Evangile de Philippe
Evangile de Philippe
Evangile de Philippe
EVANGILE DE PHILIPPE
Paraphrases et considrations
Par Nicole Daumard
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introduction
Pourquoi lEvangile de Philippe, qui fait partie des trs anciens manuscrits dune bibliothque
gnostique des premiers sicles, dcouverte en 1945 Nag-Hammadi en Egypte, est-il
apparemment un vritable puzzle ? Fallait-il dj aux IIe ou IIIe sicle cacher certains
enseignements ? La grande glise de Rome, anctre de lEglise catholique, avait-elle dj
commenc traquer, pour les expurger ou les dtruire, les crits dont la doctrine ne
correspondait pas exactement la sienne ?
Dans la tradition alchimique, il semble aussi que les auteurs aient pris lhabitude
dinterchanger certaines phrases ou certains paragraphes en sorte que seuls puissent sy
reconnatre les lecteurs avertis, et afin que ceux qui ny voyaient aucun sens ne soient pas
tents de les dnaturer ou de les faire disparatre. En ralit cette faon de faire remonterait
la plus haute antiquit o les mystres ntaient divulgus quaux initis. A ce propos, la
Bible aussi aurait un sens voil.
Sagirait-il dune mise par crit dun enseignement secret transmis oralement, et ne pourrait-il
tre celui-l mme de lhomme que Philippe appelle Jsus ses plus proches disciples ?
LEvangile de Philippe est un crit savant , comme tous les textes gnostiques, dans le
sens quil sy passe un jeu subtil entre le sens propre et le sens figur de certains termes cls,
entre le sens ordinaire de certains mots ou propositions, et les images voques ainsi que les
sens symboliques possibles. Lauteur ne manque pas non plus de jouer avec les invitables
contradictions apparentes de la vie, le jour et la nuit, la vie et la mort... ce que lon appelle les
extrmes , cest--dire les aspects opposs inhrents la dualit de lexistence terrestre, dont
on trouve dailleurs le symbole ds les premires pages de la Bible, sous la forme des tnbres
et de la lumire, des eaux et de la terre, de larbre de la connaissance du bien et du mal. La
pense gnostique se joue aisment de toutes ces contraires, ainsi que des sens diffrents dun
mme concept, car elle connat et voit lunit sous-jacente du tout, do vient sans doute
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Or le malheur des hommes a justement pour cause cette dualit des extrmes, qui est la
base de toute rflexion philosophique et religieuse sur la condition humaine, et a inspir
Hegel, par exemple, le concept de dialectique . On dirait que cette dualit a t cre pour
nous faire rver dune unit apparemment inaccessible ici-bas, rver dun monde o le bonheur
naurait pas pour pendant le malheur, lamour, la haine... Il semble que lhomme, dans son
ignorance, sacharne de toutes ses forces, mais en vain, tablir cette unit sur terre ; tandis
que le gnostique sait , parce quil le vit, quil existe un monde o elle existe. Il ne sagit pas
dune autre plante, mais dune autre nature. Mon royaume nest pas de ce monde , dit
Jsus.
Le dualisme facile observer dans notre monde na donc rien voir avec celui des
gnostiques. Et le dsir ancestral
de rsoudre le dualisme terrestre du bonheur et de la douleur, du froid et du chaud, de lici et de
l-bas... nest que le reflet de la profonde aspiration du gnostique de tous les temps
schapper de la matire o lhomme senlise pour atteindre la nature divine. La Gnose en
donne la connaissance et la possibilit.
Toutes ces caractristiques portent conclure que lEvangile de Philippe est un texte
typiquement gnostique, dune poque o la Gnose a inspir une profusion dcrits et de
mouvements divers dans le monde entier, parmi lesquels le christianisme des premiers temps.
Philippe tait un gnostique, or cest le propre du gnostique de recevoir les rvlations
intrieures ncessaires sa progression sur le chemin de linitiation, et la tche qui lui est
confie sur cette terre pour la dlivrance de lhumanit.
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Le texte franais tabli ici la t daprs une traduction franaise o figurent entre
parenthse les termes grecs conservs dans le texte copte, la traduction parue dans la srie
Textes gnostiques de Shenest par A. Wautier, Ed. Ganesha, et la traduction en anglais
parue dans The Nag Hammadi Library , New York, 1977, ainsi que daprs des donnes
sotriques. Mais chacun, videmment, peut et doit trouver bien dautres interprtations suivant
linspiration.
Il est malheureusement probable que les considrations qui vont suivre sembleront aussi
dcousues que celles de cet vangile, mais lunit fondamentale doit finir par se manifester,
comme elle se manifeste dailleurs trs clairement aprs plusieurs lectures approfondies, et que
de lillogisme trompeur de la suite des ides se dgage une logique intrieure rigoureuse,
proprement stupfiante par rapport au dsordre apparent.
Il est aussi probable que le lecteur courageux trouvera que ces commentaires fourmillent de
redites, mais tout le monde nest pas dot de ce gnie de la Gnose qui fait que Jan van
Rijckenborgh, Catharose de Petri et... Philippe peuvent donner des aspects toujours diffrents
dun seul et unique sujet : la rsurrection de lhomme terrestre en homme divin.
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Faut-il commencer par lire le texte mme de lEvangile de Philippe, dont la premire lecture
risque dtre assez indigeste ? Je pense quil vaut mieux commencer par les considrations o
figurent les citations regroupes suivant leur sujet, et se lancer ensuite seulement dans
lEvangile de Philippe dont lunit de pense devrait alors apparatre clairement, et susciter bien
dautres interprtations.
Ce texte contient de trs nombreuses allusions au Nouveau Testament, des citations de Paul
en particulier. Je ne les ai pas toutes signales.
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1-La Vrit
" Althia " est le mot grec employ pour la Vrit : la ralit oppose l'apparence, le saphir
que porte le grand-prte d'Egypte.
(55a) La Vrit ne vient pas dans le monde nue, mais en signes (tupos = empreinte, marque) et
en images(eikn). On ne la recevra pas autrement.
(118b) Les mystres de la vrit sont rvls sous forme de signes (tupos) et d'images.
Le mot image revient constamment dans l'Evangile de Philippe. Comment, en effet, parler de
choses inexprimables sur le plan terrestre autrement qu'en images, en symboles et en
paraboles? C'est pourquoi il faut considrer et entendre tous les textes " hermtiques ", toutes
les critures saintes de faon symbolique et image.
La vrit est indicible, c'est Sophia, la Gnose. Aucun mot dans aucune langue ne saurait la
dfinir, la circonscrire. Elle est insaisissable dans sa nudit originelle; il faut donc l'habiller de
mots et d'images afinde la mettre la porte de la comprhension et de l'imagination humaines,
pour pouvoir la recevoir, la concevoir quelque peu, particulirement en un temps o toute la
pense humaine est concentre dans les mots, o l'on pense avec des mots !
Aux temps o l'homme chercha dfinir la Vrit par le langage, par des mots,
(9b) " La Vrit engendra les noms dans le monde parce qu'il est impossible de l'apprendre
sans noms. "
Les choses ont commenc par tre dsignes par des noms, lesquels ont fini par devenir de
simples mots, eux-mmes symboles des choses en question. Mais les choses chappent leur
nom, qui est incapable de les dfinir exactement.
Les noms dsignent l'apparence des choses, et sont dans l'incapacit de dcrire leur essence.
La Vrit chappe son propre nom, incapable de la dfinir;
elle se cache derrire une apparence, mais son essence
chappe toute investigation ordinaire.
Nous, cratures de cette cration terrestre, nous ne croyons
que dans les choses visibles qui nous donnons une grande
puissance puisque que nous btissons sur elles toute notre
science ; nous ignorons dlibrment la Vrit invisible,
et mme nous la rejetons si quelqu'un nous en parle, phnomne
gnral ordinaire d'une humanit qui fait grandir chaque jour
sa sempiternelle, tristesse, vide, livide et dsespre.
Par exemple :
Les mots expriment les apparences et transforment donc tout enapparence. Mais l'inquitude
pousse sonder les apparences, et c'est ce qui peut la fois nous perdre et nous sauver. En
cela, la science a raison. Elle a tort dans ses applications. Les applications entranent d'autres
dcouvertes... mais la
dcouverte du sens de la vie exige-t-elle une technique de
pointe et le niveau de vie correspondant? Les techniques de
pointe ont-elles, ou vont-elles, supprimer la guerre, la faim,
la maladie, la mort?
L'essence de la Vrit admet-elle la guerre, la faim, la
maladie, la mort?
La Vrit est " Une ", comme tout ce qui ressort de la nature
divine. Cette Unit devient multiplicit ds qu'elle touche
la nature terrestre, car le multiple est le caractre mme de
l'univers matriel. Dans son amour pour l'tre humain qu'elle
veut attirer elle pour le sauver de l'enfer terrestre, la
Vrit s'offre dans sa diversit infinie afin que l'tre
humain, sur le chemin de la perfection, finisse par entrevoir
son Unicit derrire sa multiplicit, donc sa nature divine.
La multiplicit doit retourner l'unicit: premier concept
alchimique en rfrence la Table dEmeraude dHerms
Trismgiste.
(111) Bien des choses du monde, tant que leurs racines sont
caches demeurent debout et vivent. Si les racines se voient,
elles meurent, l'exemple de l'homme visible. Tant que ses
entrailles restent caches, il vit. Si ses entrailles sortent
de lui, il meurt. Il en est de mme de l'arbre. Tant que ses
racines sont caches, il crot et fructifie; si sa racine
apparat, il se dessche. Il en est ainsi de chaque chose
dans le monde, non seulement de ce qui est manifest mais de
ce qui est cach. Il en est ainsi de chaque chose ne dans le monde
non seulement manifeste mais aussi cache. Car tant que la racine
du mal est cache, elle est forte mais
quand on la reconnat elle est dissoute, quand elle se manifeste
elle est dtruite. C'est pourquoi la Parole dit: "Dj la
hache est place la racine de l'arbre". Elle ne coupera pas
car ce qui est coup repousse, mais elle pntrera si
profondment qu'elle extirpera la racine. Jsus arrache la
racine entirement alors que d'autres ne l'ont fait qu'en
partie.
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(115) La parole dit : Si vous connaissez la vrit, la vrit vous rendra libres.
(Jean 8, 32 vrifier)
(99) Celui qui est esclave contre sa volont, pourra devenir libre. Celui
qui est devenu libre par la grce de son Seigneur (Matre?) et se rend lui-mme
esclave ne pourra plus tre libre.
Le mal cach, le mal que l'on ignore en nous, fait son oeuvre
en toute tranquillit. Dmasqu, il perd de sa force et la
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Lumire prend sa place pour faire son oeuvre qui est de nous
dlivrer du mal.
(125) Tout plant que mon Pre qui est dans les cieux n'a
pas plant sera dracin.
Vrit?
Le plant que le Pre n'a pas plant est le plant qui n'a pas
reu ou qui a rejet la Lumire divine, qui n'a pas pu
crotre en union avec l'Amour divin du Pre, le plant qui ne
reoit pas la rose de la rose aurore.
II
Les noms
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(8a) Les noms qui sont donnes aux choses du monde renferment une grande illusion, car ils
dtournent la pense de ce qui est rel vers ce qui n'est pas rel, et celui qui entend le nom
Dieu ne saisit pas ce qui est rel mais ce qui n'est pas rel. De mme dans le Pre et le
Fils et l'Esprit Saint et la Vie et la Lumire et la Rsurrection et l'Eglise , et
tous les autres on ne peroit pas ce qui est rel, on peroit ce qui n'est pas rel, moins d'avoir
appris ce qui est rel.
C'est au moyen des sens que l'homme donne des noms aux choses or les sens ne voient, ne
touchent, n'entendent, ne sentent que l'extrieur des choses, leur apparence.
Donc surtout ne pas oublier en lisant l'Evangile de Philippe que :
(9b) La Vrit engendra les noms dans le monde parce qu'il est impossible de l'apprendre
sans noms.
Il s'agit encore l des nombreux paradoxes de ce texte qui ne fait que rvler la dualit du
monde terrestre. Oui, la Vrit indicible doit se rvler par tous les moyens possibles, et parmi
eux il y a les noms donns aux choses, les mots, par lesquels elle a une possibilit de se
rvler mais seulement en images et en symboles ! Malheureusement l'esprit de ces
images et symboles n'est plus saisi et il ne reste que leur signification prise la lettre, leur
apparence.
(Le mot Dieu recouvre limage, que se sont faite, que se font et que se feront tous les
peuples du monde, de la force insaisissable qui se cache derrire lunivers et son apparition.
Cest un mot facile demploi ne serait-ce que parce quil est court et laconique. Tout au long de
ce texte il reprsente donc la force physique, spirituelle, philosophique, etc. - comme on voudra
- primordiale et fondamentale, qui explique la vie de lunivers, ainsi que la hirarchie des forces
qui en manent, quon les dsigne comme des ondes lectromagntiques ou par un nom
scientifique plus savant, ou comme des puissances spirituelles, reprsentes par des anges,
etc. toujours comme on voudra. Limage de cette force fondamentale serait celle du bien
absolu, par opposition au bien et au mal du monde que nous connaissons, qui nest quune
triste dviation du monde du bien absolu.)
(8b) Tous les mots entendus dans le monde sont trompeurs. S'ils taient dans l'Eon (ain), ils
ne seraient pas prononcs dans le monde aucun moment, et ils ne seraient pas rangs parmi
les choses du monde. Dans l'Eon ils ont une fin.
