08 Enonciation PDF
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actant on désigne par le terme « actants de l’énonciation » les partenaires discursifs, qui
(de l’énonciation) peuvent jouer différents rôles: LOCUTEUR, ALLOCUTAIRE, DELOCUTE. Les
actants font partie du DISPOSITIF ENONCIATIF extra-verbal; ils s’opposent aux
actants de l’ENONCE, qui constituent le dispositif intra-verbal et dont quelques-uns
peuvent représenter des actants de l’énonciation.
acte énonciatif catégorie fondamentale en linguistique énonciative, l’acte énonciatif est défini comme
l’ensemble des OPERATIONS métalinguistiques sous-jacentes à toute production
d’un ENONCE (ou d’un texte) par un ENONCIATEUR dans une SITUATION
ENONCIATIVE déterminée. L’acte énonciatif est repéré par rapport à la situation
énonciative dépendant d’un LOCUTEUR et d’un REPERE.
allocutaire ce terme désigne un sujet participant à l’acte de communication considéré dans son
double statut de RECEPTEUR et de répondant à un ENONCE produit. C’est l’un des
rôles du DISPOSITIF énonciatif extra-verbal. L’allocutaire ou DESTINATAIRE
direct du message peut être singulier ou pluriel, nominal ou anonyme, réel ou fictif.
Les lieux d’inscription linguistique de l’allocutaire sont: les marques de la deuxième
personne (qui peut englober aussi le DELOCUTE: toi et lui=vous ), les appellatifs
vocatifs, les impératifs. La présence de l’allocutaire se fait sentir dans toute la
structuration de l’ENONCE, qui est construit de telle manière qu’il agisse sur celui
auquel il s’adresse. Parmi d’autres lieux d’inscription de l’allocutaire on peut
mentionner aussi le degré d’explicitation des informations énoncées, le choix de
l’appareil stratégique, le contenu de l’ENONCE.
allocution la situation d’allocution se définit par le nombre et le statut des partenaires discursifs.
L’acte d’allocution est l’acte par lequel le LOCUTEUR s’adresse à un
ALLOCUTAIRE.
assertion l’assertion est un type de communication institué entre co-énonciateurs qui consiste à
faire dépendre l’ENONCE du verbe locutoire fondamental dire: (Je te dis que) p.
L’assertion est aussi un acte évaluatif de jugement.
cadre les éléments constitutifs du cadre énonciatif sont: les protagonistes du discours, les
énonciatif circonstances spatio-temporelles, les conditions générales de la production/ réception
du message (canal, contexte socio-historique, contraintes de l’UNIVERS DU
DISCOURS). La linguistique énonciative étudie les rapports qui s’instaurent entre
l’ENONCE et le cadre énonciatif dans lequel il s’enracine. Dans le discours rapporté
il existe deux cadres énonciatifs imbriqués.
déictique les déictiques sont les unités linguistiques dont le fonctionnement (sélection et
interprétation) implique une prise en considération du rôle des ACTANTS de
l’ENONCE, de l’espace-temps du LOCUTEUR et éventuellement de celui de
l’ALLOCUTAIRE (v. aussi REPERE). Ces éléments sont encore désignés par les
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PREMIÈRE ASSISE THÉORIQUE
deixis la deixis est un mode particulier d’actualisation des domaines spatial, temporel,
personnel par rapport à la SITUATION ENONCIATIVE. Le terme de deixis est
polysémique: il désigne à la fois l’acte de référence à l’espace-temps de
l’ENONCIATION et l’ensemble des marques qui font référence à la situation: les
DEICTIQUES (pronoms personnels, démonstratifs, adverbes de lieu, et de temps,
système des temps verbaux, etc. ). On distingue trois types essentiels de deixis:
personnelle, spatiale, temporelle, les coordonnées déictiques fondamentales étant moi-
ici-maintenant. A ces types viennent s’ajouter encore deux catégories dont l’existence
n’est reconnue que par certains linguistes: la deixis notionnelle (B. POTTIER) et la
deixis sociale (CH. J. FILLMORE).La deixis spatio-temporelle est étroitement liée au
système des pronoms personnels et constitue le système des REPERES énonciatifs.
