Epal Alsic Audras Chanier080211
Epal Alsic Audras Chanier080211
Epal Alsic Audras Chanier080211
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Audras, I. & Chanier, T. (à paraître, 2008). " Observation de la construction d’une compétence interculturelle
dans des groupes exolingues en ligne.". Apprentissage des Langues et Système d'Information et de
Communication (ALSIC), vol. 11. http://alsic.org
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1. Dispositifs de formation à distance et échanges interculturels en ligne
Notre objectif est de caractériser la situation d'échanges interculturels exolingues en groupe en
ligne, en particulier les éléments qui en constituent sa spécificité en termes de visée
pédagogique et de recherche sur l'apprentissage. Rappelons ce qui, pour nous, caractérise ce
type de situation de formation (Audras & Chanier, 2007) :
« Une situation d’Échanges Interculturels Exolingues en Groupe en Ligne (EIEGL) est
une situation dans laquelle des groupes d'apprenants résidant dans des pays différents
sont impliqués dans des tâches de travail à visée interculturelle en groupe à distance,
tâches intégrant des échanges exolingues. Nous privilégions ici les tâches de nature
collaborative. »
Cette définition indique que les phénomènes de nature culturelle ne sont pas considérés
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comme des paramètres à prendre en compte, parmi d'autres, dans une formation orientée vers
l'apprentissage des langues, mais que, au contraire, la compétence interculturelle est l'enjeu
même de l'échange. De plus, cet échange se construit à l'intérieur de groupes rassemblant des
individus de langues maternelles différentes, membres d'institutions différentes, institutions
qui encadrent ce type de formation. En termes de contenu, notre définition est un quasi-
synonyme de celle donnée par O'Dowd et Ritter (2006 : 623), rappelée par Darhower (2007 :
561), au terme "telecollaboration". Mais il s'agit dans ce cas d'un abus de langage car, même
si le type de formation évoquée ici est bien de nature télécollaborative (ainsi que nous le
discuterons plus loin), le terme "télécollaboration" est depuis longtemps utilisé en formation à
distance, sans référence à l'apprentissage des langues ou des cultures.
Le lecteur peut être déjà familier avec les expériences d'échanges exolingues en ligne,
inaugurées dans les années 90 et souvent dénommées "tandem" (en ligne ou "e-tandem")
(Lewis & Walker, 2003, pour une présentation générale). Dans ce cas, les échanges sont
construits autour de dyades, dans laquelle chaque individu est tout à la fois natif d'une langue
et apprend celle de l'autre. Le cadre institutionnel peut être ignoré dans la mesure où la
recherche d'un partenaire se fait de façon autonome, sans que ce partenaire appartienne à une
institution fixe. Enfin, même si la dimension interculturelle est de fait présente dans ce type
d'échange (Stickler & Lewis, 2003), elle n'en constitue pas l'objectif principal.
L'acronyme EIEGL se décline donc en un groupe de mots caractérisant précisément la
situation didactique étudiée. Pour clore cette digression terminologique, signalons que les
chercheurs des universités partenaires impliquées dans le projet de recherche rapporté ici ont
décidé de créer le néologisme "tridem", par souci de référence à l'historique des projets de
2
tandem en langues, en vue de désigner tout à la fois le projet commun élaboré par les 3
institutions et les mini-groupes composés d'apprenants appartenant à chacun des 3
établissements.
L'objectif didactique essentiel étant tourné vers l'interculturel, nous définirons d'abord, dans
cette section, la notion de compétence associée. Nous cernerons ensuite les spécificités des
thématiques de recherche propres aux situations EIEGL. Nous exposerons, dans les sections
suivantes, l'expérience de formation Tridem06.
trouve ainsi posé avec force. Beaucoup de chercheurs anglophones citent Byram (Byram,
1997 ; Byram & Zaratte, 1995) pour préciser les constituants de cette compétence, ou plutôt
"savoirs" (ce mot étant, pour l'auteur anglophone, le correspondant de competence en anglais).
Ces savoirs se déclinent suivant 5 axes : savoir-être, où s'apprécie la posture (attitude)
d'ouverture et de réflexion sur les deux cultures ; savoir-connaissance 1 (knowledge) dans un
sens qui englobent les contenus transmissifs cités précédemment avec une ouverture sur la
connaissance des processus de communication dans l'autre culture ; savoir-comprendre et
savoir-apprendre-et-faire qui mobilisent les habiletés (skills) à comprendre les documents
ou évènements de l'autre culture, à acquérir de nouvelles connaissances à ce propos et à agir
de façon appropriée en situation de communication exolingue ; savoir-s'engager qui fait
appel à des aptitudes d'évaluation critique (critical cultural awareness) des deux cultures et
d'engagement à négocier des compromis pour soi-même et avec les autres.
Cette approche tranche sur de nombreux points avec les visions traditionnelles d'apprentissage
de la culture dans l'enseignement des langues étrangères.
• La culture "cible" n'est plus posée en idéal à atteindre mais l'objectif vise au
développement d'un ensemble de savoirs, savoir être et savoir faire avec des
caractéristiques propres à chaque individu, caractéristiques qui s'appuient sur chacune des
cultures, tout en les dépassant à la recherche d'un équilibre entre deux normes, autrement
1
Byram n'utilise pour cet axe que le mot "savoir". Pour éviter le risque de confusion avec le terme générique,
nous préférons l'étiqueter "savoir-connaissance", dans l'esprit d'une correspondance avec le mot anglais associé
knowledge.
3
dit "interculturel", permettant à l'individu de comprendre et agir dans les deux espaces de
communication.
