Restitution de la confrence :

Quel avenir pour la filire des plantes mdicinales en France ?

Jeudi 27 septembre 2007 - Universit des Sciences et Techniques de Montpellier







Remerciements

Lquipe organisatrice tient remercier tous ceux et celles qui ont particip de prs ou de loin ce
projet.
Nous remercions en particulier les membres du comit de pilotage
Olivier Thaler, directeur du master IEGB et tuteur du projet, Yildiz Aumeeruddy-Thomas
(ethnobotaniste au CEFE CNRS), Muriel Durand-Ramel (Nunkui biodiversit), Patrick Garnon
(ONIPPAM - Office National Interprofessionnel des Plantes Parfums, Aromatiques et
Mdicinales), Claudine LUU (PDG du laboratoire pharmaceutique L.A.P.H.T Phytofrance), Vinh
LUU (responsable de l'cole IMDERPLAM - Institut Mditerranen de Documentation,
dEnseignement et de Recherche sur les Plantes Mdicinales), Arnaud Martin (responsable du
Master BGAE), Thierry Thvenin (producteur et secrtaire gnral du syndicat SIMPLES), Thierry
Thouvenot (consultant en Environnement et Modes de vie).

Les diffrents intervenants
Vinh LUU, Yldiz THOMAS, Eric MARIE, directeur du dpartement dtudes chinoises de lICES
(La Roche sur Yon, France), Muriel DURAND-RAMEL, Grard MAGNAUDEIX, Pharmacien,
Thierry Thvenin, Olivier Thaler, Arnaud Martin, responsable du Master BGAE luniversit
Montpellier 2.

Toutes les structures qui nous ont soutenu financirement :
Le conseil scientifique de lUM2, le master BGAE, la rgion Languedoc-Roussillon, le conseil
gnral de lHrault, lassociation Artio ainsi quArtisants du monde qui nous ont offert le caf, le
th et le sucre.

Les invits
Christian Moretti (IRD) et Rmy Lejeune (Responsable de lcole des plantes-75)

A Emmanuel Guillemont pour la ralisation bnvole du site internet ddi la journe
Ainsi quaux rapporteurs qui ont bien voulu prendre notes des confrences et tables rondes.
Sommaire


Problmatique

Historique et prsentation de la filire des plantes mdicinales
I Historique : tour du monde et temps de l'utilisation des plantes
II Diffrentes formes de phytothrapie
III Phytothrapie moderne : Mdicament? Remde?
IV Phytothrapies particulires
Questions Dbat

Groupe de rflexion : Plantes Aromatiques et Mdicinales en France : Usages,
Ethique et Rglementation
Introduction
I Perte du savoir et des savoir-faire
II La Pharmacope franaise, une construction historique et politique
III Un corpus rglementaire complexe et ambigu
IV Un contrle fond sur des critres scientifiques et conomiques
V Les soins de sant aux mains des professionnels de la sant
VI Relations entre cadres rglementaires franais et europen
VII Lvolution des listes de la pharmacope en France
VIII Evaluation de la tradition, le lien avec le march
IX Quel avenir en France pour une mdecine populaire?
Propositions du Groupe Usages Ethique et Rglementations des PAM en France
Questions Dbat

La pharmacope en Chine
Introduction
I Prescription de pharmacope chinoise
II Enseignement de la pharmacope en Chine
III Historique de la mdecine chinoise
IV Reconnaissance de la pharmacope chinoise en France
Questions Dbat

Formations aux plantes mdicinales en France et en Europe
Introduction par Grard MAGNAUDEIX
Problmatique du dbat
Education et droit aux remdes par les plantes : Prsentation du projet POPULUS
Introduction par Thierry THEVENIN
Dbat

Rsum de la journe


Problmatique

Actuellement, la mdecine par les plantes connat une priode charnire. D'un ct porte par un
regain socital de plus en plus important, cette mdecine par les plantes fait cependant face des
difficults multiples qui freinent son essor.
La disparition du diplme d'herboriste depuis 1945 ainsi que limpossibilit pour les producteurs-
cueilleurs, dtenteurs dun savoir, de commercialiser librement leurs produits et le nombre restreint
de plantes libres en France (seulement 34 actuellement) en sont quelques exemples. La lgislation
actuelle reprsente elle seule une entrave importante. Ayant pour projet dlargir le nombre de
plantes mdicinales libres, elle nen autorise pas pour autant la dlivrance avec une formation
thrapeutique, attribution rserve aux personnels de sant publique. De plus, de nombreux
problmes de conservation se posent, notamment pour les savoirs et les savoir-faire associs aux
plantes mdicinales. En effet, la filire est confronte depuis plusieurs annes une rosion de ces
savoirs ancestraux, trop peu de travaux visant les runir et les sauvegarder ayant lieu.
Pourtant, loppos, on assiste un regain socital (regain populaire) pour cette mdecine;
l'allopathie ayant montr certaines limites, de plus en plus de personnes remettent en cause le
systme de soin dominant et se tournent vers ces mdecines dites parallles ,
complmentaires . Le manque de reconnaissance de ces savoirs par les autorits publiques, des
pratiques mdicales associes et de leur transmission pour amliorer la sant publique est au cur
des proccupations autour de cette filire.
Depuis plusieurs annes des groupes de rflexion, runissant scientifiques et acteurs de la filire, se
sont runis pour discuter des diffrents enjeux et problmes socitaux autour de lthique, de
lusage et des rglementations autour des plantes mdicinales. La situation est complexe car divers
registres et domaines concerns interagissent (droits, processus de normalisation, enjeux
conomiques et cognitifs, reprsentations de la sant et des modes de soins en occident). Il est ds
lors assez difficile de distinguer sur quels plans il faudrait agir.
Les proccupations en terme de sant publique sont actuellement des questions qui intressent une
majorit de la socit et qui occupent une dimension pluridisciplinaire. Les questions concernant
lavenir pour la filire des plantes mdicinales en France sont donc aujourdhui cruciales et revtent
un enjeu majeur pour notre socit.

Le colloque s'tait donn pour objectif d'exposer la problmatique par et pour les spcialistes de la
filire (producteurs, chercheurs, juristes, laboratoires,) et galement de sensibiliser un public
dtudiants de lenseignement suprieur concerns par ce domaine (biologie, cologie, pharmacie,
mdecine, sociologie, anthropologie,).
Au cours de cette journe nous avons souhait que toutes ces personnes se rencontrent, dbattent
autours de thmes en commun, afin de renforcer les connexions dj tablies.


























Compte-rendu de la journe


Historique et prsentation de la filire des plantes mdicinales
Prsentation par Mr Vinh LUU, cole IMDERPLAM



I Historique : tour du monde et temps de l'utilisation des plantes
A- Msopotamie (- 6000 ans) :
L'utilisation de graines, racines, tiges, feuilles et fruits se fait sous forme de macration, dcoction,
cataplasme, onguent, bire ou vin de palmier servant d'excipient.
Les premires formes de culture des plantes mdicinales sont observes. Des remdes naturels sont
prescrits par les prtres et mdecins. Les plantes utilises sont principalement la moutarde,
l'hellbore, la salicorne, l'acore, le fenouil, la trbenthine de sapin, l'orge, la rose, le pavot, la
mandragore, la jusquiame, la belladone, le chanvre indien.

B- Chine (- 3200 ans) :
L'Empereur vert, Shennong, est le premier maillon de la chane d'utilisation des vgtaux, la base de
la phytothrapie. La matire mdicale est volue.
Les hommes font exprience de la toxicit des plantes et dcouvrent l'accoutumance certains
produits.
Des cultures de plantes mdicinales sont galement observes. La pharmacope chinoise regroupe
15 000 formules concernant 20 000 plantes, comme le haricot, le safran, la datura, la rhubarbe,
l'ergot de seigle, le gingembre, la cannelle, la poivre, le grenadier...
C'est cette poque que nat la Thorie de la Signature ainsi que le concept de chronobiologie soit
l'administration de mdicament fonction des heures de la journe.

C- Egypte (- 3000 2000 ans) :
Les principales plantes utilises sont la cannelle, l'absinthe, l'oignon, l'alos, la menthe, la laitue, la
gomme arabique, le genvrier, la coloquinte, le grenadier, le lin, le fenouil, l'rable, le cumin, l'ail,
le sn, le lis, le ricin, la mandragore, la jusquiame... sous forme de macration dans le vin de
palme, sous forme de miel... Les dosages et rgles de prescription sont trs stricts.
D- Hbreux (- 2000 ans) :
Les hommes utilisent dj les mmes plantes quen Msopotamie.

E- Indes (- 1500 ans) :
On parle de sciences de la longvit et de Mdecine Ayurvdique qui regroupe 760 plantes
mdicinales (chanvre indien, belladone, acore, ricin, tamarin, aconit..).
La notion d'homopathie est introduite par Brahman.

