Communication, technologies et
développement
9 | 2021
Science ouverte/Open science : Regards croisés sur la
transmission de la science, ses engagements, ses
innovations et ses risques
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice
Multidimensionnel de Résilience
Evaluación de la resiliencia comunitaria : el Índice de Resiliencia
Multidimensional
Community resilience assessment : the Multidimensional Resilience Index
Julien Salava, Holimalala Randriamanampisoa, Thierry Razanakoto, Pierre
Lazamanana, Aina Andrianjakatina et Mahefasoa Randrianalijaona
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/ctd/3881
DOI : 10.4000/ctd.3881
ISSN : 2491-1437
Éditeur
Chaire Unesco Pratiques émergentes en technologies et communication pour le développement
Édition imprimée
ISBN : 2491-1437
Référence électronique
Julien Salava, Holimalala Randriamanampisoa, Thierry Razanakoto, Pierre Lazamanana, Aina
Andrianjakatina et Mahefasoa Randrianalijaona, « Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice
Multidimensionnel de Résilience », Communication, technologies et développement [En ligne], 9 | 2021, mis
en ligne le 26 mars 2021, consulté le 31 mars 2021. URL : http://journals.openedition.org/ctd/3881 ;
DOI : https://doi.org/10.4000/ctd.3881
Ce document a été généré automatiquement le 31 mars 2021.
Communication, technologies et développement
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
Évaluation de la résilience
communautaire : L’Indice
Multidimensionnel de Résilience
Evaluación de la resiliencia comunitaria : el Índice de Resiliencia
Multidimensional
Community resilience assessment : the Multidimensional Resilience Index
Julien Salava, Holimalala Randriamanampisoa, Thierry Razanakoto, Pierre
Lazamanana, Aina Andrianjakatina et Mahefasoa Randrianalijaona
1
Le Cadre d’action de Hyogo (2005 – 2015) ainsi que le Cadre de Sendai pour la Réduction
des Risques de Catastrophe (2015-2030), ont mis la résilience au cœur de l’analyse de
gouvernance des risques liés aux catastrophes. Elle est employée comme un concept
destiné à orienter la pratique sur le changement et la variabilité climatiques et le
développement en général et s’est imposée au sein des milieux académique et
opérationnel. Par ailleurs, la mesure de la résilience a fait l’objet d’initiatives sérieuses
qui ont traité, soit des systèmes généraux, soit des régions, soit des villes, soit des
communautés plus ou moins restreintes. Benson C. et Twigg J. (2004, 2007) sont parmi
les premiers à avoir proposé une méthodologie pour évaluer la résilience avec des
indicateurs de réalisation aussi bien quantitatifs que qualitatifs pour un état idéal de
résilience. Ils ont ainsi donné une note d’orientation à l’intention des organismes de
développement. Il est intéressant de remarquer que malgré l’émergence de définitions
de la résilience dont les confluences se situent au niveau de la capacité à absorber les
chocs, à s’adapter à un environnement en évolution, et à transformer l’environnement
institutionnel.
2
Le présent travail s’inscrit dans une approche communautaire et participative ; il a
pour objectif de proposer une méthode d’évaluation de la résilience, comprenant
notamment l’Indice Multidimensionnel de Résilience (IMR).
3
Comment mesurer et évaluer le niveau de résilience d’une communauté à travers la
mise en œuvre de cet outil ? Le cas d’une communauté rurale au Sud Est de
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
1
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
Madagascar, comme zone d’études, a permis de le pratiquer pour évaluer la résilience
de ladite communauté suite à l’inondation provoquée par le passage de la tempête
tropicale Chedza en 20151.