• Pour atteindre cela, il faut d'abord amener le locuteur natif à réfléchir sur sa propre
culture, à présenter son interprétation à l'interlocuteur de l'autre culture, à négocier alors
une interprétation acceptable par les différents partis à travers une interaction dans
laquelle chacun apporte ses connaissances et ses interrogations. On rapprochera cette
posture de la notion d'éthique de la différence, développée par Tardy et citée par
(Abdallah-Pretceille, 1996 : 154) où il faut comprendre l'autre "dans son altérité
essentielle", ce qui n'implique pas la recherche d'un mimétisme culturel, ni même une
sorte de "compréhension universelle". L'objectif "ce n'est pas chercher à comprendre
totalement toutes les altérités, c'est admettre qu'elles existent et être capable d'en
supporter l'existence, même incomprise, parce qu'incomprise" (Tardy, 1983).
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• Aucune des cultures n'est présentée comme un bloc monolithique. Est mise en avant la
variété des interprétations qu'ont les locuteurs natifs de leur(s) culture(s) au vu de leurs
parcours personnels pluriculturel ou plurilingue ou de leurs propres attitudes critiques. Cet
aspect désavantage la situation de tandem en dyades, où chaque locuteur natif a tendance à
servir de point de repère unique sur sa culture, voire de modèle, au risque du renforcement
des stéréotypes, au profit de l'interaction entre groupes dans laquelle un dispositif
approprié peut laisser apparaître une diversité de points de vue.
• On ne cherche pas l'évitement des conflits au prix de l'aplanissement des différences. Au
contraire, la simple exhortation à la tolérance et au respect de l'autre développé dans un
esprit de relativisme culturel nuit à la profondeur des échanges et à la possibilité de voir
s'effectuer des déplacements de position entre les interlocuteurs. Ainsi l'occurrence de
conflits, souvent appelés "incidents critiques" (Jackson, 2003), ne doit pas être perçue
comme une preuve d'échec dans les situations d'échanges, mais doit faire l'objet d'un
travail pédagogique spécifique (voir (Anquetil , 2004), ou la notion de "éducation au
conflit", ainsi dénommée par (Abdallah-Pretceille, 1996 : 186) dans le cadre de son étude
sur les milieux mettant en contact des individus de cultures différentes).
4
culture and the target culture and use the target language as contact language with people
who use this language as a first language" (Risager cité par Liaw (Liaw, 2006)).
Si dans l'interculture, il est bien question de développement d'un système entre deux autres
(les cultures) avec un chemin d'apprentissage, l'extrémité de ce chemin ne saurait être la
culture "cible", ce qui correspondrait à un processus d'assimilation. La fonction de médiateur
implique un positionnement entre, avec un mouvement de développement des connaissances
sur les deux cultures (y compris donc celle qualifiée de "source"), l'élaboration d'un système
entre ces deux cultures et surtout d'un ensemble d'habiletés permettant de développer ces
connaissances et d'agir comme médiateur.
La compétence interculturelle étant posé comme un objectif en soi, il devient possible de ne
pas systématiquement associer formation en langue et formation interculturelle, de construire
des contrats didactiques dans lesquels les partis n'ont pas nécessairement tous des objectifs de
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développement de compétences en L2, celle-ci étant alors présentée comme une langue de
communication.
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1.2.1. Environnements institutionnels et culturels multiples.
Nous entendons par là le fait que la formation mélange au sein d'un même groupe de travail
des apprenants (et des enseignants / tuteurs) qui appartiennent à des environnements
institutionnels de cultures différentes. Parmi les 10 facteurs listés comme causes potentielles
d'échec dans les échanges interculturels par O'Dowd et Ritter (2006 : 629), cinq sont en
rapport avec la dimension institutionnelle mais n'ont rien de spécifique à son caractère
exolingue : a) niveau d'intégration de la formation dans le cursus général de chaque
institution ; b) dynamique du groupe local (celui préexistant à l'échange au sein d'une même
institution) ; c) façons de coupler les apprenants de chaque institution ; d) relations inter-
enseignants ; e) présentation de la formation dans chaque institution avant la phase
d'échanges.
Cette situation de mixité culturelle (institutionnelle) fait depuis plus de 10 ans l'objet d'études
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l'influence des déséquilibres entre deux publics ayant chacun une langue de référence perçue
différemment par l'autre partie (en termes de prestige, d'attrait, ou d'utilisabilité) (Belz, 2001).
Que penser encore des biais introduits lorsque l'un des publics reste en situation endolingue
(Vogt, 2006 ; Liaw, 2006), entraînant de fait un niveau inférieur de prise de risque dans la
communication, ce qui peut se traduire par une baisse correspondante de son niveau
d'engagement ?
Le travail sur la langue n'est bien sûr pas complètement absent des objectifs pédagogiques.
Par exemple, les attitudes d'étayage linguistiques sont encouragées chez les locuteurs natifs
ou/et les enseignants de langue, mais ne sont pas le premier objectif du travail collaboratif.
Afin d'éviter frustration ou incompréhension au niveau des individus participant à la
formation (Darhower, 2007 : 581), la priorité des objectifs pédagogiques devra être clairement
établie dans le contrat d'apprentissage de départ. La condition minimum nécessaire à assurer
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(2003 : 44), mais que l'auteur étudie sous un autre angle). Cette compétence de gestion est
celle qui fait partie de celles attendues des tuteurs en ligne et que Salmon (2000 : 161) intitule
justement "valuying online diversity", en dehors de tout contexte d'échanges interculturels.
C'est l'objet de toute la recherche en Tice de mesurer l'adéquation de tels palette d'outils,
collecticiels, ou plates-formes de téléformation avec le scénario pédagogique, voire
d'envisager le développement d'outils spécifiques, comme d'étudier les conditions sous
lesquelles les participants accèdent à ces environnements technologiques, en dehors du temps
de l'expérience de formation et pendant son déroulement. En particulier, le couplage
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d'environnements synchrones et asynchrones, les premiers tournés vers l'oral et les seconds
vers l'écrit, semble ouvrir un nouvel espace de construction du fil du discours exolingue
articulant les deux modes, comme nous l'avons esquissé dans (Audras & Chanier, 2006).
