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Pratiques et production piscicole ivoirienne 227

ETAT DES CONNAISSANCES SUR LA PISCICULTURE EN
COTE  D’IVOIRE

A. H. YAO1,2, A.R. KOUMI2*, B.C. ATSE2, E.P. KOUAMELAN1

1
UFR Biosciences,  Université Félix Houphouët-Boigny, 22 BP 582 Abidjan 22, Côte Abidjan, Côte d’Ivoire
2
Département Aquaculture, Centre de Recherches Océanologiques, BP V 18, Abidjan, Côte d’Ivoire
*Auteur correspondant Email : koumirachel@yahoo.fr ; Tel : +225 07 87 10 69 

RESUME

La pisciculture a été amorcée en Côte d’Ivoire en 1955. Cependant, la production de l’aquaculture
demeure faible. Une enquête a été réalisée sur le profil socio-économique des promoteurs, l’activité
piscicole et la production des fermes. Il ressort de cette enquête que la pisciculture en Côte d’Ivoire
est pratiquée sur presque toute l’étendue du territoire ivoirien. La majorité des fermes (65,4 %) ont
une superficie en eau exploitée inférieure à un hectare. La durée d’existence est inférieure à 10 ans
pour 53,8 % des fermes. Les pisciculteurs sont majoritairement des agriculteurs (60,8 %), ivoiriens
(87,4 %) de sexe masculin (94,0 %) âgés de plus de 40 ans (83,7 %).  Les systèmes d’élevage les
plus pratiqués sont le semi-intensif (51,8 %) et l’extensif (42,9  %). Le tilapia Oreochromis niloticus
(96,68 % ) et l’hétérotis  Heterotis niloticus (56,81 %) sont les espèces de poissons les plus élevées.
Les étangs de dérivation (93,69 %) et les étangs de barrages (47,84 %) sont les principales structures
d’élevage.  Les  aliments  utilisés  seul  ou  en  association  sont  les  aliments  commerciaux  (27,57  %),
produits  par  les  pisciculteurs  eux-mêmes  (17,94  %),  les  sous-produits  agroalimentaires (71,10  %)
et les aliments non conventionnels (22,26 %). Le développement de la pisciculture en Côte d’Ivoire
devrait passer par la promotion de la pisciculture intensive et semi-intensive auprès des salariés et
des  opérateurs  économiques  nationaux  et  internationaux.
Mots clés : Pisciculture, pratique, région, production, Côte d’Ivoire

ABSTRACT

STATE OF KNOWLEDGE ON FISH FARMING IN COTE D’IVOIRE

In Côte d’Ivoire, fish farming introduction took place in 1955. However, the annual national farms fish
production remains low. The survey was carried out on socio-economic characteristics of fish farms
owners, farming practices and farms production data. Results show that fish farming production is
practiced almost throughout the Côte d’Ivoire territory. The majority of farms (65.4 %) have less than
one hectare of managed water. The duration of existence is less than 10 years for 53.8% of farms. Fish
farmers are mainly farmers (60.8 %), Ivorian (87.4 %), males (94.0 %), aged more than 40 years old
(83.7 %). Majority of fish farms used semi-intensive (51.8 %) and extensive (42.9 %) systems. Tilapia
(96.68 %) and heterotis (56.81 %) are the main species bred. Earthen pond and pond-dam are the
rearing structures mostly used. Commercial feeds (27.57 %), feeds produced by fish farmers (17.94
%), agro-industrial byproducts (71.10 %) and non-conventional feeds (22.26 %) are used alone or in
combination to feed fish. The development of fish farming in Côte d’Ivoire should be through the
promotion of intensive and semi-intensive fish farming systems among employees and national and
international economic operators.
Keywords : Fish farming, Practice, Region, Production, Côte d’Ivoire

