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ISSN: 2658-8455

Volume 5, Issue 5 (2024), pp. 227-246.


© Authors: CC BY-NC-ND

Asymétrie d’information et Rationnement du crédit des PME :


Une exploration de la théorie à la pratique

Information Asymmetry and SME Credit Rationing: An


Exploration from Theory to Practice

Adil BOUTFSSI, (Docteur en sciences de gestion)


Faculté Des Sciences Juridiques Économiques et Sociales Ain Chock
Université Hassan II de Casablanca, Maroc

Faculté Des Sciences Juridiques Économiques Et Sociales Ain Chock


Km 9, Route El jadida, BP 8110 Oasis, Casablanca
Adresse de correspondance :
Université Hassan II Casablanca-Maroc BP 9167
212 06 14 00 04 00 / 212 06 14 00 04 07
Les auteurs n'ont pas connaissance de quelconque financement qui
Déclaration de divulgation : pourrait affecter l'objectivité de cette étude et ils sont responsables de tout
plagiat dans cet article.
Conflit d’intérêts : Les auteurs ne signalent aucun conflit d'intérêts.

BOUTFSSI, A. (2024). Asymétrie d’information et Rationnement du


crédit des PME : Une exploration de la théorie à la pratique. International
Citer cet article
Journal of Accounting, Finance, Auditing, Management and
Economics, 5(5), 227-246. https://doi.org/10.5281/zenodo.11212366

Cet article est publié en open Access sous licence


Licence
CC BY-NC-ND

Received: April 10, 2024 Accepted: May 15, 2024

International Journal of Accounting, Finance, Auditing, Management and Economics - IJAFAME


ISSN: 2658-8455
Volume 5, Issue 5 (2024)

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Adil BOUTFSSI. Asymétrie d’information et Rationnement du crédit des PME : Une exploration de la théorie à
la pratique

Asymétrie d’information et Rationnement du crédit des PME : Une


exploration de la théorie à la pratique

Résumé
Lorsqu'une institution bancaire est sollicitée pour un financement, elle se retrouve souvent dans l'incapacité
d'évaluer réellement la qualité du demandeur de crédit. Elle est confrontée à un problème de sélection adverse en
amont et d'aléa moral en aval. Même si elle met en place une procédure d'évaluation visant à réduire l'asymétrie
d'information, elle dispose structurellement d'une information moins complète sur la véritable qualité de
l'entreprise, notamment en ce qui concerne son niveau de risque, ce qui peut conduire en conséquence à
l’émergence du phénomène de rationnement du crédit.
Cet article scientifique présente un état de l’art sur le rationnement de crédit utilisé par les banques à l’encontre
des PME. En effet, nous nous sommes penchées sur la question du rationnement de crédit des PME en cherchant
sur le plan théorique et empirique à identifier les éléments prépondérants qui contrarient la production de crédit à
destination de ces entités. Il en ressort de notre revue de littérature que présence d’asymétrie d’information dans
le marché de crédit, le rationnement du crédit s’explique sur le plan théorique et empirique autant par des facteurs
micro-économiques que macro-économiques.

Mots clés : PME, Rationnement du crédit, Asymétries d’information, Financement bancaire.


JEL Classification : G2
Type du papier : Recherche Théorique

Abstract
When a banking institution is approached for financing, it often finds itself unable to truly assess the quality of the
credit applicant. It faces a problem of adverse selection upstream and moral hazard downstream. Even if it sets up
an evaluation procedure aimed at reducing information asymmetry, it structurally has less complete information
on the true quality of the company, particularly with regard to its level of risk, which can consequently lead to the
emergence of the phenomenon of credit rationing.
This scientific article presents a state of the art on credit rationing used by banks against SMEs. Indeed, we looked
into the issue of credit rationing for SMEs by seeking on a theoretical and empirical level to identify the key
elements that hinder the production of credit for these entities. It emerges from our literature review that the
presence of information asymmetry in the credit market and credit rationing can be explained theoretically and
empirically as much by micro-economic as macro-economic factors.

Keywords: SMEs, Credit rationing, Information asymmetries, Bank financing.


