Generale
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Si le modèle de fluide newtonien décrit bien la très grande majorité des fluides composés de
molécules simples, il existe un bon nombre de fluides, dont certains sont d’usage très courant, qui
ont un comportement sous écoulement plus complexe. La définition d’un fluide newtonien est
assez restrictive : les contraintes de cisaillement sont proportionnelles au gradient de vitesse, ce
qui implique que :
– Dans un écoulement de cisaillement simple, les seules contraintes crées par l’écoulement sont
des contraintes de cisaillement.
– La viscosité est indépendante de la vitesse de cisaillement.
– La viscosité est indépendante du temps et les contraintes s’annulent immédiatement lorsque
l’écoulement est arrêté.
Toute déviation de ces règles est le signe d’un comportement non-newtonien. La description
des ces comportements et leur interprétation en relation avec la structure microscopique du fluide
constitue la discipline appelée rhéologie. Cette discipline est assez récente; elle a connu un
développement considérable avec l’apparition des polymères synthétiques.
Les expériences de Robert Hooke en 1678 ont mené à la loi qui porte son nom et qui constitue
une équation constitutive pour un solide élastique, pour de petites déformations. Cette loi exprime
que la force de traction est proportionnelle à la déformation, soit :
σ=Eε (1.1)
où σ est la contrainte de traction appliquée mesurée en Pascal (force par unité de surface), ε est
la déformation relative, définie comme étant l’allongement du solide divisée par sa longueur
initiale (donc sans dimension), et E le module d’Young, ou module élastique longitudinal,
mesurée en Pascal (abréviation : Pa), et qui est intrinsèque au solide.
En 1687, quelques années après les expériences de Hooke, Issac Newton exprime intui-
tivement dans ses Philosophiae Naturalis Principia Mathematica1 l’idée de viscosité pour un
liquide visqueux: la contrainte appliquée est proportionnelle au gradient de vitesse, et le
coefficient de proportionnalité est la viscosité2. L’équation correspondante s’écrit :
(1.2)
On définit également la viscosité cinématique υ qui est le rapport entre la viscosité dynamique
η et la masse volumique ρ du liquide. Elle est mesurée en m2 s-1 (dans le système CGS, l’unité de
mesure est le Stokes, St en abrégé, avec la correspondance suivante: 1 St = 100 cSt = 10- 4 m2 s-1 =
1 cm2 s-1). Il joue le rôle d’un coefficient de diffusion de la quantité de mouvement à travers les
différentes couches de fluides qui glissent imparfaitement les unes par rapport aux autres lors de
l’écoulement. Dans la suite de l’exposé, nous n’utiliserons que la viscosité dynamique η.
Les vérifications expérimentales n’arrivent que bien plus tard, avec les travaux de Poiseuille en
1856 et de Couette en 1890. L’équation de proportionnalité est ainsi vérifiée pour de
nombreux liquides, que l’on qualifie alors de «newtonien». Historiquement, un liquide newtonien
est donc un liquide non élastique dont la viscosité ne varie pas suivant le gradient de vitesse.
Précisons la signification physique de l’équation . Soit un liquide entre deux plans
parallèles (voir fig. 1.1). Le plan inférieur est fixe, et on exerce sur le plan supérieur une contrainte
σ : le plan supérieur se met alors à une vitesse v. On parle, pour une telle configuration, de
géométrie plan-plan ou de Couette plan.
Fig. 1.1a- Profil de vitesse pour un écoulement de cisaillement simple d’un liquide newtonien entre deux plans
En régime laminaire, le liquide peut être modélisé par une succession de couches infiniment minces
parallèles aux plaques et parallèles les unes aux autres. La déformation du fluide se fait par glissement
successif des couches les unes sur les autres par frottement, sans transport de matière d’une couche à l’autre
mais avec transport de la quantité de mouvement. Les conditions aux limites sont la vitesse nulle sur le plan
inférieur immobile, et la vitesse v sur le plan supérieur.
La déformation γ est le rapport entre la longueur parcourue l(t) par un élément de liquide du plan
supérieur et l’épaisseur e entre les deux plaques (épaisseur appelée entrefer) :
l (t )
(1.3)
e
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
1
Principes mathématiques de la philosophie naturelle.
