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Co-écrit avec Christine Shimizu, directrice du musée Cernuschi
La révolution allemande de 1918-1919 : une histoire d'en bas Journées d'étude MAISON HEINRICH-HEINE, CITÉ INTERNATIONALE UNIVERSITAIRE DE PARIS, 27C BOULEVARD JOURDAN 75014 PARIS 9-10 NOVEMBRE 2018 Organisation : Valérie Carré, Jean-François Laplénie, Agathe Mareuge Entrée libre dans la limite des places disponibles. Journées d'étude / Studientagung La révolution au subjectif -Revolution aus subjektiver Perspektive La révolution allemande de 1918-1919: une histoire d'en bas 9-10 novembre 2018 -Paris, Maison Heinrich Heine
Arts Asiatiques, tome 67, p.79-88., 2012
ffi r#seadm ; #ss;r I rË'i ffiË er"ilrét';-1 t i, I * _c-À FJt 1*.'i"tÂq-Ii"f ii ilxt cq:ffiË#rmpÏ;xmË Ë C*s **ÉË*r:flÈ-*r:gs Cix syitis** il*;:t:e; §ühÉ L'iconographie de la peinture dite « lettrée » n a hit l'objet d'aucun travail de fond. Il reste pourtant important de comprendre les peintures dans ce qu'elles montrent de plus üsible : les objets dépeints. Chacun sait que cerhines plantes représentées sont invesües d'une signification
Ciel variable : art, photo, médias, culture, 2013
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Ces yeux pleins de lumières
Ce schéma reste globalement valide jusqu'à aujourd'hui, mais il semble, dans un premier temps, être moins le résultat d'un projet rationnel que l'expression d'une nécessité intérieure. Il n'est en effet explicité par Bang Hai Ja, si ce n'est identifié, que de manière très tardive. L'artiste estime a posteriori que c'est sa découverte de Johannes Vermeer (1632-1675) en 1966 qui permet à un désir ancré dans son enfance de se concrétiser : retranscrire la lumière. Il est vrai que plusieurs titres de ses oeuvres font référence à celle-ci à partir des années 1970, mais il faut attendre 1987 pour que Bang Hai Ja l'affirme de manière explicite comme moteur de sa création 1 . Ce tournant est encouragé par la lecture en 1976 des Dialogues avec l'Ange de Gitta Mallasz . Ce livre relate des échanges avec une entité spirituelle qui s'exprime à travers la voix et le corps d'une amie de l'auteur. Mêlant influences orientales, ésotériques et chrétiennes, l'ouvrage séduit Bang Hai Ja, dont la fibre religieuse est caractérisée par un syncrétisme semblable. Elle emprunte à ces dialogues plusieurs des formulations qu'elle emploie toujours aujourd'hui pour décrire son rapport à la lumière. Celle-ci est pour elle la matière-même de l'univers, une source de joie, de paix et d'amour. Dès lors, l'artiste a pour rôle, à travers un travail d'introspection, de cheminer vers cette lumière pour pouvoir ensuite la semer dans le coeur des autres. Elle s'emploie donc à générer son apparition au sein de ses oeuvres et espère ainsi contribuer à l'amélioration de la condition humaine ( fig. 3). Cette rationalisation tardive est l'aboutissement d'un long cheminement plastique, intellectuel et spirituel qui permet de préciser et d'enrichir des recherches menées dès la fin des années 1950. L'emploi dans la décennie suivante d'éléments rapportés et collés à la surface de la toile conditionne l'organisation des oeuvres en plans géométriques juxtaposés qui deviennent le point focal de la composition. Cette forme d'ordonnancement de l'espace amène petit à petit Bang Hai Ja à privilégier des structures circulaires qui s'allient naturellement à un mysticisme affirmé pour se muer, dans le courant des années 1970, en représentations de l'univers. Si celles-ci rompent régulièrement avec les compositions centrées habituelles chez Bang Hai Ja, peindre des planètes, des étoiles ou la voie lactée contribue à intégrer les réflexions sur la lumière au sein de questionnements cosmologiques, dont certains sont nourris par la conception du monde dans les pensées chinoises et coréennes ( fig. 2 À l'Université nationale de Séoul (서울대학교, 서울大學校), Bang Hai Ja apprend en parallèle peinture orientale et peinture occidentale. Si elle opte en quatrième année pour une spécialisation dans le domaine de la peinture à l'huile, elle continue à manier l'encre et à pratiquer la calligraphie. Dès l'origine, son travail est ainsi caractérisé par la multiplicité des procédés employés. Bang Hai Ja évolue de plus au sein de cercles artistiques qui portent une attention soutenue aux empâtements et aux textures, sous l'influence des mouvements abstraits occidentaux. Ses plus anciennes toiles connues ( fig. 1) se caractérisent ainsi par la juxtaposition de pigments dilués au point de laisser transparaître la trame de la toile et d'une pâte dont l'épaisseur est mise en valeur par des griffures opérées en son sein. L'artiste exploite également depuis le milieu des années 1990 le géotextile dont elle apprécie la texture veloutée et l'épaisseur qui permet de donner de la profondeur à ses oeuvres. Ces choix révèlent ainsi un processus créatif marqué par une volonté d'interaction physique de l'artiste avec une matière dont Bang Hai Ja cherche à comprendre les propriétés pour s'y adapter et co-créer avec elle.
