dans son mouvement par rapport au repère de référence
(R0 ).
Centre d’inertie
Le centre d’inertie G d’un solide (S) de masse m est défini par :
Z
Z
−→
−→
−→
GP dm = 0
OP dm en particulier
mOG =
(S)
(S)
(7.28)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
186
Tenseur d’inertie d’un ensemble matériel
Le tenseur d’inertie du solide, ou système de solides, (S) est défini par :
Z
−→ −→ →
→
−
I(0, S). u =
OP ∧ (OP ∧ −
u )dm
(7.29)
(S)
−
−
où le vecteur →
u (→
x ) est un vecteur arbitraire. Si par exemple, ce vecteur est la vitesse de
−
rotation du solide S par rapport au repère R0 , →
ω (S/R0 ), alors l’expression 7.29 correspond
au moment cinétique du système, telle que définie en 7.36 ou encore telle qu’utilisée dans
le calcul de l’énergie cinétique (7.40 par exemple).
Dans un repère orthonormé, le tenseur d’inertie est représenté par la matrice symétrique suivante :
Z
Z
Z
2
2
xz dm
xy dm
−
(y + z ) dm
−
(S)
(S)
(S) Z
Z
Z
2
2
−
xy
dm
(x
+
z
)
dm
−
yz
dm
(7.30)
I(0, S)(R0 ) =
(S)
(S) Z
(S)
Z
Z
−
xz dm
−
yz dm
(x2 + y 2 ) dm
(S)
(S)
(S)
(R0 )
ou encore :
avec
Ixx
−Ixy −Ixz
I(0, S)(R0 ) = −Ixy Iyy −Iyz
−Ixz −Iyz Izz
(7.31)
(R0 )
−→
— Ixx , Iyy , et Izz les moments d’inertie, respectivement par rapport à l’axe Ox, à
−→
−
→
l’axe Oy et l’axe Oz
— Ixy , Iyz , et Ixz les produits d’inertie, ou moments produits, respectivement par
−→ −→ −→ −
→ −→ −
→
rapport aux axes Ox et Oy, Oy et Oz, Ox et Oz
Les moments peuvent être calculés par rapport à un plan de référence, ou bien
encore par rapport à une droite ou à un point de référence. Par rapport à un plan de référence, les moments d’inertie deviennent, par exemple par rapport au plan yOz (d’équation
x = 0) :
Z
x2 dm
I(S/x = 0) =
(S)
par conséquent le moment d’inertie Ixx est :
Z
(y 2 + z 2 )dm = I(S/y = 0) + I(S/z = 0)
Ixx (O, S) =
(S)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
187
Également, le moment d’inertie par rapport à l’origine O du repère (R0 ), appelé moment
d’inertie polaire, s’écrit :
Z
(x2 + y 2 + z 2 )dm = I(S/x = 0) + I(S/y = 0) + I(S/z = 0)
I0 (S/O) =
(S)
= Ixx (O, S) + Iyy (O, S) + Izz (O, S)
= trace(I(0, S))
Le tenseur d’inertie de (S) par rapport à une droite (∆), correspondant donc à un
mouvement de rotation est donné par :
h
i
−
−
u . I(0, S).→
I(S/∆) = →
u
R0
−
où →
u est un vecteur unitaire porté par la droite (∆). Partant de cette définition, on peut
définir les axes principaux d’inertie d’un solide (S), tels que dans le repère généré par
ces axes le tenseur d’inertie I(O, S) est diagonal. Un tel repère est généré par la base de
vecteurs propres du tenseur d’inertie.
7.3.2
Théorème de Huygens-Koënigs
Ce théorème permet d’exprimer, entre autres choses, le tenseur d’inertie I(0, S)
d’un solide (S) de masse M (S) relativement à O, origine du repère (R0 ), en fonction du
tenseur d’inertie I(G, S) du même solide exprimé par rapport à son centre d’inertie G,
appelé tenseur central d’inertie :
2
2
yG + z G
−xG yG −xG zG
2
2
I(0, S)(R0 ) = I(G, S)(R0 ) + M (S) −xG yG xG + zG −yG zG
(7.32)
2
−xG zG −yG zG x2G + yG
(R0 )
Cette relation peut également se mettre sous la forme suivante :
−→
−→ −→
I(O, S) = I(G, S) + M (S)(OG2 Id − OG ⊗ OG)
Par exemple pour un cas plan tel que décrit dans la Figure 7.1, les moments et
produits d’inertie par rapport à O l’origine du repère s’écrivent en fonction de grandeurs
exprimées par rapport au centre de gravité G et en fonction de la position de G. Dans le
−→
cas le plus simple, sur Oy par exemple, on a :
2
Iyy (O, S) = IY Y (G, S) + M (S)zG
Iyz (O, S) = IY Z (G, S) − M (S)yG zG
2
2
I0 (S/0) = IG (G, S) + M (S)(x2G + yG
+ zG
)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
188
Figure 7.1: Section dans le plan (Oyz) et repère local (GYZ) associé
7.3.3
Tenseurs d’inertie pour des géométries courantes
Figure 7.2: Solides courants : barre de masse m et longueur 2ℓ et disque de masse m et
rayon R
Voici quelques exemples de tenseurs d’inertie pour des solides de géométries courantes. Pour une barre de masse m et de longueur 2ℓ dont l’axe est confondu avec l’axe
−→
Ox du repère (R0 ) et dont le centre de gravité est confondu avec l’origine du repère (R0 )
(figure 7.2) :
I(0, barre)(R0 )
0
0
2
0 mℓ
=
3
0
0
0
0
2
mℓ
3
(R0 )
(7.33)
Pour un disque de masse m et de rayon R dont l’axe de révolution coïncide avec
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
−
→
l’axe Oz du repère (R0 ) (voir figure 7.2) :
I(0, disque)(R0 )
mR2
2
= 0
0
189
0
mR
2
0
0
2
0
mR2
et pour un cerceau de même masse et même rayon, on a :
I(0, cerceau)
7.3.4
(R0 )
=
(7.34)
(R0 )
1
I(0, disque)(R0 )
2
(7.35)
Cinétique
Rappel : torseur cinématique
Comme introduit en début de ce chapitre, un torseur se définit en un point P et
dans un repère (R) par ses éléments de réduction qui sont la résultante et le champ des
→
−
moments associé. Le champ de vitesse V (P ∈ S) d’un solide (S) dans son mouvement par
rapport à un repère de référence (R0 ) est connu à travers le torseur cinématique suivant,
→
−
→
−
d’éléments de réduction Ω (S/R0 ) et V (P, S/R0 ), exprimé au point P de (S) :
→
−
Ω
(S/R
)
0
{VS }(P,S/R0 ) =
→
−
−−→ →
−
V (P, S/R0 ) = P M ∧ Ω (S/R0 )
(P,S/R0 )
Dans la suite, les torseurs seront supposés exprimés par rapport au repère de référence
du mouvement, ici R0 , et explicités dans ce même repère afin d’alléger les notations. Si ce
torseur est transporté au point A, la résultante reste inchangée mais le moment résultant
devient :
→
−
→
−
−→ →
−
V (A, S/R0 ) = V (P, S/R0 ) + AP ∧ Ω (S/R0 )
Remarque Les mêmes définitions s’appliquent aux champs de vecteurs définis en tout
→
−
point M du domaine. Si Ω (S/R0 ) est une densité vectorielle volumique, on aura
Z
→
−
Ω
(M
∈
S/R
)dS
0
S
Z
{VS }(P,S/R0 ) =
−−→ →
−
P M ∧ Ω (M ∈ S/R0 )dS
S
(P,S/R0 )
Torseur cinétique
Les éléments de réduction (composantes) du torseur cinétique, aussi appelé torseur
des quantités de mouvement, dans le mouvement du système (S) par rapport au repère
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
190
de référence (R0 ), sont définis de la manière suivante au point A quelconque (7.36). La
résultante est appelée quantité de mouvement ou résultante cinétique, et le moment est
appelé moment cinétique :
Z
→
−
→
−
V (P ∈ S/R0 )dm
C (S/R0 ) =
(S)
Z
{CS }(A,S/R0 ) =
(7.36)
−→ →
−
→
−
AP ∧ V (P ∈ S/R0 )dm
H (A, S/R0 ) =
(S)
(A,S/R0 )
→
−
où V (P ∈ S/R0 ) désigne la densité massique de vitesse au point P , appartenant au solide
(S), dans son mouvement par rapport au référentiel (R0 ). En se plaçant en un point A
du repère (R0 ), et en introduisant le repère central d’inertie (RG ) dont l’origine est G et
→
−
→
−
dont les axes sont colinéaires aux axes de base du repère (R0 ), i.e. Ω (RG /R0 ) = 0 , les
éléments de réduction du torseur cinétique deviennent :
→
−
→
−
C
(S/R
)
=
M
V
(G
∈
S/R
)
0
0
{CS }(A,S/R0 ) =
→
−
→
−
−→
→
−
H (A, S/R0 ) = H (G, S/RG ) + AG ∧ M (S) V (G ∈ S/R0 )
(A,S/R0 )
(7.37)
Cette dernière expression permet de poser que :
— la quantité de mouvement du système est égale à celle du centre d’inertie G
affecté de la masse totale M du système,
— le moment cinétique par rapport à un point A est la somme de son moment
cinétique par rapport à G, centre d’inertie, dans le mouvement du système
autour de G, et du moment cinétique par rapport à A de la masse totale M (S)
supposée concentrée en G. Cette dernière propriété découle du théorème de
Koënig.
