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AT 13 C R SADIK Atelier 13

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ADERSE 2018

La bonne gouvernance au service d’une finance durable et


responsable : Cas du Maroc.

Préparé par : AMINA SADIK Doctorante à la FSJES – Université Cadi Ayyad,


amina.sadik.pro@gmail.com, GSM : 06 52 12 78 96

Sous la Direction de : M. SIDI MOHAMED RIGAR Professeur chercheur, Directeur du


Groupe de Recherches et d'Etudes en Management et Ingénierie de Développement –
Université Cadi Ayyad, mrigar@gmail.com, GSM : 06 70 09 91 19

Résumé :

Suite aux divers scandales qui ont marqué le secteur financier, il a fallu responsabiliser
davantage les directions des entreprises et influencer leurs pratiques de gouvernance.
L’évolution de ces pratiques a contribué clairement au développement de la finance durable.

Cette notion de durabilité constitue un rapprochement entre le concept fondamental du


développement durable et les objectifs de performance de chaque entreprise. Il faut noter que
malgré le fait que le développement durable soit relativement récent, il est au centre de
plusieurs politiques, initiatives et stratégies d’organisations favorisant les meilleures pratiques
de gestion et de gouvernance en vue d’aboutir à une transition vers une finance responsable.

Mots clés : Gouvernance, secteur financier, finance durable, développement durable,


performance, durabilité, politiques, stratégies d’organisations, pratiques de gestion,
responsable.

0
Sommaire

Sommaire .............................................................................................................................. 1

Introduction ........................................................................................................................... 2

Partie I: Enjeux de la gouvernance et de la finance durable .................................................. 4

1. .............................................................................................................................. C
larification des concepts ............................................................................................ 4
2. .............................................................................................................................. E
njeux de la bonne gouvernance et de la RSE .............................................................. 9
3. .............................................................................................................................. E
volution de la finance durable ................................................................................. 13

Partie II: Rôle de la bonne gouvernance en l’évolution des pratiques de la finance


responsable et durable au Maroc ....................................................................................... 22

1. .............................................................................................................................. E
volution des pratiques de bonne gouvernance au Maroc ........................................ 22
2. .............................................................................................................................. E
ssor de la RSE et de la finance durable : Contexte marocain.................................... 25
3. .............................................................................................................................. P
erspectives d’évolution des pratiques de bonne gouvernance et de la finance
responsable au Maroc ............................................................................................. 29

Conclusion ........................................................................................................................... 34

Références ........................................................................................................................... 35

1
Introduction

Au niveau international, beaucoup d’évènements et de scandales financiers ont mené


les instances politiques et réglementaires à s’orienter davantage vers les enjeux juridico-
financiers en relation avec la gouvernance, en vue d’assurer une meilleure protection aux
utilisateurs finaux et d’allier les intérêts des dirigeants et ceux des investisseurs. Ceci en
cadrant mieux les pratiques en gouvernance, mais également en améliorant la déclaration et la
présentation de l’information financière et comptable.

La gouvernance, considérée actuellement comme l’un des piliers du développement


durable, constitue un nouvel aspect de la démocratie participative. Elle requiert l’alliance, la
participation et le partenariat entre toutes les parties prenantes du développement durable.

En effet, l’évolution du développement durable s’est accentuée significativement


dernièrement sur tous les niveaux que ce soit au niveau mondial, au niveau africain, ou au
niveau marocain. Ce sujet a suscité beaucoup d’intérêt, tant de la part des gouvernements que
de l’opinion publique ou de la société civile. Dans ce cadre, un modèle économique moderne
basé sur le trio économie, social et environnement, est présumé remplacer le modèle de
croissance capitaliste, reproché d’être responsable de pénuries futures et de troubles
climatiques.

Dans cette perspective, les entreprises se sont focalisées sur la conciliation de ces deux
approches c'est-à-dire la rentabilité et les préoccupations de préservation de l’avenir, ne serait-
ce que pour améliorer la création de valeur pour l’organisation.

La réglementation de la gouvernance est devenue donc d’une très grande importance,


tant sur la scène internationale qu’au niveau du Maroc, étant donné que les pratiques de
gouvernance impactent fortement l’atteinte des objectifs de la firme en assurant un équilibre
entre les trois dimensions du développement durable.

L’environnement institutionnel de la gouvernance d’entreprise au Maroc dispose


actuellement d’un large éventail de textes juridiques. La majorité de ces textes, ayant été émis,
corrigés ou révisés avec la grande réforme du marché financier en 1993, comprennent

2
généralement des dispositions en relation avec la gouvernance d’entreprises, dont le but est la
protection des actionnaires et le respect des diverses dispositions légales et réglementaires
organisant le marché financier.

Pour assurer une bonne gouvernance, le code marocain des bonnes pratiques de
gouvernance d’entreprise, rassemble les normes de gestion des relations entre les dirigeants de
l’entreprise, ses actionnaires et les autres parties prenantes. Il s’intéresse particulièrement à la
mise en place des systèmes de contrôle permettant de mieux gérer les risques potentiels et les
éventuels conflits d’intérêt.

Généralement, ce code se fonde sur quatre principes fondamentaux :

Ø Les responsabilités de l’organe de gouvernance ;


Ø Le droit des actionnaires et leur traitement équitable ;
Ø La transparence et la diffusion de l’information ;
Ø Le rôle des parties prenantes et leur traitement équitable.

Dans le présent document nous allons essayer de répondre à la problématique :

En quoi les pratiques de bonne gouvernance favorisent-elles l’essor de la


finance durable ?

3
Partie I : Enjeux de la gouvernance et de
la finance durable

1. Clarification des concepts :

Concept de gouvernance :

Etymologiquement, le terme gouvernance tire son origine du verbe grec « kubernân »


dont la signification est piloter un navire. Jusqu’à la fin du 18ème siècle, ce mot était employé
en français pour désigner le gouvernement. Mais depuis les années 80, on a assisté à
l’émergence de la notion de gouvernance publique et gouvernance d’entreprise.

La Banque mondiale propose une définition étendue du concept de gouvernance :

« Nous définissons la gouvernance comme étant l’ensemble des traditions et institutions par
lesquelles le pouvoir s’exerce dans un pays avec pour objectif le bien de tous ».

Cette interprétation est très intéressante dans la mesure où elle met en liaison le
pouvoir et la recherche du bien commun. Cette représentation de l’intérêt collectif se place au
centre de la notion de la gouvernance.

La gouvernance représente donc l’application de certaines normes dans le but


d’assurer une bonne coordination des parties prenantes d'une organisation, chacune disposant
d’une partie de pouvoir, pour prendre des décisions consensuelles et d’émettre des opérations
organisées.

La naissance de la notion de gouvernance a eu lieu dans la sphère privée en la


considérant comme une norme de base ayant pour finalité « la sécurisation des
investissements financiers et la maximisation du profit pour les apporteurs de capital »1. Dès
lors, l’introduction de gouvernance n’a cessé de s’implanter dans plusieurs domaines.

1
Shleifer et Vishny, 1997

4
En effet, la gouvernance d’entreprise ou Corporate Governance (en anglais), a vu le
jour durant les années 80 pour se déployer après dans la majorité des économies développées2.

Cette gouvernance d’entreprise provient du besoin d’unir plusieurs intérêts,


généralement opposants, à savoir ceux des actionnaires et des dirigeants.

L’administration d’une entreprise peut développer sa pratique de gouvernance à


travers un rythme graduel pour la rendre plus participative, en se basant sur une
communication visée et ajustée en vue de lier toutes les parties prenantes. Ce modèle nous
dirige vers la théorie de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise dite RSE.

La RSE représente un cadre pour l’engagement des entreprises ayant pour finalité de
mettre en priorité le développement durable dans leur stratégie, en rendant compatible leurs
visions économiques sociales et environnementales avec les objectifs du développement
durable.

De même l’intégration de la RSE a modifié grandement le poids relatif de la valeur


actionnariale et partenariale dans chaque modèle adopté pour la gouvernance de l’entreprise.
Certes, la création de valeur demeure le but ultime des dirigeants, cependant, l’émergence de
la nouvelle valorisation des actifs de l’entreprise a favorisé les finalités sociales,
environnementales, et économiques.