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228 YAO A. H. et al

INTRODUCTION produits d’élevage en général (Coulibaly, 2013).
En  2005,  environ  1000  fermes  piscicoles  de
petites  et  moyennes  tailles  avaient  été
En Côte d’Ivoire, la pisciculture a été introduite rapportées en Côte d’Ivoire pour une superficie
dans  les  années  1940  par  l’administration totale exploitée d’environ 500 ha (FAO, 2008).
coloniale avec un début réel des activités à partir La  production  aquacole  nationale  est  faible,
de  l’année  1955  (Hem  et al.,  1994). malgré  d’immense  potentialité  humaines,
L’implantation  et  le  développement  de  cette géographiques, naturelles et de nombreux efforts
activité  se  sont  faits  en  plusieurs  étapes  (; déployés dans la pisciculture ivoirienne (FAO,
Lazard,  2014 ;  MIRAH,  2014).  La  phase 2008 ;  FAO,  2015).  Elle  est  passée  de  1200
d’initiation a été concrétisée par l’installation des tonnes en 2000 à 866 tonnes en 2005, puis à
premiers  étangs  piscicoles  dans  plusieurs 1700 tonnes en 2010 et à 3720 tonnes en 2013
régions  du  pays  et  le  choix  du  Tilapia  du  Nil (FAO,  2015).  Cette  production  aquacole  est
(Oreochromis niloticus)  comme  principale largement insuffisante pour combler la demande
espèce d’élevage. Il s’en est suivi une  phase nationale en produit halieutique estimée à 250
de sensibilisation et d’implantation au cours de 000  -  300  000  tonnes.  De  même,  elle  reste
laquelle les efforts déployés ont été axés sur la éloignée  de  l’objectif  de  200  000  tonnes  à
pisciculture  en  zone  rurale  et  celle  en  milieu l’horizon 2020 visé par le Plan Stratégique de
lagunaire.  La  phase  de  la  régionalisation  du Développement de l’Elevage de la Pêche et de
développement de la pisciculture a été quant à l’Aquaculture  (PSDEPA)  de  la  Côte  d’Ivoire
elle  marquée  par  la  mise  en  place  de  divers (MIRAH, 2014).
projets régionaux dont l’objectif était de profiter
des  avantages  comparatifs  des  différentes En  Côte  d’Ivoire,  le  potentiel  de  production
régions  du  pays  pour  valoriser  les  acquis aquacole est fortement influencé par plusieurs
techniques  obtenus  dans  le  cadre  du  Projet facteurs  parmi  lesquels  le  profil  socio-
PNUD/FAO.  Il  s’agit  du  Projet  Bad-Ouest  de économique  des  pratiquants,  le  niveau  de
Développement de la Pisciculture dans la Région financement,  les  systèmes  de  production
Ouest, du Projet Belge de développement de pratiqués, la taille des exploitations, la qualité
cette activité dans la région du Moyen Comoé de l’eau, les espèces élevées, l’alimentation et
et du Projet d’Appui à la Recherche Agrono- les pratiques de production (Hetch et al., 2007 ;
mique (PARA) au Nord (MIPARH, 2008). Ces Ozigbo et al., 2014). Cette étude se propose de
divers efforts ont abouti à la création de fermes faire l’état des connaissances de la pisciculture
piscicoles  privées  dans  plusieurs  régions  du ivoirienne  après  60  années  de  pratique  en
pays. De plus, plusieurs Agents ont été formés caractérisant  les  fermes  piscicoles,  les
en technique d’élevage piscicole. Les stations promoteurs de fermes et l’activité piscicoles afin
d’alevinage publiques et des structures d’appui de comprendre la faible production de poissons
à la recherche piscicole ont été mis en place d’élevage.
(FAO, 2008).  Puis  nous  avons  assistés  à  la
diversification  des  espèces  à  élever APPROCHE METHODOLOGIQUE
(Oreochromis niloticus,  Oreochromis aureus,
Chrysichthys nigrodigitatus,  Heterobranchus
longifilis,  Clarias gariepinus)  et  à  la  mise  en Les bases de données sur les fermes piscicoles
place  de  fabriques  d’aliments  (FAO, 2008). ivoiriennes  ont  été  recueillies  auprès  de  la
Cependant,  les  perturbations  socio- Direction  de  l’Aquaculture  et  des  Pêches  du
économiques qu’ont connues le pays entre 1999 Ministère  des  Ressources  Animales  et
et 2011 ont entraîné une dégradation importante Halieutique (MIRAH) et du bureau national de
des infrastructures de production aquacole  avec l’Association  Nationale  des  Aquaculteurs  de
de nombreux autres préjudices  notamment les Côte d’Ivoire (l’ANAQUACI). Sur la base des
pertes en matériel biologique et en ressources documents consultés, 15 principales régions à
génétiques (FAO, 2008). Par ailleurs, cette crise fort potentiel aquacole ont été identifiées et une
a  occasionné  l’interruption  de  certains enquête a été réalisée sur 301 fermes piscicoles
programmes économiques et financiers qui a dans 37 départements de mai à novembre 2013
conséquemment  freiné  les  investissements (Kimou et al., 2016). L’enquête a été réalisée à
prévus pour la modernisation du sous-secteur l’aide d’un questionnaire élaboré avec le logiciel
d’élevage. Cette situation a provoqué un recul Sphinx  4.5  et  des  fiches  de  renseignements
de  la  productivité  et  de  la  compétitivité  des élaborées à partir du logiciel Word. Les fermes

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enquêtées ont été visitées puis les documents redistributions des poissons après sexage, avec
de gestion ont été consultés. Les données sur réduction de la densité de mise en charge pour
les caractéristiques des fermes, le profil socio- la phase du grossissement.
économique  des  promoteurs,  le  système  de
production, les espèces élevées, les structures ANALYSES STATISTIQUES
d’élevage,  l’alimentation  des  poissons,  les
pratiques aquacoles et la production piscicole Les données recueillies sur les fermes ont été
ont  été  relevées  au  cours  de  l’enquête.  Les traitées  à  partir  du  logiciel  Sphinx  4.5  et
enquêtes  ont  concerné  les  pisciculteurs  en présentées  sous  forme  de  pourcentage.  Les
activité.  Toutes  les  fermes  accessibles  par comparaisons entre les pourcentages ont été
2
Région, Département et Sous préfecture visités éffectuées  avec  les  tests  de  χ     sur  Statistica
ont été enquêtées. Au cours de ces enquêtes, 7.1.
les  associations  locales de  pisciculteurs,  les
représentants régionaux de l’ANAQUACI, les
Directions régionales et Départementales du RESULTATS
Ministères  des  Ressources  Animales  et
Halieutiques et de l’ANADER ont été rencontrés
LOCALISATION DES FERMES
pour compléter les données sur la localisation
des  fermes  par  région.  La  classification  de
Les fermes piscicoles sont présentes sur presque
systèmes piscicoles semi-intensif et extensif
toute l’étendue du territoire ivoirien à l’exception
a été faite selon la description adoptée par New
(1987),  Layrol  (1996)  et  Lazard  (2009).  Au du District du Zanzan (régions du Boukani et du
niveau  des  pratiques  de  production,  les Gontougo) et des régions du Hambol, du N’Zi,
différentes phases d’elevage réalisées par les du  Tchologo,  de  la  Bagoué,  du  Folon  et  du
pisciculteurs  ont  permis  de  caractériser  les Worodougou qui n’enregistrent pas une réelle
cycles de production désignés en cycle complet activité  piscicole  (Figure  1).  Les  régions  du
d’élevage et en cycle unique (lorsque le tilapia Tonkpi, du Haut Sassandra, de la Nawa, du Goh,
n’est  pas  sexé  et  que  toutes  les  phases de  la  Marahoué  et  de  l’Indénié  Djuablin
d’élevage sont réalisées en une fois). Le cycle présentent  les  plus  fortes  concentrations  de
« reproduction  +  grossissement »  est pisciculteurs  (Figure  2).  Toutefois,  le  District
caractérisé par  le sexage  du tilapia  après  la d’Abidjan  enregistre  la  plus  forte  production
reproduction suivie de l’élevage dans d’autres piscicole  en  2013  avec  la  présence  de  deux
structures jusqu’à la taille marchande. Dans le grandes fermes en système de production hyper-
cycle de « reproduction + prégrossissement + intensif et intensif que sont HYDROFISH (720
grossissement »,  l’on  procède  à  deux tonnes en 2012) et PSAT (28 tonnes en 2012).