Résilience et notion de capabilité
4
Ce travail retient la définition officielle de l’UNISDR qui assimile la résilience à « La
capacité d’un système, une communauté ou une société exposée aux risques de résister,
d’absorber, d’accueillir et de corriger les effets d’un danger, en temps opportun et de
manière efficace, notamment par la préservation et la restauration de ses structures
essentielles et de ses fonctions de base » (UNISDR, 2009 : 27). La résilience représente
ainsi le degré de capacité d’un actif (humain, environnemental, économique, physique,
etc.) à résister et rebondir après un choc dans un délai acceptable grâce à ses propres
ressources et organisation. Dans le contexte aussi bien du développement, que de l'aide
humanitaire, la résilience est encouragée dans la mesure où elle renforce le bien-être
des populations cibles (FSIN, 2014). Elle consiste également à développer les aptitudes
de la communauté et, dans un sens plus spécifique, leurs capacités à se relever après un
choc.
5
L’une des définitions de la résilience souvent rencontrée est aussi « l’aptitude de
groupes ou de communautés à faire face à des contraintes ou à des perturbations
extérieures dues à un changement social, politique ou environnemental » (Adger, 2000).
6
D’après Sen (1985 ; 1993), « les capabilités insistent sur les moyens et dotations
attribués aux individus et se construisent sur les caractéristiques individuelles et
sociales au sein desquelles ils s’insèrent » (Randriamanampisoa, 2011). L’approche par
les capabilités rejoint donc celle de la résilience par cet encastrement social de
l’individu ou de la communauté. Ceux-ci doivent y évoluer et s’y doter de ressources
qu’ils se devront de capitaliser au moment de l’apparition d’un aléa. Les politiques qui
favorisent la résilience ne visent pas à éviter l’aléa, mais à renforcer les capabilités en
vue d’un développement humain durable à travers une atténuation des conséquences
négatives potentielles (Koffi et al. 2015).
L’approche participative comme cadre d’analyse de la
résilience
7
Dans une perspective d’amélioration de la résilience de la communauté, « l’approche
participative est considérée comme une méthode prometteuse, car elle permet à la population
d’être le principal acteur de son développement en exprimant clairement ses problèmes, besoins,
obstacles et opportunités » (Latour J, 2018 : 14). Ce processus permet à la population
d’identifier, prioriser et planifier les actions de développement local et offre une
conjoncture pour créer un changement pragmatique dans la gestion des ressources de
la communauté. De plus, l'approche participative insiste sur l'importance de la
participation active et de la responsabilisation des populations dans toutes les actions
de développement les concernant. Ainsi, une approche participative peut se définir
comme un processus d’apprentissage du milieu qui s’appuie sur le savoir local en vue
de faciliter une meilleure connaissance des conditions de vie et des problèmes des
populations locales. Ce concept est maintenant à la base de la plupart des méthodes et
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
2
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
d’outils mis au point ces dernières décennies pour l'appui au développement. La
communauté ciblée doit prendre des responsabilités à tous les stades du programme de
développement, incluant la planification et la mise en œuvre.
8
Le point central de l'attention dans la gouvernance des risques de catastrophe est la
communauté locale. L'approche participative reconnaît que les populations locales sont
capables d'initier et de soutenir leur propre développement. La principale stratégie
consiste à renforcer les capacités et les ressources des groupes les plus démunis afin de
les aider à réduire leur vulnérabilité et éviter l’avènement de catastrophes à l'avenir.
« Une stratégie est un ensemble de pratiques combinées et mises en œuvre pour faire face à
l’adversité » (Gondard-Delcroix & Rousseau, 2004 : 39). La résilience, quant à elle, se
mesure par la capacité d’une communauté ou d’une société potentiellement exposée
aux aléas à résister ou à se relever afin de maintenir ou revenir au moins à un niveau de
fonctionnement et de structure similaire à celui avant le choc. Elle est aussi déterminée
par le niveau de capacité que possède un système social à s’organiser par ses propres
moyens en vue d’assurer son bon fonctionnement et de poursuivre sa trajectoire. Il
s’agit alors d’un concept qui est loin d’être une vision simpliste se résumant par « oui,
le système est résilient » ou « non, le système n’est pas résilient » et que, entre ces deux
extrêmes, d’autres possibilités représentées par différents niveaux existent. C’est ce
que l’Indice Multidimensionnel de Résilience (IMR) offre comme possibilités.
