Revue d’ethnoécologie
16 | 2019
Varia
Des hommes et des plantes
Les collections d’ethnobotanique du Muséum, état des lieux et projet
Serge Bahuchet, Julien Blanc, Catherine Hoare, Simon Juraver, Myriam
Kourdourli et Flora Pennec
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/ethnoecologie/5786
ISSN : 2267-2419
Éditeur
Laboratoire Eco-anthropologie et Ethnobiologie
Référence électronique
Serge Bahuchet, Julien Blanc, Catherine Hoare, Simon Juraver, Myriam Kourdourli et Flora Pennec,
« Des hommes et des plantes », Revue d’ethnoécologie [En ligne], 16 | 2019, mis en ligne le 31
décembre 2019, consulté le 06 janvier 2020. URL : http://journals.openedition.org/ethnoecologie/5786
Ce document a été généré automatiquement le 6 janvier 2020.
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Des hommes et des plantes
Des hommes et des plantes
Les collections d’ethnobotanique du Muséum, état des lieux et projet
Serge Bahuchet, Julien Blanc, Catherine Hoare, Simon Juraver, Myriam
Kourdourli et Flora Pennec
1
Commencées il y a plus d’un siècle, les collections d’ethnobotanique du Muséum sont
directement liées à l’origine et l’évolution de son laboratoire d’ethnobotanique. Elles
sont constituées de plantes utiles, connues, nommées et utilisées par les sociétés
humaines de diverses aires géographiques, et comptent près de 100 000 items. On en
retrace ici la mise en place et les principes qui ont guidé leur réalisation, puis on en
présentera une description précise avant de conclure sur leur évolution en cours.
2
Il convient de signaler dès maintenant que l’inventaire général de ces collections est en
cours, aussi n’est-il pas possible actuellement de donner des informations
quantitatives, mais seulement des estimations.
Origines et évolution
Histoire du laboratoire
3
Rappelons les étapes successives du laboratoire originel et les modifications du champ
qu’il recouvre.
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Des hommes et des plantes
Tableau 1 : Évolution des chaires d’ethnobotanique
4
Ces modifications d’intitulés puis de responsables ont eu des influences sur les
programmes de recherche et sur la gestion et la composition des collections qui nous
intéressent ici.
Les fondateurs
Auguste Chevalier (1873-1956), le précurseur
5
« Ce n'est pas exclusivement de l'agriculture tropicale que nous nous occupons dans ce
laboratoire, mais aussi de l'horticulture coloniale, de la phytopathologie, des forêts et
bois coloniaux, encore imparfaitement connus, toutes questions qui relèvent du
domaine de la Botanique appliquée. » déclare Auguste Chevalier lors de la fondation de
la revue de son laboratoire en 1921 (Chevalier 1921a). Son laboratoire « renferme
d’importantes collections de bois des pays tropicaux, de plantes cultivées des pays
chauds, un riche herbier (…) ».
6
Dans la grande tradition du Muséum depuis ses origines, botaniste et explorateur,
Chevalier s’attache initialement à découvrir et décrire les plantes d’intérêt économique
qu’il rencontre sous les tropiques. Il en rapporte un très important herbier, qui compte
plus de 80 000 numéros à la fin de sa vie.
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Des hommes et des plantes
Figure 1 : Portrait d’Auguste Chevalier avec son herbier, dédicacé « A mon Cher R. Portères, souvenir
très cordial. » (1949)
Archives coll. ethnobotanique
Missions et collectes de Chevalier
7
Chevalier commence ses voyages et collectes en 1898. Il verse alors ses herbiers,
logiquement, à la Phanérogamie. Il complète ses notes descriptives avec la mention des
propriétés et des usages ainsi que les noms indigènes (Chevalier 1920). Voyageur
infatigable, il parcourt l’Afrique occidentale (7 voyages de 1898 à 1912), l’Afrique
centrale (1902-1913, Oubangui, Gabon, Congo belge, Sao Tomé), l’Indochine et la
Malaisie en 1913-1914 puis en 1917-1918, Java, Ceylan en 1914, l’Afrique du nord (1927),
le Brésil (1928), à nouveau l’Afrique occidentale (1929, 1930, 1932), plus tard le Cap Vert
(1934), en 1944-1945 voyages au Sénégal et en URSS, en 1946-1947 retour au Sénégal et
en Guinée…
8
Chevalier n’a cessé d’étudier et décrire les collections qu’il a rapportées tout au long de
sa vie ; il publie plusieurs catalogues successifs avec numéros, dates et lieux de collecte
(Chevalier 1910-1914, 1913, 1920). Il note en 1921 : « Le Directeur du Laboratoire
poursuit le dépouillement des collections botaniques qu'il a rassemblées au cours de
vingt-deux années de voyages (1898 à 1919). » (1921b : 6). Toutefois, en juin 1925, le
laboratoire d'agronomie coloniale brûle : « Je fus frappé par un grand malheur. Un
stupide incendie anéantit en quelques instants mon laboratoire et une partie des
documents et manuscrits non encore publiés qu'il abritait. (…) Je pus encore reprendre
mes voyages et je rapportai au Muséum de nouveaux matériaux d'étude (…) » (1947 :
588). Il semble qu’heureusement les herbiers d’Afrique étaient conservés dans une
annexe qui n’a pas brûlé (Hoare 2012 : figure 1).
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Des hommes et des plantes
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Outre les plantes, Chevalier s’est aussi considérablement intéressé aux bois,
recherchant les essences ayant un potentiel économique. Il a ainsi constitué une très
importante collection d’échantillons d’Afrique et d’Asie du sud-est, toujours complétés
par des herbiers de branches prélevées sur le même arbre.
10
Pour constituer les collections du laboratoire, outre ses missions propres, A. Chevalier
avait organisé un vaste réseau de correspondants, chercheurs ou stations
expérimentales (voir ci-après).
11
En résumé, au cours de ses explorations, Auguste Chevalier constitue des collections
générales portant à la fois sur les plantes à décrire (essentiellement arbres et lianes),
mais aussi sur les plantes d’intérêt économique à inventorier (herbacées, plantes à
caoutchouc). Les planches d’herbier sont généralement incorporées à l’Herbier général.
Chevalier porte attention aux connaissances locales, qu’il relève au moins par les noms
vernaculaires (souvent inscrits sur les herbiers eux-mêmes), et souvent par les usages
locaux ou potentiel (pour les arbres) qui sont notés dans ses rapports et listes. Il garde
dans son laboratoire les plantes cultivées et les échantillons de bois et de matières, qui
n’intéressent pas les botanistes, et relèvent de ce qu’il nomme « la botanique
appliquée »1.
12
La majorité des herbiers de plantes vasculaires a été déposée au fil du temps dans
l’Herbier général ; celui-ci renferme des planches datées depuis 1911, provenant
d’Afrique occidentale (Mali, Bénin, Côte d’Ivoire, Guinée, Sénégal, Niger, Mauritanie),
d’Afrique centrale (Cameroun, Gabon, Centrafrique, les deux Congo), d’Asie du sud-est
(Vietnam, Cambodge, Laos), ainsi que du Brésil, de Ceylan, et de France. Les collections
d’ethnobotanique actuelles conservent toujours les herbiers de plantes cultivées et
plusieurs milliers de plantes de Côte d’Ivoire, du Cap Vert, du Brésil et de France,
provenant surtout des dernières missions. Rappelons que les collections Chevalier
contiennent des échantillons collectés par lui-même, en majorité, mais aussi des
plantes collectées par ses collaborateurs ou correspondants.
13
Mentionnons également la présence d’une quarantaine de grands herbiers « hors
norme », contenant des rameaux de palmiers et de raphias, de caféiers, des arachides
ou des grands mils (plus de 200 parts d’herbier).
Roland Portères (1906-1974), le fondateur de l’ethnobotanique institutionnelle
14
Roland Portères transforme en 19632 l’ancienne chaire d’Agronomie tropicale en chaire
d’Ethnobotanique3, qu’il définit ainsi : « L’Ethnobotanique est une discipline
interprétative et associative qui recherche, utilise, lie et interprète les faits
d’interrelations entre les Sociétés Humaines et les Plantes en vue de comprendre et
d’expliquer la naissance et les progrès des civilisations (…). Elle n’étudie, en euxmêmes, ni les Plantes, ni les Sociétés humaines, ni les Hommes. (…) l’Ethnobotanique ne
fera que s’appuyer sur [l’agronomie, l’agriculture, la botanique économique], n’ayant
en vue que des rapports avec les Sociétés humaines. (…) on peut classer l’Ethnobotanique dans
les Sciences Humaines. » (Portères 1961 : 102-104 ; italiques de l’auteur). Et d’appuyer :
« l’Ethnobotanique appartient plus au groupe des Sociétés humaines qu’à celui de la
Biologie végétale, où elle n’a que faire. » (p. 104).
