Corriges Alcools
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Corriges Alcools
CORRIGÉS
de Guillaume Apollinaire
Séquence
FICHE 1
Le Pont Mirabeau, un poème incantatoire
I. Pour guider votre analyse b) Les allitérations en [L] donnent à entendre l'eau
1) Un poème traditionnel qui coule et fuit pour s’éparpiller dans l’air. D’autre part,
a) Dès ce deuxième poème d’Alcools, la forme donne une les assonances confèrent à l’ensemble, tout comme les
impression de régularité propre aux poèmes dits classiques : répétitions de mots, un côté répétitif dans la plainte proche
8 strophes composées de 4 quatrains et 4 distiques. de la forme incantatoire. Le poète devient un magicien
Les assonances en [OU], [O] et [EU], l’alternance des strophes du désespoir où l’Espérance semble figée à jamais.
avec le refrain, la légèreté des rimes féminines mais aussi la c) Le temps passe, la Seine coule et les amours fuient.
circularité du poème qui commence par un vers et se termine Le poète, dans une opposition oxymorique, demeure
par le même (antépiphore), tout ici confère à l'ensemble néanmoins. La mort est omniprésente et dans cette
une harmonie certaine que l'on pourrait rapprocher de opposition entre immobilité du poète et écoulement du
l’esthétique classique. temps, la tonalité élégiaque ressort tout particulièrement
b) Deux thèmes majeurs sont ici abordés : celui de la fuite pour conférer à l’ensemble une « rythmique » de la plainte
du temps (dans le refrain) mais aussi de la fin de l’amour (vous pouvez faire écouter sur Daily Motion ou You Tube
(parallélisme entre l’eau qui coule, les jours qui passent et les interprétations réalisées par Léo Ferré, Marc Lavoine
l’amour qui s’éloigne). La Seine rappelle au poète que les et Apollinaire lui-même du Pont Mirabeau).
choses jamais ne demeurent, sinon lui-même (« je demeure »).
c) Le thème de la fuite du temps appartient à la tradition II. Pour faire le point
poétique et l'on pense aussitôt à Ronsard et aux poètes Ce poème-chanson, incantation à sa façon sur le thème
de la Pléiade, mais aussi, plus proche de nous, aux poètes convenu de la fin d'un amour et du passage du temps,
romantiques (xixe siècle), tels Lamartine (Souvenir et Le Lac) se présente finalement comme une œuvre véritablement
ou encore Victor Hugo (Tristesse d'Olympio). originale où l'élégie et le lyrisme se manifestent à travers une
2) La tradition réinventée forme surprenante. Malgré l'expression douloureuse des jours
a) Les huit strophes, malgré une certaine régularité, de bonheur soulignée par la permanence du moi et la lenteur
déconstruisent effectivement la tradition poétique par de la vie, l'espérance est là qui cherche à se manifester.
l’absence de rimes strictes, et par un jeu de décompte Le Pont Mirabeau, purifié de tout détail secondaire, de toute
syllabique irrégulier (quatrains avec décasyllabes, éloquence apparaît alors comme un chef-d'œuvre où la
tétrasyllabes, hexasyllabes et heptasyllabes pour le refrain). valeur humaine et la pureté rénovent la tradition lyrique
b) La circularité du poème (avec la reprise au début et des poètes de la Pléiade à Verlaine.
à la fin : « Sous le pont Mirabeau coule la Seine ») rapproche
ce poème du calligramme cher à Apollinaire et donne III. De l'écrit à l'oral
l'impression d'un tourbillon de l'eau qui passe et engloutit a) Sur l’héritage romantique d’Apollinaire, nous nous
tout, jusqu'à l'Espérance du vers 16. reporterons aux pages 174 et 175 de l’édition Folioplus
c) L'absence de ponctuation donne au poème une réelle classiques d’Alcools.
modernité en jouant sur les sens avec les enjambements b) Le « J’émerveille » d’Apollinaire sera étudié dans
et seule l’orthographe permet en définitive de comprendre la même édition aux pages 178 et 179.
le sens (cf. vers 2 et 9). c) La tristesse est abordée mais comme le disait également
d) L’effet de paronomase entre les vers 15 et 16 avec Apollinaire « J’ai des joies aussi que je chante »...
