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Defauconpret, ou le demi-siècle d’Auguste

1999, « Romantisme », n° 106

Translation studies seldom pay attention to the translators themselves : of their lives, their working habits, their personal theories, we know little or nothing. Yet some questions are well worth considering : by what principles were translators inspired in 19th-century France? How could they choose between accuracy and rewriting ? How did they consider their own language, their work, the authors they translated ? This biographical account examines the case of Auguste Defauconpret, the French translator of Walter Scott's and Fenimore Cooper's novels, pointing to the characteristic gap — or delay — between the Romantic translation theories of his time and Defauconpret's own output.

Defauconpret, ou le demi-siècle d’Auguste Pauvres traducteurs ! Ces grands oubliés de la littérature, lors même qu’on s’intéresse à leur production, demeurent négligés par la critique comme par l’histoire littéraire. Il arrive, certes, que leur travail fasse l’objet d’études savantes, le plus souvent soucieuses d’établir certains critères de comparaison entre l’original et sa version traduite, de distribuer les éloges ou les reproches au nom d’une fidélité bien chimérique et d’une élégance toute subjective, de repérer derrière la pratique une théorie plus ou moins consciente. Mais des traducteurs, des traductrices, nous ne savons presque rien. Les questions pourtant se pressent, multiples et dignes de notre intérêt. Qui sont les traducteurs du XIXe siècle ? D’où leur vient leur connaissance de la langue ? D’où leur soif ou leur besoin de traduire ? Quel est leur statut dans la France romantique ? Enfin et surtout : se trouvent-ils en amont ou en aval des évolutions théoriques qui, d’un siècle à l’autre, ont bouleversé la notion même de traduction ? Traduction interlinéaire, version, adaptation, traduction littérale, paraphrase, imitation, traduction libre : autant de conceptions que l’on voit se succéder, ou se chevaucher, sans toujours savoir si de tels changements sont dictés par l’époque, par l’éditeur ou par le choix personnel du traducteur – sans savoir, en d’autres termes, si ce dernier suscite ou subit les mutations survenues dans l’art de traduire entre le début et le milieu du XIXe siècle. Il y a trente ans déjà. George Steiner déplorait que le traducteur commence tout juste à « se dégager d’un arrière-plan de grisaille et de servitude. Et encore tient-il souvent lieu de cible : on découvre qui a donné accès à Proust et à Dostoïevski quand on s’aperçoit que le travail demande à être refait ». De même, poursuit Steiner, on parle de « l’influence énorme » de Werther, et de la façon dont les romans de Walter Scott ont remodelé la conscience que l’Europe avait du passé. Que sait-on encore de ceux qui ont traduit Goethe et Walter Scott, qui ont été les vrais messagers de cette influence ? L’histoire [...] n’a pas un mot pour Auguste-Jean-Baptiste Defauconpret dont les traductions sont l’instrument de ce choc1. Or, l’histoire n’est pas restée tout à fait muette au sujet d’Auguste Defauconpret. Le plus prolifique des traducteurs de son temps – on lui attribue entre cent dix et quatre cents ouvrages – a bien laissé quelques traces, relevées et suivies notamment par le comparatiste Jacques Béreaud2. Dans un article fort documenté, celui-ci retrace la carrière intellectuelle de Defauconpret pour étayer sa théorie : puisque les traductions de l’époque romantique sont en grande partie des adaptations, c’est le style des traducteurs eux-mêmes qui a influencé la littérature française – et non le style propre de Walter Scott ou de Fenimore Cooper. Nous reviendrons sur les conclusions, surprenantes et judicieuses, que tire Béreaud de sa comparaison raisonnée entre Scott et sa traduction par Defauconpret ; pour l’heure, c’est à l’homme lui-même que nous voudrions accorder une fugitive résurrection. 1 George Steiner, Après Babel [1975], trad. fr. Lucienne Lotringer, Paris, Albin Michel, 1978, p. 253-254. 