F- Phytothrapie en Europe :
Influence de la Grce : Hippocrate invente l'Ecole de Cos et parle des proprits laxatives,
diurtiques et narcotiques de 200 plantes dont le ricin, la coloquinte, l'euphorbe, la daphn, le
chou, le melon, l'oignon, lhypose, le persil.... Puis l'Ecole d'Alexandrie fut un haut lieu de
connaissances sur l'utilisation des plantes avec sa bibliothque de 700 000 volumes et avec son
grand jardin botanique.
Influence de Rome : Galien.
Influence de la Perse : Avicenne : canon de la mdecine , crits de botanique et
d'herboristerie.
Influence de l'Espagne : plusieurs coles marquent l'histoire : Ecole de Cordou (civilisation
arabe), Ecole de Sville, de Narbonne, d'Arles, et de Bziers. Les enseignements d'Avicenne
sont passs par l'Espagne avant de venir en France Montpellier o cette mdecine fut pratique
partir de 1904.
Influence de l'Italie : L'cole de Salerne cre par Charlemagne est domine par Constantin, un
moine bndictin qui sort un premier livre sur la sant par les plantes.
La phytothrapie en France (12me et 16me sicle) :
Il y a une certaine discontinuit dans la filire. La prparation et la vente des drogues se font par les
apothicaires, auxiliaires des mdecins. Cette mdecine commence notamment en 1258, quand Saint
Louis monte l'Ecole de Montpellier.
Au 16me sicle Paracelse reparle de la Thorie de la Signature. En 1593, Richter de Belleval cra
le Jardin de plantes mdicinales de Montpellier. Puis on observe un dveloppement de
l'enseignement sur les simples par les coles de Paris, de Lyon et de Montpellier.
II Diffrentes formes de phytothrapie
A- Phytothrapie populaire :
Les connaissances sur les plantes se transmettent par voie orale, par observation des consquences
sur les malades, il s'agit de traitements symptomatiques.

B- Phytothrapie des initis :
Elle tend disparatre. Les prtres et mdecins sorciers utilisent par exemple la jusquiame noire, la
belladone, la madragore et autres plantes diaboliques, notamment toxiques. Il s'agit d'un terroir
particulier, une certaine curiosit botanique. Les usages sont particuliers (drogues) et on observe
l'analogie astrologique.

C- Phytothrapie scientifique ou allopathique :
Il s'agit de l're de la chimie. Lors de la deuxime guerre mondiale, nat la chimiothrapie qui utilise
le sulfamide. S'introduit alors la notion de principe actif et il s'agit alors de l'isoler par extraction
chimique. Les mcanismes d'action sont expliqus par les mcanismes biochimiques ou chimiques.
Des antibiotiques sont extraits des champignons ou des bactries.
Les problmes soulevs sont quil n'y a pas de distinction entre le principe de synthse et l'extrait de
la plante, qu'on ne tient pas compte de la synergie de l'ensemble des constituants, qu'on ne fait pas
de diffrence entre plantes fraches ou sches alors qu'il y a une grande diffrence entre une plante
vivante et une plante morte.
Il s'agit en effet de replacer la plante dans son contexte car il s'agit du premier maillon.

III Phytothrapie moderne : Mdicament? Remde?
Il y a une tendance rtro expliquer le phnomne partir d'acquisitions scientifiques modernes,
c'est--dire de partir du principe actif pour expliquer le mdicament, pour expliquer la maladie ou le
symptme.
La tendance de la mdecine douce est de considrer l'homme dans sa globalit pour parler du
remde et de la maladie.
Il existe une diffrence entre l'entretien et la prvention en mdecine (action stimulante, rgle
d'quilibre interne entre organes, notion de drainage...) et l'intervention, la substitution (action
d'assistance en cas de dsordre fonctionnel ou lsionnel et utilisation de plantes sches).

IV Phytothrapies particulires
A- Homopathie :
Il s'agit d'une mdecine nergtique, selon la doctrine d'Hahnemann. La thrapeutique est base sur
la loi des similitudes ou loi des semblables d'Hippocrate. Le remde est bas sur une dilution
infinitsimale (alcoolature) qui est ensuite dynamise puis soumise imprgnation.
La loi des semblables voque que lorsqu'une plante provoque les mmes symptmes qu'une
maladie, on peut utiliser cette plante pour soigner cette maladie avec des doses infinitsimales.

B- Mdecine chinoise :
Il s'agit aussi d'une mdecine nergtique, sur la base du Taosme. La thrapeutique est sous forme
d'acupuncture ou de phytothrapie.
L'action nergtique des plantes s'explique selon l'quilibre Inn yang. Les plantes ont une action
associe selon des rgles prcises. Les actions pharmacologiques sont dpendantes du terroir, de
l'horaire de circulation, de la forme (thorie de la Signature).
La diffrence entre plantes sches et plantes fraches se fait ici entre intervention ou assistance pour
les premires et stimulation nergtique pour les deuximes. La mdecine s'insre galement au
niveau de l'alimentation.

QUESTIONS DEBAT

La pollution a-t-elle une incidence sur la qualit des plantes?
Oui, les proprits gnrales sont affaiblies. Il faut rapprocher le plus possible la plante de ses
conditions naturelles. La loi des similitudes permet de comprendre l'action de la plante sur la
matire.
La consommation de plante en France s'lve 600 000 tonnes, quelle est la proportion de plante
franaise dans ce chiffre?
Il ny a pas d'estimation mais on utilise en France que des plantes sches qui perdent alors 70 80%
de leur poids.
Depuis quand l'arrt des formations sur les plantes mdicinales a t observ en France?
Depuis le rgime de Ptain (1941), les herboristeries ne sont plus reconnues, l'utilisation des plantes
revient uniquement dans les mains des pharmaciens. Il s'agit l de raisons politiques particulires.
O se situe l'effet Placebo?
Cet effet n'est pas le mme pour tous, il n'est donc pas localisable. Dans des conditions matrielles,
la loi des semblables ne peut s'appliquer.
Les mdecines douces doivent surtout agir en actions prventives et il faut savoir que les
diffrences entre les hommes, notamment raciales, se notent ce niveau de prvention ; il faut
surveiller diffrentes parties (organes) selon ces sensibilits diffrentes, jouer sur diffrents terrains.
Quel est le rle du mdecin dans cette notion de terrain?
Il faut pister le malade lui-mme, qui a une gntique hrite des parents. Il est intressant de noter
aussi le thme astral dont on ne tient plus compte.


Groupe de rflexion :
Plantes Aromatiques et Mdicinales en France :
Usages, Ethique et Rglementation
Prsentation par Yildiz Thomas, ethnobotaniste au CNRS



Introduction
Ce groupe de rflexion a t initi par Yildiz Thomas dans le cadre de son projet sur les Plantes
Aromatiques et Mdicinales du Programme People and Plants du WWF et de lUNESCO et
lAssociation Nunkui Biodiversit. Lide nous est venu lors dun caf dbat organis par Nunkui
o un producteur de plantes mdicinales en France fit remarquer que la filire de production se
heurtait de nombreux blocages mettant en jeu des question de rglementation, mais galement de
lobby par diffrents groupes, notamment lindustrie pharmaceutique. Par ailleurs les travaux mens
par Yildiz Thomas et Sophie-Anne Sauvegrain dans le Cvennes, nous renvoyait cette mme
ralit.
Lors des groupes de rflexion qui se sont tenu en 2003, 2004 et 2005 de nombreux acteurs taient
prsents :
- Les producteurs: le rseau SIMPLES (Thierry Thvenin), la cooprative Biotopes des montagnes
(Jean-Louis Fine, Wicki Gebranda), Sves dArige (Bernard Roth), Plantes infuses (Claire
Moucot)
- Les chercheurs et enseignants: Yildiz Thomas (CNRS), Elisabeth Motte Florac, Yves Pelissier
(Facult de Pharmacie, Montpellier II), Christian Moretti (IRD)
- Associations: Nunkui Biodiversit (Muriel Durand, Stphane Person), Nature et progrs
- Distributeurs: comme Phytofrance Imderplam,
- Reprsentants dadministrations: Office National Interprofessionnel des Plantes Parfums et
Mdicinales : ONIPPAM (Patrick Garnon)
- Reprsentants dEcole dHerboristerie et enseignants: ARH , IMDERPLAM
- Herboriste: Palais Royal de Paris (Michel Pierre)
- GIS IDDRI: S. Louaffi
- Autres tels que des crivains (Bernard Bertrand), des mdecins, des pharmaciens ainsi quun
public dtudiants
Le point de dpart des travaux mens par ces groupes de rflexion tait la rvision de la liste VII B,
c'est--dire ltude des plantes dont lvaluation du rapport bnfices/risques est ngatif pour une
utilisation traditionnelle en prparation magistrale de la pharmacope franaise par lAFSSAPS
(Agence Franaise de Scurit Sanitaire de Produits de Sant) en 2003.

