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DOB II - Tome 2 (Synthèse)

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DOB II Tome 2 Les effets du contrat

Titre 1. Le contrat : accord de volonts et norme


obligatoire
Chapitre 1. La convention, loi des parties
Section 1 : Le rle de la volont dans la dtermination de la norme
contractuelle

Larticle 1134 al. 1 C.C. affirme que les conventions lgalement formes tiennent lieu de loi ceux
qui les ont faites. Cette loi tient son fondement dans plusieurs principes et notamment celui de
lautonomie de la volont. Lautonomie de la volont se dcline en trois facettes : la libert
contractuelle, la force obligatoire du contrat (ou convention-loi) et le consensualisme.
La doctrine contemporaine ne dfend cependant pas lide selon laquelle la volont des parties
contractantes fonderait, elle seule, la force obligatoire du contrat. Il existe, en effet, de nombreuses
limites ce principe (abus de droit, interventions jurisprudentielles et lgales sur le contenu et la forme
du contrat, etc.).
Les explications la force obligatoire du contrat se dont orients dans plusieurs directions :
- Vers une perspective positive, faisant de la loi la seule source dobligation conventionnelle.
- Vers une perspective jusnaturaliste, mettant laccent sur lexigence de justice et dquilibre.
- Vers un principe de confiance, la force obligatoire du contrat et de lengagement par
dclaration unilatrale de volont tant alors fonds sur les attentes lgitimes de chacune des
parties.
La doctrine et la jurisprudence belge rcentes accordent un rle croissant la thorie de la confiance
lgitime en droit des obligations, comme sources dobligations ou comme critre dvaluation du
manquement dune partie ses obligations, notamment dans la priode prcontractuelle.
Le contrat ne produit donc deffets quen vertu du droit objectif et fait lobjet dun encadrement lgislatif
de plus en plus strict qui limite le rle de la volont. Nanmoins, laccord de volont demeure un
lment essentiel sans lequel un contrat ne peut natre. Labandon du dogme de lautonomie de la
volont ne signifie pas labandon de la libert contractuelle : elle demeure mais sous contrainte. Les
parties gardent donc une marge de manuvre pour dterminer lobjet, le type de contrat, lintensit
des obligations, les sanctions contractuelles ou encore la dtermination de la loi applicable.
La volont continue daffirmer son rle en ce qui concerne linterprtation des conventions : en cas de
difficult, celle-ci reste gouverne par la recherche de la commune intention des parties (1156 C.C.).
Cependant, la volont trouve vite ses limites. En effet, le juge de fond nest pas prisonnier de la
qualification choisie par les parties ; il peut, en cas de contestation ou doffice si lordre public est en
jeu, lui substituer une qualification plus conforme ce quil estime tre la volont des cocontractants
en se fondant non seulement sur les termes du contrat en cause mais sur les circonstances et le
contexte dans lequel il sexcute.
Il nous arrive aussi que la qualification retenue par les parties aboutisse appliquer la relation
contractuelle un rgime juridique dont elles nont pas prvu ni voulu toute la rigueur, qui est souvent
dorigine prtorienne. A partir de la qualification (rattachement de la situation une catgorie
contractuelle dtermine), les jurisprudences belge et franaise ont dgag lide quil existe, par type
de contrat, un minimum obligatoire incompressible, une obligation essentielle ou fondamentale dont
les parties ne sauraient sexonrer par convention.

Section 2 : Porte du principe de la convention-loi


Le principe de la convention-loi (1134 al. 1 et 2 C.C.) se fonde sur une justification morale (respect de
la parole donne) et sur une ncessit conomique (scurit juridique). Le contrat est, comme lcrit
Ripert, une emprise sur le futur ; elle suppose donc que le droit impose le respect des engagements
dans la dure. Les conventions lgalement formes tiennent lieu de loi uniquement aux parties, elle
est donc relative. La loi tatique est, quant elle, absolue.
Le principe de la convention-loi a deux volets :
- Dune part, le dbiteur doit sexcuter conformment ce qui a t convenu et le crancier
peut ly contraindre en demandant une condamnation en nature.
- Dautre part, les conventions sont, en principe, intangibles. Elles ne peuvent tre modifies ou
rsilies que par laccord des parties ou dans certains cas prvus par la loi. Cette intangibilit
du contrat sapplique, sauf exceptions, aux parties, aux tiers, au juge et au lgislateur.
Le principe de la convention-loi connat certaines limites :
- Article 6 C.C. (ordre public et bonnes murs).
- Autres dispositions lgislatives gnrales ou spcifiques (protection du consommateur, etc.).
- Intervention du juge se basant sur linterprtation de lois (1134 al. 3, 1135 C.C.).
Tout contrat engendre une ou plusieurs obligations et, corrlativement, une ou plusieurs crances.
Certains contrats ont pour caractristique de comporter une obligation de dare dont lobjet est donc le
transfert ou a constitution de droits rels.
En droit romain, la vente nest pas translative de proprit mais elle cre une obligation de livrer la
chose vendue. Dans le Code Civil, la proprit se transfre solo consensu . La vente est donc
translative de proprit ; lobligation de livrer la chose est en ralit lobligation du vendeur de
transfrer la proprit, pour autant quil sagisse dun corps certain et non dune chose de genre.
Le transfert de proprit solo consensu a fait lobjet de vives critiques, notamment concernant la
thorie du risque. Ces risques sont lis au transfert de proprit. En principe, cest le propritaire de la
chose qui supporte les risques de sa destruction la suite dune cause trangre exonratoire ; il en
rsulte, en cas de vente, quun acheteur, devenu propritaire dune chose individualise ds lchange
de consentements, pourrait supporter la perte de la chose sans quelle lui ait t effectivement
dlivre. La porte du risque est, toutefois, limite :
- Le transfert solo consensu na lieu quentres parties et ne concerne que les corps certain,
ce qui en rduit la porte pratique.
- Larticle 1138 nest ni dordre public, ni impratif. Les parties peuvent donc
conventionnellement y droger et retarder le transfert de proprit de la chose vendue
lacheteur jusquau paiement de la totalit du prix de la chose au vendeur. Ce genre de clause
a aussi pour effet de retarder le transfert des risques et donc de les maintenir charge du
vendeur, sauf clause contraire.

Chapitre 2. La construction dune


comportement : limpratif de bonne foi

norme

de

bon

Section 1 : Notion et fondement


La bonne foi est difficilement dfinissable. Elle est plus un principe rgulateur quun concept
strictement dfini. Le principe de lexcution de bonne foi est consacr par les articles 1134 al. 3 et
1135 du Code civil en matire contractuelle.
Il ne sagit pas dune bonne foi subjective qui scrute les intentions des parties mais dune bonne foi
objective, norme abstraite de comportement loyal, simposant aux parties contractantes dans

lexcution du contrat mais aussi dans la formation de celui-ci. De faon plus prcise, le principe de
lexcution de bonne foi implique une triple obligation de loyaut, de pondration et de collaboration
dans lexcution des contrats .
Lobligation de loyaut et de collaboration implique lobligation de favoriser la russite de lentreprise
contractuelle, notamment en livrant au cocontractant les informations ncessaires la bonne
excution du contrat et en prenant les mesures ncessaires pour que le partenaire puisse excuter
ses obligations.
Quant au devoir de modration, il impose au crancier de se montrer raisonnable dans lexercice de
ses prrogatives et dans le choix des sanctions appliquer en cas dinexcution du contrat. Il ne faut
pas abuser de ses droits en matire contractuelle, pas plus quen matire extracontractuelle.
La bonne foi permet la rgle morale de pntrer dans le droit positif mais moyennant transmutation.
La bonne foi nest ni la bont ni la fraternit car le contrat reste une confrontation dintrts divergents.
Le souci de moralisation du contrat explique que les tribunaux et la doctrine tendent le principe de
bonne foi au stade de la formation des contrats o simpose galement aux ngociateurs, futurs
contractants, une obligation de loyaut et de collaboration dont lobligation de renseignements offre
une illustration remarquable. Des discussions ont lieu quant au fondement du devoir de loyaut
existant dans la priode prcontractuelle. Parfois, la lois sexprime explicitement et concrtise le
devoir de bonne foi (ex : loi du 6 avril 2010).

Section 2 : Fonctions
La bonne foi est un principe en expansion. La doctrine a t amene systmatiser les diffrentes
fonctions de la bonne foi.

1. Fonction interprtative
Il ne faut pas sen tenir au sens littral des termes dun contrat mais excuter le contrat conformment
son esprit. Fait ainsi preuve de mauvaise foi dans linterprtation et lexcution dune convention un
cafetier qui tente de se drober la clause dapprovisionnement exclusif du contrat de brasserie, en
vendant une bire concurrente, non dans son tablissement, mais dans une caravane installe sur le
parking de ltablissement au motif quil sagirait dun tablissement distinct. Cette fonction
interprtative est conteste car elle est proche de la recherche dune volont commune vise larticle
1156 du Code Civil.

2. Fonction compltive ou suppltive


La fonction compltive permet au juge dimposer aux parties des obligations additionnelles, sur la
base des suites que lusage, lquit ou la loi donnent au contrat daprs sa nature (1135 C.C.). La
jurisprudence offre de nombreux cas et est particulirement fournier en ce qui concerne le devoir
dinformation en cours dexcution (comme elle lest dailleurs dans la priode prcontractuelle).
Lexpansion donne la bonne foi par la doctrine et la jurisprudence belges a un peu occult larticle
1135 du Code Civil. La jurisprudence belge admet, notamment, que les usages puissent servir
complter le contrat en labsence de volont exprime par les parties pour autant quils prsentent un
caractre de gnralit suffisant qui permette de supposer que les parties ont entendu sy rfrer
implicitement. Dans cette optique, lusage est plus un mode dinterprtation de la volont que de
construction de la norme contractuelle de comportement proprement dit. Lquit, en droit des
obligations, a mauvaise presse car on craint larbitraire. Lquit mentionne larticle 1135 C.C. joue,
comme la bonne foi, un rle suppltif ou compltif. Cest un principe de cohrence que le juge
applique aux relations contractuelles : il est par exemple contradictoire dimposer au contractant de
dvelopper son activit en accroissant le volume de vente, tout en sabordant ses efforts par la
cration dune station-service concurrente dans un environnement immdiat.

3. Fonction modratrice
La fonction modratrice de la bonne foi impose aux parties un devoir de pondration dans lexercice
de leurs droits contractuels et leur interdit den abuser. Labus de droit sest vu confrer le droit de cit
en matire contractuelle par Un arrt de la Cour de cassation du 19 septembre 1983. Cet arrt fonde
labus de droit non sur larticle 1382 du Code civil mais sur le principe de lexcution de bonne foi des
conventions nonc larticle 1134 al. 3 du Code Civil.
Selon la Cour de cassation, si le principe de lexcution de bonne foi des conventions, consacr par
larticle 1134 C.C., interdit une partie un contrat dabuser des droits que lui confre celui-ci, pareil
abus suppose que lorsque cette partie use, dans son seul intrt, dun droit quelle puise dans la
convention, elle en retire un avantage disproportionn la charge corrlative de lautre partie .
La jurisprudence inaugure par larrt du 19 septembre 1983 a un triple intrt :
- Labus de droit contractuel se voit reconnatre un fondement juridique propre et se trouve
sanctionn par les rgles de la responsabilit contractuelle, ce qui permet dviter le problme
du cumul des responsabilits.
- Elle consacre leffet modrateur (appel aussi effet restrictif ou limitatif) de la bonne foi
labus de droit contractuel.
- La Cour se rfre au critre de proportionnalit. Labus de droit ne se dduit pas du simple fait
que le titulaire du droit lexerce son avantage ou gostement, mais rsulte de lexercice dun
droit dune manire qui dpasse manifestement les limites de lexercice de celui-ci par une
personne normalement diligente et prudente. Au fil du temps, la jurisprudence a dgag des
critres spcifiques (dautres peuvent exister) qui permettent de concrtiser la notion :
o Lexercice dun droit dans lintention de nuire.
o Lexercice dun droit sans intrt ou motif lgitime ou encore sans intrt raisonnable
et suffisant, de faon prjudiciable autrui.
o Le choix entre diffrentes faons dexercer un droit avec la mme utilit, et lexercer
de la faon la plus dommageable autrui.
o Lexercice dun droit entrainant une importante disproportion entre lavantage obtenu
par le titulaire du droit et le prjudice caus lautre partie.
o Le dtournement du droit de sa finalit, sil sagit dun droit fonction.
Quen est-il de linertie prolonge dun crancier dans lexercice de son droit ? Par exemple dun
crancier omettant de rclamer ce qui lui est du pendant ans et qui se manifeste en rclamant les
intrts de sa crance. Ce type de comportement a soulev un dbat franco-flamand sur lintroduction
en droit belge de la rechtsverwerking . Cette thorie affirme quun droit subjectif ne peut plus tre
invoqu toute les fois que le titulaire aura adopt un comportement objectivement inconciliable avec
ce droit. Dans deux arrts, la Cour de cassation rejette cette thorie comme principe gnral de droit
tout en nexcluant pas la possibilit de lappliquer dans certains cas particuliers, pour autant quelle
remplisse les critres de labus de droit.
Dans un arrt du 16 septembre 1982, la Cour de cassation a prcis que lexercice abusif dun droit
est sanctionn non par la dchance totale de ce droit mais par la rduction de celui-ci son usage
normal ou par la rparation du dommage que labus a caus. Dans certains cas, la rduction du droit
quivaut une dchance parce que la prrogative contractuelle exerce abusivement. Dans dautres
cas, la sanction applique par le juge consistera substituer un remde autre que celui rclam par le
crancier.

Section 3 : Limites
La fonction correctrice ou adaptatrice de la bonne foi permettrait aux juges dadapter le contenu dun
contrat en fonction de circonstances exceptionnelles qui ont pour effet de bouleverser lconomie
contractuelle, lquilibre des prestations prvu la conclusion du contrat. Elle nest pas admise en
droit belge. Le principe doit, en effet, tre concili avec le respect du principe de convention-loi (qui
garantit la scurit juridique), interdisant ainsi au juge de modifier le contrat pour cause dquit.