Figure 3
Vibration de lumière, 빛의 진동, 2004, pigments naturels sur géotextile, 33 x 38,5 x 3 cm, collection particulière.
Figure 2
Exposition « Souffle de lumière », musée Whanki, Séoul, du 14 septembre au 28 octobre 2007.
Matière vivante
En témoignent de manière particulièrement évidente les oeuvres réalisées en papier mâché dont les irrégularités contribuent à générer les compositions picturales. Cette sensibilité aux qualités physiques et tactiles des éléments employés se double ainsi de la perception d'une énergie ou de processus cosmologiques dont l'artiste n'est que la médiatrice. Ce sont d'ailleurs les sensations ressenties face au site de Roussillon qui l'amènent à opter définitivement pour des pigments et des liants naturels dans les années 1990. Si les premières oeuvres produites à Paris s'inscrivent dans la continuité de ces recherches, Bang Hai Ja enrichit rapidement l'éventail de ses techniques par le recours au collage. Souhaitant explorer les potentialités de nouvelles matières, elle utilise des éléments issus de la vie quotidienne -papier de verre, morceaux de cuir et de bois ou vieux tissus -dont elle souligne les propriétés physiques par leur inclusion au sein d'une peinture souvent appliquée de manière fluide et sans relief.
Un retour en Corée à la fin des années 1960 lui fait prendre conscience des qualités plastiques du papier qui devient petit à petit l'élément unique de ces collages. Ses fibres prennent en effet l'aspect de tracés lorsqu'il est imbibé de couleurs liquides tandis que l'application sur la toile de morceaux de papier préalablement chiffonnés génère l'apparition de multiples bulles d'air et reliefs parfois soulignés par un coup de pinceau. À partir des années 1990, le papier devient à la fois support et corps-même des oeuvres de Bang Hai Ja. Il reçoit en effet de multiples glacis, apposés sur son recto et son verso afin de les étager en son sein. Cette négation de son caractère bidimensionnel est renforcée par un procédé déjà expérimenté avec les collages. Le papier est en effet froissé avant d'être peint ( fig. 2). Cela permet à Bang Hai Ja d'appliquer ses glacis de manière inégale sur ce dernier afin d'animer la surface de sa composition, mais aussi de générer la structure de celle-ci ( fig. 3) Une forme de spiritualité omniprésente dans ses productions et sa démarche ainsi qu'une appétence pour le travail de la matière ont progressivement amené Bang Hai Ja à s'abstraire du caractère bidimensionnel de ses peintures. D'une part, la volonté de faire surgir la lumière du coeur de l'oeuvre nécessite de travailler les compositions dans leur profondeur et de tirer parti de l'épaisseur du support. D'autre part, le souhait de faire partager cette lumière et d'en baigner les spectateurs conduit l'artiste à s'interroger sur le rapport physique entre ces derniers et des créations dont le positionnement dans les salles prend de ce fait une importance primordiale. Depuis sa première exposition au musée Youngeun (영은미술관) en 2000, Bang Hai Ja conçoit ainsi régulièrement la présentation de certaines de ses réalisations sous la forme d'installations placées dans le même espace que les visiteurs ( fig. 1).
