Procédés de raffinage et de séparation

II. Fractionnement du pétrole brut

II-1. Introduction

L'industrie pétrolière a commencé avec le forage réussi du premier puits de

pétrole commercial en 1859 et l'ouverture de la première raffinerie deux ans
plus tard pour transformer le brut en kérosène.

L'évolution du raffinage du pétrole, de la simple distillation aux processus

sophistiqués d'aujourd'hui, a créé un besoin de procédures de gestion
basées sur la sécurité et les risques.

Le raffinage est le traitement d'un mélange complexe d'hydrocarbures en un

certain nombre d'autres mélanges complexes d'hydrocarbures. Le traitement
sûr et ordonné du pétrole brut en gaz et liquides inflammables à des
températures et des pressions élevées à l'aide d'équipements et de
tuyauteries soumis à des contraintes et à la corrosion nécessite des
connaissances considérables, contrôle et expertise.

Le raffinage commence par la distillation, ou le fractionnement, des pétroles

bruts en groupes d'hydrocarbures séparés. Les produits qui en résultent sont
directement liés aux caractéristiques du brut traité. La plupart des produits
de distillation sont ensuite convertis en produits plus utilisables en modifiant
la taille et la structure des molécules d'hydrocarbures par le craquage, le
reformage et d'autres processus de conversion. Ces produits convertis sont
ensuite soumis à divers procédés de traitement et de séparation tels que
l'extraction, l'hydrotraitement et l'adoucissement pour éliminer les
constituants indésirables et améliorer la qualité du produit. Les raffineries
intégrées intègrent des opérations de fractionnement, de conversion, de
traitement et de mélange et peuvent également inclure un traitement
pétrochimique.

Les processus et les opérations de raffinage du pétrole peuvent être séparés

en cinq domaines de base.

• Le fractionnement (distillation) est la séparation du pétrole brut dans des

colonnes de distillation atmosphérique et sous vide en groupes de composés
d'hydrocarbures de différentes plages de points d'ébullition appelés fractions
ou ‘coupes’.

• Les processus de conversion modifient la taille et/ou la structure des

molécules d'hydrocarbures. Ces processus comprennent.

- Décomposition (division) par craquage thermique et catalytique

- unification (combinaison) par alkylation et polymérisation

- Altération (réarrangement) avec isomérisation et reformage catalytique

• Les procédés de traitement sont destinés à préparer les flux

d'hydrocarbures pour un traitement supplémentaire et à préparer les
produits finis. Le traitement peut comprendre l'élimination ou la séparation
des aromatiques et des naphtènes ainsi que des impuretés et des
contaminants indésirables. Le traitement peut impliquer une séparation
chimique ou physique telle que la dissolution, l'absorption ou la précipitation
à l'aide d'une variété et d'une combinaison de procédés, notamment le
dessalage, le séchage, l'hydrodésulfuration, le raffinage au solvant,
l'adoucissement, l'extraction au solvant et le déparaffinage au solvant.

• La formulation et le mélange sont le processus de mélange et de

combinaison de fractions d'hydrocarbures, d'additifs et d'autres composants
pour produire des produits finis avec des propriétés de performance
spécifiques.

• Les autres opérations de raffinage comprennent la récupération des

fractions légères, l'extraction des eaux acides, le traitement des déchets
solides et des eaux usées, le traitement et le refroidissement des eaux de
procédé, le stockage et la manutention, le mouvement des produits, la
production d'hydrogène, le traitement des acides et des gaz résiduaires et la
récupération du soufre.

• Les opérations et installations auxiliaires comprennent la production de

vapeur et d'électricité, les systèmes d'eau de traitement et d'incendie, les
torchères et les systèmes de secours, les fours et les réchauffeurs, les
pompes et les vannes, l'approvisionnement en vapeur, en air, en azote et
autres gaz, les alarmes et les capteurs, contrôle de la pollution et du bruit,
échantillonnage, test et inspection et laboratoire, salle de contrôle,
maintenance et installations administratives.
II-2. Description du procédé de la distillation atmosphérique

La figure suivante donne le schéma général et simplifié du fractionnement

initial du pétrole brut.
Le fractionnement initial d'un pétrole brut en les différentes coupes
pétrolières peut se résumer en trois opérations distinctes.