la prononciation en diérèse de « vi/o/lente » met en parallèle Reportez-vous aux pages 178 et suivantes de l’édition
vie et violence en insistant sur l’immobilisme affreux du Folioplus classiques pour étudier la dimension du souvenir
poète, qui malgré tout ne supporte plus la lenteur de cette et autobiographique dans Alcools.
vie qui s’écoule en douleur. d) Le poète démiurge donnant naissance à la création
3) Une chanson nouvelle d’un nouveau monde est abordé aux pages 182 et suivantes.
a) La musicalité du poème en vers libres donne à entendre
une véritable chanson, sous le signe de Verlaine avec les vers
impairs des distiques « et pour cela préfère l’impair plus
vague et plus soluble dans l’air ».
n1
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de Guillaume Apollinaire
Séquence
FICHE 2
Les Colchiques
ou le mythe de la femme revisité
I. Pour guider votre analyse qu’un seul vers. Cela aurait pu faire de ce poème un sonnet,
1) Une atmosphère particulière mais par son originalité, il y a bien une revisitation de cette
a) Dès les premiers mots, nous sommes plongés in medias forme classique et une modification significative donnant lieu
res dans un cadre à la fois joli mais rendu menaçant par à ce qui ressemblerait à un chiasme sonore et sémantique
la présence des colchiques, fleurs vénéneuses, appelées aussi dans lequel Apollinaire insiste sur l’empoisonnement lent et
« tue-chien ». Les vaches, les fleurs, les enfants et leurs définitif des vaches. D’autre part, le décompte irrégulier des
harmonicas, le « vent dément », le gardien du troupeau... syllabes (v. 9 et 11), sortes d’altérations métriques, éloigne
tout donne à entendre une musique douce mais qui se teinte le poème de la régularité des alexandrins et donne à entendre
progressivement de danger et de mort : l’empoisonnement. la forme d’un vers libéré de toute contrainte.
Pour finir, le « pré joli » prend des allures dissonantes c) Si l’on se réfère au genre du « blason », le poète y
puisqu’il est qualifié de « mal fleuri » à la fin du poème. célèbre une partie du corps de la femme aimée. ici, nous
b) Par le décompte des strophes [7/5/3], nous pouvons avons affaire à ce qui serait de l’ordre du « contre-blason »,
être sensibles à un effet de rétrécissement et de repliement sur où il s’agit d’une célébration funeste et malheureuse.
soi ; une boucle qui commençait par l’automne au v. 1 et se
termine par l’automne au v. 15. Quant au cadrage, il y a bien II. Pour faire le point
effet de zoom au ralenti (rendu sensible par les adverbes) sur Fondé sur la comparaison de la femme et de la fleur,
les colchiques à la strophe 1 en particulier et sur le pré tout Les Colchiques apparaît bien comme une relecture du thème :
entier tout au long du poème. Cela rappelle l’enfermement les yeux de la femme aimée, tels les colchiques vénéneux
et la solitude du poète, mal-aimé et malheureux. qui lentement empoisonnent les vaches « y paissant »,
c) La saison des colchiques est l’automne, saison associée empoisonnent aussi la vie du poète. Loin du blason, il s’agit
à la fin, lente et monotone, qui conduit vers la mort finale ici d’une contre-célébration de la femme. La vie est mise
et irréversible (« Pour toujours », v. 15). Dans le recueil, c’est en danger et c’est la mort qui attend le poète au détour
surtout Automne malade et Signe où la faiblesse se rappelle de ce joli pré automnal. Bien loin de la « Mignonne »
doucement à la nature et au poète... « Les feuilles/ Qu’on que Ronsard comparait à la rose du matin, nous abordons ici
foule » aboutissent à l’issue fatale. les rivages de la Colchide, où Médée la magicienne sévissait.
