Mémoire Version 1
Mémoire Version 1
Mémoire Version 1
Le delit d’inité :
Introduction :
marché financier...boursier, les principes du marché (égalité, transparence…) , les
différents abus existants …
Problematique …
site de l’ammc :
Le délit d'initié résulte d'une opération qui se traduit par une rupture d'égalité des
investisseurs face à l'information et qui institue un privilège pour une certaine catégorie
d'investisseurs dits "initiés". Ainsi, toute personne disposant, dans l'exercice de sa
profession ou de ses fonctions, d'informations privilégiées et qui les aura utilisées pour
réaliser ou permettre sciemment de réaliser sur le marché, soit directement, soit par
personne interposée, une ou plusieurs opérations, est coupable de délit d'initié.
site : DALLOZ :
Constitue un délit d'initié le fait, en toute connaissance de cause et pour une personne
disposant d'une information privilégiée, d'en faire un usage en réalisant, pour elle-même
ou pour autrui, soit directement, soit indirectement, une ou plusieurs opérations ou en
annulant ou en modifiant un ou plusieurs ordres passés sur l'émetteur ou l'instrument
financier concerné par cette information privilégiée.
La qualité d'initié est limitativement énumérée par les textes, notamment par l'article L. 465-1
du code monétaire et financier, dans sa nouvelle rédaction issue de la loi du 21 juin 2016
réformant le système de répression des abus de marché. Ce sont tout d'abord les dirigeants
d'un émetteur. Plus précisément, il s'agira du directeur général, du président, d'un membre
du directoire, du gérant, d'un membre du conseil d'administration ou d'un membre du conseil
de surveillance d'un émetteur concerné par une information privilégiée. On trouve également
à ce niveau les personnes exerçant une fonction équivalente, de même que celles disposant
d'une information privilégiée concernant un émetteur au sein duquel elles détiennent une
participation. Ces personnes sont considérées comme présumées avoir eu connaissance de
l'information. Cette présomption peut toutefois être renversée par la preuve contraire (Crim.
15 mars 1993, n° 92-82.23).
Sont ensuite concernées par la qualité d'initié toutes les personnes disposant d'une information
privilégiée à l'occasion de leur profession ou de leurs fonctions ou à l'occasion de leur
participation à la commission d'un crime ou d'un délit.
Les « incitateurs »
Élément matériel
Élément intentionnel
Répression
Le délit d'initié
Le délit d'initié est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 100 millions d'euros
d'amende. Ce montant peut être porté jusqu'au décuple du montant de l'avantage retiré du
délit, sans que l'amende puisse être inférieure à cet avantage.
La tentative de délit d'initié est sanctionnée selon les mêmes modalités (C. mon.
fin., art. L. 465-1, II).
L'article 621-1 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers (AMF) définit avec
précision ce qu'est une information privilégiée. Celle-ci est, selon ce texte, une information
précise qui n'a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou
plusieurs émetteurs d'instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers et qui,
si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des
instruments financiers concernés ou le cours des instruments financiers qui leur sont liés.
L'information est réputée précise si elle fait mention d'un ensemble de circonstances ou d'un
événement qui s'est produit ou qui est susceptible de se produire et s'il est possible d'en tirer
une conclusion quant à l'effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours
des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés.
Le texte précise également ce qu'est une information de telle nature. Ainsi peut-on considérer
qu'est une information qui, si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une
influence sensible sur le cours des instruments financiers celle qu'un investisseur
raisonnable serait susceptible d'utiliser comme l'un des fondements de ses décisions
d'investissement.
Selon l'article 621-3 du règlement général, pour les personnes chargées de l'exécution
d'ordres concernant des instruments financiers ou de la négociation des contrats
commerciaux, constitue également une information privilégiée toute information transmise
par un client qui a trait aux ordres en attente de ce client, et est d'une nature précise, tout en
ayant une influence sur le cours de l'instruments financier auquel elle se rapporte si elle était
divulguée.
Les personnes détenant une information privilégiée en raison de leur qualité ou de leur
position doivent s'abstenir d'utiliser cette information privilégiée en acquérant ou en cédant,
ou en tentant d'acquérir ou de céder, pour leur propre compte ou pour le compte d'autrui, soit
directement soit indirectement, les instruments financiers ou les produits de base auxquels se
rapporte cette information, au moyen de contrats commerciaux ou d'instruments financiers
auxquels ces instruments ou ces contrats commerciaux sont liés. Ces personnes doivent
également s'abstenir de communiquer cette information à une autre personne en dehors du
cadre normal de leur travail, de leur profession ou de leurs fonctions ou à des fins autres que
celles à raison desquelles elle leur a été communiquée. De même, elles doivent s'abstenir de
recommander à une personne d'acquérir ou de céder sur la base d'une information privilégiée
ces instruments.
-> https://www.memoireonline.com/01/14/8437/L-incrimination-du-delit-d-initie-en-France-
Atouts-et-faiblesses-d-une-repression.html
Il existe en matière de délit d'initié, diverses dispositions législatives qui viennent définir ce
que l'on doit entendre par la notion d'information privilégiée.
Le règlement général de l'AMF8(*), à travers son article 621-1, donne une définition très
précise de cette notion d'information privilégiée au titre du manquement d'initié. Ledit article
énonce qu' « une information privilégiée est une information précise qui n'a pas été rendue
publique, qui concerne directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d'instruments
financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique,
serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers
concernés ou le cours d'instruments financiers qui leur sont liés ».
Sur le critère de précision, l'information sera précise lorsqu`elle fait mention d'un ensemble de
circonstances ou d'un événement qui s'est produit ou qui est susceptible de se produire, et si il
est possible d'en tirer une conclusion quant à l'effet probable de ces circonstances ou de cet
événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui
leur sont liés. Quant aux termes « avoir une influence sensible », ils signifient que
l'investisseur raisonnable serait susceptible d'utiliser cette information comme l'un des
fondements de ses décisions d'investissements.
- En premier lieu, l'information doit être confidentielle, en d'autres termes secrète et non
connue du public. Cette confidentialité de l'information est justifiée par la théorie
économique. Si certains agents utilisent une information boursière inconnue du grand public
pour en tirer profit, alors d'autres opérateurs peuvent perdre confiance dans le marché et
diriger leur capacité de financement vers d'autres placements. De plus, les organes de
direction et de surveillance d'une société étant nécessairement collégiaux, la détention d'une
information par plusieurs initiés ne lui fait pas perdre son caractère confidentiel. Dans la
mesure où la diffusion d'une information est caractérisée par une publication selon les
modalités propres au droit d'information des actionnaires, la jurisprudence l'entend de façon
restrictive. Ainsi, l'information ne perd son caractère confidentiel que lorsqu'elle est
communiquée par un canal officiel : un communiqué, une publicité légale ou encore une lettre
aux associés.
- En second lieu, l'information doit être précise. Cette condition permet d'écarter les
renseignements vagues ou les simples rumeurs. Sont par exemple des informations précises
selon la jurisprudence, des opérations régies par le droit des marchés financiers telles qu'un
projet de prise de participation significative dans le capital d'une société, la préparation d'une
offre publique d'achat. Dans l'affaire Pechiney-Triangle la Cour de cassation dans son arrêt du
26 octobre 1995 énonce que l'information privilégiée porte sur « des renseignements
suffisamment précis pour être immédiatement exploités sur le marché 9(*)». Cette précision de
l'information constitue la deuxième pierre d'échoppe de l'information privilégiée, de vagues
rumeurs ne remplissant pas l'exigence prétorienne.
- L'information doit également être « de nature à influer sur le cours de la valeur ». Ce critère
jurisprudentiel est largement inspiré des différentes directives européennes10(*), selon
lesquelles l'information se doit d'être « susceptible d'influencer de façon sensible le cours des
instruments financiers concernés si elle était rendue publique », ou encore une information
qu « un investisseur raisonnable serait susceptible d'utiliser en tant que faisant partie des
fondements de ses décisions d'investissements ».