- Distillation atmosphérique du pétrole brut

- Distillation sous vide du résidu atmosphérique

- Fractionnement des naphtas et des gaz

Le fractionnement initial du pétrole brut produit une douzaine de coupes

pétrolières qui ont des volatilités proches de celles des produits
commerciaux.

Dans certains cas, ces fractions ou coupes peuvent être directement

commercialisées ou utilisées pour la fabrication de produits finis. Ils
nécessitent généralement des transformations chimiques pour.

- Soit améliorer leur qualité et répondre aux exigences concernant les

spécifications. Les coupes pétrolières sont ainsi converties en bases qui
sont mélangées pour obtenir les produits finis.
- Ou les convertir afin de satisfaire quantitativement les demandes du
marché. Des traitements de conversion sont appliqués aux coupes
lourdes pour les transformer en coupes légères. Les opérations de
conversion produisent souvent une large gamme d'hydrocarbures qui
sont relativement similaires à un pétrole brut et doivent, également,
être séparés en coupes.
II-3. Analyse TBP

Chaque coupe pétrolière obtenue par distillation correspond à un domaine

de volatilité qui peut être caractérisé simplement par une série de
températures normales d'ébullition, ou par le nombre d'atomes de
carbone des hydrocarbures contenus dans la coupe.

La relation entre la plage de température d'ébullition et le rendement

d'un pétrole brut est obtenue par l'analyse TBP (True Boiling Point)
représenté par l’installation si dessous.

Celle-ci consiste en une opération de distillation à haute séparation qui

produit tous les composants du pétrole l'un après l'autre en fonction de
leur température d'ébullition en tête de colonne. Le résultat de l'analyse
est représenté par la courbe TBP du pétrole brut.

Pour deux températures d'ébullition t1 et t2 caractérisant une coupe

pétrolière, la courbe TBP montre le principe de détermination du
rendement et le résultat obtenu pour deux pétroles bruts différents.
Parallèlement, la comparaison des quantités distillées à une température
donnée montre les variations de rendement entre un brut léger et un brut
lourd.
II-3. Les différentes coupes ou fraction pétrolières

Une autre représentation de la courbe de distillation du TBP est obtenue

en associant l'échelle de température et les pourcentages distillés comme
indiqué dans le tableau ci-dessous.

Fuel gas C1 - C 2
Propane C3
0 Butane C4
C5 – C6
Light naphtha
82
C7 – C9
Medium naphtha
150
C9 – C11
Heavy naphtha
193
C11 – C15
Kerosene
240
Normal boiling point (oC)

Light gas oil C15 – C18

310

Heavy gas oil C18 – C25

380

Vacuum gas oils C25 – C50

550

Vacuum residue C50+

↓
L'opération de distillation du pétrole brut conduit aux coupes suivantes.

Coupe gaz combustible (C1-C2)

Cette coupe est généralement utilisée comme combustible interne dans

les fours de la raffinerie.

Coupes propane et butane (C3-C4)

Le propane et le butane forment la coupe Gaz du Pétrole Liquéfié (LPG).

Le butane peut également être utilisé dans les essences pour ajuster la
pression de vapeur Reid (RVP).

Coupes naphta (C5-C11)

Ces coupes (C5 à C11 ou 82 à 193°C) subissent généralement un

traitement complémentaire pour améliorer leur faible indice d'octane.
Nous pouvons distinguer.

Naphtha lourd (C7-C11 ou 82 à 193) à faible indice d'octane (20 à 50) qui
servira de charge pour le reforming catalytique. Le but de ce procédé est
essentiellement de convertir les molécules paraffiniques et naphténiques
en composants aromatiques à haut indice d'octane. Le produit de cette
unité est appelé reformat.

La conversion n'est possible que pour les hydrocarbures avec un

minimum de 6 atomes de carbone et donc facilement transformables en
aromatiques. Cependant, compte tenu des spécifications récentes
concernant la limitation de la teneur en benzène dans les essences, les
raffineries devront utiliser des charges C7+. Le point de coupe initial
correspondant est d'environ 82oC.

Par ailleurs, la limite supérieure est choisie en fonction du point

d'ébullition final de l'essence qui doit être inférieur à 215 oC. En effet, la
température finale d'ébullition entre la charge de naphta et le reformat
augmente de 25°C à 35°C au cours du procédé. Le résultat est que la
coupe naphta est limitée autour de la température maximale de 185 oC.