Chapitre 3. La dialectique de la loi et du contrat dans la


construction de la norme contractuelle : llimination des
clauses abusives
Lordre public classique vis larticle 6 du Code civil a surtout une fonction dfensive et un effet
prohibitif : il fait obstacle la cration ou la transmission dobligations contraires lordre public et
aux bonnes murs.
Lordre public de protection nous intresse plus directement : il se compose de dispositions
impratives dont la finalit est de protger certaines catgories de contractants, juges plus faibles :
travailleurs, locataires, consommateurs de produits et de services.
En droit belge, la protection de la partie faible sest faite dans un premier temps par la jurisprudence
qui, laide des principes et des concepts gnraux du droit des obligations, a combattu ou limit les
excs lis lautonomie de la volont. Dans un second temps, lintervention lgislative a port
spcifiquement sur llimination des clauses abusives dont lexistence ne fait que reflter lingalit
des rapports de force entre parties contractantes. La loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du
march et la protection du consommateur illustre la faon dont lordre public de protection pntre
dans le contrat. En son article 4, elle impose lentreprise une obligation trs large dinformation vis-vis du consommateur, tant sur les caractristiques principales du produit que sur les conditions
juridiques de sa dlivrance. La loi vise aussi, dans les articles 73 et suivants, liminer les clauses
abusives dans les relations entre entreprise et consommateurs.
La loi du 14 juillet 1991 comportait une section consacre aux clauses abusives (article 31 et
suivants). Elle avait d lgrement tre modifie pour satisfaire aux exigences de la directive
europenne du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les
consommateurs. En outre, elle avait t complte par une loi du 2 aot 2002 qui assurait la
transposition de la directive en ce qui concerne les professions librales. Les rgles applicables aux
clauses abusives sont dsormais disperses dans plusieurs chapitres de la nouvelle loi. La dfinition
de clause abusive, qui nonce les critres sur lesquels on peut se fonder pour qualifier une clause de
la sorte, et la sanctionner mme si elle ne figure pas dans la liste noire, est ainsi dplace dans
larticle 2 de la loi, avec les autres dfinitions.
(Clause abusive : toute clause ou toute condition dans un contrat entre une entreprise et un
consommateur qui, elle seule ou combine avec une ou plusieurs autres, cre un dsquilibre
manifeste entre les droits et les obligations des parties au dtriment du consommateur).
Comme sous le rgime antrieur, lobjectif de la LMPC est de rtablir lquilibre contractuel entre les
droits et obligations respectives des parties par llimination des clauses abusives. Elle vise protger
une catgorie particulire dagent conomique : le consommateur dfinit comme toute personne
physique qui acquiert ou utilise des fins excluant tout caractre professionnel des produits mis sur le
march. Quant lentreprise, larticle 2, 1, la dfinit comme : toute personne physique ou personne
morale poursuivant de manire durable un but conomique, y compris ses associations.
La loi sapplique aux rapports de consommation. Les contrats conclus entre non-professionnels et les
contrats conclus entre professionnels restent soumis au droit commun. Cette restriction ratione
personae peut dailleurs crer des problmes de dlimitation en cas dacquisition ou dutilisation mixte.
Un professionnel peut naturellement aussi tre un consommateur au sens de la loi et bnficier de la
protection offerte par celle-ci.
Cette loi confre au juge le pouvoir dapprcier la validit de certaines clauses douteuse ou lui impose
lobligation dannuler des clauses noires , considres demble comme abusives (article 74).
Le juge dispose donc dun pouvoir de contrle sur le contenu du contrat, soit quil estime que la clause
litigieuse appartient la liste limitative de larticle 74, soit quil estime, par application de larticle 2, 28,

de la loi que la clause litigieuse seule ou combine avec une ou plusieurs autre, cre un dsquilibre
manifeste entre les droits et les obligations des parties au dtriment du consommateur .
Cette dfinition de la clause abusive est une dfinition large. Enfin, la notion de dsquilibre manifeste
laisse un grand pouvoir dapprciation au juge et fait lobjet des dbats en doctrine. Il sagit dun
dsquilibre indiscutable apparaissant la lecture du contrat, dun dsquilibre entre les droits et les
obligations des parties. La loi ne permet pas au juge de remettre en cause le rapport conomique
sous-jacent la contestation juridique parce quil y aurait une disproportion importante entre la valeur
des prestations rciproques. Le pouvoir dapprciation donn au juge est large mais il nest pas sans
limites. Le dsquilibre manifeste est une notion lgale soumise au contrle de la Cour de cassation.
Quelles sont les sanctions applicables en cas de clause abusive ? Selon larticle 75, 1er, de la loi,
toute clause abusive est interdite et nulle. Le juge doit donc prononcer la nullit de la clause. La nullit
ne stend pas en principe lensemble du contrat (cfr. Article 75, 1er, al.2, de la loi, ancien article
33, 1er, alina de la LPCC). Le maintien du contrat est une solution avantageuse pour le
consommateur.
Llimination de la clause abusive par le juge restaure lapplication du droit commun et notamment les
rgles de la responsabilit contractuelle paralyse totalement ou partiellement par la clause querelle.
Lapplication de la nullit sanctionnant labus entraine la restauration du rgime de droit commun. Le
contrat est non seulement nettoy mais, dans une certaine mesure, remeubl .
Nonobstant larticle 33, 1er, alina 3 de la LPCC, la doctrine belge considrait en gnral larticle 32
(nouvel article 74 de la LMPC) comme une disposition imprative dont la violation est sanctionne par
une nullit relative.
Un arrt Ocano Gruppo du 27 juin 2000 de la Cour de justice de lUnion europenne a cependant
jet le doute en affirmant que la directive du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les
contrats conclus avec les consommateurs ne pouvait assurer une protection effective ces derniers
que si le juge saisi avait le pouvoir dapprcier doffice le caractre abusif de la clause.
Cela implique-t-il que la loi du 14 juillet 1991, dans ses dispositions relatives aux clauses abusives,
aurait un caractre dordre public et non pas simplement impratif ? La Cour de cassation rpond par
la ngative : la nullit qui sanctionne une clause reste une nullit relative avec toutefois une facult et
mme un devoir du juge de soulever la nullit doffice. La clause abusive peut aussi faire lobjet dune
action en cessation (article 113 LMPC) visant lliminer dans tous les contrats dadhsion qui
limposent. Ce genre daction est utilis par des organisations dfendant un intrt collectif.

Chapitre 4. La rsolution des difficults dapplication de la


loi contractuelle
Section 1 : Gnralits
1. Interprter : dcouvrir ou recrer ?
Interprter, cest donner un sens un concept, une rgle, un texte.
La qualification est distincte de linterprtation, elle consiste distinguer dans le complexe des faits en
cause ce qui justifie le rattachement telle ou telle catgorie juridique dtermine.
Linterprtation et la qualification sont lies. Linterprtation comporte une dimension cratrice, en ce
sens que le juge, confront une difficult ou une contestation, va dgager le sens et la porte dun
texte pour en permettre lapplication une hypothse imprvue. Cette dimension cratrice est
nanmoins confronte des limites (drivant du texte lui-mme, du contexte, de linterprtation dune
communaut humaine dtermine, etc.).

2. Principes du Code Civil. Prsentation gnrale


La convention fait loi des parties. Encore faut-il savoir, en cas de litige, quel est le contenu de cette
loi ? Le Code Civil consacre ce problme aux articles 1156 1164.
Pendant longtemps, ces rgles ont t considres comme de simples conseils donns aux juges de
fond. La tendance actuelle est de les considrer comme de vritables directives simposant aux juges
de fond et dont la violation ouvre la voie un pourvoi en cassation. Le juge, moyennant le respect de
ces directives, garde nanmoins un pouvoir souverain dapprciation ; la Cour de cassation impose
toutefois des limites en censurant les dcisions qui violent les principes fondamentaux. La recherche
de la commune intention des parties est le principe essentiel qui gouverne linterprtation des
conventions : il prolonge la fois le principe dautonomie de la volont et le principe de la bonne foi.

Section 2 : Deux directives dinterprtation importantes


1. Recherche de la commune intention des parties
Larticle 1156 C.C. est rattacher au principe selon lequel un accord trouve le fondement de sa force
obligatoire dans lautonomie de la volont. Cela suscite plusieurs remarques :
- Cette recherche de la commune intention a un caractre assez hypothtique et artificiel dans
la mesure o les parties sont prcisment en dsaccord sur ce qui les lie. Linterprtation des
textes se fait en fait plutt selon lesprit qui les anime.
- Dans la pratique, de nombreux contrats ne se ngocient pas ou trs peu (contrat dadhsion).
Il ny a donc pas rellement de commune intention des parties .
Dans la recherche de la volont des parties, le juge a un pouvoir souverain dapprciation. Le pouvoir
est notamment reconnu au juge de qualifier une situation contractuelle si les parties ne se sont pas
exprimes. Il nest pas tenu par la qualification que les parties donnent leur convention. Il peut la
requalifier en cas de qualification incorrecte, ce faisant il cherche la commune intention des parties.
Souverain ne veut pas dire absolu ; le juge ne peut requalifier une convention que si la qualification
donne par les partie est manifestement errone, en ce sens quil y a contradiction entre la
qualification et le contenu du texte.
Le pouvoir dinterprtation du juge connat quelques limites :
- Il doit respecter larticle 1134 al1 C.C. et la foi due aux actes (1219 et s. C.C.). Il ne peut pas
utilis le critre de lquit pour refuser de donner effet une convention. Il ne peut pas non
plus donner une interprtation inconciliable avec les termes utiliss par la convention.
- Il doit respecter la hirarchie des preuves, ce qui implique quil prenne en considration la
teneur mme de lacte qui lui est soumis.
Le juge peut, sans violer le principe de la prminence de la preuve crite, se fonder sur des lments
extrinsques lacte pour retrouver la volont commune des parties (change de lettre, bon de
commande, etc.). Lexcution donne par les parties peut galement tre pris en considration mais
ne peut tre un lment suffisant se lequel se fondrait la dcision du juge. Lapplication des principes
dinterprtation pose des problmes dlicats, linterprte tant naturellement amen complter les
conventions quand les parties ne se sont pas explicitement exprimes. Il semble que les articles 1134
alina 3 et 1135 du Code civil fournissent au juge des instruments en ce sens.
Mais jusquo le juge peut-il ou doit-il aller ? Une police dassurance stipule qu aucune indemnit ne
sera paye aux occupants dun vhicule automoteur, sil est tabli que le conducteur a bu de
lalcool . Or laccident survient alors que le conducteur a bu mais insuffisamment pour que cela
cre le moindre risque. La compagnie dassurance refuse dindemniser. Elle est cependant condamn
au nom de lintention commune des parties car les parties nont pu avoir raisonnablement lintention
dexclure les occupants de la garantie lexclusion de la garantie au profit des occupants, en pareils
cas, compte tenu du mode de vie normal dans notre socit, reviendrait rendre lassurance lettre
morte, alors que dans lintention commune des parties elle devait avoir un effet utile .

2. A qui profite le doute ?


Selon larticle 1162 C.C., dans le doute, la convention sinterprte contre celui qui a stipul et en
faveur de celui qui a contract lobligation .
Le fondement de cette rgle est discut. Le principe tant que lon est libre dobligation il serait
logique, en cas de doute, de penser que celui qui sengage na lintention de sengager quau
minimum. Une autre explication voit dans ce principe dinterprtation une sorte de sanction contre le
stipulant pour navoir pas rdig le contrat ou la clause plus clairement. Il sagit ici dun doute que les
mthodes et conseils dinterprtation exposs plus haut nont pas permis de rduire. Cette disposition
ne peut jouer quen cas de doute rel, si le juge ne parvient pas dterminer de faon suffisamment
certaine la porte prcise du contrat laide des lments intrinsques et extrinsques lacte. La
question de savoir qui soblige et qui stipule est difficile rsoudre dans les contrats
synallagmatiques o chacune des parties est la fois dbitrice et crancire.
Larticle 1162 est utilis, avec plus ou moins de rigueur, pour protger la partie la plus faible dans les
contrats dadhsion. La partie qui rdige ou impose le contrat est souvent considre en jurisprudence
comme celle qui a stipul. De faon gnrale, la jurisprudence tend interprter les contrats
dadhsion lencontre de leur rdacteur. A cela sajoute que les clauses drogatoires au droit
commun, clauses exonratoires de responsabilit, clauses pnales ou encore clauses rsolutoires
expresses sinterprtent de faon stricte ou mme restrictive.

Titre 2. Force obligatoire du contrat entre parties


Chapitre 1 :
contractuelle

Lexcution

en

nature

de

lobligation

Section 1 : Primaut de lexcution en nature. Porte et limites.


Il y a, en droit belge, primaut de lexcution en nature (agissant sur les obligation de dare, facere et
me
non facere). Lexcution par quivalent (dommages et intrts) constitue une sanction de 2
rang.
Il faut distinguer le principe dexcution en nature (le dbiteur excute ce quil devait faire) de la
rparation en nature (qui ne procure au crancier insatisfait quun quivalent non pcuniaire).
La primaut de lexcution en nature peut tre du point de vue du crancier mais aussi du dbiteur :
- Cest un droit du crancier de rclamer lexcution en nature. Saisi dune demande
dexcution en nature, le juge doit en principe laccueillir (si elle est encore possible et si ce
nest pas une demande abusive).
- Le dbiteur a la possibilit dimposer lexcution en nature de lobligation en souffrance du
crancier qui rclamerait sa condamnation des dommages et intrts (si excution encore
possible et utile pour le crancier).
Les voies dexcution, sont les mesures de contrainte que le crancier peut obtenir au cas o le
dbiteur refuse de se conformer au jugement. Les mesures de contrainte qui sensuivront ne pourront
pas sappliquer toutes les hypothses dinexcution. En principe, la violence physique directe sur la
personne du dbiteur est interdite par notre droit. Il existe quelques rares exceptions comme par
exemple, lexpulsion manu militari de loccupant dun immeuble sans droit.
Des distinctions doivent donc tre faites suivant le type dobligation en cause :
- Sil sagit dune obligation de donner une somme dargent, il est toujours possible dobtenir le
paiement grce la saisie excution et la vente force des biens du dbiteur. Lexcution
force en nature peut aussi tre mise en uvre pour les obligations de donner une chose de
genre non encore spcifie.
- Sil sagit dune obligation de ne pas faire, dont linexcution est consomme, la condamnation
lexcution en nature peut tre obtenue par jugement mais elle na pas toujours dintrt.
- Pour les obligations de faire non strictement personnelles, lexcution force en nature de
lobligation peut, moyennant en principe autorisation du tribunal, tre obtenue par lentremise
dun tiers qui accomplira la prestation aux dpens du dbiteur.
- Sil sagit dune obligation de faire dont lexcution implique du dbiteur des qualits tout fait
spcifiques, il est possible dobtenir un jugement de condamnation lexcution en nature
mais il nest pas possible, mme en vertu dun jugement, de pratiquer une mesure de
contrainte physique sur la personne du dbiteur pour lobliger excuter. Lastreinte peut tre
demande accessoirement un jugement de condamnation.

Section 2 : La mise du dbiteur sous pression


On envisage deux moyens de pression du crancier insatisfait afin dobtenir lexcution en nature :
- La mise en demeure, rappel adress par le crancier au dbiteur en dfaut
- Lastreinte qui peut tre accorde par dcision judiciaire lencontre du dbiteur rcalcitrant.
Ces deux moyens se situent des moments bien diffrents : la mise en demeure ouvre les hostilits
et peut tre le prlude une procdure judiciaire ; lastreinte suppose que linexcution soit
consomme et quune procdure judiciaire soit arrive son terme.

1. Un pralable oblig : la mise en demeure


A. Notion
La mise en demeure est une interpellation claire et non quivoque faite par le crancier au dbiteur, lui
enjoignant dexcuter lobligation en souffrance soit immdiatement, soit dans un certain dlai (articles
1138, 1139, 1146, 1153 et 1302 du Code civil).
La mise en demeure est une formalit pralable toute mesure dexcution force que la Cour de
cassation a rige en principe gnral de droit. Il sagit dun acte juridique unilatral et non dun fait
juridique. La mise en demeure constitue un acte rceptice dont lefficacit est soumise la rception
par le dbiteur.
Il est admis quelle se fasse ad futurum, cest--dire quelle porte sur une dette existante mais non
encore exigible. On pourrait galement concevoir que la mise en demeure sadresse non seulement
au dbiteur mais aussi au crancier ngligent dexercer ses droits ou tardant rceptionner le
paiement qui lui est offert.

B. Formes et contenu
Selon larticle 1139 du Code civil, le dbiteur est mis en demeure par une sommation dhuissier ou par
un acte quivalent. La tendance est lassouplissement. Malgr les termes de larticle 1139, il est
admis, en matire commerciale, que la forme dune mise en demeure est libre (lettre recommand,
etc.). La jurisprudence rcente se montre dailleurs moins exigeante que la jurisprudence ancienne
quant la forme de la mise en demeure, mme en matire civile, ds lors que le crancier manifeste
sans quivoque son intention dobtenir le paiement de lobligation en souffrance et invite son dbiteur
sexcuter.
Dans son arrt du 28 mars 1994, la Cour de cassation a rompu avec le formalisme impos par larticle
1139 du Code civil. Par acte quivalent, selon la Cour, il y a lieu dentendre tout acte contenant une
interpellation dont le dbiteur a d ncessairement induire quil tait mis en demeure dexcuter son
obligation .
La mise en demeure doit exprimer de manire claire et non quivoque la volont du crancier de voir
excuter lobligation principale et indiquer avec prcision lobligation en souffrance. Il existe toutefois
quelques exceptions (crdit la consommation, formalisme particulier quand la mise en demeure
mane dun mandataire professionnel, etc.).