dispositif ce terme désigne l’ensemble d’éléments extra- et intra-verbaux déterminés par les
énonciatif coordonnées énonciatives. On distingue un dispositif énonciatif extra-verbal constitué
par la SITUATION D’ALLOCUTION, les caractéristiques des partenaires discursifs
(ACTANTS), les conditions concrètes de la communication, et un dispositif
énonciatif intra-verbal constitué par les ACTANTS de l’ENONCE, le verbe et les
différents types de REPERES.
distance ce concept permet d’appréhender le rapport que le SUJET ENONCIATIF veut établir
entre lui et son ENONCE. Si la distance est minimale, le sujet d’énonciation tend à
s’identifier au SUJET DE L’ENONCE, ce qui se manifeste par la présence explicite
de marqueurs spécifiques; c’est la caractéristique essentielle des discours
autobiographiques. Par contre, si la distance est maximale, le sujet d’énonciation tend
à devenir un sujet universaliste, à s’identifier à d’autres sujets et le discours acquiert
un caractère généralisant et objectivant; c’est le cas du discours didactique.
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PREMIÈRE ASSISE THÉORIQUE
énoncé le terme d’«énoncé » est, comme la plupart des termes d’une discipline qui est en
train de se constituer, surchargé de significations qui, souvent, varient avec
l’orientation théorique et avec les étapes de développement de la théorie. Le sens du
terme « énoncé » se délimite par une triple série d’oppositions:
• Enoncé/vs/ énonciation
Dans une première étape, « énoncé » s’opposait à ENONCIATION comme le terme
« produit » s’oppose à « production », le fabriqué à la fabrication. « L’énonciation
désigne, par opposition à l’énoncé, l’acte de production linguistique et non le résultat
de cette production. » (B. POTTIER, 1973). Peu à peu, le sens du terme se précise:
l’énoncé apparaît ainsi comme le résultat d’un ensemble d’OPERATIONS
énonciatives et prédicatives. Dans une théorie énonciative intégrante comme celle de
A. CULIOLI et de J.P. DESCLES, l’énoncé est conçu comme une unité composée par
un schéma de LEXIS qui est repéré par rapport à une SITUATION énonciative qui
dépend d’un LOCUTEUR et d’un REPERE temporel;
• Enoncé/vs/ phrase
L’énoncé n’est pas du même domaine que la phrase , qui est une unité analysée,
abstraite, au moyen de laquelle le linguiste rend compte des relations
distributionnelles. Les énoncés sont des « échantillons de parole » (J. LYONS, 1970)
La phrase apparaît donc comme une entité théorique, un ensemble d’unités combinées
selon les règles de la syntaxe, prises hors de toute situation de discours; ce que produit
le locuteur, ce qu’entend un auditeur ce n’est pas une phrase, mais un énoncé
particulier d’une phrase (O. DUCROT, 1980);
• Enoncé /vs/ texte
Pour certains linguistes, l’énoncé est une unité transphrastique: « toute partie du
discours, tenue par une seule personne, avant et après laquelle il y a silence de la part
de cette personne ». (Z.S.HARRIS). Ce terme est donc synonyme de ce que l’on
désigne aujourd’hui par le terme “intervention”. Il ne correspond donc pas
obligatoirement à la phrase, il peut même être constitué de plusieurs phrases ou d’une
phrase asyntaxique (phrase incomplète, tronquée, inorganisée). Pour d’autres
linguistes, l’énoncé est un « segment discursif élémentaire » (J.S. ANSCOMBRE, O.
DUCROT, 1978). Deux axes se trouvent ainsi impliqués dans la polysémie du mot
« énoncé »: l’axe langue/parole et l’axe du rang (dimension de l’unité envisagée).
