Rééducation Des Troubles Des Fonctions Exécutives Et de L'attention Après AVC
Rééducation Des Troubles Des Fonctions Exécutives Et de L'attention Après AVC
Rééducation Des Troubles Des Fonctions Exécutives Et de L'attention Après AVC
P.-A. Joseph, É. Sorita, A.-S. Douguet, J.-L. Le Guiet, A. Taruella, J.-M. Mazaux
et E. Klinger
Les atteintes cognitives sont à côté des séquelles motrices un facteur majeur de la dépen-
dance des survivants à un AVC. Si la négligence visuo-spatiale, l’aphasie ou l’apraxie sont
des conséquences bien identifiées des accidents vasculaires cérébraux, d’autres troubles
cognitifs traduisant les répercussions sur les fonctions distribuées sont moins souvent
évoqués alors qu’ils sont fréquents et invalidants : troubles attentionnels, difficultés
exécutives et mnésiques.
L’étude prospective ANR-CNSA sur les technologies pour l’autonomie (1) a pointé
l’intérêt et la nécessité des travaux concernant la « stimulation des capacités cognitives »
après les atteintes cérébrales non traumatiques. Les difficultés de concentration et d’at-
tention sont presque constantes à la phase initiale de la prise en charge d’une hémiplégie
vasculaire et vont souvent persister durant plusieurs mois au-delà de la période de récu-
pération motrice et de l’autonomie. Les déficits spécifiques des fonctions attentionnelles
ont été le plus souvent étudiés dans le cadre du modèle de van Zomeren et Brouwer (2)
distinguant parmi les fonctions attentionnelles : l’attention focalisée, l’attention divisée,
l’attention soutenue et l’alerte phasique. Les fonctions exécutives sont un ensemble de
processus (inhibition, planification, contrôle, flexibilité…) mis en jeu dans des tâches
nécessitant la mise en œuvre de processus contrôlés, et particulièrement dans les tâches
séquentielles dirigées vers un but (3). Les processus exécutifs, supportés notamment par
les lobes frontaux et les structures profondes sous-corticales hémisphériques permettent
l’adaptation du sujet à des conditions nouvelles à travers la modulation et le contrôle
des aptitudes cognitives de routine (4, 5, 6). Leur perturbation est responsable de diffi-
cultés d’adaptation sociale et professionnelle parfois importantes. Cependant, comme
l’a souligné Schwartz, la perturbation du contrôle exécutif a aussi des conséquences sur
des activités pratiquées quotidiennement par le sujet (7) et peut tout à fait être iden-
tifiée dans des activités d’autonomie élémentaire pratiquées de longue date de façon
routinière : soins personnels et habillage, alimentation, déplacements dans le domicile
et sur des parcours familiers.
Les troubles des fonctions exécutives sont fréquents dans les suites des AVC, concernant
plus d’un tiers des sujets (8-10). Ils impliquent l’atteinte des boucles fronto-sous-corticales
par les infarctus, mais aussi par les lésions de la substance blanche, comme peuvent les
94 Accident vasculaire cérébral et médecine physique et de réadaptation
Les fonctions exécutives sont des processus cognitifs complexes dont l’évaluation et
la rééducation au moyen des outils neuropsychologiques traditionnels sont peu sensibles
et peu spécifiques avec une validité écologique médiocre (16, 17, 18, 19). Leur applica-
tion est encore compliquée par les déficits associés portant sur la communication, les
praxies, la représentation et l’utilisation de l’espace. L’adaptation des procédures aux
expériences particulières à chaque individu est également difficile à réaliser. Même quand
ces patients cérébrolésés réussissent les tests neuropsychologiques traditionnels visant une
capacité cognitive spécifique (i.e., attention, mémoire, fonction visuo-spatiale, langage,
etc.), on peut constater qu’ils relatent des dysfonctionnements dans les activités de la
vie quotidienne qui nécessitent planification, initiation, aptitude aux tâches multiples,
auto-évaluation des compétences, anticipation (4, 15, 20). Les tests dits « écologiques »,
comme le test des commissions multiples (multiple errands test) (5, 21), sont souvent
conduits en temps réel dans un environnement réel. Ils présentent une grande variabilité
de performance, même chez les sujets contrôles, rendant la quantification et l’interpréta-
tion parfois difficile. De plus, leur utilisation, coûteuse en temps et en moyens humains,
est limitée chez des sujets non indépendants physiquement (22). Quant aux tâches de
script (23) qui invitent le patient à organiser un plan d’action, elles ne concernent que la
génération de plan. Elles ne permettent pas d’explorer la phase de réalisation de l’action,
déficitaire dans le syndrome dysexécutif.