333 Biologie Moleculaire
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résumé
Paradoxalement, c’est un physicien, Erwin Shrödinger, qui a montré la voie à la biologie au décours de la Seconde
Guerre mondiale. La conséquence fut l’irruption des techniques de la chimie et de la physique dans les sciences du vi-
vant qui ont métamorphosé le champ de la biologie. La biologie moléculaire commence par deux découvertes majeures :
Oswald Avery montre en 1944 que les gènes sont constitués d’ADN, et Francis Crick et James Watson proposent en
1953 le modèle de la double hélice d’ADN à partir des données de diffraction des rayons X. On a d’abord identifié
toute la machinerie enzymatique des cellules, notamment en utilisant des systèmes in vitro constitués d’extraits cellu-
laires : ADN et ARN polymérases, ARN messagers et de transfert, enzymes de restriction, transcriptase inverse… Conjoin-
tement, on a déchiffré le code génétique. Toutes ces avancées ont été à l’origine d’innovations technologiques qui ont
joué un rôle majeur pour l’étude du vivant : clonage des gènes, séquençage de l’ADN des organismes, Polymerase Chain
Reaction, synthèse des gènes, de virus et de bactéries, création de gènes nouveaux (DNA shuffling), clonage des organismes
entiers (Dolly), RNA silencing, technologie CRISPR/Cas9. Ces progrès ont transformé profondément de nombreux
domaines de la biologie, incluant le diagnostic médical et l’étude des maladies, la médecine légale, l’identification des
individus et leur généalogie, la caractérisation de l’ADN ancien… La biologie moléculaire a été et sera la source de très
nombreuses découvertes qui vont peut-être transformer notre vie.
mots-clés : histoire, biologie moléculaire, clonage, séquençage, Polymerase Chain Reaction, synthèse des gènes, DNA
shuffling, Dolly, RNA silencing, CRISPR/Cas9.
les idées de Charles Darwin, d’August Weismann et de XXe siècle (3). Par la suite, Hugo de Vries découvrira les
Gregor Mendel. En 1859, Charles Darwin présente une mutations en 1900, et exhumera les travaux oubliés de
nouvelle théorie de l’évolution des espèces vivantes appa- Mendel. Suivra la théorie chromosomique de l’hérédité
rues par sélection naturelle : les espèces s’adaptent conti- par Theodor Boveri et Walter Sutton en 1902, confortée
nuellement aux différents environnements qu’elles par les travaux de Thomas Morgan, qui rattachera les
rencontrent et évoluent par tâtonnements au cours de très gènes aux chromosomes observés lors des mitoses.
longues périodes de temps (1). Travaillant sur le dévelop-
Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, on peut dire que
pement embryonnaire des œufs d’oursin comme modèle,
ce sont surtout les naturalistes qui ont investi le champ de
August Weismann formule en 1885 la « théorie sur la
la biologie. La « biologie moléculaire » est un avatar de
continuité du plasma germinatif », où il distingue les cel-
l’histoire de la biologie qui correspond en réalité à l’irrup-
lules germinales qui transmettent la vie tout au long des
tion des techniques de la chimie et de la physique dans le
générations, et les cellules somatiques qui constituent les
corps « périssables » (2). L’hérédité serait portée par le
« plasma germinatif », qui deviendra le génome au XXe
siècle. Un moine tchèque, Gregor Mendel, découvre les 1 Institut Pasteur de Lille, 1 rue du Professeur Calmette,
lois de l’hérédité, en travaillant sur les petits pois de jardin. Lille 59000.
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domaine des sciences du vivant. La connaissance du vivant sée de sucres et de phosphore, résistante aux protéases, et
a été fortement influencée par la vision et les idées d’un qui est le principal constituant du noyau cellulaire et des
physicien autrichien, prix Nobel et spécialiste de la méca- chromosomes. L’ADN est formé de très longues chaînes
nique quantique, Erwin Shrödinger (Figure 1), qui a pu- constituées d’une succession de quatre « briques » appe-
blié en 1944 un petit livre intitulé What is life ? Cet lées nucléotides, l’adénine (A), la guanine (G), la thymine
ouvrage aura un impact profond sur plusieurs générations (T) et la cytosine (C), chacune reliée à un sucre, le dés-
de biologistes (4). Shrödinger conçoit la vie comme un oxyribose, et au phosphore. Cet acide nucléique est « en-
système très complexe, stockant et transmettant roulé » de façon très compacte pour former les
d’énormes quantités d’informations qui pourraient être chromosomes et il est enrobé de protéines, les histones.