En pratique, selon les besoins commerciaux relatifs de l'essence, ces

limites sont comprises entre 150°C et 180°C.

Naphtha léger (C5-C6 ou 32 à 82oC)

Cette coupe peut être utilisée à différentes fins

- Directement comme base d'essence à faible indice d'octane. Elle sera

mélangé avec des bases de qualité supérieure.
- Elle peut être utilisée comme charge d'alimentation de naphta
pétrochimique pour le vapocraqueur. Dans ce cas, l'isopentane est
généralement d'abord séparé par distillation puis mélangé à des
essences. Le naphta léger déisopentanisé est appelé naphta
déisopentanisé.
- Elle peut être soumise à un processus d'isomérisation afin d'améliorer
son indice d'octane. Le procédé consiste à transformer les paraffines
normales à bas indice d'octane en isoparaffines à haut indice d'octane.
L'opération est notamment utile pour répondre aux exigences
concernant l'indice d'octane des essences automobiles sans plomb. Elle
produit une base d’essence appelée isomérat riche en isoparaffines.

Coupes kérosène (C11-C15)

Cette coupe est principalement utilisée comme carburéacteur (Jet fuel).

Elle peut également constituer une bonne base pour les carburants diesel
ou les fiouls domestiques dans le but d'améliorer leurs propriétés à froid.

Les composés soufrés corrosifs nécessitent généralement un traitement

chimique tel que les procédés de traitement à l'hydrogène ou
d'adoucissement pour répondre aux spécifications du Jet fuel. Il existe
également deux autres spécifications principales.

Le point d'éclair, en particulier lorsque la coupe de naphta totale a un

point d'ébullition bas. Le point éclair du jet fuel doit être supérieur à 38 oC.

Le point d'ébullition initial lié à leur comportement à froid. Le point de

congélation du carburéacteur doit être inférieur à -47 oC.

Coupes Gas oil (C15-C25)

Les fractions de gas oil sont utilisées pour la production de carburants

diesel ou de fiouls domestiques.

Ils doivent être désulfurés proportionnellement à la teneur en soufre des

pétroles bruts. Cette opération est réalisée dans une unité catalytique de
consommation d'hydrogène appelée unité d'hydrodésulfuration de gas oil.

De grandes quantités de tels produits sont demandées à travers le monde

et les raffineurs essaient d'obtenir le plus grand rendement de ces
coupes. Les qualités de ces produits dans des conditions froides, le point
d'écoulement et le point de colmatage du filtre à froid CFPP (Cold filtrer
plugging point) limitent les possibilités de rendement maximum par un
point d'ébullition final ne dépassant pas 400 oC.

Le point de colmatage du filtre à froid (CFPP) est défini comme étant la

température la plus basse à laquelle un volume donné de diesel passe
encore à travers un dispositif de filtration standardisé en 60 secondes.

La température finale d'ébullition de 400oC peut être considérée comme la

température maximale qui sépare les coupes légères et moyennes des
coupes lourdes. Les coupes légères et moyennes peuvent être manipulées
sans chauffage et valorisées comme carburants pour carburants de
moteurs et turbines.

Les coupes lourdes resteront réchauffées à l'intérieur de la raffinerie afin

d'éviter la congélation et de permettre un écoulement normal.

Il est nécessaire de transformer les coupes lourdes en coupes légères et

moyennes par traitement de conversion. La complexité de ces traitements
est liée aux caractéristiques des coupes lourdes obtenues par distillation.

Coupes Vacuum Gas oils (C25-C50)

Ces coupes, appelées gas oils sous vide (VGO) forment la fraction la plus
légère du résidu atmosphérique (400+). Leurs composants sont vaporisés
lors de la distillation sous vide et sont donc relativement pauvres en
contaminants comme les métaux. Au contraire, la coupe lourde, non
vaporisable, contient des asphaltènes riches en contaminants très nocifs
pour les traitements catalytiques.

Les raffineurs essaient généralement d'obtenir un rendement maximum

de distillats VGO, en maximisant le point d'ébullition final à environ
550°C.