Classification JEL: G2
Paper Type: Theoretical Research

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ISSN: 2658-8455
Volume 5, Issue 5 (2024), pp. 227-246.
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1. Introduction
Les études pionnières menées par Arrow (1963) et Akerlof (1970), concernant l'analyse des
décisions économiques, ont engendré une nouvelle approche méthodologique pour
l'interprétation des pratiques économiques. En effet, l'observation de l'impact de la sélection
adverse et de l'aléa moral sur les rapports entre les agents économiques a soulevé plusieurs
interrogations quant au rôle de l'économie de l'information d'une part, et à la recherche de
moyens pour limiter les pertes engendrées par la présence d'asymétries d'information, d'autre
part.
Au niveau du marché du crédit, l'asymétrie d'information désigne la disparité du niveau
d'information dont disposent les personnes physiques ou morales à la recherche de financement
et celle dont disposent les bailleurs de fonds. On suppose habituellement que ces derniers sont
désavantagés sur le plan de l'information par rapport au reste des agents initiés sollicitant un
financement.
Selon P. Roger (1988), l'asymétrie d'information est la situation où un partenaire dispose d'une
information supérieure à l'autre, avec l'existence de coûts d'obtention de l'information. Cette
situation entraîne généralement le phénomène du rationnement du crédit.
En effet, étant donné que le bailleur de fonds ne détient pas toute l'information sur l'objet du
financement, contrairement à l'emprunteur qui dispose d'une information complète sur ce
dernier ainsi que sur la probabilité de réussite de son projet (capacité réelle de production, nature
du marché, distribution des cash-flows, etc.), la sélection adverse devient éminente.
Dès lors, pour se couvrir du risque de défaut des emprunteurs malhonnêtes dissimulant des
informations sur leurs projets, l'institution bancaire appliquera des taux d'intérêt élevés.
Cependant, ces conditions risquent de faire fuir les « bons emprunteurs » qui éprouveront une
discrimination à leur égard.
L'augmentation du taux d'intérêt, par exemple, peut constituer une technique de protection
contre les emprunteurs risqués. Toutefois, il existe un seuil au-dessus duquel la hausse du risque
est plus importante que l'accroissement du taux d'intérêt, ce qui fait que les banques renoncent
à augmenter le taux d'intérêt. Cette réaction initie un rationnement du crédit, comme l'ont
souligné Stiglitz et Weiss (1981). Dans ce sens, Stiglitz et Weiss suggèrent qu'elles existent
deux conséquences directes de l'asymétrie d'information, qui sont l'anti-sélection et le risque
moral.
Dans une relation prêteur/emprunteur, l'aléa moral ou le hasard moral est la situation où
l'incomplétude au niveau de l'information (généralement survenue après la signature du contrat
de crédit) aboutira à l'observation d’un comportement douteux de la part de l'emprunteur
impliquant le non-respect des clauses du contrat. C'est donc une forme d'opportunisme post-
contractuel qui survient lorsque les actions mises en œuvre ne peuvent être discernées. Ainsi,
les individus sont susceptibles de poursuivre leurs intérêts personnels aux dépens d'autrui,
comme l'ont souligné Milgrom et Roberts (1997). La notion du risque moral conduit à mettre
l'accent sur les comportements stratégiques résultant de l’inobservation de certaines actions et
se traduisant par le non-respect des engagements, comme l'a proposé Arrow (1963).
Du point de vue PME, l'information stratégique et comptable est généralement rudimentaire, ce
qui provoque une certaine opacité. De ce fait, les banquiers seront confrontés à une évaluation
difficile du risque économique et financier de cette catégorie d'entreprises, ce qui peut rendre
difficile l'obtention du financement ou même de subir le rationnement du crédit.

2. Asymétries d'information et rationnement du crédit


Lorsqu'une institution bancaire est sollicitée pour un financement, elle se retrouve souvent dans
l'incapacité d'évaluer réellement la qualité du demandeur de crédit. Elle est confrontée à un