2 Jacques G. A. Béreaud, « La traduction en France à l’époque romantique », Comparative Literature Studies, n° 8, 1971, p. 224-244. Parmi les notices biographiques consacrées à Auguste Defauconpret, la plus longue demeure assez sommaire : Né à Lille le 12 juillet 1867, il vint à Paris faire ses études au collège Mazarin et, dès l’âge de vingt ans, s’essaya en littérature. En 1795 toutefois, il acquit une étude de notaire à Paris et la conserva jusqu’en 1814 ou 1815. Ruiné alors par de mauvaises spéculations ou par l’inexactitude de ses subordonnés, il dut abandonner son étude et se réfugier à Londres, probablement pour fuir ses créanciers. En 1802, il avait déjà fait imprimer un Nouveau barême, ou tables de réduction des monnaies et mesures anciennes en monnaies et mesures républicaines, qui avait eu du succès. À Londres, il commença par donner quelques œuvres originales : Quinze jours à Londres à la fin de 1815 (1816) ; Londres et ses habitants (1817) ; Anecdotes sur la cour et l’intérieur de la famille Napoléon, 1818 ; Voyage vers le pôle arctique. Une année à Londres, 1819 ; Londres en 1819 (1824), Londres en 1820 en 6 vol. et des romans historiques. Peu après, avec la collaboration de son fils, il entreprit un immense travail de traduction de romans anglais : tout Walter Scott, tout Fenimore Cooper, qu’il fit, l’un et l’autre, connaître en France ; des œuvres de John Banim, de Wash Irving, de Horatio Smith, de Fred. Marryat, de Ch. Dickens, de bien d’autres romanciers encore, soit environ 500 volumes. Defauconpret rentra en France lorsqu’il fut, sans doute, à l’abri de toute poursuite, et mourut à Fontainebleau le 11 mars 18433. D’autres sources nous apprennent que les études de Defauconpret furent brillantes, qu’il a écrit dans sa jeunesse des poésies latines et traduit quelques pages des classiques, enfin qu’il s’est, « comme chaque débutant, [livré] à la composition de tous les genres, depuis le madrigal et le vaudeville jusqu’à la tragédie. Ces différents essais restèrent inédits »4. Même après son départ pour l’Angleterre, il manifeste un goût très classique, dont le style de ses traductions se ressent à l’évidence. Que pouvons-nous tirer de ce bref résumé d’une vie de soixante-seize ans, et d’une carrière qui s’étend sur un demi-siècle ? D’abord que le métier de traducteur fut moins un choix pour lui qu’une nécessité : voici Defauconpret, notaire en faillite et en cavale, qui passe la Manche afin de fuir ses créanciers et s’installe à Londres pour un exil involontaire. Il y observe ses contemporains étrangers avec l’œil candide et acerbe d’un Persan de Londres. Ses diverses études de mœurs sur la société londonienne révèlent ainsi un homme charmant, spirituel, manifestant à l’endroit des Anglais une ironie pleine de tendresse, et à son propre égard un humour sans doute récolté en voyage. Dans une lettre à un ami anglais, il annonce son retour prochain et un troisième ouvrage sur les bizarreries d’Albion : Il y a longtemps que je jouis [en France] d’une atmosphère sans brouillards, j’y respire trop librement, mes poumons sont trop dilatés ; il faut que l’air épais de la Grande-Bretagne comprime leur trop grande élasticité. [...] J’avoue qu’après avoir récolté deux fois dans le champ du ridicule, ce n’est pas sans quelque crainte que je forme le projet de chercher à y faire une troisième moisson : mais dans une terre si fertile, il me semble qu’on peut toujours espérer de trouver à glaner5. Tout à ses piques contre l’Angleterre, Defauconpret omet de mentionner qu’il vient y faire oublier ses dettes... Une fois installé à Londres, il se tient au courant de 3 Roman d’Amat (dir.), Dictionnaire de biographie française, Paris, Letouzey, 18 vol., 1965. 4 Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle, Paris, Desplaces, 24 vol., 1855. art. Defauconpret. 