Les gas oils sous vide (VGO) peuvent être utilisés comme matière
première pour deux procédés principaux.

o Le craquage catalytique (F.C.C.) pour produire principalement

des essences.
o L'hydrocraquage (HCK) qui produit des fractions d’essence, de
kérosène et de gas oils.
Les coupes VGO pourraient aussi être utilisées comme matières
premières pour la fabrication d'huiles de base lubrifiantes et de cires
légères. Le besoin de produits de viscosités diverses nécessite la
séparation de trois à quatre distillats.

Résidu sous vide (Vacuum residue)

C'est la fraction non vaporisable du pétrole brut. On l'appelle souvent

"The bottom of the barrel".

Le rendement de cette coupe pour différents brut est donne par.

Saharien Crude 10 – 15%

Middle East Crude 20 – 30%

Heavy drudes 60 – 70%

Le résidu sous vide, qui doit être stocké à plus de 130oC, concentre les
asphaltènes et les résines de pétrole, qui contiennent la majeure partie
des contaminants métalliques rendant les conversions catalytiques
difficiles.

Selon le type de raffinerie, différentes utilisations ou traitements sont

appliqués à cette coupe.

- Utilisation directe.

- Fuel oil dans la raffinerie

- Matière de base pour fabriquer des fiouls lourds. Dans ce cas,

des coupes plus légères sont mélangées avec ce résidu pour
répondre aux exigences de viscosité dans le mélange final de
fuel.

- Matière de base pour produire du bitume. La dureté ou

résistance à la pénétration et le point de ramollissement sont
ajustés par les conditions opératoires de la distillation sous vide.

- Production d'huiles de base lubrifiantes lourdes et de cires.

- Conversion thermique
 - Matière première pour la viscoréduction pour produire du fioul
à viscosité réduite. C'est un moyen de réduire la production de
fiouls lourds dans la raffinerie.

-Matière première pour les unités de cokéfaction qui transforme

le résidu sous vide en coupes pétrolières légères et moyennes et
en coke.

- Conversion catalytique

- Le résidu sous vide peut être mélangé avec des distillats VGO
comme charge pour les unités FCC si sa teneur en métal est
acceptable.

- De nouveaux procédés catalytiques tels que

l'hydrodémétallation ou l'hydroconversion sont utilisés pour en
faire usage de ce "The Botton of the Barrel".

Le résidu atmosphérique, obtenue au fond de la colonne de distillation

atmosphérique peut parfois être directement traité dans certaines
unités de conversion.

Les unités de fractionnement donnent des rendements différents en

coupes pétrolières selon les caractéristiques des bruts.

II-4. Rendements et principales caractéristiques des pétroles bruts

Les rendements en coupes pétrolières dépendent de l'origine du pétrole brut.

Le schéma ci-dessous représente les structures de rendement en gaz,
naphtas, coupes intermédiaires (Kérosène, gas oils), coupes lourdes (VGO,
résidu sous vide) obtenues à partir de plusieurs pétroles bruts.
On peut noter le lien entre la densité ou densité API et le rendement en
coupes légères. La densité est un critère important pour les pétroles bruts ce
qui conduit à la classification suivante.

Bruts Densité
Bruts légers 0.80 – 0.85
Bruts moyens 0.85 – 0.90
Bruts lourds 0.90 – 1.00

Parallèlement, un autre critère de qualité majeur est la teneur en soufre qui

peut varier entre 0,04 % poids et 6 % poids pour les bruts les plus riches en
soufre. La teneur en soufre conduit à l'utilisation de traitements de
désulfuration afin d'atteindre les spécifications des différents produits
pétroliers. Il peut être distingué en.

Classification du brut Pourcentage en poids

Basse teneur en soufre < 5%
Haute teneur en soufre > 5%

Les autres caractéristiques techniques qui peuvent également intervenir

dans la qualité des pétroles bruts sont.

- La viscosité, notamment en ce qui concerne le transport.

- Le point d'écoulement qui est généralement suffisamment bas pour
que les réservoirs n'aient pas à être chauffés. Dans certains cas, et
 parfois pour des bruts légers, des points d'écoulement élevés sont
observés du fait de fortes teneurs en paraffines. Certaines précautions,
comme le mélange ou le préchauffage sont à prendre pour permettre
le transport.
- La teneur en asphaltènes et en métaux.
- La capacité de produire des huiles lubrifiantes de base et du bitume.