- Enfin, l'information doit être déterminante. Cette dernière condition posée par la
jurisprudence11(*) doit permettre à un initié d'invoquer des faits justificatifs lorsqu'il a
poursuivi un intérêt autre que personnel. Selon les pénalistes, un fait justificatif est une cause
légitime d'impunité qui fait disparaître la qualification pénale de l'acte par neutralisation de
l'élément légal de l'infraction. Ce caractère déterminant permet ainsi au prévenu d'échapper à
toute condamnation s'il prouve simplement que son intervention sur le marché financier n'était
pas dictée par la connaissance de l'information privilégiée mais par une stratégie financière
préalablement définie12(*). Cette condition peut engendrer une confusion, en faisant de la prise
en compte du mobile une cause justificative du délit d'initié. Le mobile, qui par principe est
indifférent en droit pénal, sauf lorsque la loi l'érige en dol aggravé ou en dol spécial, est pris
en compte en matière de délit d'initié. Ainsi, l'exigence d'un intérêt personnel de l'initié
s'inscrit en porte à faux de la ratio legis du délit d'initié qui a vocation à protéger l'égalité des
opérateurs sur le marché financier. La rupture de cette égalité informationnelle via l'utilisation
d'une information confidentielle, précise et sensible, devrait suffire à qualifier l'information de
privilégiée.
L'article L.465-1 punit l'initié qui aura réalisé ou sciemment permis de réaliser sur le marché,
soit directement, soit par personne interposée, une ou plusieurs opérations avant que le public
ait connaissance de ces informations. La loi incrimine donc aussi bien les opérations
effectuées par les initiés directement que celles réalisées, pour leur compte, par personne
interposée. Dans les deux cas, l'initié est l'auteur du délit. Mais la loi sanctionne également les
initiés pour les opérations effectuées par des tiers qu'ils auront « sciemment » fait bénéficier
d'informations privilégiées13(*).
Les comportements interdits portent donc sur l'utilisation d'une information privilégiée par un
initié qui souhaiterait réaliser des opérations sur les titres d'une société cotée ou tout autre
instrument financier dans le but d'en dégager un profit. Il est ainsi interdit à un initié
d'exploiter une information privilégiée en sa possession avant que celle-ci n'ait été rendue
publique.
Concrètement l'initié sera sanctionné s'il effectue un acte positif, c'est-à-dire s'il acquiert ou
cède des valeurs mobilières pour son compte ou pour le compte d'autrui en utilisant
directement ou indirectement une information privilégiée.
Par conséquent, tout initié voit peser sur lui une obligation d'abstention, mais également de
discrétion. D'abstention, car l'initié ne doit commettre aucun acte lorsqu'il est en possession
d'une information privilégiée tant que cette information n'est pas connue du public. De
discrétion, ce qui implique ici que l'initié ne doit en aucun cas communiquer une information
qu'il sait privilégiée à un tiers, avant que cette information, là encore, soit connue du public.
L'information qui est au coeur du délit d'initié, et qui constitue dans nos sociétés modernes un
élément essentiel, a fait l'objet de plusieurs études ayant pour but d'analyser et de comprendre
ses origines, sa destination et ses effets. Ainsi, les hommes ont pu définir le concept de la
communication, en se basant sur trois modèles : Le modèle systémique, le modèle linguistique
et le modèle cybernétique. C'est sur ce dernier modèle, qui renvoi directement à la théorie de
l'information, en mettant l'accent sur la formalisation des processus de transmission que nous
nous pencherons.
La cybernétique peut être définit comme la prise de conscience du processus vital qui
maintient en équilibre l'ensemble des phénomènes. C'est la science de l'efficacité et du
gouvernement par le contrôle organisé de toutes les informations y compris celles qui
concernent les perturbations de toute nature, en vue de leur traitement, pour parvenir à la
régulation optimale de tout phénomène organique, physique ou esthétique. Cette théorie de la
communication, voit le jour à la fin de la seconde guerre mondiale, et l'on en attribue la
paternité au mathématicien Norbert WIENER15(*). Selon lui, la cybernétique doit être perçue
comme une science qui étudie exclusivement les communications et leurs régulations dans les
systèmes naturels et artificiels. Par conséquent, la cybernétique désigne d'abord un moyen de
connaissance, qui étudie l' information au sens de la physique, dans la définition qu'en donne
Norbert Wiener: « De même que l' entropie est une mesure de désorganisation, l'information
fournie par une série de messages est une mesure d'organisation16(*) ».
Ce modèle cybernétique suit un déroulement logique qui peut être résumé en cinq étapes :
- Un répertoire de signes dans lequel les protagonistes, le récepteur et l'émetteur puisent pour
construire le message, côté émetteur, et pour l'identifier côté récepteur.
L'information qui par nature, a pour fonction de servir aux intérêts des hommes, peut donc
être employée et déformée, dans le but, pour ceux qui en font un tel usage, d'en tirer
quelconque bénéfice. Ce modèle cybernétique peut ainsi être approché de l'incrimination du
délit d'initié, de par le fait que l'information dans un tel système joue un rôle primordial et
aura des conséquences selon l'utilisation que certains en font.
ELEMENT MORAL :
https://www.memoireonline.com/01/14/8437/L-incrimination-du-delit-d-initie-en-France-
Atouts-et-faiblesses-d-une-repression.html :En matière de Droit pénal des affaires, l'élément
moral tend à s'atténuer en considération de la responsabilité de fonction des délinquants.
L'élément intentionnel du délit est suffisamment établi dès lors que l'auteur de l'acte "sait"
qu'il bénéficie d'une information privilégiée17(*), et que dès lors, il doit s'abstenir. Ainsi,
l'article L.465 du CMF sanctionne un délit intentionnel, mais la preuve de cette intention ne
soulève guère de problème. Certaines personnes sont présumées initiées de façon irréfragable.
Quant aux autres, il suffira d'établir qu'elles ont agi volontairement en ayant conscience de
détenir des informations privilégiées, conscience qui provenait des fonctions exercées. En
réalité, le délit d'initié apparaît très proche d'un simple délit matériel imposant aux initiés une
abstention totale. Dans l'affaire PECHINEY18(*), la cour d'appel de Paris le 6 juillet 1994, a
ainsi pu condamner pour délit d'initié l'un des prévenus en raison des opérations réalisées par
un autre prévenu en affirmant : « qu'il suffit en effet que l'initié ait eu conscience, au
préalable, de ce que les informations privilégiées qu'il livrait étaient destinées à être utilisées
par les opérateurs sur le marché ». Dans l'arrêt de cassation de la même affaire, en date du 26
octobre 1995, la Cour ajoute qu'il n'est même pas nécessaire que celui qui permet sciemment à
des tiers de réaliser des opérations sur le marché « connaisse l'identité des opérateurs, ni les
modalités des opérations réalisées ». Par conséquent, du fait du particularisme du droit pénal
des affaires au regard de la procédure pénale19(*), la caractérisation de l'élément moral du délit
d'initié, ne soulèvera pas de difficultés pour le juge.
https://vogel-academy.fr/PDF/COMPLIANCE/Extrait_ouvrage.pdf
….
On distingue les initiés de droit ou «initiés primaires» des initiés de fait ou «initiés
secondaires». Les premiers regroupent les dirigeants d’un émetteur concerné par
l’information privilégiée (directeur général, président, membre du directoire, gérant, membre
du conseil d’administration ou du conseil de surveillance). De par leurs fonctions et leur
appartenance à un cercle restreint, il pèse sur ces initiés une présomption de connaissance
des informations privilégiées. Ils ne pourront la combattre que par la preuve contraire ou par
une délégation de pouvoirs répondant aux exigences jurisprudentielles (délégataire doté de la
compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires). Les seconds rassemblent des personnes
qui disposent d’informations privilégiées à l’occasion de l’exercice de leur profession ou de
leurs fonctions et toutes autres personnes en possession de telles informations (secrétaire
général, cadre, employé, commissaire aux comptes, avocat de l’entreprise, journaliste
financier, ...). Il ne pèse sur eux aucune présomption, de sorte que l’autorité de poursuite
devra démontrer qu’ils connaissaient effectivement les informations privilégiées. L’initié sera
sanctionné qu’il agisse directement ou par personne interposée, qu’il exploite
personnellement l’information ou qu’il permette à un tiers de le faire.