Eon: ce mot grec signifie: 1) toujours, 2) un temps trs long, 3) le fils de Chronos, et dans
l'Evangile de Philippe ce terme dsigne le monde de lternit immuable. Le systme sensoriel
de l'homme ne pntre pas l'essence des choses. Au sein de l'Eon, l'ternit immuable, le nom,
l'essence mme de chaque chose, correspond une vibration dtermine, c'est une force
vibratoire d'une frquence prcise mais qui est cache aux hommes terrestres ordinaires parce
que leurs sens ne peuvent plus la capter. Dans l'ternit immuable les noms n'ont pas
d'existence et sont imprononables, ce sont des vibrations de l'ther subtil.
(9a) Un seul nom n'est pas prononc dans le monde, le nom que le Pre a donn au Fils. Il est
suprieur tout. C'est le nom du Pre. Car le Fils ne deviendait pas le Pre s'il ne revtait pas
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le nom du Pre. Ce nom, ceux qui le possdent le connaissent, mais ils ne le prononcent pas.
Ceux qui ne le possdent pas ne le connaissent pas.
Le nom Jsus , Yehoshoua en hbreu, contient les quatre lettres du Ttragramme divin, le
nom imprononable de Dieu. Il contient un "s" en plus, serait-ce le "shin" hbreux, une lettre de
feu, pouvant voquer galement le Fils, le Verbe, lagneau, sans oublier le s grec, initial de
str , sauveur ?
Le nom de Dieu est une irradiation de feu et de lumire, la force vibratoire fondamentale de
l'ternit immuable d'o toutes les autres forces sont issues, donc d'o est sorti l'univers et d'o
sont sortis tous les noms en tant que vibrations.
Dans ces conditions, il est comprhensible que l'on ne prononce pas le nom de Dieu ;
dailleurs il ny a pas de mot pour le dire, et si ce mot existait, le prononcer serait trahir
immanquablement sa signification intrieure profonde, ce qui est effectivement le cas de tous
les mots en ce monde...
Le nom de Dieu est une force vive dont il veut combler ses fils. Et comme Dieu est amour,
cette force de feu qui est l'amour divin vient combler le Fils, de sorte que le Fils, inond de cet
amour, s'oublie compltement en Dieu son Pre. Cette vibration de lumire, d'amour, de paix et
de flicit totale est indicible, inexprimable, imprononable dans le rgne terrestre. Ce nom
demeure donc secret bien qu'il ne le soit pas, et le fait que Dieu ait reu et reoive une infinit
de noms sur la totalit de la plante terre, est comprhensible, bien que ce soit tous des noms
trompeurs , des noms superficiels, sujets toutes sortes d'illusions.
L'initi parfait, le fils de Dieu, Jsus, prouve les vibrations issues de l'Eon, l'ternit
immuable, le pur domaine de la lumire divine, et en particulier, la force d'amour des immortels
fils de Dieu, eux-mmes tous pntrs de l'amour divin. Dans ce sens on peut dire que tout fils
de Dieu reoit le nom mme de Dieu. Et chacun retourne une vibration spciale d'amour en
action de grce pour l'amour divin reu, et cette vibration, aussi humble soit-elle, est sa
signature, son nom auprs de Dieu.
A celui qui vaincra je donnerai... un caillou blanc et sur ce caillou est crit un nom nouveau
que personne ne connat si ce n'est celui qui le reoit (Apocalypse 2, 17).
Le nom nouveau sur la pierre philosophale est la vibration nouvelle qu'met celui qui la reoit
et qui l'unit Jsus, donc son Pre. Par cette vibration, Jsus, le Fils de Dieu, reconnat son
serviteur tandis que son serviteur reconnat l'amour qu'il en reoit. Alors le serviteur peut dire
avec les anciens Rose-Croix: Jsus est tout pour moi et ajouter : ma vie n'est rien sans cet
amour du Pre.
Celui qui vaincra... j'crirai sur lui le nom de mon Dieu et le nom de la ville de mon Dieu, de
la nouvelle Jrusalem qui descend du ciel d'auprs de mon Dieu et mon nom nouveau. (Apoc.
3, 12).
(39) Si tu dis: je suis juif, personne ne bronchera. Si tu dis: je suis un Romain, personne ne s'en
affectera. Si tu dis: je suis un Grec, un barbare, un esclave, un homme libre, personne ne se
troublera. Si tu dis: je suis un chrtien, tous trembleront. Puisse-t-il m'arriver de recevoir ce
nom-l, que les archontes (archn) ne supportent pas.
Je suis chrtien ne veut pas dire je crois en l'homme appel Jsus-Christ, je pratique la
religion chrtienne... Ici le qualificatif de chrtien s'applique quelqu'un qui porte le nom de
Christ, qui est rceptif sa vibration d'amour, donc qui est li Christ de sorte qu'il est peu
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peu investi de sa force et de sa puissance; il s'agit donc d'une personne redoutable pour les
archontes qui tremblent devant elle parce qu'ils sentent inconsciemment que ce nom cache un
mystre puissant qui signifie la longue leur arrt de mort. Car ces archontes sont les
forces de la nature engendres par les hommes eux-mmes au cours de leur chute incessante,
forces dont les hommes sont devenus esclaves et prisonniers, et dont ils doivent finir par se
librer.
Dans le cas d'un vritable chrtien, ce nom cache le mystre indicible de la liaison entre un
homme terrestre et la force non terrestre de Christ, donc de l'Esprit, l'Esprit de consolation que
le Christ a dit lui-mme envoyer aux hommes, liaison concrtise par une vibration particulire
unissant l'un l'autre d'une faon absolument pure, dans l'insondable profondeur de la vie
intrieure, vibration que personne ne saurait jamais percevoir sur le plan uniquement terrestre,
moins que le corps terrestre ait au moins dpass quelque peu sa nature.
Celui qui est en liaison vibratoire avec l'Esprit reoit l'appui de l'Esprit dans sa lutte pour
dlivrer l'humanit de l'emprise des archontes, les princes de ce monde , d'o la frayeur de
ceux-ci. Pour essayer de se dfendre, ils tentent d'imiter cette pure liaison intrieure de
l'homme et de l'Esprit christique, imitation occulte qu'il faut dnoncer comme totalement impure,
puisante, malsaine, esclavage consumant et sans espoir, laissant dans l'me une sorte de
dgot, car elle sent obscurment quelle sombre ainsi dans un abme.
(27) Pre et fils sont des noms simples, l'Esprit Saint est un nom double; or ils sont partout: en
haut, en bas, dans l'invisible, dans le rvl. L'Esprit (pneuma) Saint est-il dans le rvl, il est
en bas; est-il dans l'invisible, il est en haut.
L'Esprit Saint est la Gnose: la connaissance entire et parfaite des choses divines prpare
pour tre rvle aux hommes terrestres. L'Esprit Saint, la Gnose, s'adresse aux hommes
dans le rvl , c'est--dire dans la manifestation terrestre, pour leur annoncer
l'omniprsence du Pre et de ses Fils bien-aims, qui cherchent les toucher de leur indicible
force d'amour.
(10) Les archontes voulurent tromper l'homme quand ils virent qu'il tait apparent (suggeneia)
ce qui est vraiment bon. Ils prirent les noms de ce qui est bon et les donnrent ce qui n'est
pas bon pour le tromper par les noms et le lier ce qui nest pas bon. Et aprs cela, sil leur
manifeste de la faveur, ils les enlvent de ce qui nest pas bon et les mettent ce qui est bon.
Ils connaissaient cela car ils voulaient s'emparer de l'homme libre et faire de lui leur esclave
pour toujours. Ce sont ces forces qui luttent contre l'homme, ne voulant pas qu'il se dlivre afin
de dominer sur lui comme sur un esclave.
En effet ce sont les archontes, les forces de la nature engendres par l'orgueil et l'gocentrisme
de l'homme lui-mme ds le dbut de sa cration, qui lui font croire la licence sous couleur de
libert, l'humanitarisme sous couleur du bien universel, l'hypocrisie sous couleur de religion,
l'absence d'me sous couleur d'art, la lutte et la rivalit sous couleur de sport, au meurtre
sous couleur de guerre juste, la science criminelle sous couleur de haut savoir et de grand
progrs, des doctrines mensongres sous couleur de vrit... internet sous couleur
d'universalit... l'imbroglio des lois et rglements sous couleur de justice... Ils imitent la vrit
pour lutter contre elle, et tout est retourn!
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Ces puissances sont les cratures de l'homme ; si l'homme leur chappe, il signe leur arrt de
mort. Le but des archontes est donc de conserver leur emprise sur lui en le manipulant pour le
soi-disant bien comme pour le soi-disant mal... en enlevant successivement la notion de mal
certains principes et en le leur restituant, ils manipulent les foules et les dominent soit par la
licence totale, soit par la culpabilit et la peur, c'est--dire par tous les sentiments ngatifs. Ils
se repaissent ainsi de toute l'nergie que dploient les hommes dans les diverses situations
auxquelles ils doivent bien faire face pour vivre et pour durer.
Cette vritable chute de la signification des mots, qui accompagne la chute incessante de
lhomme, se voit, par exemple, dans le mot orgie , qui voulait dire lorigine
rituel religieux , et mme, si lon prend la racine arabe, lvation vers Dieu , et maintenant
a pris la connotation de dbauche dans tous ses excs.
A Macbeth, dans Shakespeare, les sorcires commencent par annoncer une vrit afin de
l'entraner ensuite perptrer une srie de crimes, pour sa perdition puisquil sobstine dans
son erreur.
Heureusement :
(12a) Les archontes croyaient que ctait par leur puissance et leur volont quils opraient,
mais cest lEsprit Saint qui oprait en secret par leur entremise comme lui-mme le dsirait.
Donc, en dfinitive :
(28) Les saints sont servis par les puissances mauvaises. En effet celles-ci sont aveugles par
lEsprit Saint, en sorte quelles croient servir les leurs, alors quelles travaillent pour les saints.
Cest pourquoi un disciple posa un jour au Seigneur une question sur quelque chose du monde.
Il lui rpondit : Demande ta mre, elle te donnera une rponse qui nest pas delle (allotrion).
Dans la mesure o cest force dtre tromp et que lon finit par sen rendre compte, il est
alors possible de se tourner vers la vrit : les archontes travaillent donc pour ceux qui
deviendront un jour de vrais fils de Dieu.
La rponse de la mre sera-t-elle inspire par les archontes ou par lEsprit Saint ? Le rsultat
sera le mme la longue.
(37) Les aptres qui nous ont prcds l'appelaient ainsi: Jsus le Nazoren, le Messie, c'est--
dire Jsus le Nazoren, le Christ. Le dernier nom est Christ. Le premier est Jsus. Celui du
milieu est Nazaren. Messie a deux significations: le Christ et le mesurable. Jsus en hbreu
est la rdemption, Nasara est la vrit. Donc le Nazaren est l'homme de la vrit. Christ a t
rendu mesurable, et c'est le Nazaren et Jsus qui l'ont mesur.
Tous ces noms de nazaren, nazarnien, nazoren ont sans aucun doute un rapport avec le
mot hbreu naziren ou nazaren (traductions diffrentes suivant les Bibles franaises et se
rappeler qu'en hbreux il n'y avait pas de voyelles. Jsus de Nazareth est aussi traduit dans
certaines Bibles par Jsus le Nazaren) qui apparat, par exemple, dans la Bible au Livres des
Nombres (6,2 et 18,21) et se rfre des hommes consacrs Dieu depuis l'enfance. Or
daprs Marc 2, 22, Joseph et Marie portrent Jsus Jrusalem pour le prsenter au
Seigneur suivant ce qui est crit dans la loi du Seigneur: tout fils premier n sera consacr au
Seigneur... Il n'est pas douteux que l'adjectif naziren revienne ds lors Jsus. Par ailleurs
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Nazarens fut le nom donn un groupe de premiers chrtiens, Jsus ayant appartenu la
secte, ou mme l'ayant cre selon certains. Si on s'en rfre Lionel Rocheman dans Les
Manuscrits Nazarens de la Mer Morte , nazaren serait l'quivalent de notsrei , nom qui
dsignait certains chrtiens l'origine, et signifiant gardien, et gardien de la nouvelle
alliance en particulier, titre que se donnaient les Essniens. (A noter que Nazareth ne parat
pas avoir exist du temps de Jsus !)
Christ, messie pour les hbreux, est le nom de quiconque a obtenu une liaison (alliance) avec
les forces divines, qui a reu l'onction de l'amour de Dieu, qui est donc redevenu l'homme
parfait de l'origine, qui vit en Dieu et par Dieu. L'oint de Dieu se manifestant sur la terre est
mesur , cest-dire dtermin par les noms qu'il y reoit: Jsus et Nazaren. Jsus est un
nom terrestre voquant le chemin que montre lhomme appel Jsus pour parvenir la
dlivrance de l'assujettissement aux lois naturelles et slever dans le monde divin; Nazaren,
l'homme de la vrit, est vou Dieu avant mme sa naissance parce que, dans sa dimension
authentiquement spirituelle, il a achev son priple sur cette terre aprs un nombre suffisant
d'incarnations.
(15) Jsus est un nom cach, Christ un nom manifest. Cest pourquoi Jsus est semblable
dans toutes les langues, on lappelle toujours par le nom de Jsus. Dautre part, Christ est
messie en syriaque et christos en grec. Il est certain que tous les autres lont
conformment leur propre langue. Le nazaren est celui qui rvle ce qui est cach.
Christ possde tout en lui-mme, soit homme, soit ange, soit mystre, et le Pre.
Le Nazaren, lhomme de la vrit, rvle la vrit cache. Jsus est le nom de ltre qui, sur
cette terre, trouve la liaison mystrieuse et secrte avec le nom du Pre, sa vibration astral
particulire ; Christ est le titre de lhomme qui a reu lonction de Dieu sous forme de son amour
et de sa Gnose ; cest lhomme dont laura de lumire possde tous les attributs de la divinit,
puisquil ne fait plus quun avec le Pre et quil est donc le Pre lui-mme. Le Pre et moi
sommes un , dit Jsus (Jean 10,30). Jsus est le nom qui est au-dessus de tout nom , dit
Paul, car, on l'a vu, pour certain ce nom comporte toutes les lettres du nom sacr de Dieu.
