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Du Projet Personnel de L'élève (P.P.E.) À L'école Du Choix

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Du projet

personnel de
l’élève (P.P.E.)
à l’école du choix
Chantal Cambier
en collaboration avec D. Bertrand, Fr.-X. Druet,
M. van der Brempt et l’équipe pédagogique
du Centre interfaces
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 3

TABLE DES MATIÈRES

Du projet personnel de l’élève (P.P.E.) à l’école du choix ___________________ 5


Introduction _______________________________________________ 5

Chapitre – 1 – État des lieux du P.P.E. en école secondaire_____________ 10


Quel est le public du P.P.E. ? ________________________________ 11
Qui sont les acteurs du P.P.E. ? Quels sont leurs rôles ? _________ 11
Que propose-t-on aux élèves ? Et quand cela a-t-il lieu ? ________ 12
Quelles sont les difficultés identifiées et les conséquences de
celles-ci ? _________________________________________________ 13
Quelles sont les richesses et les pratiques à conserver, voire à
développer ? ______________________________________________ 15
Existe-t-il des prolongements aux activités ponctuelles du P.P.E. ? 17
Quelles sont les attentes formulées par les responsables de
l’accompagnement en orientation dans nos collèges ? ___________ 18
Existe-t-il des activités à caractère orientant organisées dans le
cadre des cours, hors du cadre du P.P.E. ? _____________________ 18

Chapitre – 2 – Difficultés liées à l’orientation ________________________ 21


I. Témoignages du supérieur ________________________________ 21
II. Constats dans le secondaire _______________________________ 30

Chapitre – 3 – Perspectives d’actions _______________________________ 36


I. Se questionner pour mieux agir ____________________________ 36
II. Quelques balises concernant différentes pédagogies__________ 40

Chapitre – 4 – Des expériences d’apprentissage du choix réalisées dans


le cadre des cours ______________________________________________ 49
I. Situations de cours où le professeur dans un (mini)-projet
développe une attitude réflexive _____________________________ 52

Conclusion générale ____________________________________________ 79

Annexe 1_____________________________________________________ 82

Annexe 2_____________________________________________________ 85

Annexe 3_____________________________________________________ 89

Suggestions de lectures ou de consultations__________________________ 94


4
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 5

Du projet personnel de
l’élève (P.P.E.) à l’école du
choix
Chantal Cambier1

INTRODUCTION

Un cheminement en équipe

Depuis sa création, le Centre Interfaces a placé au cœur de ses


réflexions l’orientation des élèves en fin d’enseignement se-
condaire. Ce travail de recherche appliquée a été appelé « projet
personnel de l’élève » (P.P.E.). L’aide de nombreux professeurs
et éducateurs des collèges et instituts jésuites a été précieuse et
fidèle, car les relais avec le terrain ont pu être assurés par leur
intermédiaire.
Plusieurs cahiers pédagogiques parus entre juin 2000 et octobre
2003 ont présenté différents aspects de ce cheminement : la
connaissance de soi (cahier n°2 et 3), la connaissance de l’autre
(cahier n°6), la distinction entre le choix de vie, de profession et
de formation, les spécificités de l’approche ignatienne, et les
enjeux du métier d’étudiant (cahier n°13), la distinction entre
les temps d’observation, d’organisation et d’orientation au
cours du cursus scolaire (cahier n°14).

1 En collaboration avec Dominique Bertrand, François-Xavier Druet, Myriam van der


Brempt et l’équipe pédagogique du Centre Interfaces.
6

Un CD-ROM, dont le contenu est aussi disponible sur le site


d’Interfaces, apporte diverses fiches standardisées d’animation
sur la mise en projet, la connaissance de soi et la rencontre avec
les milieux professionnels et estudiantins.

Le « Décret missions » a défini les moyens accordés aux écoles


pour les élèves : Chaque établissement peut affecter l'équivalent de
deux semaines réparties sur l'ensemble du troisième degré à des
activités destinées à favoriser la maturation par les élèves de leurs
choix professionnels et des choix d'études qui en résultent 2.
Depuis la mise en place de ces accompagnements, les expérien-
ces de terrain et les besoins qui en émergent ont évolué et nous
poussent à proposer de nouveaux outils.
Le présent cahier relate des démarches expérimentées dans nos
écoles et nos facultés, et spécifiques de leurs populations. Il est
le résultat d’enquêtes, d’interviews et de réflexions en équipe. Il
s’agit d’essais, de propositions, de constats de terrain qui,
rassemblés, ne donnent qu’un reflet de ce qui se fait ou pourrait
se faire. Le travail en commun a fait apparaître la multitude et
les convergences des stratégies mises en place pour accompa-
gner l’élève dans ses choix. Au sein des collèges, le récit de
certaines initiatives prises en marge des politiques définies par
l’institution nous a paru essentiel comme moteur pour ouvrir et
enrichir la réflexion.
Nous espérons que ce cahier rencontrera votre intérêt et que les
expériences relatées ici susciteront chez vous une réflexion
entre les acteurs concernés, qui permettra de les personnaliser,
de les adapter à la situation particulière qui est la vôtre.

2 Décret mission - Article 32. - § 2. Le document peut être consulté sur :


http://www.cdadoc.cfwb.be/RechDoc/docForm.asp?docid=764&docname=19
970724s21557 (vérifié le 6/10/2008).
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 7

Une question à se poser

Au cœur des réflexions proposées dans ce cahier et au vu des


difficultés que les jeunes vivent dans le supérieur, il y a surtout
une question : le P.P.E. – c’est-à-dire la formation destinée à
préparer l’élève à faire les bons choix – doit-il être le projet de
quelques-uns, qui proposent des animations spécifiques, ou
être le projet de chaque professeur, conscient des enjeux et
actif dans sa classe, qui, par le fait même qu’il enseigne,
apprend nécessairement à l’élève à choisir ?

La méthodologie utilisée et la structure du dossier

Le contenu de ce cahier pédagogique est le résultat de ren-


contres, enrichies de réflexions et de lectures. C’est donc bien
un travail collectif qui est donné en lecture. On y retrouvera des
témoignages d’élèves et d’étudiants, de professeurs et
d’éducateurs du secondaire, d’acteurs pédagogiques des Fa-
cultés universitaires Notre-Dame de la Paix (FUNDP) et de
spécialistes de l’orientation. Contributeurs occasionnels ou
réguliers, ils ont tour à tour apporté leurs expériences, stimulé
nos lectures, provoqué des débats, facilité la recherche, aidé à la
rédaction, pris le temps de lire et corriger l’écrit et enfin mis en
page ce dossier. Merci à tous pour ce formidable travail
d’équipe.

État des lieux du P.P.E. en école secondaire

Nous avons questionné les responsables du P.P.E. via les per-


sonnes-relais des dix collèges et instituts jésuites qui ont repéré
ce qui se fait actuellement dans nos écoles pour accompagner
les élèves dans leur choix d’études, de profession et de vie.
8

À la lecture des réponses à un premier questionnaire, nous


avons constaté que peu d’activités organisées en dehors des
animations spécifiques prévues par le P.P.E. avaient été réper-
toriées. Nous savons pourtant par d’autres sources que de
nombreux projets à caractère « orientant » sont menés dans les
écoles ; nous avons donc jugé opportun de questionner à nou-
veau les personnes-relais pour affiner l’analyse de la situation.

Difficultés liées à l’orientation

Témoignages du supérieur : pour mieux cerner les spécificités


de la transition entre le secondaire et le supérieur, nous avons
rassemblé des avis et perceptions d’acteurs pédagogiques des
FUNDP au sujet des difficultés que peuvent vivre les étudiants
de première année et reçu des témoignages de quelques étu-
diants qui ont échoué.
Nous avons également rencontré la responsable du Centre
Médico-Psychologique (CMP) des FUNDP, spécialiste du stress
chez les étudiants.

Constats dans le secondaire : nous avons relevé les dires


d’élèves démobilisés et la perception de certains de leurs pro-
fesseurs, afin de faire évoluer les objectifs et les mises en œuvre
du P.P.E.

Perspectives d’actions

Des réflexions : face aux difficultés des étudiants dans le supé-


rieur, nous invitons l’école et toute l’équipe éducative à se
questionner sur l’organisation et les pratiques scolaires, et à les
modifier au besoin en vue d’amener le jeune à acquérir et à
exercer les compétences transversales qui lui seront indispensa-
bles pour s’engager dans ses choix futurs.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 9

Nous proposons aussi les réflexions3 de l’équipe d’Interfaces sur


les mécanismes de l’acte de choisir, sur l’importance d’une
pédagogie de l’engagement qui en découle, et sur la mise en
projet. Certains ouvrages de référence nous ont apporté une
base indispensable.

Séquences de cours : nous avons rencontré des professeurs qui


introduisent dans leur cours des démarches en accord avec les
objectifs du P.P.E et nous présentons ces expériences
d’apprentissage transposables d’une discipline à l’autre. Il s’agit
de disciplines aussi variées que l’histoire, les langues modernes,
le français, les sciences ou les mathématiques, et l’éducation
physique.

3 Suivant la méthode des mini-récits : Marie BAILLEUX, Dominique BERTRAND,


Barbara DUFOUR, Gérard FOUREZ, Marie-Anne MANIET, Pierre MICHE, Ana
ROMÃO, Francis TILMAN et le Centre Interfaces, Des compétences négligées par l’école.
Les raconter pour les enseigner, Charleroi/Lyon, Couleur livres /Chronique sociale,
2006.
10

Chapitre – 1 – État des lieux du P.P.E. en école


secondaire

Les responsables du Projet Personnel de l’Élève s’expriment


sur ce qui se fait actuellement en dehors des cours dans les
collèges jésuites pour permettre à l’élève de prendre une
orientation qui lui convient.

Depuis la mise en place de l’accompagnement en orientation de


l’élève au sein des collèges et instituts jésuites, beaucoup
d’expériences ont été menées avec les jeunes. Grâce aux propo-
sitions des différents acteurs, aux difficultés rencontrées, aux
publics variés, aux rencontres programmées ou fortuites, aux
partenariats multiples, on observe des adaptations spécifiques
dans les divers établissements jésuites. Prendre connaissance de
cette diversité peut être source d’enrichissement. Voici donc
quelques éléments, fruits de l’expérience collective, qui pour-
ront aider les équipes à faire évoluer leurs pratiques.

Nous avons recueilli l’ensemble de ces informations grâce aux répon-


ses à deux questionnaires types4 transmis aux personnes-relais ;
certaines informations nous ont aussi été communiquées indépen-
damment de cette brève enquête. Il est évident que tout ce qui se fait
n’a pu être relevé : certaines activités pratiquées dans un degré ne sont
pas perçues comme faisant partie du P.P.E. par ceux qui sont actifs
dans un autre degré ; d’autres activités sont le résultat d’initiatives
personnelles et ne sont donc pas « publiées ».
Cette synthèse n’a pas d’autre prétention que de proposer en partage
quelques idées et expériences.

4 Voir annexe 1.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 11

Vous trouverez la synthèse des réponses en annexe5, classée


par niveaux et par types d’activités. Elle reprend ce qui est
proposé par les collèges et instituts jésuites dans le cadre du
P.P.E.

QUEL EST LE PUBLIC DU P.P.E. ?

Au sein des collèges et instituts jésuites, le public cible du P.P.E.


(Projet Personnel de l’Élève) est principalement les élèves du 3e
degré, voire uniquement la 6e année. Le projet est exceptionnel-
lement développé pour les élèves de 4e année et pour ceux de
2e. Parfois rien qu’une seule classe ou un seul groupe d’élèves y
travaille dans le cadre d’une option.

QUI SONT LES ACTEURS DU P.P.E. ? QUELS


SONT LEURS RÔLES ?

Les responsables et/ou animateurs de ce projet sont générale-


ment des volontaires (avec parfois des heures du N.T.P.P.
attribuées). On observe souvent des collaborations avec les
représentants du P.M.S. et avec d’anciens élèves, des parents
et, pour un institut, avec le « Carrefour-formation » et le « Car-
refour-emploi ». La présentation des objectifs du projet aux
parents et l’appel à la collaboration se fait lors de réunions par
les titulaires (avec un « arrêt sur image6 » de la classe), ou par
les responsables du projet en séance plénière.

5 Voir annexe 2.
6 Animation qui a comme objectif de visualiser pour les élèves d’une même classe, où
en sont leurs choix d’études, quels sont leurs besoins d’accompagnement et quels
sont leurs sentiments.
12

Le projet a été amorcé souvent par les personnes-relais ou par


les responsables de niveaux.
Dans certains établissements, l’équipe d’animation est réduite
à une ou deux personnes. Quand l’organisation du P.P.E. re-
pose uniquement soit sur les éducateurs, soit sur les profes-
seurs, on y voit un clivage entre la responsabilité éducative et
celle de l’enseignement. Le risque réel dans les petites équipes
est de voir le projet se limiter à des séances d’information sur
les filières d’études, organisées en soirée. C’est effectivement le
cas quand le ou la responsable ne peut plus assurer ce rôle,
pour diverses raisons.
Dans les collèges où le nombre d’intervenants est plus élevé, on
voit que les titulaires prennent une plus grande responsabilité
dans les animations liées au P.P.E.
Dans un des collèges, c’est une équipe d’une vingtaine de
personnes (éducateurs et professeurs et membre de la direction)
qui prend en charge les animations ; celles-ci sont réalisées,
pour la plupart, en duo.
On relève souvent que la force du projet tient pour beaucoup au
fait d’avoir une équipe solidaire, composée de nombreuses
personnes, et d’avoir le soutien réel (avec parfois la participa-
tion active) de la direction.

QUE PROPOSE-T-ON AUX ÉLÈVES ?


ET QUAND CELA A-T-IL LIEU ?

Les activités proposées aux élèves et les moments de réflexion


prennent des formes différentes d’un établissement à l’autre :
retraites (deux ou trois jours), heure de titulariat, heures de
cours libérées, dispersées tout au long de l’année (voire pro-
grammées dès septembre) ou centralisées en une seule journée
ou une demi-journée, temps de midi (prolongés), soirées
d’information, etc.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 13

L’information sur les études tient une place importante dans le


P.P.E. Les témoignages de personnes ayant opéré des choix
professionnels non conventionnels constituent un apport positif
et stimulant pour les élèves.
Dans les écoles où des services sociaux et des stages sont
organisés (obligatoires ou facultatifs), les temps de préparation
et de feed-back sont présentés comme essentiels : le debriefing de
la (des) journée(s) de stage est un moment important, car les
élèves peuvent aussi profiter des expériences des autres. À cette
occasion, ils expriment souvent le désir de revivre une telle
expérience.

Pour guider les démarches, un carnet de bord est soit distribué


systématiquement à tous les élèves, soit mis à leur disposition
s’ils en font la demande… Il arrive malheureusement que ce
carnet aille traîner au fond d’un tiroir...
Ces carnets d’accompagnement contiennent des guides pour
l’animation, des fiches personnelles à compléter, des informa-
tions diverses, des documents administratifs, des textes de
réflexion, des documents de préparation et de feed-back con-
cernant les stages, d’autres informations à propos des services
sociaux ou de journées d’immersion (études ou professions)…

QUELLES SONT LES DIFFICULTÉS


IDENTIFIÉES ET LES CONSÉQUENCES DE
CELLES-CI ?

Depuis les premières mises sur pied de ces projets en école, on


assiste de manière générale à une réduction (ou un statu quo)
du nombre d’activités organisées pendant les temps scolaires
parce que :
14

ƒ La programmation est difficile (principalement à cause


l’instabilité des horaires).
ƒ La pression exercée par les autres activités organisées est
forte et on constate un nombre impressionnant de cours
« perdus ».
ƒ Les professeurs sont influencés par les attitudes de cer-
tains élèves, qui se disent non concernés, ce qui décou-
rage l’équipe d’animation ; celle-ci se pose alors la ques-
tion de l’efficacité et de l’utilité de l’accompagnement.
ƒ L’école subit des contraintes externes qui poussent les
enseignants à se recentrer sur les cours (inspection, dé-
crets, etc.). Ils manquent d’élan et de dynamisme pour
innover et développer de nouveaux projets parallèles.
ƒ Le manque de moyens accordés par la Communauté Fran-
çaise pour accompagner ces projets, malgré le décret,
donne l’impression de fonctionner avec des bouts de chan-
delle.
ƒ Des réflexions expriment la difficulté d’accompagner des
élèves « délaissés ». Par exemple, les élèves démobilisés
du 3e degré qui subissent les animations et séances
d’information liées au P.P.E. ; mais aussi les élèves en fin
de cycle (ou à d’autres moments de leur scolarité), au
moment où leur (ré)orientation pose question : risque
d’exclusion, difficulté d’assurer l’accompagnement, de
fournir l’information, etc.

Chaque responsable relève que le temps et les personnes actives


manquent pour la concrétisation des nombreuses idées qui
germent.

Certaines activités ont été abandonnées (souvent à la suite


d’évaluations). Ainsi ne sont plus repris :
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 15

ƒ des questionnaires sur la personnalité (manque de temps,


manque de suivi par les collègues, attente des élèves
d’obtenir une confirmation de leur profil) ;
ƒ des conférences (par indisponibilité des orateurs, ou sim-
plement par désir de varier) ;
ƒ pour deux écoles, les séances d’animation P.P.E. en temps
scolaire (manque de temps, responsable unique, démoti-
vation) ;
ƒ des rencontres avec les anciens (par manque de temps et
de personne responsable).