Concept de la finance durable :

La définition de ce concept fait appel à deux notions faisant partie d’une démarche qui
donne un aspect éthique à la finance, ces notions sont: le développement durable et
l’investissement socialement responsable.

a. Définition du Développement Durable :

Le Développement Durable se définit comme étant : « Le développement qui répond


aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations
futures à répondre aux leurs »3.
Il y a également d'autres définitions du développement durable, qui montrent les
politiques de développement durable. A titre d’exemple, la définition qui le présente comme

2
Valin et al., 2006, p. 38
3
Selon le Rapport Brundtland en 1987

5
un développement qui intègre, les aspects économiques, sociaux, et environnementaux.
Cependant d'autres expressions expriment qu’il a pour but d’équilibrer ces aspects
économiques, sociaux, environnementaux, parfois même aspects institutionnels ou encore
culturels. Le schéma ci-dessous montre les différents aspects du développement durable :

Figure 1 : Schéma conventionnel du développement durable

Finalement, une façon habituelle de définir le développement durable est de renforcer


les fondements et les critères doit remplir. A savoir, vision de long terme, vision universelle et
globale, principe de précaution, concentration des différentes dimensions et esprit de
participation. De ce fait, suite à ces nombreuses définitions, il existe une grande difficulté à
établir les critères permettant à plusieurs investisseurs de qualifier leur projet comme
conciliable ou au service du développement durable.

b. Définition de l’investissement socialement responsable :

L’ISR est défini selon Novethic comme l’ensemble des démarches d'intégration de
critères extra-financiers aux divers modes de gestion financière. Egalement, De Brito et
al. (2005) donnent presque la même définition en appelant l’ISR « Investissement multicritère
ou Investissement Durable » et en le présentant comme une pratique d’investissement qui
intègre des éléments non strictement financiers dans la décision d’allocation des actifs.

6
Une autre explication brève donnée par Schueth (2003) souligne que l’ISR est une démarche
d’intégration des valeurs personnelles et sociétales lors de la prise d’une décision
d’investissement et le qualifie « d’Investissement Ethique ».
Tandis que le forum européen de l’investissement durable (Eurosif 2008) présente ce
concept comme suit: «L’ISR est un terme générique qui couvre les investissements
éthiques, les investissements durables et tout autre investissement qui combine les
objectifs financiers des investisseurs avec une prise en compte des considérations
environnementales, sociales et de gouvernance».
En effet, selon les travaux de la commission ISR de Paris EUROPLACE4 l’ISR est
présenté comme étant « une pratique qui recouvre tout mode de gestion, processus
d’investissement ou utilisation de ses droits et de son pouvoir d’influence en tant que
détenteurs d’actifs qui tente d’intégrer les dimensions extra-financières dans les
évaluations des entreprises afin d’appréhender leur risque ou opportunités sociales,
environnementales et en matière de gouvernance. Il s’agit donc d’une technique qui ne
préjuge pas des préférences particulières de chaque investisseur, particulier ou
institutionnel y attache même si le rapprochement avec le concept de responsabilité
sociale de l’entreprise (RSE) peut être fait. L’ISR est à l’investisseur ce que la RSE est à
l’entreprise : une définition renouvelée de la prise en compte des externalités positives
ou négatives de ses objectifs économiques et financiers. »5

Il découle donc de toutes ces définitions, que le terme Investissement socialement


responsable6 (ISR) est utilisé pour définir les actions du choix des placements, non seulement
en fonction de critères financiers à savoir rentabilité élevée ou encore risque réduit, mais en
prenant en considération durant le processus de décision des dimensions sociales, morales ou
environnementales. Cette pratique a engendré beaucoup de travail du fait qu’elle constitue une
réponse efficace à la crise morale du capitalisme, chose qui lui a permis d’avoir un important
essor dans le monde actuel. Le but est d’avoir un réel consensus entre la finance et le
développement durable7.

4
Commission ISR sous la présidence d’Antoine de Salins, membre du Directoire des Fonds de réserve pour les
retraites (FRR)
5
Observatoire sur la Responsabilité sociétal des Entreprises, Novembre 2009, page 9.
6
Cette expression est la traduction de « Socially responsible investment » en anglais, et qui est remplacée
graduellement par le vocable « Sustainable and Responsible investment » en vue d’intégrer la notion du
développement durable.
7
Il est à noter qu’il y a plusieurs manière d’investir en combinant finance et développement durable ; à savoir
les fonds de partage (une part du revenu est restituée à des associations humanitaires), les fonds solidaires

7
c. Définition de la finance durable :

La finance consiste à aboutir en une utilisation optimale des ressources ou


de l’épargne disponible pour pallier aux besoins de financement, c’est une fonction qui
intervient dans toutes les décisions importantes qui affectent les différentes structures des
organisations.

La conciliation de la finance et des aspects environnementaux sociaux et de


gouvernance, faisant critères d’optimalité, est désormais une obligation. Ceci a favorisé
l’émergence de la notion de la finance durable, ne serait-ce que pour appuyer la transparence
financière et faciliter la transition énergétique.

La finance durable ou sustainable finance en anglais, est une notion souvent employée
dans des contextes différents. Néanmoins, on trouve des éléments essentiels dans toutes ses
définitions.

Parmi les définitions données a la finance durable: 8

«La finance durable est une approche en matière d’investissement et de financement


qui se veut à long terme. La prise en compte de critères environnementaux, sociétaux et liés à
la gouvernance – appelés facteurs ESG – revêt une importance déterminante dans le processus
de décision. En pratiquant la finance durable, on essaie de générer un rendement non
seulement financier, mais également social et écologique. »

(fonds d’épargne affectés à sponsoriser des projets environnementaux ou sociaux) ainsi que les produits
bancaires à caractère éthique (C'est-à-dire les prêts pour agir contre la pauvreté, ou encore en vue
d’accompagner les projets en relation avec la préservation de l’environnement).
8
Définition fournie par l’organisation faîtière Swiss Sustainable Finance (SSF)

8
2. Enjeux de la bonne gouvernance et de la RSE

Il est important de souligner que la RSE joue un rôle déterminant dans la gouvernance
de l’entreprise. Ceci s’explique par la régulation de la relation de cette dernière avec ses
différents partenaires. Dans cette partie nous allons présenter la notion de la RSE, pour
ensuite mettre en lumière son impact sur la bonne gouvernance.

a. Emergence du concept de la RSE

Actuellement, le monde connait des changements économiques et sociaux simultanés,


tels que la globalisation des échanges, la multiplication des scandales financiers,
l’accroissement de débats sur le comportement éthique des dirigeants et l’évolution du
réchauffement climatique. Ces mutations ont favorisé et souligné le fait que l'entreprise en
elle-même constitue une affaire sociale à part entière.

La notion de responsabilité sociale de l’entreprise en sigle RSE, vient en réponse à cet


enjeu, incorporant des valeurs éthiques aux préoccupations financières et économiques de la
société. Ce concept apparu au milieu des années soixante, soit au début du fordisme, dans la
littérature consacrée aux entreprises9, a connu des changements importants au fil du temps et
continue de progresser à la même cadence que l’évolution de la société et de ses ambitions.

Généralement, il n’y a pas de définition universelle ni de critères standards et reconnus


de la responsabilité sociale des entreprises. Cependant, la majorité des définitions fournies,
dont celle présentée par la commission européenne10, se mettent d’accord sur le fait que la
RSE est un concept qui permet à l’entreprise d’intégrer les différentes préoccupations sociales
et environnementales dans ses stratégies et activités.

Il s’agit d’un outil qui permet d’améliorer l’effet négatif que les activités
commerciales ou industrielles peuvent avoir sur la société, en se référant aux principes du

9
Social Responsabilities of the Businessman de H. Bowen en 1953, et The Responsible Corporation par G
Goyder en 1961
10
La RSE est définie dans le Livre Vert de la commission européenne comme "l'intégration volontaire par les
entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations
avec les parties prenantes".