15
Ce changement de programme est aussi une rupture avec les orientations
essentiellement coloniales du laboratoire d’Auguste Chevalier, qui se marque
nettement dans les collections que Portères suscite.
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Des hommes et des plantes
Missions et collectes de Portères
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Roland Portères occupa divers postes à responsabilité dans les services de l’agriculture
en Afrique de l’Ouest, où il séjourne de 1929 à 1947 (Bingerville et Man en Côte d’Ivoire
et Sérédou en Guinée, essentiellement). Pendant cette période, il réalise de nombreuses
missions, évidemment en Côte d’Ivoire et en Guinée, mais aussi dans les pays voisins,
notamment le Sénégal et plus loin le Cameroun. La majorité de ses missions concernent
alors les plantes cultivées dans ces différents pays (arachide, café, quinquina, bananier,
maïs). Revenu en France et intégré au Muséum, il ne cessera de réaliser des missions
d’étude et de prospections sur les plantes cultivées qu’il a choisi d’étudier, et en tout
premier lieu les riz et les caféiers, et plus largement sur toutes les plantes utiles. Il se
rend régulièrement dans les différentes régions d’Afrique occidentale, mais aussi, par
exemple en Italie (1946), ou à Madagascar (1953). Toutes ses missions sont à l’origine de
collectes, aussi bien d’herbiers que de graines. Aussi les collections d’ethnobotanique
conservent-elles de très nombreux lots d’herbiers de plantes vasculaires (Cameroun,
Côte d’Ivoire, Guinée, Sénégal, El Salvador… France), et bien évidemment de très
nombreuses boîtes de céréales (sorgho, et surtout riz).
17
Portères centre ses collectes sur les plantes cultivées, en lien avec ses responsabilités
agronomiques précédentes. Tout comme Chevalier, il entretient un important réseau
de correspondants qui lui fournissent des spécimens des plantes qu’il étudie ; de ce fait
les « collections Portères » renferment des échantillons, provenant d’un grand nombre
de collecteurs.
Principes et finalité des collections
Pour Auguste Chevalier
18
Dès le début, Chevalier fonde ses travaux de terrain sur une ample collecte de végétaux
alors qu’il parcourt des régions encore non explorées du point de vue botanique 4. Il
explicite la place des collections lors de la création de son laboratoire d’Agronomie
coloniale, dont « le but essentiel (…) est de réunir une documentation tenue
constamment à jour sur les principaux produits agricoles coloniaux », par des dossiers
et par des collections : « Les collections formées au cours de nos voyages sont (…) d'une
grande utilité comme moyen d'étude des ressources de nos colonies. » (Chevalier 1921).
Il constitue ses collections de référence à la fois par ses propres missions, et par un ample
réseau de correspondants, notamment « les services agricoles des colonies françaises,
ainsi qu'avec les planteurs et exploitants qui continuent à entretenir des relations avec
le Laboratoire et le tiennent au courant de ce qu'ils font. ».
19
Il précise dans son cours de 1930 que son herbier propre collecté lors de ses missions
sera versé « à l’Herbier général (…), lorsque le Palais de la Botanique sera construit. »
(1930 : 24, 72). En effet, le début de la construction du bâtiment offert par la fondation
Rockefeller a lieu en 1931, et la livraison en 1935.
20
Chevalier conçoit son laboratoire comme un centre d’information et d’études sur les
cultures et les ressources tropicales avec le but de valoriser ces ressources et de
développer scientifiquement ces territoires ; c’est ainsi qu’il comprend à la fois la
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Des hommes et des plantes
constitution d’une documentation la plus précise possible, et des collections de
références :
« Nous avons le désir ardent d’entretenir, avec tous les Établissements de recherche
scientifique aux Colonies et avec les Stations expérimentales (…), des relations
d’étroite collaboration. N’est-ce pas au Laboratoire d’agronomie coloniale que les
techniciens et les chercheurs trouveront souvent la solution des difficultés qu’ils
rencontreront ? N’est-ce pas aussi auprès de ces techniciens et de ces chercheurs
que nous obtiendrons nous-mêmes de précieux renseignements pour notre
documentation ou pour l’enrichissement de nos collections nationales. C’est avec cette
documentation que nous pourrons poursuivre nos recherches, renseigner les
administrations et les colons. » (1930 : 120).
Pour Roland Portères
21
Lorsqu’il prend la succession d’A. Chevalier, Roland Portères intensifie ses recherches
sur les céréales africaines, et en premier lieu les riz (Oryza spp.), dont il entreprend de
décrire l’immense diversité variétale par des méthodes morphologiques héritées de la
botanique. Pour ce faire, il s’attache à constituer des collections de référence, en
recueillant le maximum de variétés locales dans de nombreux villages ouest-africains,
ainsi que par leur mise en culture (cf. par exemple Portères 1958-1959).
22
Il insiste dans son article fondateur de l’ethnobotanique (1961) sur la nécessité des
enquêtes sur le terrain « au sein des Ethnies en place et comportant la recherche de
documents végétaux bruts ou travaillés ou transformés (« objets »), de renseignements
(usages, techniques d'emploi, noms, folklore, magie, etc., thérapeutique, provenances,
etc.). » (1961 : 105), et sur l’importance des collectes de spécimens.
23
Plus tard, ayant créé son laboratoire d’ethnobotanique, Portères rédige son cours de
1969-1970 à l’Université Paris V et y théorise les collections dans une importante
section, qui va bien au-delà des spécimens botaniques, en associant les plantes et les
objets. Il décrit « l’Objet ethnographique » comme : « un témoin concret, matériel, de
Civilisation. Sa présence rend compte de la mentalité, de l'ingéniosité, de l'habileté
technique et du degré technologique d'un opérateur dans le façonnage ou la
transformation d’un produit brut en quelque chose d'élaboré. », un objet qui a été créé
« en vue de jouer un rôle, d’assumer une ou plusieurs fonctions. » (Portères 1969 : 117).
24
Il poursuit en définissant « l’Objet botano-ethnographique », c’est-à-dire « tout Objet
ethnographique constitué à partir de matériaux d’origine végétale. » (p. 118). Il précise
cependant qu’il ne s’agit pas là seulement de matières, mais de propriétés : « Pour
l’Ethno-botaniste, comme pour l’Ethno-zoologiste, l’Objet participe d’un Être vivant,
détient la Vie de l’Être dont il provient. Ce fait confère à l’Objet une Vie et celle-ci se
trouve transférée sur l’Objet de l’Ethnographe. » Et de poursuivre : « L'Objet tend à
n'être plus que Vie, laquelle est intégrée à la Fonction ; la matière elle-même devient
secondaire, dans la mesure où l'on ne considère que la Forme, conçue pour permettre
l'accomplissement de la Fonction. » (p. 120).
25
Il décrit alors l’ensemble des « Objets botano-ethnographiques » qui sont des objets
entiers mais aussi tout fragment végétal travaillé, trituré… « aussi bien que ce qu’il
évoque, ou suggère ». Puis il développe sur la nécessité de prendre en compte la plante
comme objet, c’est-à-dire ce qui permet d’obtenir l’identification du statut
taxonomique du végétal qui a fourni le matériau. Portères donne ensuite des
indications détaillées sur les méthodes, en commençant par l’obtention et la
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Des hommes et des plantes
préparation des échantillons ethnobotaniques puis « les notations sur le terrain »,
c’est-à-dire les enquêtes qui doivent porter sur la plante, le produit brut puis
transformé, sur les motivations, les rituels de prélèvement, les appellations, la
technique et les outils de transformation, etc. (Portères 1969 : 127), le tout accompagné
de photographies et de croquis. Il insiste sur le fait que « La description ethnobotanique
dépasse la description botanique et l’on a besoin de beaucoup plus d’informations. La notation
fait partie de l’Objet prélevé sur le terrain. » (souligné par nous).