Énergie cinétique
Expressions générales Par définition l’énergie cinétique T (S/R0 ) du système (S) par
rapport au repère (R0 ) est la quantité suivante :
Z
→
−2
1
V (P ∈ S/R0 )dm
(7.38)
T (S/R0 ) =
2 (S)
Cette définition s’étend sans difficulté au cas d’un système de solides, constitué de
→
−
N masses ponctuelles mk situées aux points Pk , animés de vitesses V (Pk ∈ S/R0 ) par
rapport au référentiel (R0 ) :
T (S/R0 ) =
N
−
1 X →
mk V 2 (Pk ∈ S/R0 )
2 k=1
(7.39)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
191
et si le système (S) apparaît comme la réunion de plusieurs sous-ensembles disjoints,
tels que (S) = S1 ∪ S2 ∪ . . . ∪ SN , l’énergie totale se déduit des énergies cinétiques des
sous-ensembles :
T (S/R0 ) = T (S1 /R0 ) + T (S2 /R0 ) + . . . + T (SN /R0 )
Expressions par rapport à un point quelconque Dans le cas d’un système solide,
→
−
le champ de vitesse V (P ∈ S) est connu à travers le torseur cinématique de (S) dans son
mouvement par rapport à (R0 ) : {VS }(A,S/R0 ) . En introduisant, dans la définition générale
de l’énergie cinétique (7.38), l’expression générale du champs de déplacement au sein du
solide (S), on obtient l’expression suivante de l’énergie cinétique calculée en un point
quelconque P .
→
−
→
−
−
1 h →
M V 2 (P ∈ S/R0 ) + 2M V (P ∈ S/R0 ) Ω (S/R0 ) · I(G, S)
T (S/R0 ) =
2
i
→
−
→
−
+ Ω (S/R0 ) · I(P, S) · Ω (S/R0 )
(7.40)
Un cas particulier très utile correspond à un point P fixe. Alors, seule la composante
de rotation dans le mouvement de (S) par rapport à (R0 ) est à l’origine de l’existence de
l’énergie cinétique :
→
−
−
1→
Tp (S/R0 ) = Ω (S/R0 ) · I(P, S) · Ω (S/R0 )
2
Expression en fonction du centre d’inertie L’énergie cinétique peut s’exprimer
en fonction de la vitesse du centre d’inertie et de la rotation du solide (S) dans son
mouvement par rapport à (R0 ) :
−
→
−
→
−
1→
1
M V 2 (G ∈ S/R0 ) + Ω (S/R0 ) · I(G, S) · Ω (S/R0 )
T (S/R0 ) =
2
2
(7.41)
→
−2
1
M V (G ∈ S/R0 ) + TG (S/R0 )
=
2
ce qui se met également sous la forme de produits de torseurs :
→
→
−
−
M
V
(G,
S/R
)
Ω (S/R0 )
0
1
T (S/R0 ) =
·
→
−
→
−
2
I(G, S) · Ω (S/R0 )
V (G, S/R0 )
(G,S/R0 )
1
{CS }(G,S/R0 ) · {VS }(G,S/R0 )
=
2
(G,S/R0 )
Cette dernière expression (7.41) correspond à l’application du théorème de Koënig
dans le cas de l’énergie cinétique : l’énergie cinétique totale du solide S est égale à la
somme de l’énergie cinétique dans son mouvement autour de son centre d’inertie, et de
l’énergie cinétique développée par la translation de sa masse M totale concentrée en G.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.3.5
192
Dynamique
Torseur dynamique
Le torseur dynamique est aussi appelé torseur des quantités d’accélération. Il est
−
défini en fonction de la distribution massique des accélérations →
γ (P ∈ S/R0 ) de la manière suivante :
Z
→
−
→
−
D (S/R0 ) =
γ (P ∈ S/R0 )dm
(S)
Z
(7.42)
{DS }(A,S/R0 ) =
−→ →
→
−
−
AP
∧
γ
(P
∈
S/R
)dm
K
(A,
S/R
)
=
0
0
(S)
(A,S/R0 )
Le moment dynamique du mouvement de (S) par rapport au repère (R0 ) s’exprime éga→
−
lement en tout point A de (S) en fonction du moment cinétique H (A, S/R0 ) défini précédemment. Pour un solide de masse invariante :
→
−
→
−
−
→
−
d H (A, S/R0 ) →
K (A, S/R0 ) =
+ V (A, S/R0 ) ∧ C (A, S/R0 )
(7.43)
dt
Cette expression se simplifie si le point A est fixe par rapport au repère du mouvement (R0 )
→
−
→
−
( V (A, S/R0 ) = 0 ), et donc au centre d’inertie G du système. Ce torseur des quantités
d’accélération se simplifie et s’écrit en fonction du torseur cinétique :
→
−
→
−
D C (S/R0 )
→
−
=
M
γ
(G
∈
S/R
D
(S/R
0)
0) =
Dt
(7.44)
{DS }(G,S/R0 ) =
→
−
→
−
D
H
(G,
S/R
)
0
K (G, S/R0 ) =
Dt
(G,S/R0 )
en notant que la dérivée étant relative au repère du mouvement, une expression eulérienne
D
pour ces formulations locales nécessite d’introduire une dérivée particulaire notée Dt
cf support de cours de J. Bruchon Mécanique des Milieux Continus dans la Majeure
Mécanique 2014-2015.
7.3.6
Principe Fondamental de la Dynamique
L’énoncé du PFD permet de relier directement l’ensemble des efforts extérieurs
(voir remarque ci-dessous) appliqués à un système en mouvement {τext→S }(A,S/R0 ) par
rapport à un repère (R0 ), au torseur des quantités d’accélération galliléennes {DSa }(A,S/R0 )
de ce système :
Principe Fondamental de la Dynamique
{τext→S }(A,S/R0 ) = {DSa }(A,S/R0 )
(7.45)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
193
Forces fictives
Si le repère (R0 ) du mouvement n’est pas galliléen 1 le torseur des efforts extérieurs
doit inclure les forces dites fictives qui dérivent de la loi de composition des accélérations
et qui peuvent être classées dans les forces à distances au même titre que les efforts
volumiques produits par l’attraction gravitationnelle par exemple.
En effet, le PFD s’énonce en prenant comme accélération l’accélération dite absolue
−
ou accélération galliléenne (→
γ a ). Il est donc nécessaire, lorsque le mouvement n’est pas
galliléen, de prendre en compte les forces d’inertie dues à l’accélération d’entraînement
−
−
(→
γ e ) et la force de Coriolis (→
γ c ) qui se déduisent de la loi de composition des accélérations.
Soit le PFD prenant en compte ces forces fictives lorsqu’elles existent :
−
−
−
{τext→S }(G,S/R0 ) + {−m →
γ e (G ∈ S/R0 )} + {−m →
γ c (G ∈ S/R0 )} = {m →
γ r (G ∈ S/R0 )}
(7.46)
Ce système d’équations (7.46), un peu plus général que le P F D (7.45) est également
appelé Équations universelles de l’équilibre et du mouvement.
Théorèmes de la quantité de mouvement et du moment cinétique
En se limitant aux cas où l’équilibre est considéré en un point fixe par rapport au
repère du mouvement (R0 ), le torseur des actions dynamiques {DSa } est directement égal
à la dérivée par rapport au temps du torseur cinétique (7.44).