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Figure 1 : Districts, Régions, Départements et Sous préfectures de production piscicole en Côte
d’Ivoire.
Districts, Regions, Departments and Sub prefectures of fish production in Côte d’Ivoire.

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Figure 2 : Population et production aquacole par région ivoirienne en 2012.
Côte d’Ivoire fish farms population and production by region in 2012.

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CARACTERISATION  DES  FERMES Sud Comoé (10,3 à 15,9 %). Les fermes sont


PISCICOLES situées en zone rurale (62,5 %) pour la pluspart.
Parmi elles, 53,8 % ont une durée d’existence
Les caractéristiques des 301 fermes enquêtées inférieure  à  10  ans.  La  superficie  en  eau
dans  les  régions  de  la  Marahoué,  du  Haut exploitée est inférieure à un hectare pour 65,4
Sassandra,  du  Tonkpi,  de  la  Cavally,  de % des pisciculteurs. Sur 72,1 % de ces fermes,
l’Agnéby-Tiassa,  du  Gôh,  de  la  Nawa,  des le promoteur est lui-même le gérant et le nombre
Grands Ponts, du Sud Comoé, de Gbeké, du de personnes employées est compris entre 2
Bélier, de la Marahoué, de la Mé, de l’Indénié et 4. Les différences de pourcentages calculés
Djuablin,  et  du  Moronou  sont  présentées  au sont significatives pour la localisation des fermes
Tableau 1. La majorité des fermes enquêtées χ 2
(      = 18,69 ; p < 0,05 ; dl = 1) et la gestion ou
est située dans les régions de la Marahoué, de 2
l’Indénié Djuablin, du Gôh, de la Nawa, et du χ
non de la ferme par le promoteur (     = 233,31 ;

Tableau 1 : Caractéristiques des fermes enquêtées (n = 301)
Characteristics of the farms surveyed (n = 301)

  Effectif  Pourcentage      Pourcentages 


Paramètres  (%)  Cumulés (%) 
Région 
Marahoué  48  15,9  15,9 
Indénié Djuablin  47  15,6  31,5 
Gôh  37  12,3  43,8 
Nawa  35  11,6  55,4 
Sud Comoé  31  10,3  65,7 
La Mé  17  5,6  71,3 
Haut Sassandra  16  5,3  76,6 
District d’Abidjan  14  4,7  81,3 
Agnéby-Tiassa  11  3,7  85,0 
Bélier  10  3,3  88,3 
Tonkpi  9  3,0  91,3 
Grands ponts  9  3,0  94,3 
Cavally  8  2,7  97,0 
Gbekè  7  2,3  99,3 
Moronou  2  0,7  100 
Localisation  
Urbaine et périurbaine  113  37,5  100 
Rurale   188  62,5  62,5 
22
χχ          18,69*(dl = 1)     
Nombre d’année d’existence 
Moins de 5 ans   80  26,6  26,6 
5 - 10 ans  82  27,2  53,8 
10 - 15 ans  51  16,9  70,7 
15 - 20 ans  49  16,3  87,0 
20 - 25 ans  20    6,6  93,6 
Plus de 25  19    6,3  100 
Superficie en eau exploitée (ha) 
Moins de 1  197  65,4  65,4 
1 - 2  69  22,9  88,3 
Plus de 2  35  11,6  100 
Nombre de travailleurs 
1  92  30,6  30,6 
2 - 4  155  51,5  82,1 
Plus de 4  54  17,9  100 
Le promoteur est le gérant de sa ferme ? 
Oui  217  72,1  72,1 
Non  84  27,9  100 
2
χ 2  233,31*(dl = 1)     
χ

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p < 0,05 ; dl = 1). 18 (6 %) sont des femmes. Parmi eux, 252 soit
83,7 % sont âgés de plus 40 ans. Au total, 183
PROFIL  SOCIO-ECONOMIQUES  DES promoteurs de fermes piscicoles (60,8 %) sont
PROMOTEURS DE FERMES PISCICOLES des agriculteurs, 18,9 % sont des salariés et
12,6  %  sont  des  opérateurs  économiques.
Le  Tableau  2  présente  les  caractéristiques Seulement 23 pisciculteurs (7,6 %) exercent la
socio-économiques des promoteurs de fermes pisciculture  comme  activité  principale.  Les
enquêtées.  Sur  301  fermes  visitées,  263 différences  de  pourcentages  calculés  sont
promoteurs (87,4 %) sont ivoiriens. Au total 283 χ2
significatives pour le genre du promoteur (      =
promoteurs (94,0 %) sont de sexe masculin et 58,77 ; p < 0,05 ; dl = 1).