L'article L.465-1, alinéa 1 du C.M.F désigne « les dirigeants d'une société mentionnée à
l'article L.225-109 du Code de commerce et les personnes disposant à l'occasion de l'exercice
de leur profession ou de leurs fonctions d'informations privilégiées ». Le législateur distingue
donc deux catégories de personnes physiques :
- Les dirigeants de société cotée: L'article L.465-1 dans sa rédaction actuelle, vise les
« dirigeants d'une société mentionnée à l'article L.225-109 du Code de commerce ». Il s'agit
du président, des membres du directoire d'une société, des personnes physiques exerçant dans
cette société les fonctions d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance et des
représentants permanents des personnes morales qui exercent ces fonctions.
Ces initiés de droit ou initiés « primaires » sont frappés d'une intervention absolue d'opérer.
En effet, ces personnes sont réputées initiées en raison des fonctions qu'elles exercent et la
présomption qui pèse sur elles est considérée comme irréfragable.
- En deuxième lieu, il faut évoquer les initiés externes : Aux termes de l'article L.465-1, toute
personne peut aussi être réputée initiée dès lors qu'elle dispose d'informations privilégiées,
non pas seulement dans l'exercice de sa profession ou de ses fonctions, mais aussi
« à l'occasion » de cet exercice, ce qui étend considérablement le champ de l'incrimination.
Cette catégorie de personne ne voit peser sur elle aucune présomption, ni irréfragable ni
même simple, d'initié. Tel est le cas du directeur financier ou administratif, d'un employé
ayant accès à des dossiers confidentiels, d'un trader d'une société de bourse...
- En troisième lieu, la loi du 15 novembre 2001 a allongé la liste des initiés externes en
insérant à l'article L.465-1 du CMF, un alinéa 3, qui vise « toute personne » possédant une
information privilégiée, ce qui permet d'atteindre tous ceux qui n'entrent pas dans les
prévisions des deux alinéas précédents. Dans tous les cas l'initié est punissable, qu'il agisse
directement, indirectement ou par personne interposée, et cela aussi bien lorsqu'il exploite
personnellement l'information privilégiée que lorsqu'il permet à un tiers de le faire.
De plus, le règlement de l'AMF du 12 novembre 2004 semble aller au-delà dans l'énumération
des personnes susceptibles de commettre un « manquement d'initié ». Son article 622-2 vise
toute personne détenant une information privilégiée et qui sait ou aurait dù savoir qu'il s'agit
d'une information privilégiée sans faire référence aux circonstances dans lesquelles cette
information lui est parvenue. Il s'agit des membres des organes d'administration, de direction,
de gestion ou de surveillance de l'émetteur, ou encore de personnes ayant une participation
dans le capital de l'émetteur...
Cet ensemble de dispositions démontre que le législateur a voulu doter les organes répressifs
de moyens convenables pour qualifier et poursuivre de telles infractions. Le champ
d'application du délit s'est ainsi considérablement élargi, et toute personne visée se voit dans
l'obligation de s'abstenir d'agir, tant que l'information n'est pas connue du public. Le décideur
public est même allé plus loin dans cette inflation législative, avec la loi du 20 juillet 200520(*).
Cette loi entraîne l'obligation pour chaque émetteur de créer et mettre à jour une liste21(*) de
personnes -travaillant en son sein- ayant accès à des informations privilégiées concernant
l'émetteur et une liste de tiers ayant accès à ces informations dans le cadre de leurs relations
professionnelles.
Cette disposition démontre encore une fois la volonté du décideur public d'encadrer
strictement ce genre de comportement qui porte atteinte à l'égalité des investisseurs.
Encadrement trop ferme aux yeux de certains spécialistes, qui s'interrogent sur la portée d'une
telle obligation. Cette procédure consistant à établir une liste d'initié « crée-t-elle une
présomption de culpabilité ou de quasi-culpabilité ? 22(*)». Selon l'avocat Pierre
CLERMONTEL, ces dispositions traduisent une « obsession normophile » qui « frappe
particulièrement le droit financier et le transforme en outil de communication destiné à
convaincre que l'Etat protecteur contrôle la puissance capitaliste et son cortège de méfaits ».
Me CLERMONTEL dénonce ainsi « une défiance tenace à l'égard du monde économique et
de l'entreprise », transformant chaque acteur en « délinquant virtuel ». Ce dernier allant
même jusqu'à comparer cet inflation à une période noire de la France en déclarant que « ...tout
comme au temps de la Terreur, doivent être établies des listes de suspects sur qui pèsera une
suspicion de malversations ».
Il est donc important de souligner qu'une certaine volonté apparente du législateur se traduit
par son intervention constante dans la vie des affaires. Cette intervention permet de délimiter
et réprimer en apparence les comportements qualifiables de délit boursier. Comme nous
venons de le voir avec la théorie de M.CLERMONTEL, ces mesures législatives excessives
peuvent engendrer des conséquences néfastes pour les professionnels en relation avec ce
monde des affaires. Cependant, ces dispositions apparaissent comme un mal nécessaire à la
survie des relations financières, permettant de réglementer un domaine ou la transparence et la
clarté doivent être de principe.
Or, nonobstant l'adoption de toutes ces mesures, qui peuvent entraîner un risque de confusion
et des conséquences nuisibles pour les professionnels du monde des affaires, il reste
néanmoins des zones d'ombre. On peut ainsi s'apercevoir que l'inflation législative destinée à
lutter contre les comportements d'initiés, ne s'accompagnent pas de la répression optimale
qu'il serait souhaitable d'appliquer dans ces cas là. Par conséquent, nous pouvons nous
questionner sur l'utilité de telles mesures législatives23(*) -pourtant nécessaire- qui en théorie,
encadrent de façon satisfaisante le délit d'initié, mais qui n'emporte pas les mêmes
conséquences en pratique sur le plan répressif.
Désormais, les dispositions de la loi du 2 juillet 1996, reprises dans l'article L.465-3,
prévoient que les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de toutes
les infractions définies aux articles L.465-1 et L.465-2. Il est donc nécessaire d'établir -
conformément aux dispositions de l'article 121-224(*) du Code pénal- que les faits ont été
commis par les organes ou représentants de la personne morale agissant pour son compte. En
outre, la responsabilité de la personne morale n'exclut pas celle des personnes physiques
auteurs ou complices des mêmes faits
Le principe de spécialité qui s'appliquait alors, n'a plus lieu d'être aujourd'hui, et il en résulte
qu'il n'est plus nécessaire qu'un texte particulier prévoit la responsabilité des personnes
morales en cas d'infraction. Ce principe de généralité de la responsabilité des personnes
morales, vient ainsi faciliter les possibles actions répressives contre les sociétés.
Ce dispositif peut cependant s'avérer néfaste pour l'entreprise, particulièrement pour son
personnel. Condamner la société à une peine d'amende, équivaut à mettre en péril toute la
structure financière et le fonctionnement de celle-ci.
Répression : https://www.memoireonline.com/01/14/8437/L-incrimination-du-delit-d-initie-
en-France-Atouts-et-faiblesses-d-une-repression.html
La réponse pénale face aux actes de délinquance économique et financière reste bien souvent
en deçà de ce qu'elle devrait être. Il apparaît en effet que la répression des individus
poursuivis pour de tels actes, s'avère moindre, voire nulle, parallèlement à la tendance
fortement répressive ou punitive des pouvoirs publics envers des actes de délinquance de
proximité. D'après M.Pierre LASCOUMES, il existe une « euphémisation sociale des
transgressions de la criminalité économique » qui « contraste avec la dramatisation d'autres
formes de délinquance ». Nous pouvons dès lors nous interroger sur les raisons pour
lesquelles il existe cet adoucissement répressif en matière de criminalité financière,
notamment pour le délit d'initié. Deux possibilités seront envisagées dans cette partie, tout
d'abord sur la dualité des sanctions pouvant être prononcées à l'égard des initiés, mais
également sur les enjeux situationnels gravitant autour de ce délit.