D
{CS }(A,S/R)
(7.47)
Dt
De plus, pour des systèmes (S) de contenu invariable, cette nouvelle forme du P F D
(7.47) donne deux équation vectorielles respectivement appelées Théorème de la quantité
de mouvement (7.48-a) et Théorème du moment cinétique (7.48-b). Comme précédemment, les forces fictives doivent être introduites dans le torseur des actions extérieures si
le repère du mouvement (R0 ) n’est pas galliléen. On peut noter que seul le théorème du
moment cinétique impose que le point auquel il est appliqué soit fixe par rapport au repère
du mouvement, le théorème de la quantité de mouvement s’appliquant sur la résultante
indépendante du point considéré :
{τext→S }(A,S/R) =
→
−
X→
−
d C (S/R0 )
F ext→S (M ) =
dt
→
−
X−
→→
−
d H (A, S/R0 )
M ( F ext→S (M ), A) =
dt
(7.48a)
(7.48b)
1. des axes de référence galliléens sont définis à une translation rectiligne uniforme près par rapport
à l’un d’entre eux choisi en particulier
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.3.7
194
Théorème de l’énergie cinétique
Pour un système (S) constitué de partitions, la puissance totale développée par ce
système dans son mouvement par rapport à un repère de référence (R0 ) conduit à l’expression du théorème de l’énergie cinétique. En première approximation, cette expression
est le PFD en produit avec le champ des vitesses qui règne dans chaque partition du
système. On a ainsi un équilibre entre la puissance développée par les efforts extérieurs
Pext (S/R0 ) et les efforts dérivant de l’énergie cinétique. Les efforts internes à chaque
partition Pint (S/R0 ) et inter-partitions Pdef f (S/R0 ) étant également considérés.
Finalement, pour toute partition d’un système, la somme des puissances des forces
extérieures au système et des forces intérieures relatives à la partition envisagée, dans
le mouvement réel, est égale à la dérivée par rapport au temps de l’énergie cinétique
du système augmentée de la somme des puissances des déformations entre les différentes
parties du système :
Pint (S/R0 ) + Pext (S/R0 ) =
D T (S/R0 ) X
+
Pdef f (S/R0 )
Dt
(7.49)
Dans le mouvement autour du centre d’inertie le théorème de l’énergie cinétique s’applique sans introduire d’autres forces que celles que l’on doit considérer dans le repère du
mouvement (R0 ), i.e. aucune force fictive d’origine inertielle.
7.4
Principe des puissances virtuelles - P P V - et lien
avec les autres principes de la mécanique
Le principe des puissances virtuelles - P P V - est un outil extrêmement puissant,
qui permet notamment d’expliciter les conditions d’équilibre et de stationnarité d’un système. Des formulations écrites en termes de potentiels (externe, interne, de dissipation),
telles que le principe de Hamilton peuvent être utilisées dans les cas de systèmes conservatifs et/ou dont les efforts dérivent d’un potentiel, et dans un cadre linéaire géométrique
et matériaux. Par contre, le P P V offre une écriture beaucoup plus générique. L’expression du P P V devient alors la base de l’écriture d’un équilibre, et peut correspondre sous
certaines conditions vérifiées par le champs virtuel, à la formulation faible du problème
écrit en déplacements ou en efforts. Ce principe sera d’abord introduit sur des systèmes
discrets puis étendu aux systèmes continus, dynamiques puis statiques.
Remarques : Les notions utilisées ici sur les systèmes discrets - liaisons holonômes, paramétrisation de Lagrange, structure de l’énergie cinétique, ...- sont détaillées dans le support de cours Dynamique des Solides et des Structures disponible à
l’adresse http://www.emse.fr/~drapier/index_fichiers/CoursPDF/Dynamique-3A/
Dynamique-SDrapier-janvier2012.pdf.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.4.1
195
Principe des Travaux Virtuels et Principe de Hamilton pour
les systèmes discrets
Considérons un cas linéaire, du point de vue géométrique et du point de vue matériau. Pour cela, considérons le cas le plus simple qui soit, un point matériel k, associé à
une masse mk :
→
−
— soumis a un champ de forces X de composante Xi , i = 1, 2, 3, qui peuvent être
des forces volumiques données ou bien des efforts de réaction dûs aux conditions
cinématiques imposées au système
— l’équilibre dynamique est caractérisé par le P F D (Eq. 7.45) :
mk üi − Xi = 0
Principe des Travaux Virtuels - P T V
−
−
Imaginons une trajectoire →
u ′ (t) distincte de →
u (t), mais suffisamment proche. On
→
−
→
−
→
−
→
−
′
définit le déplacement virtuel δ u par δ u = u − u (figure 7.3). Par définition le déplacement virtuel est arbitraire pour t1 < t < t2 , il représente un écart par rapport au
déplacement réel. C’est en cherchant à minimiser cet écart que la formulation variationnelle permet de trouver le champ réel, seule solution de l’équilibre. On retrouve ici la
notion de famille de fonctions admissibles proches de la solution, introduite comme base
du calcul variationnel au §7.2.
Figure 7.3: Trajectoire virtuelle.
Les conditions aux limites cinématiques doivent être vérifiées par le champ de dé
placement réel, qui est dit Cinématiquement Admissible (C.A.). Il faut donc que le champ
virtuel soit Cinématiquement Admissible à 0 (C.A.(0)), c’est à dire que les conditions aux
limites cinématiques soient vérifiées, et donc que les perturbations imposées au champs de
−
déplacement soient nulles. En effet, si au point P le déplacement →
u d est imposé, l’écart
à cette quantité donnée ne peut qu’être nulle, puisque le champ réel est C.A. (7.50). Ce
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
196
raisonnement tient aussi pour les Conditions Initiales (en temps), et le champ virtuel
devra être nul aux bornes t1 et t2 , il sera noté C.I.(0).
→
−
−
u (P )
= →
ud
→
−
→
−
→
−
u (P )+ δ u (P ) = u d
⇓
→
−
→
−
δ u (P ) = 0
(7.50)
L’énoncé du P T V pour les systèmes discrets de dimension N est donc le suivant :
N X
3
X
(mk üik − Xik ) δuik = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0)
(7.51)
k=1 i=1
Réciproquement, si le P T V est vérifié, quelque soit le champ virtuel répondant aux restrictions ci-dessus, alors l’équilibre est satisfait. Le P T V représente la contribution énergétique des puissances développées, dans un champ de déplacement virtuel C.A.(0), par
d’une part les efforts d’origine inertielle et d’autre part les efforts extérieurs au système.
Nous verrons son extension aux milieux continus, ci-après.
Principe de Hamilton
Le principe de Hamilton n’est rien d’autre que le P T V intégré dans le temps. Il
est donc nécessaire de pouvoir définir des potentiels dont dérivent les grandeurs statiques
et dynamiques du P F D. Partons de notre écriture du P T V (7.51) et intégrons-le dans
le temps, en supposant que le système ne présente que des liaison holonômes, i.e. dont
l’expression permet une intégration en temps.
Z
t2
t1
3
N X
X
k=1 i=1
(mk üik − Xik ) δuik
!
dt = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0)
(7.52)
Nous allons exprimer ce principe en utilisant des formes potentielles, et pour cela
nous supposerons que les masses sont indépendantes du temps. On peut remarquer l’identité suivante concernant les effort d’origine inertielle :
d
(mk u̇ik δuik ) = mk üik δuik + mk u̇ik δ u̇ik
dt
1
= mk üik δuik + δ mk u̇ik u̇ik
2
on retrouve la définition de l’énergie cinétique (7.39) pour le points matériels
⇓
d
(mk u̇ik δuik ) = mk üik δuik + δT (uik , u̇ik , t)
dt
(7.53)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
197
Il faut maintenant définir l’énergie potentielle, qui dans le cas des systèmes discrets,
se déduit de l’expression des efforts extérieurs et des efforts de liaison intérieurs. On
→
− −
→
− −
suppose ici que ces efforts Xik dérivent d’un potentiel V : F (→
x ) = − ∇V (→
x , t). Pour
mémoire, les forces dérivant d’un potentiel peuvent conservatives, ou non (cf potentiels
de dissipation au §7.4.3).
