Cours Master Math
Cours Master Math
Cours Master Math
COMPLÉMENTS EN ANALYSE
COURS et
EXERCICES
- 2010-2011 -
2
Table des matières
1 Topologie générale 7
1.1 Espaces topologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.1.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.1.2 Rappel sur la topologie la moins fine rendant continues une
famille d’applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.2 Espaces topologiques compacts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.2.1 Définition et propriétés élémentaires . . . . . . . . . . . . . 13
1.2.2 Métrisabilité d’un espace topologique compact . . . . . . . 17
1.2.3 Précompacité et compacité séquentielle . . . . . . . . . . . 18
1.2.4 Ensembles relativement compacts . . . . . . . . . . . . . . 23
1.3 La topologie faible σ(E, E ∗ ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
1.4 La topologie faible∗ σ(E ∗ , E) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
1.5 Espaces réflexifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
1.6 Espaces séparables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
1.7 Métrisabilité des topologies faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
1.8 Espaces uniformément convexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
1.9 Applications : espaces Lp . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
1.9.1 Etude de Lp pour 1 < p < +∞. . . . . . . . . . . . . . . . 52
1.9.2 Etude de L1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
1.9.3 Etude de L∞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
1.10 Supplémentaire topologique... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3
4 TABLE DES MATIÈRES
1.11 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
2 Opérateurs bornés... 77
2.1 Adjoint d’une application linéaire continue . . . . . . . . . . . . . 77
2.2 Opérateurs normaux, unitaires, positifs... . . . . . . . . . . . . . . 81
2.3 Spectre des applications linéaires et continues . . . . . . . . . . . 84
2.4 Exercices, compléments de cours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
3 Opérateurs compacts 93
3.1 Applications linéaires compactes . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
3.2 Théorie spectrale des opérateurs compacts . . . . . . . . . . . . . 100
3.3 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
3.3.1 Premiers exemples d’opérateurs compacts : shifts pondérés,
opérateurs intégraux et opérateur de Volterra . . . . . . . 110
3.3.2 Opérateurs de Hilbert–Schmidt . . . . . . . . . . . . . . . 111
3.3.3 Décomposition des opérateurs compacts . . . . . . . . . . 112
Bibliographie 250
Chapitre 1
Compléments de topologie
générale
Définition 1.1.1 Un espace topologique est un couple (X, τ ), où X est un en-
semble et τ est un ensemble de parties de X vérifiant les propriétés suivantes :
(i) ∅, X ∈ τ
O1 ∩ · · · ∩ On ∈ τ.
7
8 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
Proposition 1.1.2 L’adhérence de A est égale à l’ensemble des points qui lui
sont adhérents.
(b) Une collection B d’ouverts pour τ est appelée une base de la topologie si
tout ouvert est une réunion d’ensembles de B.
Cette formule prouve que si A est une famille d’ensembles, alors ”toute inter-
section finie d’union d’intersections finies d’éléments de A est encore une union
d’intersection finie d’éléments de A”.
T S
Preuve : On a x ∈ i∈F j∈Ji Aj si et seulement si, pour tout i ∈ F , il existe
j = ψ(i) ∈ Ji tel que x ∈ Aj . Ceci est équivalent à l’existence d’une application
T S T
ψ : i ∈ F 7−→ ψ(i) ∈ Ji telle que x ∈ i∈F Aψ(i) . Soit encore x ∈ ψ∈F i∈F Aψ(i) .
Donnons maintenant le résultat principal de ce paragraphe.
10 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
X = ϕ−1
i (Yi ) ∈ τ et ∅ = ϕ−1
i (∅) ∈ τ.
De plus, la famille est stable par union quelconque et la stabilité par intersection
finie provient du lemme 1.1.8. Ainsi τ définit bien une topologie sur X.
Il est clair maintenant que chaque application ϕi , i ∈ I, est continue pour
cette topologie τ . Il reste à montrer que c’est la plus faible qui rende continue
les ϕi , i ∈ I. Pour cela, considérons une autre topologie τ ′ telle que toutes les
applications ϕ soient continues pour τ ′ . Soient Ui un ouvert quelconque de Yi ,
Fj un sous-ensemble fini quelconque de I et J un ensemble quelconque d’indices.
Nécessairement on a ϕ−1 ′ ′
i (Ui ) ∈ τ et comme τ est une topologie, elle est stable
Ainsi tout ouvert pour τ est un ouvert pour τ ′ , ce qui montre qui τ est une
topologie plus faible que τ ′ .
Proposition 1.1.10 Soient X un ensemble, (Yi )i∈I une famille d’espaces topo-
logiques et ϕi : X −→ Yi une famille d’applications. Soit τ la topologie la plus
faible rendant continue chaque ϕi , i ∈ I. Etant donné un point x ∈ X, une base
1.1. ESPACES TOPOLOGIQUES 11
sont des ouverts pour la topologie τ qui contiennent x. Notons B la collection des
ouverts de τ obtenus de cette façon. Soit maintenant V un voisinage ouvert de x
pour la topologie τ . D’après la proposition 1.1.9, V est de la forme
[ \
V = ϕ−1
i (Ui ),
j∈J i∈Fj
Donc ϕi (x) ∈ Ui , pour tout i ∈ Fj . Ainsi Ui est un voisinage ouvert de ϕi (x) dans
Yi . D’où
\ \
ϕ−1
i (Ui ) ∈ B et ϕ−1
i (Ui ) ⊂ V,
i∈Fj i∈Fj
(ii) Pour chaque i ∈ I, la suite (ϕi (xn ))n≥1 converge vers ϕi (x) dans l’espace
topologique Yi .
Dans le résultat suivant, on donne une caractérisation de la continuité d’une
application par rapport à la topologie τ .
Preuve : L’implication (i) =⇒ (ii) découle des propriétés élémentaires sur les
applications continues (la composée de deux applications continues est continue).
(ii) =⇒ (i) : soit U un ouvert de X. On doit montrer que ψ −1 (U) est un ouvert
de Z. D’après la proposition 1.1.9, l’ouvert U est de la forme
[ \
U= ϕ−1
i (Ui ),
j∈J i∈Fj
Comme ϕi ◦ ψ est continue, (ϕi ◦ ψ)−1 (Ui ) est un ouvert de Z et par stabilité par
union quelconque et intersection finie, ψ −1 (U) est aussi un ouvert de Z.
Définition 1.2.1 Soit X un espace topologique. On dit que X est séparé si pour
tous x, y ∈ E, x 6= y, il existe Ox , Oy deux ouverts disjoints tels que x ∈ Ox et
y ∈ Oy .
14 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
Remarque 1.2.2 Il est clair que tout espace métrique est un espace topologique
séparé.
Tn
Or V = i=1 Vi est un voisinage de a et comme a ∈ A, on devrait avoir V ∩A 6= ∅.
On obtient ainsi une contradiction.
(b) : soit (Oi )i∈I une famille d’ouverts de X qui recouvre A. Alors
[
E = A ∪ cA ⊂ Oi ∪ c A.
i∈I
[
ϕ(A) ⊂ Vi .
i∈I
16 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
S
Alors A ⊂ i∈I ϕ−1 (Vi ) et comme ϕ est continue, ϕ−1 (Vi ) est un ouvert de X.
Par compacité de A, il existe n ∈ N et i1 , i2 , . . . , in ∈ I tels que
n
[
A⊂ ϕ−1 (Vij ).
j=1
D’où
n
[
ϕ(A) ⊂ Vij ,
j=1
Preuve : Soit F un fermé de (X, τ2 ). Comme (X, τ2 ) est compact, le théorème 1.2.4
implique que F est en fait une partie compacte pour la topologie τ2 . Puisque τ1
est plus faible que τ2 , F est aussi compact pour la topologie τ1 . Comme (X, τ1 )
est séparé, une nouvelle application du théorème 1.2.4 entraı̂ne que F est fermé
dans (X, τ1 ). Finalement on a prouvé que τ2 ⊂ τ1 et donc on obtient que les deux
topologies coincident.
Le résultat suivant donne une condition suffisante pour qu’un espace topolo-
gique compact soit métrisable.
Preuve : D’après la proposition 1.2.5, fn est bornée sur X et donc, sans perte
de généralité, on peut supposer que |fn (x)| ≤ 1, pour tout n ≥ 1 et tout x ∈ X.
Posons alors
X∞
1
d(x, y) = |fn (x) − fn (y)|, (x, y) ∈ X × X.
n=1
2n
Il est facile de vérifier que d est une métrique (on utilise ici le fait que la suite
(fn )n sépare les points). Comme chaque fn est continue pour τ et que la série
converge uniformément sur X × X, on en déduit que d est une fonction continue
sur X × X, muni de la topologie produit induite par celle de τ . Ainsi les boules
Br (p) := {q ∈ X : d(p, q) < r} sont ouvertes dans (X, τ ). Si on note τd la topologie
induite par la distance, on a donc démontré que τd ⊂ τ . Comme par hypothèse
(X, τ ) est compact et que (X, τd ) est séparé, on obtient avec le lemme 1.2.8 que
τ = τd .
Nous allons voir maintenant que dans un espace topologique compact, les
suites jouissent d’une propriété remarquable souvent très utile. Avant rappelons
la définition suivante.
Définition 1.2.10 Soit X un espace topologique, (xn )n≥0 une suite de points de
X. On dit que la suite (xn )n≥0 admet le point a de X pour valeur d’adhérence
si, pour tout voisinage V de a, l’ensemble {n ∈ N : xn ∈ V } est infini.
Le résultat suivant fait le lien entre valeur d’adhérence d’une suite et adhérence
d’un ensemble dénombrable.
Lemme 1.2.11 Soit X un espace topologique séparé et (xn )n≥0 une suite de
points de X. Si A = {xn : n ∈ N}, alors son adhérence A est la réunion de A
et de l’ensemble des valeurs d’adhérence de la suite (xn )n≥0 . En particulier, si
(xn )n≥0 n’a pas de valeurs d’adhérence, alors A est fermé.
1.2. ESPACES TOPOLOGIQUES COMPACTS 19
Preuve : Soit a une valeur d’adhérence de la suite (xn )n≥0 . Par définition,
pour tout voisinage V de a, l’ensemble {n ∈ N : xn ∈ V } est infini. Donc en
particulier, V ∩ XA 6= ∅. Ceci montre donc que a ∈ A.
Réciproquement, si a ∈ A \ A et V est un voisinage de a. Comme a ∈ A, on
a V ∩ A 6= ∅. Nous devons montrer que l’ensemble {n ∈ N : xn ∈ V } est infini.
Supposons le contraire et soit {xi1 , xi2 , . . . , xin } = V ∩ A. Comme X est séparé,
pour chaque k = 1, . . . , n, il existe un voisinage ouvert Vk de a tel que xik 6∈ Vk .
Alors U := V ∩ V1 ∩ · · · ∩ Vn est un voisinage de a et A ∩ U = ∅, ce qui est absurde
car a ∈ A.
Enfin, si (xn )n≥0 n’a pas de valeurs d’adhérence, alors ce qui précède montre
que A = A et donc A est fermé !
Le résultat suivant très utile donne une caractérisation des valeurs d’adhérence
d’une suite dans un espace métrique. Attention ce résultat n’est pas vrai en
général dans un espace topologique quelconque (voir Exercice 1.11.6).
Lemme 1.2.12 Soit (E, d) un espace métrique et (xn )n≥0 une suite de E. Les
assertions suivantes sont équivalentes :
que l’ensemble {n ∈ N : xn ∈ V } est infini, ce qui prouve que a est une valeur
d’adhérence.
Preuve : Raisonnons par l’absurde en supposant qu’il existe une suite (xn )n≥0
de points de X sans valeur d’adhérence. L’espace topologique X étant séparé, le
lemme 1.2.11 implique que, pour tout p ∈ N, les ensembles
Ap = {xn : n ≥ p}
sont fermés.
T
Fait : p∈N Ap = ∅. En effet, raisonnons par l’absurde en supposant qu’il
T
existe a ∈ p∈N Ap et montrons alors que a est une valeur d’adhérence de (xn )n≥0 .
Soit V un voisinage de a. Comme pour tout p ∈ N, a ∈ Ap , on obtient que pour
tout p ∈ N, il existe n ≥ p tel que a = xn . En particulier, pour tout p ∈ N, il
existe n ≥ p tel que xn ∈ V . On en déduit donc que l’ensemble {n ∈ N : xn ∈ V }
est infini et donc a est une valeur d’adhérence de (xn )n≥0 , ce qui est absurde.
Ceci achève la preuve du fait.
Comme X est compact, il existe des entiers n et p1 , p2 , . . . , pn tels que
n
\
Api = ∅.
i=1
Tn
Or i=1 Api = Apmax , où pmax := max(p1 , p2 , . . . , pn ) et donc Apmax = ∅. On
obtient donc une contradiction.
Dans le cadre métrique, la réciproque de ce théorème est vraie. Avant de
donner ce résultat, nous allons introduire deux définitions supplémentaires.
(b) On dit que A est précompacte si pour tout ε > 0, il existe un entier N
et des points x1 , · · · , xN ∈ E tels que A soit contenu dans la réunion des
boules B(xi , ε), i = 1, ..., N.
Théorème 1.2.15 Soit (E, d) un espace métrique. Les assertions suivantes sont
équivalentes :
Preuve : Notre stratégie est de montrer que (i) entraı̂ne (ii), que (ii) entraı̂ne
(iii), que (iii) entraı̂ne (ii), et ensuite que (ii) et (iii) entraı̂nent (i).
(i) =⇒ (ii) : découle du théorème 1.2.13 et du lemme 1.2.12.
(ii) =⇒ (iii) : soit (xn )n≥0 une suite de Cauchy dans E. Puisque E est
séquentiellement compact, (xn )n≥0 possède une sous-suite convergente dans E.
Il est alors facile de voir que (xn )n≥0 est aussi convergente vers la même limite.
Donc E est complet.
Supposons maintenant que E ne soit pas précompact et cherchons une contra-
diction. Il existe donc ε > 0 tel que, pour chaque n ≥ 1 et pour chaque x1 , x2 , . . . , xn ∈
E, nous avons
n
[
E 6= B(xi , ε). (1.1)
i=1
d(xn , xm ) ≥ ε,
22 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
pour chaque n 6= m. Cette suite n’a donc aucun sous-suite convergente, ce qui
contredit le fait que E soit séquentiellement compact.
(iii) =⇒ (ii) : soit (xn )n≥1 ⊂ E. Il s’agit de montrer que (xn )n≥1 possède une
sous-suite convergente. En utilisant la précompacité de E, il existe un nombre
fini de boules de rayon 1 qui recouvre E. Il existe donc une boule, disons B1 , qui
contient xn pour une infinité d’indices. Posons
N1 := {n ≥ 1 : xn ∈ B1 }.
De même, il existe un nombre fini de boules de rayon 1/2 qui recouvre E. Il existe
donc une boule, disons B2 , qui contient xn pour une infinité d’indices n ∈ N1 .
Posons
N2 := {n ∈ N1 : xn ∈ B2 }.
Nk ⊂ · · · ⊂ N2 ⊂ N1 ⊂ N,
Nk+1 := {n ∈ Nk : xn ∈ Bk+1 }.
2
d(xnj , xni ) ≤ ,
i
et donc la suite (xni )i est de Cauchy dans (E, d) complet. Donc elle converge vers
un élément x ∈ E. Ceci achève de prouver que E est séquentiellement compact.
1.2. ESPACES TOPOLOGIQUES COMPACTS 23
Nous introduisons maintenant une propriété un peu plus faible que la compa-
cité.
(iii) Pour toute suite (xn )n≥1 de points de A, il existe une sous-suite (xnk )k≥1
qui converge (vers un élément x ∈ A).
Notons une conséquence facile mais utile qui donne une condition suffisante
pour la relative compacité.
Corollaire 1.2.19 Soit A une partie d’un espace métrique complet (E, d). Sup-
posons que pour tout ε > 0, il existe une partie compacte Kε de E telle que
∀x ∈ A, d(x, Kε ) < ε.
N
[
Kε ⊂ B(xi , ε/2).
i=1
N
[
A⊂ B(xi , ε/2),
i=1
Proposition 1.2.20 Soit A une partie d’un espace de Banach E. Alors A est
relativement compacte si et seulement si A vérifie les deux conditions suivantes :
dist(x, Lε ) < ε.
et
O2 = {x ∈ E : |f (x) − f (x2 )| < ε} = f −1 (B2 ).
Il est clair alors que O1 et O2 sont deux ouverts de E pour σ(E, E ∗ ) qui vérifient
x1 ∈ O1 , x2 ∈ O2 et O1 ∩ O2 = ∅.
est un ouvert pour la topologie faible et qui contient x0 . Il reste à montrer que
tout voisinage ouvert U de x0 contient un sous-ensemble de cette forme. Par
définition de la topologie faible et en utilisant la proposition 1.1.10, on sait qu’il
existe un voisinage W de x0 , W ⊂ U, de la forme
\
W = fi−1 (ωi ),
i∈I
où I est fini, fi ∈ E ∗ et ωi est un voisinage ouvert de fi (x0 ) dans K. Donc il existe
ε > 0 tel que B(fi (x0 ), ε) ⊂ ωi , pour chaque i ∈ I (attention ici on utilise le fait
que I est fini). Si on définit
δa (f ) = f (a), (f ∈ E ∗ ).
et donc
sup kxn k < +∞,
n≥1
Remarque 1.3.5 Les ouverts (resp. les fermés) de la topologie faible σ(E, E ∗ )
sont aussi ouverts (resp. fermés) pour la topologie forte. Lorsque E est de dimen-
sion infinie, la topologie faible σ(E, E ∗ ) est strictement plus faible que la topologie
forte, c’est-à-dire qu’il existe des ouverts (resp. des fermés) pour la topologie forte
qui ne sont pas ouverts (resp. fermés) pour la topologie faible. On pourra se re-
porter aux exercices 1.11.10 et 1.11.11 pour de tes exemples. En revanche (voir
exercice 1.11.12), lorsque E est de dimension finie, la topologie faible σ(E, E ∗ )
et la topologie forte coincident. En particulier, une suite converge fortement si et
seulement si elle converge faiblement.
1.3. LA TOPOLOGIE FAIBLE σ(E, E ∗ ) 31
Tout ensemble fermé pour la topologie faible σ(E, E ∗ ) est fermé pour la topo-
logie forte. La réciproque est fausse en dimension infinie (voir remarque 1.3.5 et
exercice 1.11.10). Toutefois le résultat suivant montre que la réciproque est vraie
pour les ensembles convexes.
Preuve : On sait déjà que si C est faiblement fermé, alors il est fortement
fermé. Réciproquement supposons que C est fortement fermé et montrons que
32 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
Il est clair que Ω est un voisinage ouvert de x0 pour la topologie faible σ(E, E ∗ )
et de plus, on vérifie facilement que Ω ∩ C = ∅. Par conséquent, Ω ⊂ E \ C. Ainsi,
E \ C est un voisinage de chacun de ses points pour la topologie faible, ce qui
signifie que E \ C est ouvert pour σ(E, E ∗ ).
Le résultat suivant montre que pour une application linéaire entre deux es-
paces de Banach, la continuité faible et forte coincident.
Posons pour i ∈ I et j ∈ J
Θi : E × F −→ K fj : E × F −→ K
Θ
et
(x, y) 7−→ fi (x) (x, y) 7−→ gj (y).