Or, il existe un principe en droit, le principe de « non bis in idem ». Cet adage latin est un
principe classique de la procédure pénale, déjà connu du droit romain, selon lequel nul ne peut
être poursuivi ou puni pénalement deux fois en raison des mêmes faits. Ce principe entraîne
ainsi l'impossibilité pour une personne de se voir infliger deux sanctions pour un même acte
délictueux. Cette règle qui répond à une double exigence d'équité et de sécurité juridique, est
reconnue par la plupart des systèmes juridiques. En France, elle figure notamment à l'article
368 du Code de procédure pénale et le Conseil d'Etat considère qu'elle fait partie des principes
à valeur constitutionnelle. Elle est également consacrée au niveau international, notamment
par le protocole n° 7 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des
libertés fondamentales, en date du 22 novembre 1984. Elle figure enfin dans la Charte des
droits fondamentaux de l'Union européenne.
Ce cumul de sanctions est incompatible avec le principe non bis in idem, lequel s'oppose à un
cumul des sanctions de différentes poursuites concernant la même infraction. Le fondement
de ce principe réside dans l'intérêt de l'accusé de connaître qu'il ne sera pas à nouveau
poursuivi pour le même fait. De cette manière sont garantis, comme vu précédemment,
l'exigence générale d'équité, la sécurité juridique et les droits de la défense avant le procès.
De plus, nous relèverons que la sanction administrative remplit une fonction distincte de la
fonction pénale. L'AMF utilise son pouvoir répressif comme moyen de régulation. Le but de
l'amende étant de respecter le bon équilibre des marchés financiers et non pas de maintenir
l'ordre public. Saisi, le conseil constitutionnel a précisé dans sa décision du 28 juillet
198927(*) que « si l'éventualité d'une double procédure peut effectivement conduire à un cumul
de sanctions, le principe implique qu'en tout état de cause, le montant global des sanctions
éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevée de l'une des sanctions
encourues » et qu « il appartiendra aux autorités administratives et judiciaires compétentes
de veiller au respect de cette exigence ».
Ainsi, le conseil est parvenu en fait, à des résultats équivalents à ceux qu'engendraient une
application du principe non bis in idem, entre sanctions de nature différente, venant
sanctionner le même acte.
C'est pour répondre à ces questions, que le législateur, sept ans après la décision du conseil
constitutionnel, a prévu la possibilité de non cumul entre sanctions pénales et administratives
de même type (pécuniaire). En effet, la loi du 2 juillet 1996, modifiant l'ordonnance du 28
septembre 1967, en admettant en même temps qu'une sanction pénale et une sanction
administrative peuvent être appelées à réprimer les mêmes faits, ou des faits connexes, prévoit
dans l'art. 9-3 que « lorsque la COB a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive
avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes,
celui-ci peut ordonner que la sanction pécuniaire s'impute sur l'amende qu'il prononce ».
Par ce moyen, le législateur a exclu indirectement une partie de la sanction pénale, puisqu'il a
laissé la faculté au juge, le soin d'imputer ou pas la sanction administrative sur la sanction
pénale.
Par conséquent, ce cumul des poursuites pour des faits identiques porte en germe un risque de
confusion et de contradiction quant aux décisions prises par la justice pénale et l'AMF, les
deux instances risquant de se prononcer en même temps en rendant deux décisions
contradictoires et ce, même si les incriminations pénales et administratives se sont
rapprochées notamment quant à la définition du délit d'initié.
Par ailleurs, ce cumul risque de ne pas être admis par la Cour européenne des droits de
l'homme. En effet, dans l'arrêt « GRADINGER c/ Autriche du 23 octobre 1995, relatif à un
accident de la route, la Cour déclare qu'elle « n'ignore pas que les dispositions en cause se
distinguent non seulement sur le plan de l'appellation des infractions mais aussi sur celui,
plus fondamental de leur nature et de leur but. « Elle relève en outre que l'infraction punie »
par le code de la route « ne représente qu'un aspect du délit sanctionné » par le Code pénal.
« Néanmoins, les deux décisions litigieuses se fondent sur le même comportement. Partant, il
y a eu violation de l'art. 4 du protocole n°7 28(*)». Ainsi, comme la loi prévoit un cumul des
sanctions pécuniaires, d'une part pénales, d'autre part administratives, la question qui se pose
est, quel est l'intérêt de cette double procédure, notamment quand elle aboutit à des sanctions
de même type ?
Dans un arrêt récent du 9 mars 2006, la Cour de justice des Communautés européennes est
venue confirmer cette conception. Cette affaire concernait un ressortissant belge, qui avait été
condamné en Norvège pour importation illégale de stupéfiants à une peine de cinq ans
d'emprisonnement. Après avoir purgé sa peine, il était retourné dans son pays, où il a été
poursuivi pour exportation illégale de stupéfiants. La Cour de Justice a estimé que le
principe « non bis in idem » était applicable en l'espèce, étant donné que l'importation et
l'exportation des mêmes stupéfiants constituaient des faits identiques, indépendamment de
leur qualification juridique. Par cet arrêt, la Cour de justice a donc estimé que la notion de
« mêmes faits » « vise la seule matérialité des faits en cause, à l'exclusion de leur
qualification juridique ».
Cette non application du principe non bis in idem, entraîne des conséquences préjudiciables
quant à la répression du délit d'initié. Il apparaît en effet, que cette possibilité de condamner
deux fois pour le même acte délictueux une personne soupçonnée d'avoir commis un délit
d'initié, crée, au contraire de ce que l'on pourrait croire, un adoucissement de la répression. La
raison de cet adoucissement est simple : la sanction prononcée par l'AMF intervient le plus
souvent avant la décision du juge pénal ; il ne restera dans la plupart des cas, que la possibilité
pour le juge répressif d'aligner sa répression sur celle de l'AMF, et d'imputer l'amende sur le
montant fixé par l'AMF. D'où une exclusion quasi-systématique de la répression pénale, face
aux décisions de l'organe administratif. Rares sont les cas ou le jugement du tribunal
correctionnel intervient avant la décision de l'AMF, mais même dans un tel cas, la tendance
répressive est légère. La sanction privilégiée restera donc l'amende ; une amende qui peut
aller jusqu'au décuple du profit engendré. Mais une telle sanction, lourde en apparence pour le
commun des mortels, ne dissuade pas ces délinquants en « col blanc » - qui brassent des
millions d'euros quotidiennement- de commettre ce délit.
La nécessité de l'organe administratif, spécialisé dans la détection des fraudes dans le domaine
boursier ne doit pas être remis en cause. Cependant, afin d'apporter une réponse ferme à ces
comportements délictueux, il apparaît opportun de se questionner sur la légitimité du pouvoir
de sanction de l'AMF. Ne vaudrait-il pas mieux laisser la répression au juge pénal29(*), tout en
gardant l'organe administratif en tant qu'enquêteur spécialisé dans un domaine
particulièrement complexe ?
Il ressort donc de l'étude de la jurisprudence en matière de délit d'initié, que les personnes
poursuivies pour de tels actes, se voient infliger dans la majorité des cas, des sanctions
pécuniaires. Or, pour que la dissuasion de commettre un délit -objectif de la politique pénale
de chaque Etat- soit effective, il apparaît nécessaire de punir des individus en appliquant à
leur égard des peines d'emprisonnement ferme. Une telle sanction devrait mettre un frein à
l'attrait toujours plus poussé de ces délinquants d'affaire pour l'argent ; des délinquants qui,
pour satisfaire leur appétit d'argent facile, usent et abusent des privilèges que leur procure leur
fonction.
Selon M.Pierre KOPP30(*), la population qui enfreint ces lois du marché « n'a pas forte
appétence pour le risque ». Pour ce dernier, la répression des actes commis par les individus
constitue le premier vecteur d'action de la politique criminelle. Il suppose dès lors « qu'un
individu décidé à s'engager dans une telle activité pèse le bien-fondé de son attitude en
fonction du gain qu'il espère obtenir, de la probabilité qu'il a d'être arrêté, de l'amende et de
la durée de prison qu'il encourt, de la durée de l'emprisonnement et de la valeur négative
qu'il attribue au temps passé en prison ». Pour cet auteur, la politique criminelle permet de
recalibrer les choix des criminels en leur imposant des sanctions qui rendent le crime moins
attractif. Dans le cadre du délit d'initié, la personne qui commet le délit engendre des
bénéfices colossaux, pour un minimum de risques pénaux. Il y a donc minimisation des
risques pour une maximisation des profits.
https://www.lefigaro.fr/economie/le-scan-eco/explicateur/2015/08/26/29004-
20150826ARTFIG00111-comment-se-deroule-une-enquete-pour-delit-d-
initie-en-france.php
Souvent, les initiés ne travaillent pas dans la société concernée mais gravitent autour,
dans des cercles secondaires. Par exemple, des avocats mandatés pour une opération
qui ont trop parlé lors d'une partie de golf. Des personnes présentes ont utilisé
l'information pour réaliser des profits sur les marchés.