Un point fréquemment soulevé est celui de la littératie des utilisateurs (apprenants et tuteurs)
se rapportant aux environnements technologiques utilisés dans les échanges. Pour un point de
vue sur l'influence du niveau de compétence communicative dans des environnements
multimodaux dans l'expérience Tridem05, le lecteur pourra se reporter à (Hauck, 2007). Un
débat très actif parcourt le milieu de la recherche sur les relations entre littératie
technologique, niveau de compétence en L2, genres communicatifs, cadres culturels, cultures
des usages technologiques propres à chaque société. À ce propos, le lecteur pourra suivre l'un
des rares cas de réinterprétations d'un même corpus d'interactions par des chercheurs
différents, cas qui illustre un incident critique survenu dans un échange franco-étasunien
(successivement (Kern, 2000: chap. 8), (Kramsch & Thorne, 2001), (Thorne, 2003)).
8
pour que les individus comprennent le sens de leur engagement, aient l'occasion de changer
de posture, de percevoir ces changements chez eux et chez autrui.
En particulier, on peut s'interroger sur la nécessité d'introduire systématiquement dans le
scénario un rapport réflexif, appuyé sur un journal de bord, tous deux individuels, de façon à
mémoriser l'historique des événements et des appréciations personnels, qui servira de point de
référence lors du travail d'analyse final et qui aidera l'apprenant à prendre le recul nécessaire.
C'est ce que Vogt (2006) a commencé à faire avec ce qu'elle appelle l'"interaction journal",
mais qui n'a été rédigé que par un seul des trois groupes de l'échange, tout comme nous dans
la session 2005 de notre projet Tridem.
Le scénario pédagogique n'est, bien sûr, pas un élément qui s'élabore de façon isolée en phase
de conception du dispositif EIEGL. La conception de tels dispositifs va de pair avec le
développement de méthodes d'évaluation des compétences interculturelles en rapport direct
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avec le contenu de la formation. Sans pouvoir discuter plus avant ce point, signalons que,
dans l'esprit des chercheurs s'exprimant dans (Zarate & Gohard-Radenkovic, 2004) contre une
vision par grille ou niveaux telle qu'on peut la rencontrer dans le référentiel européen de
compétences en langues (CECR), nous préférons un système d'évaluation sous forme de
réseau ou de carte qui pourrait inclure des rapports d'expérience de vie sous forme de
portfolios. Dans notre projet Tridem, cela prend la forme de rapports réflexifs et de collages,
comme nous le verrons plus loin.
Présenter une formation de type EIEGL comme une expérience de vie d'un nouveau type qui
s'inscrira dans le portfolio de l'apprenant et sera l'un des éléments pour l'évaluation de sa
compétence interculturelle (Anquetil, ibid : 80), invite à effectuer des recherches sur la
question de la transférabilité. Autrement dit, un gain de compétence interculturelle, acquis
dans une formation mettant en rapport deux cultures, peut-il être mobilisé et complété dans
des formations ultérieures associant d'autres situations interculturelles ? Le changement de
cultures "cibles" n'est en soi pas un problème, puisque l'approche défendue ici place au
second plan les savoirs / connaissances acquises sur les cultures, en faveur du développement
des postures générales du locuteur interculturel. S'il est trop tôt pour observer ce transfert en
suivant longitudinalement des apprenants ayant vécu plusieurs situations EIEGL, nous
verrons plus loin l'influence des expériences interculturelles antérieures au sein de la
formation Tridem.
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2. Présentation de la formation Tridem06
Le corpus recueilli provient d'une formation à distance qui s'est étendue d'octobre à décembre
2006, sur 10 semaines, avec une période de préparation avant le début de la formation de 3
semaines. Le dispositif de formation Tridem06 est semblable, en certains points, à celui de
Tridem05 (Audras & Chanier, 2006), (Audras & Chanier, 2007).
Chaque tridem a un blogue dédié (Blogger, 2007) à un thème. 3 thèmes étant offerts en
options au départ, 4 tridems sont dédiés à chacun des thèmes. Seuls les membres du tridem et
10
un tuteur ont les droits d'auteur dans le blogue (les autres participants à la formation peuvent
lire et poster des commentaires). Un blogue commun sert de liaison entre tous les participants.
• des sessions "programmées" autour des activités du scénario, réunissant les membres de
deux blogues travaillant sur un thème identique, et le tuteur correspondant ;
• des sessions "libres", non tutorées, à l'initiative des membres d'un même tridem.
La formation a deux langues-cibles : l’anglais pour les francophones et le français pour les
anglophones. L’objectif pédagogique est centré sur l’acquisition d’une compétence
interculturelle. Avant le début de la formation, un choix exclusif entre 3 thèmes est offert à
chacun : "identity/identité" ; "freedom/liberté" ; "diversity/diversité. En fonction de ses choix2 ,
chaque apprenant est ensuite intégré à un tridem dédié à son thème. Le cheminement est
identique pour les 3 thèmes. Il comprend un parcours en 6 étapes.
2
Un certain équilibre entre les institutions devant être respecté, certains apprenants ont été affectés à un tridem
suivant leur deuxième choix de thème. Un certain sentiment de frustration peut en résulter.