2
Newton formule l’’hypothèse suivante [Newton, 1687] : « La résistance qui vient du défaut de lubricité des parties
d’un fluide doit être, toutes choses égales, proportionnelle à la vitesse avec laquelle les parties de ce fluide
peuvent être séparées les unes des autres ». La « résistance» est la viscosité, c’est-à-dire la réaction à la contrainte
appliquée, et la « vitesse avec laquelle les parties de ce fluide peuvent être séparées les unes des autres» est le gradient de
vitesse. Le « défaut de lubricité» des couches de fluides, c’est-à-dire le glissement imparfait des couches entres elles,
provient des échanges de quantité de mouvement entre les différentes couches du fluide. Le mot « lubricité» est à
prendre ici dans le sens de « lubrification »...
La déformation γ dépend du temps t puisque le liquide se déforme continûment au cours du
temps : plus l(t) est grand pour e fixé, plus γ est grand; de même plus e est petit pour un même
l(t), plus γ est grand. Le liquide n’arrête cependant pas de se déformer avec le temps. À la place
de la déformation, on s’intéresse donc à une grandeur physique plus pertinente : la déformation par
unité de temps dγ/dt = , que l’on appelle également taux de déformation ou encore taux de
cisaillement5. L’unité SI est le s-1. Le taux de cisaillement n’est autre que la variation de la
vitesse du plan supérieur en fonction de l’épaisseur e: il s’agit donc également du gradient de
vitesse, qui s’écrit v/e. On a donc:
v
(1.4)
e
Le concept est identique pour une couche infiniment mince qui compose le liquide, et on définit
donc un taux de cisaillement local ( y ) v x ( y ) / y . La contrainte σ xy est la contrainte
appliquée par une couche de fluide sur la couche de liquide inférieure. En géométrie plan-plan,
σ xy est constante dans l’épaisseur e par équilibre mécanique entre les différentes couches de
fluide, et par conséquent, à l’état stationnaire, le gradient de vitesse est également constant
dans l’épaisseur e. D’où la relation pour un liquide quelconque en géométrie plan-plan, qui définit
la viscosité de cisaillement η ( ) pour le liquide (constante dans l’épaisseur e en géométrie plan-
plan à l’état stationnaire) :
σ xy = η ( ) . (1.5)
où encore plus explicitement :
xy ( ) v x / y (1.6)
Fig. 1.2– a) Composantes σ xy, σ yy et σ zy. de la contrainte s’exerçant sur une surface dS de normale orientée suivant
l’’axe y. b) Force de contrainte dF s’exerçant sur une surface dS dont la normale n est orientée de façon quelconque.
Pour une force dF de direction quelconque appliquée à la surface dS de normale n (voir fig.
1.2b), la contrainte σn appliquée à dS s’écrit :
σn = σ . n = dF/dS (1.7)
xn xx xy xz nx dF
1 x
yn yx yy yz n y dFy (1.8)
dS dF
zn zx zy zz nz z
σ=τ–pδ (1.9)
L’étude d’un écoulement d’un fluide nécessite de déterminer la relation qu’il existe entre les
contraintes, explicitées par le tenseur τ, et les taux de déformation qui en résultent. Les
déformations sont données par les coefficients du tenseur G des gradients de vitesse :
vi
G Gij (1.10)
x j
Le tenseur G peut être décomposé en deux parties : une partie symétrique Dij, et une partie
antisymétrique ωi j [Guyon e t a l . ( 2001)]. On a alors :
Gij = Dij + ωi j (1.11)
1 v v j 1 v v j
avec Dij i et wij i
2 x j xi 2 x j xi
La partie symétrique Dij est la somme de deux tenseurs: le tenseur diagonal tij,
représentant la variation de volume des éléments du fluide (variation nulle pour un fluide
incompressible), et le tenseur symétrique de trace nulle dij, traduisant les déformations des
éléments de fluide, sans variation de volume. La partie antisymétrique ωij traduit la rotation en
bloc des éléments du fluide (rotation dite pure ou solide). La rotation solide ne faisant pas
intervenir d’interactions entre éléments voisins, elle n’est pas liée aux contraintes appliquées
au fluide. On ne s’intéresse donc qu’à la partie symétrique de G: le tenseur des déformations
D= Di j , qui caractérise la déformation du fluide.