C. Champ dapplication. Exceptions.


La mise en demeure ne concerne que linexcution fautive des obligations contractuelles. Elle nest
pas de mise, par la force des choses, pour des obligations dlictuelles. Cela tant, la mise en
demeure est possible pour obtenir lexcution dun jugement de condamnation des dommages et
intrts.
En matire contractuelle, la mise en demeure est en principe requise. La seule chance du terme ne
suffit pas mettre le dbiteur en demeure sous rserve dun certain nombre dexceptions :
- Le contrat peut prvoir que la seule chance du terme vaut mise en demeure de plein droit.
La loi interdit parfois ce genre de clause.
- La loi prvoit dans certains cas des mises en demeure automatiques dont certaines sont
importantes en pratique.
- Il ne faut pas non plus mettre en demeure lorsquil rsulte de lobjet ou de la nature de la
convention ou de circonstances particulires la cause que lexcution en nature est devenue
impossible ou ne prsente plus dutilit pour le crancier.
- Il y a lieu de mentionner limportante drogation introduite par larticle 5 de la loi du 2 aot
2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales.
Selon cette disposition, en cas de dfaut de paiement dans le dlai requis, le crancier a

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droit, compter du jour suivant, de plein droit et sans mise en demeure, au paiement
dintrt . Le champ dapplication de la loi est toutefois limit aux transactions
commerciales (art. 2) cest--dire aux transactions portant sur la fourniture de biens ou de
services entre des entreprises ou entre des entreprises et des pouvoirs adjudicateurs.

D. Effets
La mise en demeure est un pralable pour pouvoir recourir lexcution force en nature ou par
quivalent, lexceptio non adimpleti contractus ou la rsolution judiciaire du contrat.
Elle fixe aussi le point de dpart des intrts moratoires qui compensent le prjudice d au retard
dans lexcution (articles 1146 et 1153, al. 3 du Code civil). Les intrts moratoires sont les intrts
dus par le dbiteur la suite du retard apport au paiement dune somme dargent (articles 1153
1155 du Code civil). En principe, ils commencent courir la date de la mise en demeure, moins
que la partie nait convenu de les faire courir de plein droit dater de lchance de lobligation ou
moins que la loi ne les fasse courir de plein droit.
Enfin, la mise en demeure opre un transfert de la charge des risques sur le dbiteur de lobligation de
livrer un corps certain (articles 1138 al. 2 et 1302 du Code civil). Lorsque le dbiteur a t mis en
demeure de livrer la chose, la charge des risques est dplace et le dbiteur mis en demeure doit
rpondre des risques de perte ou de dtrioration de la chose. Cet effet repose sur une prsomption :
si le dbiteur avait livr la chose temps cette perte ou ces dtriorations ne se seraient pas
produites chez le crancier.
Le Code civil, en son article 1302 al. 2, dispose toutefois que le dbiteur peut renverser la
prsomption nonce ci-dessus. Il peut invoquer leffet libratoire de la cause trangre sil dmontre
que la chose aurait pri chez le crancier mme si elle avait t livre en temps utile.

2. Lastreinte
Lastreinte est une condamnation pcuniaire prononce par le juge charge du dbiteur en cas
dinexcution par celui-ci de la condamnation principale.
Lastreinte vise favoriser lexcution en nature de lobligation en faisant pression sur le dbiteur
rcalcitrant pour quil excute la dcision judiciaire le condamnant. Il ne sagit toutefois que dun
incitant lexcution et ne permet pas de contraindre physiquement un dbiteur rcalcitrant. Elle est
accessoire la condamnation principale. Elle doit tre demande au juge qui peut ou non laccorder et
qui en fixe souverainement le montant et les modalits.
Diffrents types dastreinte sont possibles. Certaines condamnations ne peuvent toutefois tre
assorties dastreinte, telles que les condamnations pcuniaires et celles tendant lexcution des
contrats de travail.

Section 3 : Une mesure de contrainte par substitution : le


remplacement
Lexcution force en nature dune obligation de faire ou de ne pas faire peut se heurter la mauvaise
volont ou lincapacit persistante du dbiteur de lobligation. Le principe est que lexcution force
en nature ne peut pas aboutir une contrainte physique sur la personne du dbiteur. Larticle 1144 du
Code Civil offre une issue au crancier : le remplacement.
Le remplacement est une forme dexcution force en nature qui consiste faire excuter par un tiers
lobligation en souffrance. Ceci suppose que lobligation du dbiteur ne lui est pas purement
personnelle. Le remplacement aboutit une excution en nature puisque le crancier obtient ainsi une
excution conforme son attente.
- Cette excution force de lobligation par un tiers est accorde en principe par jugement,
contre le gr du dbiteur. Cest le remplacement judiciaire dont les articles 1143 et 1144 du

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Code civil font application en matire dobligations contractuelles de faire et de ne pas faire.
Ce remplacement peut aussi aboutir lexcution force en nature des obligations de donner.
Le juge jouit-il dun pouvoir souverain dapprciation en la matire ou doit-il accder la
demande dautorisation ? La tendance rcente est de considrer que lautorisation de
remplacement constitue un droit pour le crancier et quelle nest pas dapplication facultative
pour le juge du fond. Encore faut-il que ce droit ne soit pas exerc de faon abusive par le
crancier insatisfait.
Le remplacement du dbiteur initial par un autre dbiteur implique-t-il la rsolution du contrat
initial ? Le remplacement judiciaire implique la survie du contrat initial alors que la rsolution
prvue larticle 1184 du Code civil vise rompre le lien contractuel.

Le principe de lautorisation judiciaire pralable souffre de plusieurs exceptions. Une dispense du


recours pralable justice est possible en matire de ventes commerciales de marchandises o le
remplacement unilatral est permis en vertu de lusage.
Il est aussi possible de prvoir par contrat que le crancier insatisfait peut remdier doffice la
carence du dbiteur, aux dpens de celui-ci. (Les articles 1143 et 1144 du Code civil ntant pas
impratifs, ni dordre public, les parties peuvent y droger librement et prvoir une clause de
remplacement ou dexcution doffice. Ceci permet au crancier de faire appel aux services dun tiers
de plein droit et de rclamer ensuite le paiement des frais de remplacement au dbiteur dfaillant).
En labsence de clause, la jurisprudence belge admet, lorsque les circonstances exigent une solution
rapide, que le crancier se remplace unilatralement aux dpens du dbiteur . Cette facult a
notamment t reconnue par la jurisprudence belge au maitre de louvrage ou lentrepreneur
principal en cas de dfaillance de son dbiteur. Les conditions de cette facult de remplacement
unilatral sont toutefois assez strictes :
- Il faut une situation durgence laquelle il importe de remdier au plus vite.
- Le crancier doit faire constater ltat des travaux do ressort un manquement du dbiteur qui
lui soit imputable
- Il doit le mettre en demeure en lui indiquant les dfaillances releves et en lui laissant un dlai
raisonnable pour y remdier. Il doit aussi lui indiquer son intention de procder au
remplacement sil ne remdie pas la dfaillance. Le crancier sexpose un contrle
judiciaire a posteriori si les droits de la dfense du dbiteur en dfaut ne sont pas respects.
- A lchance de la mise en demeure, le crancier doit se remplacer effectivement, sans dlais
et des conditions normales, dans le respect de la bonne foi.

Chapitre
2:
Lincidence
dun
changement
circonstances sur la force obligatoire du contrat

de

Il existe des situations o le rapport qui existait la conclusion du contrat entre les prestations des
parties est substantiellement altr en raison de la survenance dvnements techniques,
conomiques ou politiques imprvisibles la conclusion du contrat et indpendants de la volont des
parties.
La thorie de limprvision vise admettre la dissolution ou ladaptation du contrat quand il devient
tout fait dsquilibr suite des circonstances imprvisibles postrieurs la conclusion du contrat et
non imputables la partie qui sen prvaut.
Il y a lieu de ne pas confondre imprvision et lsion (qui concerne un dsquilibre affectant le contrat
ds sa formation). Limprvision ne doit pas non plus tre confondu avec la force majeure (qui
entrane pour le dbiteur une impossibilit dexcution) alors que limprvision entrane un
bouleversement de lconomie contractuelle, une aggravation substantielle des charges pour le
dbiteur.
La thorie de limprvision nest pas reue, comme telle en droit belge. La scurit juridique prvaut
sur les considrations dquit qui pourraient conduire le juge remodeler un peu facilement un
contrat que le dbiteur trouve dsquilibr suite aux circonstances. Admettre limprvision serait, au

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nom de lquit, compromettre la scurit que le droit a voulu assurer par le principe de la convention
loi . Des lois apportent cependant des correctifs dans des domaines particuliers.
Les concepts et principes gnraux du droit des obligations peuvent aussi tre sollicits, afin de porter
remdes aux situations les plus choquantes. Elargissement de la force majeure : la force majeure doit
tre apprcie de manire raisonnable, ce qui permet au juge de remdier aux cas dimprvision les
plus criants en largissant la force majeure des hypothses de difficults dans lexcution de
lobligation, au risque de dnaturer la notion de force majeure.
Labus de droit peut aussi faire obstacle lexcution dune convention dont lconomie a t
profondment bouleverse. Rappelons toutefois que labus doit tre caractris. Aucun de ces
remdes nest toutefois pleinement satisfaisant car ils ne permettent pas comme tels dimposer une
partie, favorise par le bouleversement de lconomie contractuelle, lobligation daccepter une
radaptation du contrat.
La convention, loi des parties, peut assouplir le droit commun. La pratique contractuelle,
particulirement dans les contrats internationaux de longue dure, a dvelopp des clauses dites de
hardship dimprvision ou de sauvegarde. Celles-ci prvoient la rvision ou la dissolution du contrat
lorsquun bouleversement des circonstances modifie profondment lquilibre initialement convenu
entre les parties. Dans le mme ordre dides, quand lobjet des prestations consiste dans le paiement
dune somme dargent, la pratique contractuelle, pour contrer le principe du nominalisme montaire
prvu larticle 1895 du Code civil, a mis au point des clauses de protection contre la dprciation
montaire.
La monnaie est une matire sensible laquelle les Etats sont attentifs. Il sagit notamment dviter la
dprciation de la monnaie en limitant la possibilit de clauses conventionnelles dindexation. Le
lgislateur met parfois des limites aux clauses dindexation pour des raisons de politique montaire. Il
le fait aussi par souci de protection de la partie faible.

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Titre 3. Le contrat et les tiers


Chapitre 1 : La relativit des conventions
Section 1 : Porte du principe
Larticle 1165 du Code civil, dj annonc par larticle 1119, indique que Les conventions nont
deffet quentre les parties contractantes

1. Effets internes et effets externes


Les contrats crent une situation juridique, un fait qui peut affecter les tiers. La doctrine distingue les
effets internes du contrat, les droits et les obligations quil cre en faveur ou charge des parties (son
effet obligatoire) et les effets externes, la situation ne du contrat qui en principe simpose aux tiers
(son opposabilit). Celle-ci souligne quil y a un devoir de respect du lien contractuel qui simpose aux
tiers. Le principe de la relativit des conventions ne sapplique quaux effets internes. Historiquement,
cest un arrt de la Cour de cassation du 27 mai 1909 qui a tabli la distinction entre effets internes et
effets externes du contrat.
La distinction entre effets internes et effets externes, confirme par la jurisprudence ultrieure, nest
pas toujours facile tracer.
Il est en principe interdit un tiers de puiser des droits dans une convention laquelle il nest pas
partie, de mme quil est interdit aux parties dimposer un tiers lexcution dobligation rsultant de
leur convention. Cela tant, le contrat est un fait dont les tiers peuvent tirer ou doivent accepter
certaines consquences favorables ou dfavorables, comme lindique larrt prcit du 27 mai 1909.
- Les tiers peuvent se prvaloir du contrat vis--vis des parties pour en tirer des avantages
(opposabilit du contrat par les tiers aux parties).
- Lexistence dun contrat peut aussi jouer au dtriment des tiers. Ils doivent en reconnaitre les
effets. Le contrat est un tout quil faut prendre avec ses consquences favorables et
dfavorables.
- Le contrat limite la libert de contracter des parties avec des tiers qui ne peuvent pas
contribuer sciemment la violation du contrat sous peine dengager leur responsabilit
dlictuelle. Cest le problme de la tierce complicit.
Plus radicalement, les tiers peuvent contester lopposabilit du contrat conclu en fraude de leurs
droits, se prvaloir vis--vis des parties dune situation apparente lencontre dune situation cache
mais aussi dune situation cache non conforme la situation apparente.

2. Parties et tiers
A. Les parties
a. Vue densemble
Sont parties ceux qui ont contract, cest dire ceux qui ont particip la conclusion de lacte et y ont
donn leur consentement. Un mandataire nest pas partie lacte, il est reprsentant.
Certaines personnes, qui nont pas particip la conclusion de lacte, sont parties ou le deviennent.
Sont ainsi considres comme parties contractantes :
- Les personnes reprsentes.
- Les ayants cause universels ou titre universel recueillant tout ou fraction du patrimoine de
leur auteur dcd.
- Les cessionnaires de contrat (ou de crance, voir tome 4).

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b. Personnes reprsentes
Des personnes reprsentes peuvent tre parties contractantes alors quelles nont pas particip la
conclusion du contrat :
- La reprsentation est en effet une technique par laquelle une personne, le reprsentant,
accomplit un acte juridique au nom et pour le compte dune autre de manire telle que les
effets de cet acte se produisent dans le chef du reprsent. Le reprsent est seul li par les
actes accomplis par son reprsentant pour autant que celui-ci agisse dans les limites de son
pouvoir et ait une volont saine.
- La reprsentation suppose lexistence dun pouvoir dans le chef du reprsentant, cest--dire
dune aptitude engager autrui. Ltendue des pouvoirs dpend de la source de la
reprsentation (lgale, conventionnelle ou judiciaire).
- Il existe diffrents types de reprsentations.
o La reprsentation est parfaite : quand lacte accompli par le reprsentant au nom et
pour le compte du reprsent lie immdiatement ce dernier qui est alors partie au
contrat.
o La reprsentation est imparfaite : lorsque leffet de substitution ne se produit pas
immdiatement mais se produit ultrieurement la conclusion de la convention. Le
reprsentant est personnellement li envers le tiers contractant et lui incombe de
transfrer la personne quil reprsente les charges et les avantages de lopration.
- La reprsentation ne produit en principe ses effets que dans la mesure o me reprsentant
na pas excd ses pouvoirs. La jurisprudence notamment par le biais du mandat apparent, et
la loi temprent parfois la rigueur de ce principe pour des raisons de protection des tiers. Le
mandat apparent a pour effet de confrer la qualit de partie contractant un pseudomandant qui na pas, en ralit, entendu donner son consentement lacte conclu par celui
que le tiers contractant a pu lgitimement considrer comme mandataire.

c. Personnes assimiles aux parties contractantes : ayants cause universels


et titre universel
Selon larticle 1122 du Code civil, on est cens avoir stipul pour soi et pour ses hritiers et ayants
cause . Seuls les ayants cause universels ou titre universel sont viss par cette disposition et non
les ayants cause titre particulier.
Layant cause universel est : celui qui recueille lintgralit du patrimoine de son auteur tandis que
layant cause titre universel recueille une fraction du patrimoine de son auteur. Layant cause titre
particulier : recueille, quant lui, non un ensemble ou une fraction dun ensemble mais un droit
dtermin.
La transmission universelle ou titre universel dun patrimoine se produit lors du dcs du titulaire
dun patrimoine.
Le principe prvu par larticle 1122 du Code civil est que les ayants cause universels ou titre
universel succdent aux droits et obligations de leur auteur dans le contrat, lors de la transmission du
patrimoine. Toutefois, il existe des exceptions ce principe :
- Larticle 1122 C.C. ne sapplique pas si le contraire est prvu par les parties ou rsulte du
caractre intuitu personae de la convention.
- Il ne sapplique pas non plus si les hritiers renoncent la succession ou ne lacceptent que
sous bnfice dinventaire.
- Diverses dispositions lgales prvoient aussi la fin du contrat en cas de dcs dune partie.

B. Les tiers
La notion de tiers est quelque peu tautologique (proposition dont la conclusion nonce une vrit dj
contenue dans le point de dpart) : sont tiers ceux qui ne sont pas parties ou ne le sont pas devenus
en reprenant les droits et obligations de lune delles.