Tableau 2  :  Caractéristique  socio-économique  des  promoteurs  de  fermes  (n=301)

Socio economic characteristics of the fish farms owners (n=301)

Pourcentage      Pourcentages 
Paramètres  Effectif 
(%)  Cumulés (%) 
Origine du promoteur 
Autochtone  152  50,5  50,5 
Allochtone  111  36,9  87,4 
Allogène  38  12,6  100 
Genre                  
Masculin  283  94,0  94,0 
Féminin  18    6,0  100 
22
χχ            58,77*(dl = 1)     
Age du promoteur 
Moins de 30 ans  3    1,0    1,0 
30-40 ans  46  15,3  16,3 
40-50 ans  92  30,6  46,9 
50-60 ans   91  30,2  77,1 
plus de 60 ans   69  22,9  100 
Fonction du promoteur 
Salarié  57  18,9  18,9 
Opérateur économique  38  12,6  31,5 
Agriculteur  183  60,8  92,3 
Pisciculteur  23    7,6  100 

SYSTEMES D’ELEVAGE DES POISSONS dans les régions des Grands Ponts, de l’Agnéby
Tiassa, et du Moronou où il est retrouvé sur 100
Sur  les  301  pisciculteurs  interrogés,  les %  des  fermes  visitées,  suivi  des  régions  du
systèmes  d’élevage  rencontrés  sont  les Tonkpi, du Cavally, du Sud Comoé, du Gbeké,
systèmes intensifs, semi-intensif, extensif et la
de l’Indénié Djuablin et de la Mé où il représente
rizipisciculture.  156  personnes  pratiquent  le
plus de 50 % des fermes enquêtées. L’extensif
système  semi-intensif  (51,8  %),  129  les
systèmes extensif (42,9 %), 12 la rizipisciculture est dominant et pratiqué par plus de 50 % des
(4,0 %) et 4 l’intensif (1,3 %). Le système intensif fermes dans les régions de la Marahoué, du Haut
est  retrouvé  exclusivement  dans  le  District Sassandra,  de  la  Nawa,  et  du  Gôh.  La
d’Abidjan, et dans les régions du Bélier et de la rizipisciculture a été retrouvé dans la région de
Mé. Le semi-intensif est pratiqué en majorité la Nawa exclusivement (Figure 3).

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234 YAO A. H. et al

Pisciculteurs

Figure 3 : Répartition des systèmes de production piscicoles pratiqués par région.
Distribution of fish production systems practiced by region.

ESPECES  ELEVEES rencontrées. L’hétérotis est retrouvé sur 91 à


100  %  des  fermes  enquêtées  dans  le  Haut
Le tilapia Oreochromis niloticus (96,68 %), les Sassandra, le Gôh, la Nawa et sur 50 à 71 %
silures  (29,24  %)  Hetebranchus longifilis, dans les régions de la Marahoué, du Tonkpi et
Clarias gariepinus et leur hybride Hetero-claria, de l’Indénié Djuablin. Cette espèce est retrouvée
l’hétérotis Heterotis niloticus (56,81  %),  le à  une  fréquence  inférieure  à  50  %  dans  les
mâchoiron Chrysichthys nigrotigitatus (5,98 %), régions de l’Agnéby Tiassa, du Gbeké, du Sud
la  carpe africaine Labeo coubie (3,99 %) et le Comoé, du Bélier, de la Mé et des Grands Ponts.
poisson dormant Parachana africana (1 %) sont Les pisciculteurs enquêtés dans le Cavally et le
les espèces de poissons élevées sur les fermes. District  d’Abidjan  n’élèvent  pas  de  Heterotis
Le tilapia est retrouvé sur la majorité des fermes niloticus. Les silures sont retrouvés sur la totalité
(87,5 à 100 %) quelque soit la région considérée des fermes enquêtées dans le Tonkpi et 50 %
(Figure  4).  La  monoculture  du  tilapia  est des fermes enquêtées dans le Cavally et moins
pratiquée  sur  90  fermes  (29,90  %)  des  301 de 50 % dans les autres régions. Le mâchoiron
enquêtées. L’élevage en polyculture du tilapia est retrouvé sur 2 à 36 % des fermes des régions
avec d’autres espèces est pratiqué à 70,1 %. de l’Agnéby-Tiassa, du Sud Comoé, du District
La monoculture du tilapia est réalisée par 75 % d’Abidjan, des Grands Ponts, de la Mé, du Gôh
des pisciculteurs en intensif, 39,10 % en semi- et de l’Indénié Djuablin. Le poisson dormant est
intensif  et  20,16  %  en  extensif.  Sur  les  301 très peu retrouvé dans les régions du Gôh (2,7
fermes  enquêtées,  les  associations  tilapia  et %) et de l’Indénié Djuablin (4,26 %). La carpe
hétérotis (36,2 %), tilapia, silure et hétérotis (42 est retrouvée dans la Marahoué (14,58 %), le
%),  tilapia  et  silures  (27  %)  sont  les  plus Gôh (18,81 %), et le Gbeké (14,29 %).

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


Pratiques et production piscicole ivoirienne 235

Figure 4 : Espèces de poissons élevées par région.
Fish species bred by region.

STRUCTURES D’ELEVAGE majorité des cas aux autres structures d’élevage.
Les associations les plus pratiquées sont les
Les différentes structures d’élevage rencontrées étangs de dérivation et les étangs de barrage
sur les fermes piscicoles sont présentées au retrouvés sur 40,5 % des fermes. Les étangs
Tableau 3. Les étangs de dérivation (93,69 %) de barrage sont retrouvés sur la majorité des
et les étangs de barrages (47,84 %) sont les fermes des régions de la Marahoué, de la Nawa,
plus  fréquents  sur  les  fermes.  Les  barrages du  Gôh,  de  l’Agnéby  Tiassa  et  de  l’Indénié
dérivés (3,32 %), les bassins (1,33 %), les cages Djuablin.  Les  étangs  de  barrages  sont  plus
flottantes (1,33 %), les cages enclos (0,66 %), utilisés dans les systèmes d’élevage extensif
les happas (0,33 %), les raceway (0,33 %) et (66,7 %) et rizipisciculture (100 %). A l’inverse,
les  bouteilles de joug (0,33 %) sont très peu les étangs de dérivation dominent sur les fermes
utilisés. Quelque soit la région considérée, les en système semi-intensif tandis que l’intensif
étangs  de  dérivation constituent  la  principale est caractérisé par l’élevage des poissons en
structure d’élevage utilisée par les pisciculteurs. bassins, en cages flottantes et en cages enclos.
Ils sont retrouvés exclusivement sur 147 fermes Les barrages dérivés ont été retrouvés sur 7 %
(48,80 %). Ces étangs sont associés dans la des fermes en système extensif.