Pour simplifier les écritures, on utilisera ici la notion de coordonnée généralisée
qui permet, dans les systèmes discrets, de passer d’une paramétrisation en fonction des
→
− −
−
−
−
coordonnées matérielles (→
x, →
u (→
x )) et vitesses associées ( u̇ (→
x )), à une paramétrisation
optimale en termes de coordonnées généralisées (qs ) et vitesses associées (q̇s ). En écrivant
le travail virtuel δWQs (ou le travail élémentaire) des efforts généralisés :
δWQs =
N X
3
X
k=1 i=1
Xik δuik =
n
X
Qs δqs = −δV (qs )
(7.54)
s=1
On a ainsi l’expression des efforts généralisés et du potentiel correspondant qui se déduit
de l’expression du travail virtuel :
!
s
X
∂V (qs )
∂V (qs )
δV =
(7.55)
= −Qs
δqs
∃V (qs ) /
∂qs
∂q
s
n=1
Si nous revenons à notre expression initiale de l’intégration dans le temps du P T V
(7.53), en introduisant l’expression du potentiel des efforts généralisés (7.54) et l’expression
de l’énergie cinétique (7.53) quadratique en les coordonnées généralisées et les vitesses
généralisées, le principe de Hamilton (7.52) peut s’écrire sous la forme :
" N 3
#t 2
Z t2
XX
(T (qs , q̇s , t) − V (qs )) dt = 0, ∀δuik C.A.(0), C.I.(0)
−mk u̇ik δuik
+δ
k=1 i=1
t1
t1
(7.56)
compte-tenu des restrictions sur les valeurs du champ virtuel en t1 et t2 , le premier terme
de cette expression est nul et on obtient l’énoncé du Principe de Hamilton.
Principe de Hamilton pour les systèmes conservatifs
La trajectoire réelle du système est celle qui rend stationnaire l’intégrale
R t2
(T (qs , q̇s , t) − V (qs )) dt par rapport à toute variation arbitraire de déplacement C.A.(0)
t1
entre 2 instants t1 et t2 , mais s’annulant aux extrémités de l’intervalle :
Z t2
δ
(T (qs , q̇s , t) − V (qs )) dt = 0
t1
(7.57)
δqs (t1 ) = δqs (t2 ) = 0
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.4.2
198
Forme proposée par Lagrange pour les systèmes discrets
La forme proposée par Lagrange est beaucoup plus générale car elle ne se limite
pas aux systèmes conservatifs. On exprime les équations du mouvement en fonction des
coordonnées généralisées. Pour la variation de l’énergie cinétique, T (qs , q̇s , t), on obtient :
δT (S, R0 ) =
n
X
∂T
s=1
∂T
δqs +
δ q̇s
∂qs
∂ q̇s
(7.58)
On connaît également la forme du potentiel des efforts extérieurs (7.54) en fonction des
coordonnées généralisées. On peut donc écrire le principe de Hamilton (7.57) sous la forme
suivante :
!
Z t2 X
n
∂T
∂T
+ Qs δqs +
δ q̇s dt = 0, ∀δqs C.A.(0), C.I.(0)
(7.59)
∂q
∂
q̇
s
s
t1
s=1
On intègre par parties le second terme :
t2
Z t2
Z t2
∂T
d ∂T
∂T
δqs dt
δ q̇s dt =
δqs
−
∂qs
∂ q̇s
t1 dt
t1 ∂ q̇s
t1
k
0 car δqs C.I.(0)
(7.60)
Finalement, l’équilibre est équivalent à :
Z
t2
t1
n
X
s=1
d
−
dt
∂T
∂ q̇s
!
∂T
+
+ Qs δqs dt = 0, ∀δqs C.A.(0), C.I.(0)
∂qs
(7.61)
cette égalité étant vraie quelque soit le champ virtuel, la condition (7.61) équivaut donc
à n équations scalaires, appelées Équations de Lagrange, valables pour l’instant dans le
cadre d’un système conservatif :
∂T
d ∂T
+
−
+ Qs = 0 , s = 1 . . . n
|{z}
dt ∂ q̇s
∂qs
(7.62)
|{z}
{z
}
|
a
b
c
les termes a, b représentant les forces d’inertie généralisées associées au ddl qs , et le terme
c représentant les forces généralisées extérieures (et intérieures comme nous le préciserons
dans la suite).
On reconnaît dans la structure de ces équations, la condition de minimisation des
fonctionnelles d’Euler-Lagrange (voir Eq. 7.11), pour la fonctionnelle présentée dans le
principe de Hamilton (7.57). Cette expression est complétée par la suite dans le cadre des
systèmes dissipatifs.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
7.4.3
199
Généralisation aux systèmes discrets non-conservatifs
Les forces généralisée intérieures et extérieures au système peuvent être classées
selon leur type (élastiques, conservatives, dissipatives, ...) ce qui permet de formuler les
équations de Lagrange dans un cadre tout à fait général. Ces forces sont dites conservatives
si le travail virtuel associé est récupérable.
1/ Forces intérieures
Forces de liaison Les forces de liaison sont internes au systèmes, elles résultent des
contraintes cinématiques imposées. Exemple, une liaison entre 2 masses :Xi1 + Xi2 = 0
(action - réaction). Le travail virtuel associé au déplacement virtuel (δui1 , δui2 ) est nul
puisque nous avons vu que le champ virtuel est C.A.(0), c’est-à-dire que les déplacements
virtuels imposés sont nuls.
En conséquence, les forces de liaison ne contribuent pas aux forces généralisées
agissant sur l’ensemble du système. C’est un des attraits essentiels la mécanique Lagrangienne.
Forces élastiques Dans un corps déformable, le travail est stocké sous forme récupérable. Les forces élastiques dérivent d’un potentiel élastique, ou potentiel de déformation
qui s’exprime en calculant le travail virtuel δWel effectué par ces effort internes dans le
−
déplacement virtuel δ →
u :
δWel =
3
N X
X
∂Vint (qs )
k=1 i=1
∂uik
δuik =
n
X
Qs δqs = −δVint (qs )
(7.63)
s=1
On en déduit l’expression des forces internes généralisées et du potentiel de déformation :
∂Vint (qs )
(7.64)
∃ Vint (qs ) / Qs = −
∂qs
Forces dissipatives Ces forces sont de sens opposé au vecteur vitesse, orientées dans
la même direction. Elles sont fonction du module du vecteur vitesse.
Les liaisons non-parfaites peuvent être dissipatives, c’est souvent le cas dans les systèmes réels. Un autre exemple de force dissipative est l’effort de rappel d’origine visqueuse
d’un amortisseur tel que dans un oscillateur amorti.
On montre que le travail virtuel de ces forces dissipatives agissant sur le systèmes
est non-nul. On introduit un potentiel de dissipation D :
∃ D(q̇s ) / −
∂D(q̇s )
= Qs
∂ q̇s
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
200
La puissance dissipée est donnée par :
Pdiss =
n
X
s=1
n
X
∂D(q̇s )
Qs q̇s = −
q̇s
∂ q̇s
s=1
On montre que la fonction D(q̇s ) est homogène d’ordre m en fonction des vitesses généralisées, donc d’ordre m − 1 pour les forces dissipatives généralisées qui en dérivent :
— m = 1 : frottement sec
— m = 2 : frottement visqueux
— m = 3 : traînée aérodynamique (turbulence)
Donc la puissance dissipée vaut :
Pdiss = −
n
X
mD(q̇s )q̇s
s=1
On peut noter que les forces extérieures peuvent également être dissipatives, par exemple
en présence de contacts.
2/ Forces extérieures
Forces conservatives Comme nous l’avons vu précédemment, elles dérivent d’un potentiel (7.55) :
∂Vext
∃ Vext (qs ) / Qs = −
∂qs
Le travail virtuel de ces forces sur un cycle est nul :
I
δWext−cons = Qs δqs = 0
Forces non-conservatives Leur travail virtuel ne peut se simplifier comme dans les
cas précédents, il s’exprime en fonction des efforts extérieurs (7.54) et des déplacements
courants dérivés par rapport aux coordonnées généralisées :
δWnon−cons = −
Pn
s=1
Qs δqs =
N X
3
X
Xik δuik
k=1 i=1
=
n
3
PN X X
k=1
Xik
i=1 s=1
Ce qui donne l’expression des efforts généralisés associés :
Qs (t) =
N
3 X
X
i=1 k=1
Xik
∂uik
∂qs
∂uik
δqs
∂qs
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
201
Au bilan la prise en comptes des forces non-conservatives internes et externes dans
le calcul du bilan énergétique du système donne :
n
X
d
(T (qs , q̇s , t) + V (qs , q̇s )) = −mD(q̇s ) +
Qs (t)q̇s
dt
s=1
où le potentiel total V (qs ) = Vint (qs ) + Vext (qs )
Équations de Lagrange dans le cas général
Dans le cas général d’un système non-conservatif à liaisons cinématiques holonômes, les équations de Lagrange prennent en compte les forces intérieures et extérieures,
dissipatives et conservatives, introduites précédemment. Au final, le mouvement du système est caractérisé par s équations correspondant aux s degrés de liberté du système :
Équations de Lagrange pour les sytèmes non-conservatifs
d
−
dt
∂T (qs , q̇s , t)
∂ q̇s
+
∂T (qs , q̇s , t) ∂V (qs ) ∂D(q̇s )
−
−
+ Qs (t) = 0 , s = 1 . . . n
∂qs
∂qs
∂ q̇s
(7.65)
avec
Qs (t) : les forces extérieures généralisées non-conservatives
V (qs ) = Vint (qs ) + Vext (qs ) : le potentiel total
V ∗ (qs ) = V (qs ) − T0 (qs , t) : le potentiel modifié par l’énergie cinétique d’entraînement linéaire en les coordonnées
D(q̇s ) : le potentiel de dissipation
P
Fs = ns=1 Grs les forces gyroscopiques généralisées
Toutes les notions introduites ci-dessus restent évidemment valables dans le cas des
systèmes continus. Bien évidemment la notion de potentiel des actions intérieures devra
être précisée puisque nous considérerons, généralement, une unique partition dans le cas
des milieus continus.