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La notion de tiers est relative et volutive. Elle est aussi polysmique. Il y a une graduation dans la
notion de tiers en fonction de lintensit des relations que les tiers entretiennent avec une des parties :
- Il y a des tiers parfaitement trangers au contrat ou aux contractants.
- Dautres tiers sont plus proches dune partie contractante parce que dune faon ou dune
autre, ils subissent certaines consquences dune opration juridique de leur dbiteur.
- Sont aussi des tiers les agents dexcution (un agent dexcution est une personne qui un
contractant confie tout ou partie des obligations contractuelles quil assume lgard de son
propre crancier). Les prposs et les sous-traitants sont des catgories typiques dagents
dexcution.
o En droit belge, le statut dagent dexcution est assez ambigu : le prpos ou lagent
dexcution que le transporteur se substitue pour excuter tout ou une partie du
contrat de transport, nest pas un tiers au regard de lexcution du contrat et lgard
du cocontractant du transporteur. Dautre part, il est tiers par rapport la formation du
contrat principal conclu entre le crancier et le dbiteur. Cette ambigut a des
consquences. Puisque lagent dexcution nest pas un tiers, il sensuit, en principe,
une viction des rgles de la responsabilit dlictuelle dans les rapports entre le
crancier principal insatisfait et lagent dexcution dfaillant. Celui-ci bnficie en
jurisprudence belge dune quasi-immunit vis--vis du crancier principal.
Il importe de prciser ici le statut des ayants cause titre particulier qui ne sont pas viss par larticle
1122 du Code civil. Layant cause titre particulier est un tiers par rapport aux conventions conclues
par son auteur et nest donc en principe pas tenu des dettes ni bnficiaire des crances de son
auteur. Un acheteur par exemple nest en principe as tenu dune dette que le vendeur dun immeuble
a contracte pour des travaux antrieurs la vente.
Les choses sont complexes. Il y a lieu doprer des distinctions. Les droits rels portant sur le bien
sont transfrs avec le bien auquel ils sappliquent et simposent layant cause titre particulier,
pour autant que le formalisme dopposabilit ait t suivi. Les droits de crance et obligations ne lui
sont en principe pas transmis. En principe, layant cause titre particulier nest pas tenu des dettes de
son auteur. Il y a peu de drogations ce principe.
En revanche, dans certains hypothses, la loi ou la jurisprudence permettent layant cause titre
particulier de se prvaloir des droits de son auteur notamment des garanties dont celui-ci bnficie
contre son cocontractant :
- En matire de vente, la jurisprudence admet, en sappuyant sur larticle 1615 du Code civil,
que le sous-acqureur dun bien ayant fait lobjet de ventes successives puisse agir contre le
vendeur initial en garantie des vices cachs. Le vendeur peut toutefois opposer au sousacqureur les exceptions quil peut opposer son acheteur direct.
- En matire dassurances terrestres , larticle 57 de la loi du 25 juin 1992 prvoit que
lassurance dun bien alin entre vifs continue de bnficier au cessionnaire pendant trois
mois aprs la date de passation de lacte authentique, sauf si ce dernier bnficie dune
garantie rsultant dun autre contrat.
La thorie des groupes de contrats, dveloppe surtout en doctrine franaise, oblige repenser ou
nuancer les notions corrlatives de parties et de tiers. La notion de groupe de contrats vise un
ensemble de contrats distincts mais lis parce quil portent sur un mme bien ou quil participent une
opration conomique unitaire. La consquence de cette thorie est dtendre la sphre contractuelle
au-del des parties originaires certains cocontractants de lune des parties qui doivent normalement
tre considrs comme tiers au regard de larticle 1165 du Code civil. Un des enjeux de la question
est celui de la reconnaissance dune action contractuelle entre les parties extrmes de la chaine des
contrats, ce qui permet dviter lintrusion de la responsabilit dlictuelle.
Le droit civil classique reconnat dj linterdpendance de certains contrats dont lun est principal et
lautre accessoire. Le droit positif rcent, sil ne consacre pas la thorie des groupes de contrats de
faon gnrale, tire cependant des consquences juridiques des liens qui peuvent exister entre des
contrats unissant des personnes diffrentes.

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Section 2 : Exceptions au principe de la relativit des conventions


1. La stipulation pour autrui
A. Notion
La stipulation pour autrui est une exception la relativit des conventions nonce larticle 1165 du
Code civil. Vise larticle 1121 du Code civil, il sagit dune opration par laquelle une personne
(stipulant) demande une autre (promettant), qui accepte, de prendre un engagement envers une
troisime (tiers bnficiaire). Cette dernire devient crancier du promettant en vertu dun contrat
auquel elle na pas particip. Cest le bnfice dun contrat que le tiers recueille et non les charges.

B. Conditions
Il faut un contrat valable entre stipulant et promettant par lequel le premier manifeste une volont
certaine de faire naitre un droit propre au profit dun tiers. Les conditions de fond de validit des
conventions doivent tre remplies. Lobjet et la cause de la stipulation doivent tre licites.
La stipulation doit tre faite au profit dun tiers. Celui-ci doit tre capable lors de lacceptation. Il ne doit
pas tre nommment dsign mais il doit tre dterminable au moment o la stipulation doit tre
excute. Il nest pas requis que le bnficiaire accepte la stipulation pour que le droit naisse son
profit mais son acceptation rend le droit irrvocable (Art. 1121 Code civil).
Selon larticle 1121, la stipulation au profit dun tiers doit tre la condition dune stipulation que lon
fait pour soi-mme ou dune donation que lon fait un autre . Lintervention du stipulant ne pourrait,
si lon suit cette disposition, se limiter faire promettre une prestation au profit dun tiers.

C. Effets
Leffet principal de la stipulation pour autrui est douvrir une action du tiers bnficiaire contre le
promettant vis--vis duquel il va pouvoir faire valoir des droits . Le tiers ne se voit en principe pas
imposer dobligation. Trois rapports sont analyser :
- Entre promettant et stipulant, la stipulation pour autrui est un engagement contractuel soumis
aux principes de lexcution en nature et de la responsabilit contractuelle.
- Les rapports du promettant et du tiers bnficiaire sont au cur de la stipulation pour autrui.
Le droit du tiers bnficiaire contre le promettant appartient la dfinition de la stipulation
pour autrui. Le tiers tire le droit dexiger une prestation du promettant dune convention
laquelle il nest pas partie. Le droit du bnficiaire prsente plusieurs caractristiques :
o Il sagit dun droit direct (ou propre). Le bnfice de la crance revient au tiers
bnficiaire dont le droit est propre. La prestation due par le promettant ne transite
donc pas par le patrimoine du stipulant et nimplique pas lintervention de celui-ci. En
cas dinexcution de sa prestation par le promettant, le tiers dispose contre celui-ci
dune action propre en excution force ou en dommages-intrts. En revanche, il ne
dispose pas dune action en nullit ou en rsolution qui appartiennent au stipulant.
o Il sagit aussi dun droit satellite ou dpendant du lien contractuel originaire entre
stipulant et promettant. Ce dernier pourra donc opposer au tiers bnficiaire les
exceptions lies la nullit du contrat principal ou linexcution par le stipulant de
ses obligations.
o Il sagit dun droit qui prend naissance au moment mme de la stipulation.
Lacceptation du tiers a pour seul effet de rendre la stipulation irrvocable par le
stipulant.
o Il sagit dun droit personnel qui ne peut tre exerc par les cranciers par la voie de
laction oblique prvue larticle 1166 du Code civil.
-

Il nexiste pas de lien de droit entre le stipulant et le tiers bnficiaire La stipulation pour autrui
ne donne pas de droit au stipulant contre le tiers bnficiaire ni au tiers bnficiaire contre le

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stipulant. Le stipulant peut rvoquer la stipulation pour autrui tant que le tiers ne la pas
accepte. Lacceptation du tiers bnficiaire met fin la facult de rvocation du stipulant. Elle
nest pas soumise des exigences de forme (des lois particulires peuvent toutefois prvoir
des formes spcifiques). Lacceptation du tiers bnficiaire ne peut naturellement intervenir
que si le tiers est au courant de la stipulation.

2. Les actions directes


A. Notion
La thorie de laction directe a t construite autour de trois dispositions du Code civil, les articles
1753 (bail), 1798 (entreprise) et 1994, alina 2 (mandat). En dehors du Code civil, le mcanisme est
utilis par le lgislateur notamment en matire dassurance.
Laction directe est un mcanisme lgal en vertu duquel une personne peut se prvaloir dun contrat,
conclu par son dbiteur, auquel elle nest pas partie et exercer un droit propre et personnel contre le
dbiteur de son dbiteur. Laction directe met en prsence un crancier direct (titulaire de laction
directe), un dbiteur immdiat et un sous-dbiteur. Ainsi dans larticle 1798 du Code civil qui instaure
une action directe au profit du sous-traitant, le sous-traitant est titulaire de laction directe,
lentrepreneur, dbiteur immdiat ou intermdiaire et le maitre de louvrage, sous-dbiteur et
dfendeur laction directe.
Laction directe prsente des caractristiques originales :
- Elle confre son titulaire un droit propre.
- Elle diffre de laction oblique ou subrogatoire o le crancier nexerce pas un droit propre
mais se substitue son dbiteur ngligeant dexercer ses prrogatives.
- Elle diffre aussi de la stipulation pour autrui qui est conventionnelle (le bnficiaire dune
action directe jouit dune situation plus avantageuse que celui dune stipulation pour autrui).
- En principe, pas daction directe sans texte.
Laction directe prsente pour son titulaire pas mal davantages :
- Elle simplifie le recours puisquelle le met en relation avec le sous-dbiteur sans passer par le
dbiteur intermdiaire.
- Elle permet au titulaire dintenter son recours directement contre le dbiteur du dbiteur et
dviter deux recours successifs.
- Elle permet aussi son titulaire dviter le concours avec les cranciers du dbiteur immdiat
de lobligation. Le crancier direct est investi dun droit propre, dune exclusivit portant sur ce
que lon appelle parfois la crance objet , cest dire la crance que le dbiteur
intermdiaire dtient contre le sous-dbiteur (effet de privilge).

B. Conditions
Un certain nombre de conditions sont requises pour quune action directe puisse tre intente :
- Il y a les conditions de fond.
o Une premire condition est que le titulaire de laction directe ait une crance valable et
exigible contre le dbiteur intermdiaire. Cette crance peut tre soit de nature
contractuelle, comme celle du sous-traitant contre lentrepreneur principal soit de
nature dlictuelle comme la crance en responsabilit de la victime contre lassur
dans les assurances de responsabilit civile. Si cette crance nexiste pas ou si elle
est prescrite, il ne peut y avoir daction directe.
o Une deuxime condition de fond est quil existe une crance
du dbiteur
intermdiaire contre le dfendeur laction directe. Le sous-dbiteur nest tenu envers
le titulaire de laction directe que parce quil est dbiteur du dbiteur intermdiaire et
dans la mesure de sa dette envers celui-ci.
- Il y a les conditions de forme ou de procdure.
o En ce qui concerne la procdure, il ne semble pas requis que le titulaire de laction
directe mette son propre dbiteur en demeure pralablement son action contre le

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sous-dbiteur. Laction directe suppose toutefois une manifestation de la volont de


son bnficiaire pour prendre effet vis--vis du sous-dbiteur. Une notification
adresse par lettre suffit.

C. Rgime
Les effets juridiques de laction directe sont complexes, faute notamment dun rgime gnral
applicable toutes les actions directes :
- Un premier effet est commun toutes les actions directes : le titulaire de celle-ci dispose de
deux recours, lun contre son dbiteur (immdiat), lautre contre le sous-dbiteur. Les deux
dbiteurs (maitre de louvrage et entrepreneur / assureur et responsable de laccident) sont
tenus in solidum.
- Laction directe a aussi un effet conservatoire : la crance du dbiteur intermdiaire est
bloque dans le patrimoine de celui-ci.
- Leffet le plus spectaculaire de laction directe est leffet dit privilge. Le titulaire de laction
directe peut rclamer directement le paiement de sa crance au sous-dbiteur sans que le
produit de cette action transite par le patrimoine du dbiteur intermdiaire. Ceci permet donc
au titulaire de laction directe dchapper la loi du concours avec les autres cranciers du
dbiteur intermdiaire.
En ce qui concerne lopposabilit des exceptions par le dfendeur laction directe, , en principe, le
dfendeur laction directe peut opposer au demandeur toutes les exception qui auraient pu tre
opposes au demande par le dbiteur intermdiaire et toutes les exceptions quil aurait pu, lui
dfendeur, opposer au dbiteur intermdiaire. Il peut donc opposer les exceptions lies aux deux
crances qui justifient laction directe.
Les exceptions du dfendeur laction directe doivent tre antrieures lintentement de laction. Les
exceptions lies la crance du dbiteur intermdiaire doivent, pour tre opposables au titulaire de
laction directe, tre nes avant lexercice de laction directe.

D. Dispositions lgales
a. Actions directes du Code Civil
Le Code civil comporte quelques exemples daction directe :
- Larticle 1798 du Code civil en matire dentreprise.
- Larticle 1994, alina 2 en matire de mandat que la jurisprudence applique en matire de
virements bancaires ou en matire judiciaire.
- Larticle 1753 du Code civil protgeant les droits du bailleur vis--vis du sous-locataire.

b. Actions directes prvues par des textes particuliers


De nombreuses actions directes sont prvues par des textes particuliers, notamment par la lgislation
sur les assurances. Par exemple :
- Larticle 68 de la loi du 25 juin 1992.
- Larticle 86 de la loi du 25 juin 1992.
- La loi sur les accidents du travail qui confre aux victimes un droit propre contre lassureur
accidents du travail.
On assiste dans la loi du 25 juin 1992 sur les assurances terrestres une gnralisation de laction
directe contre les assureurs de responsabilit. Le titulaire de laction directe bnficie dun droit propre
contre lassureur (cf. articles 68 et 86 de la loi). Cette multiplication des actions directes saccompagne
dune certaine inopposabilit des exceptions (article 87). Un compromis doit tre trouv entre la
protection de la personne lse et le souci des assureurs de ne pas indemniser les victimes de
dommages causs par une personne manifestement non assure. Cet article 87 fait une distinction
entre les assurances obligatoires de la responsabilit civile et les assurances facultatives. Pour les
premires, le lgislateur, dans cette disposition spciale, donne un statut avantageux au bnficiaire
de laction directe.

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Section 3 : La promesse de porte-fort


Selon larticle 1119 du Code civil : On ne peut, en gnral, sengager, ni stipuler en son propre nom,
que pour soi-mme. Mais larticle 1120 du Code civil dispose que nanmoins, on peut se porter fort
pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci ; sauf lindemnit contre celui qui sest port fort ou qui a
promis de faire ratifier si le tiers refuse de tenir lengagement.
La convention de porte-fort : est une convention par laquelle une personne (porte-fort) s'engage vis-vis de son cocontractant obtenir le fait d'un tiers (acte juridique, prestation, ratification acte,..).Le
porte-fort promet son fait personnel ; le plus souvent, il promet dobtenir le consentement dautrui (il
faut que ni lordre public ni les rgles impratives ne soient transgresses).On peut envisager
diffrentes hypothses :
- La promesse peut porter sur lengagement futur dun tiers. Je me porte pour que x nous
vendra sa voiture pour 50 000 euros.
- Elle peut aussi porter sur le fait que le tiers ratifiera un acte dj accompli sans pouvoir par le
porte-fort. Celui-ci accomplit lacte au nom du tiers sans mandat valable et promet que le tiers
ratifiera son engagement.
La promesse de porte-fort a un beau domaine dapplication en matire de vente dimmeubles, par
exemple quand une personne copropritaire, qui souhaite vendre, se porte-fort, vis--vis de lacheteur
du consentement des autres propritaires. Le porte-fort se retrouve aussi en droit des socits, pour
les engagements pris au nom dune socit en formation.
La ratification ou, de faon plus gnrale, Le fait du tiers est le pivot du mcanisme. La ratification est
un acte juridique unilatral par lequel le tiers va consentir lacte accompli en son nom et pour son
compte. Il faut distinguer plusieurs priodes et hypothses en fonction du comportement du tiers :
- Avant la ratification ou laccomplissement par le tiers du fait promis, le porte-fort est tenu dune
obligation de faire, qui, en cas dinexcution, se rsoudra en dommages et intrts. Le tiers
nest pas engag, seul le porte-fort lest personnellement.
- Si le tiers ratifie ou accomplit le fait promis, plusieurs effets se produisent :
o Le promettant est libr de sa responsabilit vis--vis du bnficiaire de la promesse.
Il disparat du rapport juridique.
o La ratification opre avec effet rtroactif ; le tiers devient partie compter du jour de la
conclusion de la convention de portefort. La convention se noue entre le contractant
du portefort et le tiers ratifiant.
- Si le tiers ne ratifie pas ou naccomplit pas le fait promis, cest le promettant qui engage sa
responsabilit contractuelle et non le tiers.
La promesse de porte-fort nest pas une drogation au principe de la relativit des conventions. Le
porte-fort est tenu des dommages et intrts en cas de refus du tiers de sengager ou de ratifier ; en
effet, la promesse de porte-fort, ne fait pas naitre dobligation charge dun tiers au profit du
cocontractant. Le promettant contracte une obligation de faire dont lobjet est dobtenir un certain
fait du tiers, cest donc une obligation personnelle du promettant qui sengage en son nom.

