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CAT Devant Une Névrite Optique

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Fiche technique :

Conduite à tenir devant une neuropathie optique inflammatoire


Club de Neuro-ophtalmologie francophone (CNOF)

http://www.neuro-ophtalmologie-club.org

Pr Jérôme De Sèze (Strasbourg) – Dr Damien Biotti (Toulouse)


JP Héligon, C Vignal, MB Rougier

I) Les signes évocateurs d’une neuropathie optique inflammatoire (névrite optique)


démyélinisante aiguë typique :

A) Signes d’appel :
-Femme
-Age 20 à 40 ans
–Baisse d’acuité visuelle unilatérale rapidement progressive (quelques heures à quelques
jours)
PUn tiers des patients ont une acuité visuelle initiale inférieure à 1/10, mais la
perte de la perception lumineuse résiduelle représente seulement 2% des cas !
–Douleur rétro-orbitaire, majorée par la mobilisation du globe, dans plus de 90% des cas
PGénéralement durant moins de 7 jours
-Récupération spontanée dans plus de 90% des cas, en général dans les deux mois

B) Signes d’examen :
–Déficit pupillaire afférent relatif homolatéral (Signe de Marcus-Gunn) (dilatation
paradoxale de la pupille de l‘œil atteint après éclairement successif des 2 yeux dans la pénombre)
PIl s’agit d’un signe à rechercher systématiquement. Dans de bonnes
conditions d’examen, sa présence est hautement évocatrice d’une neuropathie optique (quelle
qu’en soit la cause), son absence alors que le FO est normal représente un drapeau rouge
remettant en cause le diagnostic
–Anomalie de vision des couleurs (>90% des cas)
–Fond d’œil normal a la phase aigue ou œdème papillaire modéré unilatéral (idem sur les
données de l’OCT RNFL) ; pâleur temporale fréquente ultérieurement.
-Champ visuel : scotome central ou caeco central classiquement, mais tout autre type de
déficit est possible
-PEV : allongement de la latence de l’onde P100 (non nécessaire au diagnostic, ils ne
seront réalisés qu’en cas de doute)

C) Diagnostics différentiels
–Terrain vasculaire NO ischémique
–Age > 50 ans NO ischémique non artéritique, Horton
– Enfants NO infectieuse, tumorale, ADEM*
- Hérédité NOHL*
–Brutalité de la baisse visuelle NO ischémique
–Atteinte bilatérale d’emblée ou bilatéralisation NMO-SD*, Horton, NOHL*, méningite
-Absence de douleurs NO ischémique, tumorale, sarcoïdose, NOHL*
-Absence d’amélioration spontanée ou mauvaise NO tumorale, lymphome, inflammatoire
récupération atypique, NMO-SD*, NOHL*
–Fond d’oeil: étoile maculaire : neurorétinite Infection avec en premier lieu la maladie des
griffes du chat… inflammation (sarcoïdose)
–Fond d’oeil: œdème papillaire bilatéral HTIC, papillite bilatérale
Classiquement, en dehors des HTIC
fulminantes, les patients avec une HTIC
présentent un œdème papillaire de stase avec
peu ou pas de BAV ; en cas de papillite
bilatérale, la baisse de vision apparait au
premier plan, devant l’œdème.
–Fond d’oeil: œdème papillaire unilatéral sévère HTIC, tumeur
–Uvéites antérieure ou postérieure ou sclérite Maladie inflammatoire de type sarcoïdose ou
associée Behçet ou infection
–Absence de DPAR Rétinopathie, fonctionnel, NO bilatérale (le
DPAR traduit comme son nom l’indique, un
déficit relatif d’un œil vis-à-vis de l’autre. En
cas de BAV bilatérale et symétrique, il est
donc possible de ne pas le retrouver)
–NO sévère, bilatérale, récidivante Neuromyélite optique de Devic, anticorps
anti-AQP4, autres NO « autoimmunes »
(anticorps anti-MOG)
Abréviations : ADEM : acute demyelinating encephalomyelitis ; NMO-SD : Neuromyélite optique – spectrum disorder
(Maladie de Devic, NO avec anticorps anti-AQP4 ou anti MOG) ; NOHL: neuropathie optique héréditaire de Leber

II) Conduite à tenir en cas de neuropathie optique inflammatoire

A- Examen ophtalmologique clinique (DPAR, AV, fond d’œil, lampe à fente) et


paraclinique (champ visuel, vision des couleurs, OCT, PEV uniquement si doute
diagnostique) : forme typique ou atypique de la neuropathie optique

B- Examen neurologique et général (antécédents, signes de SEP, maladie systémique


inflammatoire, Fièvre, adénopathies)

C- Bilan sanguin à la recherche d’une autre pathologie systémique :


1- Forme typique : il sera toujours orienté par la clinique mais le plus souvent : VS,
CRP, NFS, sérologie syphilitique, sérologie VIH, enzyme de conversion
(sarcoidose), anticorps antinucléaires (syndrome de Gougerot-Sjögren, lupus ;
uniquement si signes systémiques évocateurs), sérologie de Lyme (en zone
d’endémie), sérologie VIH
2- Forme atypique : en fonction du contexte et à adapter à la clinique
i. Orientation infectieuse : maladie des griffes du chat, toxoplasmose, EBV
ii. Forme chronique, récidivante, bilatérale : large bilan dysimmunitaire
(ANA, Ac anti DNA, Ac anti-antigène soluble, ANCA, Ac anti-AQP4, anti
MOG), recherche d’autre localisation inflammatoire ou lymphome
(Scanner TAP, Biopsie des glandes salivaires accessoires), bilan biologique
pour recherche néoplasique ou lymphomateuse (LDH, béta2
microglobuline, Ac antineuronaux), Biol moléculaire pour maladie de Leber