7.4.4
Principe de Hamilton pour les systèmes continus
Dans ces systèmes continus le principe de Hamilton établi précédemment (Eq. 7.57)
pour des systèmes discrets conservatifs reste bien évidemment valable. On rappel que ce
principe est basé sur la minimisation de la fonctionnelle appelée Lagrangien du système,
définie comme la différence entre l’énergie cinétique du système et son énergie potentielle
extérieure et intérieure. Dans le cas des milieux continus, cette dernière quantité est
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
202
classiquement appelée énergie de déformation élastique. Le principe de Hamilton s’écrit
entre deux instants t1 et t2 pour un système continu :
Z t
Z t2
2
→
−
→
−
−
−
−
→
−
δ
T (→
u , u̇ , t) − Vext (→
u ) − W (→
u ) dt = 0,
L( u , u̇ , t) dt = δ
(7.66)
t1
t1
∀ δ→
−
→
−
u ( x , t) C.A.(0) et C.I.(0)
Les relations entre le PPV / PTV, et le Principe de Hamilton sont explicitées
plus en détails ci-après §7.4.5 page 206. On rappel que le principe de Hamilton s’écrit
à partir des potentiels des actions extérieures et intérieures, c’est-à-dire du potentiel de
déformation pour ce dernier terme. Considérons un milieu continu Ω quelconque de masse
volumique ρ supposée constante, tel que représenté sur la figure 7.4. Ce milieu est en
équilibre sous l’action d’efforts extérieurs volumiques fi et surfaciques Fid appliqués sur
sa frontière ∂ΩF . Les conditions aux limites cinématiques de ce milieu sont quant à elles
−
−
−
−
−
appliquées sur la surface ∂Ωu (→
u (→
x) = →
u d (→
x ), ∀→
x ∈ ∂Ωu ) et l’on a les conditions
suivantes sur ces deux surfaces complémentaires : ∂ΩF ∪ ∂Ωu = ⊘ et ∂ΩF ∩ ∂Ωu = ∂Ω
Figure 7.4: Solide (S) quelconque, occupant un volume Ω, en équilibre sous l’action d’efforts extérieurs, et conditions aux limites associées.
Définition des potentiels
Pour ce milieu continu, la densité d’énergie cinétique s’exprime de manière triviale
−
et on définit w(γ) (éq. 7.67b) la densité d’énergie de déformation et vext (→
u ) (éq. 7.67a)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
la densité de potentiel des actions extérieures conservatives telles que :
→
−
∂vext
vol →
vol
|Ω = − f
δvext
(−
u ) = −δwext
→
−
∂u
−
∃vext (→
u) /
→
− d surf →
∂v
ext
surf
−
δvext ( u ) = −δwext
|∂ΩF = − F
−
∂→
u
∂w
∃ w(γ) /
= S(γ)
δw = S(γ) : δγ
∂γ
203
(7.67a)
(7.67b)
où S est le second tenseur des contraintes de Piola-Kirchhoff et γ est le tenseur des
déformations de Green-Lagrange, son dual au sens de l’énergie de déformations définie
w(γ). Sans entrer dans les détails de cette formulation en description Lagrangienne, c’està-dire sur la configuration non-déformée, nous nous limitons ici aux petites perturbations.
D’ailleurs dans le cadre de la formulation de Hamilton, les forces extérieures ne peuvent
que dériver d’un potentiel, elles sont donc conservatives. Ceci exclue de fait les forces
suiveuses telles que les pressions qui agissent sur la configuration géométrique courante,
et dont le travail dépendra des déplacements solutions, ceux justement recherchés.
La prise en compte des grandes déformations et des grands déplacements est écartée
ici, il en découle que la mesure des contraintes peut se ramener au tenseur de Cauchy, σ,
et le tenseur des déformations de Green-Lagrange associé se limite à sa partie linéarisée,
notée ε. L’effet des pré-contraintes par exemple, telle que la pré-tension dans les cordes
vibrantes, peut être pris en compte différemment pour ces cas spécifiques. Pour les cas
généraux que nous traitons ici, le tenseur des déformations est :
1
1
−
−
−
∇→
u + t ∇→
u
ou encore, en notation indicielle εij = (ui,j + uj,i ) (7.68)
ε(→
u)=
2
2
On définit de manière courante l’énergie interne de déformation par l’intégrale du
travail fournit par les contraintes dans les déformations correspondantes, ce qui dans le cas
de contraintes indépendantes explicitement du temps se ramène au calcul sur le trajet de
déformation. L’énergie complémentaire, notée w∗ (σ), est duale et se définit par l’intégrale
sur le trajet de contrainte du travail fourni par les déformations dans le solide (Table
7.4.4). Ces deux grandeurs énergétiques permettent de définir la loi de comportement,
relation entre contraintes et déformations ; aussi bien également dans le cas des grandes
déformations où les mesures de contraintes et de déformations doivent alors être adaptées
aux formulations choisies, Lagrangienne ou Eulérienne notamment.
On peut maintenant calculer sur le domaine entier les quantités intervenant dans
le principe de Hamilton :
Z
Z
Z
Z
→
− →
→
−d →
surf
−
−
→
−
→
−
vol
F (−
x , t)→
u (x, t)dωF
f ( x , t) u (x, t) dΩ −
vext dΩF = −
vext dΩ +
Vext ( u ) =
∂Ω
Ω
∂Ω
Ω
F
F
Z
Z
1
→
−
→
−
→
−
σ(ε) : ε( u ) dΩ pour un matériau linéaire
w( u )dΩ =
Vint ( u ) =
2 Ω
Ω
Z 2
1
→
−
→
−
T ( u̇ ) =
ρ u̇
dΩ
2 Ω
(7.69)
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
w(ε) =
∗
w (σ) =
Z
εij
σij dεij
∂w(ε)
= σij
∂εij
εij dσij
∂w∗ (σ)
= εij
∂σij
0
Z
σij
0
204
Loi de comportement et énergies associées.
Table 7.1: Définition des énergies de déformation et de déformation complémentaire, et
leur signification physique en lien avec la loi de comportement.
Dérivation des équations d’équilibre
Partant des expressions des potentiels présentées en 7.69, le principe de Hamilton
(eq. 7.66) devient :
Z t2
Z t 2 Z
Z
→
−
→
−
→
−
→
−
→
−
δ
L( u , u̇ , t)dt =
ρu̇i δ u̇i − σij (ε)δεij ( u ) + fi ( x , t)δui dΩ +
Fi ( x , t)δui dΩF dt
t1
t1
Ω
∂ΩF
−
−
= 0 , ∀ δ→
u (→
x , t) C.A.(0) et C.I(0)
(7.70)
en utilisant les conditions de vitesses nulles aux instants extrêmes, i.e. pour un champ
de vitesse C.I.(0), on obtient après intégration par partie en temps du terme inertiel
provenant de la variation de l’énergie cinétique :
Z t2
Z t2
t2
ρüi δui dt
ρu̇i δ u̇i dt = [ρu̇i δui ]t1 −
(7.71)
| {z }
t1
t1
0
et la variation de l’énergie de déformation s’écrit classiquement, en remarquant la symétrie
du tenseur des déformations et du tenseur des contraintes, et la nullité de la variation des
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
205
−
déplacements imposés sur ∂Ωu (δ →
u C.A(0)) :
Z
Z
→
−
σij (ε) δui,j dΩ
σij (ε) δεij ( u ) =
Ω
Ω
↓ Intégration par parties
Z
Z
= − σij,j (ε) δui dΩ
+
Ω
σij (ε) δui
Ω
= −
σij,j (ε) δui dΩ
Ω
,j
dΩ
Ostrogradski ⇔ th. de la divergence en 3D
Z
+
σij (ε) δui nj dΩF
↓
Z
∂ΩF
(7.72)
Finalement, en substituant les expressions 7.71 et 7.72 dans l’expression du principe de
Hamilton (eq. 7.70), on aboutit à une fonctionnelle faisant intervenir deux quantités distinctes, respectivement dans le solide et sur sa frontière où les efforts sont imposés :
Z t2
→
−
−
L(→
u , u̇ , t) dt =
δ
t
Z t21 Z
Z
(7.73)
d
−ρüi + σij,j (ε) + fi δui dΩ +
Fi − σij nj δui dΩF dt
t1
Ω
∂ΩF
−
−
= 0 , ∀ δ→
u (→
x ) C.A.(0) et C.I(0)
Le champ virtuel étant par définition arbitraire, et compte-tenu des conditions de
nullité de ce champ aux instants extrêmes t1 et t2 , d’aprés le lemme de l’intégrale nulle, la
quantité dans l’intégrale en temps est nulle quelque soit le champ virtuel continu sur Ω.