G(T ) = {(x, T x) : x ∈ E,
Définition 1.4.1 La topologie faible∗ sur E ∗ est la topologie la plus faible sur E ∗
qui rend continues toutes les applications (ϕx )x∈E . On la note σ(E ∗ , E).
Notons que chaque ϕx est continue comme forme linéaire sur E ∗ (avec la topologie
forte) et donc ϕx ∈ E ∗∗ . Ainsi ϕx est continue pour la topologie faible σ(E ∗ , E ∗∗ )
et par définition de la topologie faible∗, on obtient que la topologie faible∗ est plus
faible que la topologie faible qui elle-même est plus faible que la topologie forte.
et
O2 = {f ∈ E ∗ : |f2 (x) − f (x)| < ε} = ϕ−1
x (B2 ).
Il est clair alors que O1 et O2 sont deux ouverts de E ∗ pour σ(E ∗ , E) qui vérifient
f1 ∈ O1 , f2 ∈ O2 et O1 ∩ O2 = ∅.
On peut expliciter les bases de voisinage d’un point pour cette topologie.
de la forme
Vf0 = {ϕ ∈ E ∗ : |ϕ(xi ) − f0 (xi )| < ε, ∀i ∈ I} ,
il existe ε > 0 tel que B(f0 (xi ), ε) ⊂ ωi , pour chaque i ∈ I (ici on utilise que I
est fini !). Si on définit V par
on a alors f0 ∈ V ⊂ W ⊂ U.
Notation. Etant donnée une suite (fn )n≥1 de E ∗ , on désigne par fn ⇀
∗
f la
convergence de fn vers f pour la topologie faible −∗ σ(E ∗ , E). Pour éviter les
∗
confusions, on précisera parfois “fn ⇀ f pour σ(E ∗ , E)”
(a) fn ⇀
∗
f pour σ(E ∗ , E) si et seulement si fn (x) → f (x), ∀x ∈ E.
(d) Si fn ⇀
∗
f pour σ(E ∗ , E) et si xn → x fortement dans E, alors fn (xn ) → f (x).
1.5. ESPACES RÉFLEXIFS 37
Remarque 1.4.6 Si fn ⇀
∗
f pour σ(E ∗ , E) (ou même si pour fn ⇀ f pour σ(E ∗ , E ∗∗ )),
et si xn ⇀ x pour σ(E, E ∗ ) alors on ne peut pas conclure que fn (xn ) → f (x). Par
exemple, considérons E = H un espace de Hilbert, (en )n≥1 une suite orthonormale
de H et fn ∈ E ∗ définie par
L’importance de la topologie faible∗ est sans aucun doute contenue dans le théorème
de Banach-Alaoglu.
l’application f 7−→ hf, xi de E ∗ dans K est une forme linéaire continue sur E ∗ et
donc est un élément de E ∗∗ qu’on note Jx. On a donc
Il est clair que J est linéaire et que J est une isométrie, i.e. kJxkE ∗∗ = kxkE ,
pour tout x ∈ E. En effet, en utilisant le théorème d’Hahn–Banach, on a
Preuve : Rappelons que la topologie σ(E, E ∗ ) est la topologie la plus faible sur
E qui rend continues toutes les applications x∗ ∈ E ∗ et la topologie σ(E ∗∗ , E ∗ )
est la topologie la plus faible qui rend continues toutes les applications
Θx∗ : E ∗∗ −→ K
ϕ 7−→ hϕ, x∗ i,
D’où
Θx∗ ◦ J = x∗ . (1.3)
|hfi , xε i − αi | < ε, ∀i = 1, . . . , n.
n
X n
X
βi αi ≤ βi fi .
i=1 i=1
40 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
soit !
n
X n
X n
X
βk fk (x) < γ < Re βk αk ≤ βk αk .
k=1 k=1 k=1
1.5. ESPACES RÉFLEXIFS 41
Le lemme 1.5.3 implique alors qu’il existe xε ∈ B E tel que |fi (xε ) − αi | < ε,
pour i = 1, . . . , n, ce qui signifie exactement que J(xε ) ∈ V . Donc on a bien
V ∩ J(B E ) 6= ∅.
(ii) B E , la boule unité fermée de E, est compacte pour la topologie faible σ(E, E ∗ ).
Preuve : Montrons d’abord que (i) implique (ii). Autrement dit, supposons
que E est réflexif. On a alors J(B E ) = B E ∗∗ et il résulte du théorème de Banach–
Alaoglu que B E ∗∗ est compacte pour la topologie faible∗ σ(E ∗∗ , E ∗ ). Mais d’après
42 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
Lemme 1.6.2 Soient E un K-espace vectoriel normé, (xn )n≥1 une suite de vec-
teurs de E et notons par F le sous-espace vectoriel engendré par (xn )n≥1 . Suppo-
sons que F soit dense dans E. Alors E est séparable.
Lemme 1.6.3 Soit E un espace de Banach. On suppose qu’il existe une famille
d’ouverts (Oi )i∈I telle que
(i) Oi 6= ∅, i ∈ I,
44 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
(ii) Oi ∩ Oj = ∅ si i 6= j,
Preuve : Raisonnons par l’absurde et supposons qu’il existe une suite (un )n∈N
dense dans E. Pour chaque i ∈ I, il existe n(i) ∈ N tel que un(i) ∈ Oi . L’applica-
tion i 7−→ n(i) est injective : en effet, si n(i) = n(j), alors un(i) = un(j) ∈ Oi ∩ Oj
et donc i = j. Par suite I est dénombrable, ce qui est contraire à l’hypothèse (iii).
Théorème 1.6.4 Soit E un espace de Banach tel que E ∗ est séparable. Alors E
est séparable.
Preuve : Soit (yn∗ )n≥1 une suite dénombrable dense dans E ∗ . Pour chaque
n ≥ 1, il existe xn ∈ E tel que kxn k = 1 et
1
|hyn∗ , xn i| ≥ kyn∗ k.
2
Soit L le K-espace vectoriel engendré par la suite (xn )n≥1 . Montrons que L est
dense dans E. Soit y ∗ ∈ E ∗ tel que y|L
∗
= 0. Montrons que y ∗ = 0. Etant donné
ε > 0, il existe un entier n tel que ky ∗ − yn∗ k < ε. D’où
1 ∗
ky k ≤ |hyn∗ , xn i| = |hyn∗ − y ∗ , xn i| ≤ kyn∗ − y ∗ k < ε.
2 n
Ainsi
ky ∗k ≤ ky ∗ − yn∗ k + kyn∗ k ≤ 3ε.
S∞
où Φn ⊂ E est un sous-ensemble fini. Notons que D = n=1 Φn est dénombrable.
D’autre part,
+∞
\
Vn = {0},
n=1
Corollaire 1.7.2 Soit E un espace de Banach séparable et (yn∗ )n une suite bornée
dans E ∗ . Alors il existe une sous-suite (ynk )k qui converge pour la topologie faible∗.
Lemme 1.5.2) que J est un isomorphisme de (E, σ(E, E ∗)) sur (J(E), σ(E ∗∗ , E ∗ )).
On en déduit alors facilement que B E est métrisable pour la topologie faible
σ(E, E ∗ ).
(ii) =⇒ (i) : supposons que la boule unité B E est métrisable pour la topologie
faible σ(E, E ∗ ) et soit (Vn )n un système fondamental de voisinages de l’origine
dans B E pour cette topologie induite (un tel système de voisinages dénombrable
existe car la topologie est métrisable). Pour tout n ∈ N, il existe une partie finie
An de E ∗ telle que B E ∩ Wn ⊂ Vn , où
Il est clair que V est un voisinage de l’origine pour σ(E, E ∗ ) dans B E . Donc il
existe un entier n ∈ N tel que Vn ⊂ V . Considérons maintenant
∗∗ ∗∗ ∗ ∗∗ ∗ ∗∗ ∗ ∗∗ ∗
Ω = y ∈ B E ∗∗ : |y (x0 ) − x0 (x0 )| < 1/2 & sup |y (x ) − x0 (x )| < 1 .
x∗ ∈An
Comme J(B E ) est dense dans B E ∗∗ pour la topologie σ(E ∗∗ , E ∗ ) (voir lemme de
Goldstine), il existe x0 ∈ B E tel que J(x0 ) ∈ Ω. Ainsi
et
La forme x∗∗
0 étant nulle sur An , l’inégalité (1.6) implique
(1.5) donne |x∗0 (x0 )| ≥ 1/2, i.e. x0 6∈ V . Mais comme Vn ⊂ V , ceci est absurde et
le théorème est démontré.
Corollaire 1.7.5 Soit E un espace de Banach réflexif et (xn )n une suite bornée
de E. Alors il existe une sous-suite (xnk )k qui converge faiblement.
Exemple 1.8.2 On prend E = R2 . La norme kxk2 = (|x1 |2 + |x2 |2 )1/2 est uni-
formément convexe tandis que la norme kxk1 = |x1 |+|x2 | n’est pas uniformément
convexe. On peut s’en convaincre en ”regardant” les images des boules unités.
Exemple 1.8.3 On peut montrer facilement que les espaces de Hilbert sont uni-
formément convexes. On verra par la suite (voir section 1.9) que les espaces Lp (Ω)
sont uniformément convexes pour 1 < p < ∞. Par contre L1 (Ω), L∞ (Ω) et C(K)
(K compact) ne sont pas uniformément convexes.
On pose
V = {η ∈ E ∗∗ : |hη − ζ, f i| < δ/2}.
Il est clair que V est un voisinage de ζ pour la topologie faible∗ σ(E ∗∗ , E ∗ ). D’après
le lemme de Goldstine, on sait que V ∩ J(B E ) 6= ∅. Fixons donc x ∈ B E tel que
J(x) ∈ V . Montrons que ζ ∈ J(x) + εB E ∗∗ , ce qui achèvera la démonstration.
Raisonnons par l’absurde, en supposant que ζ ∈ W = E ∗∗ \ (J(x) + εB E ∗∗ ).
Remarquons que B E ∗∗ est fermée pour la topologie faible∗ σ(E ∗∗ , E ∗ ) d’après le
théorème 1.3.8 et donc J(x) + εB E ∗∗ est aussi fermé pour σ(E ∗∗ , E ∗ ). Ainsi W
est un voisinage ouvert de ζ pour la topologie faible∗ . En appliquant une nouvelle
fois le lemme de Goldstine, on en déduit que (V ∩ W ) ∩ J(B E ) 6= ∅. Autrement
dit, il existe x̂ ∈ B E tel que J(x̂) ∈ V ∩ W . On obtient alors (puisque J(x),
J(x̂) ∈ V )
δ
|hf, xi − hζ, f i| <
2
et
δ
|hf, x̂i − hζ, f i| <
2
D’où
2hζ, f i ≤ hf, x + x̂i ≤ kx + x̂k + δ,
où
Z
kf kpp = |f (x)|p dx.
Ω
On pose également
L∞ (Ω) = {f : Ω → R; f est mesurable et il existe une constante C telle que |f (x)| ≤ C p.p. sur Ω}
On note
kf k∞ = inf{C : |f (x)| ≤ C p.p. sur Ω}.
kf gk1 ≤ kf kp kgkq .
Enfin, on rappelle que si Cc (Ω) désigne l’espace des fonctions continues sur Ω, à
support compact, alors l’espace Cc (Ω) est dense dans Lp (Ω) pour 1 ≤ p < +∞.
Dans cette section, nous voulons discuter de la réflexivité et de la séparabilité
des espaces Lp . Nous allons distinguer trois cas : 1 < p < +∞, p = 1 et p = +∞.
52 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
Il s’agit du cas le plus favorable. Comme nous allons le voir, Lp est réflexif,
séparable et le dual de Lp s’identifie isométriquement à Lq .
Théorème 1.9.2 Soit 1 < p < +∞. Alors l’espace Lp est réflexif.
αp + β p ≤ (α2 + β 2 )p/2 ,
f +g
p ε p
< 1− ,
2 p 2
1.9. APPLICATIONS : ESPACES LP 53
et donc
f +g
< 1 − δ,
2 p
avec
ε p 1/p
δ =1− 1− .
2
Ainsi Lp est uniformément convexe et donc réflexif grâce au théorème 1.8.4.
3ème étape : montrons que Lp est réflexif pour 1 < p ≤ 2. Pour u ∈ Lp et
f ∈ Lq (p et q conjugué), on pose
Z
(T u)(f ) = uf.
Ω
Il est clair que T u est une application linéaire sur Lq , qui est continue car d’après
l’inégalité de Holdër, on a
|(T u)(f0)|
kT uk(Lq )∗ ≥ = kukp .
kf0 kq
convexe dans le cas 1 < p ≤ 2. Pour cela, on peut utiliser une autre inégalité de
Clarkson, valable pour 1 < p ≤ 2, à savoir :
q q 1/(p−1)
f +g f −g 1 p 1 p
+ ≤ kf kp + kgkp .
2 p 2 p 2 2
Mais cette inégalité est plus difficile à obtenir. On trouvera dans l’exercice 1.11.25
une preuve assez simple de l’uniforme convexité de Lp (1 < p ≤ 2) sans cette
inégalité.
De plus, on a
kϕk(Lp )∗ = kukq .
kT uk(Lp )∗ = kukq , u ∈ Lq .
Remarque 1.9.7 On verra dans l’exercice 1.11.26 une autre preuve de la séparabilité
de Lp (Ω), 1 ≤ p < +∞.
56 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
v(x)
Posons u(x) = (ceci a un sens puisque w(x) > 0 pour tout x ∈ Ω). La
w(x)
fonction u est mesurable. Montrons que u ∈ L∞ (Ω) et kuk∞ ≤ kϕk(L1 )∗ . D’après
(1.10), on a
Z
vf ≤ kϕk(L1 )∗ kwf k1 , ∀f ∈ L2 (Ω). (1.11)
Ω
A = {x ∈ Ω; |u(x)| > C}
est négligeable. Raisonnons par l’absurde. Si A n’est pas négligeable, alors il existe
à ⊂ A mesurable tel que 0 < |Ã| < +∞ (ici |Ã| désigne la mesure du borélien
1.9. APPLICATIONS : ESPACES LP 57
Il en résulte que
Z
hϕ, gi = ug, ∀g ∈ Cc (Ω). (1.13)
Ω
Enfin on a Z
|hϕ, gi| ≤ |ug| ≤ kuk∞ kgk1, ∀g ∈ L1 (Ω),
Ω
ce qui donne kϕk(L1 )∗ ≤ kuk∞. Par conséquent, kϕk(L1 )∗ = kuk∞ . L’unicité de
u est une conséquence immédiate de la propriété suivante bien connue : soit
f ∈ L1loc (Ω) tel que Z
f u = 0, ∀u ∈ Cc (Ω);
Ω
alors f = 0 p.p. sur Ω.
58 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
Remarque 1.9.9 Le théorème 1.9.8 est très important. Il exprime que toute
forme linéaire continue sur L1 se représente à l’aide d’une fonction de L∞ . L’ap-
plication ϕ 7−→ u est une isométrie surjective qui permet d’identifier le dual de
L1 avec L∞ . Ainsi on fera systématiquement l’identification
(L1 )∗ = L∞ .
Ainsi on obtient que f = 0 p.p. sur Ω \ {x0 }, soit f = 0 p.p. sur Ω. Par ailleurs,
si on prend ϕ ≡ 1, on obtient avec (1.14)
Z
f = 1,
Ω
1.9.3 Etude de L∞ .
Alors, on a Z
uf = 0, ∀f ∈ Cc (Ω \ {0}).
Ω
Ceci entraı̂ne que u = 0 p.p. sur Ω \ {x0 }, soit u = 0 p.p. sur Ω. Par conséquent,
hϕ, f i = 0, ∀f ∈ L∞ ,
Oa = {f ∈ L∞ : kf − ua k∞ < 1/2}.
On vérifie facilement que la famille (Oa )a∈Ω satisfait les hypothèses du lemme 1.6.3.
On conclut donc que L∞ n’est pas séparable.
Le tableau suivant résume les propriétés principales des espaces Lp .
Nous allons voir que, dans le cadre d’un espace de Banach E, si M admet
un supplémentaire topologique dans E, alors la projection sur M est continue et
réciproquement. Tout d’abord, nous allons montrer le résultat suivant, basé sur
le théorème de l’application ouverte.
1.10. SUPPLÉMENTAIRE TOPOLOGIQUE... 61
ϕ: M ×N −→ E
(a, b) 7−→ a + b.
Preuve : (i) =⇒ (ii) : on suppose qu’il existe un sous-espace N fermé tel que
E = N ⊕ M. Définissons
P : E = M ⊕ N −→ M
x+y 7−→ x
On vérifie alors facilement que P est un projection et Im P = M. La continuité
de P découle du Lemme 1.10.2.
(ii) =⇒ (i) : il suffit de considérer N = ker P qui est fermé car P est continue.
Comme P est une projection, on a toujours E = ker P ⊕ Im P = M ⊕ N.
Nous allons voir un résultat qui donne des conditions suffisantes pour qu’il
existe un supplémentaire topologique.
Preuve : (a) : supposons que n := dim M < ∞ et soit (e1 , · · · , en ) une base
de M et (e∗1 , · · · , e∗n ) la base duale. Autrement dit, e∗i est défini par
n
!
X
e∗i λk ek = λi .
k=1
Il est clair que e∗i est une forme linéaire sur M et elle est nécessairement continue
car dim M < +∞. D’où e∗i ∈ M ∗ . Par le théorème de Hahn-Banach, on peut
1.10. SUPPLÉMENTAIRE TOPOLOGIQUE... 63
prolonger chaque forme linéaire e∗j en une forme linéaire continue x∗j ∈ E ∗ . Il
suffit alors de poser
n
X
P (x) = x∗j (x)ej , (x ∈ E)
j=1
πM : E −→ E/M
la surjection canonique et soit (πM (e1 ), πM (e2 ), . . . , πM (en )) une base de E/M.
Considérons
N := Vect {e1 , e2 , . . . , en }
Mais (πM (e1 ), πM (e2 ), . . . , πM (en )) étant une base, cette dernière égalité implique
que λi = 0, pour tout i et donc x = 0. Ceci achève de prouver que M ∩ N = {0}.
Il reste à montrer que E = M + N. Pour cela, considérons x ∈ E quelconque.
Alors il existe λ1 , λ2 , . . . , λn ∈ K tels que
n
X
πM (x) = λi ei .
i=1
64 CHAPITRE 1. TOPOLOGIE GÉNÉRALE
d’où, en posant
n
X
a := λi ei
i=1
on obtient que x − a ∈ ker πM = M. Comme a ∈ N, on obtient que x ∈ M + N,
ce qui achève la démonstration.
Remarque 1.10.6 Dans le cas où n = dim (E/M) < +∞, alors tout supplémentaire
topologique N est de dimension n. En effet, il suffit de remarquer que si E =
M ⊕ N, alors l’espace quotient E/M est isomorphe à N.
Remarque 1.10.7 Si n = dim (E/M) < +∞, alors pour tout sous-espace G tel
que dim G > n, on a M ∩ G 6= {0}. En effet, supposons par l’absurde qu’il existe
G un sous-espace vectoriel de E tel que dim G > n et M ∩ G = {0}. Si π = πM
désigne la projection canonique de E sur E/M, alors π|G est injective car
Donc dim (π(G)) = dim G > dim (E/M), ce qui est absurde car π(G) est un
sous-espace vectoriel de E/M.
codim G = codim M + 1.
E = M ⊕ N = G ⊕ Kx0 ⊕ N.