C'est le secrétaire général de l'AMF qui décide, lors d'une anomalie, d'une plainte ou
d'une demande des autorités étrangères, d'ouvrir une enquête, confiée à un binôme
d'enquêteurs choisis parmi la trentaine qui travaillent à l'AMF. Un tiers vient du
secteur public (magistrats et juristes, cadres de la Banque de France, inspecteurs des
impôts, policiers...), deux tiers du privé (avocats, auditeurs, professionnels des
marchés, scientifiques...). Ils analysent les relevés bancaires et téléphoniques, les
enregistrements de salles de marché... puis convoquent suspects et témoins lors
d'audiences qui peuvent durer une heure comme deux jours. Ce n'est pas une garde à
vue: les personnes ne sont pas obligées de venir ni de rester, mais peuvent être
sanctionnées pour entrave au bon déroulement de l'enquête. «Outre les fréquentes
ramifications à l'international, la grande difficulté des affaires d'initiés est qu'il n'y a
jamais d'aveu», souligne Sophie Baranger. «Nous devons construire un faisceau
d'indices pour montrer que l'intervention sur le marché ne peut s'expliquer que par la
détention de l'information».
Au bout de deux ans d'enquête en moyenne, les inspecteurs présentent leur rapport
au Collège de l'AMF, qui décide des suites à donner. Sur les 68 enquêtes terminées en
2014, dont il faut soustraire 41 du ressort des autorités étrangères, 9 ont été classées
sans suite, 12 ont donné lieu à l'envoi de lettres d'observation, et 10 sont allées jusqu'à
la notification de griefs, première étape avant la sanction. Le dossier passe aux mains
de la Commission des sanctions, le «juge» de l'AMF. Pendant un an, l'un de ses
membres se forge un avis sur l'affaire. C'est donc au bout de trois ans que toutes les
personnes impliquées se retrouvent en séance publique: personnes mises en cause,
enquêteurs, représentant du Collège... chacun argumente sur les griefs et les
sanctions que la Commission devrait retenir. Un mois après, elle publie sa décision.
En 2014, elle a infligé 79 amendes allant de 5000 euros à 8 millions d'euros, pour un
total de presque 33 millions d'euros. Treize étaient assorties d'une sanction
disciplinaire (3 interdictions définitives d'exercer, 5 interdictions temporaires, 4
blâmes et 1 avertissement).
L’opération d’initié est le fait de toute personne qui, de par ses fonctions ou les contacts entretenus,
réalise une opération boursière au vu des informations non publiques2 . Ce comportement porte en
effet une atteinte grave à la qualité d’information et au principe de l’égalité de traitement, conditions
essentielles de la transparence nécessaires à l’efficience des marchés3 . Cela veut dire que l’usage de
ces informations nuit à l’intérêt du marché en ce qu’il rompt l’égalité d’accès à l’information entre
tous les acteurs. Le fondement de l’efficacité opérationnelle des marchés en est affecté dans la
mesure où la libre confrontation de l’offre et de la demande ne peut plus produire un prix qui reflète
fidèlement le marché. De plus, l’efficience informationnelle suppose que tous les acteurs du marché
aient accès dans les mêmes conditions à l’information, or, si lorsque l’un des acteurs du marché use
d’une information qu’il est le seul à détenir, il fausse la circulation de l’information. L’avantage
informationnel des initiés peut altérer la confiance des investisseurs non-initiés et entrainé des
répercussions néfastes sur marché. Une large partie des économistes s’étend pour considérer que le
délit d’initié nuit au bon fonctionnement des marchés financiers
Pour d’autres au contraire le délit d’initié ne produit pas d’effets économiques négatifs réels, il est en
effet contesté que « les transactions d’initiés soient économiquement néfastes ou qu’elles affectent
négativement la distribution1 ». L’économiste Henry G. Manne est même allé jusqu'à considérer,
dans deux études et à 30 ans d’intervalle, que les opérations d’initiés stimulaient le marché, et même
que le profit tiré d’une opération d’initié soit le « seul moyen de compensation effectif aux services
rendus par les entrepreneurs dans les grandes sociétés ». Pour le même auteur, les profits réalisés
par l’initié « ne portent préjudice à personne ». Aujourd’hui encore, le débat fait rage, surtout aux
Etats-Unis où l’on cherche à établir une cohérence entre les solutions législatives et
jurisprudentielles. b :
Fondements juridiques
Au Maroc, la France et dans la grande majorité des pays sanctionnant le délit d’initié, la défense de
l’égalité des investisseurs face à l’information est au fondement de la sanction. L’exploitation, directe
ou indirecte, d’une information détenue par un initié rompt l’égalité formelle entre les intervenants
en ce qui concerne l’information qu’ils détiennent. Si l’égalité informationnelle réelle des
investisseurs ne peut être imposée, la condamnation du comportement qui consiste à fausser la
circulation de l’information participe en revanche de la protection du principe de transparence. Aussi
la prohibition de l’opération vient-elle tout bonnement marquer la limite du toléré et du tolérable
dans l’exploitation en bourse de l’inégalité d’information. « La philosophie égalitaire anime
incontestablement l’interdit, en France comme dans l’immense majorité des pats qui l’ont édicté ».
Aussi le fondement du principe de l’égalité de traitement des investisseurs face à l’information est-il
le plus adéquat pour justifier la sanction du délit d’initié et faire du principe de transparence un
principe à valeur impérative. Les considérants introductifs de la directive européenne du 13
novembre 19892 s’inscrivent exactement dans cette perspective : « Considérant que le bon
fonctionnement du marché (...) est dans une large mesure tributaire de la confiance que celui-ci
inspire aux investisseurs, considérant que cette confiance repose, entre autre, sur la garantie donnée
aux investisseurs qu’ils sont placés sur un pied d’égalité et qu’ils seront protégés contre l’utilisation
illicite de l’information privilégiée, considérant que les opérations d’initiés en raison du fait qu’elles
apportent des avantages à certains investisseurs par rapport aux autre, sont de nature à remettre en
question cette confiance et peuvent de ce fait porter atteinte au bon fonctionnement du marché.,
considérant dés lors qu’il convient de prendre les mesures nécessaires pour lutter contre les
opérations en cause ». Le délit d’initié porte ainsi atteinte à l’intérêt du marché qui apparait comme
un intérêt général à protéger, ce qui justifie la nature impérative de la sanction prévue1 .
https://www.cairn.info/revue-d-economie-financiere-2018-1-page-193.htm
DÉTECTION ET SANCTION.
Pour qu’il y ait des moyens accordés à la lutte contre les infractions, encore faut-il qu’il y ait un
préjudice 6 causé par l’action prohibée. Du point de vue économique, en référence au modèle de
Becker (1968) et à son développement par Polinsky et Shavell (2000 et 2007), le bénéfice de la
dissuasion repose sur la réduction de l’externalité négative engendrée par certaines actions. Or, dans
le cas des opérations d’initiés, l’existence d’un préjudice est débattue. Voyons tout d’abord les
arguments selon lesquels les opérations d’initiés ne génèrent pas de préjudice. L’argument principal
est que le marché financier est impersonnel. Autrement dit, un investisseur non informé peut
acheter des valeurs à un initié ou non. Supposons, par exemple, que la transaction se fasse la veille
de la révélation d’une information qui joue négativement sur le cours de la valeur. L’investisseur
subit une perte et le vendeur (initié ou non) évite une perte. Il n’y a pas de raison de penser que
l’investisseur ait subi un dommage directement causé par une opération d’initié, dans la mesure où il
aurait pu acheter les valeurs à un non-initié. Un autre argument est que l’information transite par les
échanges sur les marchés financiers, et ces échanges influencent les prix. Aussi, réaliser des
transactions avec des opérateurs initiés renforcerait l’efficience informationnelle des marchés, par
leurs choix de vendre ou d’acheter. Manne (1966) voit également les opérations d’initiés comme un
mode de rémunération 7 des « managers » à la tête des entreprises. Si l’existence d’un préjudice
causé directement par les opérations d’initiés est discutable, de nombreux auteurs ont mis en
évidence théoriquement et empiriquement l’existence d’un préjudice pour la société dans son
ensemble. Ainsi Fishman et Hagerty (1992) montrent que sous certaines conditions, les opérations
d’initiés réduisent l’efficience informationnelle des marchés boursiers, en déformant la distribution
de l’information et en réduisant les incitations des traders (non-initiés) à acquérir cette information.