2) Le mythe de la femme aimée
a) Le titre du poème indique bien que ce sont à des fleurs III. À vous d’écrire : écriture d’invention
« couleur de cerne et de lilas » que la femme aimée est Ce travail nécessite d’avoir bien compris ce qu’était le genre
comparée et en particulier aux yeux, miroir de l’âme du blason (genre somme toute assez simple si l’on comprend
(anaphore aux v. 5 et 7), mais aussi aux paupières (v. 11). qu’il s’agit d’une célébration de la Dame quant à un élément
b) Les colchiques sont des plantes des prés dont la de son anatomie : ici, la chevelure). Les élèves auront lu
particularité est d’être dangereuses dès qu’on les ingère. d’autres exemples de blasons, notamment celui du Beau tétin
Cette fleur, venue de Colchide où Médée la magicienne et de Clément Marot, dont voici un extrait ci-après. Marot,
célèbre empoisonneuse de la mythologie habitait, a bien une outre le sonnet, qu'il a contribué à imposer, est donc
connotation négative. aussi l'inventeur du jeu littéraire du blason. À l’origine,
c) Dans ce poème de fin d’amour où la démence s’associe « blasonner » consistait à détailler et expliquer les armoiries
à la mort, Éros représente un danger de mort (Thanatos) d'un écu. ici, les poètes rivalisent en chantant à leur tour
pour la vie du poète : « Et ma vie pour tes yeux / Lentement telle ou telle partie du corps féminin...
s’empoisonne » (v. 7) « Tétin refait, plus blanc qu'un œuf,
3) Une relecture du mythe Tétin de satin blanc tout neuf,
a) Le poème de Ronsard chantait la jeunesse, la beauté et Toi qui fait honte à la rose
la fraîcheur de la femme aimée. ici, Apollinaire opère une Tétin plus beau que nulle chose,
relecture et une réécriture du poème : « la femme aimée » Tétin dur, non pas tétin voire
est présentée comme dangereuse et fatale. Mais petite boule d'ivoire. »
b) Un sonnet compte 14 vers et se compose d’alexandrins.
ici, les v. 2 et 3 (6 et 6 syllabes) ne formaient à l’origine
n2
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de Guillaume Apollinaire
Séquence
FICHE 3
Nuit rhénane, un fantastique surprenant
entre ivresse et éclat de rire
I. Pour guider votre analyse verts apparaissent et où, telle la Lorelei, les étoiles tombent
1) L’inspiration dionysiaque après s’y être mirées.
a) Au-delà de l’impression visuelle où l’on voit l’éclat b) Ces deux groupes de mots sont des COD, lesquels,
intermittent du vin brillant à travers les facettes du verre, le posés ainsi en fin de vers ou de phrase, étirent davantage
premier vers suggère, par la comparaison avec « la flamme » le suspens. L’ordre des mots, presque proche de la phrase
et le qualificatif « trembleur », à la fois l’ardeur dévorante allemande par certains endroits, participe donc à ce que l’on
du poète et son inquiétude. C’est par le vin que la chanson pourrait qualifier d’esthétique de la surprise. Le fantastique
du batelier va pouvoir se faire entendre et l’envoûtement s’en trouve accru.
s’opérer. c) Le poète pour la deuxième fois en appelle à l’assistance,
b) Chaque mot, chaque évocation acquiert comme par l’auditeur, le lecteur bienveillant qui le détournera du
magie une vibration particulière dont le « tremblement » sortilège (« Debout », « Chantez »).
du ciel étoilé se reflétant dans le Rhin est une image (v. 10). Le martèlement nerveux des vers par opposition au
Or, le succès de cette incantation s’explique par un certain mouvement souple et continu des vers 2 et 4 est ici frappant.
état de ferveur, voire de transe poétique que l’on peut Le souhait de ne plus entendre (subjonctif présent au vers 6)
qualifier de dionysiaque. et de remplacer le chant lent du batelier par une ronde qui va
c) « Le Rhin le Rhin est ivre », écrit Apollinaire au vers 9. réveiller la torpeur montre à quel point il y a mise en danger
Au-delà de l’impression visuelle d’un fleuve reflétant le ciel pour lui. Néanmoins, même la réalité des « filles blondes »
étoilé, ces mots évoquent les reflets trompeurs du fleuve et semble menacée par leur regard immobile, comme figé.