Choisissons le champ virtuel non-nul à l’intérieur du solide (7.74a) et nul sur sa frontière,
puis inversement nul à l’intérieur et non-nul sur sa frontière (7.74b). La condition de
nullité est donc satisfaite si et seulement si les équations suivantes sont vérifiées, ce sont
les équations caractérisant l’équilibre dynamique :
n
o
o n
→
− −
→
− −
→
−
−
−
−
⇒ σij,j + fi = ρüi dans Ω et ∀t(7.74a)
u (→
x ) 6= 0 , ∀→
x ∈Ω ∪ →
u (→
x ) = 0 , ∀→
x ∈ ∂ΩF
n
o
o n
→
− −
→
− −
→
−
−
−
−
⇒
u (→
x ) = 0 , ∀→
x ∈Ω ∪ →
u (→
x ) 6= 0 , ∀→
x ∈ ∂ΩF
Fi = σij nj sur ∂ΩF et ∀t (7.74b)
On notera que la condition de minimisation d’Euler-Lagrange est une généralisation
du principe de Hamilton à toute fonctionnelle convexe. D’ailleurs on montrera, pour un
cas simple, que ces équations d’équilibre se déduisent directement de cette condition de
minimisation sans autre calcul.
À partir de ces équations d’équilibre, on peut traiter n’importe quel problème de
dynamique de milieux continus. Il faut toutefois noter qu’on aborde souvent de manière
distincte deux types de problèmes de dynamique : propagation d’ondes et vibrations. Dans
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
206
cette distinction ’fictive’ interviennent en premier lieu les propriétés de conduction de ces
mouvements (vitesse de propagation), notamment la célérité caractérisant l’aptitude du
solide à propager ces mouvements entre des points matériels voisins. Selon la vitesse de
propagation, les mouvements pourront devenir coopératifs ou non. En général, la vitesse de
propagation des ondes est beaucoup plus grande que les vitesses résultant de la vibration
des structures, propagation d’ondes et vibrations peuvent donc assez fréquemment être
dissociées lorsque le spectre des sollicitations reste dans des plages connues par avance.
7.4.5
Liens avec le PPV/PTV, et le Principe de Hamilton dans
les milieux continus
On peut aisément remarquer que les différentes formulations connues de l’équilibre
(PPV/PTV, Principe de Hamilton, Principe de d’Alembert, PFD) d’un système dérivent
de la même expression, mais sont utilisées selon que les efforts sont ou non proportionnels
au temps, et dépendent ou non du champ de déplacement, ce qui indique la présence de
non-linéarités géométriques dans ce dernier cas.
En effet, le théorème de l’énergie cinétique peut être vu comme la forme intégrale
scalaire du PFD (7.45) : si les équations vectorielles sont toutes identiquement nulles, leur
somme reste nulle. Il suffit de faire "travailler" le PFD dans le champ cinématique en
tout point du solide. En se limitant aux cas où l’équilibre est considéré en un point fixe
par rapport au repère du mouvement (R0 ), le torseur des actions dynamiques {DSa } est
directement égal à la dérivée par rapport au temps du torseur cinétique (7.44), et on peut
écrire en tout point :
→
−
D
−
{τext→S }(A,S/R0 ) −
{CS }(A,S/R0 ) · V (A, S/R0 ) = 0, ∀→
x ∈Ω
Dt
Dans le cadre général des solides déformables (Figure 7.4), on utilise la forme
intégrale en espace (sur le solide (S) occupant le domaine Ω et son bord ∂Ωf ) de cette
formulation. Les efforts ne se limitent plus aux efforts extérieurs, et il faut alors intégrer
les efforts internes, et plus précisément expliciter l’énergie de déformation produite par
les efforts de cohésion dans le champs de déplacement interne au milieu. Finalement,
l’équilibre exprime que, pour toute partition d’un système, la somme des puissances des
forces extérieures au système et des forces intérieures relatives à la partition envisagée,
dans le mouvement réel, est égale à la dérivée par rapport au temps de l’énergie cinétique
du système augmentée de la somme des puissances induites par les déformations entre les
différentes parties du système :
Pint (S/R0 ) + Pext (S/R0 ) =
D T (S/R0 ) X
+
Pdef f (S/R0 )
Dt
(7.75)
Nous nous limiterons désormais au cas où le milieu est continu, i.e. il n’existe
qu’une seule partition constituant le milieu à elle seule. Pour la partie inertielle des efforts
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
207
extérieurs, on utilise les expressions des grandeurs cinétiques et dynamiques telles qu’exprimées aux centres de gravité d’une partition - respectivement les équations 7.37 et 7.44soit en tous les points du domaine dans la formulation pour un milieu continu. Compte
tenu des expressions des quantités cinétiques et dynamiques la contribution des efforts
d’origine inertielle peut s’écrire à partir de la dérivée temporelle de l’énergie cinétique
→
− −
−
0)
(Eq. 7.41 : dT (Ω/R
= 21 M (→
x ) V 2 (→
x , S/R0 )), ici dans son expression eulérienne :
dΩ
Z
→
2
− −
D 1
D T (S/R0 )
−
=
ρ(→
x ) V (→
x , S/R0 ) dΩ(t)
Dt
Dt 2
Ω(t)
↓ Conservation de la masse locale
−
∂ρ
Dρ(→
x , t)
−
=
+ div(ρ→
v)=0
Dt
∂t
Z
2
− →
d →
1
−
V (−
x , S/R0 ) dΩ
ρ(→
x)
=
2
dt
ZΩ
→
− −
−
−
−
=
ρ(→
x )→
γ (→
x , S/R0 ) · V (→
x , S/R0 ) dΩ
Ω
(7.76)
→
−
avec ρ( x ) la masse volumique du solide. On peut rappeler que par définition de la
résultante dynamique exprimée au centre de gravité de la partition considérée (7.44),
on retrouve les mêmes expressions pour les efforts d’origine inertielle :
−
−
M→
γ (→
x , S/R0 )
−
→
D C (G,S/R0 )
Dt
=
Dans cette formulation intégrale, les efforts peuvent dépendre du temps, et les
tenseurs des contraintes et des vitesses de déformation sont introduits comme dans la
−
définition des potentiels utilisés pour le principe de Hamilton (Eq. 7.69) : σ(→
u ) est la
→
−
→
−
mesure du champ des contraintes qui règne dans le solide au point courant x , et ε̇( V )
est le tenseur des vitesses de déformations associé. Ces deux grandeurs dépendant du
→
− −
champ des vitesses V (→
x , S/R0 ). Pour simplifier l’expression, le champ de vitesse est
supposé cinématiquement admissible à 0 (C.A.(0)), i.e. les déplacements imposés sur ∂Ωu
étant annulés :
Z
Z
→
− →
→
− −
→
−
→
−
−
→
−
−
τ vol→S ( x , t) · V ( x , S/R0 ) dΩ +
τ surf →S (→
x , t) · V (→
x , S/R0 ) dωF −
Ω
Z
Ω
→
−
−
u , t) : ε̇( V ) dΩ =
σ(→
Z
Ω
∂ΩF
2
− →
→
− −
D →
→
−
ρ( x )
V (−
x , S/R0 ) dΩ, ∀ V (→
x , S/R0 )C.A.(0) et C.I.(0)
Dt
→
− −
→
− −
→
− −
−
−
−
−
avec f (→
x , t) = →
τ surf →S (→
x , t) et F d (→
x , t) = →
τ surf →S (→
x , t), et u̇ (→
x)=
retrouver les expressions des potentiels définis précédemment (7.69).
