Fiducia Supplicans
Fiducia Supplicans
Fiducia Supplicans
Fiducia supplicans
Texte intégral
Introduction
1. La confiance suppliante du peuple fidèle de Dieu reçoit le don de la
bénédiction qui jaillit du cœur du Christ à travers son Église. Comme
nous le rappelle avec insistance le Pape François, "La grande
bénédiction de Dieu est Jésus Christ, c'est le grand don de Dieu, son
Fils. C'est une bénédiction pour toute l'humanité, c'est une
bénédiction qui nous a tous sauvés. Il est la Parole éternelle avec
laquelle le Père nous a bénis “alors que nous étions encore pécheurs”
(Rm 5, 8) dit saint Paul: Parole faite chair et offerte pour nous sur la
croix"[1].
par sa volonté: "Bénis le Seigneur, ô mon âme, bénis son nom très
saint, tout mon être" (Ps 103,1).
16. A Dieu qui bénit, nous aussi, nous répondons par la bénédiction.
Melkisédek, roi de Salem, bénit Abraham (cf. Gn 14, 19) ; Rébecca est
bénie par sa famille juste avant de devenir la femme d'Isaac
(cf. Gn 24, 60), qui à son tour bénit son fils Jacob (cf. Gn 27, 27). Jacob
bénit Pharaon (cf. Gn 47, 10), ses petits-fils Éphraïm et Manassé
(cf. Gn 48, 20) et ses douze fils (cf. Gn 49, 28). Moïse et Aaron
bénissent la communauté (cf. Ex 39, 43 ; Lv 9, 22). Les chefs de
famille bénissent leurs enfants lors des mariages, avant
d'entreprendre un voyage, à l'approche de la mort. Ces bénédictions
apparaissent ainsi comme un don surabondant et inconditionnel.
17. La bénédiction présente dans le Nouveau Testament conserve
essentiellement la signification de l'Ancien Testament. Nous
retrouvons le don divin qui "descend", l'action de grâce de l'homme
qui "monte" et la bénédiction donnée par l'homme qui "s'étend" vers
ses semblables. Zacharie, ayant retrouvé l'usage de la parole, bénit le
Seigneur pour ses merveilles (cf. Lc 1, 64). Le vieillard Siméon,
tenant dans ses bras le nouveau-né Jésus, bénit Dieu pour lui avoir
accordé la grâce de contempler le Messie sauveur, puis il bénit
également ses parents Marie et Joseph (cf. Lc 2, 34). Jésus bénit le
Père, dans le célèbre hymne de louange et de jubilation qui lui est
adressé: "Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange"
(Mt 11,25).
18. Dans la continuité de l'Ancien Testament, la bénédiction en Jésus
n'est pas seulement ascendante, se référant au Père, mais aussi
descendante, répandue sur les autres comme un geste de grâce, de
protection et de bonté. Jésus lui-même a mis en œuvre et encouragé
cette pratique. Par exemple, il bénit les enfants: "Il les embrassait et
les bénissait en leur imposant les mains" (Mc 10,16). Et la vie
terrestre de Jésus se terminera précisément par une dernière
bénédiction réservée aux Onze, peu avant de monter vers le Père: "Et,
levant les mains, il les bénit. Or, tandis qu'il les bénissait, il se sépara
d'eux et il était emporté au ciel" (Lc 24, 50-51). La dernière image de
Jésus sur la terre, ce sont ses mains levées, en train de bénir.
19. Dans son mystère d'amour, à travers le Christ, Dieu communique
à son Église le pouvoir de bénir. Accordée par Dieu à l'être humain et
octroyée par lui à son prochain, la bénédiction se transforme en
inclusion, en solidarité et en pacification. C'est un message positif de
réconfort, de sollicitude et d'encouragement. La bénédiction exprime
l'étreinte miséricordieuse de Dieu et la maternité de l'Église qui
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invite les fidèles à avoir les mêmes sentiments que Dieu envers leurs
frères et sœurs.
Une compréhension théologico-pastorale des bénédictions
20. Celui qui demande une bénédiction montre qu'il a besoin de la
présence salvifique de Dieu dans son histoire, et celui qui demande
une bénédiction à l'Église reconnaît l'Église comme sacrement du
salut que Dieu offre. Chercher une bénédiction dans l'Église, c'est
admettre que la vie de l'Église jaillit du sein de la miséricorde de Dieu
et nous aide à avancer, à mieux vivre, à répondre à la volonté du
Seigneur.