9
développement durable. Ceci a stimulé l’apparition de la notion de triple bottom line, qui se
base sur le fait que pour atteindre une performance optimale, il est indispensable d’intégrer les
dimensions économique, environnementale et sociale dans la politique à long terme de
l’entreprise.

En effet, adopter une stratégie RSE qui s’établi sur cette notion de triple résultat, ne
signifie pas uniquement être en conformité avec la législation, mais s’inscrit dans un cadre
plus large visant à investir surtout dans le capital humain, l’environnement est les relations
avec les parties prenantes. Evidemment, La conformité avec la loi est une obligation.
Toutefois, la RSE, relève d’une démarche volontaire et non contraignante, et constitue
l’ensemble d’apports supplémentaires des entreprises aux attentes sociales et
environnementales. Elle implique une politique de prévention socio-environnementale active
permettant d'optimiser les bénéfices de la firme et de développer ses activités, tout en
s’alignant sur les textes de règlementation.

b. La RSE comme instrument pour une bonne gouvernance d’entreprise

Après la crise financière de 2007/2008, il y a eu un grand succès des législations et du


référentiel que composent les bonnes pratiques en gouvernance, caractérisées par créatrices de
valeur durable.

Dans ce cadre, il y a eu beaucoup d’analyses du référentiel de « meilleures pratiques »


de gouvernance, qui ont remis en cause la relation qui existe entre la gouvernance, telle que
présentée par le courant disciplinaire, et la création de valeur.

Les théories disciplinaires, qui sont la théorie actionnariale et la théorie partenariale


sont au cœur du paradigme fonctionnaliste qui est reliée à la littérature économique
néoclassique (Ardalan, 2007, p. 508; Bonnafous-Boucher, 2005, p. 39). Suivant ce paradigme,
l’agent économique est un être passif, rationnel et égoïste. Son unique intention est de rendre
maximale son utilité de la fonction risque/rentabilité. Du moment que chaque agent souhaite
optimiser son utilité respective, cela fait donc apparaître des intérêts divergents et conflictuels.

10
Selon L’approche fonctionnaliste qui est surtout analytique, la gouvernance n’a pour
utilité que minimiser les coûts liés aux intérêts divergents des différents partis11.

En fait, la centralité attribuée aux dispositifs de résolution des conflits d’intérêt entre
ces différents partis se présente, du côté fonctionnaliste, par l’examen de dysfonctions dans le
mode de gouvernance.

Après L’abus et le manque de discipline des dirigeants qui ont conduit aux scandales
financiers dans le début des années 2000, la législation et les codes de conduite ont mis le
point sur la réduction des coûts associés aux conflits d’intérêt. Ceci en appuyant une
surveillance plus développée et une incitation plus adaptée des dirigeants. « La question de la
gouvernance s’inscrivait ainsi dès l’origine dans une perspective de « régulation » du
comportement des dirigeants, de définition des « règles du jeu managérial » ». 12

En effet, Jensen et Meckling (1976) remettent en question quelques propositions


établies par la théorie néoclassique, ayant pour extrême finalité la maximisation des profits ou
de la valeur actuelle de la firme13. Ceci notamment par l’étude de la relation principal-agent
déployée dans la théorie normative de l’agence. Pour ces théoriciens il est primordial de
définir la façon dont les droits de propriété déterminent l’allocation des coûts et des gains
entre les principaux participants d’une firme. Ils donnent alors beaucoup d’importance au
concept de contractualisation, d’asymétrie d’information et de conflits d’intérêt entre
actionnaires et dirigeants.

Quant à la théorie positive de l’agence, elle se base essentiellement sur une nouvelle
définition de la firme. Contrairement au courant néoclassique, « […] la firme est un faisceau
de relations d’agence, notion assimilable à celle de nœud de contrats [nexus of contracts] ».14
Allant de ce concept, Jensen et Meckling (1976) présentent la relation d’agence comme un
contrat alliant les mandants qui sont les principaux ou les actionnaires, et les mandataires qui
sont les agents ou les dirigeants. Plus précisément, cette relation d’agence a été découverte par
les actionnaires, qui donnent la gestion de l’entreprise à des personnes qualifiés, qui sont les
agents, dans le but que ces derniers opèrent pour leurs intérêts.

11
Ardalan, 2007, p. 518; Bonnafous-Boucher, 2005, p. 38.
12
Charreaux et Wirtz, 2006, p. 298.
3
Jensen et Meckling, 1976, tiré de Clarke, 2004, p.59.

14
Charreaux, s.d. Encyclopédie Universalis

11
Cette conception contractuelle de la firme prend sa source de la scission du contrôle et
de la propriété. « The separation of ownership from control produces a condition where the
interests of owner and of ultimate manager may, and often do, diverge […] ».15 La démarche
décisionnelle est séparée en deux grandes fonctions, qui sont le contrôle et la gestion, et qui
sont respectivement assurées par les actionnaires et les dirigeants. Les actionnaires ayant le
statut de fournisseurs de capital et de détenteurs de risque résiduel, ils possèdent des
responsabilités de contrôle dont la mission d’approuver les projets et de surveiller le
management.

Dans un cadre juridico-financier et selon les principes posés par la théorie de l’agence,
la gouvernance admet donc l’étude des moyens par lesquels les actionnaires pourvoient un
rendement sur leur investissement. Principalement, ces moyens consistent en l’établissement
des instruments de gouvernance internes et externes marquant les coûts liés aux différences
d’intérêts ou conflits d’agence entre les décideurs et les financeurs.

Les instances politiques et réglementaires désiraient en établissant des standards en


matière de gouvernance la réconciliation des intérêts des dirigeants à ceux des actionnaires.

L’importance que détient le concept de la gouvernance se justifie actuellement sur


beaucoup de niveaux, parce que justement on considère la gouvernance comme étant partie du
modèle fondamental de développement durable.

Il est aujourd'hui admis, en droit comme en gestion, que la gouvernance doit


s’analyser d’une manière plus étendue en développant le nombre de parties prenantes à
prendre en considération, ceci s’oppose à la théorie restrictive qui fait porter la théorie de
l’agence à la gouvernance et qui se résume dans la satisfaction des intérêts des actionnaires.

A la notion de durabilité économique, principe de base de la constitution en société,


s’additionnent depuis quelques décennies celles de durabilité sociale et environnementale.
Dans le moment actuel, en addition aux enjeux sociaux entre autre les droits de l’homme, le
travail des enfants..., on assiste de plus en plus à une raréfaction des ressources naturelles, à
une amplification de la pollution et à une courbe régulière croissante de la perte de la
biodiversité. Ceci rend de plus en plus impératif pour les dirigeants et les grands investisseurs
d’adopter des critères extra-financiers en addition à ceux financiers durant leur processus
décisionnel. En n’attribuant d’importance qu’aux actionnaires et en n’appuyant que
15
Berle et Means, 1932, p. 6

12
l’augmentation de la valeur de la société par actions dans le marché, les théories financières
de la firme dont la théorie d’agence, ne proposent pas le cadre conceptuel le plus adapté pour
encadrer et conduire la prise de décision des dirigeants. Cependant, la théorie des parties
prenantes est beaucoup plus en adéquation avec les principes de la gouvernance dans une
perspective durable.

3. Evolution de la finance durable


a. Facteurs d’évolution de la finance durable

La transition vers une économie durable et responsable se voit accélérer ces derniers
temps, à travers notamment la mise en œuvre des objectifs du développement durable.
L’évolution et l’essor de la finance durable se justifie donc avec la progression rapide de
l’intérêt attribué à la bonne gouvernance, à l’éthique, à la justice social, mais surtout à la
qualité environnementale et aux changements climatiques.

i. Fondement et évolution de la justice sociale

Tout d’abords, il serait judicieux de donner une définition de la notion du social.