Voici quelques unes des définitions proposées pour le terme « énoncé »:
Orientation Enoncé
J. LYONS échantillon de parole
B. POTTIER produit de l’énonciation
Z.S. HARRIS partie de discours tenue par une seule personne
J.S. ANSCOMBRE segment discursif élémentaire
O. DUCROT
A. CULIOLI résultat d’un ensemble d’opérations énonciatives et prédicatives; unité composée d’un
J.P.DESCLES schéma de lexis, repéré par rapport à une situation énonciative, à un locuteur, à un
repère temporel et à un événement auquel l’énoncé réfère
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PREMIÈRE ASSISE THÉORIQUE
énonciation le sens du terme « énonciation » s’est constitué par des délimitations successives.
Dans un premier temps, l’énonciation était définie comme un acte de parole
individuel, considéré dans sa singularité, comme une prise en charge par le SUJET des
virtualités de la langue. C’est la « mise en fonctionnement de la langue par un acte
individuel d’utilisation ».( E. BENVENISTE, 1970). Cette définition procède d’une
conception qui rejette l’analyse du discours, en ne faisant aucune place à la dimension
sociale de l’activité langagière. Avec l’extension du domaine de la linguistique
énonciative, une nouvelle optique s’impose et l’énonciation est conçue comme une
structure non linguistique qui sous-tend la communication. L’objet de la recherche
devient ainsi le rapport institué entre les instances sociales et l’activité langagière.
L’énonciation est opposée à l’ENONCE comme la production s’oppose au produit,
mais ces deux termes artificiellement opposés pour autant que l’acte de production ne
peut être appréhendé qu’à travers le produit, se rapprochent considérablement. (C.
KERBRAT- ORECCHIONI, 1980). Enonciation et énoncé représentent le même
objet considéré sous deux angles différents: l’énonciation comme objet événement et
l’énoncé comme objet fabriqué dans lequel le SUJET s’inscrit à tout moment, en
inscrivant en même temps l’ENONCIATAIRE dans ce qu’il dit, puisque dès qu’il
commence à parler il implante l’autre devant lui. L’énonciation est définie alors
comme le surgissement du sujet dans son énoncé et elle peut être saisie à travers les
traces (lieux d’inscription de la subjectivité) qu’elle laisse dans l’énoncé.
fait énonciatif (v. aussi ENONCIATEME, SUBJECTIVEME). Les faits énonciatifs sont
les traces linguistiques de la présence du LOCUTEUR dans son ENONCE, les lieux
d’inscription de la subjectivité dans le langage. Parmi les faits énonciatifs on peut
retenir la DEIXIS, la MODALITE, les relations intersubjectives de toutes sortes.
instance (ou instance du discours). C’est l’acte de parole par lequel le SUJET énonciateur
énonciative actualise les virtualités de la langue en parole. Dans le discours rapporté on opère avec
deux instances énonciatives: l’instance passée et la dernière instance énonciative
(instance présente).
instance v. RECEPTEUR
réceptrice
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PREMIÈRE ASSISE THÉORIQUE
est instancié, c’est-à-dire rempli par des éléments lexicaux, qui seront ensuite soumis à
des opérations de quantification, de qualification et d’assignation de temps-aspect-
modalité.