renvoient au vertige fasciné du poète qui, avec effroi, se rend
compte que tout a perdu sa rassurante réalité ordinaire. II. Pour faire le point
2) Une nuit fantastique : l’envoûtement Dans ce premier poème des Rhénanes, Apollinaire évoque
a) C’est dans un paysage lunaire, légendaire et magique avec effroi l’envoûtement dont il est victime par une nuit
où des fées et des « filles blondes / Au regard immobile » où l’ivresse fait sombrer la réalité autour de lui. Ces « sept
que « la chanson lente d’un batelier » se fait entendre. femmes » aux « cheveux verts » que chante le batelier sont-
Le Rhin, devenu ivre, voit les étoiles chuter dans le fleuve : elles ces fées maléfiques qui vont briser le verre dans un
« Tout l’or des nuits ». « éclat de rire » ? Le rythme, depuis le premier quatrain
b) Après le vers 1, qui sonne comme une ouverture vers jusqu’au « monostiche » (vers unique) final semble s’être
l’envoûtement, les trois vers qui suivent (strophe 1) font immobilisé tout comme le regard des « filles blondes »
résonner la chanson du batelier. ici, le poète s’adresse au si ce n’est dans la deuxième strophe, où dans un sursaut,
lecteur (« Écoutez »). À la strophe 2, « Debout » indique le poète cherche à échapper à l’envoûtement fatal de
le sursaut du poète cherchant à échapper au sortilège... la chanson par une ronde.
en vain (strophe 3) puisque son rapport à la réalité est
métamorphosé par le vin qui fait basculer et trembler le III. De l’écrit à l’oral
paysage alentour. Pour finir (vers 13), on peut entendre 1) Pour répondre à cette question, référez-vous à l’édition
ce dernier vers de deux façons : la fin de l’envoûtement Folioplus classiques p. 190 et suivantes.
avec le verre qui se brise, ou bien la victoire de la puissance 2) idem, cf. p.197 et suivantes.
maléfique dans un « éclat de rire ». 3) La ponctuation est presque totalement absente du
c) La chanson du batelier que le poète cherchait à étouffer recueil, mais il y a tout de même des exceptions : un point
devient mystérieuse et tragique par le néologisme de d’exclamation dans La Blanche Neige (« Ah ! ») par exemple.
« râle-mourir ». L’irruption du tragique préfigure le triomphe il ne faut sans doute pas s’y attarder, les oublis typographiques
cruel de la puissance maléfique du vers 13. étant une possibilité, car Apollinaire n’a supprimé la
3) Un paysage légendaire et magique ponctuation que tardivement. Cela reste tout de même un
a) Le fleuve acquiert une dimension fantastique chère geste décisif dans le sens où il oblige le lecteur à un travail
aux Romantiques en ce sens où il devient le théâtre d’écoute intérieure, voire de déclamation à voix haute. Ainsi,
d’un envoûtement au cours duquel sept femmes aux cheveux Apollinaire démécanise la scansion et met son lecteur
n3
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Séquence
FICHE 4
« Mes amis m'ont enfin avoué leur mépris »
ou l’art poétique de la dissonance
I. Pour guider votre analyse souvent évoquée dans le recueil, et plus généralement
1) Le rêve comme structure temporelle et narrative l’innocence persécutée. Quant au mot « pasteur », il désigne
a) Trois temps sont représentés dans ce poème : le passé à la fois le gardien du troupeau et le guide spirituel.
composé, le présent et l’imparfait (11 imparfaits). Les valeurs Au vers 5, les « faux centurions » peuvent évoquer les soldats
temporelles des imparfaits se répartissent en deux catégories ; romains qui ont crucifié Jésus, quant au « vinaigre », il est
la première étant l’imparfait d’arrière-plan (« buvais », une version dégradée du vin (vin-aigre) qui symbolise le sang
« dormais »), tandis que les autres imparfaits ont une valeur du Christ, et qui évoque aussi la transsubstantiation lors des
descriptive (« emportaient », « dansaient »...) et s’imposent noces de Cana (Évangile de Jean, 2, 1-11).
tout à fait pour donner à voir les visions du poète. c) L’association d’un terme vulgaire, pisser (v. 8), avec
b) Le premier vers est un aveu prononcé par les amis le clair de lune constitue une dégradation de l’imagerie
et le deuxième pourrait s’apparenter à une conséquence : romantique. Tout comme le contraste du vers 9 des « croque-
l’enivrement du poète. Les vers suivants ouvrent alors la morts » avec les « bocks ». Aux vers 10 et 11, les cols sont
voie au rêve, où les visions du poète évoquent un monde faux, les jupes mal brossées, et le tout est décrit comme
« infernal » : un ange exterminateur, de « faux centurions », une chute. L’ensemble du tableau pourrait évoquer un
des « gueux », des « croque-morts », des « accouchées travestissement carnavalesque où tout est discrédité.