I Perte du savoir et des savoir-faire
Lutilisation des plantes mdicinales tant limite, ceci entrane une perte des savoirs et savoir-faire,
du moins en ce qui concerne les savoir et savoir-faire oraux. En effet, les ethnobotanistes et
crivains comme Pierre Lieutaghi ou Bernard Bertrand ont un savoir savant et ont beaucoup publi
(publication faite sur ces travaux dans le cadre du domaine public).
Les producteurs de plantes aromatiques et mdicinales ont des savoirs mdicinaux recomposs entre
savoirs savants et savoirs locaux caractre empirique. Ces savoirs locaux sont des savoirs
ethnocologiques lies la mise en culture ou la cueillette, mais galement des savoirs et savoir-
faire relationnels (cration de rseau par diffrentes structures de type cooprative ou associative :
mise en place danimations, de stages ou des journes de vulgarisation : journes SIMPLES).
Compte tenu des rglementations sur les PAM, les producteurs ne vendent leurs produits non pas au
titre de plantes mdicinales, mais de condiments, pices ou plantes alimentaires.
Il existe une rupture de transmission des savoirs au sein des familles qui est d au contraste
ville/campagne et la modernisation agricole.
Sous le rgime de Vichy, le diplme dherboristerie a t supprim en France en 1941. Et depuis,
ltude de la botanique disparat peu peu, les formations sont peu adquates pour les pharmaciens.
Cependant, on constate une forte demande sociale pour une utilisation accrue de soins par les
plantes. Il y a un retour vers le naturel qui peut prsenter certains dangers compte tenu de labsence
de diffusion des savoirs.

II La Pharmacope franaise, une construction historique et politique
Lexistence dune pharmacope franaise sest constitue au cours de lhistoire par rajouts et
suppressions de matires mdicales au gr de llaboration des reprsentations du corps et de la
sant, de rapports de pouvoir, dvolution des pratiques mdicales.
Ex: Excrments de chauve souris, chiures de mouche, peaux de grenouilles vinces (voir travaux
de E. Motte Florac, Universit de pharmacie Montpellier).
Rappel historique :
5e s av JC: Hippocrate,
1498: Pharmacope de Fiorentinno,
18e: dbut pharmacope chimique,
1930 : Industrialisation de lactivit pharmaceutique,
1965: Pharmacope europenne, Code de la sant Publique 2004
Cette pharmacope contient la liste des produits pharmaceutiques, donnant le nom des plantes et
autres matires mdicales, les parties utilises afin de fabriquer des produits pharmaceutiques (tout
produit tant une prparation faite partir dune partie ou de la totalit dune plante). Les plantes de
la liste VII B de la pharmacope sont vendues en dilution par les pharmacies.

III Un corpus rglementaire complexe et ambigu
Les restrictions de libre circulation de plantes aromatiques et mdicinales sont lies en France au
Code de la Sant Publique (ds lors que ces plantes sont inscrites sur la liste des plantes de la
pharmacope franaise).
Les plantes inscrites la pharmacope franaise reconnues comme mdicinales, relvent du
monopole pharmaceutique. Mais une plante qui a dautres vertus que des vertus mdicinales nest
pas considre comme une plante mdicinale.
Le dcret n 79 380 en 1979 a donn suite la libration de 34 plantes, soumise certaines
conditions (tiquetage, parties utilises non diffusion de leur proprit mdicinales, etc...). Seules
ces plantes peuvent faire lobjet de processus de labellisation (AB, ISO etc...).
Pour toute autre plante que ces 34 espces, une autorisation de mise sur le march est requise
(AMM Autorisation de Mise sur le March- trs coteuse, long, ncessitant une valuation de leur
qualit, leur innocuit et leur intrt pharmaceutique). Alors que ce sont des parties de plantes qui
possdent des qualits mdicinales dans la pharmacope, ce sont les plantes entires qui ne sont pas
autorise tre mis sur le march.
LAgence Franaise de Scurit Alimentaire de Produits de Sant (lAFSSAPS) est habilit en
France valuer les qualits pharmacologiques et toxicologiques des espces de la pharmacope
franaise. La majorit des experts de lAFSSAPS sont des pharmacologues.

IV Un contrle fond sur des critres scientifiques et conomiques
Une version dite allge dautorisation de mise sur le march (AMM) existe depuis 1986 pour les
spcialits pharmaceutiques base de plantes (196 plantes en 1998).
Lensemble des alicaments est vendu librement en supermarch. Cest un flou rglementaire car
cela est non soumis au code de la sant publique. Ces produits ont pourtant un effet
physiologique Les produits alimentaires ne ncessitent pas dautorisation de mise sur le march.
La rglementation porte sur lensemble de la plante alors quen fait ce sont des produits
pharmaceutiques (formes de prparations) qui devraient faire lobjet dune rglementation.
Paralllement ceci lindustrie pharmaceutique propose un grand nombre de produits comme les
glules : formes trs concentres de matire, non-conforme aux rgles de prparation traditionnelles
(comme les tisanes qui contribuaient liminer la toxicit pour certaines espces).
Dautres formes de mdecine, tel laromathrapie, la phytothrapie, ont pignon sur rue, ou sont
exerces librement par le personnel en France qualifi pour dlivrer des prescriptions.
Ces produits ne font pas lobjet dvaluations solides quant leurs effets secondaires.

V Les soins de sant aux mains des professionnels de la sant
Lautomdication est dconseille de faon gnrale en France. Les producteurs, les distributeurs
sont dans une position dlicate face la demande sociale pour proposer des produits naturels et une
approche de soin par les plantes.
Le savoir du scientifique en matire de qualit, dinnocuit et defficacit domine au dtriment de
toute autre forme de prise en charge de la sant, et de toute autre forme de savoirs.
Mais ce savoir est fortement li au pouvoir pouvoir conomique pour les pharmaciens et pouvoir
dtablir des normes en matire dapproche de la sant via le rle de veille de lAFSSAPS.
On constate une absence de label bio, ISO, etc. sur les matires naturelles vendues en pharmacie et
une forte comptition de matires naturelles provenant dEurope de lEst ou dAfrique du Nord se
fait au dtriment de produits de petits producteurs franais (plus chers), qui cependant favorisent
une approche qualit (Cahier des charges SIMPLES, label AB, Demeter etc.).
Les prparations magistrales sont non rembourses (depuis 1989). En effet les critres invoqus par
la commission nationale de la pharmacope sont labsence de validation des proprits
thrapeutiques des plantes mdicinales. Maisceci dpendrait du bon vouloir des diffrentes
caisses dassurance maladie selon la faon dont lordonnance a t formule : zone de flou trs
important.
Il existe des cas de jurisprudence, car de nombreux produits utiliss se sont avrs avoir dautres
usages que des usages mdicinauxLa situation sest durcie. Les savoirs profanes dtenus par les
producteurs sont perus comme dangereuses : procs sur la prle (2005).

VI Relations entre cadres rglementaires franais et europen
Le statut juridique et pratique des mdicaments varie considrablement travers les diffrents tats
membres. Il existe une pharmacope europenne mais les frontires sont tanches pour ce qui est
des autorisations de mise sur le march (AMM).
La directive mdicaments traditionnels , qui a t prsente en 2000/2001 a soulev de
nombreux problmes de dfinition. Elle porte sur des mdicaments base de plantes dont lusage
est depuis longtemps (minimum 10 ans) bien tabli.

La Directive Europenne 2001/83/CE mdicaments traditionnels
La mise en place de cette directive est lie aux problmes suivants:
1. Le march des substances et des prparations vgtales (plantes, parties de plantes, algues,
champignons, lichens et prparations complexes) connat une volution rapide et nest pas
ou peu rglemente.
2. La prsence croissante de substances non traditionnelles en Europe.
3. Une insatisfaction grandissante face certains traitements pharmacologiques (comme les
effets secondaires des antibiotiques).
4. Lide qui prvaut (fausse) que ce qui est naturel comporte moins de risques pour la
sant ainsi que la recrudescence de canaux de distribution de produits de sants trs varis:
magasins dittiques, vente travers internet.
5. Un dsir croissant des patients de se prendre en main.
6. Existence dun vide lgislatif dans le secteur des produits dittiques, des complments
alimentaires, des produits phytothrapiques.
En 2003, le comit conomique et social de lUE proposait de rviser la directive afin de prvoir
une procdure spcifique denregistrement sans obligation de fournir les informations et les
documents relatifs aux essais et aux expriences dmontrant leur scurit et leur efficacit []
lusage traditionnel de ces mdicaments autorisant des conclusions fiables quant leur scurit et
leur efficacit . Journal Officiel de lUE 2003

VII Lvolution des listes de la pharmacope en France
Lensemble des listes: nom scientifique, nom vernaculaire, partie de la plante utilise :
Liste 1: de la pharmacope: liste des plantes traditionnellement utilises en allopathie et/ou en
homopathie. Problme: certaines de ces plantes nont pas un usage thrapeutique exclusif
Liste 2: liste de plantes dont le rapport bnfices/risques est ngatif (effets indsirables suprieurs
aux bnfices thrapeutiques attendus) la majorit de ces plantes prsente une certaine toxicit
mais tout dpend des formes de prparation!
Liste 3: plante pouvant servir de matires premires mdicamenteuses
Liste 4: liste des plantes dont lusage est non exclusivement thrapeutique

En aucun cas ces listes ne spcifient les prparations galniques, le dosage, le produit
pharmaceutique qui est ou nest pas autoris.
En 2003: rvision de ces listes par lAFSSAPS
En 2005: projet de libration de 145 plantes comprenant pour une grande partie des espces
tropicales de DOM TOM (Publie???)
Ractions de ONIPPAM, des producteurs de PAM, et du groupe Plantes Aromatiques et
Mdicinales en France : Usages, Ethique et Rglementation. . Des personnes de la filire se sont
runis de nombreuses fois et ont fait remonter leurs contestations au niveau de l'AFSSAPS.