1.11 Exercices
Soit a ∈ E.
(d) Si (E, k · k) est un espace normé, quelle relation y-a-t-il entre B(a, 1) et
Bf (a, 1) ?
Exercice 1.11.5 Démontrer le théorème 1.2.9 sans utiliser le lemme 1.2.8 (au-
trement dit prouver que τ ⊂ τd , avec les notations du théorème 1.2.9).
1.11. EXERCICES 67
Exercice 1.11.7 Soient E un K-espace vectoriel et (pα )α∈A une famille de semi-
normes sur E. On note τ la topologie engendrée par cette famille de semi-normes.
Décrire les ouverts pour la topologie τ et donner une base de voisinage de cette
topologie.
(a) Montrer qu’il existe une suite de compacts (Kn )n≥ de Ω vérifiant les trois
propriétés suivantes :
Une telle suite s’appelle une suite exhaustive de compacts associée à l’ouvert
Ω.
pn (f ) := sup |f (x)|.
x∈Kn
(c) Montrer que l’espace C(Ω), muni de la topologie τ , est métrisable et complet.
(d) Montrer qu’une suite (fn )n converge vers f dans C(Ω) si et seulement si
(fn )n converge vers f uniformément sur tout compact de Ω.
V = {x ∈ E : |hfi , x − x0 i| < ε, i = 1, . . . , n} .
hfi , y0 i = 0, ∀i = 1, . . . , n.
Exercice 1.11.13 Soit E un espace vectoriel normé tel que dimE = +∞. On
se propose de montrer que la topologie faible n’est pas métrisable. Pour cela on
raisonne par l’absurde et on suppose qu’il existe une distance d sur E dont la
topologie est équivalente à σ(E, E ∗ ).
(a) Montrer qu’il existe une suite (fn )n≥1 d’éléments de E ∗ telle que, pour tout
k ≥ 1, il existe une partie finie Ik ⊂ N, il existe εk > 0 tels que
\
{x ∈ E : |hfi , xi| < εk } ⊂ Bd (0, 1/k),
i∈Ik
(b) Soient g ∈ E ∗ et V = {x ∈ E : |hg, xi| < 1}. Montrer qu’il existe une partie
finie I ⊂ N tel que
\
ker fi ⊂ V,
i∈I
puis
\
ker fi ⊂ ker g.
i∈I
On note I = {n1 , n2 , . . . , nk }.
(e) Conclure.
(b) Montrer que, pour tout r > 0 et toute fonction f ∈ K, l’ensemble Ω, défini
par
Ω = {g ∈ K : d(f, g) < r},
Fk = {f ∈ K : |hf, xn i| ≤ ε, ∀n ≥ k}.
(e) Soit N ∈ N∗ tel que 2N −1 > 1/ρ. Montrer que pour tout n ≥ k0 , on a
N
X
n
kx k1 ≤ ε + 2 |xni |.
i=1
Indication : choisir f = (f10 , f20 , . . . , fN0 , ±1, ±1, . . . ) et utiliser le fait que
f ∈ Fk0 .
1.11. EXERCICES 71
(f) Conclure.
Exercice 1.11.16 Soit E un espace de Banach et (xn )n≥1 une suite de E qui
converge faiblement vers un élément x de E. Montrer qu’il existe une suite de
combinaisons convexes des xn qui converge fortement vers x.
Application : que peut-on dire si (fn )n≥1 est une suite de fonctions définies sur
un compact K à valeurs complexes et qui converge simplement vers une fonction
f sur K ?
(a) Montrer qu’il existe ε > 0 et x1 , x2 , . . . , xn ∈ E tels que |ϕ(f )| < 1, pour
tout f ∈ V , où
pour tout f ∈ E ∗ .
Indication : on pourra montrer que si, pour tout i = 1, . . . , n, hf, xi i, alors
ϕ(f ) = 0 et utiliser la question (c) de l’Exercice 1.11.13.
(c) Conclure.
ou bien
ϕ(f ) > α, ∀f ∈ V.
pour tout g ∈ W .
1.11. EXERCICES 73
(d) En déduire que ϕ est continue en 0 pour la topologie faible∗ σ(E ∗ , E).
H = {f ∈ E ∗ : hf, xi = α}.
e := {x ∈ A : ϕ(x) ≤ λ0 }
A
Exercice 1.11.25 . Dans cet exercice, nous voulons montrer que Lp est uni-
formément convexe pour 1 < p ≤ 2.
ϕ(t)
lim− = ϕ′′ (1) > 0.
t→1 (t − 1)2
(iii) En déduire qu’il existe une constance C = C(p1 , p2 ) > 0 telle que
(iv) En déduire qu’il existe une constante c = c(p1 , p2 ) > 0 telle que
1/p1 p2 p2 1/p2
1 + |t|p1 1−t 1+t
≥ + ,
2 c 2
(v) Montrer finalement qu’il existe une constante c = c(p1 , p2 ) > 0 telle
que
1/p1 p2 p2 1/p2
|s|p1 + |t|p1 s−t s+t
≥ + ,
2 c 2
pour tous réels s, t.
1/2 1/2
kf1 k2p + kf2 k2p ≤ |f1 |2 + |f2 |2 ,
p
On a de plus kT ∗ k = kT k.
77
78 CHAPITRE 2. OPÉRATEURS BORNÉS...
Ainsi T 7−→ T ∗ est antilinéaire. Elle est isométrique d’après la proposition 2.1.1.
Montrons que (T ∗ )∗ = T . Pour cela on montre que pour tous x ∈ E et y ∈ F , on
2.1. ADJOINT D’UNE APPLICATION LINÉAIRE CONTINUE 79
= hT ∗ (y), xi
kT ∗ T k = sup kT ∗ T (x)k
kxk≤1
= kT k2 .
= hT ∗ (x), S(y)i
= hS ∗ T ∗ (x), yi.
L’application linéaire ∆α est dite diagonale car elle admet une représentation
matricielle diagonale relativement à la base (hn )n , avec (αn )n sur sa diago-
nale. On vérifie que ∆α est continue, de norme kαk∞ . De plus ∆∗α = ∆α ,
où α est la suite des nombres conjugés de la suite α.
Mf (g) = f g.
où (Im(T ))− et (Im(T ∗ ))− désignent la fermeture (pour la norme) de Im(T ) et
Im(T ∗ ) respectivement.
2.2. OPÉRATEURS NORMAUX, UNITAIRES, POSITIFS... 81
Remarque 2.2.2 On verra (voir Exercice 2.4.2) que dans le cas d’un es-
pace de Hilbert H complexe, un opérateur P ∈ L(H) est positif si et seule-
ment si hP x, xi ≥ 0, pour tout x ∈ H. Autrement dit, la condition P auto-
adjoint dans la définition est superflue si on travaille avec un espace de
Hilbert complexe. Mais attention, cela n’est pas le cas si l’espace de Hilbert
est réel !
3. Le shift S sur ℓ2 (N) est isométrique, le shift S sur ℓ2 (Z) est unitaire.
1. T est isométrique.
2. T ∗ T = IdE .
Sont équivalents :
1. T est unitaire.
1
hu, vi = (hu + v, u + vi − hu − v, u − vi + ihu + iv, u + ivi − ihu − iv, u − ivi),
4
1
hu, vi = (hu + v, u + vi − hu − v, u − vi),
4
pour un Hilbert réel. En utilisant l’une ou l’autre de ces identités et le fait que
kT (u)k = kuk, on en déduit :
kT ∗ xk2 = hT ∗ x, T ∗ xi = hT T ∗x, xi = hT ∗ T x, xi = 0,
Rλ (T ) := (T − λI)−1 , λ ∈ R(T ).
Pour démontrer ce théorème, nous allons utiliser deux lemmes importants par
ailleurs.
(Rλ (T ) − Rλ0 (T ))(T − λ0 I)(T − λI) =Rλ (T )(T − λI)(T − λ0 I) − Rλ0 (T )(T − λ0 I)(T − λI)
=T − λ0 I − (T − λI)
=(λ − λ0 )I.
N
! N
!
X X
(I − U) Un = un (I − U) = I − U N +1 ,
n=0 n=0
T = A + (T − A) = A I + A−1 (T − A) .
Remarquons alors que kA−1 (T − A)k ≤ kA−1 kkT − Ak < 1. Donc d’après (a),
on a I + A−1 (T − A) inversible et comme Inv(L(H)) est un groupe, on en déduit
que T est inversible.
Pour montrer (c), fixons A ∈ Inv(L(H)) et soit ε > 0 tel que ε ≤ kA−1 k.
Nous allons montrer que si B ∈ L(H) est tel que kBk ≤ ε/(2kA−1k2 ), alors on
a kJ (A) − J (A + B)k ≤ ε, ce qui assurera que J est continue. Tout d’abord
ε
remarquons que A + B = (I + BA−1 )A et kBA−1 k ≤ kBkkA−1 k ≤ 2kA−1 k
≤
1/2 < 1. Donc en utilisant (a), on obtient que A + B ∈ Inv(L(H)) et
+∞
X
−1 −1 −1 −1 −1
(A + B) = A (I + BA ) =A (−1)n (BA−1 )n .
n=0
2.3. SPECTRE DES APPLICATIONS LINÉAIRES ET CONTINUES 87
D’où
+∞
X
kJ (A) − J (A + B)k =kA−1 − (A + B)−1 k = kA−1 (I − (−1)n (BA−1 )n )k
n=0
+∞
X
=kA−1 (−1)n (BA−1 )n k
n=1
+∞
X kBA−1 k
≤kA−1 k kBA−1 kn = kA−1 k
n=1
1 − kBA−1 k
ε
−1 2kA−1 k
≤kA k
1 − 2kAε−1 k
≤ε.
Preuve du théorème 2.3.1 : le spectre de T est borné car si λ ∈ C vérifie
|λ| > kT k, alors T − λId est inversible d’après le lemme 2.3.3. D’où σ(T ) ⊂
D(0, kT k).
Pour montrer que σ(T ) est fermé, considérons l’application f : C → L(H)
définie par f (λ) = λId − T . Alors f est continue et R(T ) = f −1 (Inv(L(H)).
Ainsi R(T ) est un ouvert comme image réciproque d’un ouvert par une fonction
continue. Nous pouvons en conclure que σ(T ) est un compact de C.
Vérifions que σ(T ) est non vide. Pour cela nous allons utiliser la théorie
des fonctions analytiques à valeurs vectorielles (voir appendice). Considérons
g : R(T ) −→ L(H) définie par g(λ) = (T − λI)−1 . Remarquons tout d’abord
que d’après le lemme 2.3.3 (c), la fonction g est continue sur R(T ). De plus,
d’après le lemme 2.3.2, pour λ0 ∈ R(T ) et λ proche de λ0 , on a
g(λ) − g(λ0 )
= g(λ)g(λ0),
λ − λ0
Donc par continuité de g, on obtient que
g(λ) − g(λ0 )
lim = g(λ0)2 .
λ→λ0 λ − λ0
Ainsi g est holomorphe sur R(T ) et on a g ′(λ0 ) = g(λ0)2 . Supposons maintenant
que σ(T ) = ∅. Autrement dit, cela implique que R(T ) = C. Ainsi g est une
88 CHAPITRE 2. OPÉRATEURS BORNÉS...
fonction entière. Montrons que g est bornée. Pour cela remarquons que pour
|λ| > kT k, on a (toujours d’après le lemme 2.3.3)
1 1 1
kg(λ)k = k(T − λI)−1 k = k(I − T )−1 k ≤ .
|λ| λ |λ| − kT k
Ainsi cela prouve que lim|λ|→+∞ g(λ) = 0. Par conséquent g est bornée. Le
théorème de Liouville pour les fonctions analytiques à valeurs vectorielles (voir
théorème B.3.9) implique que g est constante. Comme g tend vers 0 en l’infini,
on en déduit que g ≡ 0, ce qui est absurde !
Nous allons à présent établir le théorème spectral suivant.
Montrons ensuite que σ(p(T )) ⊂ p(σ(T )). Si p est constant, l’inclusion est tri-
vialement vérifiée. On suppose donc dans la suite que p n’est pas un polynôme
constant. Soit λ ∈ σ(p(T )). On factorise dans C[X] le polynôme p(X) − λ sous
la forme :
p(X) − λ = α(X − α1 ) · · · (X − αn ),
Preuve : Notons α := lim inf n≥1 kT n k1/n . Soit λ ∈ σ(T ). D’après la seconde
assertion du Théorème 2.3.4, λn ∈ σ(T n ). Ainsi |λn | ≤ kT n k, ce qui implique
|λ| ≤ kT n k1/n . Ainsi ρ(T ) ≤ α. De plus
Pour cela nous allons utiliser la théorie des fonctions holomorphes et des séries
1
entières. Notons Ω le disque ouvert centré en 0 et de rayon ρ(T )
, avec la convention
90 CHAPITRE 2. OPÉRATEURS BORNÉS...
égalité qui reste trivialement vraie pour λ = 0. Par conséquent, si |λ| < kT1 k ,
P P
f (λ) = − n≥0 λn+1 T n . Soit R le rayon de convergence de la série entière n≥0 λn+1 T n .
1
Comme f est holomorphe sur Ω, R ≥ dist(0, Ωc ) = ρ(T )
(voir théorème B.3.7).
De plus, d’après la formule d’Hadamard
1
= lim sup kT n k1/n .
R n→∞
Exercice 2.4.5 Soit H un espace de Hilbert et soit T ∈ L(H). Montrer que les
assertions suivantes sont équivalentes :
1. T est normal.
Exercice 2.4.6 Soit (en )n≥0 la base orthonormale canonique de ℓ2 (N). Soit S
l’opérateur défini sur ℓ2 (N) par
S(en ) = en+1 , n ∈ N.
1. Déterminer le spectre de S ∗ .
Opérateurs compacts
(ii) pour toute partie A bornée de E, l’ensemble T (Ā) est relativement compact
dans F .
93
94 CHAPITRE 3. OPÉRATEURS COMPACTS
(i) =⇒ (ii) : soit A une partie bornée quelconque de E. Par définition, il existe
donc r > 0 tel que A ⊂ BE (0, r) = rBE . D’où, avec la linéarité de T , on obtient
que
T (Ā) ⊂ T (rB E ) = rT (B E ).
Comme S est continue, l’ensemble S(B E ) est borné et la proposition 3.1.2 en-
traı̂ne que T (S(B E )) est relativement compact et donc T S(B E ) est relativement
compact. Ainsi T S est compact.
Remarque 3.1.4 Il est clair que tout opérateur T de rang fini est compact :
en effet, l’ensemble T (B E ) est alors un ensemble borné d’un espace vectoriel de
dimension finie. D’après le résultat précédent, si une suite (Tn )n d’opérateurs de
rang fini dans L(E, F ) converge vers T dans L(E, F ), alors T est compact. C’est
une méthode assez efficace pour vérifier que certains opérateurs sont compacts.
Preuve : Soit (xn )n une suite qui converge faiblement vers 0. En utilisant le
théorème de Banach–Steinhauss, on en déduit que la suite (xn )n est bornée (voir
(c) de la proposition 1.3.4). Donc elle est contenue dans une boule B E (0, r), r > 0.
D’après la proposition 3.1.2, l’ensemble T (B E (0, r)) est relativement compacte
dans F donc contenu dans un compact K de F (par exemple, on peut prendre
K = T (B E (0, r)) !). D’après le lemme 1.2.8, la topologie faible σ(F, F ∗ ) et la
topologie de la norme coincide sur K. Or d’après le lemme 1.3.9, l’application
est continue. En particulier, comme (xn )n converge faiblement vers 0 dans B E (0, r),
la suite (T xn )n converge vers 0 dans F pour la topologie de la norme.
1. T ∈ K(E) ;
2. T ∗ ∈ K(E ∗ ).
hT ∗ x∗ , xi = hx∗ , T xi,
avec |hx∗ , T xi| ≤ kx∗ kkT xk ≤ kx∗ kkT kkxk. Ainsi, nous avons
kT ∗ x∗ k ≤ kT kkx∗ k,
L’ensemble
est un voisinage de y ∗ pour la topologie faible∗ . Donc (par définition d’une valeur
d’adhérence), l’ensemble I := {n ∈ N : yn∗ ∈ V } est infini. Soit maintenant
x ∈ B E quelconque. Alors il existe i ∈ {1, 2, . . . , m} tel que kT x − yi k < 6ε . Donc
pour n ∈ I, on a
|hx, T ∗ yn∗ − T ∗ y ∗i| =|hT x, yn∗ − y ∗i|
(a) l’opérateur T est adhérent (en norme d’opérateur) à l’espace des applica-
tions linéaires continues de rang fini ;
(d) pour toute suite (xn ) de points de H convergeant faiblement vers 0, la suite
(T (xn ))n converge en norme vers 0 ;
(e) pour tout système orthonormal (en )n≥0 dans H on limn→∞ kT (en )k = 0.
Preuve :
Nous allons raisonner selon le schéma suivant :
(a) =⇒ (b) =⇒ (c) =⇒ (b), puis (b) =⇒ (d) =⇒ (e) =⇒ (a).
(a) =⇒ (b) : découle de remarque 3.1.4.
(b) =⇒ (c) : on sait déjà que, par définition de la compacité d’un opérateur,
l’ensemble T (B H ) est relativement compact dans H. Il reste donc à montrer qu’il
est fermé. Soit donc (xn )n une suite de B H telle que (T xn )n converge (en norme)
vers y ∈ H. Il s’agit de montrer que y ∈ T (B H ). Comme (xn )n est bornée, il
existe d’après le corollaire 1.7.6 une sous-suite (xnk )k faiblement convergente,
disons vers x. De plus, théorème 1.3.8 assure que B H est faiblement fermée donc
3.1. APPLICATIONS LINÉAIRES COMPACTES 99
On va construire par récurrence un système orthonormal (en )n≥0 tel que kT en k >
ε. En appliquant (3.1) avec R = 0, on obtient kT k > ε. Ainsi il existe e0 ∈ E,
ke0 k = 1 tel que kT e0 k > ε. Supposons ek construit pour k < n et soit P la
projection orthogonal sur le sous-espace F de E engendré par {ek : k < n}. Alors
T P est un opérateur de rang fini donc avec (3.1), on a kT − T P k > ε. Il existe
ainsi yn ∈ E, kyn k = 1 tel que
T x = lim T xnk = 0,
k→+∞
ce qui contredit l’injectivité de T sur F . Ainsi il existe une constante c > 0 telle
que kT (x)k ≥ ckxk pour tout x ∈ F . Le fait que l’image T (F ) soit fermée résulte
d’arguments standards laissés en exercice au lecteur.
3.2. THÉORIE SPECTRALE DES OPÉRATEURS COMPACTS 101
=α−1 dist(y0 − x0 , F )
(a) Il n’existe pas de chaı̂ne infinie (Fn )n≥0 de sous-espaces vectoriels fermés
de E telle que, pour tout n ≥ 0, on ait
Fn ( Fn+1 et T (Fn+1 ) ⊂ Fn .