compactées en un « code héréditaire » dans les molécules Jusqu’en 1944, personne n’aurait misé sur l’ADN comme
constituant les chromosomes. L’idée ancienne d’une force support de l’hérédité.
vitale qui animerait la matière organique disparaît. La voie
est tracée. Il convient désormais de comprendre les stra- En 1928, un médecin de santé publique travaillant à
tagèmes qu’utilisent les cellules vivantes pour traiter les in- Londres sur un vaccin contre le pneumocoque, Frederick
formations. La question cruciale est d’identifier les Griffith (1879-1941), fait une observation qui va mettre
molécules du vivant permettant le traitement de ces infor- sur la piste de la nature chimique des gènes. Cultivés à par-
mations. tir des crachats de patients atteints de pneumonie, les
pneumocoques donnent des colonies lisses et sont viru-
lents pour la souris à cause de la présence d’une capsule
II. - L’ADN SUPPORT DE L’HÉRÉDITÉ constituée de sucres qui les protègent de la phagocytose.
Cette capsule est spontanément perdue au cours des repi-
De quoi sont faits les gènes ? C’est la question à laquelle quages in vitro, et les colonies prennent un aspect rugueux
les chimistes vont s’atteler à partir du début du XXe siècle. et perdent leur virulence pour la souris. Griffith a la sur-
Jusqu’aux années 1940, on a longtemps cru que les gènes prise de constater qu’il peut restaurer la capsule et la viru-
étaient constitués de protéines, abondantes dans les lence en mélangeant des bactéries vivantes avirulentes et
cellules et douées d’extraordinaires propriétés catalytiques sans capsule à des extraits bactériens tués par la chaleur
BIOLOGIE ET HISTOIRE Biologie moléculaire
à l’origine de la synthèse de nombreux constituants cellu- provenant de souches capsulées virulentes. Cette « trans-
laires. En 1941, les travaux de George Beadle (1903-1989) formation » est donc liée à la présence d’un « principe
et Edward Tatum (1909-1975) semblent conforter cette transformant » provenant des extraits bactériens tués par
hypothèse : certaines mutations d’un champignon (Neu- la chaleur (6). C’est la première fois que l’on réussit à
rospora crassa) sont associées à la perte d’une enzyme transmettre des caractères génétiques, en l’occurrence les
spécifique, d’où le célèbre aphorisme : « un gène, une gènes requis pour la fabrication d’une capsule sucrée, à
enzyme ». l’aide d’une « substance » chimique contenue dans des
bactéries mortes.
Cependant, on savait depuis 1869 que les noyaux des
cellules où sont localisés les chromosomes, sont formés de Ce phénomène facile à reproduire a été étudié de façon
« nucléine », une substance acide découverte par un mé- approfondie par des chimistes travaillant au Rockefeller
decin suisse, Friedrich Miescher (1844-1895). Celui-ci lnstitute à New York, Oswald Avery (1877-1955), Colin
l’isola des noyaux séparés de leucocytes provenant de MacLeod (1909-1972) et Maclyn McCarthy (1911-2005)
plaies suppurées de patients récemment opérés (5). La (Figure 2). Pour déterminer la nature chimique du prin-
nucléine (ou acides nucléiques) est constituée d’acide cipe transformant, ces auteurs ont traité les extraits chauf-
déoxyribonucléique (ADN), une grosse molécule compo- fés de bactéries capsulées avec diverses enzymes. En 1944,
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A B
Fig. 3 - A. Francis Crick et James Watson et la structure de l'ADN par diffraction des rayons X. - B. Copie de l'article de Nature de 1953 sur
le modèle de la double hélice d'ADN (photos Wikimedia Commons).
après des années de travail, ils mettent au jour que la rure de sodium par cette technique et ouvrent l’ère de la
capacité de synthèse de la capsule est réacquise malgré le radiocristallographie X en créant à Cambridge un labora-
traitement des extraits bactériens par des protéases et par toire spécialisé dans l’étude des molécules biologiques.
des ARNases, enzymes détruisant les protéines et les ARN. Tous deux recevront le prix Nobel de physique en 1915.