Section 4 : La cration dobligations charge dun tiers est-elle


possible ?
Il nest en principe pas possible de crer, par contrat, des obligations charge dun tiers. La loi fait
parfois exception ce principe. Ainsi, larticle 1743 du Code civil impose lacqureur dun immeuble
lou de respecter un bail authentique ou dont la date est certaine. Il sagit dune exception au principe
de la relativit des effets internes du contrat.
Ladhsion du tiers un contrat antrieurement conclu aboutit le soumettre aux droits et obligations
que ce contrat prvoit. Il ny a pas de drogation la relativit des conventions.

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Chapitre 2 : Lopposabilit des effets externes de la


convention
Section 1 : Gnralits
On a vu que larticle 1165 C.C. vise les effets internes des contrats, cest--dire les obligations et les
droits quil fait naitre au bnfice ou charge des parties. Le contrat a aussi des effets externes ; il est
opposable aux tiers. Les tiers ont alors un devoir de respect de ce qui a t conclu, ce qui nexclut pas
quils puissent tirer les consquences juridiques favorables du contrat en tant que fait.
Lopposabilit nest pas lie, en principe, une connaissance pralable que les tiers ont ou devraient
avoir du contrat. Dans certains cas, toutefois, lopposabilit aux tiers est conditionn par la
connaissance que le tiers a ou devrait avoir du contra ou encore par le respect de certaines formalits
lgales de publicit.

Section 2 : Porte du principe


1. La tierce complicit, conscration de lopposabilit des effets externes
La tierce complicit : applique le principe selon lequel le contrat, sans lier les tiers, est un fait qui
modifie lordre juridique et doit tre respect par les tiers. Le contrat est opposable aux tiers donc
ceux-ci peuvent engager leur responsabilit dlictuelle (1382-1383 du Code Civil) sils participent
inexcution fautive du contrat.
La doctrine et la jurisprudence ont t divises quand il a fallu prciser en quoi consiste la faute du
tiers complice :
- La Cour de cassation, dans un arrt du 22 avril 1983, parait considrer que la faute aquilienne
du tiers peut se dduire de la connaissance quil avait ou devait avoir de la situation existante
et du concours quil a nanmoins apport la rupture du contrat. Lintention de nuire nest
donc pas requise. Cet arrt a t interprt comme une conscration de la thorie dite de la
fraude simple.
- Certains auteurs fondent la responsabilit du tiers complice sur labus de droit (ce qui nous
parat discutable). Il sagit plutt dun conflit entre un droit de crance contractuel dot
dopposabilit et une libert : celle de contracter.

2. Laction paulienne et laction en dclaration de simulation, exceptions


lopposabilit des effets externes
Selon larticle 1167 C.C., les cranciers peuvent en leur nom personnel attaquer les actes faits par
leur dbiteur en fraude de leurs droits . Fraus omnia corrumpit. Lopposabilit du contrat cde devant
la fraude du dbiteur qui tente de soustraire ses biens ses cranciers en les dilapidant ou en les
rendant indisponibles. La sanction originale : le crancier peut obtenir linopposabilit des actes
accomplis par le dbiteur en fraude de ses droits. Les conditions sont nombreuses et strictes, ce qui
explique que laction paulienne soit rare en pratique (voir tome 4).
La simulation est une discordance voulue par les parties entre une convention apparente (acte
apparent) et une convention relle qui reste cache (lacte secret, dissimul). Ce que larticle 1321 du
Code Civil appelle contre lettre ; elle vient dtruire totalement ou partiellement les effets de la
convention ostensible. Larticle 1321 du Code civil, peut-tre excessivement tolrant, nannule pas
systmatiquement lacte secret. Il se contente dindiquer que les contres lettes nont deffet quentre
les parties contractantes ; elles nont point deffet contre les tiers .

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Titre 4. Linexcution du contrat


Une convention valablement forme fait la loi des parties et donne naissance des obligations qui
doivent tre excutes de bonne foi (article 1134, al. 3 du Code civil), le cas chant, en tenant
compte de toutes les suites que lusage, lquit ou la loi donne lobligation daprs sa nature (article
1135 du Code civil). Gnralement, les parties contractantes sacquittent de leurs obligations de
manire ponctuelle et satisfaisante.
Mais il existe des incidents qui perturbent lexcution dune convention, qui se rvle pathologique. Au
sens large, linexcution contractuelle couvre divers cas de figure :
- Inexcution totale : lacheteur refuse de payer le prix des marchandises lui ayant t livres.
- Inexcution partielle : seules certaines marchandises sont livrer un entrepreneur en
construction.
- Excution dfectueuse : les travaux ont t effectus, mais ils comportent des malfaons.
- Retard dans lexcution : le locataire paie son loyer, mais en retard.
Dans un premier temps, les parties chercheront normalement rgler leur diffrend de manire
amiable, en rappelant le partenaire dfaillant ses obligations par une mise en demeure. Si elles ne
parviennent pas sentendre, la partie lse peut :
- Soit renoncer ses prtentions.
- Soit tenter de faire valoir ses droits devant tribunal (plus souvent) : rclamer excution en
nature de lobligation (si possible : application des articles 1143 et 1144 du Code civil) ou
rparation du dommage que lui a caus linexcution du contrat en cause (domaine de la
responsabilit contractuelle).
Sil sagit dun contrat synallagmatique, des rgles particulires lies la connexit des obligations
rciproquent sappliquent en cas dinexcution.
- Si linexcution de lobligation nest pas imputable au dbiteur, sa responsabilit contractuelle
nest pas engage et le sort des prestations est rgl par la thorie des risques.
- Si linexcution de lobligation est imputable au dbiteur : deux mcanismes peuvent
sanctionner son manquement : exception d'inexcution et rsolution pour inexcution fautive.
La gamme de sanctions de linexcution des obligations contractuelles est tendue. Les sanctions
explicitement prvues par loi varient en fonction du type de contrat : unilatral ou synallagmatique :
- Elles doivent tre tudies en tenant compte des remdes jurisprudentiels qui ,dans certains
cas, font droit un certain unilatralisme.
- Il faut prendre en considration les clauses labores par les parties (clauses exonratoire ou
limitative de responsabilit, clause rsolutoire expresse, clauses dimprvision, clauses
pnales, etc.).
De faon gnrale, il faut voir si le dbiteur a commis un manquement par rapport au contrat qui peut
lui tre imput. Et cest a qui nous intresse dans ce Titre 4.

Chapitre 1 : Limpossibilit dexcution. Incidence dune


cause trangre exonratoire
Les articles 1147 et 1148 du Code civil prvoient des hypothses o le dbiteur qui neffectue pas les
prestations prvues peut tre libr, cest dire quil est dispens de la prestation qui fait lobjet du
contrat mais quil est aussi dispens de verser des dommages et intrts titre compensatoire ou
moratoire (art. 1148 C.C.).

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Section 1 : Notion et conditions


Larticle 1147 et 1148 C.C. semble distinguer la force majeure et le cas fortuit, mais il ny a pas
d'intrt la distinction.
La force majeure est une varit de cause trangre exonratoire pour le dbiteur comme peuvent
ltre le fait du crancier ou le fait dun tiers pourvu quils rpondent aux conditions requises.
Selon la Cour de Cass : la force majeure qui libre le dbiteur de lobligation de payer des dommages
et intrts, suppose vnement crant un obstacle insurmontable lexcution par celui-ci de ses
obligations et non imputable (quant sa cause) une faute quelconque du dbiteur. Lvnement
doit, de plus, tre imprvisible ! Il faut que soient alors remplies certaines caractristiques strictes :
- Lobstacle lexcution doit tre insurmontable
o Limpossibilit doit en principe tre absolue ; il nest pas question dinvoquer une
grande difficult dexcution, ce qui sera, le cas chant, qualifiable dimprvision.
o Sagissant dune O de donner une chose de genre, il ne peut y avoir impossibilit
dexcution ; une chose de mme qualit et de mme quantit pouvant toujours tre
trouve par le dbiteur.
- Lvnement faisant obstacle lexcution doit en principe tre imprvisible
o Limprvisibilit doit sapprcier au moment de lengagement ; lapprciation sera, ici
aussi, raisonnable car, la limite, tout est prvisible !
- La cause trangre ne peut tre imputable (mme partiellement) un fait fautif du dbiteur :
o La maladie nexonre pas lorsquelle est due un surmenage, le vol non plus lorsquil
se produit suite linsuffisance de prcaution, cela sidentifie labsence de faute !
Le fait du crancier et le fait d'un tiers (pas lagent d'excution ! Un tiers totalement tranger !) peuvent
aussi exonrer le dbiteur. Cela tant, le dbiteur principal peut invoquer une cause trangre
exonratoire empchant lagent d'excution de satisfaire lO en cause.
La notion dagent dexcution pose parfois des difficults. Sont agents dexcution : les auxiliaires
(prpos ou salari), les substituts, lorgane. Le mandataire ne lest pas.

Section 2 : Effets
1. Libration du dbiteur et dissolution du contrat
Le Code civil nest pas trs bavard sur les effets de la force majeure. Plusieurs questions doivent tre
distingues. La force majeure a tout dabord un effet libratoire pour le dbiteur.
Il est libr de lexcution de sa prestation et de lobligation de restituer la chose qui fait lobjet du
contrat (sauf sil sagit dune chose de genre). Dautre part, sa responsabilit contractuelle nest pas
engage (Article 1147 et 1148 du Code civil).
Quen est-il du contrat, en cas dobstacle lexcution de celui-ci ?
- Si obstacle temporaire : lobligation n'est que suspendue, condition que lexcution garde
son utilit.
- Si obstacle partiel : le dbiteur ne sera libr que si lexcution partielle nest pas concevable
(1722 CC) ; dans le cas contraire, le dbiteur devra sexcuter dans la mesure du possible
(1245 CC).
- Si obstacle dfinitif, le contrat dissous ex nunc, sans rtroactivit (>< rsolution, qui a effet
rtroactif). Souvent, Ct internationaux prcisent les effets de la force majeure sur les O des
parties et la procdure suivre.
Il est toujours possible que les parties rglent les conditions et les effets dune cause trangre
exonratoire.

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2. Contrats synallagmatiques : la thorie des risques


La question de la rpartition des pertes entre les parties se pose :
- La locataire doit-il payer les loyers de la chose dtruite ?
- Lemployeur les salaires du salari malade ? Le Code ne donne pas de rponse.
Dans le contrat synallagmatique, linexcution de ses obligations contractuelles par la partie
empche va justifier linexcution des obligations corrlatives par le partenaire contractuel. Cest
donc la partie dbitrice de l'obligation (devenue impossible excuter) qui subit le poids des risques,
car elle ne peut plus exiger de son cocontractant lexcution de son obligation, alors mme que celleci serait encore possible.
Arrt de principe du 27/06/1946 ; la Cour de cassation consacre la thorie des risques :
Dans les contrats synallagmatiques, lextinction par la force majeure des obligations dune partie
entrane lextinction des obligations corrlatives de lautre partie et justifie la dissolution du contrat.
La jurisprudence a gnralis les solutions prvues aux articles 1722 et 1788 du Code civil en posant
la rgle res perit debitori ou la chose prit charge du dbiteur . Le dbiteur libr (exemple : le
bailleur) ne peut plus rclamer la contrepartie prvue malgr les frais ventuellement consentis pour
sa propre prestation. Lapplication de ces principes nest pas toujours aise. En matire de contrats de
travail, elle suscite des controverses quand le travailleur est frapp dincapacit permanente. En
matire de contrats de construction immobilire, elle peut se heurter la rgle res perit domino.
Prcisment, dans les contrats translatifs de proprit prvaut la rgle res perit domino = la chose
prit charge de son propritaire. Selon larticle 1138 du Code civil : la proprit dune chose certaine
est transfre lacheteur ds lchange des consentements, bien que celui-ci nest pas reu
livraison. Le transfert de proprit entrainant la charge des risques (selon larticle 1138 al.2 du Code
civil), lacheteur propritaire, mais crancier de la livraison, reste tenu de payer le prix au vendeur
alors que celui-ci na pourtant rien livre. Ce rgime concerne seulement la livraison corps certain et
non une chose de genre.
Solution : si le dbiteur est mis en demeure, il supporte la charge des risques (Article 1302 du Code
civil). Le rgime lgal, assez inadquat en pratique, est tempr par des clauses qui font concider le
transfert des risques avec la livraison de la chose ou des clauses retardant le transfert des risques et
de la proprit. Des usages internationaux existent galement en ce sens.

Section 3 : Preuve
La charge de la preuve de la cause trangre incombe au dbiteur qui l'invoque (1302 al.3 et 1147
CC). Le dbiteur dune O de rsultat doit en principe prouver positivement la cause trangre, sans
pouvoir se limiter prouver labsence de faute. Toutefois, la jurisprudence est tolrante. (Exemple en
matire de louage, 1732 CC : le locataire rpond des dgradations qui arrivent pendant sa jouissance
moins quil ne prouve quelles ont eu lieu sans sa faute).

Chapitre 2 : Dfaillance contractuelle


Section 1 : La suspension du contrat en vertu de lexception
dinexcution
1. Notion
Lexception dinexcution est une institution propre aux contrats synallagmatiques. Elle permet au
crancier dune obligation inexcute de refuser lexcution de ses propres obligations tant que lautre
partie reste en dfaut dexcuter les siennes.

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L exceptio non adimpleti contractus est dabord une stratgie dfensive, un moyen de pression.
Elle cre une situation provisoire, une suspension dans lexcution du contrat. Cette suspension est
appele se dnouer soit par une reprise de lexcution, soit par une action judiciaire en excution
force ou en rsolution si lexception dinexcution na pas produit ses effets.

2. Conditions
Un rapport de connexit, dinterdpendance forte doit exister entre les obligations rciproques
incombant aux parties contractantes. La connexit est une notion complexe. Il peut y avoir une
connexit objective comme cest le cas pour le contrat de bail o les obligations du bailleur et du
locataire se rpondent lune lautre. Il peut aussi y avoir connexit conventionnelle, dfinie par les
parties pour viter la contestation.
Lexception dinexcution trouve son fondement dans linterdpendance des obligations rciproques
caractrisant les contrats synallagmatiques : elle est inhrente aux contrats synallagmatiques, et peut
donc mme tre oppose par le cd au cessionnaire de la crance, mme si le manquement du
cdant est postrieur laccomplissement des formalits dopposabilit.
La crance dont se prvaut lexcipiens doit tre certaine et exigible, ce qui nest pas le cas si le
cocontractant bnficie dun terme non chu. Elle ne doit pas forcment tre liquide. Lexception ne
peut tre invoque que si dfaillance cocontractant est consomme (elle ne peut donc pas tre
invoque anticipativement). Il existe toutefois des exceptions prvues dans le Code civil. La
dfaillance du dbiteur doit lui tre imputable. Lexception ne peut tre invoque si le dbiteur
bnficie dune cause trangre exonratoire. Dans ce cas, cest la thorie des risques qui doit
sappliquer.
Lexception doit tre invoque dans le respect du principe de bonne fois et ne peut tre exerce de
manire abusive. Il doit exister une proportionnalit entre le manquement dnonc et le dommage
caus au cocontractant dfaillant par la suspension du contrat : des manquements mineurs ne
peuvent justifier la suspension de lensemble des obligations contractuelles. Lexception doit tre
refuse celui qui est de mauvaise foi. Cela vaut galement pour celui qui, par son fait, a provoqu
linexcution du cocontractant dont il entend se prvaloir. Celui qui invoque lexception abusivement
doit rparer le prjudice matriel ou moral subi par le cocontractant.
Lapprciation des tribunaux est plus rigoureuse quand lexception dinexcution aboutit privation
services de premire ncessit (eau, gaz, etc.). La dignit humaine (article 23 de la Constitution) peut
constituer une limite lapplication de lexception.