linguistique après une linguistique de la pensée (ou du JE) et une linguistique de la communication
énonciative (ou du JE et du TU conçue comme un tête à tête idéal), la linguistique de l’énonciation
(ou de se donne comme principal objectif l’analyse de la production et de la compréhension
l’énonciation) d’un ENONCE produit par un ENONCIATEUR face à un ENONCIATAIRE dans
une situation déterminée. (J.P.DESCLES, 1974) L’énonciation a été longtemps exclue
des préoccupations des linguistes en vertu du postulat de l’immanence du fait
linguistique. Elle s’est constituée comme une discipline ayant son propre objet de
recherche, son propre métalangage et une problématique spécifique à partir des années
soixante. Dans un article programmatique publié dans la revue Langages en 1970,
« L‘appareil formel de l’énonciation », E. BENVENISTE a tracé une frontière entre
l’emploi des formes de la langue et l’emploi de la langue. Les développements
ultérieurs de la théorie de l’énonciation ont mis en évidence certaines limites des
principes formulés par E. BENVENISTE, en premier lieu le fait que la linguistique
énonciative y est conçue comme une sorte de prolongement de la linguistique de la
langue et que l’énonciation apparaît comme un épiphénomène qui intervient d’une
manière plus ou moins facultative. Les deux orientations majeures qui ont marqué
l’évolution des études énonciatives se distinguent entre elles par l’extension accordée
à l’objet de la recherche: l’inscription du sujet ou bien l’inscription de la situation dans
toute sa complexité. Dans le premier cas, on parle de linguistique énonciative
restreinte, le trait sémantique pertinent étant le SUBJECTIVEME; dans le second, de
linguistique énonciative étendue, le trait pertinent étant l’ENONCIATEME (C.
KERBRAT-ORECCHIONI, 1980). En prenant en compte les ACTANTS, la
SITUATION, les circonstances spatio-temporelles de la production, les contraintes de
l’UNIVERS DU DISCOURS, cette linguistique débouche sur l’analyse du discours.
D’autres développements linguistiques se donnent pour objet la sémantique
énonciative (O. DUCROT) ou la syntaxe énonciative dans une vision intégrante,
conçue comme un système pragmatico-syntaxique qui exclut le lexique et les
déterminations affectives et sociales des participants discursifs (A. CULIOLI).
modalisation la modalisation est une catégorie énonciative qui désigne la prise en charge critique de
son ENONCE par son propre ENONCIATEUR. La modalisation implique aussi
l’explicitation des relations intersubjectives (modalités d’énonciation). On peut
distinguer cinq fonctions modales: expliciter le rapport entre l’assertion et la réalité
asserté, expliciter l’attitude de l’énonciateur à l’égard du fait ( événement, état de
choses) évoqué par l’énoncé, expliciter les relations interpersonnelles et
transactionnelles de l’énonciateur avec le(s) ENONCIATAIRE(S), expliciter l’attitude
de l’énonciateur à l’égard de la hiérarchie informationnelle des éléments constitutifs
de l’énoncé (mise en topicalisation).
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PREMIÈRE ASSISE THÉORIQUE
Récepteur
Une autre distinction est fondée sur la capacité du récepteur de répondre ou sur sa présence / absence
physique dans la situation de communication:
Participation verbale
Loquent + +
Echange oral quotidien conversation téléphonique
Non loquent + +
Conférence magistrale communication écrite
repère tout ENONCE se constitue à partir d’une SITUATION D’ENONCIATION qui
énonciatif comporte parmi ses catégories constitutives des repères spatio-temporels
d’énonciation ( le hic et nunc de l’énonciation).
situation tout ENONCE est structuré par référence à une situation déterminée créée par
d’énonciation l’ENONCIATEUR au moment où il parle. L’EMETTEUR et le RECEPTEUR font
partie intégrante de la situation énonciative qui intègre aussi une partie du référent.
Dans la théorie pragmatico-syntaxique de A. CULIOLI et de J.P. DESCLES, la
situation est une variable d’énonciation. On y distingue trois types de situations: Sit0 –
origine énonciative; Sit1 – situation de locution; Sit2 – situation événementielle:
(Je dis) Paul a dit qu’il t’avait écrit
Sit0 Sit1 Sit2
subjectivème les subjectivèmes constituent une sous-catégorie d’ENONCIATEMES qui désignent le
trait sémantique caractéristique des faits subjectifs, le surgissement (l’émergence) du
SUJET dans son ENONCE. Il existe plusieurs catégories de subjectivèmes: affectifs,
évaluatifs, modalisateurs, axiologiques.
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