(b) Il n’existe pas de chaı̂ne infinie (Fn )n≥0 de sous-espaces vectoriels fermés
de E telle que, pour tout n ≥ 0, on ait
Preuve : (a) Raisonnons par l’absurde en supposant qu’il existe une suite
(Fn )n≥0 de sous-espaces vectoriels fermés de E telle que Fn ( Fn+1 et T Fn+1 ⊂
Fn . Fixons ε ∈ (0, 1). D’après le lemme 3.2.4, pour tout n ≥ 0, il existe un vecteur
xn+1 ∈ Fn+1 tel que kxn+1 k = 1 et dist(xn+1 , Fn ) > 1 − ε. Puisque T (Fn+1 ) ⊂
Fn ⊂ Fn+1 et K = IdE − T , on a K(Fn+1 ) ⊂ Fn+1 . Soient alors k, ℓ deux entiers
tels que 0 < k < ℓ ; le vecteur T (xℓ ) est dans Fℓ−1 et K(xk ) ∈ Fk ⊂ Fℓ−1 , donc
T (xℓ ) + K(xk ) ∈ Fℓ−1 , donc
Ainsi l’image K(B E ) contient une suite infinie de points dont les distances mu-
tuelles sont ≥ 1 − ε, ce qui contredit la compacité de K.
Le (b) se prouve de façon analogue.
Remarque 3.2.8 Nous verrons plus tard que le plus petit entier n0 à partir du-
quel les suites (ker(T n ))n≥0 et (Im(T n ))n≥0 deviennent stationnaires est le même.
Preuve : (i) =⇒ (ii) : on raisonne par l’absurde en supposant que T est injectif
et non surjectif. Montrons par récurrence que nécessairement Im(T n+1 ) ( Im(T n ),
pour tout n ≥ 0. Pour n = 0, on a
Supposons que Im(T k+1 ) ( Im(T k ), pour un certain k ≥ 0. Soit alors y ∈ Im(T k )\
Im(T k+1 ). Posons z := T y. Comme y ∈ Im(T k ) il existe x ∈ E tel que y = T k x.
D’où z = T y = T k+1x ∈ Im(T k+1). D’autre part, z ∈
/ Im(T k+2 ) ; en effet sinon
104 CHAPITRE 3. OPÉRATEURS COMPACTS
On note alors
Ind(T ) := dim (ker T ) − codim (Im T )
Il est facile de voir que T ′ est linéaire. Montrons que ker T ′ = Vect (x2 , x3 , . . . , xn ).
L’inclusion
Vect (x2 , x3 , . . . , xn ) ⊂ ker T ′
Pn
est évidente par définition. Réciproquement si x = i=1 λi xi + y ∈ ker T ′ (avec
y ∈ E1 ) alors on a λ1 y0 + T y = 0. Si λ1 6= 0 alors y0 = −λ−1
1 T y ∈ Im T , ce qui
Remarque 3.2.12 Dans la remarque 3.2.8, nous avions affirmé (sans le démontrer)
que l’entier n0 , à partir duquel les suites (ker(T n ))n≥0 et (Im(T n ))n≥0 deviennent
stationnaires, est le même. Ceci découle du théorème 3.2.11. En effet, comme
T n = (IdE − K)n = IdE − Kn avec Kn compact, n ≥ 1, le théorème 3.2.11
implique que
codim (Im T n ) = dim (ker T n ), (n ≥ 0).
et comme λ−1 K est compact, on peut appliquer la proposition 3.2.2 qui implique
que le noyau de λ−1 K − IdE est de dimension finie.
Montrons maintenant que si λ ∈ σ(K) \ {0} alors λ est une valeur propre de K
qui, de plus, est isolée dans le spectre de K. Quitte à remplacer K par λ−1 K, on
3.2. THÉORIE SPECTRALE DES OPÉRATEURS COMPACTS 107
peut supposer que λ = 1. Posons T = IdE − K. Supposons que 1 n’est pas valeur
propre de K. Alors T est injectif et d’après le corollaire 3.2.9, T est finalement
bijectif. Autrement dit 1 ∈
/ σ(K), ce qui est absurde. Cela montre donc que 1
est valeur propre de K. Il reste à montrer qu’elle est isolée dans le spectre de K.
Pour cela, nous allons montrer le fait suivant :
Fait 1 : si 1 ∈ σ(K) alors il existe k0 ≥ 1 tel que E = ker T k0 ⊕ Im T k0 .
Remarquons que T n = (IdE − K)n = IdE − Kn avec Kn compact, n ≥ 1.
Donc le théorème 3.2.11 implique que
De plus, d’après le corollaire 3.2.6, la suite (ker(T n ))n≥0 est stationnaire. Soit k0
le plus petit entier tel que pour tout k ≥ k0 , on a
On a k0 ≥ 1 car ker T 0 = ker IdE = {0} et ker T = ker(IdE − K) 6= {0} car 1 est
valeur propre de K. On vérifie facilement que l’équation (3.3) implique
(car sinon ker T k0 ( ker T 2k0 ). L’égalité codim (Im T k0 ) = dim (ker T k0 ) et (3.5)
impliquent avec le lemme 1.10.10 que
E = ker T k0 ⊕ Im T k0 ,
Fait 2 : il existe δ > 0 tel que pour tout nombre λ ∈ K, |λ| < δ, l’opérateur
T2 − λId est un isomorphisme sur Im T k0 .
Nous allons montrer que T2 est un isomorphisme. Remarquons que T2 est
injective d’après (3.4). On peut alors appliquer le corollaire 3.2.9 à T2 et on en
déduit que T2 est un isomorphisme de Im T k0 sur Im T k0 . Comme Inv (L(Im T k0 ))
est un ouvert, il existe δ > 0 tel que pour tout nombre λ ∈ K, |λ| < δ, T2 − λId
reste un isomorphisme sur Im T k0 . Ceci prouve le fait 2.
Fait 3 : pour tout λ 6= 0, l’opérateur T1 − λId est un isomorphisme sur ker T k0 .
Vérifions d’abord que si λ 6= 0, alors l’opérateur T1 − λId est injectif. Soit
x ∈ ker(T1 − λId). Alors x ∈ ker T k0 et T x = λx. Nous allons montrer par
récurrence descendante que pour tout 0 ≤ j ≤ k0 , Tj x = 0. Pour j = k0 , la
propriété est vérifiée car x ∈ ker T k0 . Supposons que pour 1 ≤ j ≤ k0 alors
T j x = 0. Alors en utilisant que T x = λx, on a T j−1 (λx) = T j x = 0. D’où
T j−1x = 0 car λ 6= 0. Ainsi on obtient que x = 0. L’opérateur T1 − λId est donc
injectif et finalement un isomorphisme car dim (ker T k0 ) < +∞. Ceci achève la
preuve du fait 3.
En utilisant les faits 2 et 3, on en déduit donc que l’opérateur
est un isomorphisme pour tout λ 6= 0 assez petit. Ainsi 0 est un point isolé de
σ(T ), c’est-à-dire que 1 est un point isolé de σ(K). On a donc prouvé que pour
tout λ ∈ σ(K) \ {0}, λ est un point isolé du spectre de K. Autrement dit, si
0 < r < R, l’ensemble {z ∈ σ(K) : r ≤ |z| ≤ R} est fini. Donc si σ(K) est infini,
alors ceci permet de ranger les valeurs de σ(K) en une suite (λn )n qui tend vers
0 (car le spectre de K est fermé).
Pour T ∈ L(E), on notera σp (T ) l’ensemble (éventuellement vide) des valeurs
propres de T .
(car si T est normal, T − λIdH est aussi normal). Montrons que Eλ ⊥ Eµ , pour
tout λ, µ ∈ σp (T ), λ 6= µ. Soit x ∈ Eλ , y ∈ Eµ . Alors
T ∗F ⊥ ⊂ F ⊥ et T F ⊥ ⊂ F ⊥ . (3.6)
3.3 Exercices
3.3.1 Premiers exemples d’opérateurs compacts : shifts
pondérés, opérateurs intégraux et opérateur de Vol-
terra
où K : [a, b] × [a, b] → R est une fonction continue. L’opérateur TK est appelé
opérateur intégral.
Exercice 3.3.4 Soit H l’espace de Banach des fonctions continues sur [0, 1],
noté C([0, 1]), muni de la norme infini. On définit V sur H par
Z x
V f (x) = f (t)dt.
0
Soit H un espace de Hilbert séparable et soit (en )n≥0 une base hilbertienne de
H. Par définition on dit que T ∈ L(H) est un opérateur de Hilbert–Schmidt si
X
kT k22 := kT (ei )k2 < ∞.
n≥0
2. Montrer que C2 (H) est un espace vectoriel normé complet muni pour la
norme k · k2 .
5. Soit K ∈ L2 ([0, 1], [0, 1]) et soit T défini sur L2 ([0, 1]) par
Z 1
T f (x) = K(x, y)f (y)dy.
0
3. Montrer que L2 (∆) est la somme directe hilbertienne des sous-espaces propres
de vK correspondant aux différentes valeurs propres.
5. Soit λ un nombre complexe non nul distinct de tous les λn . Soit g ∈ L2 (∆)
R
et posons dn = ∆ g(t)ϕn (t)dt. Montrer qu’il existe h ∈ L2 (∆) et une seule
fonction h ∈ L2 (∆) telle que
Z
K(t, t′ )h(t)dt − λh(t′ ) = g(t′)
∆
3.3. EXERCICES 113
Montrer que
X
K= λn ϕnn ,
n
Définition 4.1.1 Soit A une algèbre sur C équipée d’une norme k · k. On dit que
A est une algèbre de Banach si les deux conditions suivantes sont satisfaites :
115
116 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
où C(T) désigne l’espace des fonctions continues sur le cercle unité.
C’est pourquoi, dans la suite, nous nous limiterons à l’étude des fonctions de
C(T).
Lemme 4.1.2 Soit f ∈ C(T) qui de plus est C 1 par morceaux. Alors, pour tout
n ∈ Z, on a
fb′ (n) = infb(n).
où f est C 1 sur l’arc [eiaj , eiaj+1 ]. Une intégration par parties donne
Z aj+1 Z aj+1
′ it −int it −int aj+1
f (e )e dt = [f (e )e ]aj + in f (eit )e−int dt.
aj aj
Le lemme suivant va nous permettre de préciser l’image de F .
lim ℓn (g) = 0,
n→∞
pour tout g ∈ L1 ([a, b]). En effet, soit ǫ > 0 et h dans l’enveloppe linéaire des
fonctions de la forme χI telle que kh−gk1 < ǫ. Par linéarité de ℓn , limn→∞ ℓn (h) =
0. Soit N tel que si n ≥ N, |ℓn (h)| < ǫ. Alors, pour n ≥ N, on a :
|ℓn (g) − ℓn (h)| = |ℓn (g − h)| ≤ kℓn kkg − hk1 = kg − hk1 < ǫ.
Par l’inégalité triangulaire, il en résulte que kℓn (g)k ≤ ǫ + |ℓn (h)| < 2ǫ.
On obtient le résultat immédiat suivant.
lim fb(n) = 0,
n→∞
Nous verrons en exercice que F , à valeurs dans c0 (Z), n’est pas surjective.
Remarque 4.1.5 Tout ce qui précède et tout ce qui suit reste valable pour les
fonctions T -périodiques (T > 0), en remplaçant les coefficients de Fourier par la
formule :
Z T
1
f (t)e2iπnt/T dt.
T 0
4.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS PÉRIODIQUES 119
Cette définition est motivée par le fait que la série de Fourier d’un polynôme
trigonométrique P coı̈ncide avec P .
La question centrale en analyse de Fourier pour les fonctions de L1 (T), est de
savoir quand, comment et vers quoi cette série converge.
On notera par Sn (f ) la somme dite somme partielle d’ordre n de f , le po-
lynôme trigonométrique suivant :
n
X
it
Sn (f )(e ) = fb(k)eikt .
k=−n
est appelée une série trigonométrique. Par conséquent, une série de Fourier est
un cas particulier de série trigonométrique. Cependant il existe des séries trigo-
nométriques qui ne sont pas des séries de Fourier, i.e. il existe des suites (an )n∈Z
qui ne sont pas les coefficients de Fourier d’une fonction intégrable.
Via l’identité eint = cos nt + i sin nt, une série trigonométrique peut s’écrire
sous la forme :
∞
X
α0 + (αn cos nt + βn sin nt).
n=1
Un exemple très important qui joue un rôle central dans la théorie des fonctions
harmoniques (fonctions f de classe C 2 sur le disque unité ouvert D de C dont le
∂2f ∂2f
laplacien ▽f := ∂x2
+ ∂y 2
est nul sur D) est le noyau de Poisson
it 1 − r2
Pr (e ) = , (0 ≤ r < 1).
1 + r 2 − 2r cos t
1 − r2 1 − r2
=
1 + r 2 − 2r cos t (1 − reit )(1 − re−it )
1 1
= it
+ −1
1 − re 1 − re−it
X
= r |n| eint .
n∈Z
De plus, pour chaque r < 1, les sommes partielles convergent uniformément vers
Pr . La convergence uniforme est la clé pour cette méthode rapide car elle parmet
d’inverser somme et intégrale dans ce qui suit :
Z π
cr (n) = 1
P Pr (eit )e−int dt
2π −π
Z !
1 π X
|m| imt
= r e eint dt
2π −π m∈Z
X Z π
|m| 1 i(m−n)t
= r e dt
m∈Z
2π −π
= r |n| .
1−r 2
P
L’égalité 1+r 2 −2r cos t
= n∈Z r |n| eint montre que Pr est égal à sa série de Fourier
en tout point de T.
kf ⋆ gk1 ≤ kf k1 kgk1.
1. commutative : f ⋆ g = g ⋆ f ;
2. associative : (f ⋆ g) ⋆ h = f ⋆ (g ⋆ f ) ;
3. distributive : f ⋆ (g + h) = f ⋆ g + f ⋆ h ;
Preuve : Fixons n ∈ Z. On a
Z π
1
f[
⋆ g(n) = e−int (f ⋆ g)(eit )dt
2π −π
Z πZ π
1
= f (ei(t−τ ) )g(eiτ )e−in(t−τ ) e−inτ dτ dt
4π 2 −π −π
Z π Z π
1 iτ −inτ i(t−τ ) −in(t−τ )
= g(e )e f (e )e dt dτ
4π 2 −π −π
Z π Z π
1 iτ −inτ it −int
= g(e )e f (e )e dt dτ
4π 2 −π −π
= fb(n)bg (n).
1 1 1
= + − 1.
p r s
Alors f ⋆ g ∈ Lp (T) et
kf ⋆ gkp ≤ kf kr kgks .
1 1
Preuve : Si p = ∞, ou si, de façon équivalente, si r
+ s
= 1, alors f ⋆ g
est défini partout sur T et l’inégalité de Young se réduit à l’inégalité de Hölder.
1 1
Supposons maintenant que r
+ s
> 1. Nous allons utiliser une forme généralisée
de l’inégalité de Hölder, comme suit. Soient 1 < p1 , · · · , pn < ∞ tels que
1 1
+··· = 1,
p1 pn
4.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS PÉRIODIQUES 123
et soient f1 , · · · , fn des fonctions mesurables d’un espace mesuré (X, M, µ). Alors
on a :
Z Z 1/p1 Z 1/pn
p1 pn
|f1 · · · fn |dµ ≤ |f1 | dµ ··· |fn | dµ .
X X X
1 1 1 1
+ ′ = 1 et + ′ = 1.
r r s s
1 1 1
′
+ ′ + = 1.
r s p
× |f (eiθ |1−r/p
On peut aussi prouver ce résultat à l’aide du théorème d’interpolation de
Riesz–Thorin (cf. suite du cours).
Voici deux cas particuliers très utilisés de l’inégalité de Young.
Corollaire 4.1.9 Soit f ∈ Lp (T) et soit g ∈ Lq (T), où q est l’exposant conjugué
de p. Alors f ⋆ g est bien défini pour tout eit ∈ T, f ⋆ g ∈ C(T), et
kf ⋆ gk∞ ≤ kf kp kgkq .
On en déduit :
où
ωϕ (δ) = sup |ϕ(eit ) − ϕ(eis )|
|t−s|≤δ
lim ωϕ (δ) = 0.
δ→0
sin((n + 1/2)t)
Dn (eit ) = .
sin(t/2)
En effet,
n
X 2n
X
ikt −int
e = e eikt
k=−n 0
1 − ei(2n+1)t
= e−int
1 − eit
(2n+1)it/2 −(2n+1)it/2
e (e − e(2n+1)it/2 )
= e−int
eit/2 (e−it/2 − eit/2 )
−2i sin((2n + 1)t/2)
=
−2i sin(t/2)
sin((n + 1/2)t)
= .
sin(t/2)
f ⋆ Dn = Sn (f ),
Pn
où Sn (f )(eit ) := k=−n fb(k)eikt .
Le noyau de Fejér
D0 +···+Dn−1
Posons Kn (eit ) = n
. On appelle Kn le noyau de Fejér d’ordre n ≥ 1.
Pour f ∈ L1 (T), on notera par σn (f ) la somme de Fejér d’indice n de f définie
par
S0 (f ) + · · · + Sn−1 (f )
σn (f ) = .
n
La proposition suivante donne deux autres expressions utiles du noyau de Fejér.
ou encore à
2
1
it sin(nt/2)
Kn (e ) = .
n sin(t/2)
En particulier, il est alors clair que Kn est positive, paire et kKn k1 = 1.
4.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS PÉRIODIQUES 127
128 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
Le noyau de Gibbs
π
Proposition 4.1.13 1. kGn k∞ ≤ 2
+ 1.
′ it 1 reit re−it r cos t − r 2
fr (e ) = + = .
2 1 − reit 1 − re−it 1 − 2r cos t + r 2
r sin t
On vérifie que fr′ (eit ) = gr′ (eit ) où gr (eit ) = arctan 1−r cos t
. Comme fr (1) =
gr (1), fr = gr . Par conséquent
π
kfr k∞ ≤ .
2
Ainsi,
Xn
r k sin(kt) π
(1 − k/n) ≤ kfr k∞ kKn k1 = kfr k∞ ≤ .
k=1
k 2
De plus,
n
X n
−k r k sin(kt) 1X k
≤ r ≤ 1.
n k n
k=1 k=1
Par l’inégalité triangulaire, on obtient
n
X r k sin(kt) π
≤ + 1.
k=1
k 2
π
En faisant tendre r vers 1, on obtient kGn k∞ ≤ 2
+ 1.
2. Pour 0 < t < 2π, considérons la série
X sin(nt)
S(z) = zn .
n≥1
n
Son rayon de convergence est 1 et S(1) converge car si 0 < t < 2π, les sommes
partielles
N
X N
1 X int −int 1 − eiN t −it 1 − e−iN t
sin(nt) = (e −e ) = eit −e = 4i cos(t/2) sin(N/2)
n=1
2i n=1 1 − eit 1 − e−it
1
sont uniformément majorées par 4, et n → n
décroit vers 0. D’après le théorème
d’Abel radial, S(z) converge uniformément sur le segment [0, 1]. En particulier,
P
r 7→ n≥1 sin(nt)
n
r n est continue sur [0, 1] et ainsi
X sin(nt) X sin(nt)
lim rn = .
r→1
n≥1
n n≥1
n
P
Dans la preuve du 1., nous avons établi que n≥1 sin(nt) n
r sin t
r n = arctan 1−r cos t
.
Par conséquent,
X sin(nt)
sin t
= arctan
n≥1
n 1 − cos t
2 sin(t/2) cos(t/2)
= arctan
1 − cos2 (t/2) + sin2 (t/2)
= arctan(1/ tan(t/2))
= arctan(tan(π/2 − t/2))
π−t
= .
2
130 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
3. On remarque que
n
X sin(kπ/n)
kGn k∞ ≥ Gn (π/n) =
k
k=1
n
π X sin(kπ/n)
=
n kπ/n
Z πk=1
sin t
≥ dt = 1, 85...