Manove (1989) identifie un problème d’antisélection en présence d’opérations d’initiés. Il y a
asymétrie d’information entre les investisseurs initiés et non informés. Les investisseurs non
informés doivent prendre en compte le risque que le cours de l’action soit par exemple surévalué s’ils
envisagent de se porter acquéreur. Les investisseurs non informés sophistiqués vont être disposés à
payer un prix plus faible pour l’action. Par conséquent, le financement par le marché financier sera
plus coûteux pour les firmes (Akerlof, 1970). Autrement dit, les opérations d’initiés affectent le bon
fonctionnement des marchés financiers 8 . Aussi la réglementation du délit d’initié peut atténuer ce
problème de sélection adverse et diminuer le coût du capital. Plusieurs articles empiriques 9
obtiennent des résultats dans ce sens, dont Easley et O’Hara (2004), Beny (2005), Fernandes et
Ferreira (2009). Les différentes modalités de la réglementation des opérations d’initiés sont discutées
dans la suite de l’article.
DÉTECTION ET SANCTION La théorie de la mise en œuvre publique du droit adopte comme objectif la
maximisation du bien-être social, c’est-à-dire la somme des utilités des individus qui composent la
société – individus qui respectent ou non la loi (Polinsky et Shavell, 2000 et 2007 ; Langlais et
Obidzinski, 2017). Cet objectif10 permet de définir une politique « socialement » optimale de
contrôle des activités générant une externalité négative. Dans notre cas, les opérations d’initiés
génèrent un gain11 (pour ceux qui les réalisent), mais imposent une externalité négative (le
préjudice, défini dans la première section) et la détection/ sanction de cette activité est coûteuse.
Nous choisissons la grille d’analyse proposée par cette théorie12 pour l’analyse de l’efficacité de la
répression des opérations d’initiés. L’une des justifications principales du rôle de l’AMF en matière de
répression des infractions boursières est son expertise dans une matière complexe et innovante.
Cette expertise permet ainsi théoriquement de favoriser la détection des infractions financières sur
les marchés boursiers. Si l’on s’en réfère aux chiffres en matière de décision par la Commission des
sanctions de l’AMF en 201613, la Commission des sanctions a rendu seize décisions (ayant abouti au
prononcé de trentedeux sanctions) à l’égard des professionnels placés sous son autorité ou à l’égard
de toute personne ayant commis ou tenté de commettre un manquement à la réglementation
relative aux abus de marché. 21 % des manquements sanctionnés correspondent à des
manquements d’initiés14. Ce chiffre est difficilement interprétable en l’état. Pour avoir une idée de
la probabilité de détection, il faudrait avoir une idée du nombre de manquements effectivement
réalisés. Par ailleurs, l’AMF est dotée d’une capacité d’amende financière significative. La loi n° 2010-
1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière a fortement augmenté le plafond des
sanctions financières. Les professionnels contrôlés par l’AMF tels que les prestataires de services
d’investissement ou les sociétés de gestion risquent ainsi un maximum de 100 M A ou le décuple du
montant des profits éventuellement réalisés, et ce quelle que soit la nature des faits reprochés. La loi
du 9 décembre 2016 prévoit que la sanction peut atteindre jusqu’à 15 % du chiffre d’affaires annuel
total de la personne morale sanctionnée. Pour une personne physique placée sous l’autorité ou
agissant pour le compte de professionnels, ce montant maximal s’élève à 15 M A ou décuple du
montant des profits éventuellement réalisés, si un abus de marché lui est reproché. En 2016, selon le
rapport annuel de l’AMF, les trente-deux sanctions monétaires vont « de 5 000 euros à 2 000 000
d’euros, pour un montant total de 9 725 000 euros, réparties entre dix-sept personnes morales et
quinze personnes physiques ». Cependant l’importance des sommes en jeu ne doit pas faire oublier
deux éléments indispensables du modèle de Becker (1968) dans sa version la plus simple. La décision
d’un individu de commettre une infraction dépend des bénéfices qu’il en escompte relativement à
l’amende anticipée (Garoupa, 1997 ; Polinsky et Shavell, 2000). Aussi le montant attendu de la
sanction doit être comparé aux gains réalisés. Ce montant correspond à la sanction multipliée par la
probabilité de détection. Prenons un exemple numérique. Supposons que la sanction soit égale au
décuple du gain. Si la probabilité de détection est inférieure à 0,10, le bénéfice de l’infraction net de
la sanction anticipé est positif. Dans ce cas, l’individu neutre au risque n’est pas dissuadé de réaliser
une opération d’initié (si l’occasion se présente) car le gain excède la sanction anticipée. On
comprend bien que la tentation de commettre l’opération d’initié est plus grande lorsque la
probabilité de détection de l’infraction est proche de zéro et donc l’amende anticipée faible. Lorsque
la probabilité de détection est faible, l’amende doit donc très largement dépasser le gain retiré de
l’opération d’initié. De plus, la menace que représente l’amende dépend du délai entre la réalisation
de la fraude et la sanction. En effet, on suppose généralement que les individus attribuent un poids
plus faible (en termes d’utilité) aux revenus futurs, par comparaison aux revenus aujourd’hui15. Ils
font preuve d’une préférence pour le présent, qui peut être plus ou moins importante selon les
individus. Ainsi plus la décision de sanction est éloignée du moment de la réalisation éventuelle
d’une infraction, moins la désutilité produite par l’amende est importante, ce qui peut atténuer
fortement l’aspect dissuasif des sanctions. Cela est un argument en faveur de délais plus courts,
objectif que peut remplir, potentiellement plus facilement, une autorité ayant des contraintes
procédurales atténuées.
Les victimes sont en général rassurées quand leur avocat leur répond que le préjudice n’est pas une
notion juridique, mais économique ; et qu’ils sont mieux places pour le déterminer. Si la France a
plutôt été précurseur dans le domaine boursier, notamment pour la procédure de sanction, la
réparation reste délaissée. La jurisprudence a pris une position assez claire. L’arrêt du 9 mars 2010
qui établit que l’on ne peut invoquer que la « perte de chance3 » ; mais cette jurisprudence n’a fait
qu’ébaucher le sujet. Les réponses à ces questions dépendront toujours d’une analyse économique la
plus fine possible, de la détermination aussi précise que possible du préjudice «réel», par opposition
au préjudice «estimé » sur la base de règles juridiques parfois inadaptées. La notion de « perte de
chance» est certes très utile, très intelligente, mais elle a été ́ inventée pour calculer l’incalculable et
elle ne doit pas faire oublier que le but doit systématiquement être de se rapprocher le plus possible
de la vérité́. Le domaine du droit boursier est un domaine dans lequel les juges s’attachent plus au
lien de causalité́ qu’au préjudice. C’est pourquoi on préfère remplacer le traditionnel
«faute/préjudice/lien de causalité́ » par « faute/lien de causalité́/préjudice » En outre, et en ce qui
concerne l’indemnisation de l’abus de marché repose sur le lien particulier existant entre la société ́
et son actionnaire : l’actionnaire doit-il être considèré comme un tiers à la société ́ ou, au contraire,
en fait-il partie ? Deux principaux responsables peuvent être poursuivis par les victimes d’un abus de
marché. Le responsable naturel d’un abus de marché qui est le dirigeant. C’est la personne la plus
évidente auprès de laquelle demander indemnisation mais ce n’est pas forcement celle vers laquelle
les investisseurs lésés vont se tourner en premier, surtout s’ils sont nombreux, car ce n’est pas
nécessairement la personne la plus solvable. Il est également possible de poursuivre la personne
morale, l’émetteur luimême. Il n’en demeure pas moins de soulever que le régime du délit d’initié
présente un caractère dérogatoire. Ce caractère est déduit de l’élargissement des conditions de
constitutions de partie civile en matière de délit d’initié qui sert à ce qu’on appelle l’ordre public
financier de direction1 . L’élargissement des conditions de constitutions de partie civile en cas de
délit d’initié renforce la nature impérative du principe de transparence2 . A travers cette question, le
droit boursier donne à l’intérêt du marché, partant au principe de transparence, une valeur
supérieure. Dérogeant au droit commun de la responsabilité des dirigeants sociaux, l’arrêt du 11
décembre 20002 reconnait l’existence, pour les actionnaires d’une société dont l’un des dirigeants a
commis un délit d’initié, d’un préjudice distinct de celui de ma société. Comment obtenir donc la
réparation ? Le système français actuel offre deux principales voies de recours : la voie civile et la
voie pénale. La voie civile nécessite de démontrer la faute, le lien de causalité ́, le préjudice comme
jadis cité. La preuve est compliquée à apporter, et nécessite des moyens d’investigation qui, s’ils ne
sont pas réservés à l’action pénale, sont beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre dans une action
civile. Dans le procès pénal, la difficulté ́ ne tient plus à l’établissement de la preuve. En revanche,
comme la direction du procès est confiée à l’action publique, d’une certaine manière, le plaignant est
écarté de la procédure ; il ne la contrôle plus. En tant que partie civile, il bénéficie, le cas échéant,
d’une indemnisation à l’issue de la procédure, mais il n’y participe que de façon accessoire. L’objet
premier de cette procédure n’est pas l’indemnisation des victimes des abus de marché.