QUELLES SONT LES RICHESSES ET LES


PRATIQUES À CONSERVER, VOIRE À
DÉVELOPPER ?

Indiscutablement, il est important de rendre l’élève acteur et


responsable : par exemple, dans un collège, les élèves peuvent
poursuivre individuellement la démarche entamée en retraite,
voire la commencer (s’ils avaient choisi une retraite n’ayant pas
comme thème l’orientation). Ils font alors la démarche person-
nellement (solliciter un entretien et effectuer seuls les tâches
proposées pour la réflexion).
Certaines équipes insistent particulièrement sur l’importance de
permettre à l’élève de poser des choix : thème de retraite,
engagement social, stages, etc., et de passer à l’action : prises de
contact, interviews, etc.
L’objectif de confronter le jeune avec la réalité est aussi pour-
suivi dans l’organisation des stages et services sociaux. Beau-
coup de feed-backs positifs sont exprimés par une (grande) partie
des élèves, tandis que d’autres s’investissent peu dans les
démarches actives qu’on leur propose. Les bénéfices des stages
dépendent de leur engagement. L’attitude désinvolte de cer-
tains jeunes démotivés est à l’origine du découragement de
16

plusieurs enseignants et éducateurs responsables de ces activi-


tés P.P.E.
Deux collèges mentionnent que, pour informer les plus jeunes
(1e degré), ils organisent des visites d’écoles, le but étant de leur
faire découvrir des filières techniques ou professionnelles.
Comment éviter la dérive éventuelle de « visite d’un zoo », au
cours d’une visite qui se limite à un regard curieux et condes-
cendant ? Dans une école, ces visites sont organisées pour et par
un petit groupe d’élèves (moins de dix) qui suivent un cours
intitulé « projet » dans le cadre d’une 1e année complémentaire.
L’organisation repose sur l’énergie d’un duo de professeurs
(l’un de formation littéraire et l’autre scientifique) et n’a pas du
tout pour but de provoquer un déplacement de masse ;
l’approche est très personnalisée et permet d’échapper aux
risques évoqués ci-dessus.
D’autres démarches qui permettent de découvrir des parcours
de formation existent aussi : l’organisation d’activités associant
deux groupes de « filières différentes » au sein de la même école
ou de deux écoles complémentaires, projets concrets où les
élèves se côtoient d’égal à égal quelles que soient leurs options.
Les coordinateurs de niveau, quand cette fonction existe, jouent
aussi un rôle important : ils proposent à certains élèves qu’ils
rencontrent une réflexion personnelle sur leur parcours scolaire
et les ouvrent à des démarches pour une éventuelle réorienta-
tion.
Dans une école, une attention plus particulière est accordée aux
élèves qui n’ont pas de projet. Il s’agit d’ateliers (collectifs) de
« mise en route » et d’entretiens d’orientation menés par les
agents du P.M.S.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 17

EXISTE-T-IL DES PROLONGEMENTS AUX


ACTIVITÉS PONCTUELLES DU P.P.E. ?

Parfois, des prolongements et des réflexions sont menés, au sein


des cours ou en dehors, par des professeurs investis ou non
dans les animations du P.P.E. Leur collaboration dépend de
leurs convictions personnelles et l’ampleur de leur participation
est très variable (de l’organisation en solo d’une conférence... à
une simple idée partagée entre deux portes).
Certains professeurs s’associent au cas par cas, dans le cadre
d’un projet lié à un cours au sein d’une option. Dans deux
collèges, des cours de « préparation aux études supérieures »
sont organisés et le « contenu » de ces cours intègre les objectifs
du P.P.E.
Les collègues qui ne sont pas animateurs sont parfois peu
enthousiastes pour le P.P.E., car ils considèrent que ce projet
doit se dérouler « en dehors » des cours, et que le rôle du pro-
fesseur est de s’investir uniquement dans la transmission des
savoirs.
Dans un collège, les professeurs ne se sentent pas concernés,
même si la direction est très engagée dans le projet.
Le manque d’investissement tient aussi au fait que de nom-
breux professeurs ou éducateurs sont déjà impliqués dans
d’autres projets.

Globalement, on constate donc que le P.P.E. a relativement peu


d’ancrage au quotidien et n’est pas intégré comme un rouage
important dans le projet d’école.
18

QUELLES SONT LES ATTENTES FORMULÉES


PAR LES RESPONSABLES DE
L’ACCOMPAGNEMENT EN ORIENTATION DANS
NOS COLLÈGES ?

Au point de vue de l’organisation, il manque du temps, du


temps, et encore du temps ! Et aussi de l’espace : « on » rêve
d’un local spécifique regroupant les modules d’animation, les
revues utiles, les programmes de cours, les coordonnées de
personnes et institutions ressources, un fichier des anciens, les
« offres » de l’association des parents, les fiches du C.I.O. … et
on rêve aussi d’outils informatisés. « On » constate un manque
de moyens : le P.P.E. fonctionne presque uniquement sur la
base d’un bénévolat, qui a ses limites.

D’autres demandes concernent les objectifs et la mise en œu-


vre des animations du P.P.E. : des partages d’idées avec
d’autres écoles et une meilleure coordination en interne seraient
à même d’améliorer l’efficacité.

EXISTE-T-IL DES ACTIVITÉS À CARACTÈRE


ORIENTANT ORGANISÉES DANS LE CADRE
DES COURS, HORS DU CADRE DU P.P.E. ?

Peu de réponses au second questionnaire adressé aux responsables du


P.P.E., et qui traitait de ce point, nous sont parvenues : seuls deux
collèges nous les ont transmises. Nous supposons, d’une part, qu’il est
plus difficile pour les personnes-relais et les responsables du P.P.E.
d’investiguer auprès de chaque enseignant pour lister ce qui se fait en
interne et dans le cadre des cours et, d’autre part, que les multiples
activités qui pourraient être reliées au P.P.E. ne sont peut-être pas
perçues comme contribuant à former l’élève en matière d’orientation.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 19

Les initiatives relatées sont très intéressantes : la majorité


d’entre elles appellent les élèves à jouer des rôles que les
adultes prennent en charge habituellement. Ainsi
l’organisation de certaines activités est placée sous la tutelle des
élèves, les productions finales sont utiles et publiées (ce qui
permet d’insister sur qualité du produit fini) ; les manières de
faire sont les mêmes qu’en milieu professionnel. Il s’agit de
projets très diversifiés : par exemple, guider un groupe dans
une exposition (cours d’histoire), traduire une brochure touris-
tique (cours de langues modernes), découvrir et apprendre les
codes et attitudes attendues dans le milieu du travail (cours de
langues modernes), organiser et gérer un concours de nouvel-
les, mener des enquêtes auprès de professionnels pour étudier
l’institution littéraire (cours de français), créer des chorégra-
phies et les évaluer collectivement (cours d’éducation physi-
que), conscientiser les élèves à des problèmes environnemen-
taux par le biais d’expositions (cours de sciences), monter un
spectacle de A à Z, ou organiser des conseils d’élèves. L’intérêt
est de donner aux élèves la possibilité de s’exercer à monter
des projets où ils devront collaborer, prendre des responsabili-
tés, gérer une équipe, motiver les autres élèves, évaluer, etc., et
où ils vont être confrontés aux différentes exigences de publics
variés. On leur offre ainsi des conditions pour développer
d’autres compétences que celles exercées habituellement en
classe. Certains élèves brillants scolairement éprouvent des
difficultés face à ces nouvelles attentes et d’autres montrent des
aptitudes insoupçonnées. Ils se découvrent d’autres capacités,
peu exercées dans les cours proprement dits. Les professeurs
n’ont plus les mêmes fonctions et ils collaborent plus étroite-
ment avec leurs élèves, mais aussi avec leurs collègues.

Toutes ces expériences renforcent la préoccupation exprimée,


qui est de faire évoluer le P.P.E. Un point crucial de cette évolu-
tion serait de répondre à la question : comment permettre que
20

tous les collègues se sentent vraiment concernés par


l’orientation des élèves, et qu’ils intègrent dans leurs cours et
dans les activités extrascolaires une dimension « orien-
tante » ?

Les difficultés liées à l’orientation, qui seront présentées au


chapitre qui suit, renforcent l’idée qu’il ne suffit plus d’informer
et de débattre, mais que chaque enseignant par ses pratiques
pédagogiques devrait éduquer l’élève à l’acte de choisir pour
qu’il puisse poser des choix qui lui conviennent.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 21

Chapitre – 2 – Difficultés liées à l’orientation

I. TÉMOIGNAGES DU SUPÉRIEUR

1. Des acteurs pédagogiques des FUNP s’expriment


sur les difficultés que les étudiants de premier bac-
calauréat vivent et qui pourraient être à l’origine de
leur échec ou de leur décrochage en cours d’année.

Au sein des différentes facultés, toutes disciplines confondues


(médecine, sciences, droit, sciences économiques, etc.), des
enseignants de première année s’occupent particulièrement des
étudiants en difficulté : rencontres personnalisées, session de
mise à niveau en août, feed-back suite à un test, etc.
Un groupe interfacultaire, constitué à l’initiative du Centre
Interfaces, réfléchit, depuis février 2007, à la transition entre le
secondaire et le supérieur, particulièrement à partir de cas
d’étudiants qui « décrochent » après une semaine, après un
mois, après les interrogations de novembre, après les examens
de janvier...
De ces échanges ont émergé des constats similaires d’une
faculté à l’autre, et il nous a paru intéressant de les transmettre
aux enseignants du secondaire, non pas pour inciter ces der-
niers à « répondre à une commande venant de l’enseignement
supérieur », mais pour que ces informations leur permettent
d’affiner leurs stratégies. Ils percevront sans doute mieux ainsi
pourquoi et comment faire acquérir aux élèves des « compéten-
22

ces pour se débrouiller dans la vie de l’enseignement supé-


rieur », quel que soit le parcours choisi.

À partir de ces partages d’expériences, le groupe a brossé


quelques profils d’étudiants qui posent question. Il s’agit donc
de témoignages de praticiens, et non des conclusions d’une
étude systématique et statistique du décrochage scolaire.
Cette proposition de typologie pourrait servir de base à une
réflexion sur les pratiques pédagogiques et éducatives au sein
des collèges.

a. Certains étudiants semblent afficher une sorte d’excès


de confiance

Ils ont réussi leurs études secondaires sans « beaucoup » tra-


vailler (ou sans avoir eu le sentiment de devoir « s’y mettre »),
les premiers cours ne leur semblent pas hors de portée, ils
attribuent leur échec lors des premiers tests au fait qu’ils ne les
ont pas préparés (puisque « ce n’était que des tests… »). Ils ont
la certitude (c’est ce que beaucoup d’entre eux disent, du moins,
en tout cas jusqu’en janvier, par exemple) que « quand ils s’y
mettront, ça ira ! ». Or, ils ne se rendent pas compte qu’ils
n’arrivent pas à s’y mettre, et le temps passe...

Des enseignants du supérieur s’interrogent :

ƒ Pourquoi ne se mettent-ils pas à travailler, pourquoi


n’arrivent-ils pas à le faire ? Chez ceux qui s’y mettent
tardivement, ou en redoublant leur année, que s’est-il
passé ?
ƒ Que faudrait-il à ces étudiants-là pour sortir (plus vite) de
ce que nous nommons ici « excès de confiance » et qui
n’est peut-être une confiance excessive qu’en apparence ?
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 23

Leur faut-il d’autres informations sur ce qu’on attend


d’eux à l’université, une parole précise de quelqu’un de
précis, des encouragements, un « choc salutaire »... ?
ƒ Comment ces étudiants-là peuvent-ils prendre conscience
de leur situation réelle et accepter de s’y confronter ?

b. Certains étudiants semblent manifester un manque de


motivation

Ils se sont inscrits dans telle fac, mais ne sont pas sûrs d’avoir
fait le bon choix ; ils n’arrivent pas à s’intéresser à leurs études,
aux différentes matières de leur programme. Ils s’ennuient. Ils
voudraient voir immédiatement les enjeux, pour eux personnel-
lement, de tous les cours. À la première difficulté, ils se décou-
ragent.

Des enseignants du supérieur s’interrogent :

ƒ Comment définir cette non-motivation ? La motivation,


ce moteur intérieur, d’où nous vient-elle ? Être démotivé,
n’est-ce pas la partie visible d’une problématique plus
profonde et multiforme ?
ƒ Ces étudiants peuvent-ils nous aider à cerner ce qui les
ennuie, ce qui les empêche de s’intéresser à leurs études ?
ƒ Souffrent-ils, par exemple, à l’université, d’être davantage
livrés à eux-mêmes, obligés de mieux se prendre en
charge, qu’ils ne l’étaient dans le secondaire ? Deman-
dent-ils, dès lors, plus de soutien, d’encadrement ? Ou
souhaiteraient-ils trouver un moyen d’évaluer leur choix
d’orientation ? Ou leur mal-être est-il d’un autre ordre ?
24

c. Certains étudiants paraissent manquer d’autonomie ou


de capacité d’initiative

De nombreux étudiants en difficulté ne saisissent pas les occa-


sions qui leur sont offertes. Ils sont informés, mais ne font pas le
minimum nécessaire pour bénéficier des remédiations prévues
pour eux : ils renoncent à se présenter une seconde fois s’ils
trouvent porte close une première fois chez un enseignant, ils
n’osent pas téléphoner ou ne savent comment formuler une
demande...

Des enseignants du supérieur s’interrogent :

ƒ Est-ce strictement dans le domaine de leurs études que


ces jeunes manquent d’initiative et d’autonomie ? Qu’est-
ce qui les en empêche : timidité, manque d’audace, man-
que de confiance en soi, peur de mal faire, d’être mal vu,
d’être ridicule, d’échouer... ?
ƒ Une des caractéristiques bien connues de l’université est
qu’il faut se « prendre en main », s’organiser, gérer son
travail et sa vie quotidienne (surtout en kot) par soi-
même : rencontre-t-on chez ces étudiants une difficulté
particulière de s’adapter à ce nouveau contexte ?
ƒ Peut-on cerner ce qui permettrait à ces étudiants de sur-
monter leur difficulté ?

d. Certains étudiants disent se trouver très isolés

Ils kottent seuls, loin de chez eux, vivent avec difficulté cette
séparation, ne connaissent personne dans leur orientation
d’études en arrivant en premier bac, ont du mal à s’intégrer
dans des sous-groupes de jeunes qui se connaissent déjà. S’ils
sont un peu timides, l’obstacle peut leur paraître insurmonta-
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 25

ble. Ils évitent dès lors aussi les activités culturelles et sportives
proposées sur le campus. Et en cas de difficultés, ils sont encore
et toujours très seuls...

Des enseignants du supérieur s’interrogent :

ƒ Qu’est-ce qui existe et que mettre sur pied de plus pour


permettre à ces jeunes de trouver une place qui leur con-
vient dans un réseau d’étudiants et de se construire peu à
peu un sentiment d’appartenance ?
ƒ Comment s’adresser à ceux-là pour ne pas les renvoyer
purement et simplement à eux-mêmes et donc à leur iso-
lement ?

e. Certains étudiants entrent à l’université avec une vision


de l’année qui s’ouvre devant eux dans laquelle les études
occupent une place assez secondaire

Leur projet est de vivre une vie d’étudiant, faite de vie quoti-
dienne entre jeunes, de liberté, de loisirs ; leur choix d’études ne
signifie ni engagement ni responsabilités, que ce soit vis-à-vis
de leurs parents ou vis-à-vis de la société, par exemple. Ce sont
ceux qu’on appelle les « touristes »...

Des enseignants s’interrogent :

ƒ Faut-il se désintéresser de ces étudiants-là, que la pers-


pective d’échouer dans leurs études ne met pas en dé-
tresse ni même en demande de quoi que ce soit ?
ƒ En imaginant qu’ils n’ont pas fait leur choix d’orientation
tout à fait au hasard, comment leur offrir (s’ils viennent
quand même un peu aux cours...) la chance de découvrir,
de laisser naître une curiosité, un intérêt, une passion
peut-être ?
26

2. Les étudiants de première année de baccalauréat


s’expriment sur les raisons qui pourraient être à la
base de leurs difficultés

Les témoignages des étudiants qui sont retranscrits ici ont été
fournis par les psychologues de la formation « Rebond »7. Ces
spécialistes sont en contact direct avec les étudiants de première
année des Hautes Écoles et des Universités en situation de
décrochage, c'est-à-dire des étudiants qui ne se sentent plus à
leur place et/ou qui se posent des questions sur leur orientation.
Ces témoignages viennent compléter les avis exprimés au
chapitre précédent.