21. Pour nous aider à comprendre la valeur d'une approche plus
pastorale des bénédictions, le Pape François nous a invités à
contempler, avec une attitude de foi et de miséricorde paternelle, le
fait que "lorsqu'on demande une bénédiction, il s'agit d'une demande
d'aide adressée à Dieu, d'une prière pour pouvoir vivre mieux, d'une
confiance en un Père qui peut nous aider à vivre mieux"[12]. Cette
demande doit être valorisée, accompagnée et accueillie avec gratitude.
Les personnes qui viennent spontanément demander une bénédiction
manifestent par cette demande leur ouverture sincère à la
transcendance, la confiance de leur cœur qui ne s'appuie pas
uniquement sur leurs propres forces, leur besoin de Dieu et leur désir
de sortir de l'étroitesse de ce monde refermé sur lui-même.
22. Comme nous l'enseigne Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, au-delà
de cette confiance "il n'y a pas d'autre chemin pour nous conduire à
l'Amour qui donne tout. Par la confiance, la source de la grâce
déborde dans nos vies [...]. L'attitude la plus appropriée est donc de
mettre la confiance du cœur hors de soi-même, en la miséricorde
infinie d'un Dieu qui aime sans limites [...]. Le péché du monde est
immense, mais il n'est pas infini. En revanche, l'amour
miséricordieux du Rédempteur est infini"[13].
23. Lorsque ces expressions de la foi sont considérées en dehors d'un
cadre liturgique, on se trouve dans un domaine de plus grande
spontanéité et liberté, mais "le caractère facultatif des pieux exercices
ne peut en aucun cas signifier une quelconque méconnaissance, ni
même le mépris à leur égard. L'attitude juste qu'il convient d'adopter
est, au contraire, celle qui consiste à valoriser d'une manière
adéquate et avec sagesse, les richesses non négligeables de la piété
populaire, avec ses potentialités"[14]. Les bénédictions deviennent
ainsi une ressource pastorale à valoriser plutôt qu'un risque ou un
problème.
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commettre, car Il est père, Il est mère, Il est amour pur, Il nous a
bénis pour toujours. Et Il ne cessera jamais de nous bénir. Une
expérience forte est de lire ces textes bibliques de bénédiction dans
une prison, ou dans une communauté de réinsertion. Faire sentir à
ces personnes qu'elles restent bénies malgré leurs graves erreurs, que
le Père céleste continue à vouloir leur bien et à espérer qu'elles
s'ouvrent finalement au bien. Même si leurs parents les plus proches
les ont abandonnées, parce qu'ils les jugent désormais irrécupérables,
pour Dieu ce sont toujours ses enfants."[19].
28. Il existe de nombreuses occasions où les personnes viennent
spontanément demander une bénédiction, que ce soit lors de
pèlerinages, dans des sanctuaires, ou même dans la rue lorsqu'elles
rencontrent un prêtre. A titre d'exemple, nous pouvons nous référer
au livre liturgique De Benedictionibus, qui propose une série de rites
de bénédiction pour les personnes: personnes âgées, malades,
participants à la catéchèse ou à une réunion de prière, pèlerins,
personnes qui partent en voyage, groupes et associations de
bénévoles, etc. Ces bénédictions s'adressent à tous, personne ne doit
en être exclu. Dans l'introduction du Rite de bénédiction des personnes
âgées, par exemple, il est indiqué que le but de la bénédiction "est
d'exprimer aux personnes âgées un témoignage fraternel de respect et
de gratitude, et de remercier le Seigneur avec elles pour les bienfaits
qu'elles ont reçus de lui et pour les bonnes actions qu'elles ont
accomplies avec son aide"[20]. Dans ce cas, l'objet de la bénédiction
est la personne âgée, pour laquelle et avec laquelle on rend grâce à
Dieu pour les bonnes actions qu'elle a accomplies et pour les bienfaits
qu'elle a reçus. Personne ne peut être exclu de cette action de grâce et
chacun, même s'il vit dans des situations qui ne sont pas conformes
au plan du Créateur, a des éléments positifs pour lesquels il peut
louer le Seigneur.
29. Du point de vue de la dimension ascendante, lorsqu'on prend
conscience des dons du Seigneur et de son amour inconditionnel,
même dans des situations de péché, en particulier lorsqu'une prière
est entendue, le cœur du croyant élève sa louange et sa bénédiction
vers Dieu. Cette forme de bénédiction n'est interdite à personne.
Chacun - individuellement ou en union avec d'autres - peut élever sa
louange et sa gratitude à Dieu.
30. Mais le sens populaire de la bénédiction inclut aussi la valeur de
la bénédiction descendante. Si "il n'est pas opportun qu'un diocèse,
une Conférence des évêques ou toute autre structure ecclésiale mette
en place constamment et officiellement des procédures ou des règles
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