Les collections du laboratoire
26
C’est sur cette base que les collections du laboratoire ont été constituées :
« L’Ethnobotaniste doit systématiquement recueillir des échantillons des Plantes
auxquelles il fera référence par ailleurs »5 (Portères 1961 : 106).
27
En sus des collectes réalisées par les chercheurs du laboratoire et par lui-même, pour
leurs recherches propres, Portères avait créé un véritable service de détermination à
destination des chercheurs ethnologues et linguistes devant se rendre sur le terrain 6.
Ainsi, sous sa direction, le laboratoire accueille des collections générées par des
chercheurs extérieurs, liées à des recherches directement ethnobotaniques, ou à
l’étude des sociétés (ethnologie ou linguistique). Malheureusement, ce service
s’étouffera lentement après son décès, bien qu’il ait été maintenu par les efforts de
Jacques Barrau et Hubert Gillet, jusqu’à cesser complètement dans les années 80.
28
La démarche enseignée par Portères a été inculquée aux chercheurs de terrain en
sciences humaines, notamment par la diffusion de fiches d’enquêtes 7, grâce à la Société
d’ethnozoologie et d’ethnobotanique SEZEB8. Par la suite ces fiches ont été
partiellement éditées dans le manuel de terrain Enquête et description des langues à
tradition orale (Bouquiaux & Thomas 1976). Portères s’est également employé à donner
des consignes pour la confection des herbiers, publiées très tôt dans son Journal
(Schnell 1960) et diffusées par un document ronéotypé distribué sur demande. Jacques
Barrau, dans la description des outils d’enquête en ethnobiologie, insiste sur la
nécessité de l’identification des plantes (et des animaux) qui « implique le plus souvent
la collaboration de spécialistes aussi bien que la récolte et la préparation de spécimens
et documents permettant à ces derniers d’accomplir leur tâche » (Barrau 1976 : 75).
Actuellement
29
Pourquoi des collections ? L’enquête ethnobotanique nécessite une détermination
scientifique qui produit un cadre de référence pour les informations locales et
culturelles recueillies. Sont donc réalisés des herbiers, soigneusement conservés pour
s’y référer à tout instant. Les collections sont ainsi à la fois le témoin des recherches
effectuées et des enquêtes réalisées, et le support matériel d’une information
descriptive qui s’y réfère. Sans lien avec ces informations ethnographiques collectées
sur le terrain, ces collections n’ont pas de sens, même si les spécimens peuvent
intéresser des botanistes.
30
Le principal souci de l’ethnobiologiste est de comprendre la signification des termes
locaux, notamment en ce qui concerne les espèces, plantes et animaux. Il doit
également s’efforcer de dégager les principes de la taxonomie locale et les
regroupements d’espèces qui sont opérés par les locuteurs de la langue étudiée
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Des hommes et des plantes
(processus de catégorisation et de classification, cf. Friedberg 1974). Il lui est donc
nécessaire de trouver la relation entre les termes locaux désignant des éléments
naturels et la nomenclature scientifique concernant les espèces. Robert Bye (1986)
exprime fortement la nécessité des spécimens, essentiels pour le travail de
l’ethnobotaniste, car nécessaires pour identifier l’organisme. C’est le pont entre deux
cultures, facilitant l’échange d’informations mutuellement bénéfique.
31
Dès lors, est impérative la conservation des spécimens issus du terrain dans des
collections permanentes, où l’on pourra venir les consulter et en vérifier la diagnose.
Description
Les collecteurs
32
Près de 200 collecteurs différents ont contribué aux collections d’ethnobotanique, avec
des inflexions au cours des décennies. La période de l’agronomie coloniale puis
tropicale (1911-1960) voit essentiellement des collectes réalisées par des botanistes ou
des agronomes explorateurs du monde tropical, avec une dominante pour les plantes
cultivées (cafés et céréales). C’est aussi la période où les collections de bois, de graines
et de matières végétales sont les plus conséquentes.
33
La période qui accompagne la création du laboratoire d’ethnobotanique fait intervenir
des collecteurs d’origines différentes, qui sont d’une part des ethnobotanistes
« professionnels », d’autre part des chercheurs en science humaine (ethnologues et
linguistes) qui rapportent des échantillons de plantes connues des communautés qu’ils
étudient, en réponse aux sollicitations des responsables du laboratoire offrant des
contributions aux déterminations (en premier lieu Roland Portères, ainsi que ses
collègues, chacun pour son aire géographique spécialisée, Hubert Gillet, Claudine
Friedberg et Jacques Barrau). Au cours de cette période, les régions concernées se
diversifient, tout en s’écartant du monde tropical.
34
À la fin des années 1970, les entrées en collection s’amenuisent fortement, pour
reprendre actuellement avec de nouveaux dépôts ou de nouvelles collectes
correspondant à des nouvelles recherches.
35
À titre indicatif, on peut distinguer plusieurs époques :
I- l’ère Chevalier, la période de la création de l’agriculture tropicale et de la botanique
appliquée (de 1899 à 1948),
II- l’ère Portères, fin de la période d’agronomie tropicale, et mise en place de
l’ethnobotanique (de 1948 à 1977),
III- la période de transition (de 1977 à 2002),
IV- la reprise (2002-2019).
36
12 % des contributions aux collections9 ont été enregistrés au cours de l’époque I (ère
Chevalier), 70 % de l’époque II (ère Portères), 14 % de l’époque III (période de transition)
et 5 % de l’époque IV, la plus courte (la reprise).
37
On trouvera dans l’Annexe I la liste des collecteurs.
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Des hommes et des plantes
Les lieux
38
À l’origine centrées sur les régions intertropicales, et en premier lieu l’Afrique, les
collections, tous types confondus (herbiers, bois, graines, matières), se sont étendues à
tous les continents et à différentes aires climatiques : Afrique (du nord, saharienne,
occidentale, centrale, orientale), Asie (sud-est, orientale, occidentale), Amérique
(centrale, du sud, caraïbes), Arctique, Europe (occidentale, scandinave), Océanie, pour
plus de 70 pays (Figure 2 ; Annexe II).
Figure 2 : Carte d’origine des collections. Voir annexe II pour la liste complète des pays (on
détaillera plus bas, ensemble par ensemble, les pays et régions dont ils proviennent)
F. Pennec
Les éléments
39
Les collections sont constituées d’herbiers (environ 55 000 parts d’herbier, pour moitié
de plantes cultivées et pour moitié de plantes sauvages), des sachets et des bocaux de
graines et diverses matières végétales (environ 10 000), de plaquettes de bois (plus de 3
000) et d’objets ethnographiques liés au monde des plantes (Térès & Zeroual 2011).
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Des hommes et des plantes
Figure 3 : Vue des boîtes d’herbier
© J. Larco-Laurent, MNHN
Herbiers « ethnobotaniques »
Définition et types d’herbiers
40
Cette catégorie correspond aux herbiers de plantes tant sauvages que cultivées, mais
qui résultent de recherches réalisées au sein de communautés humaines identifiées,
dans lesquelles le chercheur inventorie et documente toutes les plantes qu’elles
nomment et utilisent. Ce sont des herbiers déposés en vue de l’identification des
espèces. Ils sont d’importance très variable (de quelques dizaines à plusieurs centaines
de spécimens), et de qualité également variable. La majorité des échantillons sont
stériles, par exemple. Pour un botaniste, ces herbiers sont souvent d’intérêt très faible,
si ce n’est pour la zone géographique où ils ont été récoltés. Mais pour
l’ethnobotanique, ils doivent être conservés dès lors qu’ils portent des noms locaux et
des informations culturelles (cf. ci-dessus).
41
Certaines collections résultent d’études dirigées particulièrement sur l’ethnobotanique
d’une ethnie, voire d’une région, constituant ce que l’on peut qualifier des
« monographies ethnobotaniques ». Trois régions dominent, l’Indonésie (Timor et
autres îles), avec plus de 2 500 parts d’herbier (Friedberg 1990), l’Afrique centrale
forestière (RCA, Gabon, Cameroun), avec plus de 2 000 parts, et les Andes, en premier
lieu le Pérou avec plus de 1 900 parts. Ces grands ensembles sont dus à des collecteurs
multiples œuvrant dans la même région.