11
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L’étape 0 précède le début de la formation. C’est une période de 3 semaines, durant laquelle
les participants vont s’approprier les différents outils de communication dédiés à la formation
(première connexion et séance test sur Lyceum ; répondre à l’invitation de Blogger pour une
première connexion au blogue général, remplir la partie "profil" du blogue), signer leur contrat
de cession de droits, et compléter un pré-questionnaire. Arrêtons-nous sur ce pré-
questionnaire : il comprend tout d’abord différents items de présentation de son identité et de
sa biographie linguistique ("quelle(s) langue(s) utilisez-vous tous les jours ? A la maison, au travail,
entre amis etc."; "depuis quand pratiquez vous [la langue-cible] ? Pratiquez vous régulièrement cette
langue ?"). Puis vient une partie "compétence interculturelle", dans laquelle il est d’abord
demandé, à travers différentes questions, si l’on a déjà participé à des activités "mélangeant
des publics de différents pays ou différentes langues de travail". Chacun se positionne ensuite sur
certaines phrases, selon une échelle de convention suivante : 0 signifiant "je ne suis pas du tout
capable" et 3, "je suis tout à fait capable". Ces phrases sont partagées sous différents grands
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concernant la partie "Interculturel" : "Si je suis dans une situation de communication avec une ou
plusieurs personnes d’un autre pays que le mien, je suis conscient(e) de ma propre identité, de mes
valeurs et mes représentations culturelles", "Si [ibid], je peux me mettre à la place de cette personne
et envisager son point de vue" ou "Si [ibid], je sais gérer les malentendus qui résultent d’une
Cette étape 0 est importante. Elle évite de perturber la formation par d'éventuels problèmes
techniques individuels. Elle renvoie un bon indicateur de participation future. C'est à ce
niveau qu'a ainsi été constaté la présence de seulement 4 apprenants de l'OU.
Avec l'étape suivante, nous entrons dans le cœur de la formation. C’est pourquoi nous avons
choisi de la détailler particulièrement, ainsi que la suivante, en l’argumentant avec des extraits
du scénario pédagogique correspondant au parcours "freedom/liberté", tel qu’il a été distribué
aux apprenants.
L’étape 2 dure 3 semaines, comprend deux parties reliées à deux des savoirs, au sens de
Byram (cf. section 1.1), savoir-être et savoir-connaissance. Une première session tutorée
dans Lyceum y est prévue afin de travailler la compétence savoir-être. Cette étape s’intitule
"Intercompréhension". Chacun se positionne sur ses propres racines culturelles ("Poster un court
message décrivant à quelle communauté vous appartenez "), ainsi que sur le concept de liberté
dans son pays ("Quelle est la valeur accordée à la liberté a) dans votre pays de naissance, b) dans la
société dans laquelle vous vivez ? "). C’est à ce moment-là qu’a eu lieu la session Lyceum.
Dans la seconde partie de l’étape 1, le scénario invite chacun à trouver des exemples d’une
pratique de la liberté dans son pays de naissance et/ou de vie ("Existe-t-il dans votre pays des
organisations dédiées à la revendication ou à la protection de la liberté ? Lesquelles ? Qu’en pensez-
vous ?").
Dans ces 2 parties, chacun a donc exprimé ce qui constitue sa représentation "interne" (son
identité, sa vision sur des éléments de sa propre culture). Il a pu lire celles exprimées par les
autres (qui sont pour ceux-ci aussi des représentations internes, mais qui constituent pour le
premier des représentations "externes"). On demande alors à chacun de poster dans le blog
une synthèse de ces représentations internes et externes et de réagir à celles des autres :
"Comparez toutes les productions. Y a-t-il des similitudes ou des différences saillantes ? "
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L’étape 3, intitulée "Comment les sociétés en parlent ?", est également composée de deux
parties (qui correspondent respectivement aux compétences savoir-comprendre et savoir-
apprendre-et-faire) et comprend une seconde session tutorée sur Lyceum à une date que
chaque tridem doit négocier. Il s'agit d'approfondir le thème, mais en inversant les
perspectives : les francophones rechercheront des textes fondateurs sur les autres pays à
propos des Declaration of Independance, US Constitution, Magna Carta, Rule Britannia ; les
anglophones eux sur des sujets comme Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Les
auteurs des recherches sur ces textes en extrairont la notion de liberté mise en avant et la
compléteront de citations, empruntées à des ouvrages historiques ou littéraires (toujours
exprimées dans la L2). Chacun pourra donc réagir à la façon dont l'autre a exprimé sa vision
concernant un point de la culture de l'autre (ce qui représente une représentation interne pour
le premier et externe pour le second). À partir de là, dans la seconde partie de cette étape, les
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3. Résultats quantitatifs
Le graphique de la figure 2 rend compte de la participation par institution des apprenants dans
chaque blogue et signale les fusions de blogues.
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On remarquera une grande diversité de participation : certains blogues sont très actifs
(blogues 5, 8 et 12) car ils ont un nombre total de messages nettement supérieur aux autres.
Au contraire, d’autres blogues présentent un faible, voire très faible, nombre de messages
(blogues 3, 4, 6, 7, 9). Pour pallier ce manque de participation et ne pas laisser isolés des
membres actifs, le blogue 6 a rejoint le 5 (thème et tuteur sont identiques); idem pour le
blogue 7 qui a rejoint le 8 ; enfin les 3 blogues 9, 10 et 11 ont fusionné dans les mêmes
conditions. Toutes ces fusions ont eu lieu au même moment, au début de l’étape 2. Les
blogues 3 et 4, peu participatifs, sont restés en l'état, du fait de l'absence d'éléments actifs
appartenant à des institutions différentes.
La figure 2 fait ressortir le fait que ces disparités de participation s'expliquent d'abord en
prenant en compte la variable institutionnelle. Les participants de l'OU, bien que très peu
nombreux au départ, ont été très présents. Le groupe d'apprenants de l'UFC, public captif, a
majoritairement participé. La participation des étudiants de CMU, captifs également, est
nettement moins importante (disparité importante entre les individus). Cela peut s'expliquer
par le statut optionnel des langues dans leur cursus universitaire d'ingénieurs scientifiques et
techniques. Il n'y a pas eu de désengagement d'individus en cours de route, mais au contraire
un manque d'engagement dès le départ. Ce déséquilibre inter-institutionnel a été en partie
compensé par les fusions de blogues dans lesquels des manifestations notables de
compétences interculturelles ont pu être observées par la suite, comme nous allons le voir
maintenant.