5 Auguste Defauconpret, Une année à Londres, Paris, 1819, p. 1-3. l’actualité littéraire, s’en fait le chroniqueur et entreprend de traduire deux des grands romanciers en vogue, Scott et Cooper ; il ne s’arrêtera plus. Il publie en même temps ses études de mœurs, qui plaisent assez pour mériter plusieurs rééditions, et divers romans historiques imités de Walter Scott. C’est précisément ici, quand il s’agit pour Defauconpret de distinguer entre son œuvre propre et ses traductions, que l’on relève une série d’inexactitudes et d’appropriations éloquentes. En voici quelques-unes, de plusieurs genres : 1°) En tête de son troisième roman, Robert Fitzooh (1828), Defauconpret propose une « liste complète de ses ouvrages » où il range, parmi les productions originales, trois volumes intitulés L’Hermite de Londres, L’Hermite en Écosse et L’Hermite en Irlande (de 1819 à 1826). Dans sa France littéraire, Joseph Quérard montre que ces trois livres sont en réalité traduits de l’anglais : « Comme les Français ne connaissent guère de la littérature anglaise que ce que les traducteurs veulent bien leur faire connaître, il est bien facile d’abuser de leur crédulité, en leur présentant des traductions comme des ouvrages originaux, et vice versa. » Il s’agirait en l’espèce de cinq livres de Thomas Skinner, The Hermit in London, etc., qui « ont paru en anglais, presque toujours deux ans avant ceux de M. Defauconpret »6. 2°) Dans une notice adressée au même Quérard, pour les besoins d’une bibliographie, le voleur d’œuvres se fait pilleur de traductions : « M. Defauconpret a traduit, ou plus vraisemblablement fait traduire sous sa direction, de 1815 jusqu’à la fin de 1828, un très-grand nombre d’ouvrages anglais [sans] autre collaborateur que son fils, qui l’aide quelquefois dans ses travaux : ce qui paraîtra incroyable aux personnes qui remarqueront que depuis 1815, M. Defauconpret, dans une liste qu’il m’a donnée lui- même et qui n’est pas complète, a publié 422 vol., dont 47 dans le cours de l’année 1828 ! » 3°) Sans omettre ses sources, cette fois, Defauconpret a publié en 1818 des Anecdotes sur la cour et l’intérieur de la famille Napoléon d’après les souvenirs de Madame Durand, femme de chambre de l’impératrice Marie-Louise, en 1819 un Voyage vers le pôle arctique inspiré des récits de voyage de Ross et Perry, et par la suite de nombreux voyages publiés sous son nom avec la mention : « d’après...», signe qu’un traducteur parfois plagiaire sait aussi, à l’occasion, distinguer entre son œuvre propre, celle qu’il traduit et celle qu’il ne fait qu’adapter. 4°) Sur la couverture de ses propres romans, Defauconpret fait imprimer la mention suivante : « par le traducteur des romans historiques de Walter Scott ». Mieux : dans certains cas, ce modeste descriptif se substitue à son nom ! On hésite entre aliénation et appropriation. Effacement devant l’auteur original ? Certitude, au contraire, que d’avoir traduit Scott fait de lui, Defauconpret, un auteur à part entière ? Imaginons que cette pratique se soit répandue : Les Fleurs du Mal, par le traducteur des nouveaux poèmes d’Edgar Poë, Mémoires d’outre-tombe, par le traducteur de l’épopée de Milton, Le Hussard sur le toit, par le traducteur des romans épistolaires de Smollett... Autant d’œuvres restées anonymes, qui se prévaudraient moins d’un auteur que d’un traducteur. Encore convient-il de comprendre ce qu’entendait Defauconpret par une « traduction ». L’angliciste moderne serait certes surpris par la foule d’omissions, de contresens ou de rajouts repérés dans un travail au demeurant très honorable, voire admirable. Comment comprendre, dès lors, les louanges sans réserve que ses 6 La France littéraire, Joseph-Marie Quérard, Paris, 1827-1857, t. Il, art. Defauconpret. contemporains sont nombreux à lui accorder ? De ses traductions, on écrit ainsi qu’elles « ne se ressentent nullement de la précipitation du travail, et lui ont acquis en France une réputation méritée »7, mais aussi qu’elles sont « généralement exactes »8 ; du traducteur lui-même, que « nous lui devons de posséder dans notre littérature les œuvres immortelles de Walter Scott et de Cooper presqu’aussi parfaites