42
Une collection se distingue, celle qui concerne le Sahara. Elle résulte des missions et
recherches d’Hubert Gillet (1924-2009), agronome, naturaliste et botaniste et maître de
conférences auprès de Portères, qui parcourt en tous sens le Sahara à partir de 1953,
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Des hommes et des plantes
inventoriant et collectant la flore des massifs de l’Aïr et de l’Ennedi (Bruneau de Miré &
Gillet 1956, Gillet 1958, 1959). Il se spécialise ensuite sur la strate herbacée, en botaniste
et en phytogéographe, et il étudie particulièrement les relations entre les mammifères
herbivores et les plantes. Il s'intéresse à la fois aux animaux sauvages, ce qui le porte à
s’impliquer dans la conservation de la nature (il réalise des inventaires dans les parcs
nationaux du Niokolo Koba au Sénégal et de Zakouma au Tchad), et aux animaux
domestiques, à travers des études très fines des pâturages pour l’élevage sahélien et
saharien, en une certaine écologie ethnobotanique (Gillet 1961). Gillet suscita également le
dépôt de spécimens provenant de cette vaste région, parcourue par d’autres
chercheurs.
Les régions et les ethnies
43
Les recherches des ethnologues, agronomes, linguistes, ethnobotanistes ont porté sur
tous les continents, et une trentaine de pays. Certaines études concernent une région et
donc plusieurs communautés, d’autres une ethnie en particulier (environ 40). Toutes
ces collectes n’ont pas été suivies d’une publication particulière ; quelquefois les
identifications des plantes ont été portées dans des ouvrages (monographies,
dictionnaires) mais pas toujours. Enfin, ces herbiers sont de tailles et de qualités très
diverses, certains comportent seulement quelques feuilles ou tiges stériles, d’autres au
contraire sont forts de plusieurs milliers de planches de « qualité botanique ».
Tableau 2 : Principales ethnies représentées dans les herbiers. (On trouvera dans l’annexe III la liste
complète des régions et des ethnies)
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Des hommes et des plantes
Figure 4 : Une planche de l’herbier ethnobotanique de Germaine Dieterlen
© S. Juraver, MNHN
Plantes cultivées
44
Les fondateurs du laboratoire ont beaucoup travaillé sur les plantes cultivées, avec des
points forts : A. Chevalier, puis R. Portères et J.-F. Leroy sur les caféiers ; R. Portères ur
les céréales africaines. Il en résulte des collections d’échantillons, composées pour être
des collections de référence, sous des formes variées : planches d’herbier ; sachets de
graines ; épis entiers ; flacons de grains (cafés).
Riz (Oryza spp.)
45
La collection de riz a été constituée par Roland Portères, après que Chevalier ait
systématiquement recueilli les riz sauvages en Afrique10. Comptant environ 16 000
spécimens, elle porte sur plusieurs espèces, asiatique (Oryza sativa) et africaine (O.
glaberrima). Elle comporte également des espèces sauvages : Oryza barthii et O.
brachyantha d’Afrique, et O. meyerana (syn. granulata) d’Inde. Les spécimens sont des
herbiers ainsi que des grains ou des arêtes d'épis en sachets. R. Portères a consacré
beaucoup de temps à l’étude du riz, pour laquelle il a constitué une très importante
collection, en collectant lui-même en Afrique occidentale et en suscitant
systématiquement des apports par les stations agricoles et par les chercheurs se
rendant sur le terrain (Portères 1959).
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Des hommes et des plantes
Figures 5 : En haut- Quelques boîtes des riz de la collection Portères ; en bas à gauche- Herbier de
Portères (Guinée) ; en bas à droite- Herbier de Poilane (Indochine)
© J. Larco-Laurent, MNHN (a) et S. Juraver , MNHN (b et c)
46
L’ensemble le plus ancien a été envoyé en 1914 à Chevalier par Paul Morange
(1876-1914), chef du service de l'agriculture en Cochinchine (Bogue 2018). En lien avec
les inventaires et essais de Morange sur la diversité variétale au Vietnam, sa collection
est constituée d’une caisse de plus d’une centaine de plants de riz entiers (de la racine à
l’épi) et de 650 doubles sachets de grains de riz, chacun contenant environ
300 grammes de la même variété (Figure 6).
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Des hommes et des plantes
Figure 6 : Quelques sachets de riz de la collection Morange
© S. Bahuchet, MNHN
47
La collection comporte ainsi des échantillons provenant de 25 pays et rassemblés par
une vingtaine de collecteurs (Tableau 3).
Tableau 3 : Origine de tous les échantillons de riz, mentionnant les collecteurs inclus dans la
collection Portères
Café (Coffea spp.)
48
Les recherches sur le caféier trouvent leur origine dès la mission Chari - Lac Tchad de
Chevalier (1902-1904) (Chevalier 1908, Lizet & Hoare 2008), au cours de laquelle il
collecte un caféier sauvage qu’il décrit comme Coffea excelsa A. Chev. 11 (Chevalier 1905).
A la suite, R. Portères et J.-F. Leroy ont poursuivi les recherches sur les caféiers, et
d’amples collectes de spécimens tant d’espèces sauvages que de variétés cultivées ont
été réalisées, en vue d’une part d’établir les relations entre les nombreuses espèces,
d’autre part d’étudier et de valoriser la culture des divers caféiers (Chevalier 1929-1947,
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
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Des hommes et des plantes
1946, Leroy 1962, Portères 1963). Un effort tout particulier a été fait pour décrire les
espèces sauvages de Madagascar (Leroy 1961, 1962, Portères 1962).
Figure 7 : Planche de caféier sauvage « Coffea maclaudi » collecté par Chevalier en Guinée et publié
en 1905 (actuellement C. canephora)
© J. Larco-Laurent, MNHN
49
Les espèces présentes en herbier dans la collection d’ethnobotanique sont Coffea
arabica, canephora, congensis, humilis, liberica (incluant excelsa) et stenophylla (environ 8
000 parts). Signalons que les herbiers de Coffea canephora de Haute Guinée ont été inclus
dans une toute récente étude génétique (Labouisse et al. ss. pr.).
50
Cette collection comporte également près de 2 500 bocaux contenant des grains de
nombreuses espèces et variétés, avec des collectes s’échelonnant de 1904 à 1962
(Figure 8). Ces échantillons d’espèces sauvages et de cultivars proviennent de missions
de collectes, de plantations de producteurs, de missions catholiques et de stations
expérimentales agronomiques, du monde entier (Afrique, Asie, Amérique, Océanie).
Espèces et groupes représentés : Coffea arabica, canephora, congensis, humilis, liberica,
stenophylla, et sous-sections Pachycoffea12 (incluant excelsa), mozambicoffea, mascarocoffea.
Les grandes espèces économiques (arabica, canephora, liberica) sont représentées par de
nombreux échantillons plantés dans plusieurs pays et sur plusieurs continents.
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Des hommes et des plantes
Figure 8 : Le meuble aux échantillons de grains de café
© S. Juraver, MNHN
Sorgho (Sorghum bicolor)
51
La collection de Sorgho est riche de plus de 1 100 spécimens, qui sont des plantes
entières mais surtout des épis, de nombreuses variétés provenant de tous les pays
d’Afrique sahélienne où cette plante est cultivée (Burkina, Cameroun, Côte d’Ivoire,
Mali, Niger, Sénégal, Sénégal-Casamance, Tchad, Togo), mais aussi d’Afrique du Sud et
orientale (Somalie), ainsi qu’hors d’Afrique (Inde, Vietnam, Yémen, USA). Les collectes
s’échelonnent de 1899 à 1985.
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Des hommes et des plantes
Figure 9 : Spécimens de sorghos reçus par Chevalier en 1932-1933 de Guinée et du Mali
© J. Larco-Laurent et S. Juraver, MNHN
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Des hommes et des plantes
Fonio (Digitaria exilis)
52
La collection comporte environ 300 parts d’herbiers de fonio, des principaux pays où
cette plante est cultivée : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Sénégal,
Sénégal (Casamance), Togo. La majorité vient du « collectement systématique » que
Portères a engagé de 1945 à 1950 avec l’aide des services agronomiques d’Afrique de
l’Ouest (Portères 1955c). Quelques spécimens ont été collectés auparavant par Chevalier
(1924 en Guinée par exemple).
Figure 10 : Spécimen de fonio collecté par Portères en Guinée
© S. Bahuchet, MNHN
Mil (Pennisetum glaucum)
53
Cette collection imposante est constituée de plus de 200 spécimens d’épis de milchandelle montés sur carton, provenant essentiellement du Mali, du Niger et du Tchad,
mais aussi d’Inde pour un petit nombre (Portères 1976). Elle contient également des
épis de très grande taille, dans des liasses hors norme.