En revanche, les enzymes détruisant l’ADN inhibent la On s’attachera d’abord à résoudre la structure des pro-
transformation des pneumocoques. L’ADN est donc le téines cristallisées, puis des acides nucléiques. Le physicien
support de l’hérédité. Cette découverte majeure sera ra- britannique Willliam Astbury (1898-1961) établit que la
pidement confirmée, notamment en 1952 par les expé- structure de l’ADN présente la forme d’un long filament
riences d’Alfred Hershey (1908-1976) et Martha Chase comportant une succession d’unités répétitives empilées
(1930-2003), qui montreront que seul l’ADN de phages, (les bases), régulièrement espacées de 0,34 nm. Dans les
et non leur coque protéique, permet à ces virus d’infecter années 1950, Maurice Wilkins (1916-2004) et Rosalind
des bactéries et de s’y multiplier. La découverte d’Avery Franklin (1920-1958) poursuivent ces travaux sur la struc-
est, à l’époque, un séisme conceptuel qui substitue l’ADN ture de l’ADN au King's College (Londres) et obtiennent les
aux protéines comme support des gènes. Dès lors, la bio- premières images de l’ADN par diffraction des rayons X.
logie moléculaire est née et la voie est ouverte à toutes les L'interprétation de ces images sera l’œuvre du physicien
avancées technologiques permettant une meilleure com- britannique Francis Crick (1916-2004) et d’un jeune étu-
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préhension du monde vivant. diant américain post-doctorant, James Watson (1928-),
travaillant au prestigieux laboratoire Cavendish de l’Uni-
versité de Cambridge (Figure 3). Impressionnés par la
III. - LA DOUBLE HÉLICE ET LE DOGME découverte sensationelle de la structure hélicoïdale des
DE LA BIOLOGIE MOLÉCULAIRE protéines publiées en 1951 par le chimiste américain Linus
Pauling (1901-1994), qui travaillait au Cal Tech (California
À l’instar de Louis Pasteur montrant que les cristaux Institute of Technology), Crick et Watson proposent en 1953,
d’acide tartrique dévient la lumière polarisée, le physicien grâce aux données cristallographiques de Rosalind Franklin
allemand, Max von Laue (1879-1960), découvre en 1912 et de Maurice Wilkins, un modèle de structure de l’ADN
que les cristaux diffractent les rayons X, phénomène visua- dit en double hélice, où les deux brins d’ADN sont enrou-
lisé sur une plaque photographique par des taches symé- lés en spirale, formant un escalier en colimaçon. Ce mo-
triques. De complexes calculs permettent ensuite de dèle est basé aussi sur l’observation des biochimistes Erwin
reconstituer la structure tridimensionnelle des molécules Chargaff (1905-2002) et James Norman Davidson (1911-
cristallisées, c’est-à-dire leurs formes. Dès 1914, deux phy- 1972), qui ont montré en 1949 que les nucléotides consti-
siciens anglais, père et fils, Lawrence Bragg (1862-1942) et tuant l’ADN sont en quantités égales par groupes de deux :
William Bragg (1890-1971), décrivent la structure du chlo- autant de thymine (T) que d'adénine (A), et autant de gua-
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cine en 1959, isolent des enzymes appelées polymérases ca- entre le taux de synthèse des protéines et la quantité
pables de synthétiser de l’ADN et de l’ARN. La découverte d’ARN dans le cytoplasme. Le belge Jean Brachet (1909-
de ces polymérases va permettre le développement de sys- 1988) montre en 1955 que des cellules énucléées conti-
tèmes in vitro pour synthétiser des acides nucléiques et des nuent à produire des protéines pendant plusieurs jours
protéines. À partir de 1961, on commence le décryptage sans ADN. Dans le cytoplasme, l’ARN semble concentré
du code génétique pressenti par Shrödinger. Tout est parti dans de petits grains, extrêmement nombreux, les ribo-
d’une observation inattendue de Marshall Nirenberg somes observés au microscope électronique par le roumain
(1927-2010) et de son étudiant Johann Matthaei (1929-). George Palade (1912-2008), prix Nobel de médecine 1974.