VIII Evaluation de la tradition, le lien avec le march
Lhistoire de la constitution des pharmacope nous montre quil y a eu une constante rvaluation
de la tradition: question defficacit et de scurit, mais galement de reprsentations et de pouvoir.
Approche normative, avec beaucoup dinfluence deffets de mode lis au commerce, lindustrie et
la puissance de la demande des consommateurs.
Ex: la demande pour les produits exotiques issues des minorits ethniques de la plante (comme la
Guarana).
Ds 2004, Code de la Sant publique autorise la pharmacie, de produire, dexporter, dimporter.
Le couple industrie-science est mis en place une science triomphante qui sinscrit dans notre
culture. Lindustrie sinscrit dans les ralits du progrs et les vrits dcouvertes dans les
laboratoires de recherche. Infaillible, la science prtend tout expliquer et lavis que donne ceux qui
la cre se veut parole de vrit, ce qui est fondateur de toute la lgislation actuelle E. Motte
Florac, Rencontre GR, PAM, Usages, Ethique et Rglementation, Dc. 2005.
Problme majeur: lappareil dcisionnel ne reconnat pas ce lien avec lindustrie. Les plantes qui
sortent de la pharmacope (libre) ne sont en fait que des plantes pour lesquels il ny a pas de
spcialits pharmaceutiques sur le march.

IX Quel avenir en France pour une mdecine populaire?
Propositions du Groupe Usages Ethique et Rglementations des PAM en France
- Lever lopacit de laccs linformation concernant les procdures et les pratiques des agences
telles que lAFSSAPS.
- Ncessit dune meilleure formation pour les pharmaciens.
- Dvelopper une pharmacope populaire usage familial afin de crer un espace daccs libre pour
lautomdication et une mdecine familiale, fonde sur une information suffisante aux
consommateurs (sinspirant de lexprience TRAMIL - Amrique centrale, C. MORETTI).
Mise en place dun nouveau collectif avec pour objectif central de dvelopper une pharmacope
populaire: POPULUS


QUESTIONS DEBAT

Quel est le poids des consommateurs ? Peuvent-ils faire levier sur le couple
Sciences/Industries ?
Yildiz Thomas : Les consommateurs sont soumis aux lobbies des marchs. Ils sont encourags
consommer toujours plus via les publicits. Il faudrait ainsi parler du consommateur en tant que
citoyen. Quattend-il du systme sant ? Quelle est sa dfinition de la sant ?
Intervenant du comit de recherche : Il a dj t propos de mettre en place des groupes de
concertation entre les consommateurs et les chercheurs. Mais cela ne sest pas concrtis.
Yildiz Thomas : Le rle principal des chercheurs est de travailler sur le Savoir . Il devrait
cependant avoir un rle de communication et de rflexion envers les consommateurs et les
producteurs de plantes mdicinales. Ce concept nest hlas pas encourag par les organismes de
recherche, tel que le CNRS, qui attendent des chercheurs non pas un travail de terrain mais la
production dun maximum de publications. Le dbat engag ne pourra pas avancer tant que cet tat
de fait ne sera pas modifi. Il est en effet indispensable de mettre en place un rel forum sur la
thmatique de lutilisation des plantes mdicinales, avec une reconnaissance de sa raison dtre et
de ses objectifs.
Pourquoi le projet na-t-il pas t prsent au Ministre de la sant ? En effet, ne pourrait-il pas
tre une solution au dficit que connat actuellement la scurit sociale ?
Thierry Thvenin : Une runion de concertation a dj eu lieu au ministre de la sant en 2005. Elle
sest rvle totalement infructueuse ! LAFSSAPS a refus de participer aux rflexions.
Heureusement, tout nest pas ngatif ! La rflexion continue avec le projet POPULUS.
Beaucoup de livres traitant de lutilisation des plantes mdicinales sont mis sur le march. Hors, on
a vu prcdemment que la vente des plantes mdicinales tait interdite hors pharmacie . Ces
livres sont- ils illgaux ?
Yildiz Thomas : La loi ninterdit pas la vente de livre sur lusage des plantes. Cependant le vendeur
na pas le droit de transmettre un mode dutilisation. Les plantes mdicinales ne peuvent tre
vendues en tant que remde. Ainsi certaines dentre elles sont vendues en tant qualiment, ce qui
devient lgal.
Ne pourrait on pas vendre ces plantes sous forme de graine pour contourner lillgalit ?
Thierry Thvenin : Oui ! Ca se fait !
Eric Mairi : Il y a beaucoup dincohrences dans notre pays ! Une machine fabricant des balles
peut trs bien tre en vente libre alors que lachat des balles est interdit.
Nous sommes confronts un gros problme de rglementation, elle-mme influence par
lindustrie et la loi du march.
Rmy Lejeune : Le problme rside dans le monopole pharmaceutique. Des huiles essentielles sont
interdites cause de leur forte teneur en ctone. On trouve pourtant sur le march des produits
contenant prs de 90% de ctone !
Thierry Thvenin : La libration des plantes nest pas le seul cheval de bataille. Il existe aussi
des problmes de mconnaissances des plantes et de risques de confusion, cest pourquoi nous ne
voulons pas tout librer.

La pharmacope en Chine
Prsentation par ric MARI, IUHMSP, Facult de biologie et de mdecine de Lausanne (SUISSE)
et Facult de mdecine chinoise du Jiangxi (CHINE)



Introduction
La pharmacope traditionnelle chinoise se fonde sur un vaste assortiment de substances naturelles
ou transformes issues de tous les rgnes dont, cependant, la plus grande partie est dorigine
vgtale. Son tude implique de lexaminer dans le contexte plus gnral du systme mdical au
sein duquel elle sest dveloppe. La Chine possde, en effet, une particularit remarquable, unique
dans lhistoire des civilisations : berceau dun systme mdical qui sest pratiqu et transmis dans la
longue dure avec une grande continuit pistmologique, elle a conserv ce patrimoine savant tout
en intgrant paralllement la mdecine occidentale. Depuis les annes 1950, il existe donc deux
mdecines officielles qui cohabitent, chacune possdant ses propres facults denseignement, ses
propres hpitaux et ses propres centres de recherche, ceci nexcluant pas des cooprations entre les
deux disciplines. Les cursus universitaires (5, 8 ou 11 ans) sont de longueur analogue dans les deux
mdecines et ils dbouchent sur les mmes niveaux de diplmes.

I Prescription de pharmacope chinoise
Pour comprendre comment on labore une prescription de pharmacope chinoise, il faut
pralablement saisir le droulement gnral du diagnostic et du traitement, et plus particulirement
ce quon rsume dans une formule en quatre caractres : bianzheng lunzhi [dterminer le traitement
selon lidentification du syndrome]. La premire phase consiste recueillir les signes et symptmes
du patient travers des modes dinvestigations cliniques : observation, olfaction/audition,
interrogatoire et palpation. partir de cette collection dinformations qui sont classes et
hirarchises, le praticien tablit un double diagnostic : bianbing [identification de la maladie], dont
le principe consiste nommer un tat morbide sans prendre en considration ses causes et son
dveloppement et bianzheng [identification du syndrome] qui consiste dterminer le tableau
clinique en terme de processus tiopathognique.
VARIATIONS
(ajouts et retraits)
COMPLAINTE
PRINCIPALE
SYMPTOMES
ET SIGNES
Bing
[maladie]
en rapport avec la
complainte principale
Ajustement du
principe thrapeutique
PRESCRIPTION FINALE
+
FORMULE DE
REFERENCE
DOUBLE
DIAGNOSTIC
Zheng
[syndrome]
en rapport avec
ltiopathognie
BIANZHENG
[identification dun syndrome]
LUN ZHI
[principe thrapeutique]
VARIATIONS
(ajouts et retraits)
COMPLAINTE
PRINCIPALE
SYMPTOMES
ET SIGNES
Bing
[maladie]
en rapport avec la
complainte principale
Ajustement du
principe thrapeutique
PRESCRIPTION FINALE
+
FORMULE DE
REFERENCE
DOUBLE
DIAGNOSTIC
Zheng
[syndrome]
en rapport avec
ltiopathognie
BIANZHENG
[identification dun syndrome]
LUN ZHI
[principe thrapeutique]
COMPLAINTE
PRINCIPALE
SYMPTOMES
ET SIGNES
COMPLAINTE
PRINCIPALE
SYMPTOMES
ET SIGNES
Bing
[maladie]
en rapport avec la
complainte principale
Ajustement du
principe thrapeutique
PRESCRIPTION FINALE
+
FORMULE DE
REFERENCE
PRESCRIPTION FINALE
+
FORMULE DE
REFERENCE
DOUBLE
DIAGNOSTIC
Zheng
[syndrome]
en rapport avec
ltiopathognie
BIANZHENG
[identification dun syndrome]
LUN ZHI
[principe thrapeutique]
Selon les thories de la mdecine chinoise, si on ne connat que la maladie, il est impossible
d'appliquer une stratgie thrapeutique individualise car c'est du syndrome que dcoule
l'laboration gnrale du traitement et donc le choix de la formule de pharmacope de base. D'un
autre ct, si on ne connat que le syndrome, il est impossible d'affiner la rgle thrapeutique
gnrale en un traitement prcis car cest de la maladie et des symptmes complmentaires que
dcoulent les variations de la formule. L'identification prcise du syndrome est cependant
prpondrante car elle donne la dmarche thrapeutique son orientation fondamentale.
Lorsque le diagnostic diffrentiel dun syndrome est tabli, on y associe automatiquement un ou
plusieurs principes thrapeutiques
1
. Ceux ci sont toujours la rponse dialectique directe de lnonc
du diagnostic diffrentiel, lui-mme compos de lidentification de la maladie et du syndrome.
Ainsi, pour un patient qui souffre dune bronchite chronique (maladie) due au Vide de qi du
Poumon