que dans leur langue originale »9, qu’il « se fit connaître par des traductions estimées pour leur élégance et leur fidélité »10 ; de Scott et de Cooper, enfin, qu’ils doivent beaucoup « au soin et à l’intelligence de leur traducteur qui a su les adapter au goût de son pays, et donner souvent à leurs récits la rapidité qui manque quelquefois aux écrits originaux de ces deux romanciers. Le style de Defauconpret, sans être brillant, est simple, clair et facile11 » Ne lisons qu’avec prudence de pareils avis, sans doute de seconde main et formés d’après des critères qui ne sont plus les nôtres : qu’un contemporain estime Defauconpret « fidèle » – à supposer qu’il ait bien pris la peine de comparer le français à l’original – nous en dit moins sur les traductions elles-mêmes que sur la réputation de leur auteur et les critères de jugement de l’époque : « fidèle » à Scott et à Cooper, Defauconpret n’a-t-il pas su les « adapter au goût de son pays » ? Fidélité, adaptation : tout est là, dans le choix de l’une ou l’autre école, dans la volonté de plaire au prix de compromis ou le noble désir de transmettre en l’état. Les éloges dont s’honore notre traducteur ne font pas oublier que mainte critique sévère, et d’ailleurs incomprise, lui fut adressée par les tenants d’une fidélité accrue. S’il séduit Chateaubriand et des milliers d’autres lecteurs, Defauconpret indispose Hugo comme Stendhal ; à bien d’autres encore, sa conception de la traduction apparaît dépassée, et plus d’une voix s’élève pour réclamer davantage de scrupule12. Avec une belle assurance, qui montre combien le débat était ouvert, Defauconpret présente une manière d’art poétique du traducteur dans cette lettre adressée en 1819 au Journal des débats : Je crois qu’en faisant passer un roman d’une langue dans une autre, le premier devoir d’un traducteur est de le mettre en état de plaire aux nouveaux lecteurs qu’il veut lui procurer. Le goût des Anglais n’est pas toujours conforme au nôtre [...]. J’ai donc supprimé quelques détails qui auraient pu paraître oiseux à des lecteurs français et j’ai raccourci les portraits de quelques personnages qui ne sont aucunement liés à l’action13. À quoi bon s’indigner d’une attitude si franche, et surtout si partagée ? À l’évidence, le respect dû à l’original ne fait pas encore partie des mœurs littéraires du siècle. Retrancher ou raccourcir, ajouter ou expliciter, modifier ou altérer sont autant de pratiques courantes à l’époque romantique, même si l’on assiste à une lente mutation dans l’art de traduire. Trois ans avant la lettre de Defauconpret, Madame de Staël prônait en ces termes d’autres méthodes, au nom de la nécessaire diversité des cultures et des styles : 7 C.-A. Lefèvre, La Littérature française contemporaine, Paris, 1849. Louis Charles Dezobry, Dictionnaire général de biographie et d’histoire, 2 vol., Paris, 1869. 9 Hippolyte Verly, Essai de biographie lilloise contemporaine, 1800-1869, Lille, 1869. 10 Alfrès Dantès, Dictionnaire biographique et bibliographique, Paris, 1875. 11 L.-G. Michaud, Biographie universelle, ouvr. cité. 12 Voir à ce sujet J. Béreaud, « La traduction en France », art. cité, p. 226-227. 13 A. Defauconpret, lettre au rédacteur du Journal des débats, 3 février 1819. On en trouvera le texte intégral dans J. Béreaud, « La traduction en France [...] », art. cité, p. 232. 8 Il ne faut pas, comme les Français, donner sa propre couleur à tout ce qu’on traduit ; quand même on devrait par là changer en or tout ce que l’on touche, il n’en résulterait pas moins que l’on ne pourrait pas s’en nourrir ; on n’y trouverait pas des aliments nouveaux pour sa pensée, et l’on reverrait toujours le même visage avec des parures différentes14. Nous touchons ici à un point essentiel dans l’histoire de la traduction : le décalage entre la théorie et la pratique, entre la parole du théoricien et l’acte du traducteur. Comme le rappelle José Lambert, non seulement l’avis de Madame de Staël ne reflète pas celui de ses contemporains, mais elle-même n’applique guère