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4. Compétences observées, profils d’apprenants et discussion autour des
résultats
Les messages, collages, rapports, questionnaires et sessions synchrones de 6 blogues (5, 6, 9,
10, 11, 12) ont été étudiés. Nous avons relevé au sein de ces productions des éléments
verbaux permettant de les mettre en correspondance avec les différents types de compétences
évoqués précédemment. Dans cette section, nous commençons par illustrer notre étiquetage à
partir d'énoncés se rapportant aux compétences savoir-être et savoir-connaissance. Le lecteur
trouvera en annexe des exemples pour les autres compétences. Tous se rapportent au thème
"freedom/liberté" abordé dans les blogues 10, 11 et 12. Dans une deuxième partie de cette
section, nous examinons les niveaux de participation et les manifestations de compétences par
individu en les mettant en rapport avec les niveaux d'expérience interculturelle antérieure. Des
ébauches de profils individuels sont discutées. La section se termine par l'examen d'un
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positionnement individuel qui a reçu peu d'écho des autres participants, peut-être par manque
de réflexe tutoral.
4.1.1. Savoir-être
Nous sommes au début de la formation. Lors de la première session Lyceum tutorée, afo11_3
(une apprenante de l’OU faisant partie du tridem 11) et amo12_3 (un apprenant de l’OU
faisant partie du tridem 12) se retrouvent dans le lobby (partie de Lyceum faisant office de hall
d’entrée). C’est leur première rencontre. afo11_3 brise la glace et lance :
(1)
Bonjour, je m’appelle [nom de l’apprenante]. Et toi, tu t’appelles
comment ? Pardon, vous vous appelez comment ?
[Lyceum1, Lyceum, afo11_3, 10/10]
Ces deux apprenants ne savent pas qu’ils viennent de la même institution, et qu’ils sont tous
les deux anglophones. Ce qui est intéressant ici, c’est de remarquer, d’une part, qu’afo11_3
s’exprime d’abord en français, qui est sa langue-cible, ce qui montre un sens certain
d’ouverture, et d’autre part, que cette apprenante se reprend, en changeant le "tu" par le "vous"
pour se calquer aux normes de politesse françaises. Cette prise de parole est un bel exemple
de la compétence de savoir-être, puisqu’elle montre une posture d’ouverture à l’autre et de
réflexion par rapport à la culture-cible.
16
4.1.2. Savoir-connaissance
Toujours lors d’une première session tutorée sur Lyceum, mais regroupant deux autres
blogues, une discussion propre à la première partie de l’étape 2 du scénario ("Que représente le
mot « liberté » pour vous ?") s’engage entre les différents participants de cette session. Un
(3)
What the difference between freedom and liberty ?
[Lyceum1, Lyceum, amb11_2, 09/10]
(4)
Pourquoi dit-on freedom of speech et statue of liberty ? Pourquoi
statue of liberty et pas statue of freedom ?
[Lyceum1, Lyceum, amb11_2, 09/10]
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rapport avec la gamme quasi complète des savoirs, particulièrement les savoir-apprendre-et-
faire et savoir-s’engager, ce dernier type s'observant surtout chez les experts.
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Tableau 1 : Tableau récapitulatif des participations dans 6 tridems et des compétences observées.
Légende des codes : se : savoir-être ; s : savoir-connaissance ; sc : savoir-comprendre ; sfa : savoir-
faire-et-apprendre ; sse : savoir-s’engager.
Le tableau 2 indique le nombre d’occurrences de chaque savoir observé, par apprenant. Une
case sur fond blanc correspond à l'intervalle de 0 à 2 occurrences pour une compétence. Le
grisé fait ressortir celles les plus observées par apprenant. Nous avons grisé légèrement quand
une compétence est apparue entre 3 et 5 fois ; plus intensément quand celle-ci a été observée
plus de 5 fois. Les zones grises ne représentent pas les mêmes savoirs chez les experts et chez
les novices. Ainsi chez les novices apparaissent majoritairement une concentration
d'occurrences de savoir-être et savoir-connaissance. Chez ceux ayant déjà des expériences
multiculturelles, les zones gris clair sont plus étendues avec une concentration sur savoir-
connaissance, savoir-comprendre, savoir-apprendre-et-faire.
Les coloris de la première colonne du tableau font ressortir le type de savoir dominant
observé chez chacun. On retrouve des profils d'apprenants novices liés aux savoir-être et
savoir-connaissance, ainsi qu'une plus grande variété de profils chez les experts.
18
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De ces deux tableaux, on peut induire une forme d'ordonnancement des compétences : les
savoir-être et savoir-connaissance présents quasiment partout avec un nombre élevé
d'occurrences. Cela semble être le point d'entrée dans les échanges interculturels. La
manifestation des autres types de savoirs est en rapport avec une participation, un engagement
plus important des individus. Quant à celui de savoir-s'engager, ce sont d'abord les apprenants
ayant déjà des expériences interculturelles antérieures qui s'y aventurent. Peut-on parler de
transferts de compétence entre des situations mobilisant des cultures, des langues et des
enjeux différents ?
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élément de disparité supplémentaire, interroge par le peu d'écho reçu de la part des
participants. Il s'agit de l'apprenante francophone anonymisée sous le code afg11_4.
Dans son pré-questionnaire, celle-ci se présente comme "très consciente de ses racines
culturelles". Dans sa biographie langagière, elle dit utiliser le français seul comme langue au
quotidien. Un peu plus tard, dans l’étape 1, pour se présenter aux autres membres de son
tridem, elle rédige et poste dans son blogue un message dont (5) est un extrait.
(5)
Je suis née à Port-au-Prince, la capitale politique, administrative et
culturelle de la République d'Haïti […]. Malgré la misère et la
pauvreté, les habitants de cette ville manifestent une certaine joie
de vivre et de gaieté. je suis restée dans cette ville jusqu'au debut
de mes études universitaires. Ensuite, j'ai poursuivi mes études
universitaires à Genève, Cité de la Paix et des grandes négociations
internationales et j'habite dans cette ville.