(syndrome), le principe thrapeutique sexprime ainsi : tonifier le Poumon et
augmenter le qi (rponse au syndrome) et, par exemple, arrter la toux et transformer les
Mucosits (rponse la maladie). La formule de rfrence, dans cette situation, sappuie
essentiellement sur le principe thrapeutique qui rpond au syndrome, do son nom : Bu fei tang
[dcoction pour tonifier le Poumon]. En revanche, elle est modifie par des ajouts et retraits

dingrdients, afin dexercer galement une action plus spcifique sur la maladie ou la complainte
principale du patient.
On voit clairement, travers cet exemple, quil est ncessaire de connatre aussi prcisment les
drogues isoles que les formules complexes.










1
. Rfrence lexpression zhifa qui peut se traduire par principe thrapeutique ou rgle de traitement .
II Enseignement de la pharmacope en Chine
Dans le cursus universitaire chinois, lapprentissage de la pharmacope est abord dans le cadre de
deux matires, respectivement nommes zhongyao xue [tude des substances mdicinales
chinoises], ce qui correspond ce quon appelle communment matire mdicale , et fangji xue
[tude des formules et prescriptions], qui comprend lassimilation des thories de la formulation et
dun certain nombre de formules classiques ainsi que le dveloppement dune aptitude concrte
concevoir une ordonnance dans la pratique clinique. Ces deux disciplines matire mdicale et
formules sont tudies sparment, malgr leur complmentarit et bien quau cours de
lenseignement de chacune dentre elles le lien avec lautre soit mis en vidence de faon
systmatique. Cette distinction apparat dans toute la littrature mdicale chinoise. Les diffrences
dans les mthodes danalyse, la classification, et les contenus justifient cette sparation mme si les
intrications sont nombreuses, les formulaires sappuyant ncessairement sur la connaissance des
ingrdients individuels et les traits sur les substances mdicinales faisant constamment rfrences
aux formules de prescriptions classiques pour illustrer les effets de chaque constituant isol. Sur le
plan didactique, il est habituel et logique de commencer par ltude de zhongyao, suivie de celle de
fangji. Cette transition entre une dmarche analytique et un raisonnement synthtique se ralise
pdagogiquement de faon progressive. Ltude commence par lapprentissage de chaque
ingrdient, selon une classification variable, qui a volu au cours de lhistoire et qui est
aujourdhui le plus souvent fonde sur laction thrapeutique principale, toujours exprime en
termes de mdecine traditionnelle chinoise. Cependant, comme chaque ingrdient possde
galement des actions diffrentes ou plus spcifiques qui sexpriment plus particulirement lorsquil
est associ dautres substances, le professeur de zhongyao introduit quelques combinaisons, parmi
les plus caractristiques, en mentionnant dans quelles formules classiques on les rencontre.
linverse, lenseignant de fangji expose les prescriptions classiques en analysant systmatiquement
les caractristiques et le rle de chacun des composants et en prcisant sa fonction dans le contexte
particulier de lordonnance en question. Ainsi ltudiant effectue une transition entre dmarche
analytique et synthtique, passant de lexamen minutieux lapprentissage de la stratgie globale.
La mdecine chinoise est trs peu empirique, elle se dfinit plutt comme une mdecine savante. La
plus grande partie des remdes et formules relvent dun corpus qui sest labor par accumulation,
rajustements et slections progressives tout au long des deux derniers millnaires, souvent trs
influenc par lvolution des thories sur la pathologie et la thrapeutique des coles et lignes
historiques.


III Historique de la mdecine chinoise
Pour tablir quelques jalons, la plus ancienne matire mdicale classique qui ait t transmise,
rdige vers le premier sicle avant J.-C., sintitule Shennong bencaojing [Herbier classique de
Shennong]. Elle contient la description de 365 substances avec leurs actions et indications. Le
premier codex officiel, le Xinxiu bencao [Nouvelle matire mdicale compile] rpertorie environ
800 drogues. Au XVI
e
sicle, le Bencao gangmu [Compendium gnral de la matire mdicale] de
Li Shizhen (1518-1593) comporte 1892 substances. Enfin, les ditions rcentes du Zhongyao
dacidian [Grand dictionnaire de la matire mdicale] recensent environ 6000 substances naturelles
ou prpares.
Pour ce qui est des formules, le plus ancien trait dcouvert lors de fouilles archologiques, dat
denviron 200 avant J.-C. est le Wushier bingfang [Formules pour 52 maladies].
En 752, le Waitai biyao [Essentiel des secrets dun fonctionnaire] contient plus de 6000 formules de
pharmacope,
En 992, le Taiping shenghui fang [Formules de la bienveillante saintet de lre Taiping] compile
16834 prescriptions et en 1406, le Pujifang [Formules pour tous les usages] en comprend 61739.
Aujourdhui, le plus grand formulaire, le Zhongyi fangji dacidian [Grand dictionnaire des
prescriptions de la mdecine chinoise], en douze gros volumes, rpertorie 96592 formules.
Cependant, lindividualisation de la prescription est telle que, malgr le nombre lev de formules
classiques rpertories, il est rare que lordonnance reproduise sans variation lune dentre elles.
Pour la rdiger, le praticien doit possder une bonne connaissance des ingrdients et de leurs
combinaisons. Ce savoir ne repose pas seulement, comme en Occident, sur des critres chimiques
comme lidentification des principes actifs mais sur les effets subtils perceptibles par lhumain.
Ainsi, la fiche technique de chacune des nombreuses substances utilises comprend des critres tels
que nature (froid, frais), saveur (acide, amer), tropisme, en plus des actions et indications. Les
rgles de formulation sont encore plus prcises car leffet dune formule est souvent trs diffrent de
la somme des actions de ses ingrdients.

IV Reconnaissance de la pharmacope chinoise en France
Comme nous venons de le voir, les subtilits des formules sont nombreuses ; ce qui est difficile
faire prendre en compte lors des tentatives de reconnaissance de la pharmacope par les pouvoirs
publics. En outre, il existe des obstacles ou des rsistances quon ne peut ignorer.
La premire est idologique : les ides sur le corps, la sant, la maladie, le remde et son action son
assez fondamentalement diffrentes en mdecine chinoise et en biomdecine. Les diffrences
conceptuelles participent donc la difficult de communication entre les deux systmes mdicaux,
dautant plus que la mdecine occidentale, se positionne en tant que paradigme dominant, peu
enclin admettre laltrit de savoirs trangers, envisageant tout au plus limportation de techniques
ou de substances exotiques son propre corpus, en les extirpant de leur contexte.
En France, cette vassalisation de la mdecine chinoise est particulirement marque, alors que
dautres pays, de culture occidentale, comme le Royaume Uni ou lAustralie, lont mieux assimil.
On peut cependant observer, depuis quelques annes, une volution progressive qui est favorable
une meilleure reconnaissance de la mdecine chinoise, aussi bien dans le monde universitaire que
dans le grand public. Il apparat, en fait, que la rsistance idologique repose essentiellement sur des
prjugs qui se dissipent devant une information juste et dpassionne.
Le deuxime obstacle est conomique. La recherche mdicale est finance la fois par les tats et
par lindustrie pharmaceutique qui investit afin de pouvoir sapproprier, travers des brevets, de
nouveaux mdicaments, principalement fonds sur la dcouverte de principes actifs pouvant tre
produits et distribus large chelle.
Or la mdecine chinoise est difficilement brevetable, pour deux raisons majeures.
Tout dabord parce que la plupart des substances utilises sont connues depuis longtemps et relvent
donc du domaine public. Aucun groupe priv na intrt investir dans la recherche sur des produits
qui sont et demeureront publics, cest--dire libres de droits, le retour sur un tel investissement tant
trs improbable.
Par ailleurs, le principe mme de la pharmacope chinoise repose sur des combinaisons complexes
et non, comme cest le cas dans la biomdecine, sur des molcules identifies et reproductibles
exactement lidentique. Chaque prescription est donc un ensemble dingrdients naturels ou
prpars, constitus eux-mmes dun certain nombre de principes isols qui interagissent les uns sur
les autres au cours de la prparation, le rsultat de la composition tant trs diffrent de la somme
des effets individuels des ingrdients. En mdecine chinoise, cest donc la formule, entit
thrapeutique part entire, qui rpond lensemble du tableau clinique, considr comme un
ensemble synthtique, indivisible.
Cette conception est totalement oppose celle de la mdecine occidentale qui recherche, par une
approche analytique, isoler le principe actif afin de lemployer pour produire ou inhiber un
mcanisme physiologique prcis. Vouloir traiter un ensemble de symptmes par les effets cumuls
supposs dune liste dingrdients est incompatible avec la dmarche pistmologique de la
mdecine chinoise. Or, la sacro-sainte AMM (autorisation de mise sur le march) dun mdicament,
pralable indispensable sa commercialisation, ne peut pas sappliquer des formules complexes
dingrdients naturels dont lanalyse chimique est sujette variations, selon les rcoltes, la
conservation et de multiples facteurs.
Enfin, lindividualisation trs pousse de la thrapeutique est peu compatible avec le
dveloppement de spcialits prtes lemploi qui, si elles existent en Chine, ne constituent quune
partie restreinte des ordonnances des vrais mdecins chinois qui donnent presque toujours des
prparations magistrales. Il en dcoule que la mdecine chinoise classique nest pas brevetable et
difficilement industrialisable, en ltat de la rglementation franaise. Il est toujours possible, bien
sr, dinstrumentaliser la mdecine chinoise en la considrant comme un creuset de matires
premires dont on pourrait tirer des principes actifs exploitables en mdecine occidentale : sa
pharmacope constitue une source extraordinaire de substances thrapeutiques largement
exprimentes pendant des sicles, rapportes par dabondantes sources crites et couramment
utilises dans tout lExtrme-Orient. Dailleurs un nombre croissant de chercheurs, en Chine
surtout, sy consacrent. Et il faut se rjouir quon dcouvre ainsi de nouveaux mdicaments.
Cependant, la mdecine chinoise risque fort de perdre son identit et de disparatre totalement, si la
seule faon dobtenir des crdits pour ltudier consiste orienter les recherches selon les normes et
les objectifs de la mdecine occidentale.
Pourtant, certaines initiatives, au niveau universitaire et institutionnel, laissent entrevoir un regain
dintrt pour la mdecine et la pharmacope chinoise, comme la cration dun DIU de
pharmacope chinoise entre les Facults de mdecine de Paris 13 et de pharmacie de Paris 5, ou
encore le dveloppement dchanges franco-chinois sur la pharmacope, ainsi que plusieurs projets
manant dautres universits europennes qui simpliquent dans ces questions.
Il faut esprer que cette ouverture permettra de conserver lessence des connaissances accumules
par la pharmacope chinoise et que la confrontation de ce savoir exotique aux conceptions
occidentales de la science ninduira pas la perte de son identit.