L’IMR, outil de mesure de la résilience
9
Sur le plan méthodologique, Sen (2004) fournit une justification du bien-être à partir
d’espaces informationnels plus larges, mais ne donne aucune indication sur la façon
dont ils doivent être choisis. S’il ne propose pas une procédure de sélection des
capabilités, c’est parce que ce sont les applications spécifiques, sensibles au contexte,
qui font émerger la liste pertinente de facteurs à considérer (Alkire, 2002).
10
Comme l’étude de la résilience n’est pas l’apanage d’un unique domaine mais, au
contraire, fait appel à plusieurs champs d’analyse (économique, juridique, médecine,
physique, infrastructurel, sociologique, etc.), il s’avère difficile de la mesurer, de
l’observer et surtout de la quantifier directement. En outre, étant donné la nécessité
pour les divers acteurs de concevoir, de mettre en œuvre, de suivre et d’évaluer de
façon plus efficace le renforcement des capacités des populations et des communautés
les plus exposées aux risques, il est indispensable de disposer des informations sur le
degré de résilience des communautés et des ménages qui les composent.
11
En somme, l'IMR répondant aux exigences scientifiques en matière de méthodologie,
possède une construction mathématique relativement simple. Il se mesure par une
moyenne arithmétique pondérée des indices de base qui sont calculés à partir des
variables, lesquelles ont été sélectionnées en considérant l’aspect multidimensionnel de
la résilience. Ainsi, pour le calcul de la résilience, les variables de base sont regroupées
dans un ensemble d’indicateurs qui sont eux-mêmes rassemblés dans un ensemble de
sept (7) critères (économique, social, culturel, institutionnel, organisationnel,
environnemental et renforcement des capacités).
12
L’IMR s’établit en cascade car il se construit progressivement. D’abord, étant donné que
les variables sont exprimées dans diverses unités de mesure (mètre, %, etc.), nous
transformons les différentes variables en indices appelés « indices de base » qui sont
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
3
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
donc calculés et obtenus au niveau des variables. Ensuite, de nouveaux indices sont
calculés au niveau des indicateurs en considérant les indices de base et les
pondérations estimées à partir de l’Analyse en Composantes Principales (ACP). Puis, les
indices au niveau des critères (économique, social, culturel, institutionnel,
organisationnel, environnemental et renforcement des capacités) sont également
calculés en prenant en compte les indices précédemment calculés au niveau des
indicateurs. Enfin, on aboutit à l’Indice Multidimensionnel de Résilience en calculant la
moyenne arithmétique pondérée des indices calculés au niveau des critères.
13
Comme le montre le tableau ci-dessous, des efforts ont été fournis, de manière à
faciliter l’utilisation de l’IMR, par les acteurs de terrain et les décideurs, en particulier
la lecture des résultats obtenus après son application grâce au passage de l’indice aux
scores ainsi que leur signification.
14
L’IMR servant à évaluer le niveau de résilience d’une communauté suite à un choc
donné repose sur deux aspects : i) le degré de résilience de la communauté face à un
choc déterminé et ii) la possibilité de comprendre le pourquoi des résultats obtenus,
bons ou mauvais, et d’apporter des améliorations ou des mesures correctives pour des
meilleurs résultats dans le futur.
15
En outre, la conception de l’IMR prend déjà en compte la dimension temporelle qui est
particulièrement importante en matière de résilience. En effet, sans cette prise en
compte de la dimension temporelle, les résultats pourraient être aisément biaisés car la
communauté ou les ménages qui la composent seraient toujours considérés comme
résilient quel que soit le temps qu’ils consacrent pour rebondir et retrouver le niveau
de bien-être, en l’occurrence après le passage d’un choc.