[Tridem11, blogue, afg11_4, 02/10]
edutice-00250378, version 1 - 11 Feb 2008
Dans ce message, on apprend que cette apprenante est haïtienne, donc de culture et de langue
maternelle créole. Au début de la séance Lyceum 1, à la question "Qu’est-ce que la liberté
représente pour vous ? ", elle témoigne :
(6)
Au moment où j’ai laissé Haïti, y avait un problème d’insécurité, y
avait un coup d’état. […] Y avait des coups de feu. […], alors là je
euh, ça peut atteindre la liberté, notre propre liberté à nous. […]
Dans ce pays là, on pouvait pas parler de liberté d’expression comme
vous avez parlé tout à l’heure, […]. Mais quand je suis arrivée à
Genève, cette liberté-là, je voyais une grande différence parce que
déjà y avait pas ce problème d’insécurité. Et là, j’ai vu tout de
suite la grande différence, entre la liberté que j’ai, j’avais vécu en
Haïti, et celle que j’ai à Genève, en Suisse […].
[Lyceum1, Lyceum, afg11_4, 09/10]
Après ce tour de parole, le tuteur demande à chacun de choisir "un moment où vous vous êtes
senti tout à fait libre". Quand arrive à nouveau le tour de l’apprenante en question, après une
(7)
Difficult to speak.
[Lyceum1, Lyceum, afg11_4, 09/10]
Quelle interprétation donner à cet énoncé ? S’agit-il d’une difficulté à s'exprimer en anglais –
cependant le tuteur un peu plus loin lui propose de parler à sa convenance en anglais ou en
français – ou d’un évitement de réponse ? Toujours est-il que cette disparité de
positionnement sur le thème même du tridem, n'a pas été développée. L'apprenante en est
restée essentiellement au premier stade de manifestations de compétence, celui de savoir-être
(cf. tableau2).
20
Le constat peut sembler quelque peu paradoxal. L'expression de disparités de positionnement
culturelles au sein d'un groupe endolingue est recherchée dès la première étape de notre
scénario, et a bien été mentionnée en section 1.1. Toutefois cette expression est restée sans
écho direct, non par indifférence des participants (comme en témoignent certains
commentaires ultérieurs, cf. exemple 9 en annexe), mais parce que le groupe n'a pas réussi à
intégrer cet aspect et d'enrichir ainsi le travail thématique sur la liberté.
En étudiant d'autres situations un peu similaires, il nous apparait qu'un mode approprié
d'intervention du tuteur aurait pu permettre au groupe de réagir et de réfléchir à la façon de
tenir compte de cette dimension supplémentaire de la diversité culturelle. Un des rôles du
tuteur dans ce genre de formation devrait être celui d'accompagnant, intervenant
ponctuellement et de façons ciblées, afin de verbaliser l'implicite et de solliciter le
positionnement des participants. Ceci requiert sans doute une préparation spécifique de ces
edutice-00250378, version 1 - 11 Feb 2008
5. Conclusion
Ces premières observations d’acquisition d’une compétence interculturelle, déclinée suivant
le modèle inspiré, notamment, de Byram, demandent à être étendues. Le foisonnement des
résultats pose la question de l’organisation des observables, voire de leur étiquetage en vue
d'une plus grande lisibilité et traçabilité. L'analyse que nous avons présentée a été conduite
par un seul chercheur. Il conviendrait de faire accomplir, par une deuxième personne, cet
étiquetage afin d'apprécier la consistance de notre approche. Cet objectif est inscrit dans le
planning à court terme de notre équipe.
D'un côté, le cas singulier posé en fin d’article nous pousse à approfondir notre modèle de
référence, et à le croiser éventuellement à d'autres approches (Anderson 1999) : dans
l’exemple exposé ici, la question de l’identité de l’apprenant croise les problématiques du
statut de la langue seconde et de l’appropriation ou réappropriation d’une langue.
D'un autre côté, la fonctionnalité de ce modèle et sa pertinence au sein d’un scénario et d’un
montage pédagogiques tournés sur l’interculturel, largement décrits ici, nous poussent à le
confronter à d'autres situations EIEGL. A l'heure où nous écrivons débute la formation
ECOFRALIN dans un nouveau contexte plurilingue (espagnol-français) et pluriculturel
(Colombie-France). Dans tous les cas, l'intérêt de concevoir une préparation spécifique aux
situations EIEGL, destinée aux tuteurs, s'affirme.
21
Le groupe exo-culturel dont les membres appartiennent à des institutions différentes constitue
une des caractéristiques principales d’une situation d’EIEGL. Elle est susceptible d'offrir une
expérience de vie dont pourront bénéficier un grand nombre d'étudiants et de futurs
enseignants de langue en vue d'en faire des locuteurs interculturels. Avant même, ou à côté,
des projets de mobilité qui ne concernent aujourd'hui qu'une petite minorité d'européens, ce
type de formation peut être un cadre expérimental où se développe une partie de la
compétence interculturelle au sens du CECR. C’est pourquoi organiser et étiqueter les
observables discutés ici pourrait donner des éléments d'évaluation de cette compétence. Dans
un but plus limité, le type de scénario développé ici permet à chaque apprenant de produire
des matériaux pertinents qui auraient une place de choix dans son portfolio et témoigneraient
de son vécu. Le postulat de transférabilité des compétences interculturelles d'une situation de
contact avec une culture à une autre situation doit également être posé, afin de permettre à ce
edutice-00250378, version 1 - 11 Feb 2008
Remerciements
Le projet Tridem n'aurait pu avoir lieu en 2006 sans le soutien de la British Academy
(http://www.britac.ac.uk/ ) et la participation active de Bonnie Youngs et Chris Jones de
Carnegie Mellon University, Elodie Vialleton et Tim Lewis de The Open University, et de
Maud Ciekanski de l'Université de Franche-Comté. Qu'ils en soient vivement remerciés.