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


236 YAO A. H. et al

Tableau 3 : Structures d’élevage utilisées sur les fermes enquêtées
Rearing structures used on the farms surveyed

Pourcentage      Pourcentages 
Structures de production  Effectif 
(%)  Cumulés (%) 
Etang de dérivation  146  48,50  48,50 
Etang de dérivation  + étang de barrage  122  40,53  89,03 
Etang de barrage  15  4,98  94,01 
Etang dérivation + étangs de barrage + 
6  2,00  96,01 
barrage dérivé 
Etang de dérivation + barrage dérivé  3  1,00  97,01 
Etangs de barrage + barrage dérivé  1  0,33  97,34 
Etang de dérivation + happas  1  0,33  97,67 
Etang de dérivation + cages enclos  1  0,33  98,00 
Etang de dérivation + cages flottantes  1  0,33  98,33 
Cages enclos + cages flottantes  1  0,33  98,66 
Etangs de dérivation + bassins   1  0,33  98,99 
Etang de dérivation + bassins + cages 
1  0,33  99,32 
flottantes 
Bassins + raceways + bouteille de joug  1  0,33  99,65 
Bassins + cages flottantes  1  0,33  100 
Total  301  100   

ALIMENTATION DES POISSONS D’ELEVAGE produits agro-alimentaires. Les sous-produits
agro-alimentaires d’origine végétale tels que le
Les aliments utilisés sur les fermes pour nourrir son de riz, le son de maïs, la farine basse de riz
les poissons d’élevage peuvent être regroupés et le son de blé sont utilisés régulièrement pour
en quatre différents types. Il s’agit des aliments nourrir directement les poissons d’élevage. Ils
commerciaux  que  sont  les  commerciaux sont de moindre coût, produits localement et
importés, nationaux et provendiers (produits et disponibles  en  grande  quantité  dans  les
commercialisés par les vendeurs privés de sous- différentes localités visitées. Les aliments non
produits et de matières premières), les aliments conventionnels d’origine animale et végétale sont
produits  par  les  pisciculteurs  eux-mêmes utilisés  dans  l’alimentation  des  poissons
(produits à partir des produits et sous-produits d’élevage. Ce sont les feuilles de tarot, de manioc
agro-alimentaires),  les  sous-produits  agro- et de patate, les fientes de poulet et les lisiers
alimentaires et les aliments non conventionnels. de porcs, les algues croissantes sur les plans
Les aliments commerciaux industriels importés d’eaux, les restes de nourritures et les déchets
sont ceux produits par Skretting et Raanan fish domestiques. Ces aliments sont utilisés seuls
feeds.  Les  aliments  commerciaux  nationaux ou  en  association  avec  les  autres  types
sont  constitués  d’aliments  produits  et d’aliments. Les aliments commerciaux ont été
commercialisés par deux sociétés implantées retrouvés sur 27,57 % des fermes. En revanche,
en Côte d’Ivoire que sont IVOGRAIN et FACI. 17,94 % des pisciculteurs enquêtés produisaient
Les  aliments  provendes  sont  retrouvés  dans leurs propres aliments. Au total 71,10 % des
certains Départements et Sous-préfectures à pisciculteurs  utilisait  les  sous-produits
forte activité piscicole (Abidjan, Anyama, Dabou, agroalimentaires  alors  que  22,26  %  des
Bingerville, Abengourou et Agnibilékrou). Ils sont pisciculteurs  utilisaient  les  aliments  non
produits par les vendeurs privés de sous-produits conventionnels.  Le  Tableau  4  présente  les
et  de  matières  premières,  des  sociétés caractéristiques  de  ces  différents  groupes
industrielles  de  transformation  de  produits d’aliments.  L’analyse  des  fréquences
agricoles (Grand Moulin d’Abidjan) et la station d’utilisation des différents types d’aliment par
expérimentale d’Aquaculture de Layo du Centre région nous permet d’observer que les régions
de Recherche Océanologique d’Abidjan (CRO). du Cavally, des Grands Ponts, du Sud Comoé,
Certains  pisciculteurs  formulent  eux-mêmes du District d’Abidjan, de l’Agnéby Tiassa sont
leurs  aliments  à  partir  des  produits  et  sous- caractérisées par une forte utilisation (50 - 100

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


Pratiques et production piscicole ivoirienne 237

%) d’aliments commerciaux. Celles du Tonkpi Bélier, du Moronou, de l’Indénié Djuablin et de
et  des  Grands  Ponts  (55,50  -  66,66  %) la  Mé.  Les  plus  fortes  proportions  de
enregistrent  le  plus  grands  nombre  de pisciculteurs  utilisant  un  aliment  non
pisciculteurs qui produisent leurs aliments. Les conventionnel (37,14 - 43,75 %) sont obtenues
sous-produits sont utilisés par plus de 50 % des dans la Marahoué, la Nawa, le Gbeké et le Bélier
pisciculteurs  de  la  Marahoué,  du  Haut
(Figure 5).
Sassandra, de la Nawa, du Gôh, du Gbéké, du

Tableau  4  :  Caractéristiques  des  différents  aliments  utilisés  sur  les  fermes  enquêtées
Characteristics of different feeds used on the farms surveyed