Tableau : correspondance des indices et des scores pour évaluer la résilience
Indice
Score Niveau de résilience
Résultat
[0,00 – 0,09] 0
Sans résilience
Résultat extrêmement mauvais
[0,10 – 0,25] 1
Hautement non résilient Très mauvais résultat
[0,26 – 0,45] 2
Résilience modérée
Mauvais résultat mais relativement acceptable
[0,46 – 0, 59] 3
Résilience moyenne
Résultat considéré comme acceptable
[0,60 – 0,89] 4
Bonne résilience
Bon résultat
[0,90 – 1,00] 5
Très bonne résilience
Très bon résultat
Source : CERED, 2015
La communauté rurale dans le Sud Est de Madagascar
comme cadre d’application de l’IMR
16
La communauté d’Ambaro Bekibo qui fait partie des huit Fokontany 2 composant la
Commune rurale d’Ankatafana, dans le district de Mananjary, Région Vatovavy
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
4
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
Fitovinany a été choisie pour appliquer l’IMR. Mananjary se trouve dans la partie Sud
Est de Madagascar, sur la Route Nationale n° 7 à environ 528 Km d’Antananarivo, la
capitale de Madagascar. L’activité économique de la population est basée sur
l’agriculture et la pêche avec une prédominance de la riziculture traditionnelle, qui
s’effectue en deux saisons, comme tel est le cas avec « vary vatomandry 3 » ; « vary
hosy4 » puis le « vary an-tanety » ou le riz pluvial. Par contre, les autres cultures
servent d’activités complémentaires, à l’instar des cultures de rente et les
légumineuses.
17
Au plan social, la communauté privilégie toujours la valeur inestimable du Fihavanana.
Différents auteurs (Gannon F., Sandron F., 2006) voient en fihavanana la qualité de
régulateur des relations sociales. Considérée comme conservateur de cette valeur
culturelle malagasy, la communauté d’Ambaro Bekibo tisse encore une relation sociale
tangible à travers la solidarité communautaire perceptible dans les domaines
économique et social. L’existence de ce lien social peut jouer a priori un rôle d’assurance
communautaire contre les risques et constitue un moyen pour la communauté
d’apporter des solutions à ses problèmes.
Résultats et analyse de l’application de l’IMR : cas de
la communauté d’Ambaro Bekibo
18
Les résultats de l’Indice Multidimensionnel de résilience montrent un score égal à 2
exprimant ainsi un degré de résilience modérée de la communauté d’Ambaro Bekibo
face à l’inondation générée par le passage de la tempête tropicale Chedza en 2015 (cf.
tableau 2). Ces résultats signifient que la communauté a réussi bon gré mal gré à se
relever et reprendre le niveau de ses ressources et capacités d’une manière générale,
avant l’avènement de l’inondation.
Tableau : Résultats de l’IMR pour le cas d’Ambaro Bekibo
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
5
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
Figure : Présentation des scores par critère dans le radar
Source : CERED, 2015
19
Le score global enregistré n’est pas satisfaisant puisqu’il peut encore être largement
amélioré pour pouvoir atteindre le score maximum de 5. Cela signifie que certains
aspects ou paramètres des variables communautaires ne se sont pas opérés notamment
durant la période d’inondation. En fait, les résultats montrent que quatre critères
expriment un score de résilience acceptable, à savoir : une très bonne résilience pour le
critère culturel, une bonne résilience respectivement pour le critère institutionnel et le
critère de renforcement de capacités et enfin une résilience moyenne de la
communauté pour le critère social. Cependant, des scores exprimant des niveaux de
résilience médiocre montrant des résultats hautement non résilients de la communauté
sont enregistrés dans les critères économique, organisationnel et environnemental.
20
Dans le critère social, malgré la valeur maximale de 5 obtenue respectivement par deux
variables à savoir « santé5 » et « éducation6 », le score global du critère n’est que de
valeur 3. Les deux autres variables à savoir « wash » et « emploi » n’ont obtenu
respectivement que les valeurs 1 et nulle. Le score égal à 5 de la variable « santé »
signifie que dans les communautés rurales malgaches, l’accès aux médicaments
notamment traditionnels est assuré par l’apprentissage de leur production qui se
réalise de génération en génération, de bouche à oreille au sein de la famille ou par la
consultation d’un praticien des médecines traditionnelles au sein de la communauté.
L’accès à ce genre de médicaments est renforcé par la communauté lors de l’avènement
des catastrophes comme le cas d’inondation à Ambaro Bekibo car l’approvisionnement
en médicaments chimiques modernes n’est pas forcément garanti comme priorité.