Autres plantes cultivées
54
Moins importantes, les séries d’autres plantes cultivées n’en sont pas moins présentes,
généralement sous forme de grains ou d’épis, selon les missions et séjours sur le
terrain. Ces échantillons ne sont pas nécessairement réunis dans un même ensemble
cohérent, mais peuvent être dispersés dans les collections géographiques.
55
On notera en premier lieu plus d’une centaine d’épis de maïs (Zea mays), provenant
d’Afrique (Bénin, Togo, RCA, Madagascar…), d’Amérique (Mexique, USA, Canada,
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
18
Des hommes et des plantes
Équateur, Pérou), d’Asie (Laos…) et d’Europe (France, Italie), dont les plus anciens ont
été récoltés par Chevalier au Bénin en 1899 et 1910, et les plus récents viennent du
Mexique en 2017 et du Laos en 2018.
56
Le deuxième ensemble intéressant concerne les haricots américains (Phaseolus spp.),
avec près de 100 échantillons, d’une dizaine de pays (Tableau 4). Là encore, les plus
anciens, Phaseolus lunatus, ont été récoltés par Chevalier (1899 Guinée, 1903 Oubangui).
Quelques échantillons sont des mélanges de variétés, tels qu’on les trouve sur les
marchés.
Tableau 4 : Origine des haricots Phaseolus
57
Deux autres ensembles plus modestes méritent mention, d’une part des espèces et
variétés de piments (Capsicum annuum, C. baccatum, C. chinense, C. frutescens, C. pubescens)
de diverses régions du monde (notamment Mexique, Pérou, Brésil, Guyane, Espagne,
France, Hongrie), et d’autre part une intéressante collection de 60 bocaux de variétés
de dattes (Phœnix dactylifera) de Tunisie, provenant d’une exposition coloniale de la fin
du XIXe ou du début du XXe siècle (Figure 11).
Figure 11 : Spécimens de dattes de Tunisie
© J. Larco-Laurent, MNHN
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19
Des hommes et des plantes
58
Rappelons enfin qu’il y a aussi des planches de plantes cultivées (dont des branches de
maniocs Manihot esculenta) dans les « herbiers ethnobotaniques », parmi l’ensemble de
la flore connue des sociétés étudiées.
59
La toute dernière collection entrée est une collection de 40 échantillons de variétés
françaises de blés de Côte-d’Or, offerte en 2016 par M. Bernard Ronot, au nom de
l’association « Graines de Noé », pour témoigner des efforts militants de paysans
prônant une autre agriculture basée sur la diffusion de semences « bios et
reproductibles » de variétés anciennes et locales (Figure 12)
Figure 12a et b : Collection de semences de blés de Côte-d’Or de l’association « Graines de Noé »
© S. Juraver, MNHN
Carpothèque et matières végétales
60
Outre les graines et épis des plantes cultivées mentionnées plus haut, les collections
comptent plusieurs milliers d’échantillons de graines de plantes spontanées, qui sont
conservés dans des bocaux, secs ou humides, dans des sachets ou dans des boîtes. Il
s’agit de fruits secs ou de graines, dont une grande partie résulte des explorations d’A.
Chevalier. Notons aussi que les ethnologues et linguistes, dans le but de documenter les
connaissances ethnobotaniques des ethnies qu’ils étudient, ont rapporté soit des
herbiers, soit des éléments secs dans le but d’obtenir la détermination des plantes.
61
Une partie de ces graines avait été réunie comme base de comparaison en vue de
déterminations muséologiques, par exemple pour des colliers ou des ornements, ou
bien des renseignements pour le Centre anti-poison en cas d’ingestion de plantes, ou
encore pour des recherches ethnobotaniques.
62
Les matières végétales sont constituées essentiellement d’écorces, de fibres (cotons, par
exemple), de farines diverses, de résines (copal par exemple), d’huiles et graisses,
conservées dans des sachets ou dans des bocaux de verre. Elles ont, elles aussi, leur
origine dans les expéditions de Chevalier (Figure 13). Considérées pour leur intérêt
économique potentiel, certaines séries sont issues d’expositions internationales ou
coloniales. Mentionnons un ensemble provenant du Musée colonial de la Chambre de
commerce de Lyon, recueilli par André Leroi-Gourhan lorsqu’il dirigeait le département
de technologie comparée du Musée de l’Homme, et un autre ensemble très volumineux,
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20
Des hommes et des plantes
provenant d’une exposition coloniale non encore identifiée, et déposée dans nos
collections par le laboratoire de Phanérogamie (Figure 14).
Figure 13a et b : Exemples de graines et matières, collectées par G. Condominas (Vietnam, à g.), et
par Chevalier (RDC, à dr.)
© J. Larco-Laurent, MNHN
Tableau 5 : Les grandes collections de matières végétales
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
21
Des hommes et des plantes
Figure 14 : Anciennes collections coloniales, échantillons de tissus végétaux
© S. Bahuchet, MNHN
63
En dernier lieu, mentionnons la collection de plantes médicinales (en herbier) et de
matière médicale recueillie par Louis Girault en Bolivie (850 échantillons) lors de ses
recherches sur les guérisseurs itinérants, et dont Cl. Friedberg a assuré la publication
(Girault 1984 ; voir aussi Brousse 2017), ainsi qu’une collection de plantes médicinales
du Pérou collectées par Friedberg sur les marchés (Friedberg 1963).
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
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Des hommes et des plantes
Figures 15a et b : Spécimens et herbier de plantes médicinales de Bolivie, collectés par L. Girault
© S. Juraver, MNHN
Bois
« Le Laboratoire d'Agronomie coloniale possède à l'heure actuelle la plus riche
collection de bois qui ait été recueillie tant en Afrique tropicale qu'en Indochine.
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
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Des hommes et des plantes
Cette collection, formée sous notre direction par notre dévoué et si regretté
collaborateur F. Fleury, est accompagnée de notes et de renseignements botaniques
qui permettent l'identification exacte des bois et font connaître les emplois dont ils
sont susceptibles, grâce à une documentation tenue constamment à jour depuis
1906. » (Chevalier 1921 : 9)
64
Le plus gros des collections d’échantillons de bois provient en effet des activités
d’Auguste Chevalier, qui a recueilli environ 20 000 plaquettes, ainsi que des buchettes,
auxquelles sont associées des parts d’herbier de l’Herbier général. La collection a été
enrichie régulièrement par des dons d’une vingtaine de collecteurs et d’institutions,
parmi lesquelles des gouvernements (Australie, Philippines, Maurice), des instituts de
recherche (Universités de Yale, de Syracuse, Forest Institute de Séoul, le CIRAD (exCTFT), l’ONF, le Museu communal de Para, le Musée de Tervuren). Une partie a un
double au CIRAD (ex-Centre technique forestier tropical) actuellement à Montpellier.
65
Ces échantillons proviennent d’Afrique de l’Ouest (Côte d’Ivoire, Mali, Sénégal, Libéria),
d’Afrique centrale (Gabon, Cameroun, RDC), d’Asie (Vietnam, Indonésie (Kalimantan),
Philippines, Corée, Chine), d’Océanie (Tahiti, Marquises, Australie, PNG), d’Amérique
(USA, Vénézuela, Brésil, Equateur, Guadeloupe) ainsi que de Maurice et de France.
66
Plusieurs anatomistes du bois ont œuvré au laboratoire, apporté des échantillons
nouveaux et analysé les bois ; ils ont assuré des déterminations pour divers musées ou
expositions en utilisant la collection comme référence (Arlette Plu, Didier Normand,
plus récemment Catherine Orliac). Il en résulte de belles séries sur l’Océanie et
l’Extrême Orient (Japon, Chine).
67
Il est prévu que cette collection rejoigne la Xylothèque de l’Herbier national, toutefois
avec la nécessité absolue que l’origine en soit conservée.
Figure 16 : Plaquettes de bois du Gabon
© J. Larco-Laurent, MNHN
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Des hommes et des plantes
Objets et outils
68
Les chercheurs du laboratoire d’ethnobotanique ont collecté ou accueilli quelques
objets qui témoignaient des relations avec la plante.