Références
Les liens Internet figurant dans cette section étaient valides en décembre 2007.
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22
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Logiciels
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(Lyceum 2006). Site présentant la plate-forme audio-graphique synchrone Lyceum.
http://kmi.open.ac.uk/projects/Lyceum/
Annexes
Dans cette partie, ont été ajoutés d’autres exemples de compétences observées, en plus de
celles présentées dans la section 4.1.
Savoir-connaissance
Voici un exemple, dans lequel une apprenante de CMU appartenant au tridem 12 parle de ses
origines :
(8)
I grew up in a family and neighborhood that was “upper-middle-class”.
I mean that we didn’t have problems with money. It isn’t that we were
rich but I had everything I needed. But I think that maybe if you
asked someone who was not so lucky, who didn’t have as many
opportunities, they might say that they didn’t have as much freedom?
But also you should keep in mind that I am young and still a student
and I don’t have a lot of experience in the world. I feel a little
naïve and without authority on this subject! This is why I said I was
“sheltered”. I hope that is clearer, I will try and check more often
to answer more.
[Tridem 12, blogue, afc12_4, 23/10]
24
Dans ce message, l’apprenante fait preuve d’une certaine maturité quant à son point de vue
sur la liberté. Bien qu’elle se qualifie de "naïve" lorsqu’elle caractérise son propos, elle est
capable de le relativiser et d’en avoir une vision très objective. Ainsi, parce qu’ici elle fait
preuve d’une prise de distance sur le processus de fabrication de sa pensée, elle témoigne de
la compétence de savoirs de Byram.
Savoir-comprendre
Concernant cette compétence, nous avons choisi de présenter deux occurrences qui
témoignent de l’habileté à comprendre une autre culture, ou un évènement d’une autre culture.
Ainsi, dans la première session Lyceum, lorsqu’une apprenante (afg11_4) raconte un passage
de sa vie où elle a été entravée dans sa liberté de parole et de mouvement pour cause de
troubles politiques dans son pays (cf. paragraphe 5 de cet article), un apprenant de l’UFC
edutice-00250378, version 1 - 11 Feb 2008
(9)
Comme dit, on est devant un problème parce que liberté, ça veut dire
beaucoup de choses. Donc y a cette liberté qu’on vit au fond de soi,
euh y a la liberté simplement fondamentale, celle de pouvoir bouger,
celle de pouvoir aller où on veut en sécurité, euh que [afg11_4] vient
de nous décrire et qui est, qui est terrifiante […].
[Lyceum1, Lyceum, amb11_2, 09/10]
Par l’utilisation de l’adjectif "terrifiante", il rend compte qu’il a bien pris conscience de la
teneur des propos de sa partenaire de tridem, et des conséquences que cette période a pu avoir
sur sa vie.
L’exemple qui suit contient également des indices de compréhension de la culture de l’autre,
preuve en est l’argumentation de l’auteur du message de blogue, apprenant de CMU faisant
partie du tridem 10, sur une partie d’un message précédent sur laquelle il n’est pas d’accord :
(10)
En ce qui concerne des autres parallèles, je suis d’accord jusqu’à un
certain point à propos la nécéssité de la liberté du individu avant la
liberté d’une grande groupe comme un pays. Mais le concepte de
l’égalité de tous les hommes en fait comme principe du gouvernance est
assez récent. La Magna Carta a donné plusieurs droits précédents de
notre formes du gouvernance, mais seulement à l’aristocratie. Le
concepte est là. Il faut avoir des droits individus si l’état tire la
droit de gouverner au consent des individus. Mais des femmes et des
noirs n’ont pas reçu la droit de voter jusqu’à le 20e siècle ici. Ils
n’ont pas été des mêmes individus sous la loi. Ils n’ont pas eu tous
les droits civils, même la plupart des droits civils. Je suis d’accord
aussi que la liberté est relative. Cowboys and mountain men of the 19th
century would balk at the profound lack of liberty we all possess.
[Tridem10, blogue, amc09_6, 08/11]
25
Savoir-apprendre-et-faire
Cette compétence correspond à la deuxième partie de l’étape 3 du scénario. Après avoir lu les
différentes contributions de ses partenaires, afo11_3 (une apprenante de l’OU faisant partie du
tridem 11) envoie sa contribution pour la constitution à plusieurs d’une nouvelle définition de
la liberté :
(11)
I think one thing that everyone in the blogue seemed to agree on was
that in order to be actively concerned about freedom/liberty, one has
to have a level of basic needs met. However, it could certainly be
argued that in the total absense of personal liberty, gaining freedom
is of paramount concern. (sorry it's all in English but my French for
this sort of discussion would be pretty poor!)
[Tridem11, blogue, afo11_3, 07/11]
Dans cette production, l’apprenante met bien avant ce qu’elle a retenu des diverses
contributions qu’elle a lues. Dans sa définition, elle pense que chacun de ses partenaires de
edutice-00250378, version 1 - 11 Feb 2008
tridem se sent concerné par le concept de liberté, mais que pour en jouir véritablement,
l’individu doit d’abord pouvoir être satisfait au quotidien de ses besoins de base. Ici, nous
voyons que cette apprenante a bien compris et pris en compte les informations que ses
partenaires lui ont transmises concernant la conception de la liberté dans leurs sociétés
respectives. Elle sait réutiliser ces informations pour en proposer une synthèse. En cela, son
message de blogue est à relier à la compétence de savoir-faire de Byram.
Par ailleurs, nous pouvons remarquer que le contenu linguistique de sa production nourrit une
réponse à l’interrogation d’amb11_2 à propos de la distinction entre freedom et liberty dans la
langue anglaise.