masquées », des femmes qui demandent « l’amour et Le vers 14 peut s’interpréter comme une antithèse et les deux
la dulie », « des ombres […] jamais jolies ». Tout ce monde-là derniers vers closent le poème sur l’évocation d’un fleuve
danse, festoie, passe... cependant que « les becs de gaz sombre qu’on peut difficilement ne pas rapprocher du Styx,
[pissent] leur flamme au clair de lune » (v. 8). fleuve des Enfers.
c) En n’établissant aucun rapport logique entre les 3) La dissonance, un manifeste pour une poésie nouvelle
événements, le poète procède par juxtaposition (parataxe) ou une forme-sens
et confère ainsi aux images évoquées une impression a) Par le schéma des rimes, on se rend compte que sur
dissonante et propre à l’aspect illogique du rêve : « Des faux seize finales de vers, quatre sont isolées (v. 2, 5, 9 et 11),
cols sur des flots de jupes mal brossées » (v. 11). ce qui amène le poème vers une irrégularité, une dissonance
2) Le constat du poète : un monde renversé certaine, un chaos évident au niveau du rythme.
a) Après l’annonce du mépris du vers 1 et l’ivresse qui suit b) Le schéma métrique : on trouve dans ce poème neuf
(v. 2), le poète est plongé dans le sommeil et rêve (v. 3-16). alexandrins, soit à peine plus de la moitié des vers. Apollinaire
il décrit alors à l’imparfait une vision d’un monde renversé joue donc avec la tradition en utilisant des mètres très
et dégradé qu’a contaminé l’aveu originel : tout est faux réguliers au milieu d’autres mètres complètement différents
(faux centurions, faux cols, les accouchées sont masquées ou irréguliers.
et les femmes demandent aussi bien l’amour que la dulie), c) Deux dynamiques antithétiques sont à l’œuvre dans
tout est duplicité. C’est le chaos, l’ordre est dénaturé ce poème : celle du chaos, qui donne naissance au monde
et l’on pense à des peintures telles celles de Jérôme Bosch. renversé du rêve, et celle d’un ordre poétique supérieur.
b) Aux vers 3 et 4, il faut bien évidemment voir la symbolique La fausseté dont il est question dans le rêve contamine ainsi
chrétienne : l’anneau représente la personne du Christ jusqu’à la forme même du poème.
n4
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de Guillaume Apollinaire
Séquence
FICHE 5
Pour aborder le commentaire littéraire
I. À la recherche d’indices pour une poésie libérée du passé. Par opposition, tout ce qui
1) Sous le signe de la surprise ne va pas dans le sens de la modernité, est antique et marque
a) L’ouverture de Zone peut apparaître de prime abord étrange la lassitude et l’ennui.
en ce sens où l’on trouve ce groupe de mots « À la fin », b) Ce deuxième vers établit une métaphore audacieuse
signifiant « finalement », et que l’on penserait à juste titre où urbanisme (avec la tour Eiffel) et ruralité (les moutons)
voir placer en clôture du poème. « À la fin », provoque un effet se mêlent. On passe de l’impression visuelle, vraisemblable
de surprise, de rupture, comme si l’on prenait une conversation (un pont ressemble à un mouton qui paît), à l’impression
en cours de route. auditive, illogique (un pont qui bêle), même s’il s’agit en fait
b) Avec le « tu » du monostiche initial, nous pouvons de la sirène des remorqueurs.
nous poser la question de savoir à qui s’adresse ici le poète : c) « Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui
à lui-même ou bien au lecteur ? Le christianisme est même chantent tout haut / Voilà la poésie ce matin… » (v. 11 et
convoqué (v. 7) jusqu’au Pape Pie x (v. 8) qui est vouvoyé. 12). La poésie serait donc dans le quotidien puisque
Ce jeu des personnes indique une mouvance et brouille catalogues, affiches et prospectus y participeraient.
le jeu de l’énonciation. Le « je » fera son apparition un peu Nul besoin de mots abscons, nulle volonté de placer haut
plus loin comme si, en définitive, l’universel venait rejoindre la poésie, elle se trouve là où tout un chacun vit.
le personnel et réciproquement. 3) Une déambulation
c) En mêlant alexandrins (à six reprises) à des vers a) C’est à Paris que se situe la scène de Zone puisqu’on y
beaucoup plus longs (16 syllabes souvent), Apollinaire trouve la « tour Eiffel » et la description de cette rue située
démontre que sa poésie sera sous le signe non du dans le xViie arrondissement, justement dans la zone
conventionnel ni du classique mais bien de la nouveauté. nord-ouest de Paris.