https://www.afep.com/uploads/medias/documents/Prevention_des_delits_d_inities_0708.
pdf !!!!!!!!!!!!!!!!!!!
AU MAROC : https://jurismaroc.vraiforum.com/t615-Le-Delit-d-initie.htm
Le délit d'initié est une infraction pénale fréquente dans le milieu boursier commise par une
personne nommée " l'initié ". Celui-ci exécute des transactions boursières sur la base
d'informations dont ne disposent pas les autres, c.à.d. qu'il a un avantage concurrentiel sur les
autres mais dont l'origine est illicite. En d'autres termes, le spéculateur est sûr de gagner.
Au Maroc, le délit d'initié est régi par le Dahir portant loi n° 1-93-212 relatif au Conseil
Déontologique des Valeurs Mobilières (CDVM) et aux informations exigées des personnes
morales faisant appel public à l'épargne.
Aux termes de l'article 25 de ce même Dahir, le délit d'initié est le fait pour une " personne
disposant dans l'exercice de sa profession ou de ses fonctions, d'informations privilégiées et qui les
aura utilisées pour réaliser ou permettre sciemment de réaliser sur le marché soit directement soit
par personne interposée, une ou plusieurs opération ".
Est considérée comme " information privilégiée " selon le même article " toute information relative
à la marche technique, commerciale ou financière d'un émetteur ou aux perspectives d'évolution
d'une valeur mobilière, encore inconnue du public et susceptible d'affecter la décision d'un
investisseur ".
Les personnes susceptibles d'être en situation d'initié sont nombreuses. On peut toutefois
distinguer entre les " initiés permanents " et les " initiés occasionnels ".
Les personnes en position " d'initiés permanents " sont des personnes qui, de par leur position ou
leur fonction, ont accès de façon régulière à des informations privilégiées. Il peut s'agir des
dirigeants d'une société cotée ou d'une de ses filiales, ainsi que de toutes personnes participant
habituellement au processus d'établissement des comptes de la société cotée.
Les personnes en position " d'initiés occasionnels " sont celles qui bénéficient d'informations
privilégiées à l'occasion de l'exercice de leur profession ou de leur fonction. Ces personnes peuvent
appartenir à la société cotée ou entretenir avec elle uniquement des relations professionnelles. Il
peut s'agir en particulier, des partenaires contractuels, des avocats ou conseillers intervenant dans
une négociation ou une décision importante sur la situation de la société cotée, ou dans des
opérations financières en préparation.
Les agissements de ces initiés sont réprimés sur le plan pénal par l'emprisonnement de trois mois à
deux ans et d'une amende pouvant atteindre le quintuple du profit éventuellement réalisé, sans
qu'elle puisse être inférieure à 200 000 dirhams, ou de l'une de ces peines seulement.
Cette sanction est également valable pour toute personne possédant " en connaissance de cause
des informations privilégiées sur les perspectives ou la situation d'une société dont les titres sont
cotés à la Bourse des valeurs ou sur les perspectives d'évolution d'une valeur mobilière, qui réalise
ou permet de réaliser, directement ou indirectement, une opération ou communique à un tiers des
informations, avant que le public ait connaissance de ces dernières ".
Les membres du conseil d'administration du CDVM ainsi que son personnel engagent également
leur responsabilité s'ils réalisent - directement ou par personne interposée - des opérations sur les
titres d'une personne morale ayant présenté un document d'information au visa du CDVM.
Ainsi, encourent-ils la révocation lorsque les transactions auraient été réalisées avant que le
contenu du document d'information n'ait été rendu public (art 30 du Dahir portant loi n° 1-93-
212).
Ce délit permet aux initiateurs de réaliser un profit qui s'entend selon l'article 25 comme étant la
différence entre le prix auquel l'opération initiale a été faite et le cours moyen du titre constaté
pendant les 15 jours de bourse suivant soit la diffusion de l'information privilégiée soit la
rectification des informations fausses ou trompeuses.
La constatation de ces infractions est faite sur la base des enquêtes réalisées par le CDVM à travers
ses agents spécialisés ou encore par les agents de police judiciaire. Ceux-ci sont autorisés à
convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations en rapport avec
leur mission.
En effet, le CDVM est habilité à réaliser des enquêtes auprès des sociétés de bourse, des OPCVM,
des fonds de placements collectifs en titrisation, du dépositaire central (MAROCLEAR) ainsi que des
organismes de placement en capital risque (art 24 du Dahir portant loi n° 1-93-212).
https://vogel-academy.fr/PDF/COMPLIANCE/Extrait_ouvrage.pdf :
Les délits d’initiés, qu’ils soient commis par usage d’une information privilégiée lors d’une
opération ou par communication indue d’une telle information, peuvent être sanctionnés
pénalement ou administrativement.
Le juge pénal peut sanctionner le délit comme sa tentative par une peine d’emprisonnement
de cinq années, portée à dix années lorsque le délit est commis en bande organisée. Il peut
aussi prononcer une amende de 100 millions d’euro pour les personnes physiques, et de 500
millions d’euro pour les personnes morales. Ce maximum peut être dépassé pour atteindre
jusqu’à dix fois le montant de l’avantage retiré du délit, qui peut être un profit ou une perte
évitée, sans que le montant de l’amende puisse être inférieur à cet avantage. Enfin, pour les
personnes morales, l’amende peut être portée à 15 % de leur chiffre d’affaires annuel total.
Les peines complémentaires prévues par l’article 131-39 du Code pénal sont également
applicables, notamment l’exclusion des marchés publics, l’interdiction de procéder à une offre
au public de titres financiers ou de faire admettre ses titres financiers aux négociations sur un
marché réglementé ou celle de percevoir toute aide publique attribuée par l’Etat, les
collectivités territoriales, leurs établissements ou leurs groupements ainsi que toute aide
financière versée par une personne privée chargée d’une mission de service public. Le délai
de prescription de l’action est fixé à 6 ans. Il court à compter de la commission du délit.
L’AMF, quant à elle, inflige des sanctions disciplinaires et pécuniaires, qui peuvent s’élever à
15 millions d’euro pour les personnes physiques et 100 millions d’euro pour les personnes
morales. A nouveau, ces montants peuvent aussi égaler le décuple des profits réalisés. La
prescription applicable aux manquements susceptibles de sanction par la Commission des
sanctions de l’AMF est passée de 3 à 6 ans depuis la loi PACTE du 22 mai 2019.