Généralement cette notion peut être abordée selon trois approches:

Ø Selon la première approche le concept du social étant lié à la notion de politique


sociale, ou politique d’assistance sociale désigne tout ce qui se rapporte aux
démarches d’aide à la situation des plus démunis.
Ø Suivant la deuxième approche16, le concept du social couvre
non uniquement la dimension du travail et de la sécurité sociale mais aussi tout ce qui
concerne les conditions de vie des individus, et inclut donc le sujet du logement, de
l’éducation et de la consommation.
Ø La troisième approche du social, considère les politiques
sociales comme étant des appuis sociaux de la communauté ayant pour finalité de
« rendre gouvernable une société ayant opté pour un régime démocratique, dans le
cadre d’un système économique libéral »17. Autrement dit, il s’agit de considérer que

16
Fournie par jacques Fournier et Nicole Questiaux dans leur ouvrage « Le Traité du social », et aussi par
l’INSEE dans leur revue « Données sociales »
17
M.TH. Join-Lambert, A. Bolot-Gittler, Ch. Daniel, D. Lenoir, D. Méda, « Politiques sociales », Ed Presses de la
FNSP, 1997, p.27.

13
les hommes d’un même pays sont membres d’une même société, même s’ils ne se
connaissent pas.

Le tableau18 suivant présente d’une façon détaillée les principaux courants intellectuels qui
posent l’idée d’un nécessaire rattachement des individus à la société:

Libertariens Multiculturalistes Libéraux Communautariens

La La société La société comme La société La société comme


conception comme ensemble de comme « communauté de
de la société association communautés association communautés »
d’individus distinctes d’individus

Les Les contrats Le contrat social Le contrat Les valeurs morales


fondations privés social partagées
de la société

Les La liberté La liberté La liberté Le respect des


principes de absolue tempérée par valeurs communes
L’égal respect des
justice l’égalité (ou
La responsabilité identités (nationales, La responsabilité
équité)
individuelle linguistiques, sociale
ethniques et La recherche
La quête du bien
religieuses) du juste

Le degré Fort Faible Fort Moyen


d’ouverture
des groupes
dans la
société

Le lien entre Hostilité à l’Etat Dissociation de Identification (variable selon les


Etat et comme lieu l’Etat et des nations de l’Etat et de auteurs)
nation(s) d’intégration de (ou « minorités la nation
la société mais nationales)
respect de l’idée
nationale

Le rôle de Garantir les Garantir les libertés Garantir les Protéger les

18
Olivier Nay, « Histoire des idées politiques », Ed Dalloz/A. Colin, 2004, p.557

14
l’Etat libertés individuelles libertés solidarités et les
individuelles individuelles valeurs
Protéger les droits
(Etat « veilleur communautaires
culturels Maintenir
de nuit »
l’égalité des
chances
(tempérer les
injustices par le
droit)

ii. Histoire et progrès du concept de gouvernance

Au fil des années, le terme Gouvernance, employé tant au niveau économique que
politique, a connu des débats très important sur la scène internationale, pour aboutir à la
gouvernance d’aujourd’hui, qui s’intéresse aux interrogations liées aux mécanismes
nécessaires à la négociation des différents intérêts de la société.

En fait, La question sur la gouvernance d’entreprise s’est révélée en premier lieu aux
Etats-Unis, suite à pleins de scandales financiers et comptables qu’ont connu certaines
entreprises, à titre d’exemple Enron, Worldcom, ou Adelphis. C’est à cause de ces scandales
que sont apparues les défaillances d’un système de surveillance des directions générales, qui,
jusqu’à cette période était présumé le système le plus répandu au monde.

Le tableau suivant donne un aperçu de l’histoire de l’évolution de la forme de


gouvernance d’entreprise en fonction des différentes phases du capitalisme.

Période Phase du capitalisme Forme de gouvernance


Pendant le XIXème Le capitalisme familial Durant cette période, les relations qui existaient
siècle et au début du entre actionnaires et dirigeants étaient très
XXème siècle simples, parce qu’ils sont en fait les mêmes
personnes. Les entreprises étant souvent
fondées par des familles, ces dernières
gardaient leurs noms de famille comme marque
de société. Il n’y avait pratiquement pas de
problèmes de gouvernance, du moment que les
dirigeants étaient eux même les propriétaires.

15
Durant la période Le capitalisme Ce type de capitalisme se basait sur l’apparition
qui relie les deux managérial d’un nouveau modèle de régulation et de
guerres mondiales gouvernance des entreprises. L’émergence de
ce modèle était le résultat, d’une transformation
des générations, et d’un développement
considérable des sociétés anonymes donnant
possibilité d’avoir des capitaux émanant
d’actionnaires qui n’étaient pas les dirigeants
de l’entreprise. De ce fait, les fondateurs des
entreprises ne devenaient plus tous leurs
dirigeants. La croissance des entreprises reposa
donc sur l’ouverture du capital, ce qui a mené à
une grande évolution de la bourse.
Des années 1970 Le capitalisme Cette époque du capitalisme a connu le
aux années 2000 actionnarial développement de plusieurs entreprises
novatrices reliant richesses et intelligence,
grâce à l’expansion de l’utilisation des
nouvelles technologies, entre autres les NTIC.
Durant cette période il y a eu l’apparition de
certaines normes de rentabilité comme la
rentabilité financière ou Return On Equity,
devant être d’au moins 15 %, chose qui a
marqué le retour au pouvoir des actionnaires, et
l’approbation de la notion du Corporate
Government.
Aujourd’hui Le capitalisme partenarial Après de vraies réussites, le capitalisme
actionnarial a connu certaines défaillances qui
ont stimulé l’apparition du capitalisme
partenarial. Ce type de capitalisme se fonde sur
le principe d’une gouvernance élargie, qui
prends en compte les différentes parties
prenantes de l’entreprise à savoir les
actionnaires, les salariés, les clients, la société

16
et l’environnement.

iii. Histoire du réchauffement climatique

A partir de la fin du XIXème siècle, l’humanité a commencé à réaliser qu’elle fait


partie des facteurs responsables de l’accroissement de la concentration du gaz à effet de serre,
et plus particulièrement du CO2 dans l’atmosphère. Ceci a stimulé le
réchauffement climatique, qui génère beaucoup d’effets inquiétant l’humanité de l’avenir de
la biodiversité dont elle fait partie.

En effet, l’histoire du réchauffement climatique montre le rythme régulier ascendant


qu’ont connu les changements climatiques de la planète, et l’intérêt croissant qui leur est
accordé. Le tableau suivant montre les principales années marquant la prise de conscience du
monde du réchauffement climatique :

Années Faits marquants


1827 Apparition de la notion « Effet de serre » désignant la rétention partielle dans
l’atmosphère des radiations solaires.
1896 Découverte de Svante August Arrenius que l’industrie qui fait accroitre la
consommation du charbon stimule l’augmentation du CO2 présent dans
l’atmosphère terrestre.
1958 Keeling inventa la fameuse courbe de Keeling montrant l’accroissement du taux
de dioxyde de carbone. Et de ce fait montra que le gaz à effet de serre ne se limite
pas dans les pays ou continents industrialisés, mais se répartit un peu partout dans
la Terre.
1967 le Rapport Mc Namara prévoit une augmentation des émissions de gaz à effet de
serre de 2.5 °C avant la fin du XXème siècle.

1972 Apparition du rapport « Nous n’avons qu’une Terre » écrit par René Dubos,
mettant en lumière l’importance de l’expression « penser global, agir local ». Ce
support a été utilisé comme base de la première Conférence des Nations unies sur
l’environnement connu également sous dénomination « Sommet de la Terre » qui
a eu lieu à Stockholm.

17
1979 Cette année a été marquée par la Conférence de Genève, et la première sortie du
Programme de recherche climatologique mondial.

1987 Apparition d’une définition universelle de la notion du développement durable


dans le Rapport Brundtland: « Le développement durable est un développement
qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations
futures de répondre aux leurs ».

1988 Création du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat


(GIEC). Ce groupe a pour objectif de donner des évaluations précises de la
situation des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques
concernant les changements climatiques, leurs origines, leurs conséquences
potentielles et les stratégies éventuelles.

1992 Connu sous le nom du Sommet de la Terre ou Sommet de Rio de Janeiro, il a été
l’occasion d’approuver la création de la Convention-cadre des Nations unies sur
les changements climatiques (CCNUCC).