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la pratique

problème de sélection adverse en amont et d'aléa moral en aval. Même si elle met en place une
procédure d'évaluation visant à réduire l'asymétrie d'information, elle dispose structurellement
d'une information moins complète que les non-initiés sur la véritable qualité de l'entreprise,
notamment en ce qui concerne son niveau de risque.
De manière générale, on peut considérer qu'il subsiste toujours une asymétrie d'information
résiduelle sur le marché du crédit. Étant donné que tout transfert d'information engendre des
coûts, il en découle que l'activité de réduction des asymétries informationnelles diminue
naturellement lorsque le bénéfice marginal pour la banque est égal au coût marginal de cette
activité de production d'information.
Plusieurs chercheurs ont soulevé dans leurs travaux la question du traitement de la politique de
financement des PME, que ce soit du point de vue du prêteur ou de l'emprunteur. De plus, la
théorie démontre l'existence d'un lien de causalité entre le rationnement du crédit et l'asymétrie
d'information Stiglitz et Weiss (1981) ; Roger (1988) ; Binks et Ennew (1997).
En ce qui concerne le rationnement du crédit, sur le marché du crédit, l'asymétrie d'information
désigne la disparité d'information entre le prêteur et l'emprunteur. D'une part, l'emprunteur,
méfiant, refuse de partager les informations pertinentes concernant sa personne, son entreprise
ou son projet de financement. D'autre part, le prêteur, rationnel, ne souhaite pas engager de
coûts supplémentaires pour obtenir les informations jugées pertinentes Roger (1988). Dans ce
contexte, lorsque les informations fournies sont jugées de mauvaise qualité ou non pertinentes
par le centre décisionnel de la banque, celle-ci peut procéder au rationnement du crédit de
différentes manières.
Convaincus de l'existence d'une information incomplète entre le prêteur et l'emprunteur Stiglitz
et Weiss (1981), démontrent que plus l'asymétrie d'information est importante, plus la
probabilité de rationnement du crédit devient éminente. De leur côté, Jensen et Meckling
(1976), supposent que la négligence de l'asymétrie d'information peut entraîner, ex post, une
allocation non convenue des fonds par le biais d'une substitution d'actifs.
Les créanciers se trouvent en position vulnérable lorsqu’ils sont moins informés sur les projets
à financer. En effet, les dirigeants d'une entreprise, ne partageant pas les mêmes intérêts que les
créanciers, possèdent une information plus précise sur la qualité de leurs projets (Jensen et
Meckling, 1976). Dans de telles circonstances, la décision de rationner le crédit peut s'avérer
utile et rationnelle. Les dirigeants d'une entreprise, lorsqu'ils identifient des idées de projets
prometteurs, hésitent à partager l'information pertinente avec la banque Peternson et Schulman,
(1987).
Ainsi, le dirigeant d'une PME peut dissimuler une information jugée pertinente par la banque
afin d'obtenir un crédit ou de bénéficier de conditions de crédit plus favorables Lobez, Vilanova
(2006). Cela peut entraîner une sélection adverse en amont. Une fois le crédit obtenu, le
dirigeant cherchera à maximiser le profit, même si cela entraîne le non-respect du compromis
déjà mis en place.
Van der Wijst (1989), démontre que l'accès au crédit des PME est directement lié aux coûts
associés à l'asymétrie d'information Binks et Ennew (1996), montrent, quant à eux, que
l'asymétrie d'information est une caractéristique des petits emprunteurs. Ainsi, le coût élevé lié
à la production d'informations expliquerait pourquoi l'asymétrie d'information est plus
fréquente chez les petites entreprises, qui subissent davantage de rationnement de crédit que
leurs homologues de taille moyenne et grande St-Pierre et Bahri (2011).
Selon Binks et al. (1992) et Bruns et Fletcher (2008), le principal problème rencontré par les
PME lorsqu'elles tentent d'obtenir un financement est l'absence d'informations symétriques sur
le projet à financer.
Williamson (1987) a révélé un lien de causalité entre le rationnement du crédit et les coûts
d'agence excessifs liés à la surveillance des résultats de l'emprunteur. Autrement dit, le
rationnement est le résultat d'une réflexion en termes de coûts, et il sera envisageable si la