II. Absence de cumul des sanctions pénales et administratives A RETENIR Avant la loi
du 20 juin 2016, une même personne pouvait être poursuivie pour les mêmes faits devant le
juge pénal et l’Autorité des marchés financiers (AMF). Cette faculté de cumul des poursuites
semblait se heurter au principe non bis in idem selon lequel «nul ne peut être poursuivi ou
puni pénalement à raison des mêmes faits», consacré à l’article 368 du Code pénal et qui
constitue un principe général du droit. Longtemps, les juridictions nationales ont pourtant
considéré que le principe non bis in idem ne valait que pour la matière pénale et ne devait
donc pas s’appliquer au cumul des sanctions administratives et pénales dès lors que le
montant global des sanctions ne dépassait pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions
encourues et que le cumul garantissait une sanction «effective, proportionnée et dissuasive».
Cependant, la légalité d’un tel cumul a connu un premier ébranlement en 2014 par l’arrêt
Grande Stevens contre Italie de la Cour européenne des droits de l’Homme, au nom du
principe non bis in idem Le Conseil constitutionnel a achevé de remettre en cause cette double
sanction. Dans une décision du 18 mars 2015, il a estimé que plusieurs articles du Code
monétaire et financier étaient contraires au principe de nécessité des peines et a, ainsi, mis fin
au cumul des répressions pénales (délits d’initiés) et administrative (manquements d’initiés)
en matière financière en s’appuyant sur quatre arguments : - les dispositions contestées
tendent à réprimer les mêmes faits ; - les deux répressions protègent les mêmes intérêts
sociaux ; - les faits sont susceptibles de faire l’objet de sanctions qui ne sont pas de nature
différente ; - les sanctions relèvent toutes deux des juridictions de l’ordre judiciaire. Pour parer à
cette prohibition constitutionnelle, et en la généralisant à tous les abus de marché, l’article 2 de la loi
du 21 juin 2016 élabore un mécanisme d’aiguillage des poursuites administrative ou pénale par
concertation entre l’AMF et le procureur de la République financier. Chacune de ces deux autorités se
voit privée du pouvoir d’engager une poursuite dès lors que l’autre aurait déjà pris cette initiative à
l’encontre de la même personne et pour les mêmes faits. La loi impose à chacune de ces autorités
d’informer l’autre de son intention avant de déclencher la poursuite. L’autorité ainsi informée dispose
d’un délai de deux mois pour faire connaître son intention de poursuivre elle aussi la même personne
pour les mêmes faits (C. mon. fin., art. L 465-3-6). Si l’autorité informée garde le silence pendant ce
délai, cela vaut acceptation de la poursuite par l’autre autorité. Si, au contraire, l’autorité informée fait
savoir qu’elle souhaite aussi engager des poursuites, la première a 15 jours pour lui céder la place ou
pour saisir le procureur général près la Cour d’appel de Paris aux fins de trancher l’opposition. Depuis
lors, de nouvelles décisions de la CEDH ont cependant réintroduit une certaine incertitude, en retenant
qu’un cumul de sanctions administratives et pénales était possible à condition qu’il existe un lien
matériel et temporel suffisamment étroit entre les poursuites (CEDH, 15 nov. 2016 et 6 juin 2019).
Detecter le préjudice :
https://vogel-academy.fr/PDF/COMPLIANCE/Extrait_ouvrage.pdf
I. Le déroulement d’une enquête menée par l’AMF PLAN Nous envisagerons successivement : •
l’enquête et la notification des griefs ; • l’instruction et l’audition. A. Enquête et notification des
griefs A RETENIR L’Autorité des marchés financiers (AMF) dispose d’un département surveillance
composé d’analystes financiers qui traquent les anomalies sur les cours des valeurs cotées en France.
Si une anomalie est repérée ou lorsqu’une plainte ou une demande des autorités - françaises ou
étrangères - a été déposée, le secrétaire général de l’AMF décide d’ouvrir une enquête qui sera
confiée à un binôme d’enquêteurs de l’AMF. Le déroulement des enquêtes est encadré par la Charte
de l’enquête (2017) qui détaille les principes de bonne conduite appliqués par les enquêteurs, ainsi
que les comportements attendus des personnes sollicitées au cours des investigations. L’enquête est
en général confiée à un binôme d’enquêteurs. Selon l’AMF, la diversité d’origine professionnelle des
enquêteurs permet de réunir l’ensemble des compétences techniques et juridiques nécessaires
(auditeurs, comptables, actuaires, avocats, juristes, ingénieurs, magistrats, data scientists, ingénieurs
quants, policiers, inspecteurs des impôts ou de la Banque de France, professionnels de marché, etc.).
Les enquêteurs, qui ne peuvent se voir opposer le secret professionnel, peuvent, en vertu des articles
L. 621-10 et suivants du Code monétaire et financier : - demander la communication de tout
document, quel qu’en soit le support : communiqués des sociétés cotées en bourse, transactions
boursières effectuées, rapports des commissaires aux comptes, courriers, agendas, relevés bancaires
et téléphoniques, enregistrements téléphoniques de salle de marché, demandes internationales, etc.
; - procéder à l’audition de toute personne concernée par l’enquête, qui est en droit de se faire
assister du conseil de son choix ; - accéder aux locaux professionnels ; - effectuer des visites
domiciliaires (y compris dans des lieux privés) au cours desquelles la saisie de documents pourra être
réalisée, sur autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal compétent et en
présence d’un officier de police judiciaire chargé de veiller au respect du secret professionnel et des
droits de la défense. L’entreprise ne doit pas faire obstacle aux investigations menées par les
enquêteurs de l’AMF, sous peine de sanction administrative et/ou pénale : - l’article L. 621-15, II,
sous f) du Code monétaire et financier autorise la Commission des sanctions de l’AMF à sanctionner
toute personne qui « refuse de donner accès à un document, quel qu’en soit le support, et d’en
fournir une copie, refuse de communiquer des informations ou de répondre à une convocation, ou
refuse de donner accès à des locaux professionnels » ; - l’article L. 642-2 du même code punit « d’un
emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euro le fait, pour toute personne, de
mettre obstacle à une mission de contrôle ou d’enquête de l’AMF effectuée dans les conditions
prévues aux articles L. 621-9 à L. 621-9-2 ou de lui communiquer des renseignements inexacts ».
Pour éviter de telles sanctions, les entreprises et leurs personnels doivent donc : - répondre aux
questions posées ou aux demandes de renseignements qui leur sont adressées par les enquêteurs
avec loyauté : ils sont invités à répondre avec diligence, loyauté et clarté à ces demandes et s’efforcer
de fournir des réponses complètes et précises, en communiquant les pièces venant à l’appui de leurs
réponses aux enquêteurs ; - coopérer avec les enquêteurs : ils doivent fournir aux enquêteurs les
coordonnées de tout tiers (commissaire aux comptes, membre du comité d’audit ou du conseil
d’administration, consultant externe, prestataire externe, ancien salarié, conseil dans le cadre de
l’enquête, tierce personne) que les enquêteurs estiment nécessaire ou utile de rencontrer ou
contacter pour l’avancée de leur enquête ; désigner un représentant qui sera l’interlocuteur
privilégié des enquêteurs et sera chargé de transmettre les demandes des enquêteurs aux services
concernés, collecter les informations et procéder aux relances nécessaires ; - communiquer les
documents, les fichiers et les explications demandés dans des délais raisonnables : les documents et
fichiers de réponse doivent également être transmis dans un format facilement exploitable ; -
conserver une attitude neutre, professionnelle et courtoise pendant toute la durée de l’enquête.
Avant de clôturer la phase d’enquête (qui dure en moyenne deux années), l’AMF adresse aux
personnes susceptibles d’être mises en cause un courrier qui expose son analyse sur les éléments de
fait et de droit recueillis au cours des investigations, auquel celles-ci peuvent répondre dans un délai
d’un mois. Les enquêteurs rédigent ensuite un rapport d’enquête indiquant si les faits relevés
peuvent constituer des infractions boursières (manquements administratifs et/ou infraction pénale),
transmis au collège de l’AMF. Le collège de l’AMF décide alors des suites à donner. Il peut classer le
dossier, le transmettre à d’autres autorités, le transmettre au Parquet, ou ouvrir une procédure de
sanction. Le cas échéant, le collège de l’AMF adresse la notification des griefs aux personnes mises en
cause, et transmet le rapport d’enquête, la notification des griefs et les pièces du dossier à la
Commission des sanctions. La procédure entre alors dans sa phase contradictoire.