1995 Le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat constate que


l’analyse de la situation actuelle suscite un intérêt sérieux de la part de l’humanité
sur le climat planétaire.

1997 Signature du protocol de Kyoto engageant les pays industrialisés (38 pays) dans
des démarches de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 5.2% à
l’horizon 2012.

2005 Ratification du Protocole de Kyoto par 141 pays dont 25% sont des pays
industrialisés. Ces derniers sont engagés à travers cette signature à réduire leurs
émissions de gaz à effet de serre, tandis que les pays en voie de développement
n’ont que de simples responsabilités d’inventaires d’émissions. Il est à noter que
les pays qui diffusent plus du un tiers des gaz à effets de serre dans le monde, qui
sont les États-Unis et l’Australie n‘ont pas signé ce protocole.

2006 Pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, Nicholas Stern évalue cet effort
à 500-550 ppm, qui égalise 1% du Produit Intérieur Brut annuel global, et précise
que rester passif coûterait à l’humanité 20 fois plus.

2007 Le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat fournit un

18
nouveau rapport résumant que la plupart du développement repéré de la
température moyenne de la planète depuis la fin du XIXème siècle est très
probablement à l’origine de l’accroissement constaté des gaz à effet de serre émis
par l’Homme. Le taux de probabilité est supérieur à 90 %, contre 66 % en 2001.

2008 C’est à Bali, qu’une nouvelle phase de négociations internationales concernant les
changements climatiques est ouverte pour initier la COP15 à Copenhagen venant
en continuité au Protocole de Kyoto qui expire en 2012.

2009 Tenue de la COP15 à Copenhagen ayant pour objectif l’aboutissement des


négociations internationales à un substitut du Protocole de Kyoto pour la phase
post 2012.

2012 Tenue de la COP18 à la capitale de Qatar « Doha » en vue d’élaborer le régime


climatique post 2020.

2014 Les risques sont estimés très élevés par le GIEC, qui s’est basé sur des éléments
scientifiques, pour déceler les effets de l’augmentation moyenne des températures
de +4°C menaçant la biodiversité et la sécurité alimentaire. Son rapport
d’évaluation a également porté sur l’adaptation et vulnérabilité par rapport aux
risques prévus de perdre jusqu’à 2% des revenus annuels mondiaux.

2015 Cette année a été marqué par l’accord de Paris durant la COP21 adopté par 195
pays ainsi que l’Union Européenne, et qui constitue un tournant dans la lutte
contre le réchauffement climatique. Ceci du fait qu’il incite tous les pays du
monde sans exception, à diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre et à
garder le degré du réchauffement climatique en dessous de 2°C d’ici 2100.

2016 Tenue pour la 2eme fois à Marrakech après la COP7, la COP22 avait pour
objectif de mettre le point sur les règles d’application de l’accord de paris conclu
durant la COP21. Elle a été l’occasion également pour mettre en place une feuille
de route pour les années à venir favorisant la promesse d’accélérer le rythme des
actions climatiques.

2017 Ayant lieu en Allemagne et plus précisément à Bonn, la COP23 a souligné


l’importance de la finance en vue de tenir les promesses d’atténuation et du
maintien du degré de réchauffement climatique et concrétiser les engagements qui

19
ont été tenus lors de l’accord de Paris.

20
b. Contexte actuel de la finance carbone

Comme nous l’avons évoqué précédemment, le monde chemine dorénavant, lentement


mais surement, vers une économie verte. D’ailleurs on assiste à la naissance d’un nouveau
marché de la finance durable, nommé marché du carbone. Pour comprendre le
fonctionnement de ce marché, il faut revenir au sommet de Copenhague, et précisément à la
COP 15, qui a initié la notion de budget carbone. Ce dernier se définit comme étant le plafond
d’émissions de gaz à effet de serre (GES), exprimé en millions de tonnes de CO2 par an, fixé
sur une durée déterminée, afin de permettre un pilotage des évolutions structurelles des
émissions de gaz à effet de serre tout en diminuant certains impacts conjoncturels, telles que
les variations de rigueur hivernale.

Sur la base de ce système de plafonnement, et sur la base d’un système d’échange des
droits d’émission des GES, le marché du carbone a vu le jour. En effet, depuis le 1er Janvier
2005, l’Union Européenne a instauré un système d’échange de quota, qui vise à limiter les
émissions de CO2 des secteurs industriels les plus polluants. Et depuis janviers 2012, les
entreprises québécoises, qui innovent dans les technologies propres, et qui parviennent à
réduire leurs émissions de GES en dessous du plafond fixé, peuvent vendre le crédit
excédentaire sous forme de crédit carbone, tandis que celles qui ne respectent pas leur quota
doivent acheter des droits d’émission sur le marché du carbone. Il en résulte donc, que réduire
son empreinte carbone est dorénavant rémunéré.

i. Définition de la compensation carbone :

Il s’agit d’une démarche permettant, de mettre en place des projets de réduction ou du


maintien du degré carbone en un autre pays, après avoir essayé de réduire ses émissions de
GES dans son pays d’origine. Autrement dit, compenser les émissions CO2 des pays Nord en
finançant des investissements dans les pays Sud. Ces investissements se réfèrent à des projets
qui concernent surtout l'efficacité énergétique, la valorisation des énergies renouvelables ou
encore la reforestation.

Cette approche repose sur le fait que l'effet de serre représente un phénomène qui
touche le monde en sa globalité, et qu'une quantité de carbone émise en un lieu peut être
compensée par la réduction d'une quantité similaire en un autre lieu.

21
ii. Les unités de mesure du marché du carbone

Ø Unité de Quantité Attribuée (UQA) : C’est la quantité d’émissions consacrée


aux pays engagés répartie en tonnes d’équivalent CO2.
Ø Unité de Réduction des Emissions (URE) : Ce sont les crédits attribués pour
des réductions d’émissions effectuées dans le cadre du mécanisme de la mise
en œuvre conjointe (MOC). Cette unité est égale à une tonne métrique
d’équivalent de CO2.
Ø Unité de Réduction Certifiée des Emissions (URCE) : Il s’agit des crédits
accordés pour des réductions d’émissions réalisées dans le contexte du
mécanisme de développement propre (MDP). Cette unité est égale à une tonne
métrique d’équivalent de CO2.

22
Partie II : Rôle de la bonne gouvernance en
l’évolution des pratiques de la finance
responsable et durable au Maroc
1. Evolution des pratiques de bonne gouvernance au Maroc

En 1999, les pays membres de l’OCDE19 ont approuvé six principes de bonne
gouvernance, considérés depuis lors comme référence mondiale. Les six principes se
présentent comme suit :

• Mise en place des fondements d’un régime de gouvernance d’entreprise


efficace
• Droits des actionnaires et principales fonctions des détenteurs du capital
• Traitement équitable des actionnaires
• Rôle des différentes parties prenantes dans la gouvernance d’entreprise
• Transparence et diffusion de l’information
• Responsabilités du conseil d’administration

Cependant, en 2004, la même organisation, à savoir l’OCDE, vient préciser que lesdits
six principes, ne sont que des principes de base, qui ont un caractère évolutif, et qui sont
appelés à être revus en fonction des changements que connait le contexte général. Dès lors,
ont surgit de nouveaux principes, dont quelques-uns ont trait à la notion de durabilité,
notamment :

• le principe de solidarité (Michel et al., 2009, p. 211-212) qui préconise que la


participation à une cause commune est enrichissant, et qu’il faudrait tout
engager pour utiliser les ressources naturelles sans compromettre la pérennité
pour les générations futures. D’ailleurs, l’économie de l’eau et de l’électricité
dans l’entreprise, est une recommandation fondamentale de ce principe.
• les principes du développement durable et de gestion des risques cités par ISO
13000 rédigée en 2005.

19
L’Organisation de Coopération et de Développement Economique

23
En outre, dans un essai de définir la bonne gouvernance, l’INERIS20, a affirmé qu’une
bonne gouvernance est une gouvernance qui ne viole pas les sept grands principes fixés dans
le cadre de l’ISO 26000, publiée en 2010, à savoir : Redevabilité, Transparence,
Comportement éthique, Reconnaissance des intérêts des parties prenantes, Respect du
principe de légalité, Prise en compte des normes internationales de comportement et Respect
des droits de l’homme.