D- Recherche d’élément pour une dissémination temporelle et spatiale, évocateurs d’une


SEP

1- Examen neurologique : recherche d’une autre localisation + interrogatoire


poussé à la recherche d’un antécédent passé inaperçu (près de 50% des cas !).
2- IRM encéphalique
-avec injection de Gadolinium : recherche d’une dissémination temporelle
et spatiale (tableau 1).
- avec séquences orbitaires centrées sur les nerfs optiques.
Ces séquences comportent des coupes fines axiales et coronales en
pondération T2, T1 pré et post gadolinium avec saturation de la graisse orbitaire.
P De telles séquences devraient être systématiques, révélant une
anomalie de signal du nerf optique inflammatoire (élément radiologique de
diagnostic positif), et permet d’éliminer d’autres pathologies pouvant
ressembler initialement à une névrite optique (lésion orbitaire…)

E- Ponction lombaire : Deux attitudes possibles

1- A discuter au cas par cas


2- Systématique : pour recherche d’un profil oligoclonal (sensibilité et spécificité de
85-90% pour le diagnostic de SEP) et éliminer d’autres diagnostics (pathologie
infectieuse ou infiltrative).
-Si l’IRM encéphalique et la clinique sont typiques d’une SEP, l’intérêt de la PL
est discutable.
- -Le résultat de cette ponction peut conditionner la surveillance d’un
patient et le discours à lui tenir dans certains cas. Imaginons une névrite optique
typique chez un patient dont l’irm encéphalique serait normale. Le risque de
conversion vers une SEP sera à considérer chez le patient ayant une inflammation du
LCR ; ce risque étant par contre très faible en cas de névrite optique à IRM et PL
normales.

P En cas de bilan négatif ne pas oublier les pièges diagnostiques notamment en cas d’atteinte
sévère et non régressive après les bolus de corticoïdes, de récidive :

1-Rechercher une lésion expansive (méningiome +++) : coupes centrées sur le nerf optique
(surtout si elles n’avaient pas été réalisées initialement), injection de gadolinium.
2-Rechercher une neuromyélite optique de Devic : faire une IRM médullaire et un dosage
des anticorps anti-Aquaporine 4. Chez ces mêmes patients, en cas de négativité des anti-
AQP4 peuvent être aujourd’hui recherchés de nouveaux anticorps « anti-MOG »
3-Attention au lymphome
4-Neuropathie optique héréditaire de Leber en cas de forme indolore
III) Prise en charge thérapeutique au moment du diagnostic :

Bolus de corticoïdes IV (1g/j pendant 3 jours ou 5 jours dans les formes sévères) sans
relais per os systématique, en l’absence de contre indication (par exemple, vu la non efficacité à
long terme des corticoïdes, il n’y a aucune raison de prendre un risque chez un diabétique, un
insuffisant cardiaque ou un hypertendu).
Corticoïdes per os à faible dose (1mg/kg) contre-indiqués (cf : ONTT)

P Pour rappel, la corticothérapie IV à forte dose peut permettre d’accélérer la récupération


visuelle mais n’influence pas le degré de handicap visuel à distance.

A distance : discuter la mise en route d’un traitement de fond de la SEP si éléments en faveur du
diagnostic et évolution radiologique ou clinique en faveur d’une activité de la maladie.

Tableau 1 : Critères de Mc Donald révisés (2010), pour le diagnostic de SEP RR,

applicables après un premier événement démyélinisant : recherche de la « dissémination

dans l’espace et dans le temps »

Dissémination spatiale :
- Au moins 1 lésion T2 dans au moins deux des quatre territoires du
système nerveux central considérés comme caractéristiques de
SEP :
a. juxtacortical
b. périventriculaire,
c. sous-tentoriel
d. médullaire*

* : En cas de syndrome médullaire ou du tronc cérébral, les lésions symptomatiques sont exclues
des critères diagnostiques et ne participent pas au compte des lésions.

Dissémination temporelle :
- Une nouvelle lésion en T2 et/ou une lésion prenant le gadolinium
sur une IRM de suivi quel que soit le moment de l’IRM initiale.
- La présence simultanée de lésions asymptomatiques rehaussées et
non-rehaussées par le gadolinium à n’importe quel moment.
Bibliographie
1. Optic Neuritis Study Group. Multiple sclerosis risk after optic neuritis: final optic

neuritis treatment trial follow-up. Arch Neurol. 2008 Jun;65(6):727-32.

2. Cole SR, Beck RW, Moke PS, et al. The predictive value of CSF oligoclonal banding for

MS 5 years after optic neuritis. Optic Neuritis Study Group. Neurology. 1998;51:885-

887.

3. Polman CH, Reingold SC, Banwell B, Clanet M et al. Diagnostic criteria for multiple

sclerosis: 2010 revisions to the McDonald criteria. Ann Neurol. 2011 Feb;69(2):292-302

4. Petzold A, Wattjes MP, Costello F, Flores-Rivera J et al. The investigation of acute optic

neuritis: a review and proposed protocol. Nat Rev Neurol. 2014 Aug;10(8):447-58.

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