0 t
π
> = kGk∞ .
2
Le noyau de Jackson
it Kn2 Kn2
Jn (e ) = = .
kKn2 k1 kKn k22
Comme le noyau de Fejér est positif, il est de même pour le noyau de Jackson. Par
défintion on a aussi kJn k1 = 1. On peut aussi remarquer que comme le noyau de
Fejér d’ordre n est un polynôme trigonométrique d’ordre n, le noyau de Jackson
d’ordre n est un polynôme trigonométrique d’ordre 2n.
La proposition suivante donne une estimation sur le noyau de Jackson utile
pour les applications. Cette estimation pour k = 1, 2 n’est pas vraie pour le
noyau de Fejér et cela justifie pour certaines applications l’introduction du noyau
de Jackson.
2
t ≤ sin t ≤ t.
π
4.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS PÉRIODIQUES 131
Si f est impaire, Z π
−i
fb(n) = f (t) sin(nt)dt.
π 0
De plus, lorsque f est impaire,
n
X n
X
it
Sn (f )(e ) = 2i fb(k) sin(kt) et σn (f )(eit ) = 2i (1 − k/n)fb(k) sin(kt).
k=1 k=1
avec 2nk + j (resp. 2nk − j) qui parcourt [2nk + 1, 3nk ] (resp. [nk , 2nk − 1]) quand
j parcourt [1, nk ]. Comme nk+1 > 3nk , on en déduit
avec 2nk + j (resp. 2nk − j) qui parcourt [2nk + 1, 3nk ] (resp. [nk , 2nk − 1]) quand
j parcourt [1, nk ], on obtient pour k ≥ 2 :
nk
αk X ei(2nk −j)t
S2nk (f )(eit ) = α1 P1 (eit ) + · · · + αk−1 Pk−1 (eit ) − .
2i j=1 j
En particulier,
nk
αk X 1
S2nk (f )(1) = α1 P1 (1) + · · · + αk−1Pk−1 (1) − .
2i j=1 j
Presque au même moment où il donnait son contre-exemple, Fejér a montré
comment contourner la difficulté et a énoncé un résultat positif d’une très grande
généralité et utilité.
On a donc
2kf k∞
kf − σn (f )k∞ ≤ w(δ) + .
n sin2 (δ/2)
Par conséquent
lim sup kf − σn (f )k∞ ≤ w(δ).
n→∞
qui implique
lim sup kf − σn (f )k∞ = 0.
n→∞
On a donc montré que kσn (f )kp ≤ kf kp . Le même calcul appliqué cette fois à
Z π
it it 1
f (e ) − σn (f )(e ) = (f (eit ) − f (ei(t−u) )Kn (u)du
2π −π
conduit à
Z π Z π
1
kf − σn (f )kpp ≤ iu
Kn (e ) it
|f (e ) − f (ei(t−u) p
)| dt du
4π 2 −π −π
Z π
1
= Kn (eiu )g(e−iu )du = σn (g)(1),
2π −π
136 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
1
Rπ
avec g(eiu ) = 2π −π
|f (eit ) − f (ei(t−u) )|p dt = kf − τu f kpp où τu f (eit ) = f (ei(t+u ).
Or, via le théorème de convergence dominée de Lebesgue on montre aisément que
g est continue sur T. D’aprés le premier point du théorème de Fejér, limn→∞ σn (g)(1) =
g(1) = 0, et donc limn→∞ kf − σn (f )kp = 0.
Voici à présent un théorème donnant quelques applications très utiles.
Si E est un sous-espace vectoriel de L1 (T) et si Λ ⊂ Z, on pose EΛ = {f ∈
E : Sp(f ) ⊂ Λ}. On désigne par P l’ensemble des polynômes trigonométriques.
Fourier.
f dans L2 (T). Autrement dit Sn (f ) → f dans L2 (T), ce qui est plus précis que
le théorème de Fejér pour p = 2.
5. Soit f continue et C 1 par morceaux. D’après le lemme 4.1.2, fb′ (n) = infb(n).
Comme f ′ est continue par morceaux, en particulier f ′ est dans L2 (T). D’après
4. on a donc
X X
n2 |fb(n)|2 = |fb′(n)|2 = kf ′ k22 .
n∈Z n∈Z
X X 1 b
|fb(k)| = |k f (k)|
|k|
1≤|k|≤n 1≤|k|≤n
1/2 1/2
X 1 X
≤ k 2 |fb(k)|2
k2
1≤|k|≤n 1≤|k|≤n
!1/2
X 1 π
′
≤ 2 2
kf k 2 = √ kf ′ k2 .
k≥1
k 3
138 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
kf − gk ≤ kf − σn (f )k + kg − σn (g)k,
où g(eit ) = f (t). Comme g est continue sur T, d’après le théorème de Fejér,
kg − σn (g)k∞ → 0, et donc F est limite uniforme de polynômes algébriques.
Alors on a :
1
lim Sn (f )(eit0 ) = (f + + f − ).
n→∞ 2
140 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
Le phénomène fut mis pour la première fois en évidence en 1848 par Henry
Wilbraham, mais cette découverte ne connut guère d’écho. En 1898 Albert Mi-
chelson développa un système mécanique capable de calculer et sommer la série
de Fourier d’un signal donné en entrée. Il observa alors un effet d’amplification des
discontinuités, qui persistait malgré l’augmentation du nombre de coefficients cal-
culés. Alors que Michelson soupçonnait un défaut dans la fabrication de son engin,
Josiah Willard Gibbs montra que le phénomène était d’origine mathématique et
se produisait dans des conditions très générales. En 1906, Maxime Bôcher donna
la première interprétation satisfaisante du phénomène auquel il donna le nom de
4.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS PÉRIODIQUES 141
phénomène de Gibbs.
4.1.8 Applications
Il existe de très nombreuses applications des séries de Fourier telle que l’inégalité
isopérimétrique, la résolution d’équations aux dérivées partielles telle que l’équation
des ondes...
142 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
Inégalité de Bernstein
kh′ k∞ ≤ λkhk∞ ,
où S est la fonction triangle décalée de l’exercice 4.2.5. Puisque la série de Fourier
de S converge normalement sur R,
n n ∞
!
X X X
h′ (t) = iλj aj eiλj t = iaj eiλj t b
S(k)eikλj
π
α= et ϕ(t) = h(αt).
2λ
Pn
Comme ϕ(t) = k=1 aj e
i(λj α)t
avec |λj α| ≤ π2 , d’après le cas précédent, kϕ′ k∞ ≤
π
2
kϕk∞ , c’est-à-dire, αkh′ k∞ ≤ π2 khk∞ , et ainsi kh′ k∞ ≤ λkhk∞ .
P
Théorème 4.1.20 Soit (ǫn )n≥0 une suite de C telle que n≥0 |ǫn | < ∞. Soit q
un réel > 1, et (λn )n≥1 une suite d’entiers strictement positifs telle que λn+1 ≥
qλn pour tout n ≥ 1. Soit f défini par
X
f (t) = ǫ0 + ǫn eiλn t .
n≥1
ǫn = o(λ−1
n ) quand n → ∞.
En particulier,
X eiλn t
f (t) =
n≥1
λn
Lemme 4.1.21 Soit n ≥ 2. Alors pour tout k tel que 0 < |k| < min(λn+1 −
λn , λn − λn−1 ), on a fb(λn − k) = 0.
Preuve : Par définition de f , le spectre de f est inclus dans {0} ∪ {λj : j ≥ 1}.
Pour k tel que 0 < |k| < min(λn+1 − λn , λn − λn−1 ), on a λn − k 6= λn et
144 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
D’après le lemme 4.1.21, on a donc fb(λn − k) = 0, pour tout 0 < |k| ≤ 2p.
P
De plus Jp est de la forme Jp (eit ) = 1 + 0<|k|≤2p αk ek . On obtient alors
Z π Z π
1 it −iλn t 1
f (t)Jp (e )e dt = f (t)e−iλn t dt
2π −π 2π −π
X Z π
1
+ αk f (t)ei(k−λn )t dt
2π −π
0<|k|≤2p
X
= fb(λn ) + αk fb(λn − k)
0<|k|≤2p
= fb(λn )
= ǫn .
Preuve du théorème 4.1.20 : Suposons d’abord que t0 = 0, f (t0 ) = 0 et
f ′ (t0 ) = 0. Soit n0 ≥ 2 un entier tel que :
n ≥ n0 ⇒ E(ρλn /2) − 1 ≥ 1.
Soit ǫ > 0. D’après les hypothèses sur f , il existe δ ∈]0, π[ tel que
Pour n ≥ n0 , posons
pn = E(ρλn /2) − 1.
où h est une fonction C 1 sur l’intervalle fermé [0, L] telle que h(0) = h(L) = 0
(nécessaire d’après l’hypothèse u(0, t) = u(L, t) = 0). La série de Fourier de h
sera donc normalement convergente. L’idée de départ est de chercher une solution
de la forme u(x, t) = f (x)g(t). Alors (4.1) est équivalente à
Cherchons une solution telle que u(x, t) 6= 0 pour tout x ∈]0, L[ et pour tout
t ∈]0, ∞[. L’égalité ci-dessus est alors équivalente à
f ′′ (x) g ′ (t)
= , ∀x ∈]0, L[, ∀t ∈]0, ∞[.
f (x) g(t)
Ainsi il existe λ ∈ R tel que
et
g ′ (t) = λg(t), t ∈]0, ∞[. (4.3)
Cette égalité traduit le fait que les bn doivent être les coefficients de Fourier d’une
fonction e
h égale à h sur [0, L] et que la série de Fourier de e
h converge vers e
h sur
[0, L]. La voie est donc tracée !
148 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
et Z
∞
X 2 L nπ
|bn | < ∞, bn = h(x) sin x dx.
n=1
L 0 L
La fonction u définie par
∞
X nπ n2 π2
u(x, t) = bn sin x e− L2 t
n=1
L
est continue sur Q. Montrons qu’elle est en fait C ∞ sur Q et que l’on peut
dériver sous le signe somme. Pour cela il suffit de montrer que les séries dérivées
convergent uniformément sur tout compact de Q.
Si t ∈ [ε, M], ǫ > 0, le terme général de la série dérivée d’ordre k est majoré
en valeur absolue par
n2 π 2
Ck |bn |n2k e− L2
ǫ
,
qui est le terme général d’une série convergente. Il y a donc convergence normale,
ce qui montre que u ∈ C ∞ (Q). On a donc prouvé l’existence d’une solution à
notre problème.
Que peut-on dire de l’unicité ?
Pour conclure, nous avons besoin du lemme suivant, qui est un principe du
maximum.
∂2 ∂
P = ∂x2
− ∂t
. Soit T > 0 et K = [0, L] × [0, T ]. Alors
sup u = sup u.
K K∩∂Q
∂uǫ ∂ 2 uǫ
xǫ ∈]0, L[, donc (ǫ) = 0 et (mǫ ) ≤ 0.
∂x ∂x2
sup u = sup u.
K K∩∂Q
Nous allons en déduire l’unicité de notre problème. En effet, soient u et v deux
solutions et soit w = v − u. Alors w est continue sur Q, de classe C 2 sur Q, avec
(4.1) vérifiée par w. De plus
4.2 Exercices
Exercice 4.2.1 Soit f une fonction continue sur T telle que fb(n) ≥ 0 pour tout
n ∈ Z. Montrer, à l’aide du théorème de Fejér et du lemme de Fatou, que
X
fb(n) < ∞.
n∈Z
π 3π
S(eit ) = t si − π/2 ≤ t ≤ π/2 et S(eit ) = π − t si ≤t≤ .
2 2
Montrer que
X
b
|S(n)| = π/2.
n6=0
1 X 1
πcotan(πa) = +a (a ∈ C \ Z).
a n≥1
a − n2
2
1 u u3
En utilisant le développement asymptotique de cotanu = u
− 3
− 45
− · · · quand
u → 0, montrer, en faisant tendre a vers 0, que
X∞ X∞
1 π2 1 π4
2
= , 4
= ,···
n=1
n 6 n=1
n 90
152 CHAPITRE 4. SÉRIES DE FOURIER ET APPLICATIONS
Chapitre 5
Lp (R) \ Lq (R) 6= ∅.
On notera par C(R) l’espace des fonctions continues sur R. Un élément de C(R)
n’est pas nécessairement borné ou uniformément continue. Pour certaines appli-
cations il sera suffisant de considérer le sous-espace plus petit
Les éléments de C0 (R) sont eux bornés et uniformément continus sur R. L’exemple
de la fonction “sinus” montre que la réciproque est fausse. Comme les éléments
de C0 (R) sont bornés, C0 (R) peut aussi être considéré comme un sous-espace
fermé de L∞ (R). Dans ce cas, on munit C0 (R) de la norme du sup, laquelle sera
atteinte. Une autre sous-classe des fonctions continues sur R est Cc (R) l’espace des
fonctions continues à support compactes ; elles aussi sont bornées et uniformément
153
154 CHAPITRE 5. TRANFORMATION DE FOURIER SUR L1 (R)
continues. Les espaces lisses C n (R), C0n (R), Ccn (R), C ∞ (R), C0∞ (R), Cc∞ (R) sont
définis de façon analogue.
La transformée de Fourier d’une fonction f ∈ L1 (R), notée fb, est définie par :
Z ∞
b
f (t) = f (τ )e−i2πtτ dτ t ∈ R.
−∞
kfbk∞ ≤ kf k1.
De plus fb est une fonction uniformément continue qui tend vers 0 à l’infini.
et on en déduit :
1 ′ 1 ǫ
|fb(t)| ≤ kfn0 kL1 + kf − fn0 kL1 ≤ kfn′ 0 kL1 + .
|t| |t| 2
Alors on a la relation :
∞
X ∞
X
F (n) = Fb(n).
n=−∞ n=−∞
156 CHAPITRE 5. TRANFORMATION DE FOURIER SUR L1 (R)
Cette série (à double sens) est normalement convergente sur tout compact de R.
En effet, si A > 0 vérifie |x| ≤ A, alors pour |n| ≥ 2A, on a |x + n| ≥ |n| − |x| ≥
|n| − A ≥ |n|/2, et donc |F (x + n)| ≤ M(1 + |n|/2)−α. Comme F est continue
par hypothèse, f l’est aussi. De plus f (x + 1) = f (x). La fonction f est donc
1-périodique. Calculons le m-ième coefficient de Fourier de f :
Z 1
fb(m) = f (t)e−imt dt
0
Z 1 X
= F (t + n)e−i2πmt dt
0 n∈Z
XZ 1
= F (t + n)e−i2πmt dt.
n∈Z 0
R P P
L’interversion entre et est justifiée par la convergence normale de n∈Z F (t+
n) sur [0, 1] et le fait que |e−imt | = 1. Comme e−i2πn = 1 pour tout n ∈ Z, on
obtient :
XZ 1
fb(m) = F (t + n)e−i2πm(t+n) dt
n∈Z 0
XZ n+1
= f (u)e−i2πmu du
n∈Z n
= Fb(m).
c’est-à-dire :
∞
X X
F (x + n) = Fb(m)e2iπmx ,
n=−∞ m∈Z
kf ⋆ gk1 ≤ kf k1 kgk1.
f[
⋆ g = fbb
g.
= fb(t)b
g (t).
5.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS INTÉGRABLES SUR R159
Nous avons déjà remarqué que L1 (T) contient Lp (T) pour tout 1 ≤ p ≤ ∞.
Ainsi, peut définir sans problème f ⋆ g pour tout f ∈ Lp (T), g ∈ Lr T) avec
p, r ≥ 1. Comme dt n’est pas une mesure finie sur R, les espaces de Lebesgue
ne forment pas de chaı̂ne et ainsi il faut justifier le fait que f ⋆ g est bien défini
lorsque soit f , soit g n’est pas dans L1 (R). Cependant, le théorème de Young va
garantir que si f ∈ Lr (R) et g ∈ Ls (R) pour certaines valeurs de r et s, alors
f ⋆ g sera bien défini.
1 1 1
= + − 1.
p r s
Alors f ⋆ g ∈ Lp (R) et
kf ⋆ gkp ≤ kf kr kgks .
kf ⋆ gkp ≤ kf kp kgk1.
Corollaire 5.1.7 Soit f ∈ Lp (T) et soit g ∈ Lq (T), où q est l’exposant conjugué
de p. Alors f ⋆ g est bien défini pour tout eit ∈ T, f ⋆ g ∈ C0 (R), et
kf ⋆ gk∞ ≤ kf kp kgkq .
160 CHAPITRE 5. TRANFORMATION DE FOURIER SUR L1 (R)
b
h = fbb
g = |fb|2 ≥ 0.
R
Par conséquent, fb ∈ L2 (R), et de plus, d’après le corollaire 5.1.9, h(0) = R
b
h(t)dt.
Calculons à présent chaque membre de l’égalité suivant leur définition. D’un coté
nous avons Z Z
b
h(t)dt = |fb(t)|2 dt = kfbk22 ,
R R
et d’un autre coté,
Z Z
h(0) = f (t)g(0 − t)dt = f (t)f (t)dt = kf k22 .
R R
5.1. ANALYSE DE FOURIER POUR LES FONCTIONS INTÉGRABLES SUR R161
Alors (fn )n est une suite de Cauchy dans L2 (R). D’après le théorème de Plan-
cherel, nous avons
kfbn − fc \
m k2 = kfn − fm k2 = kfn − fm k2 ,
ce qui implique que (fbn )n est aussi une suite de Cauchy. Comme L2 (R) est com-
plet,
lim fbn
n→∞
existe dans L2 (R). Si (gn )n est une autre suite de L1 (R) ∩ L2 (R) satisfaisant les
mêmes propriétés, alors limn→∞ gbn existe aussi dans L2 (R). Cependant, toujours
d’après le théorème de Plancherel, nous avons
≤ kfn − f k2 + kgn − f k2 → 0,
et donc, limn→∞ gbn = limn→∞ fbn . Autrement dit, pour un élément de L2 (R), la
limite de fbn ne dépend pas du choix pourvu que la suite soit bien dans L1 (R) ∩
L2 (R) et converge vers f dans L2 (R).
Nous pouvons ainsi définir la transformée de Fourier–Plancherel de f ∈
L2 (R) par
F (f ) = lim fbn ,
n→∞
162 CHAPITRE 5. TRANFORMATION DE FOURIER SUR L1 (R)
lim kfn − f k2 = 0.
n→∞
F (f ) = fb.
En d’autres termes, les deux définitions coı̈ncident sur L1 (R)∩L2 (R). Par conséquent
on utilisera sans ambiguité la notation fb pour la transformée de Fourier–Plancherel
d’une fonction f ∈ L2 (R). De plus, d’après le théorème de Plancherel,
F : L2 (R) → L2 (R)
f 7→ fb
Nous pouvons à présent montrer que la transformation de Fourier–Plancherel
F est surjective sur L2 (R). En fait, si g est orthogonal à l’image de F , c’est-à-dire
si Z ∞
fb(t)g(t)dt = 0
−∞
2
pour tout f ∈ L (R), alors, grâce à la formule de multiplication, on obtient
Z ∞
f (t)b
g(t)dt = 0,
−∞
Analyse complexe
Dans ce chapitre, nous supposerons que le lecteur connaı̂t les résultats de base
de la théorie des fonctions holomorphes d’une variable (logarithme complexe,
théorème de Cauchy, de Morera, principe du maximum,...). Nous renvoyons le
lecteur au livre de Pabion [6], Amar–Matheron [5] ou Rudin [7] par exemple pour
les rappels sur ces résultats.