21
La variable « Education » qui représente l’accès aux services de l’enseignement des
enfants a également obtenu un score égal à 5 puisque les salles de classe sont souvent
construites d’une manière commune7 (FRAM ou Association des parents d’élèves) et les
enseignants sont généralement des individus qui sont plus ou moins instruits 8 et
identifiés au sein de la communauté qui assurent le rôle d’enseignant (enseignant payé
par le FRAM).
22
Quant à la variable « wash » qui traduit l’accès à l’eau potable et aux services
d’assainissement, le score obtenu égal à 1 montre que les puits ou bornes fontaines sont
souvent l’œuvre de l’ensemble de la communauté et leur niveau d’accomplissement qui
n’est pas satisfaisant dans le cas présent d’Ambaro Bekibo, dépend du degré de
participation des membres de la communauté, notamment suite à la sensibilisation
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
6
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
effectuée par le comité local de gestion des risques de catastrophes. Beaucoup d’efforts
restent donc à fournir pour activer la communauté d’Ambaro Bekibo en vue
d’améliorer l’accès à l’eau potable et aux services de l’assainissement.
23
Pour le critère culturel, la connaissance et savoir traditionnels, ont obtenu le score
maximal de 5. En effet, la communauté est riche en connaissance traditionnelle
relatives à la gestion et réduction de risques de catastrophes. Autrement dit, les
caractéristiques culturelles de la communauté ont beaucoup contribué à sa résilience
face notamment aux chocs d’inondation, expliquant ainsi ce niveau très satisfaisant du
score obtenu.
24
Dans le cas du critère institutionnel, deux variables dont les droits et pratiques
coutumiers et la gouvernance sont considérés et partagent le même score 4 ; qui
signifie « une bonne résilience ». Evoqué en supra, l’entraide communautaire fait partie
des pratiques coutumières d’actualité chez la communauté d’Ambaro Bekibo. En effet,
le cas des travaux de construction des cases d’habitations, illustre cette pratique et
permet à la communauté de protéger la valeur sociale et de maintenir les liens sociaux
déjà existants. En effet, cette entraide renforce et améliore la capacité et la capabilité
de la communauté pour se préparer et faire face aux risques.
25
Concernant la gouvernance, l’existence de la structure locale CLGRC 9 qui assure la
sensibilisation et la vulgarisation ainsi que la mise en œuvre des stratégies et mesures
de GRC est un grand atout pour la communauté.
26
Le critère de renforcement de capacité, quant à lui a obtenu le score de 4, évoquant
toujours une bonne résilience. Les variables, à savoir sensibilisation, vulgarisation et
exercice de simulation ont au moins respectivement un score de 3. Cette situation est
normale dans la mesure où ce sont les membres du Comité Local de Gestion des Risques
et de Catastrophes, élus par la communauté et ayant la confiance de cette dernière, qui
assurent ce renforcement. A cet effet, grâce à ces liens, la transmission des messages est
facile.
27
Dans le critère économique, la valeur nulle de la variable « AGR » (activités génératrices
de revenu), a fortement influencé la faible valeur du score du critère. Ainsi, la pratique
des AGR demande une importante capacité de travailler ensemble entre les membres de
la communauté au niveau de la sensibilisation et pour le recours à la main d’œuvre
disponible pour les activités agricoles en milieu rural.
28
Dans le critère organisationnel, force est également de constater que l’absence d’une
structure et mécanisme de coordination ainsi que l’absence de système d’alerte rapide
handicapent le renforcement de leur résilience.
29
Enfin, pour une communauté soumise à des aléas climatiques fréquents, les activités de
protection de l’environnement jouent des rôles importants alors que ces dernières
n’étaient pas assez développées dans la communauté étudiée.