Aliments        Mode de           Tailles des       Teneur en protéines         Coût Pourcentage*


       présentation         granulés       Minimum    Maximum      Minimum     Maximum   d’utilisation
               (mm) (%)         (%)         (F cfa/kg)   (F cfa/kg)       (%)
    0,5
    0,7
Commerciaux Granulés,     1,0 30,00        57,00     600          1250
importés extrudés     1,8
flottants     2,5        27,75
    4,5
Commerciaux        Farine/granulés      2 28,00        30,15     240          295
nationaux
Commerciaux        Farine/granulés      2             16,20        24,29     110          300
provendiers
Produits par les       Farine       -             10,92        35,90       25          270        17,94
pisciculteurs
Sous-produits        Farine       -               9,45        16,20       20          105        71,10
Aliments non        Brute       -                -           -                    -            -        22,26
conventionnels
*Différents aliments peuvent être rencontrés sur une même ferme

Figure 5 : Fréquence d’utilisation des différents types d’aliment par région.

Frequency of different feeds used by region.

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


238 YAO A. H. et al

PRATIQUES AQUACOLES ment  avec  le  sexage  du  tilapia  et  les


pisciculteurs  respectent en majorité les bonnes
Une  proportion  de  58,1  %  des  pisciculteurs pratiques d’élevage. Cependant, ce système est
effectue les pêches de contrôle et 45,8 % trient caractérisé par une quantification de l’aliment
leur stock de poissons au cours de l’élevage. avec  un  instrument  de  mesure.  Dans  les
Un  total  de  72,4  %  des  pisciculteurs  sexe  le systèmes  extensifs  et  rizipisciculture,  les
tilapia, parmi eux, 75,7  % le  font à  une taille pisciculteurs utilisent les sous-produits associés
inférieure  à  40  g.  Le  cycle  de  production  de ou non aux aliments non conventionnels pour
poissons marchands est réduit aux stades de nourrir occasionnellement les poissons et ne
la  reproduction  et  du  grossissement  pour  la respectent pas les bonnes pratiques d’élevage
majorité  des  fermes  enquêtés  (40,9  %). en général. Les régions de la Marahoué, du Haut
L’aliment utilisé est régulièrement distribué par Sassandra, de la Nawa et du Gôh enregistrent
54,8  %  des  pisciculteurs.  Très  peu  de les  plus  fortes  populations  de  pisciculteurs
pisciculteurs distribuent un aliment par espèce pratiquant le système extensif. Les pisciculteurs
(13,3 %) et par stade de production (19,6 %). de ces régions utilisent massivement les sous-
La plupart des  pisciculteurs (71,4 %) utilisent produits  associés  ou  non  aux  aliments  non
un instrument de mesure pour quantifier l’aliment conventionnels  et ne  suivent  pas les  bonnes
à distribuer contre 18,6 % qui utilisent un tableau pratiques  aquacoles.  Les  différences  de
de rationnement (Tableau 5). Dans la pratique pourcentages calculés sont significatives pour
du système intensif, les pisciculteurs utilisent χ2
la pratique des pêches de contrôle (     = 7,98 ;
2
exclusivement  les  aliments  commerciaux χ
p < 0,05 ; dl = 1),  le sexage du tilapia (    =
(importés  et/ou  locaux)  qu’ils  distribuent 60,55 ; p < 0,05 ; dl = 1), la distribution d’aliments
régulièrement et respectent les bonnes prati- 2
spécifiques  aux  stades  de  croissance  ( χ    =
ques d’élevage et d’alimentation. Au niveau du 2
système  semi-intensif,  les  différents  types χ
111,26 ; p < 0,05 ; dl = 1) et à l’espèce (    =
d’aliment inventoriés sont distribués régulière- 162,26 ; p < 0,05 ; dl = 1).

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


Pratiques et production piscicole ivoirienne 239

Tableau 5 : Pratiques de production des pisciculteurs enquêtées (n = 301).
Production practices of fish farmers surveyed (n = 301).

  Fréquence  Pourcentage      Pourcentages 


Paramètres  (%)  Cumulés (%) 
Pisciculteur fait les pêches de contrôle 
Oui  175  58,1        58,1 
Non  126  41,9      100 
2
χχ2            7,98*(dl = 1)     
Pisciculteur tri les poissons  
Oui  138  45,8  45,8 
Non  163  54,2  100 
2
χχ2  2,08     
Pisciculteur sexe du tilapia  
Oui    218     72,4  72,4 
Non  83     27,6  100 
2
χχ2           60,55*(dl = 1)     
Taille de sexage du tilapia (g) 
Moins de 20     24     11,0           11,0 
20-40   141     64,7  75,7 
40-60    18       8,3  84,0 
60-80    16       7,3           91,3 
80-100      8       3,7  95,0 
 Plus de 100    11       5,0  100 
Cycle de production pratiqué 
Cycle unique  87  28,9  28,9 
Reproduction + grossissement  123  40,9  69,8 
Reproduction + pregrossissement + 
grossissement  50  16,6  86,4 
Pregrossissement + grossissement  12    4,0  90,4 
Cycle normal  29    9,6  100 
Fréquence de distribution d’aliment 
Régulière  165  54,8  54,8 
Occasionnelle  136  45,2  100 
2
χ2           2,80 * (dl = 1)     
χ
Le pisciculteur distribue un aliment par stade de croissance  
Oui                    59  19,6  19,6 
Non  242  80,4  100 
χ22           111,26 * (dl = 1)     
χ
Pisciculteur utilise l’aliment en fonction de l’espèce 
Oui             40    13,3    13,3 
Non                 261    86,7  100 
2
χχ2           162,26*(dl = 1)     
Quantification de l'aliment à distribuer 
Tableau de rationnement  56  18,6  18,6 
A volonté  30  10,0  28,6 
Instrument de mesure  215  71,4  100 

POTENTIEL  DE  PRODUCTION  PAR rizipisciculture  (395,25  ±  163,65  tonnes/an).