Nous ajoutons ici un autre exemple de compréhension de diverses opinions de partenaires de
tridem, suivie d’une ouverture aux autres pour accord ou complément :
(12)
Bonjour à tous, Je pense que le premier parallèle entre nos
expériences de la liberté est plutôt heureux. […]. Le second parallèle
porte sur […] Enfin un troisième point commun me semble exister c'est
[…].
You, perhaps, aren't right with me in the similarities between our own
realization (feeling?) of freedom. It would be interesting to compare
our points of view. I think we could all agree with the two first
items, but the last one could be discussed. It may be on lyceum, if
someone would accept to try again with me. I'm on holidays this week,
and I'm waiting for a proposition (proposal ?); Friendly
[Tridem10, blogue, amb10_3, 30/10]
Ces deux parties sont d’autant plus distinctes ici que l’une est en français
(intercompréhension) et l’autre en anglais (ouverture à la réaction de l’autre, invitation à
prolonger la discussion dans un autre espace-temps).
26
Savoir-s’engager
Nous avons choisi de présenter cette compétence par la comparaison de deux postures
d’apprenants. Regardons tout d’abord l’attitude d’amb11_2, un apprenant de l’UFC
appartenant au tridem 11, qui fait l’inventaire des ‘bons’ et ‘mauvais’ membres de son tridem
en écrivant dans son rapport réflexif :
(13)
Malheureusement, j’ai été déçu par les propos peu stimulants que je
trouvais dans mon blogue 11. […] Afo11_3, seule, a publié
régulièrement […] alors qu’une étudiante [afc11_1] se contente de
publier une photo où elle apparaît fort jolie, en précisant : « This
is me », sans oublier d’énumérer combien elle a de frères et de sœurs,
et le nombre de neveux et de nièces dont elle est tante ! A partir de
là, elle est encore l’auteur d’un dernier petit texte, publier bien
plus tard, ne laissant aucune chance à ceux qui souhaitait interagir
avec elle autour du thème de la liberté.
[Tridem11, rapport réflexif, amb11_2, 13/12]
edutice-00250378, version 1 - 11 Feb 2008
(14)
'He that would make his own liberty secure must guard even his enemy
from oppression; for if he violates this duty he establishes a
precedent that will reach to himself'. Paine, Thomas [afo11_3]
Pourquoi est-il si difficile, pour une grande partie des hommes,
d'admettre que leurs femmes sont aussi libres qu'ils le sont eux-mêmes
? [amb11_2]
On peut voir facilement en société que la plupart des gens croit à la
liberté faux. Ils croient que leur propre liberté est la plus
importante et ils oublient à respecter la liberté d’autres. Ils font
souvent les choses qu’ils désirent sans pensant sur la conséquence ou
si leurs actions enfreignent sur la liberté d’autres. [afc11_1]
[Tridem11, collage, afo11_3, 03/12]
Dans ce collage, nous pouvons repérer des extraits de messages de trois membres du tridem
11 : un d’afo11_3, l’auteure ; un d’amb11_2, l’auteur du rapport réflexif mis en exemple juste
avant ; un d’afc11_1, l’apprenante de CMU qu’amb11_2 mentionne dans son rapport dans une
perspective plutôt négative. Bien au contraire, ici, afo11_3 reprend un message de cette
apprenante et la présente comme faisant partie de sa lecture et compréhension du fil directeur
du blogue. Elle fait preuve, à nos yeux, de la compétence savoir-s’engager de Byram, en se
27
montrant capable de gérer les différends de participation et d’engagement de ses partenaires
de tridem.
Abstract
This article belongs to two research areas, distance education and the development of intercultural
competence in online multicultural groups exchanges. Recent publications proved the interest raised
by such issues, and also the difficulty encountered. O’Dowd and Ritter found 10 criteria related to
these difficulties. We discuss them and extract one particularly relevant, the pedagogical scenario,
which we study here. The Tridem06 experiment is described with its scenario designed by a multi-
institutional team and based on Byram's model of intercultural competence. When analysing the
multimodal contents of the interactions, extracted from synchronous and asynchronous environments
used by participants, we establish a correspondence with the five savoirs of the intercultural
competence model. We finally approach a discussion about tutor’s responsibility and awareness in
multicultural groups exchanges with an example of failed learning.
Distance learning, tandem/tridem exchanges, intercultural competence, synchronous and asynchronous
learning environments, multi-institutional pedagogical team.
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Biographie
Isabelle Audras est titulaire d’un DEA en sciences cognitive et d’un doctorat en sciences du
langage. Après deux années passées à l’Université de Franche-Comté en tant qu’ATER, elle
est aujourd’hui chargée de mission à l’Apfée (Association pour Favoriser l’Egalité des
chances à l’Ecole) et s’occupe de la mise en place du dispositif péri-scolaire et péri-familial
Coup de Pouce Clé, auprès d’enfants de CP qui ont du mal à se mettre à l’apprentissage de la
lecture/écriture.
Thierry Chanier est professeur des universités. Ses domaines d'enseignement et de recherche
portent sur l'apprentissage des langues et les systèmes d'information et de communication, sur
l'ingénierie de formation. Il étudie plus particulièrement les systèmes de formation à distance
et les interactions en ligne sur des sujets tels que l'interculturel, le processus réflexif dans la
formation des enseignants, le dialogue dans les environnements multimodaux. Il s'intéresse
également à la structuration et aux modalités d'échanges entre chercheurs des corpus
d'apprentissage (recueils des interactions, des productions des participants en situation
d'apprentissage en ligne, accompagné des contextes pédagogiques et de recherche).
UFR SLHS, Université de Franche-Comté, 32 rue Mégevand, 25030 Besançon cedex
Courriel : Isabelle.Audras@univ-fcomte.fr, Thierry.Chanier@univ-fcomte.fr
Toile : http://mulce.univ-fcomte.fr
28