30
Par conséquent, malgré les apports des 4 critères, à savoir : culturel, institutionnel,
renforcement de capacités, et social, ayant des variables en lien direct avec le lien
social et qui ont positivement contribué à la résilience de la communauté, les
influences10 des 3 autres critères susmentionnés qui montrent des résultats modestes
ont certainement contribué à pousser vers le bas le résultat obtenu de l’IMR. En outre,
ces résultats sous-tendent ainsi l’évidence du principe selon lequel le niveau de
résilience d’une communauté exposée à un risque quelconque se modifie en fonction
des vulnérabilités et des caractéristiques des chocs correspondants.
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
7
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
31
Somme toute, l’entraide entre les membres de la communauté rurale d’Ambaro Bekibo
constitue une véritable capacité et capabilité à réagir à un choc déterminé. Les
pratiques sociales, qui définissent un code de bonne conduite en société, peuvent donc
jouer un rôle d’assurance communautaire contre le risque et constitue par conséquent
une manière pour la communauté de créer des solutions face à ses problèmes, liés
notamment aux dégâts occasionnés par des catastrophes. La communauté peut ainsi
s’appuyer sur ses propres ressources pour anticiper, faire face et résister et se relever
après l’avènement d’une catastrophe. Ainsi, une communauté résiliente s'organise de
manière à être capable, non seulement de surmonter les différentes catastrophes
possibles, mais surtout d'améliorer son quotidien et son environnement en misant
davantage sur la solidarité. Un des facteurs clés de résilience collective est donc
l’existence d’une capacité et capabilité de s’entraider entre membre d’une
communauté.
32
L’étude de cas de la communauté rurale d’Ambaro Bekibo, dans la partie sud-est de
Madagascar révèle que le score égal à 2 de l’Indice Multidimensionnel de Résilience ne
montre pas un résultat satisfaisant puisqu’il peut être encore largement amélioré pour
pouvoir atteindre le score maximum de 5. La communauté exprime ainsi un degré de
résilience modérée face aux catastrophes d’inondation auxquelles elle a dû faire face
après le passage de la tempête tropicale Chedza en 2015. Il se révèle alors que le
renforcement de coopération voire d’alliances au sein d’une communauté rurale peut
améliorer les résultats potentiels sur son niveau de résilience. Par ailleurs, le
renforcement de la capacité communautaire dans les paramètres qui n’expriment pas
directement le lien social, notamment ceux du critère économique et du critère
organisationnel peut améliorer le score global de résilience communautaire voire son
développement.
BIBLIOGRAPHIE
Adger, W. N. (2000). Social and ecological resilience : are they related ? Progress in human
geography, 24(3), 347-364.
Alkire, S. (2005). Valuing freedoms : Sen's capability approach and poverty reduction. Oxford :
University Press on Demand.
Benson, C., Twigg, J. (2004). Measuring mitigation : methodologies for assessing natural hazard
risks and the net benefits of mitigation.
Benson, C., Twigg, J., & Rossetto, T. (2007). Tools for mainstreaming disaster risk reduction :
guidance notes for development organisations, ProVention Consortium. https://
www.preventionweb.net/publications/view/1066
Brand, F. S., & Jax, K. (2007). Focusing the meaning (s) of resilience : resilience as a descriptive
concept and a boundary object. Ecology and society, 12(1).
Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies. (Janvier 2015).
Madagascar : Bilan de la tempête tropicale, Chedza, 20 Janvier 2015.
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
8
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
Chandler, D. (2012). Resilience and human security : The post-interventionist paradigm, Security
dialogue, 43(3), 213-229.
Gondard-Delcroix, C., & Rousseau, S. (2004). Vulnérabilité et stratégies durables de gestion des
risques : Une étude appliquée aux ménages ruraux de Madagascar. Développement durable et
territoires. Économie, géographie, politique, droit, sociologie, (Dossier 3). https://
journals.openedition.org/developpementdurable/1143#quotation
Gannon, F., & Sandron, F. (2006). Echange, réciprocité et innovation dans une communauté
paysanne. Une lecture conventionnaliste. Économie rurale. Agricultures, alimentations, territoires,
(292), 50-67.
Klein, R. J., Nicholls, R. J., & Thomalla, F. (2003). Resilience to natural hazards : How useful is this
concept ?, Global environmental change part B : environmental hazards, 5(1), 35-45.