(83,84,85) En ce monde, lunion est entre lpoux et lpouse, la force complte par la
faiblesse. Dans lEon, la forme de lunion est tout autre, bien quon lui donne le mme nom.
Cependant il y a dautres noms, suprieurs tous les noms donns, et suprieurs aux plus
forts. Car ici(-bas) il y a la force (bia) et ceux qui paraissent dominer par leur force. Mais ceux
qui sont l(-haut) ne sont pas deux choses distinctes, mais une mme chose. Ce qui est ici ne
pourra pas slever au-dessus du cur de la chair.
Dans lEon, lternit immuable, les mots ordinaires reprsentent dautres formes que celles
voques par ces mmes mots dans le monde terrestre. Dans le meilleur des cas les mots
terrestres sont des images, des abstractions qui tentent de traduire la ralit du monde divin,
laquelle est plus forte que tout ce qui est fort ici-bas. Bia veut dire force mais aussi violence.
Ceux qui rgnent par la force et la violence ont des noms suprieurs qui traduisent leur
puissance. Mais les noms donns dans lEon traduisent une supriorit bien plus grande.
Ici, lexemple est donn par limage de lunion entre lpoux et lpouse. Lunion terreste reste
charnelle, lunit parfaite de deux chairs est impossible. Lunion des curs et des mes donne
dj une meilleure ide de ce qui est nomm union dans le monde spirituel. Ceux qui sont dans
lEon, ou relis lEon, ne sont plus spars, ils ne forment plus quun seul et mme corps. Il
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sagit dune union en dehors de toute chair, quil est dj possible pourtant de ressentir ici-bas
dans la chair. Comprenne qui pourra.
Il y a les mots comme accouplement, liaison, union, mariage, mais il y a aussi les mots noces
alchimiques, mariage mystique, chambre nuptiale, union parfaite, corps de Christ, corps
mystique, qui sont des mots cachant une ralit qui est force, vigueur et puissance divine ; o il
nest plus question de masculin et de fminin, car lunion est parfaite. Lhomme de lumire,
lhomme-dieu primordial est androgyne.
(75b) Celui qui mprise le corps comme un haillon le considre comme un jouet (paignion, jeu,
plaisanterie) et le quitte en riant... Il en est de mme du pain, du calice et de lhuile alors quil y a
quelque chose dautre qui leur est suprieur.
Les noms donns aux choses ne sont qu'images pour rire. Le corps est un vtement
transitoire que l'on quitte en riant. Le pain et le vin du calice sont l'image de la nourriture
intrieure de l'me que procure l'amour de Christ, et l'huile est l'onction de son amour. Mais il
faut que ces images deviennent des ralits intrieures vivantes.
(69b) Les fils de la chambre nuptiale nont quun seul et mme nom, ensemble ils partagent le
repos...
La nostalgie dune pareille unit ternelle entre tous les tres est inscrite au cur de chacun,
mais trs peu en ont compris, et en comprennent la porte exacte, sur quel plan elle est
ralisable, et sa puret divine immacule.
(55c) On prononce le nom du Pre, du Fils et de lEsprit, et on le prononce mme sur autrui,
mais si on nacquiert pas vraiment ce nom pour soi-mme, le nom nous sera aussi repris...
La diffrence entre lglise extrieure et lglise intrieure est ici mise en lumire. Lidal est
lentente entre elles deux, en sorte que les symboles de lglise extrieure finissent par tre
rellement vcus dans lglise intrieure, et correspondent une exprience intime de la
sensibilit, de la conscience, de la psyche, puis de lintelligence, formant la longue une
nouvelle pense et une nouvelle attitude devant la vie en union profonde avec la pense divine.
III
La chambre nuptiale
19
Ainsi, le !solitaire!, au comble du dsespoir terrestre, est bientt au comble de la flicit la plus
profonde des
profondeurs de son tre, car il n'a plus rien en lui que
cette attirance irrsistible vers la source de sa flicit
20
(128 et 129) Si quelqu'un devient un fils de la chambre nuptiale, il recevra la lumire. Si quelqu'un ne la
reoit pas tant qu'il est dans ces lieux, il ne pourra la recevoir nulle part ailleurs. Celui qui recevra cette
lumire-l ne sera ni vu ni compris, et personne ne pourra l'affliger alors mme qu'il sjourne dans le
monde. Et quand il quittera le monde, il aura dj reu la vrit en images. Et le monde est devenu pour
lui l'Eon (lternit immuable), car il est pour lui la plnitude (plrma). Et il l'est de cette faon!: il lui
est manifest lui seul; il n'est pas cach dans les tnbres ni dans la nuit, mais il est cach dans un jour
parfait et dans une lumire sainte.
combl. C'est la naissance d'une me nouvelle, uniquement proccupe de la nouvelle dimension qui s'est
ouverte elle.
Le fils de la chambre nuptiale est l'homme qui, pas pas, suit le chemin de la perfection par son contact
intime avec l'amour divin. C'est l'homme pour qui l'impossible est devenu possible. C'est Jsus, ce sont
tous les grands par l'esprit. Encore sur cette terre, ils entrent dans l'Eon, le champ astral pur du monde
gouvern par la main toute puissante et magique de la Gnose: Dieu en tant que savoir suprme, et juge
suprme. Devenu explorateur de ce pays inconnu et
cach, mais qui finit par resplendir !dans un jour parfait et
une lumire sainte!, il se met collaborer son puissant gouvernement, et est admis auprs du Seigneur
de toute vie, qui va jusqu' partager avec celui qui la reconnu et qu'il aime, et qui l'aiment, sa toute
puissance elle-mme, puisqu'il est devenu lun de ses serviteurs fidles, ses fils vritables.
!Celui qui recevra cette lumire l ne sera ni vu ni compris.! Il s'agit de l'uvre de la vrit cache.
(66) En vrit, il faut dire un mystre. Le Pre du tout s'est uni la vierge (parthenos) qui tait
descendue, et un feu l'claira en ce jour. Il apparut dans la chambre nuptiale. C'est pourquoi son corps
qui fut produit en ce jour vint de la chambre nuptiale comme produit par le fianc et la fiance
(nymphios, nymph). C'est ainsi que Jsus a tabli toute chose par eux. Il est ncessaire que chacun des
disciples entre dans son repos (anapausis).
Il est aussi possible d'entrer en contact avec cet amour par l'amour humain. C'est le chemin des !cours
d'amour!, de l'amour courtois. Le pur amour terrestre, un amour d'une puret platonique, disons, qui peut
unir un homme une femme
est capable de soulever le voile cachant l'amour divin. Si les vibrations de cet amour puissant et quasi
thr atteignent celles de l'amour divin dont nous parlons, il y a phnomne de rsonance, et, sans le
savoir pour commencer, ceux qui s'aiment sont envelopps de l'amour du Pre. Leur chemin doit alors les
mener, parfois dans de grandes souffrances et de grands sacrifices, parfois par la mort mme de l'un des
deux, la reconnaissance que cette dimension d'amour particulire vient directement du Pre des
Lumires et non d'eux-mmes. Il serait possible d'voquer ici l'amour de Dante pour Batrice, et sans
doute de Ptrarque pour Laure.
bruissement des ailes de Gabriel de Sohravard, ou bien encore le doux et tranquille clapotis de la
!Fontaine du laboratoire! la fin du cinquime Jour des Noces alchimiques de Christian Rose-Croix;
tandis que le ple fminin, laspect lunaire, est combl par le rayonnement de lamour divin. Ces deux
forces sallient pour dissoudre peu peu le sel, qui est la matire. Et laxe de la colonne vertbrale, le feu
du serpent, devient lembryon du corps de lumire immortel dans un embrasement indicible.
Le!!bruissement des ailes de Gabriel! est une expression de Sohravard, que lon retrouve dans les
manuscrits de la Mer morte : ...Les ailes des chrubins font slever le son de la brise divine . A ce
propos, Dupont Sommer, aprs avoir signal que !les anges sont appels Esprits de la Connaissance dans
les Hymnes de Quoumrn!, poursuit en disant que !la secte essnienne, ainsi que certains auteurs
lavaient antrieurement pressenti, semble mme avoir t le foyer initial de ce mysticisme, de cet
sotrisme juifs qui connurent au Moyen Age, notamment avec la Cabale, dextraordinaires
dveloppements.!
Ce qui donne penser:
1/ que Shoravard (1155-1191) a pu avoir lu danciens manuscrits qui lui inspirrent lexpression le
bruissement des ailes de Gabriel , dont le sens premier donne bien limage de la vibration cleste
physiquement perceptible qui accompagne liniti sur le chemin de la Lumire.
Que ces deux ailes chez Shoravard soient orientes lune
vers la lumire, lautre vers les tnbres de ce monde en tant
que canal pour le passage de la lumire vers les tnbres,
limage du mouvement des bras des derviches tourneurs, ne change rien au sens premier ;
2/ que lauteur du Zohar, contrairement ce que lon pense aujourdhui, a bien d tre galement en
possession de quelques bribes de manuscrits trouvs en Egypte ou en Palestine, car on y rencontre des
images et expressions dont la ressemblance est frappante avec lEvangile de Philippe, ce qui appuie cette
hypothse. Mais il faut aussi remarquer que, mme si cette hypothse est fausse, elle reste vraie dans la
mesure o le gnostique initi a toujours la possibilit de puiser dans les trsors de la Connaissance
universelle, cest--dire de retrouver toute pense, parole ou image du pass - et mme de lavenir pour
exprimer un vcu prsent, en ralit ternel, ceci afin dexcuter sa tche dans ce monde, en loccurrence
formuler les transmutations alchimiques du plomb en or qui font de ltre humain form du !limon de la
terre! un homme de lumire .
Tout tre humain est anim par la force naturelle de reproduction qui le pousse vers le sexe oppos
puisque les sexes sont spars sur cette terre, et ceci afin de perptuer lhumanit. Cest ce que Philippe
qualifie de relation impure par rapport la relation pure , celle que lme peut connatre dans la
chambre nuptiale avec lpoux et lpouse au sens de lApocalypse.
La force de lpoux et de lpouse est lamour de Dieu, laspect la fois fminin et masculin.
Le processus de l'alchimie divine fait en sorte de transformer la pulsion sexuelle naturelle en dsir de
lamour divin.
Le mariage terrestre est l'image des noces clestes pures et immacules qui se clbrent dans la chambre
nuptiale entre
les mes et l'Esprit divin, union d'une grande puissance car l'me non seulement s'y fond dans l'Esprit,
non seulement s'y unit aux autres mes, mais y reoit de l'Esprit des pouvoirs
suivant l'usage qu'elle doit en faire pour rpandre la parole
de l'Esprit et sauver les hommes selon le plan tabli par lEsprit.
Chez Philippe, l'impur dsigne ce qui est charnel par rapport ce qui est spirituel; ce n'est pas un
adjectif pjoratif bien que pour le spirituel, le charnel devienne comme sans importance. Sans le mariage
charnel, sans les !esprits impurs!, c'est--dire la pulsion des forces de la nature, le monde terrestre
n'existerait pas ou disparatrait, or ce n'est pas le but... Le mariage charnel perptue l'homme terrestre, afin
de lui donner la chance de devenir un homme spirituel. Le mariage spirituel perptue l'homme spirituel en
lui assurant l'immortalit par son entre dans l'ternit de l'amour divin.
Aucune impulsion des forces de la nature n'a de pouvoir sur
l'homme ou la femme dont l'me s'est unie, dans l'astral pur, aux mes des librs de la matire, ces mes
qui servent de canal au courant de lamour universel. Le mot ange est rapprocher ici de ce mme mot
dans l'Apocalypse 22, 8. L'ange est une radiation de l'Eon, l'ternit immuable, le rayonnement de l'amour
divin, de la Gnose, qui donne la connaissance. Pour l'homme ou la femme terrestre, une telle radiation est
dcrite comme lpoux, ou lpouse, promis de toute ternit leur me. C'est la force de la vibration
christique, de la Lumire. Dans Philippe, lange signifie aussi la dimension cleste de lhomme terrestre.
A noter que les puissances naturelles crent une imitation de cette ralit dans lastral impur en suscitant
des visions danges, etc...
Ce paragraphe se suffit bien lui-mme, l'image est l pour clairer si possible notre aveuglement. La
volont s'y oppose au dsir!: Il appartient non au dsir terrestre, la volont de la chair, mais au dsir
cleste, la volont de lesprit. (On pourrait penser aussi quil y a interversion par une faute de copie!: Il
appartient non la volont mais au dsir...) De ces deux unions, l'une a lieu dans la nuit terrestre, l'autre
dans la lumire cleste.
(127) Tous ceux qui entreront dans la chambre nuptiale feront briller la lumire car ils ne sont pas
comme les mariages qui se font dans la nuit, dont le feu sallume seulement dans la nuit puis steint.
Mais les mystres de ce mariage s'accomplissent dans le jour et la lumire, ce jour et cette lumire qui ne
s'teignent pas.
(109) A l'ami de lpoux et aux enfants de la chambre nuptiale il est permis de pntrer tous les jours
dans la chambre nuptiale, mais les autres ne peuvent que dsirer entendre leur voix, jouir de leur parfum
et se nourrir des miettes de pain qui tombent de la table comme les chiens (Matth. 15, 27). Epoux et
pouses appartiennent la chambre nuptiale. Personne ne peut voir lpoux et lpouse moins de le
devenir soi-mme.
