Cours Flaubert
Cours Flaubert
Cours Flaubert
Gustave Flaubert est le meilleur exemple d’une existence consacrée entièrement à la création
littéraire, existence vécue dans le culte fanatique de l’art : «J’ai toujours vécu poursuivant mon but, la
littérature, sans regarder ni à droite, ni à gauche».
Né à Rouen, en Normandie, Gustave Flaubert est le fils d’un chirurgien. Il passe une enfance
assez malheureuse dans l’atmosphère glacée de l’hôpital ; délaissé au profit de son frère aîné, il se réfugie
à la fois dans la littérature et dans la dérision. Il accumule dès son adolescence des textes inspirés par les
élans et les passions romantiques. En 1836, sur la plage de Trouville, il rencontre Élisa Schlesinger,
femme d’un éditeur de musique. Elle sera le secret de sa vie et peut-être une source de L’Éducation
sentimentale.
Après un voyage dans les Pyrénées, Flaubert s’installe à Paris, en principe pour étudier le droit ;
mais il fréquente surtout les milieux artistiques. En 1844, une première crise d’épilepsie l’oblige à
renoncer à ses études ; il s’établit dans la propriété familiale de Croisset, au bord de la Seine, où il mènera
désormais une existence de «solitaire», interrompue parfois par de longs séjours à Paris (où il rencontre
Louise Colet, qui sera sa «Muse» et sa confidente épistolaire), et par des voyages dans l’ouest de la
France, et surtout en Égypte, Tunisie, Palestine et Grèce, où il prend des notes pour ses romans à venir,
comme Salammbô.
Sa vie se confond avec la rédaction de ses œuvres. L’élaboration de celles-ci est douloureuse tant
il est exigeant envers lui-même : modifications multiples, insatisfaction permanente. La publication de
Madame Bovary (1857) lui vaut, comme à Baudelaire, un procès retentissant pour «immoralité», dont il
sort acquitté, et qui lui assure dans les milieux littéraires une position de premier plan. Le succès de
Salammbô, en 1862, lui ouvre les portes des salons officiels du Second Empire. Mais L’Éducation
sentimentale (1869), roman auquel il a travaillé de nombreuses années et où il retrace la faillite de toute
une génération romantique, la sienne, est un échec ; à cette déception s’ajoutent de nouveaux accès de
maladie, la perte de ses meilleurs amis et de sa mère, les bouleversements provoqués par la guerre de
1870. Le pessimisme de l’écrivain s’exprime encore dans Bouvard et Pécuchet (1881), tentative
inachevée de répertorier la bêtise humaine. La vénération dont il est l’objet de la part des écrivains de la
nouvelle génération (notamment Maupassant) ne compense pas l’amertume de ses dernières années, face
à la maladie, à une situation financière désastreuse, et à l’épuisement que lui causent ses recherches
incessantes. Flaubert dépense sa fortune à essayer d’empêcher sa famille de tomber dans la faillite. En
1880, atteint de dépression grave, il meurt d’une hémorragie cérébrale.
Dans sa Correspondance (janvier, 1852), on retrouve une phrase qui décrit bien la nature de
l’homme Flaubert : « Il y a en moi deux bonshommes distincts, un qui est épris de gueulades, de lyrisme,
de grands vols d’aigle, de toutes les sonorités de la phrase et des sommets de l’idée ; un autre qui creuse et
qui fouille le vrai tant qu’il peut, qui aime à accuser le petit fait aussi puissamment que le grand, qui
voudrait vous faire sentir presque matériellement les choses qu’il reproduit.» Il y a en effet deux
personnages dans Flaubert, l’un contaminé par le romantisme du temps de sa jeunesse, l’autre épris par
réaction d’exactitude et d’objectivité. S’il est devenu l’ennemi impitoyable de la sottise prétentieuse qui
se cache parfois derrière les aspirations romantiques, il conserve pourtant du romantisme l’enthousiasme
de l’imagination et du cœur, un penchant pour le lyrisme, la haine de la médiocrité et surtout le mépris du
bourgeois qu’il définit comme «quiconque pense bassement».