Cette impression est renforcée par les assonances en fin de b) Les termes non poétiques tels « sténo-dactylographes »,
vers qui, sur un rythme suivi, égrènent comme un chapelet « aboie », « criaillent »… s’opposent ici aux vers lyriques
des mots simples et compréhensibles de tous. de cet extrait : nous pensons alors aux images du vers 2 avec
2) Le quotidien comme matériau la métaphore de la tour Eiffel en bergère des ponts parisiens.
a) « tour Eiffel » (v. 2), « automobiles » (v. 4), « hangars de Nous pensons aussi au choix de termes tels « las » (v. 1),
Port-Aviation » (v. 6), mais aussi les « prospectus, les catalogues « grâce » (v. 23).
et les affiches » du v. 11, « les journaux » (v. 12), « directeurs, c) La forme de cet extrait ne traduirait-elle pas chez
ouvriers, sténo-dactylographes » (v. 17), « la sirène » (v. 19), Apollinaire la volonté de créer de la nouveauté et de s’éloigner
« la rue industrielle » (v. 23)…. Pour Apollinaire, la modernité de la tradition ? Ainsi, 3 monostiches puis un tercet et enfin
serait symbole de nouveauté (« neuve » à deux reprises), une strophe de 18 vers, comme si vers la fin de notre extrait,
de propreté (« propre » v. 16) et de « grâce » (v. 23). L’alliance il s’éloignait des formes connues de l’Antiquité pour aborder
des termes parfois étonnante apparaît ici tel un manifeste la prose poétique.
n5
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FICHE 6
Autour de l'œuvre
n6
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FICHE 7
D'un texte à l'autre, les résonances
FICHE 8
Du texte à l'image
I. Comprendre l’image et d’innocence, baigne tout entier le poème. La sollicitude
des saltimbanques entre eux, la simplicité renvoient bien
II. Mettre en relation le livre et le tableau au tableau de Picasso.
1) On pense à Crépuscule, poème dédié à Marie Laurencin,
mais aussi à Saltimbanques et à La Tzigane. Trois poèmes III. B2i
qui donnent à voir des images propres aux baladins, aux Picasso a peint quantité de tableaux traitant du thème des
arlequins et à leur monde. gens du cirque (environ 126). ici, nous allons nous intéresser
2) Chez Picasso comme chez Apollinaire, on retrouve la à Famille de baladins, d’Eugène Chambellan, peintre réaliste.
même simplicité dans les gestes, une fraternité visible entre Le tableau, qui date lui aussi de 1905, présente une famille
les artistes, des scènes intimistes, des décors où la nature composée de quatre personnages au premier plan dont une
est présente. Une sorte d’âge d’or en somme, d’enfance, femme dans une roulotte. C’est le matin, il est encore tôt
où l’innocence est maîtresse. Une humanité certaine semble-t-il et le froid a envahi l’atmosphère. Une femme
se dégage de ces personnages du voyage et de l’errance. derrière la roulotte se tient en amazone sur un cheval.
3) Dans les poèmes d’Apollinaire, il est question La nature est présente tout autour. Deux chiens faméliques
d’animaux, en particulier l’ours, le singe, « animaux sages ». courent au côté de cette famille. Les tonalités sont froides.
On peut parler à leur sujet d’une humanisation de ces bêtes Ce tableau pourrait se rapprocher tout à fait du poème
tant elles paraissent faire partie de la communauté Saltimbanques :
circassienne et sont dignes de sagesse. « Dans la plaine les baladins
4) Dans Saltimbanques, ces bêtes sont chargées de faire S’éloignent au long des jardins... »
la quête.
5) Le tableau de Picasso suscite, génère la poésie, donne
à voir l’image poétique et il semblerait presque que cette
famille de saltimbanques soit transposée dans Alcools et plus
particulièrement dans Crépuscule avec « l’arlequin blême »
du vers 9. L’atmosphère, empreinte de rêve, de douceur
n8
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FICHE 9
Questions d’ensemble sur le recueil
n9
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Séquence
FICHE 10
Évaluation - S’entraîner à l’épreuve écrite du BAC
n 10