Il est possible de faire ainsi la coupure entre 108 et 109, si l'on rapproche ce texte de celui de l'Evangile
de Jean 3, 29 : !Celui qui appartient l'pouse, c'est l'poux; mais l'ami de l'poux qui se tient l et qui
l'entend, prouve une grande joie cause de la voix de l'poux; aussi cette joie qui est la mienne est
parfaite.!
Celui qui s'unit au cleste dans la chambre nuptiale est
comme l'poux d'une pouse cleste, et l'ami de l'poux en
conoit de la joie; du fait mme de sa liaison avec l'poux,
il a part la vibration (la voix) de l'amour divin qu'a partag l'poux. L'amour divin se transmet aux amis
de l'poux, ralit merveilleuse qui claire les relations entre frres et surs d'un vritable groupe spirituel
gnostique. Et
Jean l'atteste: sa joie est parfaite. Comme il a reconnu Jsus, il participe l'amour divin que Jsus
transmet ceux
qui l'aiment, la liaison d'amour que Jsus a avec celui
qu'il appelle son Pre, liaison que l'on peut comparer
celle d'un poux avec son pouse. Cette vibration d'amour
sinscrit dans le champ astral du groupe qui en bnficie
tout entier. Jsus est une image.
Comme les sexes sont spars sur cette terre, la femme s'unit un poux dans la chambre nuptiale
divine et l'homme une pouse, nomme parfois Sophia.
!Et l'Esprit et l'pouse disent: Viens. Et que celui qui
entend dise: !(Je) viens!. Et que celui qui a soif vienne;
que celui qui veut, prenne de l'eau de la vie, gratuitement!
(Apocalypse 22, 17).
L'eau de la vie est l'image terrestre de l'amour divin. Les
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(62a) Il y avait Jrusalem trois lieux d'offrande. Le premier, vers l'ouest, tait appel !le Saint!. Le
deuxime,
vers le sud, tait appel !Le Saint du Saint!. Le troisime,
vers l'est tait appel !le Saint des Saints!, l'endroit
o seul le grand-prtre pntre. Le baptme est le Saint, la
rdemption est le Saint du Saint, la chambre nuptiale (nymphn) est le Saint des Saints. Le baptme
implique la rsurrection et la rdemption. La rdemption a lieu dans la chambre nuptiale. mais la
chambre nuptiale est ce qui est suprieur... Jrusalem, le voile spare le Saint des Saints... Mais la
chambre nuptiale (pastos) est limage de la chambre nuptiale (nymphn) qui est au-dessus de limpuret.
Son voile sest dchir de haut en bas car il convenait quelques-uns den bas de monter en haut.
!Et voici, le voile du temple se dchira du haut jusquen bas...! (Mat. 27, 51).
Citation du Zohar (II, 99a, in: Paracelse le Mdecin maudit, Ren Allendy, Dervy-livres, p.29) dans
laquelle la !Loi signifie la Vrit dans la tradition juive:
"Les mystres de la Loi sont comparables une amante
resplendissante enferme dans la chambre d'un palais. Elle a
un ami, seul connatre les sentiments de son amour. Comme
l'ami, pouss par le dsir de voir son amante, passe souvent
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devant le palais en jetant des regards de tous cts, l'amante se dcide pratiquer une petite ouverture
dans le mur de son palais et, au moment o elle voit passer son amant, elle approche son visage pour un
instant. Il est seul le voir parce qu'il est le seul dont les regards, le cur et l'me soient dirigs vers la
bien-aime. D'abord la Loi fait signe l'homme d'approcher. Elle lui parle travers un rideau, et c'est
l'interprtation syllogistique (par le raisonnement, !Derasha!). Ensuite, elle lui parle travers un voile
transparent et c'est l'interprtation symbolique (!Agada!); enfin elle se montre lui face face (c'est
l'interprtation mystique), et l'homme devient matre de la Loi et matre de la maison car tous les mystres
lui sont rvls...!
(119b) En effet un voile commence par dissimuler comment Dieu gouverne la cration. Mais quand le
voile se dchire et que l'intrieur se manifeste, on abandonne la maison vide, et mme on la dtruit.
La maison vide!: la conscience noye dans les ides fausses parfaitement illusoires, et aveugle par tous
les dsirs passionns dun bonheur galement faux...
(120) Mais la divinit infrieure ne fuira pas de ce lieu vers le Saint des Saints, car elle ne sera pas
capable de s'unir la lumire sans mlange ni la plnitude sans faille, mais se tiendra sous les ailes de
la croix et sous ses bras. Cette arche (kibtos) sera son salut lorsque le dluge des eaux la submergera.
Les indignes que nous sommes, pleins de la volont davancer vers le Saint des Saints, sont sous !les
ailes et les bras de la croix!!: suffisamment et jamais marqus par la souffrance avant de pouvoir
accepter cette souffrance jusqu la mort en nous des illusions terrestres, avant de pouvoir apercevoir au
loin, labri sous larche de la croix au milieu des catastrophes, la lueur clatante du soleil son lever, les
premiers feux, lorient, de la rouge aurore.
(kibotos est le mot employ par Paul pour parler de larche de No aussi bien que de larche dalliance,
ces deux arches reprsentant la mme chose!: la protection par grce divine puis la liaison avec le divin.)
(121) Si quelques-uns sont dans l'ordre de la prtrise, ils pourront pntrer derrire le voile avec le
grand-prtre.
(122) C'est pourquoi le voile ne s'est pas dchir seulement en haut, car il ne se serait ouvert qu' ceux
d'en haut, ni ne s'est dchir seulement en bas, car il ne se serait manifest qu' ceux d'en bas. Mais il
s'est dchir de !haut en bas!. Le haut s'est ouvert pour nous qui sommes en bas afin que nous entrions
dans le secret de la vrit. Voil vritablement ce qui est tenu en haute estime et qui est puissant. Or nous
pntrerons l grce de vils symboles et des choses faibles et basses en vrit compars la gloire
parfaite.
(123) Il y a une gloire qui surpasse la gloire, il y a une puissance qui surpasse la puissance. C'est
pourquoi la perfection s'est ouverte nous avec le secret de la vrit, et le Saint des Saints s'est manifest
et nous avons t convis dans la chambre nuptiale.
Pour le fils de Dieu, l'homme parfait, la gloire intrieure surpasse la gloire terrestre, la puissance
intrieure surpasse toute puissance terrestre, puisque gloire et puissances intrieures seront la gloire et la
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puissance mme du Pre. Et cette gloire et cette puissance seront peu peu acquises grce de pauvres
images et de vils symboles !
(22a) Ne mprisez pas lagneau, car sans lui, il est impossible de voir la porte.
Pour finir une citation du !Miroir des mes simples et ananties! de Marguerite Porete, mystique
bguine brle vive Paris en 1310!:
!(Cette me) est venue de la mer et a reu un nom, puis elle y rentre et perd ainsi son nom, et elle nen a
plus dautre que celui en quoi elle est parfaitement transforme, cest--dire celui de lamour de lpoux
de sa jeunesse, lui qui a transform lpouse tout entire en lui!: il est, donc elle est!; cela lui suffit
merveilleusement, elle en est donc merveille...
Autrement dit :
Le fianc et la fiance renaissent enfants de Dieu dans la chambre nuptiale. Un grec descend
de parents grecs, mais il renat juif par la Loi (juive). Le juif, n de parent juif, renat chrtien.
Ici, remplacer devenir par renatre, renatre sur un autre plan, dans un autre domaine, dans
une autre nature.
Le fils du fils de Seth, ressemblera Seth, le vrai fils de Dieu. Et ceux qu'il engendrera
visiblement, c'est--dire
recrera : en qui il transmettra la force et la lumire qu'il a reues, ce qui est son devoir de fils
de Dieu, deviendront sa propre image, c'est--dire deviendront eux-mmes fils de Dieu.
(23) Les fils de l'homme cleste sont plus nombreux que ceux
de l'homme terrestre. Si les fils d'Adam sont nombreux bien
qu'ils meurent, combien plus nombreux sont les fils de
l'homme parfait, eux qui ne meurent pas mais sont
perptuellement rgnrs.
Les fils de l'homme cleste, les hommes rens d'eau et desprit , sont tous frres
immortels. C'est la grande foule que personne ne peut compter, de toute nation, de toute
32
tribu, de tout peuple et de toute langue... Ceux qui sont revtus de robes blanches... ce sont
ceux qui viennent de la grande tribulation ; ils ont lav leurs robes et ils les ont blanchies dans
le sang de l'agneau ; ils n'auront plus faim, ils n'auront plus soif, et le soleil ne les frappera
point, ni aucune chaleur. Car l'agneau qui est au milieu du trne les patra et les conduira aux
sources des eaux de la vie, et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux (Apocalypse 7,9-17).
Les fils d'Adam, les hommes mortels, sont aussi tous frres, mais frres ennemis, qui sentre-
tuent en paroles et en actes.
Tous ces frres rens, quils soient morts ou vivants, font partie de la grande Fraternit des
librs, la Fraternit des hommes immortels qui, en tout temps, soutiennent les chercheurs sur
le chemin de leur retour Dieu. Ils en font des fils de Dieu, qui leur tour deviennent leurs
frres.
Dans le royaume immuable de l'amour divin, les hommes engendrs par lEsprit renaissent
tous frres.
Si les hommes, qui implorent d'en bas, car ils entrevoient la promesse de pouvoir s'lever,
parviennent pntrer dans le Mystre et y progresser, ils dcouvriront victorieusement la
merveille de leur union dans la grande sphre du corps de l'homme cleste, o ils forment
ensemble le fils unique du Pre, son amour enfin retrouv.
(68) Les uvres de l'homme viennent de sa force naturelle(dynamis). Ce sont ses forces. Ses
enfants sont ses uvres ; ils proviennent d'un moment de repos (anapausis). Sa force est dans
ses uvres tandis que ce moment de repos se manifeste dans ses enfants. Vous verrez que
ceci s'applique une image. Voici l'homme d'aprs l'image: il fait ses uvres grce sa force,
mais c'est dans un moment de repos qu'il engendre ses enfants.
Tandis que lhomme engendre ses enfants, ses uvres, par la force de la nature dans un
moment de repos, le fils de Dieu transmet son enseignement ses disciples, c'est--dire ses
enfants, par la force divine qui lhabite, et c'est dans la paix, le repos, le secret et le silence
intrieur que s'opre en eux la liaison avec la Gnose qui les transforme en enfants de Dieu, en
fils de lumire.
L'tre dans son vtement (de peau, Gense 3, 21) de chair et de sang prissables est nu et
prissable. L'eau vive confre peu peu la robe des noces, le vtement de lumire qui permet
d'apparatre devant le Roi. Si quelqu'un descend dans l'eau vive du cratre d'Herms, il se
dbarrasse peu peu de son corps de chair et de sang et revt le corps de lumire. Morte sur
la croix plante dans la terre, la chair renat spirituelle et divine, et l'homme vtu de lumire peut
s'avancer vers le Roi.
Ni les forces naturelles, ni les puissances occultes ne les voient, car le Roi protge ses
enfants de lumire en les rendant invisibles ces puissances, intouchables et inviolables par
elles, car ce vtement de l'amour les a purifis de tout mal.
On pourrait dire aussi que si lon ne voit que ce que lon est, les puissances malfiques sont
dans lincapacit de voir ceux qui sont revtus de lumire parfaite, comme il est expliqu dans
le paragraphe suivant :
(35) Il est impossible de voir les choses qui existent vritablement sans tre comme elles. Il
n'en est pas ainsi de l'homme dans ce monde qui voit le soleil bien qu'il ne soit pas le soleil, qui
voit le ciel et la terre et toutes choses en n'tant rien de celles-ci. Mais si tu vois quelque chose
de ce lieu-l c'est que tu es devenu cela. Tu as vu l'Esprit, tu es devenu esprit. Tu as vu le
Christ, tu es devenu Christ, tu as vu le Pre, tu es devenu le Pre. C'est pourquoi ici tu vois
toute chose sans te voir toi-mme, mais en ce lieu-l tu te vois car ce que tu vois, tu l'es
devenu.
Cest ici une image de ce qui oppose les connaissances acadmiques la connaissance ,
la Gnose, qui est rvlation intrieure, perception intrieure d'un tat vibratoire particulier
manant des Fraternits qui nous guident sur le chemin du retour. Si tu perois intrieurement
l'amour des frres de la Fraternit christique, c'est que tu bois la coupe du Graal et reois sa
lumire intrieure : tu es devenu toi-mme frre du Graal. C'est que tu t'immerges dans le
cratre d'Herms.
Savoir que la mer existe, la voir ou s'y plonger constituent plusieurs visions trs diffrentes.
La Gnose est savoir par immersion puis transformation.
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Le sentiment amoureux qui fait que lon dsire devenir cet autre que lon aime en se mlant
sa chair, en dsirant ne faire plus quune seule chair , en voulant pntrer ses penses au
point de navoir plus quune seule pense, est une ralisation impossible ici-bas, car si lon voit
bien lautre, on ne peut pas devenir cet autre. Cependant ce dsir est limage selon laquelle
voir voudrait dire devenir : ralisation authentique sur le plan de la Gnose.
(87 et 88) Non seulement ils ne pourront pas saisirent l'homme parfait (teleios) mais ils ne
pourront mme pas le voir. Car sils le voyaient, ils le saisiraient. Il n'y a pas d'autre moyen
d'acqurir pour soi cette grce (charis) que de revtir la lumire parfaite et de devenir soi-mme
lumire parfaite. Quiconque la revtira entrera dans le royaume. Telle est la lumire parfaite et il
convient que nous devenions des hommes spirituels parfaits avant de quitter le monde. Celui
qui a tout reu mais ne s'est pas rendu matre de ces lieux-ci ne sera pas capable d'tre matre
de cet endroit-l, mais il ira dans le milieu, tant imparfait. Seul Jsus en connat la fin.