« Je me suis inscrite en bio ; je ne m’attendais pas à avoir


autant de physique et de chimie que de biologie. »
« On m’a dit que, même si je n’avais jamais eu de latin
dans le secondaire, je pouvais faire les romanes, mais j’ai
beaucoup de difficultés et je dois travailler beaucoup plus
que les autres pour ce cours. »
« J’ai toujours aimé les langues et mes profs du se-
condaire me disaient que j’étais bon ; j’ai choisi les ger-
maniques. Je ne m’attendais pas à avoir des cours aussi
théoriques, j’ai l’impression de ne plus pratiquer les lan-
gues. »
« Je suis perdue dans l’auditoire, pour les profs, on est un
numéro, je me sens tout à fait isolée, on est tellement dans
cet auditoire, je ne connais personne… c’est un peu cha-
cun pour soi. »
« Ici, il faut se débrouiller pour avoir l’info : se renseigner,
consulter les valves. »

7 Formation due à l’initiative du S.P.U. (Service de Pédagogie des Facultés Universi-


taires Notre-Dame de la Paix à Namur), relayée et soutenue par d’autres acteurs
pédagogiques du Namurois.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 27

« Ce n’est pas facile de s’habituer à cette nouvelle vie : ma


famille et mes amis sont loin, je dois partager mon temps
entre les courses, faire de nouvelles connaissances, tra-
vailler… C’est beaucoup à gérer en même temps ! »
« Pour la première année, mes parents ne voulaient pas
que je kotte. Je passe beaucoup de temps en trajets.
Quand je rentre d’une journée de cours, je suis crevé.
Mon travail s’accumule. »
« On voit en un mois la matière de deux années du se-
condaire ! »
« Le prof arrive, il donne son cours, qu’on soit là ou pas,
ça ne change rien. »
« En secondaire, je n’ai pas été habitué à travailler ; ici, on
ne peut plus se permettre d’étudier quelques jours avant
l’examen. »
« J’ai beaucoup plus de temps libre qu’avant, c’est à moi
de décider de ce que j’en fais », « je sais que je dois tra-
vailler, mais on ne me dit pas ce que je dois faire, je ne
sais pas par quel bout le prendre. »
« À l’examen, je pensais avoir répondu à la question, mais
le prof voulait tous les détails. »

3. Mise en garde : quelle utilisation peut-on faire de


ces témoignages des étudiants et des acteurs péda-
gogiques?

Un des objectifs du P.P.E. est de permettre aux élèves


d’anticiper les changements entre le secondaire et le supérieur :
si cela fonctionne bien, ils seront incités à faire, en fin
d’humanités, les démarches utiles pour prendre une orientation
qui leur convient.
28

C’est bien dans un but d’informer les adultes acteurs dans


l’école secondaire que ces témoignages d’étudiants en difficulté
sont repris dans ce cahier pédagogique, mais présentés tels
quels, quel impact peuvent-ils avoir chez l’élève ?

Découvrant les difficultés qu’expriment les étudiants ou leurs


hypothèses sur les raisons qui les amènent à « décrocher », les
élèves de 5e ou 6e année du secondaire disent : « Cela fait
peur ! »
Cette peur est-elle un frein ou un moteur en matière d’action,
de motivation, d’engagement, d’autonomie, de meilleure ges-
tion du temps ?

La pédagogie de la peur, parfois utilisée à l’école comme incitant


au travail (ou à la « mise en action »), peut entraîner du stress
chez l’élève. Ce stress se traduit en comportements8 qui ne sont
pas nécessairement ceux attendus.
Est-ce toujours indiqué d’utiliser la peur comme moyen de
prévention ? Comme chez le tout petit à qui on dit « Attention !
Ne cours pas, tu pourrais tomber », message négatif qui permet
d’annoncer un danger, et lui faire comprendre « qu’il faut
marcher posément ». La compréhension de ces messages impli-
cites qui utilisent des injonctions négatives se fait par juxtaposi-
tion : on se fait une représentation affirmative sur laquelle on
imprime « ne pas faire ». Cette correction mentale nous joue des
tours, à l’instar du cycliste qui, s’il ne veut pas aller droit sur le
poteau, l’emboutit quand même.

Nous attirons donc l’attention des animateurs du P.P.E. sur


l’usage qu’ils pourraient faire de ces constats, des témoignages
d’acteurs pédagogiques ou d’étudiants. Car, dans une campa-

8 Voir annexe 3.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 29

gne de conscientisation, si l’on n’y prend garde, il peut y avoir


une discordance entre l’intention et le résultat produit.
Nous pensons que ces documents dessinent un arrière-fond qui
peut aider à mieux cerner les rôles que pourrait jouer l’école, à
préciser ce que l’élève devait être capable de faire en fin de
secondaire. Et si ces témoignages sont présentés aux élèves, que
cela soit dans le cadre d’un débat afin que puissent se désamor-
cer les craintes, exprimées ou non.

Comment aider les élèves à gérer leur stress ?

Pour limiter le stress de l’élève face à son orientation, en plus


d’autres approches spécifiques à la gestion du stress9,
l’animateur peut faire un recadrage, de manière à permettre à
l’élève de s’exprimer comme suit :

ƒ Ce n’est pas le premier choix important que je fais, j’ai déjà fait
d’autres choix précédemment.
ƒ Ce n’est pas ce choix qui va déterminer ma vie pendant qua-
rante ans.
ƒ Il n’y a pas qu’une seule voie qui me conviendra, je peux pré-
voir un plan B.
ƒ Je ne vais pas devoir faire le bon choix, mais faire un choix so-
lide, c’est-à-dire prendre une orientation dans laquelle je vais
m’engager effectivement une fois la décision prise.

Les activités et les démarches que l’école propose dans le cadre


du P.P.E. et celles que le jeune va mettre en place si le cadre l’y
invite vont lui permettre d’assimiler ces recadrages. Par exem-
ple inviter un intervenant dans le cadre d’un cours et lui de-
mander d’expliquer aux élèves son parcours de formation et ses

9 Voir annexe 3.
30

réorientations professionnelles vont permettre de relativiser


l’aspect déterminant d’un choix d’orientation.

II. CONSTATS DANS LE SECONDAIRE

Quelques élèves qui participent aux activités du P.P.E. ont des


attitudes très déconcertantes, et qui rejoignent par certains
points les constats du supérieur : peu actifs, ils expriment un
certain désintérêt, voire de l’agressivité. Quelle que soit la
qualité des animations proposées, les adultes sont toujours
surpris de ces réactions et s’interrogent sur cette démobilisa-
tion apparente. Il s’agit ici, pour faire évoluer le P.P.E., de
comprendre et d’accompagner mieux ces élèves qui semblent
démobilisés.

1. Quelques traits assez caractéristiques relevés au-


près d’élèves perçus comme démobilisés

a. Des élèves pensent avoir du temps pour poser des démar-


ches liées à leur orientation et reportent continuellement le
débat, les actes, les démarches, les recherches, les contacts.
Ils reportent à plus tard ce qui les ennuie ou ce qui les
stresse. Ils disent vivre le moment présent, c’est l’immédiat
qui les guide.
b. Lors des activités collectives, certains élèves se comportent
de manière « hyperpersonnelle », refusant de s’impliquer
dans ces démarches collectives. Ils affirment que leur projet
ne concerne qu’eux-mêmes. Ils réagissent en choisissant
d’être passifs vis-à-vis du groupe. Leur attitude est loin
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 31

d’être neutre, quoi qu’ils en disent. Elle fait peser sur les au-
tres un climat négatif.

c. D’autres élèves expliquent leur attitude par un « manque


de chance » ; ils pensent que le contexte n’est pas favorable,
qu’on ne les informe pas suffisamment, que ce n’est pas
leur faute s’ils n’ont pas leurs documents et qu’ils ne peu-
vent pas participer. Ils disent ne pas pouvoir faire toutes les
démarches, car « on » ne les a pas avertis, ils trouvent que
les activités ne sont pas clairement annoncées ni présentées.
Ils sont en colère contre le système : ils se considèrent
comme victimes, car, disent-ils, les autres ne font rien pour
les aider. Ils n’imaginent pas qu’ils peuvent être acteurs et
responsables.

d. Des élèves expriment qu’ils ne se sentent pas « à l’aise »


pour discuter de leur projet personnel en public. Ils se di-
sent timides et n’ont pas l’habitude de parler d’eux-
mêmes. Avec la famille ou avec des amis, ils acceptent par-
fois cette « intrusion » dans leur projet personnel, mais la
refusent dans un autre contexte.

e. D’autres élèves critiquent négativement tout ce qui leur est


proposé : ils disent avoir droit à un service impeccable, la
moindre faille est source de critique. Quelles que soient les
modalités d’organisation, ils relèvent systématiquement les
manques et ce qui pourrait être source d’erreurs. Ils adop-
tent l’attitude du « consommateur » exigeant et
n’imaginent pas de s’impliquer dans ces conditions.

f. Quelques élèves pensent que les rôles de l’école dans ce


domaine sont de les informer sur les filières de formation
et de mettre en place un cadre de rencontres (étudiants,
professionnels). Les animations et moments de réflexion ne
32

les intéressent pas, car ils estiment que les animateurs ne


sont pas des experts en la matière, qu’ils ne peuvent répon-
dre à leurs attentes personnelles. Ils pensent que ces activi-
tés de réflexion en groupe sont des moments perdus et que
l’action seule leur permettra de faire un choix. Ce sont des
élèves motivés, mais qui s’opposent aux modalités
d’organisation, car elles ne répondent pas à leurs attentes.

La démobilisation de certains élèves n’est pas spécifique


aux activités d’orientation. La motivation pose question au-
tant dans le cadre scolaire que dans d’autres cadres.

2. Actuellement, l’organisation et le contexte scolai-


res renforcent-ils la démobilisation des élèves ?

Quelques réflexions pour construire une réponse et inviter à


imaginer des améliorations :

a. Un modèle centré sur « l’épanouissement profession-


nel »

Le P.P.E. propose aux élèves des informations sur les études,


des soirées « carrières », des journées d’immersion en entrepri-
ses, des stages, des animations, des visites, des rencontres, des
retraites, des actions sociales, etc. Ce qui émerge de l’ensemble,
c’est un modèle d’« épanouissement professionnel », un modèle
adapté à une société économique, un modèle d’efficacité : « Il
faut réussir. » Si certains élèves vivent l’école comme une
contrainte, ou vivent le monde du travail (via le travail des
parents, via leurs propres expériences ponctuelles du monde du
travail) comme une charge, peuvent-ils s’investir dans un projet
professionnel perçu comme le seul épanouissant ? Le discours
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 33

véhiculé implicitement est qu’il faut investir les études et le


monde du travail pour se sentir bien. Comment un jeune qui
envisage ses études, puis son métier, comme secondaires va-t-il
trouver une place dans ce type de discours ? Les deux percep-
tions semblent antagonistes.

b. Une attitude encouragée

L’école, dans son mode d’organisation, favorise chez l’élève le


comportement du « salarié modèle » : l’attitude attendue est
celle de l’élève qui fait bien ce qu’on lui demande, qui preste ses
heures, qui accepte de travailler sans percevoir parfois le sens
de ce que l’on lui propose, ou sans donner un sens à ce qu’il fait
de lui-même. Mais si l’élève suit bien les consignes, il sera
récompensé par « une bonne note ». Dans ce contexte qui en-
courage un certain conformisme, il peut être difficile pour
certains d’entre eux de changer d’attitude, c’est-à-dire, dans le
cadre du P.P.E., de s’engager personnellement, de passer à
l’action, de s’exprimer personnellement sur des sujets aussi
privés que son avenir.

c. Un contexte « d’obligation »

Les activités du P.P.E. dans le temps scolaire sont adressées à


tous. L’intention est de mettre les élèves en réflexion, de leur
apporter des informations ou de les inciter à passer à l’action
tantôt de manière collective tantôt de façon personnelle.
L’obligation est liée aux nécessités de l’organisation (que faire
des élèves qui n’y participeraient pas ?) et à l’idée que ces
activités peuvent profiter à tous, même et surtout à ceux qui ne
veulent pas spontanément s’y investir (l’école se sent principa-
lement responsable des élèves qu’elle estime être ceux qui en ont
34

besoin). Le caractère obligatoire de ces activités peut être ressenti


comme en contradiction avec la notion même d’orientation.

d. Des groupes ou des personnes « étiquetés »

Dans les écoles, certains groupes-classes sont étiquetés comme


« difficiles ». Les élèves qui appartiennent à ces groupes sont
conscients de cette étiquette, à partir d’indices transmis par les
enseignants, les éducateurs, et par les autres classes. Or, l’image
ainsi attribuée est parfois vécue comme un signe de distinction.
Correspondre dans la réalité à cette réputation est, pour cer-
tains, une manière de se faire reconnaître. Et on sait que, pour
des adolescents, répondre à l’attente, même négative, des uns et
des autres est une façon d’être « intégré » dans l’école. Par le jeu
des étiquettes ainsi « distribuées » naissent des comparaisons
qui, même si elles restent implicites, disqualifient une classe, un
groupe, ou même une option. Ces élèves sont ainsi cantonnés
dans une attitude vécue comme négative. Ils sont « ceux qui
n’en veulent pas ». Et un certain nombre d’entre eux ne font
plus rien pour sortir de cette attitude.

e. Un rythme scolaire et un besoin de temps

Les rythmes scolaires sont coupés, hachés et le découpage des


matières de cours en horaires et en programmes favorise plutôt
la recherche de réussites ponctuelles que l’évolution de fond
dans la durée. Beaucoup de jeunes en restent au projet d’obtenir
leur « ticket diplôme ». Et, dans un contexte de réformes
controversées, nombre d’enseignants se sentent démunis, eux
aussi, pour construire une continuité dans l’apprentissage. Cet
ensemble de données génère un stress permanent et la crainte
de « n’avoir jamais le temps de faire tout ce qu’il faut faire, de
voir tout le programme ». Ce rythme scolaire est ainsi souvent
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 35

en décalage par rapport à un apprentissage progressif, à une


lente maturation des projets, à une organisation personnelle du
temps et du travail. Or, le choix des études et de la profession
est un processus qui s’opère lentement. La sensation du man-
que de temps (à l’école et ailleurs) empêche souvent que l’on
accorde « du temps au temps » lors de décisions à prendre.

3. Quel est l’impact des élèves démobilisés sur


l’ambiance de la classe ?

Dans la plupart de nos collèges et instituts, les responsables des


activités du P.P.E. choisissent d’organiser les animations par
classe autour du titulaire, plutôt que par groupe homogène de
besoins. Le titulaire garde une place importante dans nos éco-
les, même si, avec la dispersion des élèves et des cours liée au
rénové, certains déplorent le manque de moyens accordés
maintenant au titulaire. Son influence reste prépondérante pour
que se crée une ambiance de classe ; un bon climat aura un
impact sur l’investissement des élèves dans la classe, ce qui
rejaillira forcément sur les démarches d’orientation. Il est évi-
dent que le titulaire n’est pas seul acteur ; l’équipe professorale
dans son ensemble comme l’effet de classe peuvent stimuler ou
inhiber certains élèves. Parfois, l’influence de quelques élèves
amplifie ou fait basculer les autres d’une attitude à l’autre.
L’effet de classe peut accentuer la démobilisation.
36

Chapitre – 3 – Perspectives d’actions

I. SE QUESTIONNER POUR MIEUX AGIR

1. Face à certains étudiants qui semblent afficher


une sorte d’excès de confiance et pour anticiper
leurs difficultés et éduquer les élèves à plus de ré-
alisme, est-il suffisant que l’école secondaire
n’organise que des animations P.P.E. ?

ƒ Quelles sont les moments dans les cours où l’enseignant


invite l’élève à identifier ses forces, ces difficultés, ses res-
sources, ses freins ?
ƒ Quelles sont les formes d’évaluation ou d’autoévaluation
qui permettraient d’apprendre à l’élève à percevoir ses
difficultés ?
ƒ Quelles seraient les attitudes de l’enseignant qui aide-
raient l’élève à mettre en place une stratégie adaptée ?
ƒ Quels seraient les conseils, les remarques (et la manière
de communiquer) pour que l’élève soit amené à avoir un
regard réaliste et positif sur ses aptitudes ?
ƒ Quelles seraient les modifications à apporter dans l’école
pour que le contexte soit plus favorable à une organisa-
tion personnelle et efficace ?
ƒ Comment mettre l’élève en situation d’anticiper, de se
projeter ?
ƒ Quelles stratégies met-on en place au cours pour que
l’élève puisse s’adapter à un autre contexte ?
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 37

2. Face à certains étudiants qui semblent manifester


un manque de motivation, et pour anticiper leurs dif-
ficultés et favoriser leur mobilisation, est-il suffisant
que l’école secondaire n’organise que des anima-
tions P.P.E. ?

ƒ Comment amener l’élève à identifier ce qui lui convient ?


Comment va-t-il identifier les facteurs qui influencent son
choix ?
ƒ Quelles seraient les façons de faire en classe qui encoura-
gent la persévérance et qui déboucheraient sur le plaisir
d’une production de longue haleine gratifiante aux yeux
de l’élève ?
ƒ Quels sont les modes d’organisation de l’école qui vont
inciter l’élève à rechercher du bien-être dans
l’apprentissage ou à n’avoir comme objectif de recherche
qu’une réussite minimale, voire d’éviter l’échec ?
ƒ Quelle sont les stratégies d’apprentissage et d’évaluation
qui vont inviter l’élève à s’investir ?

3. Face à certains étudiants paraissant manquer


d’autonomie ou de capacité d’initiative, et pour anti-
ciper leurs difficultés et inciter les élèves à prendre
plus d’initiatives, est-il suffisant que l’école se-
condaire n’organise que des animations P.P.E. ?