69
Au départ, Chevalier ne collectait pas d’outils, malgré l’attention qu’il portait à
l’agriculture autochtone et à ce qu’il nommait « les procédés de culture » 13. Il a suscité
des enquêtes sur ce sujet, en particulier en diffusant un questionnaire à ses
correspondants en Afrique (Chevalier & Sacleux 1940). Parmi les réponses qu’il a
publiées dans sa Revue de Botanique Appliquée, l’une se distingue par la qualité de la
description des outils aratoires du Cameroun et ses nombreuses illustrations (JacquesFélix 1940). Lui-même a consacré un article illustré sur certains instruments aratoires
d’Afrique occidentale (Chevalier 1940). Mais il n’en a pas résulté de collections.
Chevalier a recueilli au cours de sa mission de 1930 une belle série de masques de Côte
d’Ivoire, relevant précisément l’espèce d’arbre dont ils étaient tirés (Figure 17). Les
anatomistes du laboratoire, Arlette Plu et Didier Normand, ont ultérieurement procédé
à la vérification des déterminations.
Figure 17 : Deux masques Gouro collectés en Côte d’Ivoire par Chevalier en 1930, et une étiquette
© J.-C. Domenech, MNHN
70
Portères avait accueilli quelques beaux outils d’Afrique de l’Ouest, malheureusement
mal documentés (Figure 1814). Dans l’ensemble, il faut attendre les années 70 pour que
le dépôt d’objets soit moins aléatoire, sans être vraiment l’objet d’activités spécifiques :
entrent ainsi au laboratoire une belle série d’une cinquantaine d’objets en calebasse du
Burkina Faso et du Mali collectés par Hubert Gillet et par Pierre Garnier (Figure 19), un
tissu en écorce battue d’Océanie, des vanneries du Mexique…
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
25
Des hommes et des plantes
Figure 18 : Grande houe droite de Guinée. Longueur 241 cm, largeur 16 cm
© M. Kourdourli, MNHN
Figure 19a et b : Récipient et cuillère en calebasse d’Afrique de l’Ouest, collectés par Hubert Gillet
et Pierre Garnier
© S. Juraver, MNHN
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26
Des hommes et des plantes
71
Raymond Pujol, professeur d’ethnozoologie, quant à lui, réalise et fait réaliser par ses
élèves des collectes plus systématiques d’objets en lien avec l’utilisation du milieu
naturel, en France et en Afrique centrale. On lui doit, notamment, une spectaculaire
collection d’une quarantaine de ruches traditionnelles des provinces de France
(Figure 20), dont une partie est exposée dans la galerie permanente du Musée de
l’Homme.
Figure 20 : Ruche paysanne du Diois, en tronc de chêne
© J.-C. Domenech, MNHN
72
Au cours de ces vingt dernières années, la collecte d’objets « ethnobiologiques » s’est
faite plus systématique, permettant ainsi d’atteindre près de 4 000 objets, presque tous
confectionnés à base de plantes, avec des thèmes majeurs : vannerie, récipients de bois,
objets liés à l’usage ou à la transformation des plantes (agriculture, artisanat, cueillette,
alimentation). On s’attache également à collecter des produits alimentaires à base
végétale, obtenus sur les marchés ou dans les épiceries, tant en milieu urbain que rural
(Figure 23).
73
Le but de ces collections est de lier, le plus précisément possible, l’objet avec la plante,
en obtenant la détermination des espèces ayant servi à les construire, ainsi que celles
qui sont visées par l’outil (Figure 21). Cet objectif est loin d’être atteint, car
l’information n’a pas toujours été recueillie sur le terrain lors de l’acquisition de
l’objet ; il faut donc procéder à la détermination a posteriori, avec toutes les incertitudes
que cela comporte.
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
27
Des hommes et des plantes
Figure 21 : Cadre conceptuel de la relation spécimen-objet
La documentation associée
74
Dès l’origine, la conjonction de la documentation et des collections, herbiers ou
échantillons, a été impérative. Chevalier et Portères insistent tous les deux sur ce fait
pour eux fondamental (Figure 22). On l’a dit, tous les deux créèrent une revue pour
accueillir les informations et recherches, la Revue de botanique appliquée de Chevalier
(1921), et le Journal d’agronomie tropicale de Portères (1954) (Hoare 2012 pour l’histoire
de ces revues et leurs titres successifs). D’ailleurs Portères avait créé au sein de son
laboratoire un Centre de documentation en ethnobotanique très dynamique, associé avec le
CNRS.
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
28
Des hommes et des plantes
Figure 22 : Le système des collections bioculturelles
75
Les informations de base ne sont malheureusement pas toujours associées en détail
avec les planches d’herbier, mais sont contenues dans des articles, des thèses, des
livres, voire dans des courriers ou des fichiers. Un important travail de report des
informations sur les échantillons et dans la base de données est à réaliser minutieusement.
Prospective
Le contexte de la recherche ethnobotanique au XXIe siècle
La Convention de la diversité biologique et le Protocole de Nagoya
76
Les recherches ethnobotaniques menées au XXIe siècle n’ont plus grand-chose à voir
avec celles du siècle dernier. Les conditions du terrain ont changé ; les législations
nationales et internationales imposent des autorisations quelquefois complexes à
obtenir. Parmi les conventions internationales, on mentionnera la CITES (1975) 15 qui
règlemente la circulation des espèces protégées, et surtout la Convention de la diversité
biologique (CDB 1992) qui porte notamment attention aux savoirs locaux. Son
développement, le Protocole de Nagoya (2010), renforce les droits des communautés
autochtones sur leur propriété intellectuelle concernant les ressources de la
biodiversité, ce qui implique de la part des chercheurs et des musées, beaucoup plus de
démarches préliminaires aux recherches et à la collecte des échantillons 16.
77
Un point est tout particulièrement d’importance pour nos collections ethnobotaniques.
La Convention recommande « le rapatriement des informations », y compris des
« connaissances autochtones et traditionnelles » (CDB, § 17/2). Plusieurs décisions ont
été prises au cours des dernières conférences des parties (CdP) 17 qui explicitent cette
recommandation initiale. En 2010, la 10e Conférence des Parties a adopté un code de
conduite éthique pour le respect du patrimoine culturel et intellectuel des
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
29
Des hommes et des plantes
communautés locales (Décision X/4218), qui insiste sur le « rapatriement des
informations nécessaires pour faciliter la récupération des connaissances
traditionnelles liées à la diversité biologique » (§ 23). En 2014, la décision 12 de la 14 e
CdP, lignes directrices facultatives pour le rapatriement des connaissances
traditionnelles (Décision XIV/1219), est plus précise. En premier lieu elle définit le terme
« rapatriement », comme signifiant « le retour des connaissances, innovations et
pratiques des peuples autochtones et communautés locales vers leur lieu d’origine ou
d’obtention, aux fins de récupération, de revitalisation et de protection des
connaissances sur la diversité biologique » (§ 9). Elle incite ensuite chaque institution
« qui détient, stocke ou héberge des connaissances traditionnelles » (…) « d’identifier le
contenu des collections (…) pour un éventuel rapatriement et de prendre des
décisions » le concernant (§ 26). Ce rapatriement peut être réalisé à l’aide de la
numérisation des collections, « en assurant une participation pleine et effective des
peuples autochtones et des communautés locales » (§§ 47, 48 20).
78
Ces décisions entraînent pour le Muséum, à la fois une responsabilité et un programme,
en ce qui concerne ses collections de spécimens et d’informations ethnobotaniques.
79
Le MNHN se veut, en termes d’ethnobiologie, être un lieu de conservation de la mémoire
des peuples, une archive des savoirs locaux. La raison d’être des collections des spécimens
est de conserver les témoins et supports de ces savoirs ; la condition est que ces
informations dûment conservées, soient accessibles pour tous, et en tout premier lieu
pour les communautés auprès desquelles elles ont été obtenues.
80
Ce faisant, le MNHN remplira sa part des engagements de la France envers la
Convention de la diversité biologique, et envers les communautés locales auprès
desquelles les collections ont été recueillies.
Un programme de travail
81
Il ne faut pas cacher que de très gros travaux sont devant nous. En premier lieu, de
nombreux lots sont encore dans l’état de leur arrivée dans les années 50, et restent
donc à visiter et reconditionner. Ensuite, la compilation des informations et leur report
sur les étiquettes restent à compléter dans la plupart des cas. Enfin, l’inventaire et la
numérisation n’en sont qu’au début. Tout cela freine l’usage scientifique de ces
collections prometteuses, mais ne l’empêche nullement. Le plan de travail est clair, qui
débouchera sur une base de données et sur un meilleur rangement des collections, dont
une partie (les herbiers « ethnobotaniques ») sera intégrée dans l’Herbier national
(comme Chevalier en avait déjà l’intention en… 1930 !), et l’autre (les plantes cultivées
et les matières végétales, principalement) dans une section dédiée du même « Palais de
la botanique » (selon son expression) récemment rénové (Joannot 2014).