ses beaux préceptes à ses propres traductions. Il en découle un notable « écart entre les intentions et les travaux des traducteurs »15. L’évolution des traductions publiées par Defauconpret, entre les années 1810 et les années 1830, permet de mesurer assez précisément cet écart. Au moyen d’un tableau comparatif relevant les contresens, les faux sens, les omissions de mots, de phrases ou de paragraphes, mais aussi les additions au texte, Béreaud montre une indéniable prgression chez Defauconpret : sur un même nombre de pages, Les Puritains d’Écosse de Scott (1817) présentent quatorze contresens, le Tom Jones de Fielding (1835), un seul ; pour quarante-quatre omissions de paragraphes dans le premier roman, on n’en relève aucune dans le second. Entre le début et la fin de sa carrière de traducteur, Defauconpret a donc profondément modifié son approche du texte original. Aucun document, hélas ! n’en indique les raisons. On peut seulement supposer que sa connaissance de l’anglais s’est affinée avec ses années londoniennes, et qu’il ne méritait plus les reproches formulés contre lui (et contre ses pairs) par un auteur anonyme : Mais, dira-t-on, comment traduire si l’on ne comprend pas l’original ? Le problème paraît en effet difficile à résoudre ; mais l’industrie des traducteurs est grande. [...] Sa science va-t-elle jusqu’à lui faire entrevoir à peu près le sens de la phrase, deviner à demi l’idée de son auteur, il a recours à l’équivalent, à la paraphrase, à l’interprétation ; ne comprend-il point, tout en s’imaginant comprendre, il use alors du contresens ; se trouve-t-il enfin complètement en défaut, sans pouvoir se faire aucune illusion, il lui reste encore la double ressource du non-sens et de la suppression16. Ainsi un traducteur à peine frotté d’anglais peut-il « accoler [son] nom à celui de Walter Scott »... L’attaque est féroce. Elle est, surtout, parfaitement imméritée lors de la parution de l’article en 1836. Defauconpret n’a-t-il pas de lui-même, en 1835, choisi de réviser sa propre traduction des Puritains d’Écosse ! Entre l’une et l’autre mouture, le traducteur a visiblement changé son approche en améliorant son anglais. Il est également permis de supposer que les critiques à son endroit ou, plus largement, les divers débats sur la traduction à l’époque romantique, l’ont incité à respecter davantage l’esprit comme la lettre du texte. Autre hypothèse, qui n’exclut pas les deux précédentes : de formation et d’esprit classiques, Defauconpret s’est encore 14 Madame de Staël, « De l’esprit des traductions » [1816], dans Lieven D’Hulst, Cent ans de théorie française de la traduction, Lille, 1990, p. 87. 15 José Lambert, « La traduction en France à l’époque romantique : à propos d’un article récent », Revue de littérature comparée, n° 3, 1975, p. 396-412. 16 « Des traductions », auteur anonyme, Bibliothèque universelle de Genève, juin 1836, t. III, p. 244- 249, dans Lieven D’Hulst, Cent ans de théorie, ouvr. cité, p. 222-223. Defauconpret n’essuie pas seul les critiques de l’anonyme pourfendeur de demi-savants, qui s’en prend aussi à Madame de Staël pour ses traductions de Goethe, à Pichot pour son Byron, à Guizot pour son Shakespeare... mieux reconnu dans Fielding que dans Scott. Chez ce dernier, du reste, les passages les mieux rendus sont précisément ceux dont le style est le moins moderne : « Dans la mesure où la langue néo-classique de Defauconpret était, en 1820, en passe de devenir archaïque, elle constituait donc la transposition linguistique idéale du texte de Scott »17. Cette rencontre fortuite de sensibilités, alliée à la nécessité historique de traductions plus fidèles, est sans doute à l’origine de l’évolution méthodologique de Defauconpret ; son œuvre de traducteur nous apprend ou nous confirme donc ceci, qui ne doit pas surprendre, moins encore irriter : le grand auteur est de son temps, ou en avance sur son temps ; le traducteur, lui, est toujours (un peu) en retard. 17 J. Béreaud, « La traduction en France », art. cité, p. 235-236.