3. Effets
Entre parties, les effets de lexception sont provisoires et suspensifs. Le jeu de lexception ne peut
aboutir causer un dommage dfinitif lautre partie. De facto, la suspension de lexcution de
certaines obligations a des effets dfinitifs. Des loyers impays le resteront mme si le contrat reprend
par la suite. Cest pour ce motif quon a parfois rapproch lexception dune rsolution partielle.
Le contrat nest toutefois pas rsolu. Le crancier excipiens garde ses recours si le dbiteur sobstine
ne pas sexcuter ; il pourra demander par la suite lexcution force ou la rsolution du contrat.
En cas de faillite, lexception est opposable au curateur de la partie dfaillante, ce qui permet au
cocontractant du failli de jouir dune situation de faveur par rapport aux autres cranciers du failli. La
fonction de garantie de lexceptio non adimpleti contractus acquiert le caractre dun moyen de
dfense permanent qui fait chapper son titulaire la loi du concours.
Le droit de rtention qui permet au crancier de refuser la livraison dune chose appartenant au
dbiteur tant quil est impay est, pour une bonne part, une application de l'exception. Ainsi, un
garagiste retient la voiture tant que sa crance de prix reste impaye. Ce droit de rtention ne peut
tre exerc abusivement. Il y a une superposition des deux institutions mais le droit de rtention nest
pas limit aux contrats synallagmatiques. A linverse, lexception nest pas seulement limite aux
obligations de livrer.

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4. Charge de la preuve
La rpartition de la charge de la preuve entre lexcipiens et le dbiteur dfaillant reste dbattue. La
Cour de cassation considre que cest celui qui soulve lexception dinexcution quil incombe
dapporter la preuve du fait qui justifie cette exception. Lexcipiens doit prouver linexcution par lautre
partie de son obligation pour autant quelle soit exigible en premier lieu (il sagit dune application de
larticle 1315 al.2 CC : celui qui se prtend libr, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit
lextinction de son obligation ).
Certains auteurs se sont toutefois demands si la preuve ne devait pas incomber au demandeur
laction, qui devrait tablir laccomplissement de ses obligations. Cette thse serait galement fonde
sur larticle 1315 al.2 du Code civil : le crancier qui poursuit son dbiteur en excution de son
obligation doit avoir excut sa propre obligation, supposer que celle-ci ait t la premire exigible .
Il incomberait donc au crancier demandeur de prouver sa propre libration, rendant ainsi lexception
dinexcution injustifie.

Section 2 : Maintien ou rupture du contrat


Dans un contrat synallagmatique, dit larticle 1184, alina 1 du Code civil, la condition rsolutoire est
toujours sous-entendue . La rsolution, mode de dissolution du contrat synallagmatique, trouve son
fondement dans linterdpendance des obligations rsultant du contrat.
Larticle 1184 al.2 du Code civil : la partie envers laquelle lengagement na point t excut a le
choix ou de forcer lautre lexcution du contrat ou den demander la rsolution avec dommages et
intrts . Le Code offre donc un choix au crancier qui peut soit poursuivre lexcution du contrat soit
rompre le contrat. Ce choix est notamment fonction de la gravit du manquement, de lutilit pour le
crancier de lexcution du contrat, de ltat des relations avec son dbiteur et des possibilits de
contracter avec un autre partenaire mieux dispos, plus comptent ou plus solvable.
Larticle 1184 al.3 du Code civil : la rsolution doit tre demande en justice et il peut tre accord
au dfendeur un dlai selon les circonstances .
Avant daborder les conditions et les effets de la rsolution, quelques prcisions terminologiques :
- Rsolution et rsiliation = modes de dissolution d'un contrat, qui mettent fin un contrat
valablement form dont l'excution a pu avoir lieu durant une priode plus ou moins longue.
- Nullit = mode de dissolution d'un contrat qui sanctionne un dfaut affectant la formation du
contrat (vice de consentement, absence dobjet et de cause, etc.)
Tous les auteurs nont pas la mme conception de ce quest la rsolution et de ce quest la rsiliation.
Nous proposons les dfinitions suivantes adoptes par une partie de la doctrine belge :
- Rsolution = mode de dissolution des contrats synallagmatiques qui sanctionne l'inexcution
fautive de ses O par une des parties au contrat.
- Rsiliation = acte par lequel soit deux parties mettent fin de commun accord au contrat (article
1134 al.2 du Code civil), soit une des parties y met fin unilatralement dans les cas prvus par
la loi (exemple : article 1794 du Code civil).
La rsiliation est aussi des rgles dans les contrats dure indtermine La facult de rsilier un
contrat dure indtermine est un droit pour chacune des parties. Elle est lie la prohibition des
engagements perptuels. Elle peut tre subordonne au respect dun pravis. Lexpos qui suit
concerne exclusivement la rsolution.

1. Le droit doption du crancier


Le crancier dispose en rgle gnrale dune option entre l'excution force du contrat et la rsolution.
La jurisprudence belge est soucieuse de maintenir ce droit doption.

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La Cour de Cassation a estim, en son arrt du 5 septembre 1980, que ce droit appartient
exclusivement au crancier victime de linexcution. Ce choix du crancier victime de linexcution
fautive connat quelques limites :
- Le choix n'existe plus lorsque le crancier a renonc une des branches de l'option sans
aucune rserve et de faon expresse (ex : lorsquil fait jouer une clause rsolutoire expresse
prvue au contrat).
- Labus de droit constitue une seconde limite. lexercice par un crancier de son droit doption
ne peut tre abusif (Cass 16/01/1986). Les conditions de labus de droit doivent tre remplies
(labus doit tre caractris) : lapplication de labus de droit aboutit imposer aux
demandeurs la rsolution quils n'avaient pas sollicite, c..d. lautre branche de loption. Le
juge conserve son pouvoir d'apprciation et peut dcider du maintien du Ct si les chances
dexcution de celui-ci sont raisonnables et que lexcution conserve un intrt pour le
crancier.
La rsolution prvue lart. 1184 CC doit se concilier avec les dispositions particulires prvues par
certains contrats spciaux (contrat de vente 1641 ; etc.) qui limitent / suppriment la facult de
rsolution. Parfois, la loi spcifie le manquement qui peut entrainer la rsolution judiciaire.

2. La rsolution pour inexcution fautive


A. Le caractre a priori judiciaire de la rsolution
a. Principe
La Rsolution dun contrat est une sanction qui a des consquences graves car elle aboutit la
rupture du Ct. Il importe den faire une utilisation mesure et de ne pas la laisser lentire discrtion
des parties. Linterdiction de la justice prive est gnralement invoque lappui de lintervention
pralable du juge.
Lintervention du juge qui opre 2 niveaux :
- Apprciation de la gravit du manquement commis par le dbiteur.
o (selon une partie de la doctrine : le pouvoir modrateur du juge dapprcier la gravit
du manquement nest pas inscrit dans le texte de lart. 1184 CC et serait une sorte de
prise de pouvoir prtorienne). Le contrle du juge sur la sanction pourrait intervenir a
posteriori, aprs la rsolution dcide unilatralement par le crancier ; le juge opre
un contrle ex-post des ventuels abus par le crancier de ses prrogatives
contractuelles (1134 CC). Si juge dsavoue crancier, il peut :
! Prononcer le maintien du Ct (en considrant que la rsolution, abusive, est
inefficace)
! Ou dclarer la dissolution aux torts du crancier fautif.
- Apprciation de loctroi d'un dlai pour permettre au dbiteur de sexcuter.
o (1184 CC : rapprocher du dlai de grce 1244 CC).

b. Drogations
Le caractre judiciaire de la rsolution nest ni dordre public, ni impratif. Les partis peuvent y droger
par des clauses contractuelles appeles clauses rsolutoires expresses (ou pactes commissoires
exprs). Ces clauses visent supprimer le contrle pralable du juge parce que ce contrle, dans une
situation de crise contractuelle, peut prendre trop de temps et que son issue nest pas totalement
prvisible. Toutefois, le juge garde le droit de contrler a posteriori l'abus dans lexercice de la clause
par la partie qui linvoque.


Le caractre judiciaire de la rsolution a des inconvnients :
- La justice est trop lente trancher.
- Lissue du conflit nest pas certaine puisque le juge dispose dun pouvoir dapprciation

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Ceci explique que des drogations soient apportes au caractre judiciaire de la rsolution par le
lgislateur lui-mme (1657 CC ; lois particulires : loi Ct travail, etc.). La doctrine et la jurisprudence
ont admis que la rsolution peut tre dcide unilatralement par crancier, sans recours au juge,
mme si pas de clause rsolutoire expresse.
La rsolution non judiciaire ou unilatrale peut tre admise en raison de circonstances
exceptionnelles :
- Le dbiteur doit avoir commis une faute suffisante, un manquement grave.
- Toutefois, les droits de la dfense doivent tre respects (mise en demeure, etc.).
- Constat des dfaillances du dbiteur
- Urgence.
- Confiance dfinitivement rompue.
- Excution ultrieure savre sans intrt pour le crancier
Ainsi, la mesure unilatrale ne peut tre prise quavec la runion de toutes ces conditions ; ces
conditions font lobjet dun contrle, a posteriori, du juge. La rsolution unilatrale pour circonstances
exceptionnelles est bien implante chez les juges du fond et la Cour de cassation ny est pas hostile.

B. Conditions
La rsolution sapplique un contrat synallagmatique (nomm ou innom) existant au moment de
l'inexcution fautive (une convention sous condition suspensive existe et peut tre rsolue pour
inexcution fautive). Parfois restrictions ou particularits (LPC), ou exclue par la loi (1978 CC). Il reste
cependant possible aux parties de prvoir un pacte commissoire exprs.
Linexcution du dbiteur doit tre fautive (si pas, cest la thorie des risques qui trouve sappliquer).
Si le crancier ne peut tre l'origine de l'inexcution du dbiteur, il ne pourra pas demander la
rsolution (ex : le bailleur demandant la rsolution dun contrat de bail pour non-paiement du loyer
alors que lui-mme nexcute pas son obligation dentretien). Cette inexcution du dbiteur doit tre
constate au pralable par une mise en demeure. En pratique, lassignation en rsolution du contrat
vaut mise en demeure, do lon peut dire que ce principe est inutile.
La rsolution est en principe judiciaire (moyennant les rserves supra). Ceci signifie que la rsolution
est demande en justice et soumise l'apprciation du juge. Celui-ci tient compte de la gravit du
manquement, de l'utilit conomique de la poursuite du contrat pour le crancier, des possibilits
d'excution ultrieure. Le pouvoir d'apprciation du juge est fort large, puisquil porte tant sur la gravit
du manquement que sur le choix de la sanction appliquer.

C. Effets
La rsolution, aussi bien la rsolution judiciaire que celle qui rsulte dune clause rsolutoire expresse,
implique lanantissement rtroactif du contrat (article 1183 du Code civil). La rsolution joue donc en
principe ex nunc et implique des restitutions qui ne sont pas des dommages et intrts.
La rtroactivit nest pas toujours possible. Lorsque des prestations de faire ont dj t excutes, il
y a impossibilit de restitution en nature. La rsolution joue alors non pas ex nunc mais ex nunc. Cette
affirmation connait son tour des nuances. La restitution par quivalent peut tre ordonne.
Que signifie ex nunc ? La rsolution prend-elle effet compter de linexcution fautive, compter
de la demande de rsolution ou compter du prononc de la dcision ? La jurisprudence varie :
- Arrts du 29/05/1980 et du 8/10/1987 : la Cour de cassation a affirm le principe selon lequel
la rsolution judiciaire dun contrat synallagmatique prestations successives remonte en
rgle, quant ses effets, la demande en justice.
- Affinement par la Cour : le point de dpart de la rsolution peut tre antrieur la date de
lintroduction de la demande toutes les fois que la question des restitutions ne se pose pas.
La rtroactivit de la rsolution pose des problmes lgard des tiers qui ont pu acqurir des droits :

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En matire immobilire, la loi impose la publicit des demandes en rsolution et des


jugements qui la prononcent. En matire mobilire, larticle 2279 du Code civil protge les
tiers acqureurs de bonne foi.
La rsolution nexclut pas loctroi dventuels dommages et intrts complmentaires pour le
prjudice quelle ne suffit pas combler ; ceux-ci se combinent avec les restitutions
rciproques qui doivent intervenir suite la rsolution (Article 1184 al.2 du Code civil). La
nature des dommages et intrts complmentaires fait objet de discussion. Logiquement, le
caractre rtroactif de la rsolution devrait amener conclure quils sont extracontractuels,
mais la jurisprudence considre quils sont de nature contractuelle.

Section 3 : La responsabilit contractuelle


1. Responsabilit aquilienne et contrats
Le concept de responsabilit contractuelle a fait lobjet de critiques rptes dune partie de la doctrine
franaise. Cette critique reproche la prsentation traditionnelle, hrite de Planiol, daligner
linexcution du contrat sur la responsabilit aquilienne et de rduire la responsabilit contractuelle a
une fonction rparatrice alors quelle a pour objet, par le biais des dommages et intrts, de procurer
au crancier insatisfait lquivalent de ce qui tait promis par le contrat.
Cette critique met en vidence la spcificit de laction contractuelle en dommages et intrts. Cette
spcificit a t un peu occulte par souci de rapprochement des deux ordres de responsabilit. Ce
qui sest donc traduit par cet alignement de la responsabilit contractuelle sur la responsabilit
aquilienne, et une tendance calquer linterprtation du dommage, du lien causal et de la faute en
matire contractuelle sur linterprtation qui en est faite en matire extracontractuelle. Malgr ces
critiques, nous adoptons une prsentation traditionnelle.
Il existe une responsabilit contractuelle rgie par les articles 1142 et suivants du Code civil : elle obit
des rgles propres bien que lvolution jurisprudentielle tende amenuiser les diffrences de
rgime.

A. Entre parties contractantes


Lorsque deux personnes sont unies par un contrat, peuvent-elles encore invoquer la responsabilit
dlictuelle pour sanctionner le manquement commis par lune delles ? La victime dun manquement
peut, en effet, avoir intrt agir sur une base dlictuelle pour chapper des clauses dexonration
ou de limitation de responsabilit prvues par le contrat ou encore pour bnficier de la prescription
parfois plus favorable prvue par le droit commun. Les principes suivants peuvent tre noncs :
- La violation dune obligation purement contractuelle ne peut engager que la responsabilit
contractuelle de la partie dfaillante. Le dommage dans ce cas se rsume la privation de
lavantage attendu du contrat.
- Cela ne signifie pas que la responsabilit aquilienne soit ncessairement et toujours refoule
parce quil existe un contrat entre lauteur et la victime du dommage. La responsabilit
aquilienne est admise des conditions restrictives : la victime du dommage peut mettre en
cause la responsabilit dlictuelle de lauteur du dommage quand le manquement reproch
constitue non la violation dune obligation purement contractuelle mais la violation dune
obligation de prudence qui simpose tous et si cette violation cause un dommage distinct du
dommage purement contractuel.

B. Entre le crancier principal et lagent dexcution


Il arrive que le dbiteur dune obligation ait recours aux services dun tiers pour excuter tout ou une
partie de ses obligations.
- Le dbiteur qui se substitue des agents pour assurer lexcution de ses obligations
contractuelles rpond en principe des fautes commises par ceux-ci dans laccomplissement

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des missions qui leur a confies. Ces fautes ne constituent pas pour le dbiteur une cause
trangre exonratoire.
Le crancier ne peut pas exercer de recours contractuel contre lagent dexcution puisque le
crancier est un tiers par rapport cet agent.
Lagent dexcution ne peut tre considr comme un tiers par rapport au contrat, et il ne peut
pas faire lobjet dun recours sur une base extracontractuelle, moins que lon puisse
dmontrer quil a commis une faute aquilienne et que le dommage en rsultant soit distinct de
celui qui provient de linexcution du contrat.