82
Le rapprochement avec l’Herbier national devra aussi être l’opportunité pour retrouver
dans la collection générale les informations ethnobotaniques qui s’y trouvent. Nous
savons qu’il y a des notes sur les étiquettes des herbiers de Chevalier et de ses
correspondants, et notamment Eugène Poilane pour l’Indochine (au moins des noms
locaux). Il y en a aussi sur les herbiers historiques (cf. Nesbitt 2014 qui en donne
quelques exemples, tout en marquant le rôle de l’herbier dans la pratique de
l’ethnobotaniste) ; il y a des collections de matières végétales dans la Carpothèque, et
l’ensemble remarquable que constitue le « Droguier de Jussieu » qui rassemble des
produits à base végétale et qui reste à étudier. Il en va de même avec les collections de
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
30
Des hommes et des plantes
la Séminothèque, usuellement nommée « Graineterie du Muséum » qui, par exemple,
conserve nombre de graines souvent utilisées dans des ornements, similaires à ceux des
collections d’ethnobotanique.
83
Dans le même ordre d’idées, la rénovation du Musée de l’Homme en 2014-2015 a permis
le rapprochement physique de la collection des objets issus du laboratoire
d’ethnobiologie avec la collection issue de l’ancien laboratoire d’ethnologie, objets qui
présentent de très nombreuses similitudes. Un enjeu majeur consiste donc à associer
ces deux ensembles en une seule collection d’objets, et d’en associer les informations
avec le monde vivant qu’ils concernent, c’est-à-dire avec l’ensemble d’ethnobotanique,
notamment (Bahuchet 2014, Pennec et al. 2014).
84
L’un des buts de la base de données en cours d’établissement sera ainsi d’opérer des
liens entre tous ces ensembles de collections, à partir du référent taxonomique. Ainsi le
MNHN disposera d’une base de données réellement ethnobiologique, faisant le pont entre le
monde vivant et les sociétés humaines, ce qui pourrait être un outil unique au monde !
Évolution des collections
85
Les collections d’ethnobotanique documentent les relations des sociétés humaines avec
le monde des plantes, ce qui concerne les savoirs (a minima la terminologie, portée sur
les échantillons de végétaux, dans les herbiers, le bois ou la carpothèque) et les usages
(les savoir-faire), ce qui se traduit par la transformation des végétaux de matière
première en objet. Ces collections sont évolutives, en ce sens qu’elles doivent être
actualisées en permanence, pour refléter l’évolution des sociétés.
86
Tout en poursuivant les collectes associées aux recherches sur le terrain, nous avons
par ailleurs dégagé trois thèmes privilégiés, pour enrichir les collections de matières
végétales et d’objets liés aux plantes. Ces thèmes reflètent à la fois des usages
persistants, de nouveaux usages et usagers, en allant au-delà des « communautés
locales » et hors des villages, vers les villes. Il faut en effet prendre en compte que
désormais, la moitié de la population mondiale vit dans les villes, et qu’en conséquence
les communautés villageoises diminuent et changent de style économique. Ces thèmes
sont :
- Les aliments à base végétales, dans leur conditionnement commercial, recueillis dans les
épiceries des grandes villes, prenant en compte les communautés multiculturelles,
comme témoignage de l’évolution de la population. Ainsi à Paris, on a pu collecter en
2013, des sachets d’aliments, constitués de plus de 40 espèces de plantes différentes
d’Afrique, d’Asie et d’Amérique ! (Figure 23).
- Des objets artisanaux à base végétale, en tout premier lieu les vanneries et les ustensiles
en bois, collectés sur les marchés ou dans les quincailleries (Bye & Linares 1983).
- Des objets à base végétale témoignant des changements culturels : d’une part des matières
« traditionnelles » employées pour réaliser des objets avec des usages et des utilisateurs
nouveaux (citadins, voyageurs, par exemple les colliers et ornements avec des graines
locales ou de nouveaux types de vanneries pour des emplois nouveaux), d’autre part
des nouvelles matières pour de nouveaux usages (savons, compléments alimentaires
« alicaments », nouveaux objets d’artisanat destinés aux usages urbains…)…
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
31
Des hommes et des plantes
Figure 23a, b, c : Aliments végétaux collectés à Paris : Chuño, pommes de terre déshydratées
(Pérou), couscous de mil Pennisetum glaucum (Sénégal), filaments de piments Capsicum annuum
(Corée)
© S. Bahuchet, MNHN
Conclusion
87
Fortes de près de 100 000 items, les collections d’ethnobotanique du Muséum se sont
constituées en plus d’un siècle. Créées au sein d’un seul laboratoire, elles en ont suivi
l’évolution mais aussi les vicissitudes, tout particulièrement dans la période récente. En
effet, d’une part elles portent durablement la marque des fortes personnalités
scientifiques qui ont dirigé le laboratoire, Auguste Chevalier puis Roland Portères, qui
chacun selon son programme a impulsé une orientation bien nette aux collections.
D’autre part, elles ont été créées en dehors du laboratoire de phanérogamie, gardien du
grand herbier historique et universel, parce qu’elles avaient une finalité nettement
différente, une orientation vers les plantes utiles, les plantes cultivées, la botanique
appliquée (ce que l’on nomme « botanique économique » dans le monde anglophone –
voir annexe IV). Les profondes restructurations du Muséum au tournant du millénaire
ont nettement marginalisé l’ethnobotanique, à la fois dans le champ des recherches et
dans celui des collections, qui peuvent avoir été par exemple oubliées, reléguées au
grenier et ainsi exclues du grand chantier de rénovation et de restructuration du grand
herbier. Depuis une décennie, de grands efforts ont été déployés de la part des auteurs
de cet article, pour proposer un programme en faveur des recherches et des collections
ethnobotaniques, qui passe tout d’abord par la mise en évidence de leur spécificité au
sein des collections du Muséum, de leur richesse, de leur diversité et de leur potentiel
en termes de recherche et de diffusion.
88
Nos prédécesseurs ont, avec leurs objectifs, constitué des collections au cours de leur
vie active, Auguste Chevalier à la toute fin du XIXe et au début du XXe siècle, Roland
Portères dans la deuxième moitié du XXe siècle, ses successeurs à la fin du XXe siècle. Il
nous revient de poursuivre la chaîne, en documentant les relations des humains avec
les végétaux au début du XXIe siècle. Une collection qui ne s’accroît pas est une collection
morte.
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Des hommes et des plantes
BIBLIOGRAPHIE
Cette bibliographie comporte les références citées dans l’annexe III.
Antaki I. 1973 – Deir-Atieh (Syrie) : essai d'ethnographie rurale. Paris, Société d'études de la botanique
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Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
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Des hommes et des plantes
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ANNEXES
I) Les collecteurs
Tous types de collections confondus (herbiers, graines, bois)
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
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Des hommes et des plantes
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
39
Des hommes et des plantes
II) Zones géographiques et pays pour l’ensemble de la collection
Tous types de collections confondus (herbiers, graines, bois)
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
40
Des hommes et des plantes
III) Lieux et groupes ethniques (représentés dans les herbiers ou les cultivars)
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
41
Des hommes et des plantes
IV) Quelques collections de botanique économique
Nos collections d’ethnobotanique présentent des similitudes, et des différences, avec
les collections d’Economic Botany de plusieurs institutions.
La plus ancienne est celle des Royal Botanic Gardens à Kew, en Grande Bretagne,
créée en 1841 dès la fondation du Jardin botanique par William Hooker. Celui-ci
rassemble des spécimens de textiles, de gommes, de teintures, de bois dans un musée
de botanique économique qui ne cesse de s’agrandir jusqu’à compter près de 100 000
items, incorporant des matières médicales, alimentaires et techniques brutes et de très
nombreux artefacts faits avec des plantes, dont les composants botaniques sont
déterminés. Les planches d’herbiers recueillies lors des travaux d’ethnobotanique sont
quant à elles incorporées dans l’herbier général.