Teleios = achev, accompli, et aussi tout puissant. Nul ne peut voir l'homme parfait engendr
par l'Esprit s'il
n'est lui-mme illumin sur le chemin de la lumire
parfaite. Et quiconque veut accder la lumire doit
s'engager sur ce chemin dans sa vie terrestre bien avant sa
mort. Celui qui a obtenu une liaison avec la lumire ici-bas
continuera d'uvrer avec la lumire dans les lieux d'en
haut; autrement il va dans le milieu, l o l'homme terrestre
meurt tout entier, mais l aussi o ltincelle de lumire spirituelle qui lhabitait se rincarne
dans un autre corps de chair, jusqu la victoire finale : l'humble reconnaissance de la lumire
par lhomme de chair et de sang, et, grce sa rceptivit la lumire, sa transmutation en
lumire.
(38) La perle, si elle est jete dans la boue, na pas moins de valeur, et si on loint dune
substance odorifrante (opoboron), elle nen acquerra pas davantage, mais elle a toujours la
mme valeur pour son propritaire. Ainsi en est-il des fils de Dieu ; o quils soient, ils gardent
toujours leur valeur auprs de leur Pre.
Terrass, meurtri et mme souill, lenfant de Dieu invisible contemple la perle cache qui
resplendit dun merveilleux orient dans la lumire de son cur, sceau de son appartenance
son Pre.
(21) Jsus leur a tout drob. car il ne s'est pas rvl tel
qu'il tait, mais comme ils taient capables de le voir. Il leur est apparu tous : grand aux
grands, petit aux petits, ange aux anges (agglos) et homme aux hommes. C'est pourquoi sa
parole tait cache tous. Quelques-uns le voyaient croyant se voir eux-mmes. Mais quand il
apparut ses disciples dans la gloire sur la montagne, il n'tait pas petit, il tait devenu grand,
et il grandit ses disciples pour qu'ils fussent capables de le voir dans sa grandeur. Et il dit ce
jour-l dans sa reconnaissance (eucharistia) : Toi qui unis la lumire parfaite l'Esprit Saint,
unis aussi les anges aux images que nous sommes.
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Contrairement une ligne volutive laquelle on serait tent de croire, les magies dites
primitives sont les tristes et grossires dformations que les hommes font chaque fois subir la
magie de la vrit au cours des millnaires. Cette dgnrescence du vrai et de lauthentique a
lieu inluctablement, et rien jusqu prsent ne semble avoir pu lempcher nulle part. Cest
pourquoi la rvlation de la vrit est priodiquement ncessaire. Seul qui avance sur le chemin
de linitiation la vrit peut donner une explication plausible et le sens originel des pratiques
de magie primitives. Toutes sont dailleurs relies aux grands thmes ternels que lon retrouve
dans tous les mythes et mystres antiques, dans toutes les religions tablies et dans toutes les
rvlations authentiques. Surtout elles tmoignent du souvenir confus mais ineffaable de
lexistence dune puissance cache, souvenir que le matrialisme intransigeant et un
rationalisme ttu nont pas encore russi faire compltement disparatre.
Lvangile de Philippe dit toujours plusieurs choses la fois, comme tous les textes vraiment
inspirs. Chacun y voit ce qu'il peut, donc ce qu'il est.
C'est l'explication de la parole de Jsus: Laisse les morts ensevelir leurs morts (Matt. 8,
22).
Paradoxe et jeu dimages. Dans les vangiles, Jsus est pourtant bien mort avant de
ressusciter ! Cest une image. Pour que lme divine, la vraie fille de Dieu, Christ, ressuscite, il
faut que lhomme terrestre soit mort ce monde. Tous ceux qui, en ce monde, ne vivent pas de
lme divine, sont considrs comme dj morts et sans possibilit de rsurrection. Une
rincarnation ou une suite de rincarnations du principe spirituel aura lieu.
Lme divine est lme rene dans la chambre nuptiale, lieu quvoquent la nuit obscure de
Jean de la Croix... et, en alchimie, la formule du vitriol : visita interiora terrae rectificando
invenies occultum lapidem, visite lintrieur de la terre en te rectifiant, tu trouveras la pierre
cache ; descends dans les profondeurs les plus obscures de toi-mme avec le dsir den
connatre et expurger tout ce que tu crois tre mal, tu trouveras la pierre philosophale, la
lumire de Christ, la Gnose.
Il vient, les bras tendus, dployant ses ailes, embrassant la gauche et la droite , la dualit
du monde, tous les peuples et toutes les tribulations du monde quil subit lui-mme, en
exemple, pour les partager avec le monde, ce monde quil crucifie, afin que le monde finisse par
comprendre que le vrai monde nest pas ce monde.
La terre est la croix: la douleur et la mort. Le signe de la plante terre contient une croix.
Telle est la croix de lumire de Jean, la croix de lumire des Rose-Croix, eucharistia ,
laction de grce perdue.
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De deux faire un : de lhomme terrestre et de son double divin, ne faire quun ; de limage
et de lange, ne faire quun.
Ici, Jean rencontre encore une fois Jsus... Cette reconnaissance de Jsus par Jean, par
Paul, et finalement par toutes sortes de sectes gnostiques du Ier et IIe sicles, malgr leurs
grandes divergences, nest pas particulire la grande glise de Rome ses tout dbuts. Elle
sest faite progressivement bien avant lmergence de celle-ci et dans toutes sortes de groupes
de chercheurs spirituels. Cest le mystre mme du nom de Jsus, un nom porteur de lamour
du crateur pour ses cratures perdues, quil veut ramener lui. La puissance attirante et quasi
magique (et il sagit ici de la vraie magie, de la magie gnostique, de la magie divine) de ce nom
a finalement t reconnue comme une force intrieure, lpoque, par les vrais chercheurs de
vrit. A lorigine de toutes les religions, de tous les mouvements spirituels authentiques, cette
force fut prsente et reut un nom particulier. Ce qui explique la tentative minente de Mani
d'unification des religions de son poque.
(Cest que le nom reprsente une certaine force
vibratoire, comme dit au chapitre II).
(101a) Et bienheureux le serviteur qui n'a pas dsespr une me. Celui-ci est Jsus le Christ.
Il s'est prsent (apantn) partout et n'a accabl (barein) personne. Bienheureux donc celui qui
est comme lui parce qu'il est un homme parfait (teleios). Il est effectivement la parole (Logos).
(102) Parlez-nous de lui, car c'est difficile d'y russir. Comment russir une si grande chose?
Comment donner le repos chacun? Avant tout il convient de n'affliger aucune personne, soit
grande, soit petite, soit croyante (pistos) soit incroyante; ensuite de donner le repos (anapausis)
ceux qui font le bien.
Le plus bel exemple dun tel comportement est celui de Jsus face la femme adultre, que
les juifs veulent lapider selon leur loi. Il leur dit : Que celui de vous qui est sans pch lui jette
la premire pierre... Quand ils entendirent cela ils se retirrent un un... Et Jsus resta seul
avec la femme qui tait l au milieu... Jsus lui dit : Femme, o sont ceux qui taccusaient ?
Personne ne ta-t-il condamne ? Elle rpondit : Non, Seigneur. Et Jsus lui dit : Je ne te
condamne pas non plus ; va, et ne pche plus (Jean, 8).
On pourrait y voir aussi luvre de la vraie magie, la magie qui accompagne tout vritable
initi, la magie mme du Pre, la magie qui fait que le prtre-roi initi na qu penser, et la
chose sexcute.
(103) Certains trouveraient bien de donner le repos celui qui a une belle situation (kals).
Mais celui qui fait le bien ne peut pas le donner de telles personnes car elles vont l'encontre
de sa volont. Mais comme il lui est impossible daffliger quelquun, il ne les afflige pas. Il est
certain que ceux qui ont une belle situation affligent des gens, non dlibrment mais par leurs
dfauts (kakia). Celui qui possde la nature (du bien) donne la joie ceux qui sont bons, ce qui
affligent certains vilainement.
41
Un cho de la parole biblique (2Chroniques 19, 7) : Car il ny a chez Dieu... pas dgards
pour lapparence des personnes... parole reprise par Paul plusieurs fois, par exemple dans
Rom. 2, 11.
(32) Il y a des btes soumises l'homme comme le buf, l'ne et autres. D'autres ne sont pas
soumises et vivent seules au dsert. L'homme laboure le champ laide des btes soumises, et
grce cela il se nourrit ainsi que les btes soumises ou non soumises. De mme l'homme
parfait : il laboure avec les forces naturelles (dynamis) qui lui sont soumises, prparant chacun
venir l'tre. C'est ainsi que tout est redress, soit les bons, soit les mchants, et ceux de
droite et ceux de gauche. L'esprit les mne tous patre et gouverne toutes les forces, les
soumises et les non soumises ainsi que les uniques. Il les rassemble et les enclt afin que ceux
qui le voudraient ne puissent s'enfuir.
(100b) La grce (charis) agit comme un paysan, et les fruits de la semence de ce paysan sont
les hommes qui montent vers les hauteurs du ciel.
(25b) Si la parole (logos) sortait de la bouche, elle nourrirait par la bouche et ferait devenir
parfait. En effet c'est par un baiser que les parfaits fcondent et enfantent. Pour cette raison
nous nous embrassons aussi les uns les autres, et nous sommes fconds par la grce (charis)
des uns et des autres.
Ce n'est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l'homme, mais ce qui sort de la
bouche (Matthieu, 15, 11). Si c'est le Logos, la parole de vrit qui sort de la bouche d'un
homme, non seulement il travaille au perfectionnement d'autrui mais il avance lui-mme sur le
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chemin de la perfection. Le mot baiser est ici l'image de l'amour spirituel, une grce qui a le
pouvoir de faire renatre spirituellement. Les parfaits par leur amour fcondent les hommes
terrestres en leur communiquant un rayon de la lumire christique afin qu'ils deviennent eux-
mmes des hommes parfaits. C'est pourquoi aimons-nous les uns les autres car ainsi nous
travaillons notre renaissance mutuelle et par cette liaison des uns aux autres nous nous
transmettons la grce qui est en chacun de ceux qui sont unis l'Esprit.
(26) Il y en avait trois qui marchaient toujours avec le Seigneur : Marie sa mre et sa sur et
Madeleine appele sa compagne. Sa sur, sa mre et sa compagne taient Marie.
Marie est l'image de l'me. Sa sur, sa mre et sa compagne taient des mes rendues
spirituelles par leur comprhension non seulement des paroles de Jsus mais de son amour ;
toutes trois ne faisaient qu'une seule me avec Jsus, telle est la puissance de lamour dans la
Gnose. Pour Jsus, l'me aime est sa mre, sa sur et son amante ; inversement, pour l'me
spirituelle, Jsus, la force d'amour gnostique, est pre et mre, frre et sur, amant et amante.
Ceux qui cherchent tout prix lamour, comprendrons bien quil sagit l de lamour aprs
lequel ils courent dsesprment sur le plan strictement terrestre ; ce quil faut sans doute faire
pour finir par trouver sa dimension suprieure sur le chemin de la rsurrection.
(44b, 45) Et la compagne du fils est Marie Madeleine. Le Seigneur l'aimait plus que tous les
disciples et il l'embrassait souvent sur la bouche. Les disciples le voyaient et ils lui dirent :
Pourquoi l'aimes-tu plus que nous tous ? Le sauveur rpondit et leur dit : Comment se fait-il
que je ne vous aime pas autant qu'elle ? Un aveugle et quelqu'un qui voit, quand ils sont tous
deux dans l'obscurit, ils ne se distinguent pas l'un de l'autre. Si la lumire vient, alors celui qui
voit verra la lumire, alors que celui qui est
aveugle demeurera dans l'obscurit.
Non seulement Marie Madeleine, inspire et illumine intrieurement par l'amour de Jsus,
prononce des paroles de vrit (Cf. Pistis Sophia, l'Evangile de Marie, etc.) mais elle a reconnu
et vu la lumire qui est en Jsus, contrairement aux disciples encore aveugles, c'est pourquoi
Jsus l'aime plus qu'eux tous et embrasse cette bouche d'o sortent des paroles de vrit.
Voil encore une image qui, en ralit, nen est pas une : cest bien une ralit vcue sur la voie
qui mne l'homme parfait.
(13) Plusieurs disent que Marie a conu de l'Esprit (pneuma). Ils se trompent, ils ne savent pas
ce qu'ils disent. Quand une femme a-t-elle jamais conu d'une femme ? Marie est la vierge
qu'aucune force naturelle (dynamis) n'a souille. Elle est un grand anathme pour les Hbreux,
qui sont les aptres et les apostoliques. Cette vierge qu'aucune force n'a souille est
immacule, et les forces naturelles se souillent. Et le Seigneur n'aurait pas dit : Mon Pre qui
est dans les cieux, s'il n'avait pas eu un autre pre, il aurait dit simplement : Mon pre.
Ici il faut voir encore un jeu entre le sens propre et le sens figur de Marie. Marie, mre
terrestre de l'homme Jsus, n'a pas conu par l'Esprit (mot fminin en grec et en copte) mais de
faon naturelle, et Joseph est bien le pre terrestre de Jsus comme Philippe le laisse
entendre.
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Par contre aucune force terrestre (dynamis) ne peut souiller, violer l'me pure, vierge. Cette
me pure et vierge conoit et fait natre en elle Jsus, l'me vritable, l'me cleste, l'me
christique ; cette nouvelle me est une prsence qui commence par natre dans le cur puis
dans le plexus solaire avant d'immerger la tte puis le corps entier dans une vibration
harmonieuse et de l'embraser tout entier d'une paix et d'un amour infinis. La cellule de lumire
que possde le plerin en chemin vers la porte des Mystres est fconde par la Gnose,
l'Esprit, et le dveloppement final en sera l'homme parfait, le fils de Dieu.