Définition 6.1.1 Si (an )n≥1 est une suite de nombres complexes, on dit que le
Q
produit an est convergent si la suite des ”produits partiels” (pn )n≥1 , définie par
n
Y
pn = aj , (n ≥ 1),
j=1
165
166 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
Alors on a
p∗N ≤ exp (|u1| + |u2 | + · · · + |uN |) , (6.1)
et
|pN − 1| ≤ p∗N − 1. (6.2)
exp(|un |) ≥ 1 + |un |,
|pN − 1| = p∗N − 1.
= (1 + |uk+1|)p∗k − 1
= p∗k+1 − 1,
Théorème 6.1.3 Soit (un )n≥1 une suite de fonctions définies sur un ensemble
X et à valeurs complexes. Supposons que la série de fonctions
X
un
n
Preuve : Par hypothèse, il existe une constante réelle C > 0 telle que
+∞
X
|un (x)| ≤ C,
n=1
N
Y
pour tout x ∈ X. Désignons par pN = (1 + un ). Alors le lemme 6.1.2 implique
n=1
que
|pN (x) − 1| ≤ exp(C) − 1,
soit
pour tout x ∈ X et tous M > N ≥ N0 . Ceci montre que la suite (pn )n≥1 est
uniformément de Cauchy. Donc elle converge uniformément sur X, ce qui achève
la preuve de la première partie du théorème.
D’autre part, en utilisant ce qui précède, on a
Ainsi si f (x0 ) = 0 alors pN0 (x0 ) = 0, ce qui prouve qu’il existe un entier 1 ≤ k ≤
N0 tel que uk (x0 ) = −1. Réciproquement si un (x0 ) = −1 pour un certain entier
n, alors PN (x0 ) = 0, pour tout N ≥ n et donc f (x0 ) = 0.
Théorème 6.1.4 Soit (un )n≥1 une suite telle que 0 ≤ un < 1. Les assertions
suivantes sont équivalentes :
Y
(i) Le produit infini (1 − un ) converge et
n
+∞
Y
(1 − un ) > 0.
n=1
X
(ii) La série un est convergente.
n
6.1. PRODUITS INFINIS 169
N
Y
Preuve : Si pN = (1 − un ), il est clair que la suite (pN )N est décroissante
n=1
et minorée par 0. Ainsi (pN )N ≥1 converge vers une limite p ≥ 0. Remarquons
maintenant que
0 ≤ p ≤ pN ≤ exp(−u1 − u2 − · · · − uN ), (6.5)
Preuve : Puisque la convergence est uniforme sur tous les compacts de Ω, il est
clair que la fonction f est continue sur Ω. Maintenant si ∆ est un triangle contenu
dans Ω, alors ∆ est bien sûr un compact de Ω et par convergence uniforme de
(fn )n vers f sur ∆, on a
Z Z
f (z) dz = lim fn (z) dz.
∂∆ n→+∞ ∂∆
170 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
et donc Z
f (z) dz = 0.
∂∆
(ℓ)
Corollaire 6.1.6 Sous les mêmes hypothèses, pour tout ℓ ≥ 1, la suite (fn )n≥1
converge vers f (ℓ) uniformément sur tout compact de Ω.
Théorème 6.1.7 Soit (fn )n≥1 une suite de fonctions holomorphes sur un ouvert
Ω du plan complexe et supposons que la série de fonctions
X
(1 − fn )
n
(b) On a
[
Z(f ) = Z(fn ), (6.6)
n≥1
f =g fn ,
n=1
172 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
Q
où g = n≥N0 fn . D’après le théorème 6.1.3, g ne s’annule pas sur K. Donc
NY
! N −1
0 −1 X0
m(a, f ) = m a, fn = m(a, fn ),
n=1 n=1
|h|
|Log(1 + h)| ≤ .
1 − |h|
Admettons pour le moment ce lemme et finissons la preuve de (c). Fixons pour
cela un ouvert U relativement compact dans Ω. On sait qu’il existe N0 ∈ N tel
que
1
n ≥ N0 =⇒ |fn (z) − 1| ≤ , (z ∈ U).
2
En particulier ℜ(fn (z)) ≥ 1/2 et Log(fn (z)) est bien définie sur U , pour tout
n ≥ N0 . Ainsi, d’après le lemme 6.1.8, on a
|fn (z) − 1|
|Log(fn (z))| ≤ ≤ 2|fn (z) − 1|, (z ∈ U , n ≥ N0 ).
1 − |fn (z) − 1|
P
Ceci implique que la série n≥N0 Log(fn (z)) est normalement convergente sur U .
Posons
n
Y
Fn = fj , (n ≥ 1).
j=1
+∞
X
où g = Log(fj (z)). D’après le lemme 6.1.5 de Weierstrass, la fonction g est
j=N0 +1
holomorphe sur U et
+∞
X +∞
X fj′ (z)
g ′ (z) = (Logfj )′ (z) = , (z ∈ U),
j=N0 +1 j=N +1
fj (z)
0
D’où Z Z
1 1
|h| |h| |h|
|Log(1 + h)| ≤ dt ≤ dt = ,
0 |1 + th| 1 − |h| 0 1 − |h|
ce qui achève la preuve du lemme 6.1.8 et du théorème 6.1.7.
Corollaire 6.1.10 Si (an )n≥1 est une suite de nombres complexes non nuls telle
P
que la série n 1/an est absolument convergente, alors il existe une fonction
entière dont les zéros sont exactement les termes de la suite (an )n≥1 .
|1 − Ep (z)| ≤ |z|p+1 .
Ainsi
1 − Ep (z) X an X an
n−p
p+1
= z ≤ |z|n−p .
z n≥p
n+1 n≥p
n+1
D’où, pour |z| ≤ 1, on obtient
1 − Ep (z) X an
≤ = 1 − Ep (1) = 1,
z p+1 n≥p
n+1
Théorème 6.2.3 Soit (zn )n≥1 une suite de nombres complexes avec zn 6= 0 et
telle que rn = |zn | → +∞, si n → +∞. Soit (pn )n≥1 une suite d’entiers telle que,
pour tout nombre positif r, on ait
+∞
X 1+pn
r
< +∞. (6.9)
n=1
r n
n ≥ n0 =⇒ rn > 2r.
D’où
r 1
< ,
rn 2
P
et la série n 2−n converge, ce qui implique que la série dans (6.9) converge
aussi.
176 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
Remarque 6.2.5 Si α intervient m fois dans la suite (zn )n≥1 , alors la fonction
P possède un zéro d’ordre m au point α.
Remarque 6.2.6 Pour certaines suites (zn )n≥1 , la condition (6.9) est satisfaite
P
pour une suite constante (pn )n≥1 . Par exemple, si n 1/rn < +∞, nous pouvons
choisir pn = 0 et le produit canonique s’écrit
+∞
Y
z
1− .
n=1
z n
P P
Si n 1/rn = +∞ mais n 1/rn2 < +∞, alors le produit canonique P devient
Y
+∞
z
z
P (z) = 1− exp .
n=1
zn zn
Preuve : Notons que f étant une fonction entière, soit les zéros de f sont en
nombre fini, soit on a |zn | → +∞. On peut donc considérer P le produit défini
par (6.10) et construit à partir des zéros de la fonction f (si le nombre de zéro de
f est fini, le produit est fini !). D’après le théorème 6.2.3, la fonction f /P est une
fonction entière ne possèdant aucun zéro dans le plan complexe. Ainsi il existe
une fonction entière g telle que f /P = exp(g), ce qui achève la preuve.
(b) La factorisation (6.11) n’est pas unique : une factorisation unique peut-
être associée à des fonctions f dont les zéros satisfont la condition requise
pour la convergence d’un produit canonique (correspondant à une suite (pn )n
constante).
Théorème 6.2.9 Soit Ω un ouvert de C, (aj )j≥1 une suite de points distincts de
Ω sans point d’accumulation dans Ω et soit (mj )j≥1 une suite d’entiers de N∗ .
Alors il existe une fonction f holomorphe sur Ω dont les seuls zéros sont les aj
avec la multiplicité mj , j ≥ 1.
Preuve : Montrons tout d’abord qu’il suffit de prouver que si Ω est un ouvert
de C tel qu’il existe un réel R > 0 tel que
En effet, si une telle fonction f peut-être construite pour tout ouvert Ω satisfaisant
(6.12), considérons Ω1 un ouvert quelconque de C, (αj )j≥1 une suite de points
178 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
distincts de Ω1 , sans point d’accumulation dans Ω1 et (mj )j≥1 une suite d’entiers
strictement positifs. Choisissons un point a ∈ Ω1 et r > 0 tel que
D(a, r) = {z ∈ C : |z − a| ≤ r} ⊂ Ω1 ,
et Ω = ϕ(Ω1 ) \ {∞}. Il est facile de vérifier que Ω est un ouvert de C qui vérifie
(6.12) avec R = r et aj = ϕ(αj ) = (αj − a)−1 . Donc il existe une fonction f
holomorphe sur Ω telle que
Il reste donc à prouver que si Ω satisfait (6.12) alors on peut construire une
fonction f holomorphe sur Ω telle que
Définissons une seconde suite (zn )n≥1 constituée des points de la suite (aj )j≥1 mais
telle que chaque aj est répété suivant sa multiplicité mj . Notons tout d’abord
que l’hypothèse (6.12) implique que Ω 6= C car sinon la suite (aj )j≥1 ayant un
point d’accumulation dans D(0, R), elle aurait un point d’accumulation dans
Ω, ce qui est contraire à l’hypothèse. Donc l’ensemble C \ Ω est un fermé non
6.2. LE THÉORÈME DE FACTORISATION DE WEIERSTRASS 179
vide contenu dans D(0, R) qui est un compact. Ainsi C \ Ω est un compact non
vide de C. Par conséquent, pour tout n, il existe un point wn ∈ C \ Ω tel que
|zn − wn | = dist(zn , C \ Ω). Remarquons que
lim |zn − wn | = 0.
n→+∞
En effet, sinon comme la suite (aj )j≥1 a un point d’accumulation a dans D(a, R),
on aurait dist(a, C \ Ω) > 0, c’est-à-dire que a ∈ Ω, ce qui est contraire à l’hy-
pothèse. Considérons maintenant les fonctions
zn − wn
z 7−→ En
z − wn
qui sont holomorphes sur Ω et qui ont un zéro simple en z = zn . Nous allons
montrer que le produit infini
+∞
Y
zn − wn
f (z) = En
n=1
z − wn
1 3
|z| ≤ |Log(1 + z)| ≤ |z|.
2 2
2R
< δ.
R1 − R
zn − wn 2R
≤ < δ, (n ≥ 1).
z − wn R1 − R
Ainsi l’inégalité (6.13) est valable pour tout n ≥ 1 et tout z tel que |z| > R1 . En
particulier, on a
zn − wn
ℜ En > 0.
z − wn
On peut donc écrire
+∞
X !
zn − wn
|f (z) − 1| = exp Log En −1 . (6.14)
n=1
z − wn
3 δ2
|u| < =⇒ | exp(u) − 1| < ε.
21−δ
En utilisant (6.14), on obtient ainsi |f (z) − 1| < ε, pour tout |z| ≥ R1 , ce qui
conclut la construction de f .
d’où
+∞
X
Log(1 + z) z n−1
1− = 1− (−1)n−1
z n=1
n
+∞
X (−1)n z n
= 1−
n=0
n+1
+∞
X (−1)n z n
=
n=1
n+1
+∞
X |z|n
≤
n=1
n+1
+∞
X
1
≤ |z|n
2 n=1
1 |z|
= .
2 1 − |z|
Log(1 + z) 1
1− ≤ ,
z 2
Autrement dit, une fonction méromorphe sur Ω est une fonction analytique sur
Ω sauf au plus sur un ensemble discrêt constitué uniquement de pôles.
Remarquons maintenant que si g et h sont deux fonctions holomorphes sur
un ouvert Ω du plan complexe et supposons que h n’est pas identiquement nulle
dans une composante connexe de Ω. Alors le quotient g/h est clairement une
fonction méromorphe sur Ω. En utilisant le théorème 6.2.9, on peut donner une
réciproque à cette assertion.
Preuve : Soit f une fonction méromorphe sur Ω et soit A l’ensemble des pôles
de f . Pour chaque α ∈ A, notons m(α) l’ordre de multiplicité du pôle. Grâce
au théorème 6.2.9, il existe une fonction h holomorphe sur Ω telle que h possède
un zéro de multiplicité m(α) en chaque point α ∈ A et telle que h ne possède
aucun autre zéro. Posons alors g = f h. La fonction g est clairement holomorphe
sur Ω \ A et les singularités de g aux points de A sont éliminables et on peut
donc étendre g en une fonction holomorphe sur Ω, ce qui achève la preuve du
corollaire.
Dans ce cas, la distribution des zéros doit satisfaire certaines conditions quan-
titatives. Beaucoup de ces résultats reposent sur la formule de Jensen que nous
allons donner dans cette section.
Nous commençons par un lemme qui va être utile dans la preuve de la formule
de Jensen.
Lemme 6.3.1 On a Z 2π
1
log |1 − eiθ | dθ = 0.
2π 0
h(0) = Log(1) = 0.
et γ l’arc de cercle dont le centre est 1 et qui va de e−iδ à eiδ tout en restant dans
Ω. D’après la formule de Cauchy, on a
Z Z
1 h(z) 1 h(z)
h(0) = dz + dz,
2iπ Γ z 2iπ γ z
Or Z Z 2π−δ
1 h(z) 1
dz = h(eit ) dt,
2iπ Γ z 2π δ
184 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
d’où Z Z 2π−δ
1 h(z) 1
ℜ dz = log |1 − eit | dt.
2iπ Γ z 2π δ
Finalement, en utilisant (6.15), on obtient
Z 2π−δ Z
1 it 1 h(z)
log |1 − e | dt = −ℜ dz ,
2π δ 2iπ γ z
et donc
Z 2π−δ Z
1 it 1 |h(z)| 1 |h(z)|
log |1 − e | dt ≤ |dz| ≤ ℓ(γ) sup . (6.16)
2π δ 2π γ |z| 2π z∈supp(γ) |z|
|z| ≥ 1 − δ. (6.17)
Enfin
2
|h(z)|2 = (log |1 − z|)2 + arg]−π,π[ (1 − z) ≤ (log(2 sin(δ/2)))2 + π 2 . (6.18)
et donc
Z 2π
1
ℜ(h(0)) = ℜ(h(reiθ )) dθ. (6.20)
2π 0
Or |g(z)| = eℜ(h(z)) , pour tout z ∈ D, d’où log |g(z)| = ℜ(h(z)), ce qui donne avec
(6.20)
Z π
1
log |g(0)| = log |g(reiθ )| dθ. (6.21)
2π −π
En utilisant (6.19), on a
Ym YN
r r
|g(0)| = |f (0)| = |f (0)| , (6.22)
n=1
α n n=1
α n
r 2 − αn z
= 1,
r(αn − z)
Il s’ensuit que
Z π Z π N
X Z π
1 iθ 1 iθ 1
log |g(re )| dθ = log |f (re )| dθ − log |1−ei(θ−θn ) | dθ.
2π −π 2π −π n=m+1
2π −π
d’où
Z π Z π
1 iθ 1
log |g(re )| dθ = log |f (reiθ )| dθ. (6.23)
2π −π 2π −π
où (αn )n≥1 désigne la suite des zéros de f préalablement numérotée de sorte que
|α1 | ≤ |α2 | ≤ . . . .
6.4. UN THÉORÈME DE BOREL–CARATHÉODORY 187
Donc
n(r)
Y 2r
M(2r) ≥ |f (0)| ≥ |f (0)|2n(r) ,
n=1
|αn |
ce qui implique
n(r) log 2 + log |f (0)| ≤ log M(2r).
Alors
2r R+r
M(r) ≤ A(R) + |f (0)|. (6.24)
R−r R−r
2n+2 n!R
max |f (n) (z)| ≤ (A(R) + |f (0)|) .
|z|≤r (R − r)n+1
Preuve : (i) : Le résultat est trivial si f est constante. En effet, dans ce cas,
on a M(r) = |f (0)| et A(r) = ℜ(f (0)), d’où (6.24) est équivalent à
2r R+r
|f (0)| ≤ ℜ(f (0)) + |f (0)|,
R−r R−r
c’est-à-dire
2r 2r
0≤ ℜ(f (0)) + |f (0)|,
R−r R−r
188 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
f (z)
ϕ(z) = , |z| < R.
2M − f (z)
|u + iv|2 u2 + v 2
|ϕ(z)|2 = = .
|2M − u − iv|2 (2M − u)2 + v 2
r
sup |ϕ(z)| ≤ .
|z|≤r R
2M Rr 2Mr
sup |f (z)| ≤ r = .
|z|≤r 1− R R−r
Comme M est choisit arbitrairement plus grand que A(R), on en déduit que
2r
sup |f (z)| ≤ A(R),
|z|≤r R−r
On dit que f est une fonction entière d’ordre fini s’il existe a > 0 tel que
a
M(r) ≤ er , pour r > r0 (a) > 0. (6.27)
Dans ce cas, α = inf a est appelé l’ordre de f . Si (6.27) n’est satisfaite pour aucun
réel a > 0, alors on dit que l’ordre de f est +∞.
Lemme 6.5.2 Soit f une fonction entière d’ordre fini α. Alors, pour tout ε > 0,
il existe R > 0 tel que
α+ε
|f (z)| ≤ e|z| , |z| > R.
a′ α+ε
|f (z)| ≤ e|z| ≤ e|z| .
(i) la série
X 1
n
|αn |p+1
converge.
Preuve : (i) : Sans perte de généralité, on peut bien sûr supposer que f (0) = 1.
Le corollaire 6.3.4 implique alors que
Fixons ε > 0 tel que α + ε < p + 1. Comme f est d’ordre fini α, il existe R > 0
tel que
log M(2r) ≤ (2r)α+ε/2 ,
n(r) ≤ r α+ε .
(ii) : D’après le théorème 6.2.7, il existe une fonction entière Q telle que
+∞
Y
z
f (z) = exp(Q(z)) Ep .
n=1
αn
dp
q(z) = 0,
dz p
Notons que le produit est fini car f ne possède qu’un nombre fini de zéros à
l’intérieur du compact D(0, R). La fonction gR est une fonction entière et il existe
ε > 0 tel que gR ne s’annule pas sur D(0, R + ε). De plus, gR (0) = 1. Ainsi, on
peut trouver une détermination holomorphe du logarithme telle que si hR (z) =
Log(gR (z)), alors hR est holomorphe sur D(0, R + ε) et hR (0) = 0. Montrons qu’il
existe une constante K > 0 telle que
z |z| 2R
1− ≥ −1= − 1 ≥ 1.
αn |αn | |αn |
194 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
D’où |gR (z)| ≤ |f (z)|. Or f étant une fonction entière d’ordre fini égal à α, pour
tout R suffisamment grand, on a
α+ε α+ε
|f (z)| ≤ e|z| = e(2R) ,
α+ε
|gR (z)| ≤ e(2R) , (|z| = 2R). (6.31)
Comme gR est une fonction entière, le principe du maximum implique que l’inégalité
(6.31) est valable pour tout |z| ≤ 2R et en particulier pour tout |z| ≤ R. D’où
(p+1)
|hR (z)| ≤ CRα+ε−(p+1) . (6.32)
D’autre part,
gR′ (z) f ′ (z) X 1
h′R (z) = = − ,
gR (z) f (z) z − αn
|αn |≤R
et donc
(p+1) dp f ′ (z) X 1
hR (z) = p + (−1)p+1 p! .
dz f (z) (z − αn )p+1
|αn |≤R
(p+1)
X 1
Q(p+1) (z) = hR (z) + (−1)p+1 p! . (6.33)
(z − αn )p+1
|αn |>R
X 1 X 2p+1
≤ .