Les collections du New York Botanical Garden sont présentes depuis l’origine du
Jardin botanique, en 1891, à partir d’une collection de bocaux de matières végétales et
de drogues pharmaceutiques réunie par Henry H. Rusby (1855-1940), qui fonda le Jardin
puis un Museum of Economic Botany en 1899. Depuis, cette collection s’est enrichie en
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
42
Des hommes et des plantes
artefacts et objets divers faits de plantes, tels que des vanneries, ainsi qu’en produits de
marchés, notamment les marchés ethniques de New York (cf. Balick & Herrera 2014).
Les spécimens et échantillons sont rangés par ordre taxonomique. Comme à Kew, les
herbiers sont incorporés dans l’herbier général.
À Mexico, la Colección Etnobotánica est une section de l’Herbier national, conservé dans
l’Institut de Biologie de l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM), avec le
Jardin botanique. Elle a été constituée à partir de 1982, et compte environ 3000
spécimens provenant de toutes les régions du Mexique. Elle comporte des plantes
comestibles, médicinales, des matières utilisées dans l’artisanat, des graines et
semences (maïs, haricots, amarantes notamment), et des objets, tous collectés sur le
terrain ainsi que sur les marchés. Les herbiers sont incorporés dans l’herbier général,
mais des planches stériles ou des échantillons en double sont conservés dans la section
ethnobotanique.
Si les objectifs généraux sont similaires, ainsi que les types de spécimens conservés, on
relèvera que les collections du Muséum de Paris se distinguent de ces trois célèbres
ensembles par la proportion extrêmement importante des plantes cultivées,
notamment les céréales. Pour ces trois grandes institutions de référence, la
constitution d’un ensemble de collection spécifique, installé à côté et en
complémentarité avec l’Herbier général s’est imposée, qui documente les relations des
sociétés humaines avec le monde végétal.
NOTES
1. Chevalier précise dans ses titres et travaux en 1923 : « Nous avons consacré à la botanique
appliquée, et notamment à l’étude des plantes utiles des colonies françaises une grande partie de
notre activité depuis vingt-cinq ans. Nos recherches effectuées presque toujours sur le terrain
(…) avaient pour but de déterminer les conditions les plus rationnelles de conservation et
d’exploitation des plantes utiles spontanées ou cultivées, d’en faire l’inventaire dans chacune des
colonies que nous avons traversées, de rechercher les espèces et variétés cultivées par les
indigènes (…) » (1923 : 89).
2. La notion et le terme d’ethnobotanique sont présents dans le laboratoire d’agronomie
tropicale dès que Portères en prend la direction, comme en témoignent un article et des rapports
d’activités publiés dans le JATBA (Portères 1955a, 1955b, 1957).
3. Paul Rivet (1936 : 708-5) mentionne que A.-G. Haudricourt avait bénéficié d’une bourse de
l’Institut d’ethnologie afin de réaliser son premier voyage en Russie auprès de Nicolas Vavilov en
1934, pour y « étudier des problèmes d’ethno-botanique ». C’est à notre connaissance une des
premières apparitions de ce terme dans un document scientifique français, sinon la première.
C’est au retour de sa mission que Haudricourt compose, avec Louis Hédin, leur livre fondateur
L’homme et les plantes cultivées, paru en 1943, dans le laboratoire de Chevalier (qui le préface), livre
qui se conclut sur « ce que nous paraissent devoir être les sources et les moyens de l’EthnoBotanique » (p. 203). Sur l’influence de Haudricourt sur Portères pour la création de la chaire
d’ethnobotanique, voir Bahuchet & Lizet 2003.
4. Voir Lizet & Hoare 2008 pour le rôle des collectes lors de son exploration botanique dans la
mission Chari - Lac Tchad de 1902-1904.
5. « L'Ethnobotaniste doit systématiquement recueillir des échantillons des Plantes auxquelles il
fera référence par ailleurs, en épuisant, s'il le faut, la variation naturelle ; le collectement des
seuls fragments végétaux utilisés ou transformés devient d'un intérêt relatif devant la sûreté
Revue d’ethnoécologie, 16 | 2019
43
Des hommes et des plantes
dans l'identification et la comparaison des échantillons d'un lieu à un autre ou d'âge en âge. La
présence ethnographique d'une espèce ou d'une variété de plante constitue un document de très
grande valeur dans l'étude de l'origine et de la dispersion des plantes cultivées ou simplement
utilisées. » (Portères 1961 : 106).
6. Portères crée avec le CNRS un « Centre de recherches, d'études et d'informations
ethnobotaniques et ethnozoologiques » (RCP 97) qui devient en 1971 « Centre d'identification et
d'interprétations ethnobotaniques et ethnozoologiques » (RCP 295).
7. Voir par exemple la fiche « Aide-mémoire pour établir une fiche de travail sur le terrain
concernant les plantes d'intérêt alimentaire » (1967).
8. La SEZEB avait été créée par R. Portères, la linguiste Jacqueline M. C. Thomas et A.-G.
Haudricourt.
9. Il faut préciser qu’il s’agit là de l’incorporation de lots dans la collection, et non pas du nombre
de spécimens. Les pourcentages n’indiquent donc pas le volume, mais le nombre de collecteurs
ayant contribué à l’enrichissement de la collection.
10. - L’Herbier général conserve les types de riz sauvages décrits par Chevalier : Oryza breviligulata
A. Chev. & Roehr. [type P00434577], O. guineensis A. Chev. [isotype P00434578] et O. longistaminata
A. Chev. & Roehr. [holotype P00446261, isotype P00446262].
11. - [Holotype herbier de Paris P00553354]. Coffea excelsa est désormais en synonymie avec C.
liberica var. dewevrei (cf. Davis et al. 2006).
12. - Cette section n’est pas conservée actuellement (cf. Charrier & Berthaud 1985).
13. - « Loin de mépriser les méthodes des cultures indigènes, nous devons les observer de très
près, nous faire expliquer par le paysan le pourquoi de chaque chose. (…) On notera l’opinion des
indigènes sur la valeur des différents sols qu’ils savent fort bien distinguer et auxquels ils
donnent des noms différents dans leurs dialectes. On les interrogera sur les indications que
fournit la végétation spontanée sur la valeur des terres (…) » (1930 : 35)
14. Un outil similaire est illustré chez les riziculteurs Baga de Guinée (Paulme 1957).
15. - CITES : Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages
menacées d'extinction, connue encore comme Convention de Washington (entrée en vigueur en
1975).
16. - Trois sections du Protocole de Nagoya concernent nommément les savoirs locaux (§§ 7, 12,
16) ; elles portent sur l’accès aux connaissances traditionnelles associées aux ressources
génétiques, qui est soumis au « consentement préalable donné en connaissance de cause » et à
l’établissement de « conditions convenues d’un commun accord » avec les détenteurs de ces
savoirs.
17. - Les Conférences des parties sont les réunions biennales des 196 Etats signataires de la
Convention.
18. - « Code de conduite éthique Tkarihwaié:ri propre à assurer le respect du patrimoine culturel
et intellectuel des communautés autochtones et locales » : « § 23. : Des efforts devraient être
déployés en vue du rapatriement des informations nécessaires pour faciliter la récupération des
connaissances traditionnelles liées à la diversité biologique. »
19. - « Les Lignes directrices facultatives Rutzolijirisaxik pour le rapatriement des connaissances
traditionnelles des peuples autochtones et des communautés locales présentant un intérêt pour
la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique ».
20. - § 48 : « (…) Les bonnes pratiques de rapatriement peuvent aussi inclure la mise à disposition
gratuite des collections et données en ligne, ainsi que la facilitation de l’accès aux collections qui
ne sont pas en format numérique. »
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Des hommes et des plantes
AUTEURS
SERGE BAHUCHET
Professeur, UMR 7206 Éco-anthropologie, Muséum national d'Histoire naturelle
JULIEN BLANC
Maître de conférences, UMR 7206 Éco-anthropologie, Muséum national d'Histoire naturelle
CATHERINE HOARE
Ingénieur d'études, UMR 7206 Éco-anthropologie, Muséum national d'Histoire naturelle
SIMON JURAVER
Technicien, UMR 7206 Éco-anthropologie et Direction des Collections, Muséum national
d'Histoire naturelle
MYRIAM KOURDOURLI
Direction des Collections, Muséum national d'Histoire naturelle
FLORA PENNEC
Ingénieure d'études, UMR 7206 Éco-anthropologie, Muséum national d'Histoire naturelle
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