Une équation constitutive d’un fluide est une équation qui relie les tenseurs τ et D, c’est-
à-dire une relation qui relie les contraintes (en dehors des contraintes liées à la pression du
fluide au repos) et les déformations du fluide. L’équation constitutive pour un fluide
newtonien est [Larson (1999)] :
τ=2ηD (1.12)
σ=τ-pδ (1.14)
l’équation du mouvement (pour un fluide compressible ou non) [Guyon e t a l .
( 2001)]:
v
v grad v div F (1.15)
t
Or div div ( p ) div grad p (1.16)
v
v grad v grad p div F (1.17)
t
div ( v ) 0 (1.18)
t
Soit div v = 0 pour un fluide incompressible;
les conditions aux limites.
Dans le cas d’un fluide newtonien, div τ devient [Guyon et al. (2001), Morrison (2001)] :
div v ( ) grad (div v)
3 (1.19)
où ς est la « viscosité de volume », dont les contraintes associées (termes diagonaux du tenseur
τ) correspondent aux variations de volume par compression. Si de plus le fluide est
incompressible (div v = 0), on obtient : div τ = ηΔv. L’équation du mouvement pour un fluide
newtonien incompressible, appelée équation de Navier-Stokes, est donc:
v
( v.grad v ) grad p v F (1.20)
t
Lorsque le nombre de Reynolds Re est petit, on peut négliger le terme non linéaire. En se
plaçant par ailleurs en régime permanent, l’équation de Navier-Stokes se réduit à l’équation de
Stokes:
grad p v F (1.21)
Dans le paragraphe précèdent, nous avons défini la viscosité de cisaillement η résultante des
contraintes de cisaillement. Nous montrons à titre d’information un autre type de défor-
mation: l’élongation, qui nous amène à définir la viscosité élongationnelle. Un écoulement
élongationnel est un écoulement dans lequel les éléments de fluide sont étirés sans rotation ni
cisaillement. La fig. 1.4 montre l’élongation simple d’un matériau dans la direction x.
x(t dt ) x(t ) dx 1 dx
(t ) et
x(t ) x(t ) dt x(t ) (1.22)
1 1
v x x , v y y et v z z
2 2
Le tenseur total des contraintes τ s’écrit donc, pour un fluide newtonien (pour lequel l’équation
constitutive est τ = 2 η D) :
2 0 0
0 0 (1.24)
0 0
Pour un fluide newtonien, d’après les coefficients τij du tenseur des contraintes de
déformation τ, la viscosité élongationnelle ηe vaut:
ηe = 3 η (1.26)
Par contre la viscosité des liquides newtoniens décroît avec la température. On pourra
utiliser entre la température de fusion et le point d’ébullition, la formule de Guzman-
Andrade [Andrade (1930)] :
C2
C1 exp (1.28)
T
où C1 et C2 sont des constantes.
i 1
ij 2 2 1 i
j 1 yi
M
j
m1 / 3 x1 11 / 3 x2 21 / 3 (1.31)
1 K 1
r
s (I.32)
Vs
φ étant la fraction volumique du solide définie par :
V Vs
Pour étendre la validité de l’équation d’Einstein à des concentrations plus élevées, il est
nécessaire de prendre en compte les effets d’interactions entre les sphères. Cela introduit dans
l’équation d’Einstein des termes complémentaires en φ2.
En 1942, De Bruijn (1942) donne une expression de la viscosité relative en prenant compte la
perturbation hydrodynamique due à la présence d’autres particules de la forme :
Intérêt :
Pour les suspensions et les émulsions, la viscosité intrinsèque peut nous renseigner
sur la forme des particules. Par exemple, pour des particules sphériques, on trouve
[ηRed] = 2,5/ ( masse volumique), la relation est autre pour une suspension de
particules ellipsoïdales ou en bâtonnets.
pour les solutions de macromolécules, la viscosité intrinsèque permet de déterminer
la masse molaire moyenne selon la loi de Mark Houwink :
[ red ] K M