QUESTIONS DEBAT

N'y a-t-il pas danger dans l'importation des substances exotiques en France vu notre contexte
juridique complexe?
La mdecine chinoise a un statut juridique/institutionnel dans 70% des pays occidentaux. La
pharmacope chinoise a donc un poids mondial trs important. En France, il y a un manque
d'institution envers cette mdecine mme si les connaissances sont prsentes. La France est donc
mise en porte faux face aux Etats Unis par exemple qui ont une utilisation plus pousse de cette
mdecine.
N'allons-nous pas nous retrouver face un problme de ressource de certains lments?
La distribution de ces substances ne peut en effet tre assure sur un plan mondial, des substituts
sont donc mis en oeuvre. Ces produits de substitution sont, au niveau local, plus courants, plus
disponibles, et moins difficiles produire. De plus, mme si certains produits exotiques se sont
avrs bien s'adapt un environnement diffrent, pour la plupart un problme d'adaptation de ces
produits un environnement diffrent se pose, d'o l'importance des produits de substitution.
L'automdication est-elle prsente en Chine?
Oui, comme elle existe en France, certaines plantes sont connues populairement. Des plantes sont
plus couramment utilises car connues en mdecine populaire. Pour des substances plus
spcifiques, cela ncessite l'intervention d'un mdecin. De plus, en Chine, il s'agit d'une mdecine
d'Etat donc la population va plus directement l'hpital sans chercher se soigner soi-mme.
Modernisation de la mdecine chinoise : gallnisation l'tranger dans un objectif de commerce
l'international.
La chine dveloppe en effet un commerce mondial sous forme de glules... Cela peut prsenter un
danger dans notre ignorance de ces substances, dans la non-connaissance, comme en France par
exemple. Mais on assiste une drive de l'idologie de cette mdecine qui dcoule de la volont de
sduire le public industriel europen, drive qui repose aussi sur un manque d'information en
Europe. Des visions parallles discrditent la mdecine chinoise ; Par exemple le ginseng est utilis
en masse en occident en tant qu'aphrodisiaque mais pas en Chine. En effet les produits sous forme
de glule, super-commercialiss en occident, sont peu utiliss en Chine.
La pharmacope chinoise utilise-t-elle des plantes franaises?
La mdecine chinoise utilise beaucoup de substances d'Asie du sud-est mais progressivement se
font des changes aussi avec l'Europe. On assiste l'assimilation de substances occidentales varies
en Chine comme l'eucalyptus ou la lavande. Ces substances sont connues en Chine mais pas les
savoirs associs. En Europe, le systme fonctionne sur la rvolution des savoirs. En Chine, il y a
une assimilation et un rajustement permanent des savoirs mais pas de remise en question brutale.
Qui procde aux valuations et la validation des remdes en Chine?
Il existe des agents chargs de la vrification des critres des diffrentes substances, ce sont des
agents gnraux nationaux. Il existe aussi des revues scientifiques dans lesquelles de nombreuses
publications sur les substances paraissent rgulirement.




Table ronde
Formations aux Plantes mdicinales en France et en Europe
Intervenants: Grard Magnaudeix, Thierry Thvenin, Arnaud Martin, Yildiz Thomas, ric Mari



Introduction par Grard Magnaudeix
Au cours de sa formation, le pharmacien choisi d'acqurir des comptences qui lui sont propres, et
qui lui permettront une analyse de son officine. La botanique n'est pas au coeur de la formation de
pharmacien.
Le Docteur Touchon, doyen de la facult de Mdecine, a particip la mise en place d'un DU de
phytothrapie. Ce DU de phytothrapie sera propos par la facult de mdecine. Ce diplme est
donc ouvert uniquement aux chirurgien-dentiste, pharmacien, mdecin et vtrinaire. Ce DU
propose une phytothrapie pour des professionnels.
Lorsque l'on emploie le mot phytothrapie, on parle bien d'un type de thrapie. Or cette dernire fait
partie de la mdecine. Il est important de diffrencier le diagnostic de la dlivrance ou de la
mdication. Le diagnostic est rserv aux mdecins. Par exemple, le pharmacien n'a pas le droit de
faire de diagnostic, il ne peut que donner des conseils. Ceci pour viter que des personnes
incomptentes fassent des diagnostics.
En France, l'enseignement officiel de phytothrapie est un DU en facult de pharmacie. La
formation aux PM est seulement complmentaire un enseignement de base, elle est adresse des
personnes ayant dj une formation de pharmacien. Ce type de formation ne peut pas tre ouvert
tout le monde, pour suivre des connaissances de base sont ncessaires.
En Suisse, il existe des drogueries , elles contiennent des mdicaments destins
l'automdication. Une formation de 8 ans avec une alternance de la pratique et de la thorie, est
ncessaire pour tre droguiste.
En France, nous avons besoin de plus de normes, d'une formation et d'un mtier officiel car
actuellement il existe beaucoup d'enseignements obscurs. On ne peut pas se permettre de faire
n'importe quoi, par exemple, actuellement, les huiles essentielles sont vendues n'importe comment
alors qu'elles peuvent tre dangereuses.
Problmatique du dbat, propose par Grard Magnaudeix :
Compte tenu des problmes prcdemment exposs, quels types de formations aux plantes
mdicinales seraient adapts aujourd'hui en France?