Dans un système acellulaire préparé à partir d’extraits bac- Si la synthèse protéique a lieu dans le cytoplasme en
tériens, l’ajout d’un ARN synthétique, polymère constitué l’absence d’ADN, il faut bien admettre que doivent exister
uniquement d’uridine (polyU), induit la synthèse d’une des molécules intermédiaires permettant la synthèse des
protéine « monotone » constituée exclusivement de phé- protéines. Évidemment, l’ARN abondant dans le cyto-
nylalanine (polyPhe). Ainsi, le codon UUU reconnaît donc plasme est un bon candidat pour cette fonction. Cette
la phénylalanine. Dès lors, Nirenberg et Matthaei utilisent hypothèse est confortée par la découverte, dans les années
divers ARN synthétiques et le code sera déchiffré en moins 1950, de virus uniquement composés d’ARN et de pro-
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Fig. 4 - Jacques Monod et François Jacob (à droite), prix Nobel de Fig. 5 - Les découvreurs de la transcriptase inverse : Howard Temin
physiologie/médecine 1965 (photos Wikimedia Commons). et David Baltimore (à droite) (photo Wikimedia Commons)prix
Nobel de physiologie/médecine 1975.
téines. En 1956, Heinz Fraenkel-Conrat (1911-1999) et source facilement disponible comme le glucose, la produc-
Gerhard Schramm (1910-1969) montrent que le virus de tion de cette enzyme est inhibée par un gène « répres-
la mosaïque du tabac exclusivement constitué d’ARN, est seur ». Monod et Jacob (Figure 4) introduisent le concept
capable de produire ses propres protéines qui lui confèrent d’opéron qui associe des gènes dits « de structure », codant
un pouvoir infectieux, en l’absence d’ADN. Est lancée la par exemple pour des enzymes nécessaires à la survie des
quête de l’ARN intermédiaire entre l’ADN et la protéine bactéries, et des gènes régulateurs, « activateurs » ou « ré-
synthétisée. En 1961, François Gros (1925-) montre l’exis- presseurs » selon les conditions de l’environnement (12).
tence d’une nouvelle famille d’ARN de taille variable, bien Ces découvertes sont récompensées par le prix Nobel de
distincte de l’ARN des ribosomes (10). En même temps, physiologie/médecine en 1965, conjointement avec André
François Jacob (1920-2013) et Sydney Brenner (1927-), Lwoff (1920-1994).
dans le laboratoire de Mathew Meselson (1930-) en Cali-
En 1970, le dogme de la biologie moléculaire de Crick
fornie, apportent la preuve directe qu’un ARN dit « mes-
est mis à mal par la découverte d’une enzyme « hérétique »,
sager » s’associe aux ribosomes pour synthétiser les
la transcriptase inverse (ou rétrotranscriptase). Travaillant
protéines (11). Ainsi, cet ARN messager est l’intermédiaire
sur l’oncogenèse virale à l’université de Madison (Wiscon-
entre l’ADN et les protéines. Il assure un recopiage fidèle
sin), un jeune chercheur américain Howard Temin (1934-
de l’ADN et permet sa traduction en protéines. Le « dogme
1994), âgé de 25 ans, observe que la réplication du virus
de la biologie moléculaire » devient alors : l’ADN est la ma-
du sarcome de Rous, un virus à ARN, est inhibée par
trice qui stocke l’information ; l’ADN est recopié (transcrit)
l’actinomycine D, qui n’agit que sur l’ADN. Temin avance
en ARN messager dont les codons sont lus séquentielle-
alors l’hypothèse hérétique que le cycle de multiplication
ment et « traduits » en une séquence d’acides aminés or-
du virus implique une étape utilisant l’ADN. En 1964, il
donnés en protéines. Dans les années 1970, toute la
propose un modèle de réplication de ce virus comprenant
signalétique de la lecture de l’ADN en ARN (« transcrip-
une phase pendant laquelle le virus est transformé en ADN
tion » des gènes), puis de l’ARN en protéines (« traduc-
et s’intègre dans les chromosomes de la cellule infectée
tion ») est dévoilée, avec notamment la découverte des
sous la forme d’un « provirus », à l’instar du phénomène
ARN de transfert procurant les acides aminés à la chaîne
de lysogénie des bactéries infectées par certains bactério-
peptidique en voie de formation.