SYSTEMES ET PAR REGION Les régions de la Marahoué, de la Nawa, du
Gôh,  du  Gbeké,  du  Moronou  et  de  l’Indénié
Les valeurs de production maximales ont été Djuablin  présentent  les  proportions  les  plus
enregistrées  en  système  intensif  (720 000 élevées de fermes ayant une production annuelle
tonnes/an)  suivi  du  semi-intensif  (2937,12  ± inférieure  à 1tonne/an. Le Haut Sassandra, la
7180,64 tonnes/an). En revanche, les valeurs Cavally, les Grands Ponts, le Sud Comoé, le
minimales  ont  été  enregistrées  en  système District d’Abidjan et le Moronou enregistrent les
extensif  (519,93  ±  602,69  tonnes/an)  et  en proportions  les  plus  élevées  de  production

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


240 YAO A. H. et al

annuelle par ferme comprise entre 1 tonne et 5 la Nawa, et du Sud Comoé qui concentrent les
tonnes/an. Très peu de pisciculteurs (0 - 20 %) proportions les plus élevées (10,30 - 15,95 %)
dans  les  régions  visitées  ont  une  production de pisciculteurs ont les plus contributions (1,82
annuelle variant entre 5 tonnes et 10 tonnes/an. -  5,25  %)  à  la  production  aquacole  totale.  A
Seuls  les  Districts  d’Abidjan (21,40 %) et les l’inverse, le District d’Abidjan et la région de la
régions du Bélier (20,0 %), de la Mé (17,60 %) Mé avec 4,65 % et 5,65 % respectivement de
et  du  Sud  Comoé  (3,20  %)  enregistrent  une
pisciculteurs  enquêtés  représentent  58,25  %
production annuelle supérieure à 10 tonnes/an
(District  d’Abidjan)  et  10,09  %  (La  Mé)  de  la
sur quelques fermes (Figure 6). Les régions de production aquacole totale (Figure 7).
la Marahoué, de l’Indénié Djuablin, du Gôh, de

Figure 6 : Potentiel  de production annuelle des fermes dans les régions enquêtées.
Annual production capacities of fish farmers in the region surveyed.

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


Pratiques et production piscicole ivoirienne 241

Figure 7 : Répartition de la production piscicole annuelle par région.
Annual fish production repartition by region.

DISCUSSION Selon Oswald et al. (2003), la polyculture de O.


niloticus  avec  H. niloticus  est  devenue
systématique en Côte d’Ivoire dès les années
La pisciculture en Côte d’Ivoire est pratiquée sur 80. De sorte qu’en 2000,  cette espèce était le
presque  toute  l’étendue  du  territoire  ivoirien. troisième poisson par ordre d’importance produit
Cette  expansion  de  l’activité  piscicole  serait en Côte d’Ivoire. En 2014, les résultats de la
due au vaste réseau hydrographique de la Côte présente étude montrent qu’elle est la deuxième
d’Ivoire,  favorable  à  la  pisciculture  et  aux espèce élevée. L’expansion de l’élevage de ce
nombreux projets de développement piscicole poisson serait due au fait qu’il valorise bien les
initiés depuis 1974 (FAO-AQUASTAT, 2005 ; fonds  de  vase  et  la  nourriture  naturelle  des
FAO, 2008 ; MIPARH, 2008). Cependant, les étangs  (Oswald  et al.,  2003  ;  Monentcham
fortes  dispersions  et  intensités  de  l’activité Monentcham,  2009).  De  plus,  cette  espèce
piscicole au Sud-Est, au Centre et au Centre- présente une grande taille marchande. En terme
Ouest seraient dues au fait que ces zones ont économique, l’association de Heterotis niloticus
été les régions de promotion de la pisciculture à Oreochromis niloticus correspondrait à une
pendant  de  longue  années  (FAO,  2008). utilisation  intensive  de  la  surface  exploitée
Toutefois, la pisciculture demeure une activité (Oswald  et al.,  2003).  Conséquemment,  la
secondaire  pratiquée  en  majorité  par  les polyculture  de  O. niloticus  et  de  H. niloticus
agriculteurs ivoiriens sur des petites étendues initialement observée dans les régions du Centre-
d’eau. En effet, les superficies exploitées restent Ouest  (Haut  Sassandra,  Gôh,  Nawa  et
inférieurs à 1 hectare dans l’ensemble. Le tilapia Marahoué)  s’est  présentement  élargie  à
Oreochromis niloticus  demeure  la  principale certaines régions de l’Ouest, de l’Est, du Sud
espèce élevée sur les fermes. Une augmentation et du Centre (Tonkpi, Indénié Djuablin, Agnéby
de la polyculture du tilapia avec hétérotis par Tiassa,  Gbekè,  Sud  Comoé,  Bélier,  Mé  et
rapport aux silures est observée sur les fermes. Grands  Ponts).  Ce  résultat  confirmerait  la