Thierry Thvenin : Je suis un producteur et je vends des plantes mdicinales ; le problme est que
les gens viennent vers moi comme si jtais un professionnel de la sant.
Grard Magnaudeix : Oui, en effet, il manque des formations sur les PM en France. Il existe 3 ou 4
coles enseignant sur les PM pour les non professionnels, mais elles ne sont pas satisfaisantes pour
tre herboriste. Les pharmaciens n'ont pas appris reconnatre les plantes sches et coupes, des
erreurs de dtermination sont alors possibles. Une collaboration entre les pharmaciens et les autres
acteurs (botanistes, producteurs,...) est ncessaire.
Arnaud Martin : Les connaissances en botanique risquent de se perdre, il y a peu de formations et la
Socit Franaise de Botanique est vieillissante, alors que la botanique intresse. Telabotanica
(association des botanistes francophones) utilise les nouvelles technologies (internet) pour organiser
les savoirs et les connaissances. Au sein de la facult et ailleurs, la botanique doit se structurer.
Yildiz Thomas : Au Tibet, dans les rgions marginalises, les gens ont gard un lien profond avec la
nature, ils ont une approche thrapeutique en dehors des mdecines codifies. La pratique de la
mdecine ne peut pas passer uniquement par les professionnels de la sant, elle doit passer aussi par
des liens au sein de la socit (familiaux par exemple). O sont passs ces savoirs l en France? Il y
a une place pour d'autres approches de la mdecine. Il faut rechercher des relations au territoire,
l'espace,... Les savoirs peuvent tre manipuls par d'autres personnes que les professionnels.
Grard Magneudeix : On ne peut pas aller trop loin dans l'automdication, un moment il faut
s'arrter et laisser les professionnels faire les diagnostics. Les tradi-praticiens s'occupent du
quotidien, d'entretenir une hygine de vie, mais il faut placer une limite.
ric Mari : Un thrapeute est un mdecin mais pas seulement. D'autres thrapeutes
(psychothrapeute, kinsithrapeute, ...) devraient galement avoir accs la formation. La majorit
des pharmaciens n'a pas les comptences pour utiliser des plantes mdicinales. Pour vendre des
plantes mdicinales, les pharmaciens devraient suivre une spcialisation. Par ailleurs, plein de
pharmaciens ne sont pas intresss par la phytothrapie. Que se soit dans les pharmacies ou sur les
marchs, les vendeurs manquent de comptences. C'est le vide d'enseignement universitaire qui
gnre les formations annexes. Il faut faire la diffrence entre avoir accs aux savoirs (avoir un
niveau de formation, par exemple universitaire) et avoir le droit l'exercice. Et actuellement, il
n'existe pas d'apprentissage la phytothrapie, alors qu'en plus la demande socitale est l.
Grard Magneudeix : Le pharmacien s'engage vendre des produits contrls, assurant une certaine
qualit. Les plantes mdicinales reprsentent une faible part de march. La notion conomique nous
dpasse. Il est difficile de trouver des plantes de qualit. Ceci est en partie d la demande,
l'engouement des gens pour les plantes exotiques et non franaises.
ric Mari : Concernant la protection des consommateurs, notons que les seuls accidents rpertoris
viennent de la filire pharmacologique, jamais des filires traditionnelles. Les pharmaciens se
sentent moins responsables et sont moins motivs pour apprendre car ils ont dj l'autorisation.
Le public : Que fait-on du droit fondamental au savoir? Pourquoi rserver cette formation aux
pharmaciens? Beaucoup de professionnels de la filire des plantes mdicinales en France n'ont pas
le droit d'exercer, alors qu'ils ont des comptences. Eux aussi ont droit la reconnaissance. Tout
professionnaliser ne serait-il pas la limite du systme?
Grard Magneudeix : On est oblig de mettre des limites et avoir des personnes formes
spcifiquement.
Le public : A force de professionnalisme, on rend les gens assists aux mdecins. Les gens sont
dresponsabiliss par rapport leur hygine de vie, leur sant. Il faut plus d'autonomie. Le systme
et les lobbies poussent les gens aller chez le mdecin. Mais certaines personnes veulent changer
de systme, il faut leur donner un espace o il est lgal de se soigner correctement soi-mme.
ric Mari : Ce n'est pas coup de loi que l'on trouvera des solutions. L'exemple de la Suisse est
intressant. Ils ont une dmarche plus pdagogique, consistant responsabiliser les gens.
L'interdiction mne souvent rien. En France ont n'aime bien interdire les choses. La confrontation
des professionnels et des non professionnels existe depuis trs longtemps, on ne rsoudra pas ce
problme coup de rglementations.
Le public : Peut-on envisager un naturopathe dans une pharmacie?
Grard Magnaudeix : Cette question soulve plusieurs problmes. D'abord, il n'y a pas de formation
de naturopathe. Il serait intressant de mettre en place ce type de formation, qu'ils exercent par la
suite en officine ou non. Puis, une pharmacie n'a pas le droit de transmettre ses comptences. Par
exemple elle ne pourra pas faire de publicit si un naturopathe travaille dans la pharmacie. Mais
c'est surtout un problme de dcisionnaires et de technocratie.
Le public : En Belgique, il existe des cours d'herboriste dans chaque dpartement, c'est une
formation professionnelle d'au moins deux ans qui donne par la suite certains droits. 2/3 des Belges
se soignent avec des plantes, on ne peut pas les ngliger. En France, il faudrait proposer une
formation finance par l'tat ceux qui vendent des produits naturels.
Rmy Lejeune : Il faudrait une formation qui permette tous de nous former, et que le droit des
pharmaciens vendre des plantes mdicinales leur soit retir si ils n'ont pas cette formation. Cette
formation doit assortir plusieurs comptences transversales. Il ne suffit pas d'une rglementation, il
faut des comptences du dbut jusqu' la fin.
Table ronde
Education et droit au remde par les plantes :
Prsentation du projet POPULUS
Intervenants : Grard Magnaudeix, Thierry Thvenin, Olivier Thaler, ric Mari, Muriel Durand,
Yildiz Thomas.
Invits : Rmy Lejeune et Christian Moretti



Introduction par Thierry THEVENIN
Lenqute va tre diffuse dans 3 magasines : Plantes et sant , Alternative sant et Marie-
France . Le but est de mieux cerner les pratiques daujourdhui. On sest rendu compte que mme
dans le cadre dun public vis 150 personnes Nant (ftes des Simples 2006) , il y avait une
grande richesse des discours. Au niveau des connaissances, des savoirs et des pratiques, cest
cependant vraiment pauvre. Cela veut dire quil faut accompagner les personnes, quil y a un gros
travail de rducation.
1 - Il y a environ 1500 plantes mdicinales dans la flore franaise. Pour le projet POPULUS,
il va falloir des listes de plantes 2 niveaux : une pour lautomdication et une seconde lusage
des herboristes. Ces 2 listes sont pour le moment bien avances.
2 - Il va ensuite falloir tablir une liste de pathologie. Et l, cest beaucoup moins avanc !
3 - Le 3
me
chantier va tre de dvelopper une formation pour les producteurs, herboristes ;
ou plutt de recrer une formation. Quant il est n en 1803, le diplme dherboriste prenait
beaucoup en compte la manire dobtenir une plante de qualit (travail ax sur la production, la
rcolte). Et puis, petit petit, cela est plus devenu un diplme de praticien de la sant . 150 ans
aprs, on se rend compte quil y a une demande. Il faudrait rtablir cette formation qui tait axe sur
la production et non sur la dlivrance thrapeutique. Le syndicat des Simples est un syndicat qui
regroupe environ 80 producteurs. Les gens qui sont Simples ont fait une des coles
dherboristerie ; mais lon reste sur notre faim. Dans ces formations, il y a un manque de pratique
de terrain, notamment en terme de gestion des ressources. Les gens vont chercher cette formation de
terrain dans des formations agricoles, qui offrent des spcialits plantes aromatiques et mdicinales
(PAM) en ce qui concerne la rcolte, le schage, la qualit. Mais ensuite, il y a des lacunes sur
comment vendre la plante, sous quelles formes.
Pour en revenir au projet POPULUS, les gens sont trs occups et trs clats gographiquement.
Cela est donc trs lent. Il va falloir dfinir des monographies. Cest un travail vraiment important
faire. Il y a un besoin de recherche faire dans lexistant, notamment en pharmacie o beaucoup de
travaux de recherches sur ces monographies ont t raliss.
Les listes de plantes ont t tablies par rapport ce qui existait sur le march environ 150 plantes
et en fonction de ce qui se trouvait en magasin (une cinquantaine de plante). Ainsi ces listes
comprennent pour le moment 200 plantes.
Le collectif possde un site Internet : www.collectif-populus.org.
Si on veut avoir la mme dmarche pour ces plantes que pour les mdicaments, notamment en
terme de contrle qualit, je crois que cela nest pas possible. Je pense que lon peut vraiment faire
comprendre aux gens quavec les sicles de recul que lon a par rapport aux PAM, cela est gage de
qualit.