Cette image gnostique, reprsentation dune ralisation spirituelle parfaitement concrte, tait
anathme pour les tenants officiels de la religion juive, et fut par la suite galement
condamne comme hrtique par le catholicisme romain.
C'est probablement ce qui a entran la confusion que fait l'glise de Rome en parlant d'une
femme terrestre, vierge, conue sans pch, immacule, ayant engendr par lEsprit Saint un
homme terrestre, le fils de Dieu, Jsus... En tant qu'glise extrieure, l'glise de Rome a d,
videmment, simplifier son enseignement, ce qui a conduit des aberrations thologiques,
lesquelles ont provoqu des discussions et des disputes sans fin, sans parler de l'ironie
suscite chez les scientifiques athes. Dire que Marie a conu
Jsus naturellement par Joseph est donc aussi anathme pour cette glise que pour les
juifs qui ne reconnaissent mme pas Jsus comme un prophte, et plus forte raison comme le
messie, quils attendent toujours.
Le dessin de Lonard de Vinci (Londres, National Gallery), ne reprsente pas du tout Marie
sur les genoux d'Anne, sa mre, selon l'explication officielle, mais l'me rene dans les bras de
l'Esprit, qui lui montre du doigt le chemin. Elle doit mettre au monde deux enfants : Jean, c'est-
-dire l'me qui se purifie et prpare la venue de Jsus, lequel est l'me vritable, loint de Dieu,
l'homme parfait. Tel est le chemin de l'initiation sotrique.
Il faut que loiseau qui sort de luf dor ait la tte coupe pour quapparaisse lme-esprit
christique dans les Noces alchimiques de C.R.C.
Marie, lme pure, est un grand anathme pour les Hbreux, qui sont les aptres et
apostoliques. Je mets anathme entre guillemets parce qu'en grec ce mot a deux significations.
On pourrait traduire par condamnation, interdit, ou par offrande, ornement. Sur le chemin de la
transmutation de l'homme terrestre en homme cleste, il y a transmutation totale de l'tre
humain, transmutation de tous ses pouvoirs naturels, donc du pouvoir sexuel.
Celui-ci devient l'organe de liaison avec la Gnose, l'Esprit, donc un moment donn, sur le
chemin, ce pouvoir acquiert une fonction spirituelle. On pourrait parler d'une offrande aussi
bien que d'un interdit , mais sans aucune contrainte ni obligation, signifiant plutt le
dveloppement glorieux d'un pouvoir dont on sent trs bien les limites ici-bas. Pour certains
aptres, qui taient juifs, ce dveloppement ne cadrait pas avec la loi mosaque, comme
d'ailleurs tout l'enseignement de Jsus compris de faon spirituelle intrieure. Ce
dveloppement est aussi une sorte de scandale pour ces athes modernes dcids cultiver
l'amoralit totale et la jouissance sensuelle tout prix. La gloire finale et absolue, sur tous les
plans, de l'homme parfait leur sera interdite sils ne finissent pas par reconnatre un jour quil y a
une possibilit de transmutation des pouvoirs naturels sur un plan suprieur.
Ces considrations expliquent galement ce qu'on appelle dans l'glise de Rome le " vu de
chastet ", rsultat d'une
incomprhension et dune ignorance totales du vritable dveloppement spirituel intrieur.
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(36)La foi reoit, lamour donne. Personne ne peut recevoir sans la foi. Personne ne peut
donner sans lamour. Cest pourquoi nous avons la foi afin de recevoir, et nous devons aimer
afin de donner vraiment, car celui qui donne sans amour nen a aucun profit. Celui qui na pas
reu le Seigneur est encore un Hbreu.
(77) Les choses ne sont pas incorruptibles mais les fils le sont. Personne ne recevra
lincorruptibilit moins de devenir dabord un fils.
(78) Mais Celui qui na pas le pouvoir de recevoir, combien davantage sera-t-il incapable de
donner.
Sur le chemin des Mystres, celui qui a reu reoit le pouvoir de donner.
Car :
(94) Lamour ne prend rien. Comment prendrait-il quelque chose, tout lui appartient. Il ne dit
jamais : ceci est moi, ni cela est moi, mais tout est vous.
(93) Mais l'amour difie (1Cor. 8, 1), et celui qui est devenu vraiment libre par la connaissance
devient, par amour, l'esclave de ceux qui n'ont pas pu atteindre la libert de la connaissance. La
connaissance les rendra capables de devenir libres.
(69a) En ce monde, les esclaves travaillent (upretein) pour
les hommes libres ; dans le Royaume des cieux les hommes
libres servent (diakonein) les esclaves; les fils de la
chambre nuptiale servent les fils du mariage (terrestre, gamos).
(99) Celui qui est esclave contre sa volont, pourra devenir libre. Celui qui est devenu libre par
la grce de son Seigneur et se rend lui-mme esclave ne pourra plus tre libre.
savent, l'acceptent et continuent, par amour, tre leurs esclaves afin de tenter de leur
transmettre lamour queux-mmes reoivent dans la chambre nuptiale. Ils savent que cest
possible, ils savent que cest leur mission divine, ils savent que cest la loi divine laquelle ils
sont assujettis, ils savent que lunion de tous les hommes dans lamour divin est la destine
finale de lhumanit, et ils y travaillent.
(104) Un matre de maison avait acquis beaucoup: fils, serviteurs, btail, chiens, parcs, bl,
orge, paille, fourrage, os, viande et glands. Comme il tait avis, il connaissait la nourriture de
chacun. Il donnait aux enfants du pain, de l'huile d'olive et de la viande, aux esclaves l'huile de
ricin et du bl, au btail de l'orge, de la paille et du fourrage, aux chiens des os, aux cochons
des glands et des crotes de pain. Il en est ainsi du disciple de Dieu. Si c'est un homme sage, il
comprend sa qualit de disciple. Les formes corporelles ne le tromperont pas, il considrera
l'tat de l'me (psych) de chacun et parlera chacun en consquence. Il y a beaucoup
d'animaux forme humaine dans le monde. Quand il les identifie des porcs, il leur jette des
glands, des bestiaux, il leur jette de l'orge et de la paille et de l'herbe; des chiens, il leur jette
des os; des esclaves, il leur lenseignement lmentaire ; des enfants, lenseignement
parfait (teleios).
Sans commentaires.
Amour = nourriture
(95) "L'amour spirituel (agap pneumatikos) est un vin et un baume. Tous ceux qui en
sont oints en ont un grand plaisir. Lorsque ceux qui
sont oints sont prsents, ceux qui sont prs d'eux en
profitent. Mais si ceux qui sont oints de cette onction
se retirent et s'en vont, alors ceux qui ne sont pas oints et
se tenaient simplement prs d'eux restent dans leur mauvaise odeur."
influenc le cabalisme ses dbut, et peut-tre mme cet crit fondamental du cabalisme, le
Zohar.
Tout l'Enseignement universel est dans Philon, un
contemporain de Jsus. Le rayonnement de la Gnose, qui est
une manation de Dieu, a touch les curs de tous les
vritables chercheurs de cette poque, dont beaucoup furent
suivis par de nombreux disciples et crrent ainsi leur
propre groupe. Pour Philon, le Logos (parole en grec) est la
premire manation de la volont cratrice du Dieu
inconnaissable, sa Parole, sa Raison (son Ide, cette
dernire signification apparat dans Platon, or Philon est un
platonicien). Et cette manation de Dieu est donc son
Fil, c'est--dire, le premier homme, l'Homme parfait, l'Homme-dieu.
La coupe de l'amour divin, le Saint Graal, le " sang ral ", le sang
royal, le sang de la nouvelle alliance. Boire la coupe de l'Esprit
Saint c'est transformer son sang terrestre en " sang royal ". Celui
qui ne boit pas cette coupe, qui ne possde pas cette coupe,
comment pourrait-il la tendre autrui?
(89)L'homme saint est tout fait saint, mme dans son corps. Car
s'il a reu le pain, il le consacrera, de mme la coupe ou quoi que
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Dans le monde, tout est dans un tat de mort en sursis, tout ce qui
nat est dj mort, et le monde se renouvelle sans cesse grce la mort
de tout. Kronos, le temps, mange ses propres enfants. Kronos marque lentre
de lhomme dans lespace et le temps au cours de sa longue chute.
Laisse les morts enterrer les morts, dit Jsus et
suis-moi. (Matt.10, 22) Ces morts sont les vivants en sursis, ceux
qui refusent de boire la coupe du Graal, soit par ignorance, soit
par provocation.
(40) Dieu est un mangeur dhommes. Cest pourquoi lhomme lui est
sacrifi. Avant que lhomme ne lui soit sacrifi, on lui sacrifiait des
animaux, mais ce ntaient pas des dieux ceux qui on les sacrifiait.
Dieu veut faire rentrer en lui tous les hommes, rintgrer dans sa
sphre divine toutes les tincelles de lumire dont les hommes sont
porteurs, afin de reconstituer dans toute sa gloire sa
premire crature, de relever de sa chute lhomme de lorigine qui, enfin
dgot de boire la coupe amre de la fausse libert, se dcide
du fond de sa repentance se donner tout entier son Dieu
en amour parfait : tel est le plaisir infini de Dieu
dans sa bont infinie.
(Pensez lexpression : on en mangerait ! quand on voit quelque chose qui plat infiniment
nos sens. A nos sens! Il est difficile de penser Dieu comme ayant des sens, mais il est facile de
le penser comme ayant un amour infini pour lhomme...Ces deux notions ne sont-elles pas
conciliables ?)
(11) Avant la venue du Christ, il ny avait pas de pain dans le monde. Ainsi dans le paradis o
tait Adam, il y avait beaucoup darbres pour la nourriture des animaux ; il ny avait pas de bl
comme nourriture pour lhomme. Lhomme se nourrissait comme les animaux, mais lorsque le
Christ, lHomme parfait (tlios) vint, il apporta du pain du ciel afin que lhomme se nourrt dune
nourriture dhomme.
VI Adam
Il faut le rpter : le mot Dieu recouvre limage, que se sont faite, que se font et que se
feront tous les peuples du monde, de la force insaisissable qui se cache derrire lunivers et son
apparition. Cest un mot facile demploi ne serait-ce que parce quil est court et laconique. Tout
au long de ce texte il reprsente donc la force physique, spirituelle, philosophique, etc. - comme
on voudra - primordiale et fondamentale, qui explique la vie de lunivers ; ainsi que la hirarchie
des forces qui en manent, quon les dsigne comme des ondes lectromagntiques, ou par un
terme scientifique plus savant, ou comme des puissances spirituelles reprsentes par des
anges, etc. toujours comme on voudra. Limage de cette force fondamentale serait celle du
bien absolu, par opposition au bien et au mal du monde que nous connaissons, lequel nest
quune ombre lugubre du monde du bien absolu.
Lhomme est Mon secret et Je suis son secret... Je suis tel que Mon serviteur Me connat...
(Le Coran)
************
Dieu, tout amour et bien, veut partager cet amour et ce bien. Il cre un tre semblable lui, sa
crature, son fils, lhomme parfait originel, le premier Adam : Dieu. Car Dieu ne peut aimer que
Dieu et se sentir vraiment aim que par un tre qui soit Dieu lui-mme. Il ne veut pas dun
amour servile, esclave, et il donne son fils divin une libert pleine et entire. Sa crature, son
fils, doit sprendre damour pour lui en toute libert, dun dsir irrsistible, sans aucune
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contrainte, dun lan irrpressible, de tout son tre, dans une joie absolue, continue et
ternellement nouvelle.
En donnant sa crature une libert entire, il lui donne aussi, pourrait-on dire, un pouvoir
suprieur au sien : le pouvoir dexercer telle action quil voudra en dehors du bien et de lamour
suprme... malgr que les consquences de cette cration pleine de risques soient connues de
lui de toute ternit, et quil souffre donc de toute ternit de la souffrance de ce qui doit devenir
des hommes de chair et de sang, hommes spars de lui, ignorant son amour et dont certains
iront mme jusqu nier son existence.
Tel est le prix de la libert de lamour quil attend de son fils, lHomme-dieu. En effet, qui,
mme ici-bas, veut dun amour contraint ?
Comme lenfant prodigue qui dilapide ses richesses et sloigne de son pre, la longue chute
que lexercice de sa libert fait subir au fils de Dieu, au premier Adam, apparat de faon plus
ou moins image dans toutes les cosmogonies.
On pourrait dire que toute cosmogonie est la vision que lhomme se fait de Dieu un moment
donn ; elle est donc un reflet de la chute du premier homme partir du moment o celui-ci crut
devoir crer lui-mme. Cette vision a donc commenc se dgrader partir du moment o ce
premier homme a user de sa libert dans un sens diffrent du bien et de lamour suprmes. En
mme temps cet acte cre un monde correspondant en raison du pouvoir divin qui fait qu
toute pense correspond une cration. Cest le pouvoir du Logos : toute pense, cest--dire
toute parole (mot pris dans son sens imag dmission de la volont) est un acte crateur. A
chaque tape de sa chute, lhomme a donc t le crateur de son environnement, cr avec
lassentiment de Dieu qui ne veut pas voir mourir sa crature en dpit de tout. On peut donc
dire que cest lhomme qui est cause de la cration de lunivers matriel qui est le ntre
aujourdhui, univers concd par Dieu pour que sa crature, son amour, ne disparaisse pas
totalement et ait toujours la chance de retourner lui dans sa premire condition dhomme
divin. Car lhomme est lamour de Dieu. A ce propos, disons que lintelligence qui permet les
crations matrielles de lhomme actuel est un reflet de son pouvoir de cration primordial.