(7.77)
→
−
→
−
D
u ( x ) pour
Dt
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
208
PPV et PTV
Á partir de cette expression générale (7.77), la correspondance avec le Principe des
Puissances Virtuelles est direct si l’on remarque que la puissance développée par les efforts
d’origine inertielle s’écrit, en introduisant la définition (7.42) de la résultante dynamique
R −
→
−
γ (P ∈ S/R)dm), comme montré ci-dessus (7.76) :
( D (S/R0 ) = (S) →
Z
→
− −
D T (S/R0 )
−
−
−
= ρ(→
x )→
γ (→
x , S/R0 ) · V (→
x , S/R0 ) dΩ
(7.78)
Dt
Ω
−
→
Alors en prenant le champ de vitesses réel égal au champ de vitesse virtuel V ∗ (M ∈ S)
C.A.(0), on a l’expression classique de l’équilibre qui fait intervenir la puissance virtuelle
−
∗ →
des quantités d’accélérations Pacc
(u∗ , S/R0 ) :
−
−
−
→
− −
∗ →
∗ →
∗ →
Pint
(u∗ , S/R0 ) + Pext
(u∗ , S/R0 ) = Pacc
(u∗ , S/R0 ), ∀u∗ (→
x )C.A.(0) et C.I.(0) (7.79)
avec par définition la puissance virtuelle des efforts internes :
Z
−∗
→
−
−
∗ →
Pint (u , S/R0 ) = − σ(→
u ) : ε∗ (u∗ ) dΩ
Ω
L’équilibre correspondant à cette équation étant identiquement nulle, en se restreignant au cadre des petites perturbations pour des solides à comportement linéaire, et dans
le cas d’efforts extérieurs indépendants du temps, on peut considérer une forme intégrale
dans le temps, faisant intervenir les expressions des travaux et des énergies. Dans ce cadre
les intégrales en temps de ces puissances conduisent aux expressions des travaux virtuels
−
qui dépendent uniquement du champ de déplacement →
u ∗ (M ) associé à la vitesse virtuelle
→
−∗
V (M ) :
Z
Ω
Z
Ω
→
− −
→
−
−
τ vol→S (→
x ) · u∗ ( →
x , S/R0 ) dΩ +
→
−
σ(ε) : ε (u∗ ) dΩ −
∗
Z
Z
∂ΩF
→
− −
→
−
−
τ surf →S (→
x ) · u∗ ( →
x ) dωF −
→
− −
→
− −
−
−
−
ρ(→
x )→
γ (→
x , S/R0 ) · u∗ (→
x ) dΩ = 0, ∀ u∗ (→
x ) C.A.(0)
(7.80)
Ω
Le théorème de l’énergie potentielle, et le théorème de l’énergie potentielle complémentaire ne sont rien d’autre qu’un cas particulier dans un cadre statique,
de ces formulations intégrales basées sur des potentiels. Les détails de ces formulations sont
accessibles dans le support de cours de J. Bruchon Mécanique des Milieux Continus dans
la Majeure Mécanique 2014-2015. Il s’agit, dans ce cas, de définir des potentiels, comme
dans le cas du principe de Hamilton, mais indépendamment du temps, dont dérivent à la
fois l’énergie de déformation et le potentiel des actions extérieures.
A l’opposé, pour être plus général, on formule souvent le P P V faisant intervenir la
puissance virtuelle au lieu des travaux virtuels. On pourra arguer que ces quantités étant
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
209
virtuelles, on peut décider qu’on choisit le champ virtuel de la dimension d’un déplacement
ou d’une vitesse. La différence entre P T V et P P V se situe surtout au niveau de l’intégration des non-linéarités et dépendances diverses (en temps, en espace). Classiquement, le
P P V intégrera tout type de dépendance des contraintes vis-à-vis des déformations, et plus
généralement les non-linéarités. Prenons le champs virtuel égal à la variation du champs
−
→−
−
−
réel pour simplifier : V ∗ (→
x , S/R) = δ →
u (→
x , t). Ce champs est donc C.A.(0). Utilisons-le
dans l’expression (7.77) établie à partir du principe de Hamilton :
Z −
Z
Z
→−
→
− →
→
−
−
→
−
→
−
−
−
f ( x , t) · δ u ( x , t) dΩ(t) +
F d (→
x , t) · δ →
u (→
x , t) dωF (t)
−
σ(ε, t) : δε( u , t) dΩ(t) +
∂ΩF (t)
Ω(t)
Ω(t)
Z
−
−
−
−
−
−
−
ρ(→
x , t)→
γ (→
x , S/R) · δ →
u (→
x , t) dΩ(t), ∀ δ →
u (→
x , t) C.A.(0) et C.I.(0)
=
Ω(t)
(7.81)
ou sous la forme plus générique encore faisant apparaître simplement les énergies et potentiels :
Z
Z
Z
surf →
−
→
−
−
vol →
−
δw(ε, t) dΩ(t) +
δwext ( u , x , t) dΩ(t) +
δwext
(−
u ,→
x , t) dωF (t)
Ω(t)
|
=
Z
Ω(t)
{z
}
→
−
δPin ( u , t)
|
∂ΩF (t)
{z
→
−
δPext ( u , t)
→
− −
−
−
−
−
−
u (→
x , t) C.A.(0)C.I.(0)
ρ(→
x , t) ü (→
x , S/R) · δ →
u (→
x , t) dΩ(t), ∀ δ →
}
(7.82)
Ω(t)
|
7.5
{z
−
δPacc (→
u , t)
}
Concepts de stabilité des équilibres
Nous avons vu dans les parties précédentes que les équations de Lagrange caractérisent l’équilibre dynamique d’un système (7.65). Ces équations différentielles d’ordre 2
peuvent être résolues, de façon numérique ou encore analytique.
7.5.1
Stabilité des équilibre
Lorsque l’équilibre est caractérisé, se pose alors la question de la stabilité de cet
équilibre. Dans cette partie, sur la base de l’équilibre des systèmes dynamiques discrets
à N ddl, la stabilité de cet équilibre va être étudiée. Tous les concepts introduits dans le
cas des systèmes discrets restent valables dans le cas des milieus continus.
Grâce à une linéarisation des équations d’équilibre autour d’un point d’équilibre,
la stabilité du système peut être caractérisée. Dans le cas d’une résolution numérique,
l’équilibre d’un système dynamique peut être recherché par diverses méthodes : intégration
de Newmark par exemple ou encore θ-Wilson. Ces méthodes de résolution sont souples,
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
210
et vont permettre de trouver rapidement les solutions de l’équilibre du système étudié.
Par contre, ces méthodes doivent être adaptées à chaque famille de cas, notamment en
fonction de l’amortissement du système considéré.
Les résolutions analytiques ne sont possibles que dans les cas simples. Pourtant ces
méthodes de résolution fournissent les bases des résolution numériques. On peut grâce à
ces approches :
— déterminer des positions d’équilibre
— déterminer le mouvement au voisinage de cette position
— déterminer des mouvements stationnaires
— déterminer les oscillations autour des mouvements stationnaires
7.5.2
Définition d’un équilibre
L’équilibre au temps t0 peut être par rapport à un seul paramètre ou paramétrique :
— équilibre par rapport à un paramètre qj (qj est donné, et n’évolue pas dans le
temps)
)
qi (t0 ) = qi0 , q˙i (t0 ) = q̇i0 , si i 6= j
qj (t) = qje , ∀ t
qi (t0 ) = qje , q˙i (t0 ) = 0, si i = j
— équilibre paramétrique
qi (t0 ) = qie , ∀ i
q˙i (t0 ) = 0
∀i
7.5.3
)
qi (t) = qie , ∀ t, ∀ i
Petites oscillations autour d’une configuration d’équilibre
Sans entrer dans les détails, pour un système à liaisons scléronômes ne dépendant
pas du temps ni des vitesses, l’énergie cinétique se limite à sa partie quadratique en
¯ = T2 (q̄, q̇)).
¯ Ce qui donne pour les équations de Lagrange exprimées
vitesse (T (t, q̄, q̇)
pour l’équilibre paramétrique q¯e = (q1e , q2e , q3e , ..., qne ) :
d
−
dt
|
∂T2 (q̄e , q̇¯e )
∂T2 (q̄e , q̇¯e )
∂V (q̄e )
= −Qi =
, ∀i
+
∂ q̇i
∂qi
∂qi
{z
}
| {z }
|
{z
}
0
0
⇓
V (q̄)
(7.83)
avec le premier terme qui s’annule car la dérivée de l’énergie cinétique par rapport aux
vitesses est une forme linéaire des vitesses uniquement, le second terme quant à lui étant
invariant par nullité des vitesses autour de l’équilibre. Remarque : pour un système en
translation rectiligne uniforme, l’énergie cinétique relative reste inchangée, ces conclusions
restent donc valables.