Il y a alors une quasi-immunit de lagent dexcution sur le plan civil.

2. Les conditions de la responsabilit contractuelle dans le Code Civil


A. Le fait gnrateur de la responsabilit contractuelle
a. Obligation de moyens et de rsultat : fondement et importance de la
distinction
Larticle 1147 du Code civil : constitue le texte le plus gnral en matire de responsabilit
contractuelle. Pour chapper sa responsabilit, le dbiteur doit tablir une cause trangre qui ne
lui est pas imputable, encore quil ny ait aucune mauvaise foi de sa part . Ce texte est relativement
strict. Pour chapper sa responsabilit, le dbiteur doit pouvoir tablir une cause trangre qui ne lui
est pas imputable. La preuve de sa diligence ne suffit pas lexonrer. Ce texte figurant parmi une
srie de dispositions gnrales, on serait tent dy voir une directive applicable lensemble des
obligations contractuelles.
Le problme est de concilier cet article avec larticle 1137 du Code civil (moins stricte lgard du
dbiteur) : celui qui conserve la chose nest tenu de donner la chose que les soins normaux
permettant dviter sa perte ou sa dtrioration. Ainsi, pour sexonrer, il suffira au dbiteur de
prouver sa diligence ; il naura pas prouver lexistence dune cause trangre. Lalina 2 de larticle
1137 indique que les obligations nont pas toujours la mme intensit.
Comment concilier les deux textes ? La majorit de la doctrine sest ralli Demogue : celui-ci
propose un systme ingnieux selon lequel larticle 1137 sappliquerait aux obligations de moyen et
larticle 1147 aux obligations de rsultat.
Deux systmes diffrents de responsabilit contractuelle existent donc :
- Dbiteur sous larticle 1137 : assume obligation de moyens. A linstar du bon pre de famille, il
doit faire tout son possible. En cas dinsatisfaction, le crancier a la charge de la preuve du
manquement.
- Dbiteur sous larticle 1147 : assume obligation de rsultat. Il promet dobtenir un rsultat
dtermin : si le rsultat nest pas atteint, le dbiteur ne pourra sexonrer quen prouvant que
linexcution est due une cause trangre exonratoire.
La distinction reposant sur lintensit des obligations assumes par le dbiteur a une importance
pratique considrable CAR elle dtermine lattribution de la charge de la preuve en cas dinexcution
du contrat et limputation du risque de preuve au cas o lorigine du dommage nest pas connue avec
certitude.
Au cas par cas, la jurisprudence a ainsi construit un rgime dualiste de responsabilit contractuelle
avec des variantes et avec des cas intermdiaires tels que lobligation de moyen renforce ou
lobligation de rsultat attnue.
Il y a lieu dajouter une catgorie nouvelle : obligation de garantie. Le dbiteur est responsable en
toute circonstance sans pouvoir invoquer une quelconque cause exonratoire (cf. 1641 et suivants du
Code civil en matire de vices cachs). Il semble quon sorte l du domaine de la responsabilit au
sens strict.

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b. Critres de distinction
Il arrive que la loi se prononce sur la qualification de lobligation ou fournisse des indications
permettant de la qualifier en obligation de moyens ou de rsultats (ex : 1147, 1784 CC,..). Parfois, la
loi prvoit une obligation de rsultat attnue (1732 CC,). Mais le Code nest pas systmatique (ex :
1137 al.2).
Lobligation de moyens a plusieurs degrs :
- Elle peut tre renforce. Ex : en matire de prt usage 1880, etc.
- Ou parfois, elle peut tre allge : la loi allge sort dbiteur. Ex : 1927 (dpositaire bnvole).
Larticle 1927 C.C. consacre la culpa levis in concreto.
La libert contractuelle reste un principe dominant la formation des contrats :
- La volont des parties peut allger ou durcir les obligations du dbiteur :
o Une obligation considre comme une obligation de moyens par application du critre
de lala peut se muer, par la volont des parties, en obligation de rsultat.
- La volont des parties est dterminante pour qualifier une obligation contractuelle (Cass).
- En labsence de disposition contractuelle claire, la solution consiste retenir une obligation de
moyen (1162 CC).
- La recherche de la commune intention des parties (qui doit permettre la qualification de
lobligation en obligation de moyens ou de rsultat) a des limites : elle parait inadapte pour
qualifier les obligation trangres lexcution du contrat, telle que lobligation
prcontractuelle dinformation ou de scurit. Ce sont dailleurs des obligations que les
contractants nont pas voulues. Ceci soulve le problme de la dlimitation du primtre
contractuel.
- Un critre frquent pour dterminer la qualification de lobligation est celui de lala (incertitude
qui s'attache la ralisation du rsultat promis au contrat). (Ex : obligation de soins du
mdecin, obligation de lavocat = ex classique dobligation de moyens. Le rsultat est espr
plus que garanti).
Si lincertitude est telle que lobtention du rsultat envisag par les parties ne peut pas tre garantie
par le dbiteur, lobligation sera normalement considre comme une obligation de moyen.
- Il existe beaucoup dautres critres. Lala est souvent coupl lanalyse du rle, +/- actif, du
crancier dans lexcution de lobligation contractuelle (ex : contrat de conseil = obligation de
moyens).
- Lobjet de l'obligation peut dterminer son appartenance lune ou lautre catgorie. (Ex :
obligation de donner = obligation de rsultat / obligation de ne pas faire = obligation de
rsultat / obligation de faire => dbat : parfois obligation moyen parfois rsultat).
- La qualit des parties en prsence joue aussi un rle important. Le dbiteur professionnel
qualifi est en principe jug plus rigoureusement raison de sa comptence et de sa
supriorit par rapport au profane.

c. Porte de la distinction
La distinction est utile, et a obtenu un vif succs. Mais elle est toutefois relative, car un mme Ct peut
superposer les deux types d'obligations (ex : un mdecin. Si lobligation de soins du mdecin est
gnralement qualifie comme une obligation de moyens, certaines franges de son activit donnent
naissance des obligations de rsultat). Il en est ainsi pour son obligation de se rendre chez son
patient. Dans le dpt, lobligation de dpositaire de veiller la conservation de la chose est une
obligation de moyens. Le problme vient du fait que lobligation de restitution est, quant elle,
gnralement qualifie dobligation de rsultat.
La jurisprudence peut aussi voluer : ainsi, lobligation de scurit est-elle selon les dcisions mais
aussi selon les poques, tantt de moyens, tantt de rsultat. Le critre dcisif reste sans doute ce qui
a t promis au Ct mais celui-ci doit tre interprt.

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B. Qualification du fait gnrateur : dol et faute lourde


La lecture des articles 1150 et 1151 du Code civil rvle que ltendue de la rparation du dommage
peut varier en fonction de la gravit du manquement. Cest une diffrence par rapport la
responsabilit dlictuelle.
Alors que le principe, en matire contractuelle, est que la responsabilit du dbiteur est limite aux
dommages prvisibles la conclusion du contrat, le dbiteur qui commet un dol est tenu des
dommages mme imprvisibles qui sont la suite immdiate et directe de linexcution.
Cest le dol lexcution du contrat qui est vis et non le dol la formation de celui-ci.
La notion de dol nest est pas claire : le droit belge refuse quipollence du dol et de la faute lourde. Sur
le plan psychologique, le dol comporte un lment intentionnel que ne comporte pas la faute lourde.
Le dol a plusieurs sens :
- Le dol = faute volontaire avec intention de nuire crancier. Cette conception a t
abandonne.
- Selon le Procureur Hayoit de Termicourt, le dol = faute intentionnelle, cest--dire, que son
auteur a voulu non seulement le fait qui a caus le dommage, mais aussi ses consquences :
dfinition fort restrictive.
- Selon une partie de la doctrine, le dol = une faute volontaire ou une inexcution intentionnelle
de l'obligation contractuelle, sans exiger que lintention sentende aux consquences
dommageables de celle-ci.
- Selon P. Van Ommeslaghe, le dol = faute rsultant d'une violation volontaire d'une O, pour
autant que le responsable ait eu ou ait d avoir conscience du prjudice qui devait
normalement en rsulter pour autrui et ait nanmoins persist dans son comportement fautif.
- Selon Thunis, le dol = la volont dlibre de se soustraire lexcution d'un engagement
contractuel, sans souci de l'inconvnient pouvant en rsulter pour le cocontractant (ex :
socit daviation pratiquant la surrservation ; il y a bien violation volontaire dune O dont le
dbiteur sait ou doit savoir quil peut en rsulter un prjudice pour le contractant).
La faute lourde a aussi plusieurs sens :
- La notion de faute lourde est le plus souvent dfinie par rapport la gravit du manquement
commis par le dbiteur contractuel :
o conception subjective : culpa lata = faute tellement grossire, tellement excessive
qu'elle ne se comprend pas d'une personne raisonnable.
o conception objective (Cornelis) : la faute lourde contractuelle bouleverse lconomie
du contrat : il sagit de la mconnaissance dune obligation essentielle du contrat.
Cette conception se retrouve en jurisprudence.
Cette distinction entre dol et faute lourde conserve un intrt en droit belge non seulement en ce qui
concerne ltendue du dommage rparable mais aussi la possibilit dassurance :
- La faute lourde, contrairement au dol, est assurable,
- Par contre, lintrt samenuise en ce qui concerne la validit des clauses exonratoires entre
professionnels et consommateurs depuis la loi du 14 juillet 1991 (article 32, 11).
Toute cette discussion ne doit pas faire oublier les principes de base qui est que : toute faute, mme
lgre, entraine la responsabilit de dbiteur contractuel .

C. Le dommage rparable et ltablissement dun lien causal


a. Principes gouvernant la dtermination et la rparation du dommage
La responsabilit contractuelle a une fonction de paiement mais aussi de rparation. A ce titre, elle est
gouverne par le principe de la rparation intgrale du dommage sous les rserves nonces cidessous. Comme lexcution en nature na pas t possible, cest une excution par quivalent
pcuniaire qui va gnralement choir au crancier insatisfait. Il nest pas exclu quun quivalent non

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pcuniaire soit fourni au crancier pour le replacer dans une situation aussi proche que possible de ce
quaurait procur lexcution en nature de la convention (rparation dite en nature).
Ce principe de la rparation intgrale explique la varit de dommages rparables :
- Dommage matriel, moral ou corporel.
- Dommage positif (damnum emergens) et dommage ngatif (lucrum cessans) vis larticle
1149 du Code civil.
- Dommages et intrts compensatoires (rparant le prjudice caus par la carence dfinitive
du dbiteur) ou dommages et intrts moratoires (sanctionnant le retard dans le paiement
dune dette de somme).
Les dommages sont donc assez compltements couvertes, mme si lindemnisation de certains types
de dommages tels que la perte d'une chance est plus problmatique. La jurisprudence belge a connu
des volutions sur plusieurs points :
- De plus en plus nettement se dgage le principe que le crancier victime de linexcution doit
prendre les mesures ncessaires pour limiter son dommage (application de la BF).
- Cour de cassation le 2/9/04 a dcid que les frais et honoraires davocat ou conseil font
partie du dommage rparable.
- 1153 et 1155 du Code civil : indemnisation du retard de paiement ( lire).
Intrts moratoires (Article 1153 du Code civil) = intrts sanctionnant le retard mis par le dbiteur
excuter une obligation qui se borne au paiement d'une certaine somme . Le taux de ces intrts
moratoires pour 2009 : 5,5 %. Et pour 2010 : 3,5 % Il sagit dun forfait ce qui signifie que le crancier
ne peut pas rclamer de dommages et intrts supplmentaires sauf en cas de dol ou si clauses
prvoyant des intrts moratoires plus levs. Larticle 1154 du Code civil rglemente strictement
lanatocisme, cest--dire la capitalisation des intrts. La jurisprudence admet cependant que cet
article ne sapplique pas la capitalisation des intrts en compte courant.
Une remarque simpose. Elle concerne la porte de larticle 1153 du Code civil. Cet article vise les
dettes de sommes et non les dettes de valeur.
- Une dette de somme = dette dont le montant est dtermin ou dterminable en vertu de la loi
ou du contrat. Un loyer, prime dassurance, etc. sont des dettes de sommes donnant lieu, en
cas de retard, des intrts moratoires, compter de la mise en demeure du dbiteur.
- Une dette de valeur = dette dont le montant est indtermin la naissance doit tre fix par
le juge. Ce type de dette sidentifie lobligation de rparer le dommage en matire
contractuelle ou extracontractuelle.
Exemple : dette de rparation pour dgts locatifs = dette de valeur tant que son montant nest pas
dtermin par le juge. Une dette de valeur donne lieu des intrts compensatoires qui rparent le
prjudice supplmentaire subi par victime cause du retard de l'indemnisation. Il sagit plus dune
indemnit que dintrts proprement dits ; leur taux est fix librement par le juge et ils naissent ds
que lobligation de rparer le dommage existe.
Il y a lieu de rappeler que la mise en uvre de la responsabilit contractuelle est soumise une mise
en demeure pralable (Article 1146 du Code civil). Larticle 1153, alina 3 du code civil indique en effet
les intrts moratoires ne sont dus qu partir du jour de sommation payer.

b. Dommages prvisibles et imprvisibles


Voir article 1150 C.C. : rgle fonde sur lautonomie de la volont. Uniquement la rparation des
dommages prvisibles. En cas de contestation, le juge apprcie ce qui est prvisible et ce qui lest
pas.
Les dommages imprvisibles ne donnent pas lieu rparation, sauf si linexcution a t dolosive.
Dans ce cas, le dbiteur de mauvaise foi doit indemniser tous les dommages prvisibles et
imprvisibles (diffrent de la responsabilit contractuelle).
Lexclusion de la rparation du dommage imprvisible est interprte diffremment :
- En France : la prvisibilit sapplique au principe du dommage MAIS galement sa quotit.

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En Belgique : au contraire, il suffit que le dommage contractuel soit prvisible quant sa


cause ou son principe et non pas ncessairement quant sa quotit ou son tendue.

Ceci tend fortement la responsabilit du dbiteur contractuel et rapproche la responsabilit


contractuelle de la responsabilit dlictuelle en ce qui concerne le dommage indemnisable. Des
clauses peuvent prvoir ce qui est prvisible et imprvisible : pour viter incertitude et extension
excessive du dommage indemnisable.

c. Dommage direct ou indirect. Ncessit dun lien de causalit


Conformment larticle 1151 du Code civil, mme en cas de dol du dbiteur, les dommages et
intrts ne doivent comprendre que ce qui est une suite immdiate et directe de linexcution de la
convention.
Comme le souligne De page, si lide est claire, les mots pour lexprimer ne le sont pas. Il faut une
relation causale de ncessit entre une faute et un dommage, si celle-ci nexiste pas, le dommage
nest pas indemnisable. Lexemple proverbiale de Pothier : Si un marchand me vend une vache quil
sait contamine et quil me le dissimule, cest un dol. Que cette vache contamine mon troupeau, il
men doit rparation car cest l un dommage qui est une suite directe et immdiate de la convention.
Si par la perte des bestiaux, je nai pu cultiver mes terres ou payer mes dettes, il sagit dun dommage
trop loign pour quil puisse tre indemnis . Le lien causal est une exigence fondamentale de la
responsabilit civile toute entire.
Tout en rappelant quen matire contractuelle les dommages et intrts dus au crancier ne doivent
comprendre que ce qui est une suite immdiate et directe de la convention , la Cour de cassation du
24/06/1977 : il faut entendre par l une suite ncessaire de l'inexcution de la convention , et dans
un arrt du 14/10/1985 la Cour a indiqu que : le dommage indirect doit lui aussi tre rpar ds lors
quil entretient une relation de causalit ncessaire avec la faute du dbiteur. La thorie de
lquivalence des conditions se trouve ainsi applique la matire contractuelle ce qui rapproche les
deux ordres de responsabilit.