Toutes les cosmogonies sont donc fausses dans la mesure o elles ne sont quun reflet de
lide que lhomme se fait de Dieu et de la cration un moment donn. Le Dieu de la Bible est
un dieu limage de lhomme de ces temps anciens. Il est possible dinterprter la Bible dans
tous les sens possibles, par exemple comme un rcit de laffrontement entre un crateur et sa
crature.
Le Dieu de lAncien Testament apparat tour tour comme le Dmiurge, le Trs Haut, le Dieu
cach des prophtes, celui que Jsus appelle son Pre... etc.
Cest ainsi quon en arrive aux mythes antiques. Limage de Dieu donne dans lAncien
Testament est typique dune certaine conscience primitive collective dhommes incarns dans la
matire. (Les sacrifices danimaux, par exemple, taient une faon de prier un Dieu limage de
lhomme trs dgnr de cette poque dans une certaine rgion du globe. La fume et lodeur
qui montent vers le haut reprsentent un lan individuel et collectif vers le haut, un dsir
dlvation, et lodeur de la viande rtie devait tre, coup sr, agrable Dieu puisquelle
ltait pour ces hommes ! Ces sacrifices impliquaient aussi lide du don, de loffrande dun bien
de valeur, pour se concilier la faveur de Dieu tel quils limaginaient, et aussi pour se faire
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pardonner leurs manquements. Tous sentiments dailleurs toujours actuels et actifs dans
lattitude religieuse en gnral).
A ct de cela, il y eut toujours des civilisations dont la vision de Dieu tait plus leve, des
civilisations trs avances. Mais il nen reste pas moins vrai que toutes les cosmogonies sont
fausses dans la mesure o ce ne sont que les images que les hommes se font de Dieu une
certaine poque, dans une certaine rgion, et un point plus ou moins bas de leur
dgnrescence.
Le Dieu que Jsus appelle son Pre provient de lesprit dun homme qui, ayant pris
conscience de sa chute, a dj tent de sen relever. Or cette tentative implique un dsir, un
dsir qui fait oublier tous les dsirs terrestres, et engendre dj une premire liaison avec ce
qu'on appelle la Gnose, la vraie connaissance de Dieu. Cette liaison n'est pas un fait intellectuel
abstrait. C'est une ralit intrieure qui fait germer certaines images dans l'intellect, en raison
de limpuissance o se trouve lhomme terrestre de dfinir cette puissante ralit intrieure,
dans limpuissance o il est de voir Dieu, de mme quil ne peut regarder le soleil en face sous
peine dtre bloui et mme de perdre la vue... La lune qui reflte la lumire du soleil est limage
de lme humaine recevant un reflet de la lumire de lEsprit grce la Gnose. Pour Jsus, la
Gnose lui apparat comme son Pre , pour dautres ce sera leur double cleste , leur
jumeau divin , leur compagnon ou matre intrieur , pour le Bouddha ce sera
lillumination , etc. Krishna est limage de cette vritable incarnation de Dieu dans lhomme
terrestre. Or cette prsence divine est amour et nouvelle intelligence.
La vision de Jsus nexige donc plus ni sacrifices danimaux, ni respect des mille rgles dune
loi contraignante, mais loffrande tout entire de lhomme terrestre qui, dans la claire vision de
sa chute, tente de reprendre un chemin dlvation vers une condition suprieure, condition
dont il doit reconnatre, admettre et pratiquer lui-mme les lois. Dj Dieu tel que le concevait
Esae (1, 11) : disait : Quai-je faire de la multitude de vos sacrifices ? Je suis rassasi des
holocaustes de bliers et de la graisse des veaux ; je ne prends point plaisir au sang des
taureaux, des brebis et des boucs... Qui vous demande de souiller mes parvis ? Cessez
dapporter de vaines offrandes : jai en horreur lencens... Quand vous multipliez les prires je
ncoute pas... Lavez-vous, purifiez-vous... Cessez de faire le mal... ( lire tout entier les
versets 11 et la suite).
Or chaque fois quun homme a une vision de Dieu plus leve, lhumanit tout entire pourrait
slever avec lui ; mais ntant pas capable, dans lensemble, dune telle remonte, elle dtruit
ou tout au moins dgrade considrablement cette vision. Il est caractristique que le Bouddha
ne parle jamais de Dieu, comme si, pour lui, il nexistait pas ! Mais cest quil avait conscience
que lhomme, en dgradant cette notion sublime, se dgradait lui-mme chaque fois, et le
monde avec lui. (La vision de Jsus est lhritage du platonisme, comme celle de Philon
dAlexandrie, son contemporain, galement juif. Sous ce rapport, la vision transmise par les
vangiles gnostiques, et les vangiles canoniques dans un certain sens, est un amalgame des
traditions les plus leves des ides philosophiques, religieuses et mystiques de lantiquit sur
toute la surface du globe.)
Il faut remarquer en passant que tous les symboles et images des divers Mystres antiques
ont t conservs dans le Nouveau Testament, et de l dans le christianisme. Des allgories
comme la descente dun lieu cleste et la possibilit dy remonter, la naissance dun enfant
divin, la purification par leau, la traverse du dsert ou de la nuit, la tentation par les
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puissances de ce monde, labandon de ses biens, la mort, la descente dans lHads (le sjour
des morts et non lenfer) et la rsurrection, lingestion de la chair et du sang dune victime
offerte un dieu regarde comme la participation et lunion ce dieu, le bouc missaire, le
sacrifice expiatoire, etc. sy retrouvent. Le mariage sacr et laccession la royaut intrieure
ny apparaissent que trs voils mais on les dcouvre dans les vangiles gnostiques des
dbuts du christianisme.
Et ce qui est trs remarquable, cest que les enseignements de ces Mystres antiques non
dgnrs refltent ceux de la Gnose ternelle, la science unique et vritable.
La longue chute de lhomme originel, du premier Adam, apparat dans toutes les
cosmogonies. Tous les acteurs de ces pripties et ces pripties elles-mmes y sont
personnifies ce qui fait oublier quil sagit toujours de lHomme-dieu qui a dmrit, du premier
Adam, donc de lhomme, donc de nous les hommes. La chute y est aussi reprsente comme
un vnement du pass, ce qui nous faire croire : 1) quelle est termine ; 2) quelle nest pas
de notre faute ; 3) quelle ne nous concerne pas, alors quelle continue bel et bien aujourdhui
sous nos propres yeux !
Mesurons la chute prsente au fait que lhomme daujourdhui non seulement nie
farouchement lexistence dun pouvoir suprieur non visible par les sens ordinaires, mais se
prend lui-mme pour Dieu, au risque de dtruire sa propre plante...
Ce quil appelle, purilement, le big bang , nest quun pisode de la chute, un nouvel
loignement de Dieu : lhomme, aprs la dchance de son corps mental, astral et thrique a
d acqurir un corps de matire. Depuis, cet homme de matire et la nature quil a cre pour
pouvoir sincarner dans ce corps de chair et de sang, nont cess de dchoir ainsi que les trois
autres corps subtils qui laccompagnent, au point que le scientifique daujourdhui, cest--dire
lhomme qui gouverne la terre et en donne une certaine vision la triste humanit, na aucune
ide de possder un corps virtuel que lon pourrait qualifier de spirituel, et encore moins que
cest par lui seul quil aurait la possibilit de retrouver sa gloire originelle.
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(76) Le monde est apparu la suite dune faute (paraptma). En effet celui qui le cra voulait le
faire incorruptible et immortel (athanatos). Mais il choua et ne ralisa pas son dsir (elpis). Car
le monde ne fut jamais imprissable ni, pour la mme raison, celui qui fit le monde.
Tous ces Adams (ceux des premiers chapitres de la Gense), Jaldabaoth, Lucifer, Dmiurge,
Sophia prise en faute, Ouranos, Kronos, Jupiter, Hercule, etc., sont lhomme, nous, les
hommes. Tous ces personnages si divers, sans parler de ce que lon appelle des anges, nous
trompent par leur nom mme, comme lvangile de Philippe nous lenseigne : ils sont nous tous,
les hommes, soit embarqus dans une descente fatale, soit dambulant tant bien que mal sur le
chemin de la remonte, soit rests ou revenus une condition divine.
(64b)Lme (psyche) dAdam naquit dun souffle. Le compagnon de son me est lesprit
(pneuma). Ce souffle qui lui fut donn est sa mre. Son me fut remplace par un esprit.
Lorsquil lui fut uni, il pronona des paroles qui dpassaient les forces naturelles (dynamis).
Celles-ci le jalousrent, prives quelles taient du compagnon spirituel secret, exempt de tout
mal, ce qui les privait de la possibilit de la chambre nuptiale...
Il sagit ici de lAdam du chapitre 2 de la Gense, lhomme primordial une certaine tape de
sa chute o eut lieu la formation du corps matriel. Cet Adam cr par lEsprit tait esprit.
Lesprit tait sa mre, sa sur et sa compagne . Etant habit par le souffle de lEsprit, il
surpassait de loin les forces de la nature, bien que ce ft une nature encore trs pure et subtile
par rapport la ntre. Mais cet homme encore pur et reli lEsprit tait sur la pente
descendante dune chute irrmdiable depuis des temps immmoriaux du fait de son
orientation dvie par rapport lide primordiale divine. Nanmoins, il a encore la possibilit,
participant lEsprit, la Gnose, de retrouver lamour de son Dieu dans la chambre nuptiale.
Autrement dit, il a encore la possibilit dune remonte. Tout Adam, cest dire tout homme,
quelque phase de la chute o il se trouve, a la possibilit de se relier Dieu, la force
primordiale, dans la chambre nuptiale.
Le compagnon spirituel secret, cest ltincelle de lumire cache en tout tre humain qui,
lorsquil la peroit consciemment, devient son jumeau divin , son double cleste , celui-l
seul qui peut entrer dans la chambre nuptiale...
(67a) Adam est venu lexistence grce deux vierges, lEsprit et la terre vierge. Cest
pourquoi le Christ naquit dune vierge pour rectifier la chute qui sest produite lorigine.
LEsprit est un mot fminin en hbreux, la terre vierge est lmanation divine premire ; de ces
deux qui nen font quun fut cr LHomme-dieu de lorigine, dsign ici par Adam. Christ,
lhomme qui a retrouv ltat originel, qui est ren de la vierge originelle, cest--dire de lEsprit
divin, la substance mme de Dieu, est venu montrer tous les hommes le chemin de retour
dans leur tat premier, afin quils finissent par reconstituer lHomme-dieu de lorigine, lamour de
Dieu.
(33) Celui qui a t model (plassein) tait de race noble, et tu devrais trouver que ses fils sont
dun noble (eugens) modelage (plasma). Sil navait pas t model mais engendr, on
trouverait que sa semence (sperma) est noble (eugens). Or voici quil a t model et quil a
engendr. Quelle noblesse y a-t-il eu en cela ? Il y eut dabord adultre et ensuite meurtre. Il fut
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conu dans ladultre, car il tait fils du serpent ; cest pourquoi il devint meurtrier comme son
pre et tua son frre. Or toute union entre personnes dissemblables est un adultre.
(73) Dieu avait plant un jardin. Lhomme y avait t plac. Il y avait de nombreux arbres...
Cest le lieu o on me dira : mange de ceci, ou ne mange pas de cela, comme tu voudras. Dans
le lieu o je mangerai de tout se trouve larbre de la connaissance (gnsis). Cest lui qui tua
Adam mais cest lui qui vivifie lhomme. Cet arbre tait la loi. Il avait le pouvoir de donner la
connaissance du bien et du mal. Il ncarta pas du mal ni ntablit dans le bien, mais il prpara
une mort ceux qui en mangrent. Car lorsquil fut dit : mange de ceci, ne mange pas de cela,
ce fut lorigine de la mort.
Si lon pense que lhomme tait dj bien engag dans le processus de la chute, il ne pouvait
manger que du fruit de larbre du bien et du mal : premirement, pour pouvoir se rendre compte
de sa chute par sa mort inluctable, et deuximement pour pouvoir se librer du bien et du mal
par la connaissance de ce bien et de ce mal ! Cest limage mme de la condition humaine,
toujours actuelle, o lon ne peut ni scarter du mal ni stablir dans le bien ! Larbre de
la connaissance du bien et du mal est la chute certaine mais aussi la possibilit de la remonte.
Les interprtations divergentes de ce passage de la Gense sont donc parfaitement
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conciliables. Ceux qui assimilent le serpent la Gnose tentent une explication non traditionnelle
par une tendance, au tout dbut du christianisme, sopposer au judasme. Mais que le serpent
soit une image de la Gnose ou de la contre-Gnose, peut importe en dfinitive, quoi quil en soit,
la chute de lhomme est une ralit cruellement et journellement ressentie, non seulement par
lhomme terrestre en qui parle la Gnose, mais aussi par toute lhumanit, de faon plus obscure
mais bien relle ! Il faut se mentir journellement soi-mme pour repousser une telle rflexion.
La Gnose, en effet, ne peut que pousser lhomme toujours plus avant dans sa chute pour quil
finisse par se rendre compte de son tat misrable et par chercher retourner dans sa patrie
dorigine.
Pourquoi ne pas imaginer, alors, que Dieu pourrait multiplier linfini les dimensions de
lunivers mesure que lhomme tente den sonder les profondeurs, pour tracasser les
scientifiques matrialistes et finir par tuer leur conviction quils sont les matres sur terre et dans
le ciel ?
(67b) Il y a deux arbres au milieu du jardin. Lun engendre des animaux, lautre engendre des
hommes. Adam mangea de larbre qui engendre des animaux. Il devint animal et engendra des
animaux. Cest pourquoi les enfants dAdam adorent des animaux. Larbre dont Adam a mang
le fruit est larbre des animaux, cest pourquoi les pchs furent nombreux. Sil avait mang...
du fruit de larbre qui porte des hommes, alors les dieux adoreraient lhomme. Car Dieu
lorigine avait cr lhomme, mais maintenant les hommes crent des dieux, et cest ainsi quil
en va dans le monde : les hommes se crent des dieux et adorent leurs cratures. Mais ce sont
ces dieux qui devraient adorer les hommes ! Telle est la vrit.