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
211
On voit donc que l’équilibre dépend du potentiel (des efforts extérieurs et intérieurs dans le cas général), résultat classique de la statique pour un système conservatif :
l’énergie fournie par les efforts extérieurs est intégralement stockée en énergie intérieure
(de déformation). Pour la solution q̄e , ce potentiel sera un minimum relatif (V (0) = K),
2
et un minimum absolu si le potentiel est strictement convexe ( ∂∂qV2 > 0). La condition
i
nécessaire et suffisante pour cet équilibre s’exprime simplement :
∂V (q̄e )
= 0, ∀i
∂qi
Ceci se généralise pour tout système, caractérisé par les équations de Lagrange dans le
cas général (7.65). Dans ce cas le potentiel est modifié pour tenir compte de l’énergie
cinétique d’entraînement :
∂V ∗ (q̄e )
= 0, ∀i
∂qi
avec V ∗ = V − T0
L’équilibre étant caractérisé, il faut maintenant pouvoir répondre à la question
essentielle de la stabilité de cet équilibre :
♦ l’équilibre est-il stable ?
♦ que se passe-t-il si on décale légèrement de cette position d’équilibre ?
7.5.4
Stabilité d’un équilibre paramétrique
Par définition, un équilibre est dit stable si le système étant dans des conditions
initiales voisines de l’équilibre, la trajectoire du système reste dans un voisinage de la
position d’équilibre. Ceci s’écrit de façon formelle :
l’état q¯e = (q1e , q2e , q3e , ..., qne ) est dit stable si et seulement si
)
)
)
)
ǫ>0
η>0
|qi0 − qie | ≤ η
qi (t0 ) = qi0
∀
∃
vérifiant
/ ∀
µ>0
q˙i (t0 ) = q̇i0
ν>0
|q̇i0 | ≤ ν
)
|qi (t) − qie | ≤ ǫ
on ait ∀t ≥ t0 , ∃
|q˙i (t)| ≤ µ
Si ǫ et µ sont ’petits’, la stabilité est dite conditionnelle, et si ǫ et ν sont ∞, la stabilité
est dite globale. Ces expressions indiquent que l’évolution de la position courante est
nécessairement bornée en déplacement et en vitesse. Ou de façon énergétique, la stabilité
d’un équilibre s’énonce de la façon suivante : la position d’équilibre est stable lorsqu’il
existe une borne d’énergie ǫ∗ telle que, si l’énergie communiquée est ǫ < ǫ∗ , on a T ≤ ǫ
à tout instant ultérieur, l’égalité n’ayant lieu qu’à l’équilibre. Cette caractérisation de
l’équilibre nécessite la résolution des équations différentielles traduisant le mouvement
autour de la position d’équilibre lorsque l’on décale le système par rapport à sa position
instantanée. Ces équations étant souvent non-linéaires, il est bien souvent impossible de
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
212
les résoudre directement. Nous verrons dans le paragraphe suivant une approximation de
ces équations d’équilibre.
Pour le moment, on peut proposer une définition plus intuitive de la stabilité. Nous
avons vu que l’équilibre d’un système conservatif à liaisons scléronômes est caractérisé par
l’invariance de la somme du potentiel des efforts conservatifs et de l’énergie cinétique (Eq
¯ + V (q̄)) = 0). Le potentiel des efforts extérieurs V étant défini à une
?? : dtd (T (q̄, q̇)
constante prés, posons q̄(t0 ) = 0. Ceci implique que V (t0 ) = 0. Un système sera stable si
et seulement si l’énergie cinétique du système diminue pour toute position à un instant
ultérieur, ce qui se traduit par un minimum relatif, autour de la position d’équilibre, du
potentiel des efforts extérieurs du système (Eq. 7.84).
Figure 7.5: Pendule simple dans une configuration (a) stable et (b) instable.
¯ + V (q̄) = ǫ à t = t0
T (q̄, q̇)
⇒ T (t0 ) = ǫ et T (t) ≤ ǫ
,or V (0) = 0
(< ǫ∗ )
(7.84)
⇒ V (t) ≥ 0 , alors V (t0 ) est un minimum relatif
On voit que la stabilité dépend donc du potentiel des efforts. Ceci se comprend
aisément avec l’exemple de base du pendule simple (Figure 7.5). Ce concept s’étend grâce
au théorème de Lejeune-Dirichlet qui fournit, sous certaines hypothèses, une condition
suffisante de stabilité de l’équilibre :
Théorème de Lejeune-Dirichlet : soit un système S dont les liaisons sont indépendantes du temps, soumis à des forces dérivant d’un potentiel indépendant du temps. Si pour une position d’équilibre q̄e du système, le po-
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
213
tentiel est un minimum strict, alors q̄e est une position d’équilibre stable.
La stabilité dépendra donc de la convexité du potentiel. C’est un résultat classique,
à la base du traitement des problèmes d’instabilité des structures par exemple. Il en
découle que la recherche de l’équilibre du système linéarité peut donc se faire en minimisant
le potentiel. Le cas le plus illustratif est celui du ressort, dont le potentiel est strictement
convexe et dont la recherche d’un extrêmum conduit à l’équilibre. Pour des systèmes qui ne
sont plus strictement convexes, par exemple présentant des non-linéarités géométriques, la
recherche de la stabilité se fait, par extension, en étudiant le signe de la partie quadratique
du potentiel s’il existe, ou de façon équivalente la seconde variation du potentiel. Si un
potentiel ne peut être défini, on étudie alors la variation première de la formulation faible
(du P P V ).
7.5.5
Linéarisation des énergies
Afin d’étudier la stabilité des équilibres, nous venons de voir qu’il faut pouvoir
caractériser la convexité de l’énergie potentielle. Pour rechercher cette convexité, il faut
évaluer les termes quadratiques du potentiel des efforts conservatifs. Procédons à un développement linéaire de ce potentiel, au voisinage de la configuration d’équilibre q̄0 = 0̄ :
V (q̄) = V (0) +
n
X
∂V
s=1
∂qs
n
n
1 XX
qs +
2 s=1 r=1
|q̄0 =0̄
∂ 2V
∂qs ∂qr
qs qr + O(q̄ 3 )
|q̄0 =0̄
∂V
= 0, et le potentiel étant défini à une
Puisque le système est en équilibre ∂q
s
constante près, on a également V (0) = 0. Finalement, la courbure du potentiel est donnée
par le seul terme restant, qui doit être positif pour que la stabilité soit assurée :
n
avec :
n
1 XX
krs qs qr > 0 pour q̄ 6= 0
V (q̄) =
2 s=1 r=1
krs = ksr =
∂ 2V
∂qs ∂qr
|q̄0 =0̄
Matriciellement la partie quadratique du potentiel s’écrit :
V (q̄) =
1 t
q̄ K q̄ > 0 pour q̄ 6= 0̄
2
K, matrice de raideur linéaire du système, est donc symétrique et définie positive pour
assurer la stabilité.
De même pour l’énergie cinétique, on se limite au cas où le système ne subit pas
d’entraînement. L’énergie cinétique se réduit donc à l’énergie cinétique relative qui est une
¯ 0 ) = 0)
forme quadratique des vitesses. La linéarisation autour de l’équilibre (q̄0 = 0̄, q̇(t
Rappels - Éléments et Principes de la mécanique
214
conduit également à éliminer les dépendances par rapport aux coordonnées généralisées.
Le développement s’effectue donc uniquement par rapport aux vitesses :
¯ = T2 (0) +
T2 (q̄, q̇)
n
X
∂T2
∂ q̇s
s=1
n
n
n
n
1 XX
q̇s +
2 s=1 r=1
|q̇¯0 =0̄
∂ 2 T2
∂ q̇s ∂ q̇r
q̇s q̇r + O(q̇¯3 )
|q̇¯0 =0̄
⇓
XX
¯ =1
T2 (q̇)
mrs q̇s q̇r avec mrs = msr =
2 s=1 r=1
∂ 2 T2
∂ q̇s ∂ q̇r
|q̇¯0 =0̄
Matriciellement la partie quadratique de l’énergie cinétique s’écrit avec M la matrice de
masse linéaire symétrique et définie positive du système :
¯ = 1 q̇¯t M q̇¯ > 0 pour q̇¯ =
6 0̄
T2 (q̇)
2