phages. Le virus intégré est alors transmis aux cellules-filles
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On sait que l’activité de certains gènes peut varier selon lors de la division cellulaire et peut être produit de façon
les conditions environnementales. Comment cette modu- intermittente par lecture de la copie insérée dans le
lation est-elle contrôlée ? Jacques Monod (1910-1976) s’est chromosome cellulaire. Temin postule l’existence d’une
intéressé à cette question, à travers le phénomène de enzyme capable de transformer l’ARN en ADN, enzyme
diauxie qu’il a décrit dans les années 1950. Des colibacilles qu’il met en évidence en 1970 : la transcriptase inverse du
cultivés dans un bouillon contenant deux sucres, vont uti- virus du sarcome de Rous. David Baltimore (1938-), un
liser préférentiellement l’un des deux sucres, puis après virologue spécialiste des polymérases cellulaires et virales
une phase de latence, consommer l’autre sucre. Il s’agit travaillant au Salk Institute de La Jolla (Californie), décou-
d’un mécanisme d’adaptation montrant que des gènes uti- vre indépendamment cette même enzyme sur un autre ré-
lisant un sucre peuvent être activés ou réprimés selon les trovirus, le virus de la leucémie murine de Rauscher. Cette
conditions de culture. Avec François Jacob, Jacques Monod découverte sera publiée conjointement dans l’édition du
va décortiquer ce phénomène. Les deux pasteuriens 27 juin 1970 du journal Nature (13, 14). Aujourd’hui, le
étudient l’activité du gène contrôlant la synthèse d’une phénomène de rétro-transcription de l’ARN (synthèse
enzyme, la b-galactosidase, qui scinde le lactose en glucose d’ADN à partir de l’ARN) apparaît universel dans le monde
et galactose. En l’absence de lactose ou en présence d’une vivant. En 1975, Howard Temin et David Baltimore reçurent
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(Arabidopsis thaliana) en 2000… duites en réponse à l’infection par un phage, ces enzymes
reconnaissent et coupent de courtes séquences d’ADN (3-
Enfin, Craig Venter (Figure 8) épatera le monde en 6 nucléotides), contrairement aux DNAses, qui coupent
achevant la séquence complète du génome humain en l’ADN au hasard (32, 33, 34). Cette découverte leur valut
2003, après dix ans d'efforts, pour un coût de 3,7 milliards le prix Nobel de physiologie/médecine en 1978. On peut
de dollars (29, 30). De façon étonnante, on n’a identifié désormais découper spécifiquement des fragments d’ADN
que 23 688 gènes, contre les 100 000 attendus par les scien- portant les gènes à étudier.
tifiques. Le génome humain comporte 3,25 milliards de
nucléotides et les gènes ne représentent que 1,2 % du Pour produire des fragments d’ADN en grande quan-
génome. À quoi servent les 3 milliards de nucléotides tité, on s’est tourné vers les techniques de clonage utilisant
restants ? Cet ADN non codant est constitué de multiples des vecteurs dans lesquels on a inséré des gènes à étudier.
éléments (31) : introns ; régions régulatrices contrôlant la Ce sont surtout des plasmides, molécules d’ADN circulaire
transcription des gènes ; très nombreuses séquences répé- présentes en grand nombre dans certaines bactéries. Ces
tées (ADN satellites, mini-satellites, micro-satellites…) plasmides peuvent être facilement introduits dans d’autres
retrouvées tout au long du génome ; éléments mobiles bactéries, et même dans les cellules animales ou végétales
(transposons, rétrotransposons, rétrovirus endogènes…) (Figure 9). C’est ainsi qu’en 1971, Stanley Cohen (1922-)
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