ƒ Comment multiplier en école l’occasion pour l’élève de


relever des défis, de mener des projets ?
ƒ Existe-t-il dans l’école des personnes, des lieux, ou des
relais, où se transmettent des initiatives et des responsabi-
lités ?
ƒ Quelle place fait-on dans le cadre de son cours à la prise
de parole, aux propositions des élèves et aux négocia-
tions ?
38

ƒ Quelles pourraient être les façons de faire de l’enseignant


pour induire chez l’élève de s’organiser, de faire des dé-
marches, d’élaborer des stratégies, de s’essayer sans ris-
que, seul ou avec d’autres ?
ƒ Quelles sont les caractéristiques des élèves qui prennent
des initiatives, qui se dépassent, qui prennent des risques,
au sein d’une classe ?
ƒ Quelles sont les activités qui incitent les élèves à
s’organiser ?
ƒ Que fait-on face aux élèves qui s’étiquettent comme
« incapables d’agir seuls » ?
ƒ Comment met-on les élèves en confiance ? Quelles sont
les caractéristiques d’un contexte favorable aux prises
d’initiatives au sein d’une classe, d’un groupe ?

4. Face à certains étudiants qui disent se trouver très


isolés, pour anticiper leurs difficultés et développer
l’intelligence relationnelle, est-il suffisant que
l’école secondaire n’organise que des animations
P.P.E. ?

ƒ Lors de difficultés scolaires, comment amener l’élève à


réfléchir sur les stratégies qu’il aurait tendance à mettre
en place : va-t-il se couper des autres, se focaliser sur son
temps de travail, préférer une production personnelle à
une production collective ?
ƒ Existe-t-il au sein de l’institution des moments prévus
pour l’émergence de projets de groupe, pour la mise sur
pied d’activités conviviales ?
ƒ Que fait-on avec les élèves qui s’isolent ?
ƒ Dans quel cas encourage-t-on, ou aide-t-on à construire
des équipes de travail, d’entraide, des tutorats ?
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 39

ƒ Quelles sont les attitudes pédagogiques qui seraient favo-


rables au développement de l’intelligence relationnelle et
aideraient à reconnaître son importance ?
ƒ Existe-t-il au sein de l’école des lieux ou des moments
pour que les enseignants collaborent ?
ƒ Face aux élèves, les collaborations sont-elles visibles ?
ƒ Quand invite-t-on les élèves à chercher l’aide qui leur est
nécessaire ?
ƒ Dans quelles activités sont-ils amenés à réaliser que sa-
voir s’adresser à d’autres est une force ?
ƒ Dans quelles situations les élèves sont-ils amenés à
s’adresser à des personnes (adultes ou jeunes) qu’ils ne
rencontrent pas spontanément, à les rencontrer, à nouer
des liens avec elles?

5. Face à certains étudiants entrant à l’université


avec une vision de l’année qui s’ouvre devant eux
dans laquelle les études occupent une place assez
secondaire, pour anticiper leurs difficultés et ap-
prendre aux élèves à être plus responsables, est-il
suffisant que l’école secondaire n’organise que des
animations P.P.E. ?

ƒ Comment amener les élèves à être plus « conséquents » ?


ƒ Quels sont les éléments du contexte scolaire qui favori-
sent ou défavorisent la prise de conscience de l’impact de
ces attitudes désinvoltes ?
ƒ Dans le cadre d’un cours, quelles sont les occasions pour
que les élèves prennent la position d’un tiers ?
ƒ Quels sont les modes d’organisation que propose
l’institution qui rendent l’élève responsable de son ap-
prentissage et de ses résultats ?
40

ƒ Quels sont les facteurs au sein de l’école qui « encoura-


gent » l‘envie d’avoir une étiquette de jeune « guindail-
leur » ?
ƒ Comment renforcer le plaisir d’apprendre pour appren-
dre et non pour obtenir un « ticket-diplôme » ?

II. QUELQUES BALISES CONCERNANT


DIFFÉRENTES PÉDAGOGIES

1. Pédagogie du choix : apprendre à choisir pour dé-


cider

Nous avons réfléchi au sein de l’équipe d’Interfaces aux méca-


nismes qui sous-tendent le « geste de choisir » et nous pensons
qu’on n’insiste jamais assez sur une pédagogie du choix, qui
vaudrait de se voir accorder une place importante dans le projet
pédagogique de l’école.

Nous pensons que chaque professeur, par le fait même qu’il


enseigne, apprend nécessairement à l’élève à choisir. S’il dis-
cerne les conditions nécessaires et suffisantes pour « faire un
choix », l’enseignant est à même de construire, dans le cadre de
ses cours, des projets qui permettront aux élèves d’apprendre à
bien choisir en prenant conscience des mécanismes qui inter-
viennent dans le choix. À partir de mini-récits10, de situations

10 Marie BAILLEUX, Dominique BERTRAND, Barbara DUFOUR, Gérard FOUREZ, Marie-


Anne MANIET, Pierre MICHE, Ana ROMÃO, Francis TILMAN et le Centre Interfaces,
Des compétences négligées par l’école. Les raconter pour les enseigner, Charleroi/Lyon,
Couleur livres /Chronique sociale, 2006.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 41

précises, de questions nous vous proposons un éclairage sur les


mécanismes du choix

Voici des exemples de situations où soit l’enseignant ou


l’éducateur décide seul, soit il propose à l’élève (ou au groupe)
de prendre position :

le statut d’un test, d’un travail, le thème d’un travail, un livre à


analyser, un mode d’expression, une destination de voyage, un
mode de résolution, un cours, une option, un type d’études, une
activité sportive, un type d’exercices, une façon d’évaluer…

Voici des exemples de questions auxquelles l’enseignant,


l’éducateur ou l’élève peuvent être confrontés quand ils se
retrouvent en position de choisir.

Pourquoi choisir ? Qui choisit ? Comment arriver à répertorier


toutes les possibilités imaginables ? Comment faire le deuil de ce
qui ne sera pas choisi ? Quel est le risque de prendre telle ou telle
option ? Est-il possible de faire un essai préalable pour anticiper
les conséquences ? Quelles sont les influences ou les pressions qui
pèsent sur la décision ? Qu’est-ce qui est le plus important pour
moi ? Qu’est-ce qui est de l’ordre du possible ? Qui sera respon-
sable de la réalisation ?

Selon l’importance des enjeux repérés, on peut admettre qu’il


existe des niveaux de choix très différents. Ils seraient reliés aux
besoins fondamentaux de l’être humain. Ainsi, certains choix
seraient plus « chargés » que d’autres quand ils sont associés à
certains besoins11.

11 La pyramide des besoins de Maslow. Voir, par exemple,


http://semioscope.free.fr/article.php3?id_article=8 (vérifié le 06/10/2008).
42

Deux familles de situations

L’analyse de ces situations nous porte à penser que, face à une


décision à prendre, deux familles de situations sont envisagea-
bles. Au préalable, chacun va situer son choix dans l’une ou
l’autre de ces options. La conscience de ces possibles oriente
déjà l’attitude que l’on va adopter face au réel.

Si celui qui projette de faire un choix se situe dans un cadre


d’obligation, s’il se base sur les effets non désirés et les dé-
sagréments à éviter, s’il procède par exclusion de possibili-
tés, s’il exprime ne pas avoir de choix, s’il adopte une atti-
tude passive, s’il lui paraît impossible d’envisager une
marge de manœuvre, s’il se décharge des conséquences
éventuelles, etc., il opte pour des choix dictés par les
contraintes.

Si à l’opposé, celui qui projette de faire un choix est en at-


tente de bien-être, en recherche de plaisir, qu’il anticipe les
améliorations et les bénéfices, qu’il exprime le sentiment
qu’il peut choisir, qu’il adopte une attitude active, qu’il
imagine une marge de manœuvre même dans un cadre très
contraignant, qu’il accepte la responsabilité du choix, etc., il
opte pour des choix dictés par le sentiment de liberté.

Les choix dictés par les contraintes donnent l’impression qu’on


n’a pas de prise sur sa vie, sur son environnement, sur le réel.
Les choix dictés par le sentiment de liberté, permettent de se
positionner comme acteur de sa vie, et de pouvoir agir sur son
environnement.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 43

Dans une pédagogie du choix12, éduquer serait amener l’élève à


apprendre à choisir, pour qu’il prenne conscience de sa capacité
à avoir prise sur sa vie, pour qu’il prenne conscience que les
transformations sont possibles, pour qu’il soit responsable des
orientations qu’il aura prises. Et pour qu’ensuite il s’engage
durablement. Un choix dicté par le sentiment de liberté permet
de fonder un engagement. En restant fidèle à sa décision,
l’élève va mettre en place des stratégies pour mener à bien
son projet.

Certains enseignants sont réticents à proposer aux élèves,


dans leur cours, de poser des choix.

D’une part, il semble que les enseignants ont une croyance


profonde que tous les élèves doivent être « traités » de la même
façon13 et qu’une forme de justice, c’est d’uniformiser les exi-
gences.

Quelle est l’attitude juste ? Sur quelles exigences porte-t-


elle ? S’agit-il de « justice » ou de « justesse » ? Ne convien-
drait-il pas de donner à chaque élève la possibilité de gérer
son apprentissage en posant des choix, ceci en fonction de
ses besoins ? Comment éviter les dérives d’une pédagogie
du choix ?

D’autre part, certains adultes ont la conviction que les élèves


sont incapables de juger de leurs besoins.

Croire en leur capacité de gestion et d'évaluation, c’est leur


donner des clés pour grandir. Le professeur peut définir un
cadre de progression, quel que soit l’âge des élèves.

12 Voir l’exemple 1. S’exercer à choisir, chapitre 4 de ce cahier.


13 François DUBET, « Pourquoi ne croit-on pas les sociologues ? », dans Éducation et
Sociétés, n° 9/2002/1, p. 13-25.
44

L’évaluation d’un travail qui aura laissé aux élèves une marge
de liberté ne peut exercer une pression sur le choix de l’élève,
sous peine de voir l’élève basculer dans « un choix dicté par des
contraintes ». En d’autres termes, il serait contre-productif de
pénaliser un élève qui n’aurait choisi que des exercices faciles
ou en nombre réduit (si le nombre n’est pas imposé).

La difficulté pour le professeur est d’attribuer une cotation


similaire à deux élèves pour des prestations différentes.
Une évaluation de ce type peut être formative et se réfère à
la progression de l’élève. Elle pourra servir d’indicateur
ponctuel (voire de pondération positive d’une évaluation
certificative) et les critères de choix ne pourront en aucun
cas avoir un impact négatif sur l’évaluation certificative.

2. Pédagogie de l’engagement : apprendre à


s’engager dans un choix solide

Comment renforcer le sens de l’engagement ?

Un levier d’action lié aux théories de l’engagement est utilisé


dans le cadre de l’enseignement après avoir fait ses preuves
dans d’autres contextes. Ce ne sont ni l’explication du sens d’un
projet, ni les contraintes, ni même les sanctions annoncées pour
les réfractaires qui incitent la majorité des élèves à participer
activement. Par contre, si on invite les élèves à poser personnel-
lement et publiquement un geste ou à dire un mot qui exprime
un engagement, on constate une augmentation significative du
nombre d’élèves qui s’investissent. Par exemple, le simple fait
de lever la main entraîne le constat suivant : au lieu de 30 %,
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 45

sans ce geste, 60 % des élèves ont effectué une préparation à


domicile non obligatoire14 .

Un autre levier d’action est l’identification des actes à poser. Par


exemple, l’engagement de l’élève dans les activités du P.P.E.
sera possible s’il correspond à des attitudes précises et claire-
ment décrites, exprimées positivement afin d’éviter toute
confusion : prendre un contact, compléter et remettre des
documents administratifs, respecter un temps de parole,
s’exprimer sur ses démarches pour enrichir les autres, partici-
per à une séance d’information, suivre un professionnel durant
toute une journée, etc.

Un troisième levier serait de multiplier les situations où l’élève


peut s’engager : travail à remettre, recherche à mener, rencontre
avec un enseignant ou un éducateur, remédiation à convenir,
etc., pour que l’élève puisse percevoir la cohérence du projet de
l’école, y adhérer et coopérer.

Travailler sur la base de l’engagement est doublement bénéfi-


que : on peut penser qu’un nombre plus important d’élèves
participeront aux projets et qu’ils seront plus nombreux à
coopérer et répondre aux exigences ou aux propositions.

14 M. Ch. TOCZEK et D. MARTINOT, Le défi éducatif. Des situations pour réussir, Paris,
Armand Colin, 2004.
46

3. Pédagogie du projet : apprendre à avoir des initia-


tives, à gérer son temps, à être autonome

a. Le caractère dynamique du projet

On a beau proposer des visites d’entreprises, des témoignages,


des séances d’information, des liens entre les matières ensei-
gnées et les professions, etc., si l’élève n’est pas intéressé par sa
propre orientation, s’il n’est pas motivé pour faire des choix, ni
pour participer activement aux activités, les démarches
d’orientation hors des cours et dans les cours seront sans effet15.

Par les démarches pédagogiques et les attitudes qu’ils adoptent,


les professeurs ont un impact certain sur la mobilisation de
l’élève.

Comment faire en sorte que l’élève se mobilise pour lui-même ?

En observant les personnes qui ont une attitude motivée dans


leur existence, on constate qu’elles fonctionnent par projets.

Certaines conditions reprises ci-dessous sont nécessaires pour


qu’une personne conçoive et mène à terme un projet16.

15 Denis PELLETIER, L’approche orientante : la clé de la réussite scolaire et professionnelle,


Québec, Septembre éditeur, 2004.
16 Rolland VIAU, La motivation en contexte scolaire, Bruxelles, Pratiques pédagogiques,
De Boeck, 2003.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 47

Conditions liées au Conditions liées au besoin Conditions liées au besoin


pouvoir personnel de réussite de
s’inscrire dans le temps
Avoir la conviction Se donner des buts qui Penser à long terme,
qu’on peut agir sur son constituent, ne fût-ce programmer les étapes.
environnement. qu’un minimum, des
défis. Imaginer les bénéfices.
Estimer qu’on a les
capacités nécessaires Agir de manière appro- Peser les pertes poten-
pour réaliser son projet. priée pour réussir. tielles.

Aborder une tâche Faire preuve d’un


pour apprendre plutôt minimum de persévé-
que pour évaluer ses rance, en prenant
capacités. conscience de ses
craintes et de ses espoirs
pour construire des
« possibles ».

b. Des questions pour guider la mise en projet

Un projet proposé aux élèves, ou mieux, construit avec eux,


aura ainsi toutes ses chances d’être finalisé s’il répond positi-
vement aux questions reprises ci-dessous.

Le projet imaginé est-il …

ƒ formulé positivement ?
ƒ sous le contrôle du groupe ?
ƒ structuré en étapes successives programmées dans le
temps ?
ƒ imaginé en tenant compte du contexte ?
48

ƒ réalisable à partir des ressources disponibles ?


ƒ intégré dans un objectif plus large ?
ƒ en accord avec les valeurs personnelles du groupe et des
personnes ?
ƒ construit en tenant compte des bénéfices attendus et des
pertes possibles ?
ƒ évaluable au cours de sa réalisation et sur son produit
final ?
ƒ construit en tenant compte de l'impact sur soi et sur les
autres ?

Une dérive possible

Une dérive est celle de l’enseignant inquiet, qui met sur pied de
faux projets, s’il adopte une attitude très directive, imaginant les
objectifs, gérant seul et complètement la mise en œuvre, et se
sentant responsable totalement de la qualité du résultat. En
conséquence de quoi, les élèves vont endosser les rôles
d’exécutants, ne partageront ni les risques, ni les bénéfices, et
n’auront pas l’occasion de s’exercer aux comportements atten-
dus. Le projet sera réduit à son produit final sans avoir engen-
dré une action collective dynamique, source de la motivation.
Ces dérives peuvent être rencontrées si les objectifs sont mal
définis et parfois si le produit fini est mis à disposition d’un
public, car, dans ce cas, les jugements et critiques peuvent faire
pression et faire naître une inquiétude chez le professeur.
On peut par exemple imaginer de réduire ces facteurs de dis-
torsion en invitant au partage des responsabilités (entre collè-
gues et avec les élèves) et donc mener un travail réellement
collectif, en réduisant les niveaux d’exigence ou en étant cons-
cient que l’objectif peut englober tant les qualités de la produc-
tion que le bénéfice de pouvoir donner à chacun une place qui
lui convient.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 49

Chapitre – 4 – Des expériences d’apprentissage du


choix réalisées dans le cadre des cours

Nous vous proposons ici quelques réflexions sur la place d’un projet
intégrant l’orientation au sein même des cours. Nous avons pu récol-
ter des témoignages d’expériences pédagogiques auprès de quelques
enseignants qui essayent d’intégrer dans leurs pratiques des appren-
tissages de ce type : connaissance de soi, analyse du choix, prise
d’initiatives, mise en projet.
Toutes ces propositions testées en situation réelle, qui semblent à
première vue spécifiques d’une discipline, nous paraissent transposa-
bles d’un cours à l’autre. Nous vous invitons donc à consulter aussi
les séquences des cours qui ne sont pas les vôtres.