Nous pouvons donc remarquer que l’intégration de la notion de durabilité dans les
modèles de gouvernance, n’était pas une initiative découlant des pratiques d’entreprises, mais
que c’est plutôt une incitation de la part des organismes officiels afin de pousser les
entreprises à prendre en considération le souci écologique. Toutefois, il faut préciser que la
majorité de ces principes ne sont pas entièrement respectés par les entreprises. D’un côté, il
n’y a aucune obligation légale à les appliquer, d’un autre côté, ils laissent une marge
d’interprétation.

Quant au Maroc, avant la rédaction du code marocain des bonnes pratiques de


gouvernance d’entreprise, la CGEM21 avait mené en 2005 une étude à propos de la
gouvernance au Maroc. Ladite étude avait démontré que 94,4 % des dirigeants ont entendu
parler des principes de bonne gouvernance. Toutefois, la majorité d’entre eux, méconnaissent
le contenu de ce concept. L’étude avait aussi montré la non prise en considération des
actionnaires minoritaires par les dirigeants de certaines sociétés cotées.

En ce qui concerne l’appareil législatif en matière de gouvernance, l’étude signale


qu’il n’est pas encore bien connu par les dirigeants et qu’il y’a un manque évident d’expertise
dans le domaine juridique et de la gouvernance dans les entreprises marocaines.

Par ailleurs, plus de 60% des sociétés cotées ont affirmé qu’elles disposent d’une
charte de gouvernance, tandis que le contrôle de vraisemblance montre que ce n’est pas le cas.
Il ne s’agit pas de réels codes de gouvernance, mais seulement de conventions ou de simples
accords. Ce qui est très risqué pour les parties prenantes. En effet, Les scandales des
manipulations comptables qui ont faussé les résultats de sociétés aussi emblématiques
qu’Enron ou Worldcom ont inséré, dans beaucoup d’esprits, un doute profond et durablement
nocif concernant la fiabilité des chiffres annoncés par les grandes entreprises. De ce fait, bien

20
INERIS (Institut National de l'Environnement industriel et des risques) est un Établissement Public à
caractère Industriel et Commercial, placé sous la tutelle du ministère de l’Ecologie, du Développement Durable
et de l'Energie, du gouvernement français.
21
Confédération Générale des Entreprises du Maroc

24
qu’il soit nécessaire de laisser une marge d’initiative aux dirigeants de l’entreprise pour mener
à bien leurs projets, l’expérience obtenue à travers ces scandales financiers indique, qu’un
contrôle est indispensable pour s’assurer qu’ils agissent dans l’intérêt des actionnaires et des
investisseurs.

Pour pallier ces risques, le ministère des Affaires économiques et générales et la


CGEM ont procédé en 2008 au lancement du Code marocain de bonnes pratiques de
gouvernance d’entreprise, qui met l’accent sur les principes de gestion et de transparence, sur
des normes éthiques qui permettent d’établir une relation de confiance entre l’entreprise et son
environnement.

Ledit code vise à améliorer l’information à destination des actionnaires. Il formule un


ensemble de recommandations sur la gestion de la société par les dirigeants et sur leur
contrôle par l’organe de gouvernance, et ce dans l’objectif de protéger les intérêts des
actionnaires et de les rendre aptes à prendre des décisions souveraines. Pour maintenir cette
souveraineté, le code insiste sur l’accès des actionnaires aux assemblées générales et sur la
communication des informations, et ce, à travers deux supports principaux, à savoir le rapport
général annuel, et les sites internet.

Il en découle donc, que la gouvernance d’entreprise, encadrée par la loi, qui prévoit
des sanctions, et des règles comptables, standards pour une meilleure transparence,
maintiendrait, théoriquement les intérêts des principales parties prenantes.

Jusqu’à ce stade, ou les sociétés marocaines peinaient à appliquer les pratiques de la


bonne gouvernance, il n’y avait pratiquement pas de débat concernant la finance durable au
Maroc.

On a dû attendre la COP 22, tenue à Marrakech en Novembre 2016, pour mettre en


place une feuille de route pour l’alignement du secteur financier marocain sur le
développement durable. Cette feuille dont l’objectif principal est de favoriser l’émergence
d’une finance durable sur le plan régional, s’articule autour de 5 axes majeurs, à savoir
l’extension de la gouvernance fondée sur les risques aux risques socio-environnementaux, le
développement d’instruments et de produits financiers durables, la promotion de l’inclusion
financière, le renforcement des capacités dans le domaine de la finance durable, la
transparence et la discipline de marché.

25
Continuant sur cette lancée, l'AMMC _ avec le soutien d’International Finance
Corporation _ a publié le 17 février 2017, un guide visant à favoriser l’émergence du marché
des Green bonds sur la place financière Marocaine., à travers la clarification des rôles et des
exigences associés à ce type d’instrument financier. Dans le cadre de la symétrie de
l’information, et dans l’appui de la bonne gouvernance, ledit guide s’adresse aussi bien aux
émetteurs qu’aux investisseurs. Le régulateur a introduit par une présentation des éléments
permettant de mieux cerner ce segment du marché de la dette, pour enchainer ensuite avec
une synthèse des principes à respecter pour l’émission. Cette synthèse est répartie en trois
parties que nous pouvons résumer dans le tableau ci-dessous :

Les préalables à l’émission Le Processus d’autorisation L’information périodique et


continue

_ Définition les projets, _ Mêmes diligences _ Assurer un certain niveau


décrire et quantifier leurs applicables aux autres d’informations qui doivent être
impacts. émissions obligataires. disponibles et portées à la
_ Respect des standards _ Certification externe connaissance des investisseurs
internationaux : Green Bond assurant la qualité verte de selon une fréquence au moins
Principles, et Climate Bonds l’émission. annuelle et durant toute la vie
Initiative. _ Définition claire de la des titres, notamment : nature
_ Instauration d’un climat de destination des fonds levés. des projets financés ou
confiance avec les refinancés, Impacts
investisseurs concernant la environnementaux de ces
sincérité de l’impact projets.
écologique des projets.

2. Essor de la RSE et de la finance durable : Contexte marocain


a. Genèse de la RSE au Maroc

La Responsabilité sociétale des entreprises est un atout supplémentaire qui se base sur
une démarche volontaire, visant la conciliation du besoin de création de valeur et des divers
objectifs du développement durable.

26
Au début, la notion de la RSE, a été importée au Maroc grâce aux stratégies d’éthique
des multinationales. En d’autres termes, les sociétés mères s’intéressant aux préoccupations
sociales et environnementales, ont exigé à leurs filiales qui s’implantent au Maroc d’adhérer
aux mêmes démarches de développement durable, en vue de marquer et d’améliorer l’effet
qu’a une société sur son environnement.

En effet, une autre manière d’introduction de la RSE, s’est présenté avec l’ambition
des entreprises marocaines d’ouverture et d’accès aux marchés étrangers et d’acquisition de
nouveaux clients mais aussi de nouveaux partenaires. Et ce, en se procurant une bonne image
à travers une gouvernance transparente, une réduction considérable de l’impact négatif des
activités de la société sur l’environnement, des achats responsables, et une prise en
considération de l'ensemble des relations de l'entreprise avec ses parties prenantes, etc.

Le sujet des pratiques RSE au Maroc est synonyme de normes, programmes et label
que les entreprises adoptent pour montrer leur implication sociale, à titre d’exemple le
programme du pacte mondial, Les lignes directrices ISO 26000 sur la responsabilité sociétales
des organisations et le label RSE de la CGEM22. D’ailleurs, le Maroc a intégré le pacte
mondial en 2006 suite à l’annonce du programme intitulé «Développement Durable grâce au
Pacte Mondial», ayant pour finalité la promotion de la RSE. Ce projet qui repose sur les
principes directeurs de l’OCDE23 et la stratégie sociale de l’Organisation Internationale du
Travail, a été réalisé par le BIT24 et financé par le ministère italien des affaires étrangères.