Alors Eve engendre lhomme animal qui tue son frre . Cest encore une image : lhomme
animal cest--dire purement terrestre tue en lui lhomme spirituel, lhomme issu de larbre de
vie. Ceci se passe journellement en nous-mme. Il y a dailleurs beaucoup dinterprtations
possibles de cette image, laissons chacun la libert de sen faire une ide personnelle, la
Bible nen est pas a prs...
Laspect fminin serait li aux forces naturelles. Mais pourquoi les forces naturelles sont-elles
opposes aux forces divines ? Parce quelles ont t engendres depuis des temps
immmoriaux par Adam au cours de son irrsistible chute : elles sont limage de son opposition
son crateur.
Philippe ne manque dcidment pas dhumour. Lide que lhomme se cre des dieux est
claire : la soi-disant intelligence humaine, la prtendue civilisation industrielle, la science,
largent, internet, etc., toutes ces entits abstraites, idoles pleines dimposture, devraient adorer
les hommes... nous sommes en plein paradoxe : elles les adorent, en effet, et sen nourrissent
en les asservissant chaque jour davantage tout en les vouant la mort.
(71)... Mais larbre de vie est au milieu du jardin et cest lolivier, do vient lhuile, et de lhuile, la
rsurrection.
Larbre de vie est larbre qui porte des hommes , ces hommes qui ont la possibilit de
recevoir lhuile de lonction, chrisma, pour devenir eux-mmes Christ.
(10b) Ce sont les forces naturelles (dynamis) qui luttent contre lhomme, ne voulant pas quil
soit dlivr afin de dominer sur lui comme sur un esclave. Car si lhomme tait dlivr, les
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sacrifices danimaux ne se produiraient plus, ils ne seraient plus offerts ces forces. En vrit
celles-ci sont des animaux. On le leur offrait vivants, mais aprs quils taient offerts, ils
mouraient. Quant lhomme il fut offert Dieu, mort, et il vcut.
Les forces naturelles (les archontes), compares des animaux, asservissent leurs crateurs,
les hommes (galement compars des animaux !) lesquels, par la mort, leur offrent leur vie...
Ceux qui meurent la matire et se dlivrent des forces naturelles trouvent la vie.
Encore un exemple des images paradoxales et trs parlantes auxquelles se plat Philippe. Par
une tel raisonnement on peut voir les sacrifices danimaux comme limage du sacrifice de la
mort des hommes animaux...
(46) La supriorit de lhomme nest pas apparente mais cache. Cest pourquoi il est le matre
des animaux, de ceux qui sont plus forts que lui, qui sont grands selon ce qui est apparent et ce
qui est cach, mais cest lui qui leur donne leur subsistance. Si lhomme se spare deux, ils se
mordent les uns les autres et sentre-tuent. Ils sentre-dvorent parce quils ne trouvent pas
dautre nourriture. Mais maintenant ils ont de la nourriture parce que lhomme travaille la terre.
Ceux qui se dlivrent des forces naturelles signent larrt de mort de ces forces dominatrices,
tel est le dbut du retour
la condition premire de lHomme-dieu.
Peut-on dgager ici limage de lhomme animal apparent, serviteur des forces de la mort ; et
de lhomme spirituel cach, serviteur des forces de la vie, qui assure secrtement la
subsistance de lhomme animal, au sens de sa survie, dans lespoir de le transformer en
homme spirituel ?
(59) Quand Eve tait en Adam, la mort nexistait pas. Aprs quelle fut spare de lui, la mort
survint. Sil la reprend en lui, et retrouve sa forme premire, il ny aura plus de mort.
(64a) Si la femme navait pas t spare de lhomme, elle ne serait pas morte avec lhomme.
Sa sparation a t lorigine de la mort. Cest pourquoi Christ est venu remdier cette
sparation, qui existe depuis le commencement, runir les deux, redonner la vie ceux qui
taient morts dans la sparation et les unir. Or la femme sunit lhomme dans la chambre
nuptiale. En vrit ceux qui se sont unis dans la chambre nuptiale ne seront plus jamais
spars. Ainsi Eve sest spare dAdam parce quelle ne stait pas unie lui dans la chambre
nuptiale.
Ceux qui ont accs la chambre nuptiale y retrouve leur amour perdu dans le mystre de
lamour divin, le mystre du monde divin o il ny a nulle sparation, o tous sont unis tous et
ne font quun avec leur Seigneur. Les fiancs de la chambre nuptiale reprsentent une
image de cette union, qui reconstitue la gloire de lHomme-dieu primordial androgyne faisant
nouveau les dlices du Pre qui a retrouv son enfant prodigue, et en est aim comme il le
dsirait. Sans oublier que le retour de lenfant prodigue est marqu par une grande fte...
(72) Le monde est un mangeur de cadavres, tout ce qui y est mang meurt aussi. La vrit se
nourrit de vie, aussi personne de ceux qui se nourrissent de la vrit ne mourra. De l Jsus est
venu apporter de la nourriture, et tous ceux qui le veulent il donne la vie afin quils ne meurent
pas.
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Dans le monde, tout est dans un tat de mort en sursis, tout ce qui nat est dj mort, et le
monde se renouvelle sans cesse grce la mort de tout. Kronos, le temps, mange ses propres
enfants. Kronos marque lentre de lhomme dans lespace et le temps au cours de sa longue
chute.
Laisse les morts enterrer les morts, dit Jsus, et
suis-moi. (Matt.10, 22) Ces morts sont les vivants en sursis, ceux qui refusent de boire la
coupe du Graal, soit par ignorance, soit par provocation.
(11) Avant la venue du Christ, il ny avait pas de pain dans le monde. Ainsi dans le paradis o
tait Adam, il y avait beaucoup darbres pour la nourriture des animaux; il ny avait pas de bl
comme nourriture pour lhomme. Lhomme se nourrissait comme les animaux, mais lorsque le
Christ, lHomme parfait (tlios) vint, il apporta du pain du ciel afin que lhomme se nourrt dune
nourriture dhomme.
Adam est dj sur la pente descendante de la chute. Son corps va bientt devenir celui dun
animal, il se nourrit comme lanimal (ce qui est dailleurs toujours notre cas). Christ, lAdam
rgnr, lhomme parfait ressuscit, vient avec le bl, la Gnose, le pain du ciel , la force
magntique qui rgnre lme, la connaissance de la vrit qui rgnre le mental, lamour qui
rgnre le corps.
(3b) Depuis le jour o le Christ est venu, le monde a t cr, les villes, ordonnes (kosmei), ce
qui est mort, rejet.
A mettre au futur : quand la force astrale christique sera reue par tous les curs, le monde
sera compltement recr, les villes merveilleusement apaises, diriges et ornes grce au
respect et lamour du prochain. Ce qui est mort sera dfinitivement rejet, car tout vivra de
nouveau dans la maison du Pre qui rassemble tout en elle.
(14) Le Seigneur dit aux disciples : Eloignez-vous de toute maison. Entrez dans la maison du
Pre, ne prenez ni nemporter rien de la maison du Pre.
Entrez dans la maison du Pre, mais ne vous servez pas des rvlations du Pre sur le plan
terrestre et intellectuel pour en faire des principes, des dogmes, des philosophies, des
religions... tous ces systme vous la mort entranent des bains de sang. Mais si tous les
hommes rentraient dans la maison intrieure de leur cur, la maison du Pre, et se mettaient
vivre deux-mmes tous les grands idaux par amour du Pre et respect de ses lois, au lieu de
ne faire quen rver et en discourir, alors tout serait possible...
(40) Dieu est un mangeur dhommes. Cest pourquoi lhomme lui est sacrifi. Avant que
lhomme ne lui soit sacrifi, on lui sacrifiait des animaux, mais ce ntaient pas des dieux ceux
qui ils taient sacrifis.
Dieu veut faire rentrer en lui tous les hommes, rintgrer dans sa sphre divine toutes les
tincelles de lumire dont les hommes sont porteurs, afin de reconstituer dans toute sa gloire sa
premire crature, de relever de sa chute lhomme de lorigine qui, enfin dgot de boire la
coupe amre de la fausse libert, fausse galit, fausse fraternit, se dcide du fond de son
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repentir se donner tout entier son Dieu en amour parfait : tel est le plaisir infini de Dieu dans
sa bont infinie.
La fin de cette citation se rfre au fait que Philippe, comme dautres gnostiques,
considraient Yahweh comme une force cratrice malfique. Sans dnaturer le sens de la
Gense donn par Mose, cette interprtation est comprhensible dans la mesure o lon pense
que cest lhomme lui-mme qui cre le monde au fur et mesure de sa chute et se fait une
certaine image de Dieu. Mais le verbe crer na pas ici la signification ordinaire, car lhomme est
dans limpossibilit de crer comme son Crateur, il ne peut que crer une imitation, une
image du monde suprieur, de mme quil ne peut se faire quune certaine image de
son Crateur.
(100) Dans ce monde les plantations ncessitent quatre lments. On moissonne ce qui
provient la fois de leau, de la terre, du vent et de la lumire. De mme les plantations de Dieu
rsultent de quatre lments : la foi, lesprance, lamour et la gnose. Notre terre est la foi en
qui nous prenons racine, leau est lesprance dont nous nous nourrissons ; le vent est lamour
qui nous fait grandir et la lumire est la gnose qui nous fait mrir.
Le monde terrestre, reflet du monde spirituel, est son ombre, une image obscure.
Philippe est un disciple de Paul et cest ici un raccourci frappant de lEptre aux Hbreux,
chapitre 10 jusqu la fin.
Vie et mort
(31b) Une chose est Achamoth et autre chose Echmoth. Achamoth est simplement la
Sagesse. Mais Echmoth est la sagesse de la mort, celle qui connat le mort. Cest la petite
sagesse .
Achamoth est la sagesse divine, une, universelle, ternelle ; Echmoth est la sagesse humaine,
multiple,
mortelle.
Dans ce monde il y a du bien et du mal. Ce qui est bien nest pas bien, et ce qui est mal nest
pas mal. Mais il y a quelque chose de mauvais qui est vraiment mauvais, cest le lieu du milieu :
cest la mort. (non vrif)
Dans ce monde ce qui est bien peut devenir mal et ce qui est mal devenir bien, il ny a rien
dabsolu. Le bien et le mal peuvent conduire au bien ou au mal, do limmense chaos qui
sinstalle sur la terre. Le lieu du milieu cest se contenter de ce bien et de ce mal sans raction
passionne pour chercher la vrit. Cest la tideur cite dans lApocalypse : cit :
Ne crains pas la chair mais ne laime pas non plus. Si tu la crains, elle te dominera. Si tu
laimes, elle te dvorera et ltranglera. Ou bien on est dans ce monde, ou bien dans la
rsurrection, ou bien dans les lieux du milieu. Que je ne sois pas trouv dans ce dernier. (non
vrif)
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...Il convient que nous devenions des hommes spirituels avant de quitter le monde. Celui qui a
tout reu mais ne sest pas rendu matre de ces lieux-ci (le monde) ne sera pas capable dtre
matre dans ces lieux -l ( le royaume de la lumire), mais il ira dans le milieu, tant
imparfait... (cit dans vritable)
La lumire et les tnbres, la vie et la mort, ceux qui sont droite et ceux qui sont gauche
sont frres les uns des autres. Il nest pas possible quils se sparent. Cest pourquoi ni les bons
sont bons, ni les mchants mchants,, ni la vie est vie, ni la mort, mort. Cest pourquoi chacun
sera dissous dans sa nature originelle. mais ceux qui sont suprieurs au monde sont
indissolubles, ternels. (non vrif)
Chacun sera dcompos dans ses lments premiers : les lments matriels pour le corps
matriel, les lments thriques pour le corps thrique ou nergtique, les lments de
lastral pour le corps astral ou corps des dsirs et passions, les lments du mental pour le
corps mental. Ces lments reformeront une autre individualit susceptible de trouver la voie
qui la rendra suprieure au monde .
Celui qui sort du monde nest plus prisonnier comme il ltait dans le monde. il est au-dessus
du dsir, de la mort et de la crainte. il est matre de la nature, il est suprieur lenvie. Ces
passions tiennent et touffent chacun mais comment fuir ces dsirs et ces craintes ? Comment
se cacher delles ? Souvent certains viennent dire : Nous sommes croyants afin dchapper
aux esprits impurs et aux dmons. Mais(car ?) sils possdaient lEsprit Saint aucun esprit impur
ne sattacherait eux. (non vrif)
Et... pour retrouver le chapitre dans lequel figurent les commentaires dune citation :
Citation chapitre :
1 - IV 35 - IV 70a - V 111 - I
2 - VII 36 - IV 70b - IV 112 - I
3a - VII 37 - II 71 - VI,VIII 113 - I
3b - VI 38 - IV 72 - VI 114 - I
3c - I 39 - II 73 - VI 115 - I
4 - I 40 - VI 74 - V 116 - I
5 - I 41 - V 75a II,V 117 - I
6 - IV 42 - VIII 75b II,V 118a - I
7 - VII 43a IV 76 - VI 118b - I
8a - II 43b - VII 77 - IV 119a - III
8b - II 44a VII 78 - IV 119b - III
9a - II 44b IV 79 - V 120 - III
9b I,II 45 - IV 80 - IV 121 - III
9c - I 46 - VI 81 - IV 122 - III
10a - II,VI 47 - II,V 82 - IV 123 - III
10b VI 48 - III 83 - II 124 - I
11 - VI 49 - III 84 - II 125 - I
12a II 50a III 85 - II 126 - III
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