Fil rouge de ces expériences

À côté de la transmission de savoirs, le rôle du professeur n’est-


il pas aussi d’inciter les élèves à porter un regard sur leur mode
de fonctionnement, à discerner les satisfactions et les frustra-
tions qu’ils vivent, et de stimuler leur capacité à anticiper ?
Comme l’écrivain ne peut découvrir son propre style qu’en
écrivant, le sportif son endurance qu’en s’entraînant, l’élève est
appelé à découvrir sa façon d’apprendre en apprenant.
Par petites touches, l’enseignant intégrera au contenu de son
cours des informations, des références aux études et au monde
du travail. Ce sont des valeurs ajoutées…, mais qui aident les
jeunes à construire du sens dans leur travail.
Parallèlement aux multiples temps d’informations, de contacts,
de stages, de moments de réflexion personnelle et collective, le
cours est le lieu par excellence pour se connaître dans et par
l’action. L’élève pense par lui-même, il s’affirme, communique,
50

négocie, utilise les ressources du milieu, construit ses stratégies,


acquiert des compétences, il se donne ainsi du pouvoir et de
l’avenir17.
Sans modifier radicalement le déroulement de son programme,
il s’agit pour l’enseignant de changer simplement d’angle de
vue : quelques éléments seront apportés ou présentés diffé-
remment. Toute occupation pourra être une occasion offerte à
une exploration de soi et au projet de soi.

Cela peut se faire chaque fois que l’on

− précise et exprime son intention à l’élève :

ƒ Comment le professeur met-il les élèves en projet au dé-


but du cours ?
ƒ Quelle est l’intention du professeur quand il propose aux
élèves d’étudier un des thèmes du programme ?
ƒ Comment le professeur fait-il le lien entre le cours, les
contextes historique et social et l’histoire personnelle de
l’élève ?
ƒ Quelles seront les étapes que l’enseignant propose pour
que l’élève puisse progresser ?
ƒ Quels liens les élèves sont-ils invités à établir entre ce qui
a été mis en place lors des cours précédents et ce qui sui-
vra ? Comment l’enseignant permet-il à l’élève d’être
conscient de toute cette progression ?
ƒ À quel moment le professeur aborde-t-il explicitement la
question du lien entre l’option, les sujets traités au
cours et les choix de vie ou de profession ?

17 Denis PELLETIER, L’approche orientante : la clé de la réussite scolaire et professionnelle,


Québec, Septembre éditeur, 2004.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 51

− instaure pour l’élève un contexte de réflexion :

ƒ Lors d’un dialogue


™ Comment négocier des échéances avec l’(es) élève(s) ?
™ Comment inciter l’élève à s’engager pour obtenir un
certain résultat ?
ƒ Lors d’un feed-back suite à une réussite ou un échec, à la
fin d’une séquence de cours, d’un travail de groupe :
™ « Qu’est-ce que je fais pour apprendre ? »
™ « Qu’est-ce qui se passe en moi quand j’apprends ? »
™ « Qu’est-ce que je ressens quand j’apprends ? »

− propose aux élèves de faire des choix et de mener des


actions :

ƒ Comment le professeur organise-t-il le travail pour que


l’élève puisse décider… d’un thème, d’un type de produc-
tion, d’une manière de travailler, d’un nombre d’exercices
à résoudre, etc. ?
ƒ Quelle responsabilité le professeur donne-t-il à l’élève
lors de diverses activités ou projets ?
ƒ Comment le professeur invite-t-il les élèves à prendre
position, à organiser, à prendre des initiatives ?
ƒ Quelle est la part de l’élève dans le partage des connais-
sances ?
52

I. SITUATIONS DE COURS OÙ LE PROFESSEUR


DANS UN (MINI)-PROJET DÉVELOPPE UNE
ATTITUDE RÉFLEXIVE18

1. S’exercer à choisir et exprimer le critère de choix


(parfois privilégié) dans le cadre d’un cours de
sciences ou de mathématiques, lors de la résolution
d’exercices

Le cours de mathématique ou de sciences, lors de séances


d’exercices, semble être très éloigné d’une démarche
d’orientation. L’objectif poursuivi ici sera de mettre l’élève en
situation de choix. Cela paraît anodin, mais, dans son parcours
scolaire, l’élève apprend souvent à obtempérer et plus rarement
à poser des actes personnels. Il perçoit l’école comme un lieu
d’obligations et il a tendance, parfois par confort, à adopter
(voire à souhaiter) une attitude de soumission et de passivité.
En lui offrant une occasion de choisir et de justifier son choix, le
professeur met en place un processus de connaissance de soi et
d’appropriation de l’apprentissage. Un outil précieux pour
aborder le supérieur.

18 Merci aux enseignants qui ont partagé ainsi leurs expériences pédagogiques. Si
vous désirez entrer en contact avec l’un d’eux, vous pouvez vous adresser à
l’équipe d’Interfaces, qui vous communiquera ses coordonnées.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 53

a. Mise en œuvre

Dans le cadre d’une séquence de cours, il arrive fréquemment


que les professeurs demandent à leurs élèves de résoudre une
série d’exercices (travail en classe ou à domicile).
La modalité particulière proposée ici pour ce type de travail
scolaire est la suivante : l’enseignant demandera à chaque élève
de résoudre un nombre limité d’exercices de la liste distribuée :
il s’agira pour l’élève d’en choisir certains et de résoudre uni-
quement ceux-là (1)19. Pour exercer la prise de conscience pro-
pre au P.P.E, on exigera (2) des élèves qu’ils justifient leur choix
(3). Pour que les élèves soient capables de poser un choix, il faut
qu’au préalable l’enseignant présente rapidement les exercices,
en mettant en évidence leur intérêt respectif.

Lors d’une séance ultérieure (4), on leur demandera, avant


qu’ils entament les résolutions de nouveaux exercices, de dis-
cerner et d’exprimer (5) leurs difficultés ; puis on les invitera à
choisir l’(es) exercice(s) et à justifier leur choix.

Lors de travaux ultérieurs et selon les nécessités, on pourra


élargir les possibilités (6) en présentant d’autres critères de
choix, en laissant la liberté du nombre d’exercices, en variant les
thématiques, en accentuant la multiplicité des types de produc-
tion, etc.
Les variantes sont multiples (6) et seront adaptées aux caracté-
ristiques du groupe-classe et aux objectifs que l’on s’est fixés.
Les choix et leurs justifications peuvent s’appliquer à d’autres
situations d’apprentissages (lecture, exposé, débat, etc.), voire à
l’évaluation.
L’intérêt réside dans la progression que l’on va induire.

19 Les chiffres (x) renvoient aux éléments d’organisation auxquels il faut être attentif.
Voir le point b.
54

b. Quels sont les éléments d’organisation auxquels être at-


tentif ?

La présentation préalable est essentielle. Cela permet au profes-


seur de donner des pistes concernant les critères de choix, de
mettre en évidence les différences entre les exercices, le sens
qu’on peut leur trouver. Les élèves ont besoin de ces modèles
pour ensuite donner du sens à leur travail.

(1) Dans un premier temps, il est plus facile d’imposer le


nombre d’exercices à résoudre. Quand le système est mieux
« rodé », on peut laisser l’élève décider du nombre
d’exercices à travailler ce qui l’incitera à s’engager. Selon
ses besoins, il jugera du temps et de l’énergie à investir
dans ce type de travail.
(2) Il est essentiel, lors des premières expériences, d’insister sur
la justification, car les élèves minimisent l’importance de
cette exigence ; ils auront tendance à mettre leur énergie
dans la résolution et s’y cantonneront. La justification doit
être verbalisée pour que la demande soit concrètement ré-
alisée et vérifiable.
(3) Les élèves sont souvent déstabilisés face à la liberté qu’on
leur accorde et, par habitude, ils recherchent
l’acquiescement de l’adulte. Certains peuvent être inquiets
face à l’exigence de se justifier : ils n’imaginent pas quels
arguments personnels ils pourraient fournir. Donner des
exemples pour enrichir leurs représentations est tout à fait
indiqué : facilité de résolution, défi, lacunes à retravailler, théma-
tiques attrayantes, type de production, temps que l’on veut y
consacrer, plaisir que l’on pressent, similitude avec les exercices
traités précédemment, besoin de faire comme les autres ou de se
démarquer, etc.
(4) Il est important de répéter toutes ces opérations, d’induire
une habitude réflexive, même et surtout si les premières
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 55

expériences n’ont pas été bien menées par les élèves. Il faut
laisser du temps aux essais et aux échecs (pédagogiques)
avant d’en percevoir les bénéfices.
(5) Choisir, c’est se demander ce que l’on aime, souhaite,
déteste, ce qui est utile, important, indispensable pour soi.
Au cours de l’apprentissage, repérer ses besoins, c’est dis-
tinguer ce que l’on maîtrise et ce qui est encore à assimiler.
Cette phase d’autoévaluation est primordiale. Il est impor-
tant que l’élève fixe ses propres critères pour faire son
choix. Cette réflexion préalable permet à l’élève de progres-
ser dans une direction qu’il s’autorise. C’est là qu’il ap-
prend.
(6) Ajouter des éléments à chaque étape permet d’accumuler
des réflexes, d’élargir le panel de choix. Les élèves vont ac-
quérir un certain automatisme, de plus en plus complexe,
qui leur sera profitable lors de la préparation de contrôles,
de bilans ou lors de décisions à prendre dans un autre
contexte.
Que vais-je étudier, ce que je ne connais pas ou ce que je maî-
trise correctement ?
Vais-je y passer beaucoup de temps ? Oui, car j’aime cette par-
tie de matière.
Je ne désire pas y passer du temps, car je n’apprécie pas cette
matière, ce cours, cet enseignant, mais, puisque j’ai besoin de
réussir, je vais cibler la partie que je ne maîtrise pas.
J’ai constaté que, si je connais mieux les notions, j’ai du plaisir
dans un cours qui me semblait rébarbatif.
Ne faudrait-il pas que je consacre plus de temps à une autre
discipline pour laquelle j’ai des difficultés plus profondes ?

Toutes ces réflexions mettent l’élève en projet d’apprendre et


non en situation de simple exécution.
56

c. Quels sont les éléments à communiquer à l’élève ?

- La présentation de la démarche et sa justification sont


importantes. Les élèves ont intérêt à comprendre le sens de
ce mini-projet : apprendre à discerner ses atouts, ses diffi-
cultés, ses intérêts pour pouvoir s’appuyer dessus ou y re-
médier, faire des choix satisfaisants pour soi ou pour les au-
tres, être efficace, ne pas perdre de temps, faire ce que l’on
aime, etc.

- Le feed-back, au moment où l’on remet les copies aux


élèves, permet de « faire redire » l’intérêt de la démarche. Ce
sera l’occasion de préciser à nouveau que tous les choix
sont intéressants, mais que certains seront plus adaptés
que d’autres, dans la mesure où ils répondent à un besoin
personnel, besoin qui s’inscrit dans le « projet
d’apprendre » ou qui correspond à l’objectif que le groupe
s’est donné. Aucun jugement ne sera porté.

Si j’ai besoin d’être rassuré, je choisis un exercice facile. Si j’ai


besoin de tester mes acquis, je choisis un exercice difficile. Si le
groupe a besoin de nouvelles méthodes de résolution, je choisis
des exercices qui s’y rapportent.

- L’évaluation de ce type de travail ne peut exercer une


pression sur le choix de l’élève. En d’autres termes, il serait
contradictoire de pénaliser un élève qui n’aurait choisi que
des exercices faciles ou en nombre réduit (si le nombre n’est
pas imposé).
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 57

d. Quels sont les bénéfices secondaires de ce type de dé-


marche ?

- En classe, la mise en place de la démarche, sa justification et


les commentaires supplémentaires prennent quelques mi-
nutes la première fois. On constate ensuite avec étonnement
que ces consignes supplémentaires deviennent très rapide-
ment des réflexes, au point que les élèves les rappellent
quand le professeur oublie de les formuler à nouveau.

- L’énergie que le professeur met à corriger les copies diffère


peu de celle que demande une méthode habituelle et est
même parfois moindre. Les élèves auront ciblé leur travail,
l’ensemble à corriger sera varié : le travail sera moins répé-
titif et, comme tous les élèves ne feront qu’une partie des
exercices, le total des exercices à corriger sera moins impor-
tant.

- L’enseignant aura des informations sur les difficultés des


élèves, indications qu’ils auront eux-mêmes exprimées ou
révélées par le biais de leur choix, donc des regards croisés
sur leur situation. Une aide précieuse pour mieux analyser
leur situation et par la suite mieux cibler le travail. Il s’agit
donc de faire moins et mieux.

- Les élèves se sentent respectés. Ils seront facilement parte-


naires pour s’engager à faire un travail choisi qui leur paraît
moins ample et plus ciblé que celui qui aurait pu être impo-
sé.

- Les copies à corriger qui sont des « recopiages d’un travail


d’un seul élève », cela n’existe plus : chacun s’engage per-
sonnellement et s’implique par ses justifications. La copie
non personnelle est vite repérée (voire annulée).
58

e. Quelles sont les réticences et les dérives possibles ?

Le professeur peut être inquiet face à certains élèves qui sem-


bleraient ne pas se prendre en charge. Quelques élèves négli-
gent parfois le travail quand celui-ci montre un caractère peu
contraignant. La situation peut dériver jusqu’à l’échec : en
dernier recours, il faudra imposer l’ensemble des exercices, c’est
une solution agressive (à éviter autant que possible), mais qui
sera vite comprise : l’élève gagne à choisir et à sélectionner, en
lieu et place de se voir contraint à un travail beaucoup plus
long, fastidieux et peu ciblé.

2. Apprendre à collaborer, à s’exprimer sans engen-


drer des conflits, à coévaluer dans le cadre d’un
cours d’éducation physique

Le cours d’éducation physique répond à des objectifs très


spécifiques. Contrairement à ce qui se fait « en classe », ce n’est
pas par la parole que l’élève s’exprimera, mais par son corps et
par sa gestuelle. Ce type d’expression permet d’être valorisé
autrement, et de réparer parfois une image négative (qui est de
l’ordre des croyances) engendrée par des échecs scolaires.
L’enseignant en éducation physique poursuit trois objectifs
principaux qui sont tous les trois en lien direct avec
l’accompagnement du jeune vers son parcours futur.
Il s’agit de
ƒ renforcer la confiance en soi à partir de l’aisance corpo-
relle,
ƒ percevoir que le potentiel « santé » est sous son propre
contrôle,
ƒ collaborer et apprécier l’efficacité de la collaboration.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 59

a. La mise en œuvre

Dans le cadre d’une création chorégraphique, l’enseignant


demande aux élèves de produire un enchaînement complexe à
partir de modules simples. Les exigences peuvent porter sur le
rythme, la durée, les rapports aux autres, l’occupation de
l’espace, critères et gestuelles qui ont fait l’objet d’un apprentis-
sage partiel ou complet à l’occasion d’une séquence précédente.
Les consignes sont strictes et précises. La créativité est balisée et
s’exerce donc dans un cadre de contraintes indispensables : on
ne fait pas n’importe quoi. L’exercice peut se construire pro-
gressivement en plusieurs phases : variation sur le pas, ajout de
trois temps, répétition d’une même séquence avec variation, etc.
On simplifie la tâche, on la découpe et on progresse ensemble,
puis on la complexifie. Le travail est collectif et doit permettre à
chacun(e) d’avoir la place qui lui convient.

La présentation des consignes est montrée lors d’un essai collec-


tif produit « sur le tas » avec quelques élèves qui ont des facili-
tés de coordination (ce qui permet la mise en évidence de leur
compétence) ; c’est une occasion privilégiée de montrer que la
collaboration est plus intéressante qu’une production en solo,
que les élèves sont, au même titre que l’enseignant, des modèles
à suivre et que chacun possède des ressources qui peuvent être
partagées.

Les critères d’évaluation, en nombre limité (cinq par exemple),


sont énoncés par l’enseignant, ou, mieux, construits avec le
groupe.
On pourra retenir :

un critère principal : la coordination de l’ensemble :


ƒ les élèves doivent commencer en même temps et termi-
ner en même temps
60

ƒ chacun a une place dans l’ensemble


ƒ chacun est actif
des critères secondaires
ƒ les consignes doivent être respectées (nombre de pas et
de flexions, direction, rythme, durée, occupation de
l’espace, synchronisation).

b. L’évaluation

Pour réduire le stress lié à un échec éventuel, on postule, dès le


départ, que chacun(e) réussira. Ce postulat est clairement
annoncé avant l’évaluation des prestations.
Cette activité de création et d’évaluation collectives vise à
mettre en évidence l’importance de la collaboration (et donc des
initiatives que l’on peut prendre pour faire appel à la collabora-
tion).

Tous les élèves évaluent chaque prestation, ils sont invités à se


prononcer sur

ƒ un aspect excellent
ƒ un conseil pour s’améliorer

Tous les axes seront justifiés ; il s’agit d’apprendre à

ƒ s’exprimer avec respect


ƒ relever les faits sans apporter de jugement
ƒ conseiller judicieusement
ƒ identifier ce qui convient et ne convient pas en se basant sur
les critères annoncés
ƒ être le plus objectif possible en prenant du recul par rapport
aux liens affectifs
ƒ éviter de juger les personnes en lieu et place de la presta-
tion.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 61

Le rôle de l’enseignant lors de l’évaluation est de

ƒ mettre un contexte de respect, voire de recadrer une ex-


pression
ƒ entendre et reconnaître les émotions
ƒ reformuler les expressions
ƒ approfondir l’analyse et les conseils.

c. Quels sont les bénéfices secondaires de ce type de dé-


marche ?