En outre, la CGEM, montrant son engagement, a conçu le label RSE et la charte de la


responsabilité sociale comme référentiel pour constater la conformité avec les objectifs RSE.

Cette charte est le référentiel du Label CGEM pour la RSE. Elle a été rédigée
conformément à la législation nationale qu’aux principes des Institutions internationales :
l’ONU, OIT, et l’OCDE. Cette dernière ayant été révisée et actualisée le 31 janvier 2017
inclut neuf axes à savoir:

Ø Respecter les droits humains.

Ø Améliorer en continu les conditions d’emploi et de travail et les relations

professionnelles.
Ø Préserver l’environnement.

22
Confédération Générale des Entreprises du Maroc
23
L’Organisation de Coopération et de Développement Economique
24
Le Bureau International du Travail

27
Ø Prévenir la corruption.

Ø Respecter les règles de la saine concurrence.

Ø Renforcer la transparence du gouvernement d’entreprise.

Ø Respecter les intérêts des clients et des consommateurs.

Ø Promouvoir la responsabilité sociétale des fournisseurs et sous-traitants.

Ø Développer l’engagement envers la communauté.

Le nombre des entreprises adhérant à ce label RSE de la CGEM n’a pas cessé
d’augmenter dans les dernières années. En effet, la liste des membres du club RSE de la
CGEM s’est grandement allongée, allant de 2 entreprises lors de la création du label en 2007,
à plus de 90 membres actuellement dont à peu près la moitié sont filiales de groupes. La
courbe ci-dessous représente l’évolution du nombre d’entreprise labélisée RSE durant la
période entre 2007 et 2016 :

Figure 1 : Evolution du nombre d'entreprises labélisées RSE au Maroc

Cette procédure de labellisation permet aux entreprises de formaliser leurs


engagements, de mesurer leur progrès et de faire connaitre leurs performances.

Ce label est accordé pour une durée de 3 ans, avec une évaluation de suivi à 18 mois. Son
renouvellement se fait sur a l’aide d’une évaluation récente permettant de relever le progrès,
l’amélioration des pratiques et le développement de la performance globale de l’entreprise.

28
b. Contexte actuel de la Finance durable au Maroc

Effectivement, l’implication du Maroc dans l’économie internationale ainsi que


l’émergence de certains accords commerciaux aux cours des deux dernières décennies
ont apporté aux entreprises des occasions importantes pour franchir de nouveaux marchés.
Toutefois, ces accords comprennent des normes et obligations, qui présentent de grands défis
non seulement pour le Maroc mais aussi pour les entreprises concernées. C’est pour cette
raison que l’économie marocaine devrait désormais s’appuyer sur certaines exigences en
matière de qualité, de sécurité, d’innovation, de compétitivité, de contrôle d’impact
écologique et de respect des droits sociaux.

La finance durable au Maroc demeure donc un marché assez jeune, dont le nombre des
acteurs est faible. Néanmoins, c’est un marché qui ne manque pas de promesses du fait que
notre pays s’engage solidement, dans les initiatives à portée environnementales et sociales, et
ce, dès le début du 21ème siècle. D’un point de vue écologiques, c’est en grande partie grâce
à l’accord de Marrakech_ lors de la COP 7 en 2001 _ que des règles d’application et des
modalités ont été mises en œuvre, pour la ratification du Protocole de Kyoto par de nombreux
pays. Egalement, ayant récemment accueillit la COP 22, le Maroc vient de se mettre comme
objectif, la réduction de 13% de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Dans ce
contexte, le Maroc bénéficie d’un appui budgétaire international, via notamment le Fonds
Vert pour le climat. Par ailleurs, le conseil d'administration du Groupe de la Banque Africaine
de Développement vient d’exécuter en Octobre dernier, la première tranche d’un financement
de 132 millions de dollars au profit du Maroc, destiné à renforcer la croissance économique
verte du pays à travers la mise en œuvre de la 2ème phase du Plan Maroc Vert.

En outre, suite à l’entrée en vigueur de la loi de protection de consommateur en 2011, les


entreprises marocaines, sont plus ou moins forcées à garantir plus de transparence, vis-à-vis
de leurs partenaires. D’ailleurs, plusieurs mesures ont déjà été prises dans ce sens,
notamment, l’incitation à l’adoption des normes ISO 14001, OHSAS 18001, et ISO 26000. Il
faut noter que cette dernière est la source d’inspiration des grandes lignes de la charte de
responsabilité sociale adoptée en 2006.

29
3. Perspectives d’évolution des pratiques de bonne gouvernance et de
la finance responsable au Maroc

Dans son discours prononcé devant le Sommet de l’ONU sur les Objectifs du
Millénaire pour le Développement (OMD) qui s’est tenu à New York du 20 au 22 septembre
2010, le Roi Mohammed VI a précisé qu’il importe d’amorcer un effort de réflexion
prospective et d’anticipation par rapport à la période post-2015, dans le but de mieux nous
préparer à relever les nouveaux défis à venir, et d’œuvrer pour la consolidation d’un modèle
harmonieux et solidaire de développement humain durable, et ce, dans le cadre d’une
gouvernance mondiale aussi équitable qu’efficiente.

Actuellement, la croissance économique et le développement humain au Maroc


continuent à supporter les retombées de la période de l’endettement et de l’ajustement
structurel des années 80-90. Toutefois, un processus de réformes a été initié afin de lutter
contre les inégalités sociales, et de démocratiser le système institutionnel de gouvernance.
Tandis que d’importantes avancées ont été graduellement réalisées sur la voie de ces objectifs,
le Maroc connait l’émergence d’une nouvelle génération soucieuse de l’économie verte, et
aspirant à moderniser leur modèle de consommation.

En effet, les rapports entre l’environnement et le développement sont divers.


D’ailleurs, la disponibilité des ressources naturelles a beaucoup contribué au développement
socio-économique au Maroc. Mais ce développement ne peut être durable tant qu’il n’est pas
accompagné d’un investissement de grande envergure en terme de gouvernance, et dans les
ressources humaines et ce, afin de consolider la conscience éco-citoyenne.

Dans ce cadre le Maroc cherche de plus en plus à améliorer son efficacité énergétique.
Cette dernière est un synonyme de meilleure gouvernance, invitant à une coordination, une
harmonisation et une mise en synergie des actions entre les différents intervenants publics et

30
privés.25 Dans un souci d’un développement durable, le Haut-Commissariat Au Plan a dressé
trois scénarios alternatifs pour déterminer comment le Maroc pourra atteindre une meilleure
efficacité énergétique à l’horizon 2030. Le tableau ci-dessous résume les conditions prévues
par les trois scénarios :26

Scénario de Scénario de Scénario de


référence (S1) volontarisme régionalisme ouvert
énergétique (S2) (S3)
Croissance Tendancielle (4%) Forte (5%) Forte (5%) Exogène
économique Endogène
Relations Globalisation Globalisation Régionalisation
internationales
Consommation 48 Millions de TEP 84 Millions de TEP 106 Millions de TEP
d’énergie e 2030
Développement Difficile Positif Très Positif
durable
Effort économique Normal Exceptionnel Partagé dans la
région
Nouvelles Eolien, Biomasse, Eolien, Biomasse, Eolien, Biomasse,
technologies Solaire Solaire, Nucléaire Solaire, Nucléaire

Dans le cas du scénario de référence S1, avec la continuation de l’augmentation des


prix du pétrole, il serait difficile pour le Maroc de poursuivre son processus de croissance
économique modérée. Le HCP recommande alors comme mesure de réduire sensiblement la
dépendance extérieure du Maroc en limitant son importation d’énergie grâce à la production
d’énergies renouvelables, et en développant l’énergie nucléaire ainsi qu’une activité
marocaine d’extraction d’énergies fossiles. Cette mesure est en fait déjà retenue par l’actuelle
stratégie du Centre de développement des énergies renouvelables dont l’objectif est de porter
la part de ces énergies dans la consommation du Maroc à 42 % du mix énergétique du
royaume d'ici 2020, puis à 52 % d'ici 2030. Elle est actuellement de 26 %. Le Maroc dispose

25
Haut-Commissariat au Plan ; Prospective Maroc 2030 : Energie 2030, quelles options pour le Maroc ?; Page
59 ; 10/08/2011
26
Haut-Commissariat au Plan ; Prospective Maroc 2030 : Energie 2030, quelles options pour le Maroc ?; Page
70 ; 10/08/2011

31
en effet d'importantes sources d'énergies renouvelables, particulièrement pour le solaire et
l'éolien au niveau des zones côtières qui s'étendent sur 3500 km. Aujourd’hui son
rayonnement solaire moyen est estimé à 5 kWh/m2 par jour et son potentiel éolien à plus de
6000 MW.