Koffi Kouamékan, J. M., Pelenc, J., Lompo, K., Ballet, J., & Dubois, J. L. (2015). Résilience et capabilités
pour un développement humain durable (No. hal-02145621).
Lallau B., Droy Isabelle. (2014). Qu'est-ce qu'un ménage résilient ? Concepts, méthodes,
illustrations. In : Châtaigner J.M. (ed.) Fragilités et résilience : les nouvelles frontières de la
mondialisation. Paris : Karthala, 149-170. ISBN 978-2-8111-1109-0. https://
www.documentation.ird.fr/hor/fdi :010061714
Latour, J. (2018). Comment la gestion participative s’inscrit-elle dans la transition écologique et la
résilience des communautés ? (Doctoral dissertation, Université de Sherbrooke).
Manciaux M. (2010). La résilience. Un regard qui fait vivre. Études 2001/10, (Tome 395), 321-330.
Randriamanampisoa H. (2011). Microcrédit et lutte contre la pauvreté en milieu rural malgache :
une analyse par les capabilités. Management & Avenir 2011/6 (n° 46), 319-335. DOI 10.3917/mav.
046.0319
Sen, A. (1985). Commodities and capabilities, Amsterdam : North-Holland. https://
scholar.harvard.edu/sen/publications/commodities-and-capabilities.
Sen, A. (1993). Capability and well-being. in : Martha Nussbaum et Amartya Sen (dir.). The quality
of life (p.62-66). Oxford : Clarendon
Sen A. (2004). Elements of a Theory of Human Rights. Blackwell Publishing, Inc Philosophy & Public
Affairs 32, no.4 (p.315-356). https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.
1088-4963.2004.00017.x ?cookieSet =1
United Nations Office for Disaster Risk Reduction (UNISDR). (2009). Terminologie pour la prévention
des risques de catastrophes. http://www.unisdr.org/we/inform/publications/7817.
NOTES
1. Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies. (Janvier 2015).
Madagascar : Bilan de la tempête tropicale Chedza, 20 Janvier 2015.
2. Le Fokontany est une subdivision administrative de base au niveau de la Commune. Le
Fokontany, selon l'importance des agglomérations, comprend des hameaux, villages, secteurs ou
quartiers. Les habitants du Fokontany constituent le "Fokonolona" (Art 2 du Décret N° 2004-299
du 3 mars 2004 fixant l'organisation, le fonctionnement et les attributions du Fokontany).
3. Vary vatomandry : riz de saison pluvieuse, début de récolte au mois de Mai.
4. Vary hosy : riz de saison sèche, début de récolte au mois de décembre.
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
9
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
5. La variable « Santé » exprime l’accès aux médicaments notamment traditionnels grâce souvent
aux échanges au sein de la communauté.
6. Accès aux services de l'éducation (les salles de classe construites par la communauté, les
enseignants FRAM payés par la communauté).
7. Dans la majorité des localités rurales enclavées de Madagascar,
8. Ayant uniquement le BEPC (Brevet d’Etudes du Premier Cycle) et souvent n’ayant pas reçu une
formation pédagogique car les enseignants légitimes, agents fonctionnaires de l’Etat sont
quasiment absents et ne rejoignent pas leur poste.
9. Les membres du Comité Local de la Gestion des Risques et des Catastrophes ou CLGRC sont élus
et choisis par la communauté et ils assurent la sensibilisation, la formation ainsi que le
renforcement de la capacité de la communauté dans le domaine de la GRC.