ƒ Prendre conscience de ses points forts et de ses points


faibles pour accepter son corps sans jugement.
ƒ Améliorer la gestion de son stress en étant attentif à ses
sensations corporelles et à ses réactions physiques.
ƒ Identifier ses émotions (par exemple la peur) et leur expres-
sion (« je n’aime pas travailler sur les engins » à différencier de
« j’en ai peur »).
ƒ S’exercer à agir et non à subir.
ƒ Identifier ses limites et celles des autres, respecter ses
capacités.
ƒ Oser se sentir différent, ou accepter que les autres soient
différents sans subir ou exercer un jugement.
ƒ Prendre conscience des capacités des autres et de la
confiance que l’on peut leur accorder.
ƒ Être conscient que l’on peut progresser.
ƒ Découvrir la nécessité, l’intérêt et le plaisir de faire appel
aux autres, la capacité de chercher à exprimer des deman-
des, de se faire aider, de reconnaître que l’autre est peut-
être une personne-ressource.
ƒ Gérer un travail collectif : répartir les actions, se coordon-
ner, prendre des initiatives, etc.
62

Toutes ces compétences transposées à d’autres domaines vont


permettre aux jeunes d’aborder plus sereinement des diffi-
cultés, de mobiliser leurs ressources, de faire des démarches
pour trouver de l’aide ou des collaborations, de trouver une
solution en cas de problème.
Toutes ces attitudes leur serviront dans la vie et leur permet-
tront de repérer dans quels contextes et conditions ils se sentent
bien. Nous sommes bien en présence d’outils pour une bonne
orientation.

3. Prendre des initiatives, organiser son travail et


son temps, participer à un projet collectif dans le ca-
dre d’un cours de français, en 5e année d’humanités

Dans le cadre du cours de français, le programme de 5e année


du secondaire intègre l’étude de l’institution littéraire. Dans le
collège en question, presque tous les enseignants de 5e se sont
mis d’accord pour travailler ce thème de manière similaire, tout
en laissant à chacun beaucoup de liberté pédagogique.
Au départ, la démarche avait été déjà construite et testée au
sein d’une seule classe. Le projet avait mûri au fil des années et
il s’est encore précisé lors du travail de coordination.
Le caractère collectif d’un travail au sein d’une équipe professo-
rale se répercute dans la classe : chacun a une place et un rôle
précis et différent des autres, les compétences et les productions
sont complémentaires. Pour ce projet, chaque élève, membre
d’un petit groupe traitant d’un aspect de l’institution littéraire,
rédige une partie du travail, et assure ainsi une production
personnelle et originale. Ces productions sont rassemblées pour
balayer chacun des huit sujets qui couvrent une large thémati-
que résumée par la question suivante :
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 63

« Écrire au XXIe siècle… ou comment fonctionne l’institution


littéraire aujourd’hui ? »

a. Mise en œuvre

L’objectif du travail, les consignes, l’échéancier, les critères


d’évaluation, le mode d’organisation, le type de production,
etc., sont présentés au début de l’année. La dernière
échéance est annoncée : la remise des documents écrits et les
présentations orales se situeront en janvier.

Le projet se déroule en deux étapes.

Dans un premier temps, pour élargir son spectre d’intérêts,


chaque élève devra confectionner un dossier de presse et analy-
ser les articles.

ƒ Les articles seront issus des revues spécialisées en littéra-


ture ou recherchés dans les pages littéraires des quotidiens.
D’autres sources papiers sont aussi acceptées, à la condition
qu’elles soient clairement identifiées.
ƒ Internet ne peut pas être l’unique source de récolte.
ƒ Un nombre minimum d’articles est imposé.
ƒ La forme du dossier doit être créative, originale.
ƒ L’analyse des articles devra être rédigée selon des consi-
gnes précises.

Dans un deuxième temps, les huit sujets seront répartis (l’objet-


livre, la librairie, les prix littéraires, l’édition, la critique,
l’écrivain, la littérature et la publicité, la littérature et les mé-
dias). Choix personnel de l’élève, répartition en groupe
d’intérêts ou d’affinités, toutes les modalités d’organisation sont
possibles.
64

Les élèves vont adopter les mêmes démarches, quel que soit le
sujet qu’ils devront traiter.
À la base du travail, il s’agira pour chacun de mener une en-
quête auprès de l’un ou l’autre métier de la littérature ayant
rapport avec le sujet choisi par le groupe.
L’élève prend des contacts, rencontre et interviewe un écrivain,
un éditeur, un acteur de la promotion du livre, un responsable
de la diffusion médiatisée, un libraire, un juré de prix littéraire,
un journaliste.
Les questions posées, les réponses, la preuve du contact seront
reprises dans le document écrit.
Durant les cours, l’enseignant prévoit des moments, à sa
convenance, pour outiller les élèves : leur permettre de recher-
cher, classer, rassembler, choisir, interviewer, se présenter,
analyser, argumenter, rédiger, établir une bibliographie,
s’exprimer oralement, s’organiser.
De plus, le professeur aiguille les élèves vers des lieux ou des
sources d’information, répond aux demandes de renseigne-
ments et aux difficultés que les élèves expriment. Il adapte son
cours pour aider les élèves à agir. Il est un facilitateur et un
organisateur.
Certaines heures de cours peuvent être consacrées à la mise en
partage entre élèves de l’état d’avancement de leur recherche.

La production finale est collective et sera guidée par les items20


qui se rapportent à chaque thème. Une présentation orale, par
sujet, se fera devant toute la classe, pour que chaque élève
s’exerce à une expression orale de qualité, et communique ainsi
à l’ensemble du groupe le contenu de ses recherches.

L’évaluation portera sur tous les types de production (dont le


dossier constitué, le classement des articles et leur analyse),

20 Voir le point d.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 65

avec une importance plus marquée accordée à la présentation


orale. Un contrôle général sur l’ensemble du projet clôture la
démarche.

b. Quelles sont les réticences et les dérives possibles ?

Comment éviter les « copier-coller », documents issus


d’Internet et qui n’ont pas fait l’objet d’un travail de la part de
l’élève, tout en fournissant au professeur un travail supplémen-
taire et inutile ? En exigeant que le point de départ du travail
soit une interview, on obtient un travail original, impossible,
ou, en tout cas, très difficile à dénicher sur le web ; en augmen-
tant la part de l’oral dans l’évaluation, on invite au moins
l’élève à maîtriser sa production.

La qualité des travaux fournis est parfois très décevante, écri-


ture non remaniée, de premier jet, sans réflexion approfondie ni
expression travaillée. Renvoyer à l’élève des remarques justi-
fiées, voire une évaluation sanctionnée, permet qu’il se situe
face à sa production et à son investissement.

c. Quels sont les bénéfices (secondaires) de ce type de


démarche ?

Outre les compétences propres au cours de français (lire, écrire,


parler, écouter, participer à la vie culturelle), la tâche permet
d’acquérir des compétences liées au P.P.E., dans la mesure où
l’élève va recueillir des informations sur les métiers de la littéra-
ture et les formations pour y parvenir et va s’exercer à des
comportements qui sont identifiés comme essentiels pour se
« débrouiller dans la vie ».
66

d. Sujets qui permettent de parcourir l’institution litté-


raire

Sujet 1 : l’objet livre Sujet 2 : la librairie


ƒ Description du livre (couverture, ƒ Une librairie
titre, auteur, …) ƒ Localisation, type de livres vendus,
ƒ Différents types de livre public cible
ƒ Collections … ƒ Historique de la librairie
ƒ Livre, bien symbolique, bien ƒ Métier de libraire
commercial ƒ Devenir libraire
ƒ Coût du livre ƒ Comment devient-on libraire ?
ƒ Historique du manuscrit au livre ƒ Quelle est la formation d’un li-
électronique braire ?
ƒ Qui fabrique le livre ?
ƒ Quels sont les métiers concernés ?
Sujet 3 : les grands prix littéraires Sujet 4 : l’édition
ƒ Grands prix en France et en Belgi- ƒ Les grands éditeurs
que ƒ Devenir éditeur ?
ƒ Le jury ƒ Quelle est la formation d’un édi-
ƒ Nomination des membres teur ?
ƒ Rémunération des membres ƒ Parcours du manuscrit au livre ?
ƒ Genre littéraire récompensé ƒ Sélection.
ƒ Influence du prix sur la vente ƒ Comité de lecture.
ƒ Statut de l’auteur ƒ Critères de sélection.
ƒ Reproches et critiques à l’encontre ƒ Manuscrits refusés, quel devenir ?
des prix qui les formule, quels sont ƒ Métiers de l’imprimerie
leurs fondements ? ƒ Commercialisation
ƒ Arguments en faveur des prix ƒ Calcul du prix
littéraires
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 67

Sujet 5 : la critique Sujet 6 : l’écrivain


ƒ Itinéraire d’un critique littéraire ƒ Devenir écrivain
ƒ Comparaison de critiques d’un ƒ Quelle est la formation d’un
même ouvrage écrivain ?
ƒ Recherche de critiques : sur quoi ƒ Métier d’écrivain
porte la critique (écriture, sujet, historique,
structure, auteur, etc.) ? statut : reconnaissance juridique et
ƒ Impact de la critique sur l’auteur, sociale
sur son œuvre rémunération, droits d’auteurs, aides,
ƒ Portraits de grands critiques peut-on vivre de sa plume ?
littéraires Pourquoi écrire ?
Portrait-robot d’un écrivain
d’aujourd’hui.
Sujet 7 : littérature et publicité Sujet 8 : littérature et médias
ƒ Lancement d’un livre ƒ Fonctionnement des émissions de
Annonces radio
dans les librairies, dans les journaux, à rôle du présentateur
la radio, à la TV mise en scène
affiches type d’écrivains invités
séances de dédicaces, etc. Impacts des émissions
Quelle publicité pour quels auteurs ? Image de l’écrivain dans la presse
Public cible Portraits d’écrivains dans la presse,
Promotion : qui décide, qui organise ? analyse :
ƒ Portrait d’un attaché de presse. Ce qu’on en dit, comment on en parle,
Quelle est la formation d’un attaché de etc.
presse ? ƒ Rôle des revues littéraires.
Comment devient-on journaliste
littéraire ?
68

4. Mobiliser les élèves, les rendre responsables


dans le cadre d’un cours d’histoire en 4e, 5e et 6e
année, 2H ou/et 4H

Comme examen d’histoire de fin d’année, en 4e, 5e et 6e année,


l’élève devra mener une visite guidée21. Il prendra en charge un
groupe de « touristes » : des élèves (du primaire ou du se-
condaire), des professeurs de l’école ou d’autres écoles, des
étudiants en tourisme et des spécialistes des questions histori-
ques. Les lieux ciblés sont soit une œuvre picturale de
l’exposition installée dans toute l’école, un musée ou un aspect
d’un circuit touristique en ville.

Le thème choisi est en accord avec le programme du cours


d’histoire :
ƒ en 4e : le Moyen-Âge et la Renaissance
ƒ en 5e : le XIXe siècle et l’industrialisation
ƒ en 6e : le XXe siècle

D’une année à l’autre, l’enseignant modifie et fait évoluer les


thèmes ou l’organisation. Par exemple, des élèves peuvent se
regrouper en équipes et se répartir les sujets liés à
l’industrialisation : la cité lainière, les écoles au XIXe, les trans-
ports, les machines à vapeur, etc. Sujets qui mis côte à côte
balayeront l’ensemble de la problématique. Le projet est un
travail d’équipe, où chaque élève a une place et un rôle diffé-
rents. Autre modalité possible : selon les opportunités, quand le
thème retenu pour une classe est hors programme, la direction

21 Le professeur d’histoire, promoteur du projet, en plus d’être enseignant du


secondaire, professe dans une école normale (formation des jeunes instituteurs) et
est guide touristique et formateur de guides, il utilise donc ses compétences et ses
contacts pour mener à bien ce projet.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 69

soutient le projet et couvre les risques éventuels face à une


inspection, car les compétences en histoire sont reprises parfai-
tement dans la démarche.

a. Mise en œuvre, identique quelles que soient l’année, la


classe, l’option

Dès le début de l’année, une visite sur le thème de l’année est


organisée pour les élèves, elle sert de modèle. Cette visite est
guidée par un ou plusieurs experts (participation de guide
professionnel, de l’ancien directeur historien, etc.). L’écoute et
l’analyse portent sur la communication spécifique à adopter
avec un groupe de touristes : il s’agit donc d’outiller les élèves.
Les items développés sont aussi répertoriés à cette occasion.

Exemples de visite proposée

ƒ Muséobus22 pour les élèves de 4e année.


ƒ Circuit touristique dans Verviers pour les élèves de 5e
année, ville par excellence témoin de l’industrialisation
(cité lainière et sidérurgique) ou autre musée comme ce-
lui du coticule de Vielsam.
ƒ Présentation et analyse détaillée d’une ou l’autre repro-
duction de peinture du 20e siècle de la collection installée
dans l’école23.
ƒ Etc.

22 La visite, malgré qu’elle soit adressée aux élèves de 4e, sera celle qui habituellement
est donnée aux élèves de primaire pour que la forme soit en rapport avec leur
production de fin d’année et le public auquel les élèves seront confrontés.
23 Cette exposition permanente dans l’école est aussi le résultat d’un projet antérieur

du cours d’histoire.
70

La constitution des groupes et la répartition des sujets24 se font


en octobre, basées sur les choix préférentiels des élèves ou sur
la décision du professeur selon les caractéristiques de la classe.
Dans tous les cas, des groupes de niveaux sont préférés à tout
autre regroupement, afin éviter qu’un seul élève ne soit celui
qui produit pour les autres.
Les recherches et la rédaction d’un dossier personnel sont
structurées à partir des compétences du programme.
Une présentation orale devant la classe est prévue deux semai-
nes avant la visite guidée publique, de manière à permettre une
dernière amélioration.
L’examen est la visite guidée en live au mois de mai. Le jour J,
tous les élèves sont sur leur site au même moment, avec leur
public.
Suite à toutes ses épreuves et aux feed-backs donnés par les
condisciples et par son public, l’élève pourra encore peaufiner
son dossier pour que l’écrit soit parfait. Il sera remis au promo-
teur avant la session de juin.

b. La démarche correspond parfaitement aux compétences


du programme d’histoire :

Se poser des questions : au départ du sujet choisi ou imposé, et


avant toute autre recherche, il est demandé à l’élève de rédiger
cent questions et sous-questions.

Analyser et critiquer : sur base des questions, chaque élève


élabore une ébauche de table des matières. Pour cela on lui
apprend à trier, faire des liens, mettre en attente, hiérarchi-
ser ses questions, à les confronter à ses lectures, à les reformu-

24 Le thème général du circuit a été traité avec vingt-quatre élèves, et découpé en six
sujets. Chaque sujet a été attribué à un petit groupe de quatre élèves. Par la suite
on a placé un élève de chaque groupe dans une nouvelle équipe (de six élèves) qui
aura comme objectif de couvrir tout le circuit.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 71

ler. Puis la phase de recherche peut commencer : chercher des


documents pour répondre aux questions posées, ce qui engen-
dre de nouvelles questions, de nouvelles lectures, des réponses
plus appropriées, etc.

Synthétiser : la rédaction du dossier ne débute qu’à ce stade,


quand les idées sont clarifiées ; il s’agit de rédiger une synthèse
qui fera le corps du travail.

Communiquer : lors de la visite guidée proprement dite et


précédée de l’exercice oral devant la classe.

c. Quelles sont les aides apportées par l’enseignant ?

L’enseignant, de par sa qualité de guide touristique, éveille les


élèves à tous les aspects d’une communication verbale et ges-
tuelle nécessaire pour s’adapter à un public précis. Des séquen-
ces de cours sont prévues pour s’exercer à ce type de prestation.

ƒ Les élèves de 4e et 5e année auront dans leur public des


élèves de l’école primaire (5e et 6e), il est donc question
pour eux de reformuler simplement les idées à transmet-
tre.
ƒ Les élèves de 6e secondaire auront dans leur public des
élèves de l’école secondaire (4e, 5e et 6e année) ; le niveau
d’approfondissement est accru.

Au fil de l’année, les cours apportent les connaissances sur la


thématique traitée, éléments qui devront être intégrés dans le
dossier, dans l’exposé oral et donc repris lors du guidage.

Une partie de la recherche se fait durant les cours dans le centre


de documentation de l’école où l’analyse critique des docu-
72

ments a une place importante : cinq sources papiers et cinq


sources multimédia sont le minimum imposé pour que l’élève
puisse apprendre à valider les informations. Le suivi du travail
de chacun y est très strict.

Les élèves en difficulté sont particulièrement suivis par


l’enseignant afin d’éviter qu’ils ne soient dépassés par
l’ampleur du travail ou se satisfassent d’une production bâclée.

Des temps de concertation sont également organisés pour que


chaque élève d’un groupe de guides puisse prendre connais-
sance des apports de ses coéquipiers : la négociation est essen-
tielle pour couvrir sans redondance la thématique.

Le projet se base sur le partenariat entre étudiants : ils sont


amenés à évaluer les travaux de leurs coéquipiers et ce fait
permet à chacun de perfectionner son travail. Par exemple, lors
des exposés en classe, des grilles d’observation différentes (des
rôles différents leur sont attribués) leur sont fournies ; cette
coévaluation leur permet de mieux identifier ce qui est exigé.

d. Quelles sont les difficultés auxquelles on peut


s’attendre, et comment les résoudre ?