(z − αn )p+1 |αn |p+1
|αn |>R |αn |>R
6.5. FONCTIONS ENTIÈRES D’ORDRE FINI ET THÉORÈME D’HADAMARD195
pour tout |z| = R/2. Choisissons alors ε > 0 suffisamment petit pour que α + ε −
(p + 1) < 0. On a alors
lim Rα+ε−(p+1) = 0,
R→+∞
P
et comme la série n 1/|αn |p+1 converge, on a aussi
X 1
lim = 0.
R→+∞ |αn |p+1
|αn |>R
′
Ainsi, pour tout ε > 0, il existe R0 tel que
|Q(p+1) (z)| ≤ ε′ ,
pour tout |z| = R/2 et R ≥ R0 . Comme Q est une fonction entière, ceci est
valable (par le principe du maximum) pour tout |z| ≤ R/2. Ceci implique que
Q(p+1) (z) = 0 pour tout z, et donc Q est un polynôme de degré au plus p.
pour tout |z| > R. Ceci prouve que g est une fonction entière d’ordre fini β ≤ α.
On peut en fait prouver que β = α. En effet, notons M ′ (r) = max{|g(z) : |z| =
r|}. Pour tout ε > 0, il existe R′ > 0 tel que si |z| > R′ , alors
log |f (z)| = log |z m g(z)| = m log |z| + log |g(z)| ≤ m log |z| + |z|β+ε < |z|β+2ε .
Pour un domaine Ω non borné, ceci n’est plus vrai. Par exemple, considérons
où g est une fonction réelle qui tend “assez lentement” vers +∞ quand |z| tend
vers +∞ dans Ω, alors f est en fait bornée dans Ω. L. Phragmen et E. Lindelöf
ont développé une méthode qui permet de démontrer de tels résultats.
Dans ce cours, nous allons donner deux situations concrêtes où la méthode de
Phragmen–Lindelöf s’applique. Dans le premier cas, nous supposerons f bornée
sur Ω et le théorème améliorera la borne ; dans le deuxième cas, nous imposerons
à f une hypothèse de croissance assez faible mais qui excluera malgré tout le cas
de la fonction f (z) = exp(exp(z)) (qui a donné précédemment le contre-exemple
au principe du maximum sur un domaine non borné).
6.6. LE PRINCIPE DE PHRAGMEN–LINDELÖF 197
Théorème 6.6.1 (Théorème des trois droites d’Hadamard) Soient deux réels
a, b tels que a < b et soit Ω la bande définie par
On suppose que f est une fonction holomorphe sur Ω, continue et bornée sur Ω.
Notons
M(x) = sup{|f (x + iy)| : −∞ < y < +∞},
Comme la fonction x 7−→ exp(εx2 + λx) est continue sur le compact [a, b] ⊂ R et
que f est bornée sur Ω, il existe une constante K = K(ε, λ) telle que
|fε (a + iy)| ≤ M(a) exp(εa2 + λa) exp(−εy 2) ≤ M(a) exp(εa2 + λa), (6.37)
et
|fε (b + iy)| ≤ M(b) exp(εb2 + λb) exp(−εy 2 ) ≤ M(b) exp(εb2 + λb). (6.38)
198 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
où
M = max M(a) exp(εa2 + λa), M(b) exp(εb2 + λb) .
|fε (z)| ≤ M,
|fε (z)| ≤ M,
D’où
M(x) ≤ max (M(a) exp(−λ(x − a), M(b) exp(−λ(x − b)) .
ce qui arrive si
M(a)
= exp(λ(b − a)),
M(b)
soit
1 M(a)
λ= log .
b−a M(b)
6.6. LE PRINCIPE DE PHRAGMEN–LINDELÖF 199
Dans ce cas, on a
x−a M(a)
M(a) exp (−λ(x − a)) = M(a) exp log
b−a M(b)
x−a
M(b) b−a
= M(a)
M(a)
x−a b−x
= M(b) b−a M(a) b−a ,
et donc
x−a b−x
M(x) ≤ M(b) b−a M(a) b−a ,
Corollaire 6.6.3 Soit f une fonction holomorphe sur Ω = {z ∈ C : a < ℜ(z) <
b}, continue et bornée sur Ω. Alors la fonction t 7−→ log M(t) est une fonction
convexe sur [a, b].
(y − x) log M((1 − λ)x + λy) ≤ (1 − λ)(y − x) log M(x) + λ(y − x) log M(y),
et en simplifiant par y − x, on a
et
|f (z)| ≤ 1, z ∈ ∂Ω. (6.41)
Pour z = x + iy ∈ Ω, on a
et
Comme εδ > 0 et β > α, le membre de droite dans (6.43) tend vers 0 lorsque
x → ±∞. Ainsi il existe x0 > 0 tel que
|f (z)hε | ≤ 1,
|f (z)hε | ≤ 1,
pour tout z ∈ R. Finalement en utilisant une nouvelle fois (6.44), on obtient que
|f (z)hε | ≤ 1,
|f (z)| ≤ 1,
Remarque 6.6.5 Remarquons que la condition α < 1 dans le théorème 6.6.4 est
optimale. En effet, comme on l’a vu au début de la section, la fonction exp(exp(z))
fournit un contre-exemple au résultat avec α = 1.
Si 1 ≤ p < +∞, il est facile de voir que χA ∈ Lp (X) si et seulement si µ(A) <
+∞. Une fonction ϕ est dite étagée si on peut l’écrire comme une combinaison
linéaire finie de fonctions caractéristiques ; autrement dit, s’il existe des ensembles
mesurables disjoints A1 , A2 , . . . An et des nombres complexes a1 , a2 , . . . an non nuls
tels que
n
X
ϕ= ak χAk .
k=1
d’où
|ak |p µ(Ak ) ≤ kϕkpp < +∞,
et donc µ(Ak ) < +∞. On a donc montré que si ϕ est une fonction étagée et si
1 ≤ p < +∞, alors ϕ ∈ Lp (X) si et seulement si µ({x : ϕ(x) 6= 0}) < +∞.
On notera dans la suite Ep (X) l’ensemble des fonctions ϕ étagées telles que
µ({x : ϕ(x) 6= 0}) < +∞. Il est clair que Ep (X) est un sous-espace vectoriel de
Lp (X). Le résultat suivant rappelle une propriété fondamentale de ce sous-espace.
Lemme 6.7.1 Soit 1 ≤ p < +∞. Le sous-espace vectoriel Ep (X) est dense dans
Lp (X).
Premier cas : supposons d’abord f positive. Il existe alors une suite crois-
sante de fonctions étagées ϕn : X −→ R telles que
0 ≤ ϕn ≤ f
et (ϕn ) tend vers f simplement µ-presque partout. Il est clair que ϕn ∈ Lp (X),
autrement dit ϕn ∈ Ep (X). De plus, comme ϕn ≥ 0, on a
0 ≤ (f − ϕn )p ≤ f p .
ce qui prouve que f peut être approchée dans Lp (X) par une suite de fonctions
de Ep (X).
Deuxième cas : supposons maintenant que f soit réelle. Notons par f+ et
f− les fonctions définies par
|f | + f |f | − f
f+ = f− = .
2 2
Les deux fonctions f+ et f− sont positives et dans Lp (X). De plus, on a f =
f+ − f− . D’après le premier cas, il existe deux suites (ϕn )n et (ψn )n dans Ep (X)
telles que
kf+ − ϕn kp → 0 et kf+ − ψn kp → 0, n → +∞.
Alors f = f1 + f2 et de plus, on a
Z Z Z
kf1 kpp11 = p1
|f | dµ = p1
|f | dµ ≤ |f |p dµ ≤ kf kpp .
X |f |>1 |f |>1
p/p1
D’où f1 ∈ Lp1 (X) et kf1 kp1 ≤ kf kp . Si p2 = +∞, alors il est clair que |f2 | ≤ 1
presque partout et donc f2 ∈ L∞ (X). Si p2 < +∞, alors on a
Z Z Z
kf2 kpp22 = p2
|f2 | dµ = p2
|f | dµ ≤ |f |p dµ ≤ kf kpp ,
X |f |≤1 |f |≤1
p/p2
d’où f2 ∈ Lp2 et kf2 kp2 ≤ kf kp .
Dans le lemme 6.7.2, nous avons montré que si p est compris entre deux réels
p0 et p1 alors Lp est contenu dans la somme Lp0 + Lp1 . Le résultat suivant donne
un résultat ”un peu inverse”.
et on a
kf kp ≤ kf kθp0 kf k1−θ
p1 , ∀f ∈ Lp0 (X) ∩ Lp1 (X). (6.45)
6.7. LE THÉORÈME DE RIESZ–THORIN ET APPLICATIONS 205
D’où
kf kp ≤ kf kθ∞ kf kpp11/p = kf kθp0 kf k1−θ
p1 ,
ce qui prouve (6.45) dans le cas où p0 = +∞. Si p1 = +∞, on raisonne de même.
Supposons donc maintenant que 1 ≤ p0 , p1 < +∞ et posons alors α = p0 /(θp) et
β = p1 /((1 − θ)p). On vérifie que 1/α + 1/β = 1 et en appliquant l’inégalité de
Hölder, on obtient
Z θp/p0 Z (1−θ)p/p1
p p0 p1
kf kp ≤ |f | |f | = kf kθp (1−θ)p
p0 kf kp1 ,
X X
Preuve : Si 1 ≤ p < +∞, cela découle du Lemme 6.7.1 car alors Ep (X)
est contenu dans Lp0 (X) ∩ Lp1 (X) et dense dans Lp (X). Si p = +∞, alors
nécessairement p0 = p1 = +∞ et Lp0 (X) ∩ Lp1 (X) = L∞ (X) = Lp (X).
Pour finir avec ces préliminaires concernant les espaces Lp , rappelons la notion
de convergence en mesure. Soit (fn )n une suite de fonctions mesurables sur un
206 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
espace mesuré (X, M, µ). On dit que la suite (fn )n converge en mesure vers f si
pour tout ε > 0, on a
Lemme 6.7.5 Soit (X, M, µ) un espace mesuré et (fn )n une suite de fonctions
mesurables.
Preuve :
(a) : soit ε > 0 et notons
On a
Z Z
kfn − f kpp = p
|fn (x) − f (x)| dµ(x) ≥ |fn (x) − f (x)|p dµ(x) ≥ εp µ(An ).
X An
d’où
{x ∈ X : |f (x)−g(x)| > ε} ⊂ {x ∈ X : |f (x)−fn (x)| > ε/2}∪{x ∈ X : |fn (x)−g(x)| > ε/2},
et donc
µ ({x ∈ X : |f (x) − g(x)| > ε}) ≤ µ ({x ∈ X : |f (x) − fn (x)| > ε/2}) +
{x : |fn (x)+gn (x)−(f (x)+g(x))| > ε} ⊂ {x : |fn (x)−f (x)| > ε/2}∪{x : |gn (x)−g(x)| > ε/2}.
D’où
µ ({x ∈ X : |fn (x) + gn (x) − (f (x) + g(x))| > ε}) ≤ µ ({x ∈ X : |fn (x) − f (x)| > ε/2})
est borné, c’est-à-dire qu’il existe une constante C > 0 telle que
kΛf kq ≤ Ckf kp ,
pour toute fonction f ∈ Lp (X), alors on dit que l’opérateur Λ est de type (p, q)
et on note sa norme par
kΛf kq
kΛk(p,q) = sup .
f ∈Lp (X) kf kp
f 6=0
et
Λ : Lp1 (X) −→ Lq1 (Y )
Λ : Lp (X) −→ Lq (Y )
est une application linéaire de types (p0 , q0 ) et (p1 , q1 ). Soient t ∈ [0, 1] et définissons
1 1−t t 1 1−t t
= + et = + .
pt p0 p1 qt q0 q1
Alors Λ : Lpt (X) −→ Lqt (Y ) est une application linéaire de type (pt , qt ) et on a
Preuve : Fixons t ∈]0, 1[. Sans perte de généralité, on peut supposer que
p0 ≤ p1 . On considère trois cas.
Premier cas : pt , qt ∈]1, +∞[. Dans ce cas, on dispose de deux propriétés
′
importantes : tout d’abord, Lqt (Y ) est le dual de Lqt (Y ), où 1/qt + 1/qt′ = 1 ; de
′
plus, les fonctions étagées sont denses dans Lpt (X) et Lqt (Y ) (voir lemme 6.7.1).
6.7. LE THÉORÈME DE RIESZ–THORIN ET APPLICATIONS 209
Soit ϕ ∈ Ept (X). Puisque ϕ ∈ Lp0 (X)∩Lp1 (X), le lemme 6.7.3 permet d’écrire
que Λ(ϕ) ∈ Lq0 (Y ) ∩ Lp1 (Y ) ⊂ Lqt (Y ). De plus, par dualité, on a
Z
kΛϕkqt = sup (Λϕ)ψ dν .
′
ψ∈Lqt (Y ) Y
kψkq′ ≤1
t
′
En utilisant la densité de Eqt′ (Y ) dans Lqt (Y ), on obtient que
Z
kΛϕkqt = sup (Λϕ)ψ dν .
ψ∈Eq′ (Y ) Y
t
kψkq′ ≤1
t
R
Pour estimer l’intégrale Y
(Λϕ)ψ dν, nous allons appliquer le théorème des trois
droites d’Hadamard (théorème 6.6.1). Puisque ϕ et ψ sont des fonctions étagées
de Ept (X) et Eqt′ (Y ) respectivement, on peut écrire
X X
ϕ= rm eiθm χAm et ψ = ρn eiϑn χBn ,
m n
En particulier, on a
|ϕiy |p0 = |ϕ1+iy |p1 = |ϕ|pt , (6.46)
et
′ ′ ′
|ψiy |q0 = |ψ1+iy |q1 = |ψ|qt . (6.47)
Soit Z
F (z) = (Λϕz )ψz dν, (z ∈ C).
Y
210 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
Soit S la bande
S = {x + iy : 0 < x < 1, y ∈ R}.
Puisque
1−z
pt 1−z
+ pz qt′ q′
+ qz′ pt 1−x
+ px qt′ 1−x
q′
+ qx′
p0 0 1 p0 0 1
rm 1
ρn = rm 1
ρn ,
Par conséquent, en utilisant une nouvelle fois (6.46), (6.47) et le fait que kψkqt′ ≤
1, on obtient
|F (1 + iy)| ≤ kΛk(p1 ,q1 ) kϕkpptt /p1 . (6.49)
Par conséquent,
Z
(Λϕ)ψ dν ≤ kΛk1−t t
(p0 ,q0 ) kΛk(p1 ,q1 ) kϕkpt .
Y
En prenant le supremum sur tous les ψ tels que kψkqt′ ≤ 1, on obtient finalement
1−t
kΛϕkqt ≤ kΛk(p 0 ,q0 )
kΛkt(p1 ,q1) kϕkpt , (6.50)
pour toute fonction ϕ ∈ Ept (X). Il reste à montrer que (6.50) est valable pour
toute fonction de Lpt (X).
Soit f ∈ Lpt (X). Comme 1 < pt < +∞, il existe une suite ϕn ∈ Ept (X) telle
que
lim kϕn − f kpt = 0. (6.51)
n→+∞
Nous allons montrer que Λϕn converge en mesure vers Λf , ce qui suffira pour en
déduire que g = Λf et donc obtenir (6.51). Soit
εn = kf − ϕn kpt ,
et
Sn = {x ∈ X : |f (x) − ϕn (x)| > εn }.
Clairement sans perte de généralité, on peut supposer que εn > 0 (sinon f serait
une fonction de Ept (X) et on sait que (6.50) est satisfaite pour ces fonctions).
D’après l’inégalité de Chebyshev, on a
Z Z pt
f − ϕn
µ(Sn ) = dµ ≤ dµ
Sn Sn εn
kf − ϕn kpptt
≤ = 1.
εpnt
≤ kf − ϕn kpp0t . (6.53)
ce qui donne
k(f − ϕn )χX\Sn kp1 ≤ εn = kf − ϕn kpt . (6.54)
en mesure lorsque n → +∞. D’où Λ(f −ϕn ) = Λ((f −ϕn )χSn )+Λ((f −ϕn )χX\Sn )
tend aussi en mesure vers 0, lorsque n tend vers +∞. Ceci prouve que Λ(ϕn )
converge vers Λf en mesure, ce qui conclut la preuve du premier cas.
Deuxième cas : pt ∈]1, +∞[ et qt = 1 ou qt = +∞. Dans ce cas, on a
nécessairement q0 = q1 = qt . Soit x∗ un élément quelconque du dual de Lqt (Y ) et
définissons
F (z) = x∗ (Λϕz ) ,
où ϕ est une fonction de Ept (X) et ϕz est définie comme dans le premier cas. Par
conséquent, on a
et
|F (1 + iy)| ≤ kx∗ kkΛϕ1+iy kq1 ≤ kx∗ kkΛk(p1 ,q1) kϕkpptt /p1 .
On vérifie aussi facilement que F est bornée sur la bande S. Le théorème 6.6.1
implique alors que
kΛϕkqt ≤ kΛk1−t t
(p0 ,q0 ) kΛk(p1 ,q1 ) kϕkpt ,
pour toute fonction ϕ ∈ Ept (X). La suite se prouve exactement comme dans le
premier cas.
214 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
= kΛk1−t t
(p0 ,q0 ) kΛk(p1 ,q1 ) kf kp1 ,
kfˆkq ≤ kf kp .
On a donc facilement
Z 2π
dθ
|fˆ(n)| ≤ |f (eiθ )| = kf k1 .
0 2π
1 1
r= et s = .
1− θ
2
1 − 1r
Or quand θ parcourt l’intervalle (0, 1), r parcourt l’intervalle (1, 2). De plus, s est
l’exposant conjugué de r. Ceci implique donc que pour tout p ∈ [1, 2], l’opérateur
T est de type (p, q). De plus, le théorème de Riesz–Thorin dit aussi que
kT k(p,q) ≤ kT k1−θ θ
(1,∞) kT k(2,2) .
6.8 Exercices
Exercice 6.8.1 Le but de l’exercice est de montrer que, pour tout z ∈ C \ Z, on
a 2
+∞
X 1 π
= (6.55)
n=−∞
(z − n)2 sin(πz)
et
+∞
X
1 1
πcotan(πz) = + 2z 2 2
. (6.56)
z n=1
z − n
(a) Posons
+∞
X 1
f (z) = 2
.
n=−∞
(z − n)
(i) Montrer que la fonction f est holomorphe sur C\Z et est 1-périodique.
2
1 π
(ii) Montrer que les fonctions z 7−→ f (z) − 2 et z 7−→ se
z sin(πz)
prolonge par continuité en 0.
(b) Posons
+∞
X
1 1
g(z) = + 2z − πcotan(πz).
z n=1
z − n2
2
(ii) En écrivant
2z 1 1
= + ,
z2 −n 2 z−n z+n
montrer que g ′ ≡ 0.