Le feu clair qui remplit les espaces limpides
L'introduction de celles-ci au centre même des lieux investis s'accompagne d'une réflexion sur l'emploi de formats adaptés aux volumes architecturaux ainsi que sur les modalités de présentation les plus aptes à mettre en valeur ces travaux et leurs caractéristiques plastiques. Bang Hai Ja dispose ainsi régulièrement des oeuvres circulaires sur des plans horizontaux, parfois constitués d'un miroir surmonté d'un support en plexiglas afin d'en permettre la contemplation recto et verso. Elle multiplie, pour les mêmes raisons, les peintures suspendues au plafond plutôt qu'accrochées au mur. Cette possibilité d'observer ces dernières depuis différents points de vue aboutit, dès cette exposition en 2000, à la conception de tubes caractérisés par une composition continue sur la totalité de la surface extérieure du cylindre ( fig. 2). Ces expérimentations encouragent enfin l'artiste à approfondir ses recherches, menées depuis le début des années 1990, sur la variation des tailles et des formes des oeuvres destinées aux cimaises. Ovales, cercles, carrés présentés sur la pointe, bandeaux verticaux deviennent ainsi des éléments constitutifs de son répertoire. Celui-ci finit même par inclure des reliefs aux formes complexes composés de morceaux de géotextile et évoquant volontiers des paysages terrestres ou célestes ( fig. 3). Cette inventivité dont Bang Hai Ja fait preuve à partir des années 2000 s'appuie sur l'expérience accumulée grâce à la réalisation d'objets en trois dimensions. Celle-ci débute dans les années 1960 après l'installation à Paris. Elle accompagne l'exploration de la technique du collage, comme en témoigne l'identité des matériaux de récupération employés dans l'une et l'autre de ces productions. Si l'impulsion qui préside à la réalisation de ces sculptures est souvent liée à la qualité esthétique d'un morceau de bois préexistant ou de tout autre élément dans son état brut, Bang Hai Ja transforme systématiquement ce support initial en le recouvrant directement de pigments ou de papier ensuite peint. Malgré son goût pour les matières et son émerveillement devant la nature, elle estime en effet qu'une intervention de l'artiste est nécessaire pour qu'il y ait art. Ses rondes-bosses apparaissent ainsi comme l'un des exemples les plus patents de la démarche de co-création avec le cosmos qui est au coeur de son travail. . 3).
C'est l'entrée en contact en 2012 avec l'atelier Glasmalerei Peters sis à Paderborn (Rhénaniedu-Nord-Westphalie) qui permet enfin à l'artiste d'accomplir une synthèse entre ces deux types de production. La société allemande emploie en effet, sous la direction de l'artiste, des techniques de peinture sur verre pour rendre au mieux la complexité des oeuvres. Après une année dédiée à la création de pièces de tailles relativement modestes ( fig. 2) On dit en Occident que la quête de soi est une véritable descente aux enfers -et ces mots ne sont nullement excessifs. Non seulement fautil descendre aux enfers, mais encore faut-il en remonter.
«La création, a dit Bang Hai Ja, est avant tout la voie directe pour atteindre mon propre moi. En Asie, l'acte de créer est l'accomplissement de soi, l'union entre le moi et l'Univers ». Pour parvenir à cette union, le peintre doit au préalable s'employer à conquérir une liberté intérieure, soit s'affranchir de toutes sortes de contraintes, d'entraves, de peurs, d'influences, etc. Il doit aussi travailler à dépasser son moi et à atteindre l'imparticularisé. C'est ce qu'indique à sa manière Bang Hai Ja quand elle dit que lorsqu'elle a « fini de peindre, elle n'a plus de place pour signer ». C'est reconnaître qu'elle s'est totalement effacée et que cette toile qui lui a donné la possibilité d'accéder à l'universel, ne peut être rattachée à une personne.
Peindre est un moyen de se révéler à soi-même et de tendre vers la sagesse. Cette aventure-là est vécue par les artistes authentiques soucieux de vie spirituelle depuis des siècles et des siècles.
Elle a été suivie par nombre de calligraphes et de peintres lettrés de l'Extrême-Orient.
Ce besoin de peindre qui habite Bang Hai Ja lui impose de nourrir en permanence la source intérieure qui alimente sa création. Car lorsqu'elle est hors de son atelier, elle maintient sa vigilance, continue d'être en état de réceptivité, elle ne cesse pas d'être occupée par ce qu'elle poursuit. En peignant, elle active sa réalité interne, intensifie son rapport à elle-même et son rapport au monde. Elle a dilaté son espace intérieur jusqu'à pouvoir accueillir en elle l'essence et l'immensité de la vie, jusqu'à pouvoir entrer en communion avec l'univers.
Son oeuvre aux couleurs si douces, si délicates, nous met en contact avec le meilleur de nousmêmes, et aussi avec cet inexprimable que l'on rencontre quand on s'approche du mystère de la vie. Sa recherche de l'intemporel, de l'impérissable l'a conduite à vivre ces états de surconscience qui l'ont portée à la pointe d'elle-même et lui ont permis de fixer sur ses toiles ce qu'on pourrait nommer l'infiniment subtil -une synthèse de tout ce qu'elle a vécu, de ce qu'elle vit, de ce vers quoi elle tend.
Son oeuvre de grand silence nous laisse deviner une ascèse, le long chemin parcouru en direction de la simplicité et de cette lumière qui advient à ceux qui se sont pleinement accomplis. En recevant en vous-même ce que ces toiles irradient, puissiez-vous partir avec en vous un surcroît de lumière et de paix.
Bang Hai Ja dit: « Mettre une petite touche de couleur, c'est semer une graine de lumière, d'équilibre et de paix. »
Charles Juliet
Extraits de « La dimension spirituelle de l'oeuvre de Bang Hai Ja »