Comme l’évaluation de la prestation publique est réalisée au


même moment par des personnes différentes, une grille com-
mune d’évaluation est fournie. On constate que l’évaluation
externe est moins stricte que celle faite par le professeur titu-
laire de la branche, car le facteur émotionnel de l’événement est
important.

Il peut y avoir une grande disparité entre la prestation orale


(prestance des élèves) et la production écrite (approfondisse-
ment), ce qui peut déstabiliser l’enseignant qui globalise des
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 73

évaluations qu’il n’a pas menées. Suivre les productions succes-


sives et les évaluer sont des moyens d’éviter ces discordances.

Dans les deux cas précédents, si pour certains élèves des risques
sont pressentis, le professeur parcourt les lieux de visite pour se
faire une idée de leur performance orale et les confronte avec
l’évaluation des écrits.

Le dossier écrit ne peut être un plagiat, même si certains élèves


d’une même classe prennent en charge un même sujet.
L’adaptation nécessaire pour insérer leur travail dans celui des
élèves-guides de l’équipe les force à personnaliser leur travail.
Tout plagiat est sanctionné et l’évaluation de l’écrit est alors
annulée. Les redites d’un guide à l’autre au cours d’un même
circuit sont aussi un facteur qui peut réduire fortement la
valeur du travail. La concertation est indispensable.

Dans certains groupes ou selon les conditions de cours (fin de


journée, suite à des moments d’évaluation dans d’autres disci-
plines, etc.), la motivation n’y est pas. Un suivi très régulier de
ces élèves et de leurs productions est alors indispensable, la
charge peut être épuisante et source de découragement chez
l’enseignant.

e. Quelles sont les observations possibles ?

Certains élèves, au départ du projet, sont peu motivés, mais le


fait que la présentation soit publique et adressée à de plus
jeunes induit chez ces élèves une stimulation très forte pour ne
pas passer pour un incapable. La reconnaissance qui découle d’une
bonne prestation attendue est un moteur d’action : certains
élèves, qui d’ordinaire dorment littéralement en classe, se
74

révèlent des guides diserts que l’on pourrait écouter pendant


des heures.
Des constats étonnants surgissent : des élèves, très scolaires et
obtenant d’ordinaire des résultats brillants, éprouvent
d’énormes difficultés à gérer un groupe et à s’exprimer de façon
attrayante.

Mettre les élèves à la place de l’évaluateur est très bénéfique


pour eux : cela leur permet de relativiser l’importance d’une
cote, de se rendre compte qu’une part de subjectivité est inévi-
table et donc cela les amène à interpréter leurs résultats comme
des indications plutôt que des stigmatisations définitives.

f. Quels sont les liens avec le P.P.E. ?

Mettre les élèves en situation réelle, les pousser à s’engager, à


persévérer pour produire un travail de qualité sont des facteurs
puissants de mobilisation. Le projet motive assurément et
éduque à la collaboration : des attitudes relevées par les acteurs
pédagogiques des études supérieures comme étant un plus pour
s’engager dans des études supérieures et espérer s’y tenir. Des
idées à transposer d’un cours à l’autre, d’une discipline à
l’autre.

5. Inviter les élèves à analyser et à partager leurs


expériences du monde professionnel dans le cadre
du cours de langues modernes, en 5e

Le cours de langue moderne est tout indiqué pour aborder des


thématiques multiples en accord avec les préoccupations des
élèves. Ici, en mars, le professeur propose une activité en 5e qui
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 75

explicitement projette l’élève dans un vécu professionnel. À ce


moment de leur cursus scolaire, les jeunes ont dépassé l’âge
légal de seize ans et peuvent donc (espérer) décrocher un tra-
vail rémunéré ; ils sont d’ailleurs très intéressés par toute dé-
marche pour augmenter leurs « rentrées financières ».
La séquence de cours proposée s’étale sur deux heures de cours
(selon le nombre d’élèves25 et la manière dont le débat est mené)
et est proposée dans un cours de 1e langue à raison de 4 heures
par semaine.

a. Mise en œuvre

Les consignes sont simples. Chaque élève prépare en classe un


bref exposé sur un de ses « jobs d’étudiant ». On laisse quinze
minutes pour cette préparation. Le professeur assiste les uns et
les autres dans la recherche du vocabulaire spécifique... et, plus
fréquemment, les aide à déterminer le cas qu’ils vont présenter.
Les élèves peuvent s’aider l’un l’autre, mais il est préférable
qu’un temps personnel d’introspection soit instauré.
Cette séquence d’expression orale peut être annoncée par un
travail préalable : recherche d’annonces dans des quotidiens, ou
lecture de textes issus de revues spécialisées26. On y retrouve
souvent des témoignages de jeunes sur leur job de vacances.
À défaut d’une séquence préparatoire, les présentations peu-
vent être complétées soit par la rédaction d’un curriculum vitae
de jobiste en prévision des vacances prochaines, soit par une
expression écrite assortie d’un texte de référence ou spontanée.
La règle concernant la durée du projet reste malgré tout la
modération : quelques cours suffisent pour « épuiser le sujet ».

25 La séquence a été testée avec vingt-six élèves.


26 Revue fournie par l’école : Blikopener. Uitgeverijaverbode, Februari, 2008.
76

L’exposé de quelques minutes devra contenir les réponses aux


questions suivantes :

ƒ Comment l’élève a-t-il « déniché son job » (démarches


précises) ?
ƒ Quel est le cadre, le contexte (lieu, horaire, durée,
contrat...) ?
ƒ Qu’est-ce que l’élève a fait exactement ?
ƒ Qu’est-ce que l’élève en a retiré ?
ƒ Quels sont écueils à éviter ?
ƒ Comment l’élève a-t-il vécu cette expérience en milieu
professionnel ?

La séquence de cours ayant comme objectif d’exercer la compé-


tence d’« expression orale », le travail écrit ne sera pas deman-
dé, mais gardé par l’élève pour une étude ultérieure éventuelle.

Excepté par des questions portant sur le contenu, l’expression


orale de chaque élève ne sera pas interrompue. À la suite de
chaque intervention orale, l’enseignant renvoie un feed-back
rapide sur les améliorations possibles de la structuration de la
phrase : inversion, rejet, etc. Aucune précision ou correction de
vocabulaire ne sera faite, car on a pris soin d’être de bon conseil
durant la phase de préparation en classe.

b. Quelles sont les difficultés à éviter ?

Quelques élèves sont démunis face à la thématique et aux


consignes. Certains argumentent qu’ils n’ont jamais « travail-
lé », car ils ont l’image qu’un travail d’étudiant est de longue
durée et effectué dans un contexte de productivité. Il faut dans
ce cas ouvrir à d’autres regards l’ensemble de la classe. On peut
citer l’animation de plaines de vacances, le lavage de voiture
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 77

pour une association ou un projet collectif, le baby-sitting en


soirée, le nettoyage du grenier des voisins, la tonte des pelou-
ses, etc. À partir de ces exemples, tous les élèves arrivent à
repérer une expérience à partager.
Il est aussi intéressant d’associer à quelques situations fictives
des ébauches de réponses aux questions posées, afin de montrer
quels types d’apports mettre en partage.

Durant les exposés, le professeur joue un rôle de modérateur et


juge de l’intérêt de poursuivre le débat ou de le réorienter. Il
aiguille aussi l’élève vers les questions qui n’auraient pas été
rencontrées. Le fait d’avoir une expérience d’animation du
P.P.E. aide le professeur dans la gestion du groupe et de
l’animation qui s’installe.

Les commentaires du public ou du professeur permettent de


faire les liens entre le « job d’étudiant » et le monde profession-
nel futur. Les questions du choix, des valeurs, mais aussi des
codes de conduite sont souvent discutées. Les parallèles avec
les projets professionnels sont aussi abordés quand l’élève
justifie ses recherches.

Le feed-back donné à chaque élève doit être bref et porté sur les
essentiels, éviter à tout prix de vouloir enrichir le vocabulaire
au risque d’être emporté par l’élan et de voir ce projet s’étaler
sur plusieurs heures de cours (et par conséquent d’entraîner
une perte d’intérêt des élèves). En axant sur la thématique et
sur l’amélioration de la structuration des phrases, on fait pro-
gresser l’élève en rapport avec des difficultés bien ciblées.
78

c. Quels sont les bénéfices secondaires de ce type de dé-


marche ?

Lors des exposés, le groupe est très à l’écoute, et les questions


fusent de toutes parts. Les cas sont très variés et donnent des
idées aux autres élèves.
Les premières présentations prendront beaucoup plus de temps
que prévu, car l’intérêt du public stimule le partage. On est loin
des anecdotes ânonnées et de la recherche de mots de vocabu-
laire spécifiques : le sujet est porteur et chaque élève devient un
partenaire pour celui qui communique sur ce qu’il a vécu. Les
intervenants expriment d’ailleurs leur satisfaction de pouvoir
s’affirmer comme « débrouillards » et d’être ainsi reconnus
pour d’autres compétences que celles habituellement partagées
durant le temps scolaire.

d. Quels sont les liens avec le P.P.E. ?

On parle donc bien de prises d’initiative, de reconnaissance, de


motivation, de confiance et de connaissance de soi, d’an-
ticipation…, toutes dimensions spécifiques aux activités P.P.E.,
mais intégrées ici au sein du cours de langue. Nous sommes
bien en présence d’outils pour une bonne orientation.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 79

Conclusion générale

Le décrochage constaté et observé en premier baccalauréat par


les acteurs pédagogiques du supérieur nous montre que les
difficultés de l’orientation, au-delà des acquis et prérequis
attendus dans les différentes disciplines, seraient d’ordre com-
portemental. Les manques de motivation, de responsabilité,
d’autonomie, de prise d’initiative, d’engagement, de relations
que ces étudiants expriment, dessinent autant d’hypothèses
quant aux causes du décrochage.

Celui qui, au troisième degré de l’enseignement secondaire,


écoute et observe des élèves qui manifestent peu d’intérêt pour
les activités liées au P.P.E., est entraîné à interroger l’école :
joue-t-elle bien son rôle d’accompagnatrice de l’orientation ?
Les contraintes du cadre scolaire et le manque de moyens
accordés pour l’aide à l’orientation sont autant de freins à
débloquer pour former nos jeunes à l’acte de choisir.

Les activités du P.P.E. proposées aux élèves du secondaire pour


les amener à faire des choix (de formation, de profession et de
vie) ont été jusqu’ici menées principalement en dehors des
cours ; elles sont animées par quelques adultes (professeurs,
éducateurs, intervenants du P.M.S., etc.). Dans les écoles jésui-
tes, ces activités consistent principalement en temps
d’informations, moments de réflexions et, quelquefois, en
activités d’immersion, c’est-à-dire de stages et de rencontres...

Mais d’autres activités menées par certains professeurs dans le


cadre de leurs cours relèvent aussi in fine de l’aide à
l’orientation, parce qu’elles mettent l’élève en situation de
choisir et exercent les compétences nécessaires pour bien choi-
sir. Ces projets nés en classe sont inédits, et souvent se sont
80

enrichis d’essais successifs. Les professeurs impliqués, cons-


cients de l’enjeu, placent intentionnellement au cœur de la
formation des élèves un apprentissage du choix. Pour ce faire,
ils les invitent à remplir des rôles habituellement tenus par des
adultes ; ils les poussent à construire, à organiser et à mener au
terme des projets. Ainsi les élèves vont s’exercer à adopter des
attitudes qui leur seront nécessaires dans leur parcours futur.

Étendre ces expériences ponctuelles à d’autres moments et à


d’autres disciplines, imaginer des variantes et de nouvelles
mises en œuvre, c’est tracer une ligne directrice d’un projet
d’école. Si on en fait la ligne prioritaire, pourquoi ne pas lui
donner le nom d’« école du choix » ?
Inévitablement, ce projet se construirait sur la prise de cons-
cience de chaque professeur, qui par le fait même qu’il ensei-
gne, apprend à l’élève à choisir : l’accès au savoir n’est pas
univoque, mais suppose tri, classement, choix personnalisés,
tant dans l’approche des matières que dans les méthodes effica-
ces pour les assimiler.

Pourquoi dès lors ne pas approfondir les composantes de l’acte


de choisir – c’est-à-dire les compétences requises pour choisir
en connaissance de cause ? Chacune de ces compétences pour-
rait être exercée, chaque discipline scolaire apportant son écot.
En équipe pédagogique, la réflexion sur le « talent de bien
choisir » pourrait s’inspirer d’une méthode récemment mise au
point par une équipe de chercheurs et appelée la méthode des
mini-récits27.

27 Marie BAILLEUX, Dominique BERTRAND, Barbara DUFOUR, Gérard FOUREZ, Marie-


Anne MANIET, Pierre MICHE, Ana ROMÃO, Francis TILMAN et le Centre Interfaces,
Des compétences négligées par l’école. Les raconter pour les enseigner, Charleroi/Lyon,
Couleur livres /Chronique sociale, 2006.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 81

En outre, il serait intéressant de développer des bourses aux


idées : témoignages et partages d’expériences pédagogiques,
qui multiplieraient les approches et renforceraient la cohérence
éducative de l’école. Car rien ne vaut ce qui a fait ses preuves
sur le terrain, même si cela reste toujours perfectible. Et
l’échange d’expériences entre écoles peut aussi amener un
progrès dans la diversité pédagogique et servir de régulateur.

Les quelques séquences « à caractère orientant » présentées


dans ce cahier constituent en quelque sorte l’ébauche de cet
échange.

Le métier d’enseigner, c’est transmettre, c’est essayer, c’est


collaborer. Espérons que ce cahier pédagogique pourra être
source d’idées et d’actions partagées, grâce auxquelles à la fois
dans les activités explicitement liées au P.P.E., mais aussi au fil
des cours de toutes disciplines, l’élève pourra exercer les com-
pétences nécessaires pour bien choisir et percevoir comme un fil
rouge cet aspect essentiel de sa formation.
82

Annexe 1

Premier questionnaire type

Dans le cadre du projet personnel (accompagnement des


élèves dans leur choix de vie, d’étude, de profession) :

1. Pouvez-vous décrire les projets actuels qui sont organisés


dans votre collège, en supposant, par exemple que votre
collège organise pour les élèves :

ƒ des moments d’information


ƒ des séances d’animation et de réflexion
ƒ des activités spécifiques
ƒ des activités qui sont intégrées dans le cadre d’un cours
ƒ autres.

2. Quelles sont les particularités d’organisation que vous


jugez intéressantes et qui font la force de ces projets ?

3. Que pouvez-vous dire de l’implication de l’équipe éduca-


tive du collège dans ces projets ?

4. Quelles sont les expériences déjà vécues qui ne sont plus


reprises cette année et quelles seraient, à votre avis, les rai-
sons de leur abandon ?

5. Quelles sont les activités déjà imaginées qui n’ont pas


(encore) été mises en place et quelles seraient, à votre avis,
les raisons de leur non-réalisation ?

6. Quels seraient vos besoins, vos attentes, vos rêves ?


CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 83

Second questionnaire type transmis aux personnes-relais pour


compléter l’état des lieux

1. Quelles sont, dans votre collège, les activités proposées aux


élèves en dehors du cadre spécifique du P.P.E. qui sont
identifiées (ou pourraient l’être) comme des activités
« orientantes » ?

Quels liens (implicites ou explicites) voyez-vous entre chaque


activité citée et le P.P.E. ?

2. Au sein de votre collège certains professeurs ont expéri-


menté des activités (de cinq minutes ou de plusieurs se-
maines) dans le cadre de leur cours, activités qu’ils identi-
fient clairement comme ayant un caractère orientant (par
leurs contenus, ou par leur forme).

Exemples d’activités orientantes que l’on peut proposer aux


élèves pour qu’ils puissent

ƒ mener des projets


ƒ poser des choix solides
ƒ acquérir des compétences nécessaires à aborder dans
les meilleures conditions possibles la première année
d’études (ou autre projet) après son secondaire.

C'est-à-dire chaque fois qu’on invite les élèves, en dehors ou


dans le cadre d’un cours, à

ƒ s’engager,
ƒ faire une démarche, une rencontre, une recherche,
ƒ relever un défi,
84

ƒ monter une action humanitaire, sociale, citoyenne, ou y


participer,
ƒ organiser une activité extrascolaire, un voyage, une vi-
site,
ƒ mettre sur pied une activité artistique, une animation,
une publication,
ƒ analyser un événement, une situation inattendue, un
échec,
ƒ programmer dans le temps,
ƒ participer à la gestion de...,
ƒ représenter un groupe,
ƒ s’exprimer publiquement,
ƒ évaluer,
ƒ identifier les influences qu’ils subissent,
ƒ négocier…
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 85

Annexe 2

Activités d’orientation en dehors des cours – Que propose-t-


on aux élèves du secondaire ?

Collaboration avec le P.M.S. : entretien individuel, animations,


tests d’orientation.

Aux élèves du premier degré

ƒ Visites organisées d’écoles techniques

Aux élèves de 4e (concerne une seule école)

Des séances d’informations

ƒ Présentation par les aînés (élèves de 5e) du projet « ser-


vices sociaux », que les élèves de 4e feront l’année sui-
vante.
ƒ Informations sur les options (mais sans lien explicite
avec le P.P.E.).
ƒ Conférences (par exemple sur le thème « choisir »)
avant les choix d’options de 5e.