10. Exprimées par des pondérations plus importantes.
RÉSUMÉS
L’évaluation de la résilience constitue le nœud de toute analyse en matière de gouvernance et de
gestion des risques liés aux catastrophes. Le Cadre d’action de Hyogo (2005 – 2015), reconsidéré
puis renforcé dans le Cadre de Sendai pour la Réduction des Risques de Catastrophe (2015-2030),
justifie l’importance de la lutte contre la pauvreté à travers les efforts de Réduction des Risques
de Catastrophes ; d’où l’utilité du concept destiné à orienter la pratique sur le changement et la
variabilité climatiques et le développement en général. Il s’est alors produit un intérêt vis-à-vis
de la résilience au sein du milieu académique et opérationnel. Le présent travail vise à proposer
un outil d’évaluation de la résilience communautaire dont l’Indice Multidimensionnel de
Résilience (IMR). L’objectif consiste à mesurer et évaluer le niveau de résilience d’une
communauté au travers de la mise en œuvre dudit outil. Le résultat de l’évaluation de la
résilience de la communauté rurale d’un village au Sud-Est de Madagascar montre que cette
dernière peut s’appuyer sur ses propres ressources pour renforcer sa résilience, après
l’avènement d’une catastrophe.
La evaluación de la resiliencia está en el centro de cualquier análisis de gobernanza y gestión del
riesgo de desastres. El Marco de Acción de Hyogo (2005 - 2015), reconsiderado y luego reforzado
en el Marco de Sendai para la Reducción del Riesgo de Desastres (2015-2030), justifica la
importancia de la lucha contra la pobreza a través de los esfuerzos de Reducción del Riesgo de
Desastres ; de ahí la utilidad del concepto para orientar la práctica sobre el cambio climático y la
variabilidad clématica y el desarrollo en general. Entonces surgió un interés en la resiliencia
dentro del entorno académico y operativo. Este trabajo tiene como objetivo proponer una
herramienta para evaluar la resiliencia comunitaria, incluido el Índice de Resiliencia
Multidimensional (IMR). El objetivo es medir y evaluar el nivel de resiliencia de una comunidad a
través de la implementación de esta herramienta. El resultado de la evaluación de la resiliencia
de una comunidad rural en una aldea en el sureste de Madagascar muestra que puede depender
de sus propios recursos para fortalecer su resiliencia después del inicio de un desastre.
The resilience assessment is the crux of any analysis in governance and disaster risk
management. The Hyogo Framework for Action (2005 - 2015), reconsidered and then
strengthened in the Sendai Framework for Disaster Risk Reduction (2015-2030), justifies the
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
10
Évaluation de la résilience communautaire : L’Indice Multidimensionnel de Rés...
importance of poverty reduction through Disaster Risk Reduction efforts ; Hence the usefulness
of the concept for guiding practice on climate change and variability and development in
general. There then arose an interest in resilience within the academic and operational
environments. This work aims to provide a tool for assessing community resilience including the
Multidimensional Resilience Index (IMR). The objective is to measure and assess the level of
resilience of a community through the implementation of this tool. The result of the resilience
assessment of a rural community in a village in south-eastern Madagascar shows that it can rely
on its own resources to build resilience after a disaster.
INDEX
Mots-clés : résilience communautaire, réduction des risques de catastrophes, indice
multidimensionnel de résilience, changement climatique, variabilité climatique
Palabras claves : resiliencia comunitaria, reducción del riesgo de desastres, índice de resiliencia
multidimensional, cambio climático, variabilidad climática.
Keywords : community resilience, disaster risk reduction, multidimensional resilience index,
climate change, climate variability
AUTEURS
JULIEN SALAVA
Centre d’Etudes et de Recherches Economiques pour le Développement (CERED), Université
d’Antananarivo
HOLIMALALA RANDRIAMANAMPISOA
Centre d’Etudes et de Recherches Economiques pour le Développement (CERED), Université
d’Antananarivo
THIERRY RAZANAKOTO
Centre d’Etudes et de Recherches Economiques pour le Développement (CERED), Université
d’Antananarivo
PIERRE LAZAMANANA
Centre d’Etudes et de Recherches Economiques pour le Développement (CERED), Université
d’Antananarivo
AINA ANDRIANJAKATINA
Centre d’Etudes et de Recherches Economiques pour le Développement (CERED), Université
d’Antananarivo
MAHEFASOA RANDRIANALIJAONA
Centre d’Etudes et de Recherches Economiques pour le Développement (CERED), Université
d’Antananarivo
Communication, technologies et développement, 9 | 2021
11