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


242 YAO A. H. et al

rentabilité économique de son association avec influencée par le système extensif promu dans
O. niloticus en élevage en étangs. Une faible cette  région.  Il  en  est  de  même  pour  les
fréquence d’élevage de mâchoiron Chrysichthys proportions  élevées  de  systèmes  intensifs  et
nigrodigitatus, de carpe africaine Labeo coubie semi-intensifs dans les régions de l’Est, du Sud,
et de dormant Parachana africana est observée du Centre, et de l’Ouest. En effet, ces régions
sur les fermes enquêtées. De plus les conditions du Centre-ouest (Marahoué, Haut Sassandra,
et les techniques d’élevage restent méconnues Nawa  et  Gôh)  ont  été  les  zones  de  projets
des pisciculteurs qui les élèvent au regard des d’aquaculture  orientés  vers  les  systèmes
faibles poids marchands de poissons produits. extensifs d’élevage auprès des populations à
En effet, concernant Labeo coubie, les travaux faibles revenus (MIPARH, 2008). Ces projets
de Morissens et al. (1996) et Da Costa et al. avaient pour objectifs de lutter contre la pauvreté
(1999) rapportaient avant les années 2000 une et  de  pourvoir  les  populations  en  protéines
croissance journalière de (3,38 g/j - 3,60 g/j) en animales. A l’inverse, vers les années 1990, les
étangs  fertilisés  avec  utilisation  d’aliments objectifs de développement de la pisciculture en
granulés. Aussi, l’élevage du mâchoiron a t-il Côte  d’Ivoire  ont  été  réorientés.  Le  système
débuté en Côte d’Ivoire depuis les années 1980. d’élevage semi-intensif et la professionnalisation
En 1995, la FAO (2008) rapportait une production de la filière piscicole avec l’utilisation d’aliment
nationale de 300 tonnes de mâchoiron élevés composé avaient été promus dans les régions
contre 20 tonnes en 2005. L’abandon croissant de l’Ouest, du Sud et de l’Est afin d’améliorer la
de l’élevage de ce poisson serait lié à plusieurs production commerciale de poissons d’élevage
difficultés que sont entre autres le manque de (FAO, 2008 ; MIPARH, 2008 ; FAOCI-RAFW,
larves et de juvéniles, les difficultés de gestion 2009).  Ces  pratiques  piscicoles  ont
des stocks de géniteurs, le cycle de production conséquemment influencé les potentialités de
relativement  long  de  12  à  18  mois  et  une productions  piscicoles  régionales.  Ainsi,  les
dépendance  aux  régimes  alimentaires  hyper régions du Centre-ouest à forte concentration
protéiniques en élevage. Les résultats obtenus de pisciculteurs présentent-elles les productions
permettent de dire que malgré les politiques de les plus faibles. Cette faible production serait
diversification  des  espèces  d’élevage  et  les due d’une part à la prédominance de la pratique
travaux de recherches effectués, le choix des du  système  extensif  et  d’autre  part  au  non
espèces à élever revient aux pisciculteurs. Aussi respect des bonnes pratiques piscicoles. Ces
la  forte  utilisation  de  sous-produits  agro- pratiques traduisent une volonté de réduire les
alimentaires pour nourrir les poissons justifierait coûts de production de poisson marchand en
le  choix  des  espèces  peu  exigeantes.  Les augmentant  la  contribution  des  ressources
structures  d’élevage  restent  en  majorité  les naturelles  à  l’alimentation  des  poissons.
étangs  de  dérivation.  De  plus,  les  choix  des L’utilisation  élevée  de  sous-produits  agro-
systèmes de production de poisson et du type alimentaires de moindre coût comme aliments
d’aliment  à  utiliser  sont  influencés  par  les sur la plupart des fermes et le non respect des
capacités financières des promoteurs et le type bonnes pratiques d’alimentation des poissons
de  projet  promu  dans  la  région.  Aussi  les ont  également  influencés  les  capacités  de
exploitations piscicoles sont-elles dominées par production des fermes (La Croix, 2004 ; Koumi
les systèmes semi-intensif (51,80 %) et extensif et al.,  2015).  Cette  situation  de  faibles
(42,9 %) d’élevage de tilapia, d’heterotis et de investissements,  associée  à  de  faibles
silure. Cette expansion de système extensif, peu rendements  aquacole  en  système  extensif  a
productif a été rapportée par Gabriel et al. (2007) déjà été rapportée par Hecht (2007) et Ranjet et
et Hecht (2007) dans la majorité des pays de Kurup (2013). Par conséquent le développement
l’Afrique  subsaharienne.  Par  ailleurs,  les de la pisciculture ivoirienne devrait passer par la
résultats  obtenus  permettent  d’observer  une promotion de systèmes intensif et semi-intensif
répartition  des  systèmes  pratiqués,  des auprès  des  investisseurs  économiques
différents types d’aliments utilisés, des espèces nationaux et étrangers à l’instar du Nigéria, de
élevées, et de la production en fonction de la l’Uganda, du Cameroun et du Kenya (Hecht,
région.  Les  fortes  proportions  de  système 2007).  Mais  aussi  devrait-il  passer  par  la
extensif dans les régions du Centre-ouest avec promotion de bonnes pratiques d’élevage auprès
l’utilisation  massive  de  sous-produits  agro- des  pisciculteurs  avec  l’utilisation  d’aliments
alimentaires de moindre coût comme aliments composés  de  qualité  de  moindre  coût  et
pourraient  refléter  une  culture  piscicole accessibles sur tout le territoire ivoirien. De plus,

Agronomie Africaine 29 (3) : 227 - 244 (2017)


Pratiques et production piscicole ivoirienne 243

la  mise  à  disposition  d’intrant  (alevins  et FAOCI-RAFW, 2009. Plan directeur de la pêche et


aliments) de qualité aux pisciculteurs dans les de  l’aquaculture  (PDPA),  Rapport  de  for-
régions à forte concentration de pisciculteurs mulation,    Ministère  de  la  Production  Ani-
aura-t-elle  pour  conséquence  d’améliorer  la male  et  des  Ressources  Halieutiques,
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extensif d’élevage de tilapia, de heterotis et de
Study  and  analysis  of  feeds  and  fertilizers
silures en étang. Ces fermes sont très répandues for  sustainable  aquaculture  development.
sur presque toute l’étendue du territoire ivoirien. FAO  Fisheries  Technical  Paper.  N°.  497.
Cependant, les zones de fortes concentrations Rome, Italie : pp 77 - 109.
de pisciculteurs restent peu productives à cause
Hem S., Legendre M., Trébaol L., Cissé A., Otémé
de la pratique de système extensive et le non
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