Des rencontres :

Les élèves doivent réaliser une interview d’un « professionnel


hors du commun » et en rédiger un rapport.
86

Aux élèves de 5e

Des séances d’informations

ƒ Universités
ƒ Hautes écoles
ƒ C.I.O.
ƒ Présentation du projet aux parents (objectifs du P.P.E.)

Des journée(s) d’immersion

ƒ DREAM (parfois « revisité »)


ƒ Stage de trois jours en services sociaux
ƒ Journée chez un professionnel
(suivie d’une journée de retraite qui sert de debriefing)

Des animations et réflexions

ƒ Connaissance de soi et de son milieu, ses valeurs, ses


représentations, etc.
ƒ Préparation aux stages et aux journées d’immersion
(découvrir un autre milieu et réfléchir à leurs réactions).
ƒ Rapport et feed-back sur les stages et journées
d’immersion (et pour certaines écoles, présentation de
ces feed-back aux plus jeunes).

Possibilité de visites libres durant les heures scolaires ou en


dehors

ƒ Des écoles et universités


ƒ Des salons d’information : S.I.E.P.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 87

Aux élèves de 6e

Des séances d’informations (C.I.O., U.L.G. ...)

ƒ Universités
ƒ Hautes écoles
ƒ Présentation du projet aux parents (objectifs du P.P.E.)

Des conférences et des visites

ƒ Sur les métiers, le choix, les changements entre études


secondaires et études supérieures
ƒ Visite au C.I.O.

Des collaborations avec les parents : communication des


objectifs du P.P.E., ou des résultats de « arrêt sur image28 »,
présentation des projets des journées d’immersion en mi-
lieu professionnel et demande de collaboration : l’accueil
d’un jeune sur leur lieu de travail.

Des rencontres :

ƒ avec des étudiants (tables rondes)


− anciens élèves
− étudiants du supérieur qui ne sont pas des anciens
élèves
− étudiants de 2e bac : témoignages sur les change-
ments entre le secondaire et les études supérieures
− temps de midi avec d’anciens élèves pour un
groupe d’élèves intéressés (au rythme d’une ou
deux fois par mois)

28 Animation qui a comme objectif de visualiser pour les élèves d’une même classe,
où en sont leurs choix d’études, quels sont leurs besoins d’accompagnement et
quels sont leurs sentiments.
88

- avec des parents et des anciens pour discuter de


leur métier.
ƒ avec des professionnels sur leur milieu de travail
ƒ participation au projet DREAM (parfois « revisité »)

Animations et réflexions

ƒ Retraite de 6e
− choix d’avenir et profession
− réflexion sur la connaissance de soi

Immersion organisée(s), seul ou par groupe de deux ou trois


élèves

ƒ stage d’un jour ou plus, voire d’une semaine


− proposée(s) ou imposée(s)
− en milieu professionnel
− avec des personnes de terrain

ƒ journées d’immersion sur sites universitaires ou autres

− retraites (animation autour du choix)


− retraites sociales
− opération « Dream »

Possibilité de visites libres durant les heures scolaires ou en


dehors

ƒ Des écoles et universités


ƒ Des salons d’information : S.I.E.P. (visite précédée par-
fois d’une préparation).
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 89

Annexe 3

Savoir ce qu’est le stress pour mieux le gérer29

La pédagogie de la peur, parfois utilisée à l’école comme incitant


au travail, peut entraîner du stress chez l’élève. Ce stress se
traduit en comportements qui ne sont pas nécessairement de
l’engagement, de la motivation, de la prise d’initiative, de
l’autonomie, de la responsabilité, de la confiance en soi.
Le stress est une réaction personnelle face à une situation don-
née, réaction qui dépend donc d’une part du contexte et d’autre
part de l’individu. Ce qui fait que chacun aura une manière
différente de réagir à une même situation : fuir, combattre ou
se figer30.
Pour l’élève, la première année après ses années de secondaire
peut être perçue comme menaçante : la pression parentale,
l’échéance qui se rapproche, l’appréhension du changement
entre le secondaire et le supérieur, les enjeux d’un choix de vie.
D’autres situations scolaires peuvent aussi être stressantes :
l’idée d’une évaluation, le délai d’un travail à remettre, la
proposition d’une intervention orale. Il s’agit bien de percep-
tions personnelles.
L’élève, selon les cas, pourra fuir, ce qui signifie pour lui, par
exemple, aller voir des copains, faire autre chose, se détendre,
écouter de la musique, et aussi boire de manière exagérée,
prendre des médicaments, ou devenir dépendant du sucre, du
chocolat, de l’ordinateur.
Une seconde manière de réagir au stress est de combattre, et
donc soit être agressif, répondre de manière impertinente,

29 Synthèse de la rencontre avec Jacqueline Delville, psychologue et responsable du


Centre Médico-Psychologique des FUNDP, spécialiste du stress, qui nous a aima-
blement permis de résumer ici ses propos et que nous remercions.
30 Jacques FRADIN, L’intelligence du stress, Paris, édition Eyrolles, 2008.
90

chercher le conflit, taper du pied, s’opposer systématiquement,


chahuter, boycotter un moment d’animation ou de cours, soit
agir, faire quelque chose, s’y mettre, devant l’urgence d’une
échéance. C’est dans cette dernière façon de réagir que se mani-
feste « le bon stress », celui qui pousse à agir. Tout est question
de nuance et de personne.
Ces réactions n’ont qu’un seul but : permettre dans l’instant de
réduire la tension qui s’accumule.

Une troisième réaction possible sera de se figer, ce qui peut


signifier ne rien faire, ne pas avoir de projet, ne rien organiser,
faire comme si on ne savait pas, attendre, se dire qu’il reste
encore du temps, rester devant la TV durant des heures, arriver
en retard, bref, ce qu’ils appellent glander.

Quels sont les facteurs qui augmentent la fragilité de l’élève


face au stress ?

Le « juge intérieur » trop puissant : d’une part, si l’élève a


fortement intégré certaines normes extérieures (les devoirs du
métier d’élève par exemple), qu’il soit guidé intérieurement par
des « je dois, il faut, je devrais, c’est impossible de ne pas... », il
sera d’autant plus stressé. Il est soumis à une exigence trop
importante qu’il s’impose ou qui lui semble imposée.

L’estime de soi : d’autre part, s’il a une faible estime de soi, s’il
éprouve un sentiment d’infériorité, s’il se sent incompétent,
insécurisé, s’il se dit peu à l’aise, il peut aussi être stressé. Il
exprime dans ces cas des croyances négatives sur ses capacités :
« Je ne suis pas capable de... », croyances qui découlent de son
histoire passée et présente, qui se construisent ou se sont cons-
truites partiellement à l’école.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 91

Les pressions et l’isolement : des contraintes externes peuvent


aussi augmenter la fragilité au stress ; insécurité économique et
sociale, attentes (parfois non verbalisées) des parents, angoisses
des parents, comparaison entre les frères et sœurs, exigences
contradictoires dans l’éducation, médias, rythme scolaire,
charge horaire, nombreuses activités, changements familiaux
(divorce des parents, naissance…), fin de scolarité, changement
d’école, déménagement... L’isolement ne fera qu’accroître la
difficulté.

Le cumul de nombreux petits ou grands tracas augmente for-


cément la vulnérabilité face au stress.

Comment construire un cadre positif de confiance, un


contexte qui réduit le stress de l’élève, dans toutes les activi-
tés scolaires (cours, activités, projets, etc.) ?

Agir sur le contexte est du ressort de l’école et du professeur.

En compensant le « parent normatif »31 par une meilleure


écoute de ses sensations corporelles et de ses émotions.

Inviter l’élève à être plus attentif à ce qu’il ressent, à ses be-


soins de base « je sens, j’ai envie de… », on lui permet de com-
penser son « parent normatif intérieur ».

L’écoute et l’expression de ses sensations au cours


d’éducation physique sont un exemple de rééquilibrage de ce
juge intérieur : « j’ai peur », « je n’aime pas » est très différent
de « je dois », « je suis nul(le) », « je suis incapable de... ».

31 Concept puisé dans l’analyse transactionnelle.


92

Quand on identifie l’émotion, on peut imaginer une stratégie


pour l’exprimer et progresser. Réflexions que l’on peut aussi
développer dans d’autres cours et en d’autres circonstances.
L’objectif étant d’identifier ce qui est bon pour soi à partir de ses
sensations et non à partir de normes extérieures que l’on a
intégrées de manière stéréotypée.

En réduisant les tensions

L’expression créative est une autre manière d’évacuer des


tensions et d’apprendre à être congruent. La créativité n’est
pas l’apanage de cours spécifiques d’arts plastiques ou d’éveil
musical, mais peut s’exercer chaque fois qu’un choix et un
minimum de liberté s’offrent, tant dans la forme que dans le
contenu d’une tâche à réaliser.
L’activité physique régulière est aussi un exutoire des ten-
sions.
Il s’agit donc chaque fois de se remettre à l’écoute de ses sen-
sations corporelles ou émotionnelles.

En renforçant la résistance

Une autre possibilité pour réduire le stress de l’élève est de


favoriser les relations (réduire l’isolement) et les coopéra-
tions : travailler en équipe dans laquelle chaque élève a un
rôle défini et spécifique, apprendre à collaborer, prendre des
rôles au sein d’une classe, faire appel à d’autres personnes
compétentes, être solidaire, s’organiser ensemble en vue de
répondre à un défi, faire partie d’un projet et prendre des
initiatives, etc., autant de situations où l’élève peut se sentir
apprécié et à sa place. Les bénéfices qui en découlent sont
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 93

amplifiés quand l’enseignant met en place des stratégies


d’apprentissage qui sont construites avec les élèves.
94

Suggestions de lectures ou de consultations

Pédagogie générale :

Marie BAILLEUX, Dominique BERTRAND, Barbara DUFOUR, Gérard


FOUREZ, Bertrand HESPEL, MARIE-Anne MANIET, Pierre MICHE, Ana
ROMĂO, Francis TILMAN et le Centre Interfaces, Des compétences négligées
par l’école. Les raconter pour les enseigner, Charleroi/Lyon, Couleur
livres/Chronique sociale, 2006.

Marie BAILLEUX, Dominique BERTRAND, François-Xavier DRUET, Barba-


ra DUFOUR, Gérard FOUREZ (dir.), Bertrand HESPEL, Marie-Anne
MANIET, Pierre MICHE, Ana ROMÃO, Francis TILMAN, Myriam VAN DER
BREMPT et le Centre Interfaces, Des compétences pour la vie. Des modules
pour les enseigner, Charleroi/Lyon, Couleur livres/Chronique sociale,
2007.

Marc-Henry BROCH, Travailler en équipe à un projet pédagogique, Na-


mur/Lyon, Pédagogie-formation/Chronique sociale, 2004.

Jean-François MARCEL, Vincent DUPRIEZ, Danièle PÉRISSET BAGNOUD,


Maurice TARDIF (sous la direction de), Coordonner, collaborer, coopérer.
De nouvelles pratiques enseignantes, Bruxelles, de Boeck Université,
Perspectives en éducation et en formation, 2007.

Denis PELLETIER, L’approche orientante : la clé de la réussite scolaire et


professionnelle, Québec, Septembre éditeur, 2004.

Philippe PERRENOUD, Dix nouvelles compétences pour enseigner. Invitation


au voyage, Paris, ESF éditeur, 2e éd. 1999.

Christian PHILIBERT et Gérard WIEL, Accompagner l’Adolescence – du


projet de l’élève au projet de vie, Paris, Chronique sociale, Collection
Pédagogie/Formation, 3e éd. 2002.

Halina PRZESMYCKI, Pédagogie différenciée, Paris, Hachette Éducation,


Pédagogies pour demain/Nouvelles approches, 1991.
CAHIERS PÉDAGOGIQUES > P.P.E. 95

Marc ROMAINVILLE et Concetta GENTILE, Des méthodes pour apprendre,


Paris, Les éditions d’organisation, 2e éd. 1995.

M. Ch. TOCZEK et D. MARTINOT, Le défi éducatif. Des situations pour


réussir, Paris, Armand Colin, 2004.

Rolland VIAU, La motivation en contexte scolaire, Bruxelles, de Boeck


Université, Pratiques pédagogiques, 2003.

Pédagogie du projet :

Bruno HOURST, Au bon plaisir d’apprendre. (Re)trouver la faculté


d’apprendre avec le sourire, Paris, InterEditions, 2002

Philippe MEIRIEU, Apprendre… oui, mais comment ?, Paris, ESF éditions,


8e éd.1991.

Philippe MEIRIEU, La pédagogie entre le dire et le faire, Paris, ESF éditions,


Collection Pédagogies, 1995.

Philippe PERRENOUD, Métier d’élève et sens du travail scolaire, Paris, ESF


éditions, 1993.

Philippe PERRENOUD, La pédagogie à l’école des différences, Paris, ESF


éditions, 1994.

Jean-Pierre WAUTHY, Pédagogie par projets et environnement. Une interdis-


ciplinarité efficace, Bruxelles, Éditions Érasme, Forum pédagogique,
1993.

Introduction à l’Analyse Transactionnelle :

Éric BERNE, Des Jeux et des Hommes. Psychologie des relations humaines,
Paris, Stock, 1966, 3e éd. 1980.

Gysa JAOUI, Le triple Moi, Paris, R. Laffont, Collection Réponses, 1979.


96

Gestion du stress

Charly CUNGY, Savoir gérer son stress, Paris, Éditions Retz, Développe-
ment personnel, 2003.

Jacques FRADIN, L’intelligence du stress, Paris, édition Eyrolles, 2008.

Le stress, nécessaire mais pas fatal, brochure des mutualités socialistes


disponible sur leur site internet
http://www.mutsoc.be/Mutsoc/MeDocumenter/Brochures/gerer-stress-
conseils.htm (vérifié le 06/10/2008)

*
Liste des cahiers disponibles

1 FRANC J.-P., MAINGAIN A., La mise en réseau des savoirs et des


compétences, au-delà des cloisonnements disciplinaires, octobre 1999,
56 p. (épuisé)
2 PRIGNON P., Quand on parle du choix d'orientation en fin de secondaire,
de quoi s'agit-il? Essai de synthèse globale, novembre 1999, 16 p.
3 PRIGNON P., Des activités pour éclairer le projet personnel et le projet
orientation. Une séquence sur la connaissance de soi, mars 2000,
43 p. (épuisé)
4 MAINGAIN A., La construction d'un ilot interdisciplinaire de rationalité
sur la notion de mythe, avril 2000, 35 p.
5 MAINGAIN A., Un parcours inter- et transdisciplinaire sur la notion
d'initiation, mai 2000, 37 p.
6 PRIGNON P., BAILY J.-M., Des activités pour éclairer le projet personnel et
le projet orientation. Une séquence sur la connaissance de l'autre, juin
2000, 44 p.
7 PRIGNON P., Quel sens à l'école et quel sens de l'école, aujourd'hui?,
février 2001, 20 p.
8 PRIGNON P., BAILY J.-M., “Projet Personnel de l'Élève” ou “Projet
d'Orientation”, avril 2002, 34 p.
9 DUFOUR B., FOUREZ G., MAINGAIN A., Comment construire une
représentation de “sa” ville pour y favoriser l'intégration sociale, dans
la perspective de valeurs éthiques?, avril 2002, 26 p.
10 PRIGNON P., BAILY J.-M., Le “projet d'Orientation”, mise en place
d'activités articulées, juin 2002, 32 p.
11 KULCSAR D., MINET FR., SPITAELS N., La mise en réseau des disciplines à
l'occasion d'un travail encadré de fin d'études, mai 2002, 35 p.
(épuisé)
12 FOUREZ G., DUFOUR B., JACCARD J., MAINGAIN A., Points stratégiques
pour un travail interdisciplinaire, décembre 2002, 24 p.
13 PRIGNON P., BAILY J.-M., Un chemin vers une décision libre…, mai 2003,
59 p.
14 PRIGNON P., BAILY J.-M., STERNOTTE M.-Th., Face à la nébuleuse des
”Projets Personnels de l'Elèves”… Réflexions autour d'une mise en
perspective, octobre 2003, 23 p.
15 BAILY J.-M., PRIGNON P., Des mécanismes de transfert. Comment initier
un transfert avec les élèves ?, décembre 2004, 44 p.
16 BAILY J.-M., DUFOUR B., PRIGNON P., FOUREZ G, Le travail de fin
d'études secondaires. Regards croisés, février 2005, 50 p.
17 PRIGNON P., Etre professeur dans un collège jésuite. Quels profils dessine
la spiritualité ignatienne, juin 2005, 42 p.
18 FOUREZ G. (dir.), Vivre avec des musulmans. Les défis de l'ouverture,
juin 2005, 14 p.
19 FOUREZ G. (dir.), Elitisme. Analyse et jugements éthiques, décembre
2005, 19 p.
20 FOUREZ G. (traduit par), Les tours de rêve. Faire le plein d'énergie pour
construire un projet avec un groupe, septembre 2008, 26 p.
21 CAMBIER Ch. (en collaboration avec BERTRAND D., DRUET Fr.-X., VAN
DER BREMPT M. et l’équipe pédagogique du Centre Interfaces), Du
projet personnel de l’élève (P.P.E.) à l’école du choix, octobre 2008,
96 p.

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