(a) Posons
+∞
Y
z2
f (z) = πz 1− 2 .
n=1
n
(i) Montrons que f est holomorphe sur C.
f (z)
(iii) Soit u(z) = . Montrer que u est holomorphe sur C \ Z et que,
sin(πz)
pour tout z ∈ C \ Z, on a u′ (z) = 0.
Indication : on pourra calculer d’abord u′ (z)/u(z) et utiliser la ques-
tion (ii) et l’exercice 6.8.1.
(b) Soit (pn )n≥0 la suite des nombres premiers rangés par ordre croissant et
posons
+∞
Y
1
F (s) = 1− s .
n=0
pn
Montrer que F définit une fonction holomorphe sur Π1 qui ne s’annule pas.
218 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
(c) Pour N ∈ N, notons AN l’ensemble des entiers qui ne sont divisibles par
aucun des nombres premiers p0 , p1 , . . . , pN et posons
YN
1
FN (s) = 1− s .
n=0
pn
n
pn
est divergente.
Indication : on pourra utiliser l’exercice 6.8.3.
(a) Montrer que Γ est holomorphe sur le demi-plan H+ = {z ∈ C : ℜ(z) > 0}.
n!nz
Γ(z) = lim . (6.58)
n→+∞ z(z + 1) . . . (z + n)
6.8. EXERCICES 219
(i) Soit Z n
n
z−1 t
In (z) = t 1− dt.
0 n
Montrer que Γ(z) = limn→+∞ In (z).
(ii) Soit Z 1
Jn (z) = uz−1(1 − u)n du.
0
n
Montrer que Jn (z) = J (z
z n−1
+ 1), pour n ≥ 1, puis que
n!
Jn (z) = .
z(z + 1)(z + 2) . . . (z + n)
Exercice 6.8.7 (La formule des compléments) Montrer que, pour tout z ∈
C \ Z, on a
π
Γ(z)Γ(1 − z) = . (6.60)
sin(πz)
Indication : on pourra tout d’abord supposer que 0 < ℜ(z) < 1 et utiliser les
exercices 6.8.2 et 6.8.5.
Exercice 6.8.8 (Critères d’Abel) Soit (an )n≥1 une suite de fonctions définies
sur un même ensemble X, et soit (bn )n≥1 une suite de fonctions définies sur un
même ensemble Y .
P
(a) On suppose que les sommes partielles de la série an sont uniformément
bornées sur X, que bn (y) tend vers 0 uniformément sur Y , et que la série
P
(bn+1 − bn ) est uniformément absolument convergente sur Y . Montrer
P
alors que la série de fonctions an (x)bn (y) converge uniformément sur
X ×Y.
P
(b) On suppose que la série an converge uniformément sur X, que la suite
(bn ) est uniformément bornée, et qu’il existe une constante C telle que
+∞
X
|bn+1 (y) − bn (y)| ≤ C,
n=0
P
pour tout y ∈ Y . Montrer que la série de fonctions an (x)bn (y) converge
uniformément sur X × Y .
Notons
+∞
Y
|an | an − z
B(z) = .
n=1
an 1 − an z
(a) Montrer que B définit une fonction holomorphe sur D dont les zéros sont
exactement les points de la suite (an )n≥1 .
où log+ (t) = max(log t, 0). Soit f ∈ N et soit (an )n≥1 la suite des zéros de f
dans D, chaque zéro étant compté avec sa multiplicité. Le but de l’exercice est de
montrer que si f ≡ 0, alors
X
(1 − |an |) < +∞. (6.61)
n≥1
222 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
(a) Montrer qu’on peut supposer que f (0) 6= 0 et que la suite (an )n≥1 comporte
une infinité de termes.
Quitte à permuter les (an )n≥1 , on peut supposer que la suite (|an |)n≥1 est
croissante. Posons
(c) Montrer que n(r) est bien défini, que la fonction r 7−→ n(r) est croissante
et que
lim n(r) = +∞.
r→1
(ii) On a
+∞
X
(1 − |an |) < +∞.
n=1
On suppose que F (0) = 1 et que F ne s’annule pas sur C. Montrer qu’il existe
une constante α ∈ C telle que
σ(a) = {λ ∈ C : a − λe 6∈ Inv(A)},
Θ(ab) = Θ(a)Θ(b), a, b ∈ A.
224 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
(a) Montrer que pour tout a ∈ A, Θ(a) ∈ σ(a). En déduire que Θ est continue
avec kΘk ≤ 1.
(e) Conclure.
|f (z)| ≤ M, z ∈ ∂Ωα ,
et
β
f (z) = O e|z| , z ∈ Ωα , |z| → +∞,
|f (z)| ≤ M.
γ
Indication : soit β < γ < α et ε > 0. Considérer F (z) = f (z)e−εz .
6.8. EXERCICES 225
Alors f ≡ 0.
|F (z)| ≤ M, (6.63)
est convergente.
n ≥ n0 =⇒ |an | ≤ n−n(µ−ε) .
Notons
+∞
X
Σ1 = r n n−n(µ−ε) ,
n=n0 +1
n≤(2r)1/(µ−ε)
6.8. EXERCICES 227
et
+∞
X
Σ2 = r n n−n(µ−ε) .
n=n0 +1
n>(2r)1/(µ−ε)
(i) Montrer qu’il existe une sous-suite (nk )k≥1 telle que
nk
−(µ+ε)
|ank |r nk ≥ rnk .
(ii) Considérons rk = (2nk )µ+ε . Montrer qu’il existe une constante A > 0
telle que
1/(µ+ε)
M(rk ) = sup |f (z)| ≥ exp Ark .
|z|=rk
1
ρ≥ .
µ
Exercice 6.8.20 (f et f ′ ont même ordre.) Soit f une fonction entière. No-
tons
M(r) = max |f (z)| et M ′ (r) = max |f ′ (z)|.
|z|=r |z|=r
M(R)
M ′ (r) ≤ .
R−r
Alors les zéros de f ′ sont aussi tous réels et séparés entre eux par les zéros de f .
f ′ (z)
(b) En calculant ℑ f (z)
, montrer que f ′ ne peut s’annuler que sur l’axe réel.
(d) Conclure.
kf ∗ gkp ≤ kf kr kgks .
fˆ(n) = an , (n ∈ Z),
et
kf kq ≤ kfˆkp .
|ϕn (x)| ≤ M,
230 CHAPITRE 6. ANALYSE COMPLEXE
kfˆkq ≤ M (2−p)/p kf kp ,
kf kE ∗ = kgkG′ .
231
232ANNEXE A. QUELQUES GRANDS PRINCIPES D’ANALYSE FONCTIONNELLE
Théorème A.0.3 Soient E et F deux espaces de Banach. Soit (Ti )i∈I une fa-
mille (non nécessairement dénombrable) d’opérateurs linéaires et continues de E
dans F . On suppose que
Alors
sup kTi k < +∞.
i∈I
kTi xk ≤ ckxk, ∀x ∈ E, ∀i ∈ I.
Ce résultat admet une conséquence intéressante qui affirme qu’un ensemble d’un
espace de Banach qui est faiblement borné est en fait borné (en norme).
233
234 ANNEXE B. QUELQUES COMPLÉMENTS D’ANALYSE COMPLEXE
Définition B.1.1 (a) On appelle courbe (ou chemin) dans C toute application
continue γ : [a, b] −→ C, où [a, b] est un intervalle compact de R. L’image
d’une courbe γ sera notée γ ∗ , c’est un compact de C.
(d) Une courbe γ est dite simple si γ(s) = γ(t) implique que soit s = t soit
s = a et t = b.
(e) Etant donné une courbe γ : [a, b] −→ C, la courbe opposée, notée γ, est
définie sur le même intervalle par
Définition B.1.2 Soit γ : [a, b] −→ C une courbe fermée de classe C 1 par mor-
ceaux et soit z 6∈ γ ∗ . On appelle indice de γ par rapport à z le nombre défini
par Z Z b
1 1 1 γ ′ (t)
n(γ, z) = dζ = dt.
2iπ γ ζ −z 2iπ a γ(t) − z
Donnons quelques propriétés clés de l’indice. Pour une démonstration de ce
résultat, on pourra se reporter à [7].
Proposition B.1.3 Soit γ une courbe fermée de classe C 1 par morceaux. Alors
et pour z ∈ C \ γ ∗ , on pose
X
n(γ, z) = n(γj , z).
j=1
On dit que γ est positivement orientée si les conditions suivantes sont satisfaites :
(c) n(γ, z) = 0 ou 1, ∀z ∈ C \ γ ∗ .
236 ANNEXE B. QUELQUES COMPLÉMENTS D’ANALYSE COMPLEXE
K ⊂ Int(γ) et C \ Ω ⊂ Ext(γ).
(a) γ ∗ ⊂ Ω \ K.
3 1 1
γ1 (t) = e2iπt , γ2 (t) = e−2iπt , γ3 (t) = e2iπt .
2 4 4
Alors on vérifie facilement que les deux systèmes {γ1} et {γ1 , γ3} n’entourent pas
le compact K dans Ω. Par contre, le système {γ1 , γ2 } entoure le compact K dans
Ω.
Nous pouvons maintenant énoncer les deux résultats principaux que nous
allons chercher par la suite à généraliser dans le cadre vectoriel. Pour une preuve
de ces résultats classiques, on pourra se reporter à [4, 3, 7, 10].
telle que f est constante sur chacun des intervalles ]tj−1 , tj [. L’ensemble E(I, E)
de toutes les fonctions en escalier forme un sous-espace vectoriel de B(I, E).
Pour chaque fonction f en escalier (définie à partir de la partition P ci-
dessus), on appelle intégrale de f l’élément de E défini par
Z b n
X
f (t) dt := (tj − tj−1 )f (ζj ), (B.2)
a j=1
avec ζj ∈]tj1 , tj [.
est une application linéaire continue de (E(I, E), k · k∞ ) dans E. De plus, pour
toute fonction f ∈ E(I, E), on a
Z b Z b
f (t) dt ≤ kf (t)k dt ≤ (b − a)kf k∞ .
a a
B.2. FONCTIONS RÉGLÉES À VALEURS VECTORIELLES 239
Définition B.2.3 L’ensemble des fonctions réglées R(I, E) est définie comme
l’adhérence de E(I, E) dans l’espace de Banach (B(I, E), k · k∞ ). Autrement dit,
une fonction bornée f : I −→ E est dite réglée si et seulement si il existe une
suite (fn )n de fonctions en escalier qui converge uniformément vers f sur I.
Alors, pour toute fonction f ∈ R(I, E) et toute forme linéaire continue ϕ sur E,
on a
Rb Rb
(a) f (t) dt ≤ a kf (t)k dt ≤ (b − a)kf k∞ .
a
R R
b b
(b) ϕ a f (t) dt = a ϕ(f (t)) dt.
On en déduit que (Jfn )n est une suite de Cauchy dans E complet, donc elle
converge. Notons
Jf := lim Jfn .
n→+∞
Il est clair que J définit une application linéaire continue sur R(I, E). Le point
(a) vient immédiatement du lemme B.2.2.
Pour le point (b), remarquons que si f ∈ E(I, E), alors on a
Z b n
! n Z b
X X
ϕ f (t) dt = ϕ (tj − tj−1 )f (ζj ) = (tj −tj−1 )ϕ(f (ζj )) = ϕ(f (t)) dt.
a j=1 j=1 a
Preuve : Comme f est continue sur le compact I = [a, b], il suit du théorème
de Heine que f est uniformément continue. Autrement dit, pour tout ε > 0,
il existe δ > 0 tel que pour tous x, y ∈ [a, b] satisfaisant |x − y| ≤ δ, on a
kf (x) − f (y)k ≤ ε. Soit P : a = t0 < t1 < t2 < · · · < tn = b une partition tel que
max1≤j≤n (tj − tj−1 ) ≤ δ. Définissons
Remarque B.2.6 Les fonctions réglées peuvent se caractériser comme les fonc-
tions qui admettent une limite à droite et une limite à gauche en tout point de
[a, b] (voir [1]). Donc en particulier, les fonctions continues par morceaux sont
aussi réglées.
Nous terminons par une proposition utile dans le cadre des algèbres de Banach.
et
Z Z
f (z) dz x = f (z)x dz. (B.5)
γ γ
et de résultats que ce qui est réellement utilisé dans ce cours. Notamment, dans
une première lecture, on pourra porter son attention uniquement sur les théorèmes
B.3.5, B.3.7 et B.3.9.
Comme nous allons le voir, beaucoup de résultats de la théorie des fonctions
holomorphes à valeurs scalaires s’étend (sans aucun changement ou presque) au
cas vectoriel. L’idée étant la plupart du temps de scalariser le problème (en ap-
pliquant une forme linéaire continue), d’utiliser les résultats du cas scalaire et de
revenir au cas vectoriel avec le corollaire du théorème de Hahn-Banach (corol-
laire A.0.2). Même si cette idée est assez simple, nous allons prendre le temps de
donner les détails....
f (z) − f (z0 )
f ′ (z0 ) := lim ,
z→z0 z − z0
Preuve : Soit a ∈ Ω. Comme Ω est ouvert, il existe r > 0 tel que B(a, r) ⊂ Ω.
B.3. FONCTIONS HOLOMORPHES À VALEURS VECTORIELLES 243
est une fonction continue du compact B(a, r), à valeurs dans C. Donc l’image
g(B(a, r)) est un compact de C. Clairement u(M) ⊂ g(B(a, r)) et donc u(M) est
bornée. Comme cela est vrai pour tout u ∈ E ∗ , cela signifie que M est faiblement
borné. D’après le corollaire A.0.4, cela implique que M est borné. Autrement dit,
il existe une constante K = K(a, r, f ) > 0 telle que pour tout z, 0 < |z − a| ≤ r,
on ait
f (z) − f (a)
≤ K,
z−a
d’où
où γ est un système de courbes fermées dans Ω, de classe C 1 par morceaux et qui
entoure {a}.
244 ANNEXE B. QUELQUES COMPLÉMENTS D’ANALYSE COMPLEXE
Considérons maintenant 0 < δ < r/2 et choisissons b ∈ Ω tel que 0 < |b − a| < δ.
Alors il est clair que γr est une courbe fermée dans Ω, de classe C 1 et qui entoure
à la fois {a} et {b}. Le théorème B.3.3 permet alors d’écrire
Z
f (b) − f (a) 1 1 f (z) f (z)
= − dz
b−a b − a 2iπ γr z − b z − a
Z
1 f (z)
= dz.
2iπ γr (z − a)(z − b)
B.3. FONCTIONS HOLOMORPHES À VALEURS VECTORIELLES 245
D’où :
Z Z
f (b) − f (a) 1 f (z) 1 f (z)
− 2
dz = (b − a) 2
dz
b−a 2iπ γr (z − a) 2π γr (z − a) (z − b)
Z
|b − a| kf (z)k
≤ 2
|dz|.
2π γr |z − a| |z − b|
f (b) − f (a)
lim
b→a b−a
existe et est finie. Ceci signifie donc que f est dérivable en tout point a de Ω et
donc f est homomorphe sur Ω. De plus, d’après (B.6), on a
Z
′ 1 f (z)
f (a) = dz.
2iπ γr (z − a)2
Preuve : Pour montrer que f est indéfiniment dérivable, nous allons raisonner
par récurrence. Tout d’abord, d’après le lemme B.3.2, nous savons déjà que f
est continue sur Ω. Supposons maintenant que f est n-fois dérivable sur Ω. Pour
tout élément u ∈ E ∗ , la fonction (complexe) u ◦ f est holomorphe sur Ω donc
(n + 1)-fois dérivable sur Ω. Mais comme u est linéaire, on a (u ◦ f )(n) = u ◦ f (n) .
Ceci implique que la fonction u ◦ f (n) : Ω −→ C est dérivable. Autrement dit,
la fonction f (n) est faiblement holomorphe sur Ω, donc holomorphe sur Ω (i.e.
dérivable sur Ω), d’après le théorème B.3.4. Ainsi f est (n + 1)-fois dérivable sur
Ω. Par récurrence, on en déduit que f est indéfiniment dérivable sur Ω.
Pour montrer la formule (B.7), considérons u ∈ E ∗ . Comme la fonction u ◦ f
est holomorphe sur Ω on peut appliquer les formules de Cauchy scalaire (propo-
sition B.1.9) qui donnent alors
Z
(n) n! u(f (z))
(u ◦ f ) (a) = dz,
2iπ γ (z − a)n+1
B.3. FONCTIONS HOLOMORPHES À VALEURS VECTORIELLES 247
pour tout n ∈ N, où γ est un système de courbes fermées, de classe C 1 par mor-
ceaux et qui entoure le compact {a} dans Ω. On applique alors le théorème B.2.8
qui entraine que
Z
(n) n! f (z)
(u ◦ f ) (a) = u dz .
2iπ γ (z − a)n+1
Par linéarité de u, on a (u ◦ f )(n) (a) = u(f (n) )(a) et donc
Z
(n) n! f (z)
u(f )(a) = u dz .
2iπ γ (z − a)n+1
Comme l’égalité est vraie pour tout élément u ∈ E ∗ , le corollaire du théorème de
Hahn-Banach (corollaire A.0.2) permet alors de conclure que
Z
(n) n! f (z)
f (a) = dz.
2iπ γ (z − a)n+1
Les autres propriétés découlent immédiatement des propriétés classiques sur les
séries entières.
Pour plus de détails sur les séries entières à valeurs vectorielles, on pourra
consulter [9] mais la théorie est la même que pour les séries entières à valeurs
scalaires.
n!kf k∞
kf (n) (z0 )k ≤ ,
rn
B.3. FONCTIONS HOLOMORPHES À VALEURS VECTORIELLES 249
et donc, en faisant tendre r vers +∞, on obtient que f (n) (z0 ) = 0, pour tout
n ≥ 1. Le théorème B.3.7 permet alors de conclure que pour tout z ∈ C, on a
f (z) = f (z0 ).
Il est clair que g est holomorphe sur Ω et continue sur B(a, r). Maintenant si
u ∈ E ∗ , alors la fonction scalaire u ◦ g a les mêmes propriétés, elle est holomorphe
sur Ω et continue sur D(a, r). Il est alors bien connu (c’est une conséquence très
simple du théorème de Morera, voir [4] par exemple) que u ◦ g est holomorphe
sur D(a, r). Ainsi g est faiblement holomorphe sur D(a, r) donc holomorphe. On
peut alors appliquer le théorème B.3.7 qui dit que pour z ∈ D(a, r), on a
∞
X g (n) (a)
g(z) = (z − a)n ,
n=0
n!
où la série converge normalement sur tout compact de D(a, r). Comme g(a) = 0,
on peut alors écrire g(z) = (z − a)fe(z), avec
∞
X g (n+1) (a)
fe(z) = (z − a)n .
n=0
(n + 1)!
La théorie des séries entières nous dit alors que fe est holomorphe dans D(a, r)
et de plus, on a bien f (z) = fe(z), pour z ∈ Ω. L’unicité est immédiate (par
continuité).
250
[4] Carlos Berenstein et Roger Gay. Complex variables, volume 125 of Graduate
Texts in Mathematics. Springer-Verlag, New York, 1991. An introduction.
[7] Walter Rudin. Analyse réelle et complexe. Masson, Paris, 1980. Transla-
ted from the first English edition by N. Dhombres and F. Hoffman, Third
printing.
[8] Walter Rudin. Functional analysis. International Series in Pure and Applied
Mathematics. McGraw-Hill Inc., New York, second edition, 1991.
251