Chapitre 3 : Clauses amnageant les conditions ou les


effets de linexcution du contrat
En vertu du principe de la libert contractuelle, les parties peuvent amnager le contenu du contrat :
elles peuvent rgler soit en faveur du crancier soit en faveur du dbiteur, les conditions et les
consquences dun incident dinexcution.
Suivant le poids des parties la convention, les clauses joueront en faveur de lun ou de lautre.
Mme si la libert contractuelle reste le principe, lautonomie des parties connat des limites de plus
en plus nombreuses ; elles sont de deux types :
- Des limites de type jurisprudentiel : la jurisprudence a utilis son pouvoir dapprciation pour
limiter la porte de clauses qui avantagent outrageusement lun des cocontractants.
- Des limites lgales spcifiques : certaines lois limites la validit de certaines clauses abusives.
Dans certains cas, le juge est mme autoris rduire ou radapter certaines clauses.
Plusieurs classifications existent concernant les clauses amnageant les conditions ou les effets de
linexcution du contrat, nous ne les voyons pas toute ici :
- Clauses qui tendent assouplir, en faveur du dbiteur, les consquences dun changement
de circonstances sur lexcution dun contrat.
- Clauses dispensant le crancier de certaines procdures ncessaires lexercice de ses
droits. Ex : clause de mise en demeure, rsolution automatique de contrat, etc.
- Clauses relatives la responsabilit et aux dommages-intrts dfinissant, notamment, les
conditions dans lesquelles la responsabilit du dbiteur est engage ou fixant le montant des
dommages et intrts en cas dinexcution de ses obligations par une des parties.

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Section 1 : Clauses amnageant les consquences


changement de circonstances sur lexcution du contrat

dun

1. Clauses relatives limprvision


La doctrine et la jurisprudence belges dominantes considrent que larticle 1134 C.C. exclut la
dissolution ou la modification de la convention tant que le bouleversement ne constitue pas une cause
trangre exonratoire ou un cas de force majeure. La pratique contractuelle, surtout internationale,
assouplit ce rgime en prvoyant des clauses spcifiques dites dimprvision. Celles-ci prvoient alors
les lments constitutifs de limprvision ainsi que la procdure suivre par les parties.
Il existe galement des clauses qui sappliquent corriger les effets dune dprciation montaire en
se rfrant un talon (valeur-or). Ce sont surtout des clauses de rfrence une monnaie de
compte trangre normalement stable. Il est aussi possible de se rfrer un index dont la variation
entraine la variation de la dette montaire.

2. Clauses relatives la force majeure


Le droit belge et franais ont une conception trs stricte de la force majeure ; nanmoins il existe une
tendance dans les contrats oprer un largissement de ce concept. Ceci aboutit la limitation de
responsabilit dont la validit doit tre apprcie en fonction de la porte de llargissement du
concept de force majeure prvue au contrat. Les contrats prcisent donc les effets et la procdure de
la force majeure.

Section 2 : Clauses dispensant le crancier


procdures ncessaires lexercice de ses droits

de

certaines

1. Clauses relatives la mise en demeure


La mise en demeure est une interpellation non quivoque adresse au dbiteur par le crancier
insatisfait enjoignant de sexcuter.
Une clause relative la mise en demeure peut, soit porter sur les formes quelle doit revtir, soit
dispenser le crancier de toute interpellation pralable. Dans ce dernier cas, le contrat prvoit alors
que le simple dpassement du terme vaut mise en demeure et entrane un certain nombre de
sanctions (application dune clause pnale, etc.).

2. Clauses rsolutoires expresses


Larticle 1184 C.C. indique que la condition rsolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats
synallagmatiques et que la rsolution de ces conditions rsolutoires doit tre demande en justice.
Nanmoins, les parties peuvent stipuler un pacte commissoire exprs ou une clause rsolutoire
expresse permettant de se passer de lintervention pralable du juge. Dans ce cas, les parties
doivent prciser clairement au contrat que, en cas de manquement, ils entendent se passer du
recours la justice et donc du pouvoir dapprciation du juge quant la gravit du manquement. En
cas de doute, ces clauses sont interprtes de faon stricte. Le juge peut, toutefois, vrifier a
posteriori si la mise en uvre de la clause rsolutoire ne constitue pas un abus de droit.
On distingue divers degrs dans les pactes commissoires exprs :
- Soit le contrat se borne appliquer larticle 1184 C.C. et il faut appliquer le droit commun.
- Soit une clause du contrat prvoit que le contrat sera rsolu de plein droit en cas de
manquement sur tel ou tel obligation prcise. Le juge na alors plus lobligation dintervenir et

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ne pourra, en cas de dolance forme par lune des parties, que constater lexistence du
manquement ventuel, tel que celui-ci est dfini dans le contrat. Une telle clause suppose
lenvoi dune mise en demeure.
Soit le contrat peut prvoir que celui-ci sera rsolu de plein droit sans mise en demeure
pralable. Il faut alors que cette clause soit prvue de faon indiscutable.

Il existe, bien sr, un certain nombre dexception aux clauses rsolutoires expresses : certaines lois
mais aussi des dispositions impratives ou dordre public.
Il y a lieu de distinguer la clause rsolutoire expresse de la clause de rsiliation unilatrale : cette
dernire permet une partie de rompre le contrat, en dehors de toute ide de faute ; elle ne
sanctionne pas un manquement contractuel et ne dissout le contrat que pour lavenir.
Il y a lieu de distinguer la clause rsolutoire expresse de la condition rsolutoire : celle-ci est trangre
lide de sanction contractuelle et opre de plein droit automatiquement.

Section 3 : Clauses relatives la responsabilit et aux dommages


et intrts en cas dinexcution
Il existe en pratique de nombreuses conventions ou clauses qui attnuent ou aggravent la
responsabilit dun contractant, ou encore qui fixent forfaitairement le montant de la rpartition
charge du dbiteur dfaillant. Ces clauses sont, en principe, licites car la matire de responsabilit
civile nest pas considre comme dordre public en droit belge.
Ces clauses peuvent donner lieu des abus, cest pourquoi de nombreuses jurisprudences ont limit
la validit de ces clauses.
On distingue deux types de clauses relatives la responsabilit et aux dommages et intrts en cas
dinexcution :
- Les clauses exonratoires ou limitatives de responsabilit.
- Les clauses pnales.

1. Les clauses exonratoires ou limitatives de responsabilit


A. Description
Les clauses exonratoires ou limitatives de responsabilit sont les clauses par lesquelles un dbiteur
supprime ou allgue sa responsabilit. Ces clauses sont diverses :
- Elles peuvent prciser que seuls certains types de manquement donnent lieu responsabilit.
- Elles peuvent plafonner les montants de rparation.
- Elles peuvent limiter la responsabilit du dbiteur certains types de dommages.
- Elles peuvent dlimiter lobligation que le dbiteur accepte dassumer ou transformer une
obligation de rsultat en obligation de moyens.
- Elles peuvent largir certains concept (ex : force majeure).
- Elles peuvent prciser certains concepts en les restreignant (ex : dommage prvisible).
La varit de ces clauses rend leur classification difficile :
- Certains distinguent les clauses restreignant le contenu des engagements des clauses
restrictives de responsabilit .
- La doctrine franaise (non pratique en Belgique) distingue les clauses lisives de
responsabilit et les clauses limitatives de rparation .
- Dautres distinguent les clauses portant sur les conditions dexistence de responsabilit et
les clauses amnageant les consquences de responsabilit .
Une tendance forte du droit positif est de restreindre la validit des clauses exonratoires ou limitative
concernant le prjudice corporel.

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B. Restrictions jurisprudentielles
La jurisprudence cherche carter ces clauses quand elles conduisent des abus.
La jurisprudence belge a ainsi utilis des techniques dinterprtation permettant de limiter la porte de
certaines clauses. Le principe de leffet utile prvu larticle 1157 C.C. est galement utilis.
Lorsquune clause prte diverses interprtations, il est parfois possible de linterprter dans un sens
qui la rend licite : une clause rdige en termes gnraux, qui semble exonrer le dbiteur de toute
responsabilit en cas dinexcution peut, par application de larticle 1157 C.C., tre carte en cas de
faute lourde ou de faute dolosive, mais tre considr comme efficace en cas de faute lgre.
La jurisprudence a mis au point deux critres pour apprcier la validit dune clause exonratoire ou
limitative de responsabilit :
- La clause est inefficace lorsquelle prtend exonrer le dbiteur de son propre dol. Le
fondement de cette solution est discut : certains parlent du principe de linterdiction des
conditions purement potestatives (article 1174 C.C.), dautres disent que sexonrer du dol
est contraire lordre public (article 6 C.C.), dautres encore invoquent le principe de
labus de droit et enfin, dautres parlent du principe dexcution de bonne foi des
obligations . De plus la notion de dol est trs controverse.
- La clause ne peut pas non plus porter atteinte une obligation essentielle du contrat ou vider
le contrat de sa substance, de tout contenu. Cette approche produit lide dun minimum
incompressible par type de contrat. Attention ! La nullit ne frappe pas ncessairement tout le
contrat ; si une seule clause du contrat est frappe dillicit, lannulation ne va pas
automatiquement stendre au contrat tout entier. Lensemble de la convention ne sera
annule que si, dans lintention des parties, la clause illicite forme avec les autres dispositions
contractuelles un ensemble indissociable.

C. Restrictions lgales
Les clauses dexonration ne sont pas valables lorsquelles sont contraires lordre public ou des
dispositions lgales impratives.
Le Code Civil connat dautres restrictions la validit de ces clauses : Il rsulte de larticle 1645 C.C.
que les clauses de non-responsabilit stipules dans les contrats de vente sont nulles ds linstant o
lacheteur dmontre que son vendeur connaissait les vices de la chose, etc.
Ces restrictions se sont tellement multiplis que le lgislateur a du intervenir pour rglementer, de
faon plus gnrale, les clauses exonratoires ou limitatives de responsabilit. Ainsi, la loi du 6 avril
2010 comprend bon nombre de dispositions permettant de combattre les clauses limitatives ou
exonratoires abusives, soit que celles-ci fassent partie de la liste des clauses interdites par larticle
74, soit quelles aboutissent crer un dsquilibre manifeste entre les droits et les obligations des
parties au dtriment du consommateur.
Ces dispositions ne sappliquent que dans le cadre de relation entre consommateurs et entreprises. Il
nest pas exclut, toutefois, que certaines des solutions quelle consacre sappliquent par
contamination aux rapports entre professionnels ou aux rapports entre non professionnels.
Le lgislateur contemporain procde plutt par type de relations que par problme. Les textes sont
parfois dune qualit douteuse.

2. Les clauses pnales


A. Le rgime du Code Civil
a. Dfinition caractristiques
Larticle 1226 C.C. dfinit la clause pnale.

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En bref, dans une clause pnale, les parties saccordent pour dterminer, de faon anticipe et
forfaitaire, les dommages-intrts auxquels le crancier a droit en cas dinexcution de lengagement.
Le crancier est dispens dtablir lexistence et le montant du prjudice calcul forfaitairement la
conclusion du contrat de mme que le lien causal entre la faute et le dommage. Ce second point est
nanmoins discut.
Les clauses pnales sont trs varies : elles peuvent prvoir un montant absolu, un pourcentage du
montant d, des intrts moratoires suprieurs au taux dintrt lgal ou encore la combinaison dune
majoration du montant d et dintrts moratoires conventionnels.
Les clauses pnales prsentent plusieurs caractres :
- Caractre forfaitaire.
- Caractre accessoire. Le sort de la clause pnale est tributaire de celui de lobligation
principale.
- Caractre sanctionnateur. Elle sanctionne linexcution fautive dune convention.
o Selon la Cour de cassation, il y a une diffrence entre clause pnale et clause
de ddit : la clause pnale est la compensation des dommages et intrts que le
crancier souffre de linexcution de lobligation principale ; la clause de ddit est le
prix payer par le dbiteur pour quitter le contrat. Dans la pratique, la distinction entre
les deux types de clauses est tnue.
o La mise en uvre de la clause pnale implique une mise en demeure pralable du
dbiteur dfaillant (article 1230 C.C.) sauf si des clauses conventionnelles dispensant
le crancier de mise en demeure sont possibles.
La clause pnale a t-elle une fonction indemnitaire ou peut-elle remplir une fonction coercitive,
comminatoire ?
Une premire conception attribue la clause pnale une fonction comminatoire : si elle prvoit un
forfait lev, plus lev que le dommage prvisible pouvant rsulter de linexcution de la convention,
elle constitue un moyen de pression sur le dbiteur, une sorte de peine prive.
Une seconde conception assigne une fonction exclusivement indemnitaire la clause pnale : celle-ci
doit se limiter prvoir une valuation forfaitaire des dommages-intrts dus en cas dinexcution
fautive de ses obligations par le dbiteur.
Cette deuxime conception a t clairement affirme en jurisprudence belge depuis un arrt de la
Cour de cassation du 17 avril 1970 selon lequel : lorsque la clause ne peut-tre une rparation du
dommage et procure au crancier un bnfice beaucoup plus important que lexcution normale du
contrat, elle est contraire aux dispositions de larticle 6 du Code Civil . Elle est confirme par larticle
1226, mme si le Code, dans dautres dispositions, utilise le mot peine plusieurs reprises (article
er
1231 1 C.C.).
er

Face au caractre comminatoire de certaines clauses, larticle 1231 1 C.C. permet au juge de
rduire la clause lorsque la somme prvue par celle-ci excde manifestement le montant que les
parties pouvaient fixer pour rparer le dommage rsultant de linexcution de la convention . Ceci
sapplique donc in concreto par rapport un homme raisonnable et, le caractre comminatoire
sapprcie ex ante par rapport au dommage potentiel envisageable la conclusion du contrat.

b. Sanction dune clause pnale comminatoire


Selon la jurisprudence antrieure la loi de 1998, une clause pnale ayant un caractre comminatoire
est contraire lordre public et la sanction tait donc : la nullit absolue. Cette nullit na deffet que sur
la clause pnale et non pas sur le contrat tout entier. Lannulation est une solution extrme qui
entraine alors le retour la responsabilit contractuelle du droit commun.
er

La loi du 23 novembre 1998 permet, dans larticle 1231 1 C.C., la rduction des clauses pnales
er
excessives. Le juge dispose donc maintenant dun pouvoir de rduction en vertu des articles 1231 1
C.C. (clauses pnales excessives) et 1153 alina 5 nouveaux (clauses dintrts moratoires
excessives). Attention, en vertu de larticle 1231 2 C.C., le juge ne peut condamner le dbiteur une
somme infrieure celle qui aurait t due en labsence de clause pnale.

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B. La loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du march et la protection du


consommateur
Le Code Civil nest pas le seul traiter des clauses pnales. Certaines dispositions de la loi du 6 avril
2010 les concernent galement.
La loi du 6 avril 2010 prvoit la nullit des clauses comminatoires, apparemment plus avantageuse
pour le consommateur que la rduction. Apparemment, la solution retenue par cette loi na pas t
remise en cause par la rforme du 23 novembre 1998 ; la protection du consommateur tant trs
importante dans nos socits actuelles.

C. Autres dispositions
Dautres dispositions existent en matire de clauses pnales. Cet parpillement rend les approches
densemble difficiles. En ce qui concerne la rduction des clauses pnales par exemple, celle-ci peuttre accorde dans plusieurs hypothses :
er
- Rduction des clauses pnales excessives, prvue par les articles 12311 C.C. et 1153
alina 5 du Code Civil.
- Adaptation de la clause pnale en cas dexcution partielle de lobligation par application de
larticle 1231 2 du C.C.
- En vertu des principes gnraux, rduction des clauses pnales pour abus de droit fonde sur
larticle 1134 alina 3 du Code Civil. Cette rduction sapplique une clause valide mais
utilise de faon abusive ; dans un arrt de la Cour de cassation du 18 fvrier 1988, la Cour
de cassation permet au juge de fond, qui constate que le crancier abuse de son droit en
rclamant lapplication intgrale de la clause, de rduire lusage de la clause son exercice
normale.

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