Parmi les programmes gouvernementaux fondateurs de cette stratégie, le Programme


solaire marocain qui a pour objectif de mettre en service 2000 MW à l'horizon 2020. Il
comprend à titre d’exemple la construction de la plus grande centrale solaire thermique du
monde avec une capacité de 582 MW. En ce qui concerne l'éolien, le plan de développement
national, prévoit un objectif analogue à celui de la branche solaire, et a déjà permis la mise en
service de plusieurs fermes éoliennes dont la plus grande centrale éolienne d'Afrique
inaugurée fin 2014. En outre, le Projet éolien intégré lancé en 2014 par l'Office National de
l'Électricité et de l'Eau Potable (ONEE) devrait, aboutir à la réalisation de cinq parcs éoliens
supplémentaires entre 2017 et 2020 pour une puissance cumulée de 850 MW.

Répondre au défi de l’énergie nécessite donc un important effort économique national.


Cet effort serait d’autant plus considérable dans les scénarios alternatifs S2 et S3, mais avec
une intensité plus forte dans le scénario S2, et ce, car il existe une différence de base entre les
deux scénarios.

Dans le scénario S2, le Maroc fait face au défi énergétique en solitaire, ce qui requiert
la mise en place d’un processus d’investissements massifs en énergie, tandis que dans le
scénario S3, il le fait conjointement avec ses voisins maghrébins et européens.

Le HCP considère que le scénario S3 est plus intéressant pour le Maroc sur de
nombreux plans. D’une part, les coûts de la transition énergétique connaitront une baisse,
alors que le territoire des projets co-développés connaitra un élargissement considérable.
D’autres parts, il favorise l’émergence d’un modèle de développement plus durable à l’aide de
l’évolution des prix, des valeurs et des technologies, et participe à la définition d’une
géographie économique Méditerranéenne, nouvelle et compatible avec le processus de
globalisation financière et économique. Toutefois, les conditions institutionnelles ne sont pas
encore remplies pour ce modèle, car ni l’UMA, ni les accords euro-méditerranéens n’assurent
pour l’instant un cadre approprié pour cette option. Le HCP recommande donc dans ce cas, de
faire une réflexion commune pour relancer le processus d’intégration de la Méditerranée
occidentale et créer une zone régionale émergente.

32
Une stratégie à moyen terme conforme à ces prévisions a été définie. Elle vise à
assurer la sécurité d’approvisionnement, la diversification des formes et des sources
d’énergie, la disponibilité de l’énergie au meilleur coût, la généralisation de l’accès à
l’énergie, la préservation de l’environnement et le renforcement de la sécurité et du contrôle
technique des installations énergétiques ainsi que la maîtrise de l’énergie. Cependant, le HCP
estime qu’il serait temps de remettre à l’étude le développement éventuel d’une centrale
nucléaire, et de commencer à dessiner une stratégie d’ensemble pour l’énergie du Maghreb et
de l’Europe voisine, si le Maroc veut éviter de rester à l’écart de la convergence économique
avec les pays industriels avancés. A l’état présent du développement, toujours selon l’étude du
HCP, le Maroc ne peut envisager une croissance accélérée sans l’accompagner d’une
augmentation considérable de la consommation d’énergie. Restreindre cette consommation
causerait automatiquement une limitation de la croissance et du développement humain et
durable.

Néanmoins, devant les dérèglements des changements climatiques, le Maroc est tenu
de rationaliser sa consommation de ressources et ses émissions des G.E.S, même si ces
dernières sont insignifiantes sur le plan mondial.

A cet effet, en plus des stratégies énergétiques citées ci-dessus, des stratégies pour
entamer une croissance verte dans les secteurs du transport, de l’industrie, du bâtiment et des
déchets solides commencent à connaître un début de réalisation. En effet, la stratégie des
énergies renouvelables, qui s’inscrit dans les Objectifs du Développement Durable (ODD), a
pour objectif d’accompagner la croissance tendancielle dans le bâtiment, l’industrie et le
transport par une réduction des émissions de CO2 de 18 millions de tonnes à l’horizon 2020,
et de réaliser une économie d’énergie de 12% d’ici 2020 et 15% d’ici 2030.

Par ailleurs, face aux changements climatiques, le Maroc devrait relever un autre défi.
Il devrait opter pour une gestion intégrée des ressources en eau dans la perspective d’assurer
une solidarité spatiale amont-aval et intergénérationnelle privilégiant le temps écologique
dans la planification, et ce surtout en réduisant l’envasement des barrages. Ceci permettra de
gagner un potentiel d’irrigation de l’ordre de 10 000 hectares par an.

Le Maroc devrait aussi lutter contre les tendances de dégradation par la réduction des
pertes en terres de 30 à 50%, et chercher à réorienter le modèle d’exploitation des terres
agricoles vers un respect des écosystèmes naturels, et ce dans un souci du développement

33
durable prenant en considération les effets de la sécheresse, et les inégalités potentielles entre
les régions et les générations.

Par ailleurs, la reconstitution de ces écosystèmes peut atteindre 5% d’ici 2030 grâce à
la gestion durable des écosystèmes forestiers prévue par le plan directeur de reboisement, le
plan directeur de lutte contre les incendies, et la stratégie nationale de la santé des forêts.

Enfin, grâce à l’adaptation de ces stratégies sectorielles aux effets des changements
climatiques, et au choix d’un modèle de production à base d’énergie propre, le Maroc pourrait
inscrire son modèle de croissance dans une perspective de durabilité tout en soulignant son
engagement à associer ses efforts à ceux de la communauté internationale.

34
Conclusion

Les efforts durant ce travail de recherche visent à consolider la représentation du


système économique et financier de l’entreprise et les liens théoriques entre ce dernier et le
développement durable afin d’assimiler les mécanismes liant la sphère économique et la
sphère éthique à l’intérieur de l’économie tant au niveau national qu’international, eu égard à
l’importance cruciale que revêt la dimension socio-environnementale dans le monde.

Comme cela a déjà été mentionné ci-dessus, notre document vise à présenter de
manière concise notre vision suite au survol de la situation de la gouvernance au Maroc. Nous
avons présenté en premier lieu les enjeux de la gouvernance et de la finance durable, en
détaillant les définitions des concepts clés, mais aussi en abordant le contexte de la bonne
gouvernance et de la RSE au niveau mondial ainsi que l’évolution de la finance durable.

Notre deuxième partie a été consacrée à la présentation du rôle de la bonne


gouvernance en l’évolution des pratiques de la finance responsable et durable au Maroc, et a
été divisée en trois sections. La première concerne l’évolution des pratiques de bonne
gouvernance au Maroc, la seconde a été dédiée à l’éclaircissement de l’essor de la RSE et de
la finance durable dans le contexte marocain, et dans la dernière section nous avons essayé de
lever le voile sur les perspectives d’évolution des pratiques de bonne gouvernance et de la
finance responsable au Maroc.

Etant donné que l’évolution des pratiques de bonne gouvernance a contribué fortement
en l’essor de la finance durable, le management du développement durable, de l’immatériel ou
plus précisément du renouvellement stratégique est devenu une discipline de premier ordre
pour les entreprises marocaines.

L’amélioration des pratiques de bonne gouvernance, en la conciliant aux objectifs de


développement durable, est alors une nécessité stratégique pour les entreprises qui veulent
faire face aux nouveaux défis et rester compétitives dans un environnement à concurrence
accrue.

35
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