QUESTIONS DEBATS

Le public : Dans le projet POPULUS, ce nest que des plantes sches ou bien vous incorporez des
teintures mres, des huiles essentielles ?
Thierry Thvenin : Ce nest pas encore dfini. Personnellement, je ne suis pas pour les huiles
essentielles. Dans le syndicat des Simples, on est contre.
La mme personne du public : Je trouve quil serait dommage denlever les huiles essentielles. Il y
a plein dhuiles essentielles que lon pourrait faire en alicaments.
Thierry Tvenin : Il sagit dans le projet POPULUS dautomdication et donc vis--vis des huiles
essentielles, nous ne sommes pas suffisamment au point en terme de posologie. Cela ne fait que 40
ans que lon en prend alors que les plantes sches
Le public : O va tre diffuse cette enqute ? Est-ce que cela va tre publie seulement dans les
rseaux de sant ou bien auprs dautres rseaux qui sy intressent ? Et y a-t-il un savoir recueilli
auprs des agriculteurs, des paysans ?
Thierry Thvenin : Lenqute sintresse plus un tat des lieux des pratiques de consommation,
plus que sur les savoirs. Mais on est preneur de toutes opportunits pour largir le public de
diffusion ; ainsi on aura peut-tre une ide plus relle de la socit ?
Yildiz Thomas : Il faut fournir un effort pour intgrer les politiques de sant, quils soient au
courant de la dmarche. Cest essentiel que lEtat soit partie prenante. Les discours actuels, trs
vagues, sont pour une plus grande automdication ; peut-tre est-ce une dlgation de lEtat.
POPULUS doit bien faire comprendre que a dmarche est autre. Il faut sinscrire dans une
dmarche de sant publique.
Un autre point. Mettre en place une pharmacope populaire est un gros projet. Il faut un travail
collectif, identifier tous les acteurs susceptibles daider la dmarche. Il faut rflchir sur ce quils
peuvent apporter, dans quel cadre, dans quels lieux. Il y a plein dinstances, plein de lieux possible
et cest bien rflchir.
La question des coles dherboristerie est essentielle. Avec la facult de pharmacie, cest un dbat
de sant et non sur lauto-individualisation de la mdication. Il faut dvelopper une approche
professionnelle de la botanique, dune botanique plus approprie la demande sociale.
La dmarche POPULUS doit, je pense, aussi sinterroger sur la manire dinterroger les formateurs
des CEP, des lyces agricoles, des CFPPA qui sont rests trs professionnels. Dune faon
gnrale, POPULUS devrait montrer quil est en phase avec lEurope. Il faut dailleurs peut-tre
penser mobiliser lEurope. LOMS va galement dans le mme sens ; il faut rendre tout cela
visible dans le projet POPULUS. On ne peut pas fonctionner dans lombre sinon on reste dans
lombre. Il faut que POPULUS sorganise et soit clair. Organisation en instance, dans luniversit
ou bien ailleurs ? Si il ny a pas un lieu, une instance pour le rendre visible, POPULUS ne
fonctionnera pas. Il faut quil y est un lieu pour le rendre visible.
Grard Magnaudeix : Sur le projet en lui-mme, on ne peut qutre daccord. Mais cest surtout une
question de temps et dargent. Pour en revenir aux monographies, lOMS a dj effectu un gros
travail. Au niveau de lEurope, il y a galement la commission E qui a fait 360 monographies. Et
ces monographies sont publies.
Le public : Si le projet POPULUS a pour objectif de dvelopper la phytothrapie et la
responsabilit des gens, par rapport aux monographies, il faut que celles-ci soient accessibles aux
gens qui en ont besoin. Dans vos monographies, est-ce quil y a une description de lusage ?
Thierry Thvenin : Effectivement, il faut les ractualiser et les modifier car en ltat, elles ne sont
pas utilisables. Mais le problme se pose pour dautres plantes qui nont pas t tudies.
Christian Moretti : Les monographies, il ne faut pas les refaire. Dans le projet TRAMIL, ils
voulaient mettre en place des recommandations dusage pour les plantes les plus couramment
utilises. Cest sur ce point que TRAMIL peut-tre repris en France ; pas sur la manire de faire des
monographies.
Thierry Thvenin : Le besoin de monographie est juste l pour aider la validation par les autorits.
Muriel Durand : Une tude de march pourrait tre faite, au niveau de ltude de la filire, au niveau
des plantes les plus utilises ?
ric Mari : Avez-vous intgr dans votre projet lutilisation de ces plantes par dautres
civilisations ? Et dautres parties de la plante galement ?
Christian Moretti : Sagissant de favoriser un certain nombre de plantes, de remdes dans une
pharmacope populaire, cela veut dire quelles sortiraient du monopole pharmaceutique. Pensez-
vous que cela soit possible ?
Grard Magnaudeix : Cest une vidence aujourdhui, les plantes sont sorties dans les marchs, les
magasins Bio. On fait des lois mais on les contourne. Aujourdhui, la sortie du monopole, on ne se
pose pas la question car on le vit. Cela est bien pour certaines plantes, moins bien pour dautres Il
suffit juste davoir des informations stables. Aujourdhui la pharmacope nest plus franaise mais
europenne ; donc peut-tre que grce lEurope on pourra faire avancer les formations ou les
choses qui sy rapportent.
Thierry Thvenin : Un bmol tout de mme : la France est indpendante en terme de Sant et de
Dfense par rapport lEurope. Donc cela est plus difficile car au niveau des tribunaux, ce nest pas
la mme lgislation.
Olivier Thaler : Dans le projet POPULUS, vous voulez proposer un usage, des recommandations
dusages. Mais qui prend la responsabilit ? Dans votre projet, de qui attendez-vous la
responsabilit ?
Thierry Thvenin : Du ministre de la sant.
Olivier Thaler : Du coup, ce projet na aucun ralisme si vous ny accdez pas. Savez-vous quelle
est leur position ?
Yildiz Thomas : Il faudrait leur proposer une dmarche dvaluation sinon elle va tre impose. Il
faudrait se mettre daccord sur des critres choisis par un groupe dhorizons divers. Et cela, si on le
propose, cela fera peut-tre un premier pas vers le ministre de la sant. Paralllement, il existe des
procdures en biologie de la conservation dont il serait possible de sinspirer pour cette dmarche
dvaluation.
Olivier Thaler : Ne pensez-vous pas que la dmarche POPULUS, en France o la population est
mature en terme de qualit, doit intgrer ce volet qualit ?
Thierry Thvenin : Oui, mon avis, cest un des points importants.
Olivier Thaler : Oui mais ne faut-il pas ds le dpart intgrer dans votre groupe de rflexion les
acteurs concerns par la certification de la qualit ?
Thierry Thvenin : Pour le moment, il ny en a pas. Au niveau de la qualit, on suit le cahier des
charges des Simples. Le contrle est fait par un organisme indpendant.
Christian Moretti : La question de la qualit est essentielle. Il existe aujourdhui la labellisation
AB ; mais il y a galement des certifications sur lorigine, sur le terroir. Est-ce que cela existe pour
les plantes aromatiques et mdicinales ?
Thierry Thvenin : Oui, je crois. [Donne un exemple de labellisation de terroir dans le Vercors] La
disponibilit de la ressource est vraiment importante. Mme au-del de la rglementation, cest un
point important du projet POPULUS.
Olivier Thaler : Automdication +++.
Grard Magnaudeix : Ce nest pas du tout le mme fonctionnement ; au niveau de lassurance, au
niveau de lobtention de certains produits.
Christian Moretti : Le march de lautomdication aux Etats-Unis est totalement ouvert. Il y a eu
une loi en 1995 qui a libre totalement les produits de sant non pharmaceutiques.
Le public : Oui mais lautomdication nest absolument pas la mme en Amrique du Sud et du
Nord. Les gens nont pas la mme responsabilisation.
Muriel Durand : La manire dinformer le public est vraiment primordiale.
Olivier Thaler : Quelle stratgie commerciale adoptez-vous dans POPULUS en terme de
communication ? Celle qui vous garantie le moins de risque ?
Thierry Thvenin : Il ny en a pas. Pour chaque plante, il faut des rglementations dusages trs
prcises.
Rsum de la journe

Ce colloque a runi tout au long de la journe une centaine de personnes. Les confrences et tables-
rondes ont suicit des changes intressants entre le public, les invits et les intervenants.
Ces dbats se sont poursuivis jusqu' un apritif convivial qui acheva cette journe.

Cet vnement a t l'occasion pour les diffrents professionnels de la filire de se runir autour
d'une problmatique commune, mais galement pour les tudiants de rencontrer et discuter avec ces
professionnels.
Le colloque a notamment eu des retombs positives en terme d'embauche pour deux des tudiants
organisateurs. Il a galement permis d'orienter de nombreuses personnes passionnes par les plantes
utiles vers les formations reconnues en France.

Si la problmatique semble avoir volu depuis que le panel de plantes libres est pass de 34
147 en aot 2008, des dbats restent encore ouverts quant la reconnaissance de la totalit de la
filire des plantes mdicinales en France.
En effet si les dcrets n2008-841 du 22 aot 2008
(http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=?cidTexte=JORFTEXT000019375944&d
ateTexte=&oldAction=rechJO ) et n 2008-839 du 22 aot 2008
(http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=?cidTexte=JORFTEXT000019375930&d
ateTexte=&oldAction=rechJO ) largissent la vente de plantes ou de parties de plantes inscrites la
pharmacope franaise, le problme quant la transmission des savoirs et savoirs-faire reste entier,
c'est dire qu'elle reste encore sous le monopole pharmaceutique.
L'un de nos intervenant et membre du comit de pilotage, Mr Thierry Thvenin a rdig un
commentaire intressant ce sujet, intitul: La nouvelle liste des plantes mdicinales en vente
libre (http://www.syndicat-simples.org/actualites/la-nouvelle-liste-des-plantes-medicinales-en-
vente-libre ).

Pour cette journe, nous tenons remercier nouveau tous les participants qui, nous l'esprons,
auront l'occasion de se retrouver pour poursuivre le dbat.

Contacts

Les 5 organisateurs de cet vnement sont diplms du master IEGB (Ingnierie en Ecologie et
Gestion de la Biodiversit) de l'universit de Montpellier II.

Chef de projet :
Paule Teres pauleteres@gmail.com 06-76-77-95-94

Responsable intervenants :
Simon Guillemont guillemontsimon@yahoo.fr 06-62-00-20-73

Responsable communication :
Morgane Noullet morgane.noullet@hotmail.fr 06-08-66-01-53

Responsable finances :
Ccile Delarque cecile.delarque@laposte 06-86-77-51-74

Responsable logistique :
Sergio Castillo sercastillo2000@yahoo.com 06-27-47-92-43


Une adresse mail commune a t cre pour ce colloque, afin que vous puissiez nous contacter plus
facilement :
avenir_filiere_plantes_medicinales@no-log.org