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banque estime que les coûts engagés pour le contrôle de la PME dépassent les profits à réaliser.
Stiglitz (1986) et Tirole (2006), démontrent que les coûts d'agence augmentent dans un contexte
d'aléa moral et d'asymétrie d'information, ce qui explique pourquoi la banque rationne le crédit.
2.1.Implications de l’asymétrie d’information antérieure sur le rationnement du
crédit
George Akerlof, en 1970, a été le premier théoricien ayant souligné l'impact de l'asymétrie
d'information dans les transactions financières, en affirmant que les acteurs ne disposent pas de
la même information sur le marché. Pour expliquer son raisonnement, Akerlof donne l'exemple
du marché des voitures d'occasion dans son article intitulé "The Market for Lemons".
Akerlof part de l'idée générale selon laquelle le vendeur d'une voiture d'occasion connaît mieux
les caractéristiques de sa voiture que l'acheteur potentiel. Initialement, les acheteurs sont
conscients que le marché comprend des voitures de mauvaise qualité. Ils cherchent donc à payer
un prix plus bas pour les voitures. Cependant, à ce prix, les propriétaires de voitures de bonne
qualité refusent de vendre et se retirent définitivement du marché. Par conséquent, seules les
voitures de mauvaise qualité ("lemons" en anglais) restent sur le marché.
En effet, un acheteur qui ne dispose pas de toutes les informations sur la qualité des voitures
proposées fixe un prix d'achat moyen en se basant sur le prix du marché. À ce prix, seuls les
vendeurs de voitures de qualité inférieure restent sur le marché, ce qui crée un phénomène de
sélection adverse.
Pour contrer cette interprétation faussée de la part de l'acheteur, le vendeur honnête doit fournir
un effort supplémentaire de signalisation sur le marché afin de justifier l'état de sa voiture. Selon
Michael Spence en 1973, la technique de signalisation constitue une protection contre les
interprétations négatives sur les marchés caractérisés par une asymétrie d'information.
En théorie, nous avons vu que l'asymétrie d'information conduit à une sélection adverse, qui est
la conséquence d'un déséquilibre informationnel. En effet, le marché est constamment perturbé
et affecté par le fait qu'une partie possède une meilleure connaissance des caractéristiques du
bien échangé au moment de la signature du contrat (ex-ante). Dans ce cas, le prix ne joue plus
son rôle d'information crédible de la valeur.
Dans un marché du crédit, les asymétries d'information se réfèrent à la disparité entre
l'information détenue par la firme en recherche de crédit et celle des fournisseurs de fonds, qui
sont souvent désavantagés en termes d'information. Au sujet des PME, Psillaki (1995), affirme
que l’existence d’un caractère défiant de ces entreprises peut engendrer une certaine sélection
adverse en cas de demande d’un crédit conduisant ainsi à un rationnement du crédit. Dans une
telle situation, une préférence pour l’autofinancement au détriment du financement externe peut
être adoptée.
2.2.Implications de l’asymétrie d’information postérieure sur le rationnement du
crédit
La question du rationnement du crédit, en plus de préoccuper les entreprises, a suscité depuis
longtemps l'intérêt des chercheurs dans le domaine économique et financier. Bien que la
caractérisation d'une situation de rationnement semble consensuelle (demande de crédit
durablement supérieure à l'offre au taux prévalant sur le marché), l'analyse de l'origine de ce
phénomène est restée superficielle pendant longtemps.
Le concept étant défini de manière précise, une véritable explication de l'origine d'une situation
d'équilibre de rationnement du crédit n'a été apportée qu'en début des années 1980 par Stiglitz
et Weiss (1981). Nos deux théoriciens considèrent l'interaction suivante entre une banque et des
entreprises neutres vis-à-vis du risque :
En t=0, une banque est confrontée à des candidats emprunteurs, chacun ayant besoin
d'emprunter un montant B pour financer un investissement. La banque accepte ou refuse

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d'accorder le crédit sans avoir la possibilité d'observer le risque du candidat. Si le financement


est validé, la banque fixe un taux ř et un montant de garanties C.
En t=1, les revenus de chaque projet financé sont réalisés. En notant R le revenu réalisé, deux
états sont possibles : si R+C ≥ B(1+ř), la banque est remboursée intégralement. En revanche, si
R+C ≤ B(1+ř), l'emprunteur se trouve en situation de défaut de paiement et la banque capte
l'intégralité des revenus générés.
L'un des points clés de l'analyse de Stiglitz et Weiss (1981), repose également sur l'incapacité
des banques à observer le risque des candidats á l’emprunt. Par conséquent, en cas d'accord de
crédit, la banque applique le même taux ř à tous les emprunteurs.
Toutefois, l’application d'un taux unique, dans la terminologie de la théorie des contrats, n'est
pas sans conséquence sur la qualité des candidats à l'emprunt.
La logique de Stiglitz et Weiss repose sur le fait que l'espérance de profit des emprunteurs est
une fonction croissante du risque de leur projet.
La règle de responsabilité limitée des actionnaires implique que le profit d'une entreprise est
une fonction convexe du résultat de son projet. En effet, les actionnaires ont une perte limitée
à C en cas de défaut, tandis que leurs gains sont illimités en cas de succès.
Ainsi, les emprunteurs présentant les risques les plus élevés, qui ont une probabilité plus élevée
d'obtenir des revenus élevés, ont une espérance de profit plus élevée que les autres firmes. Sur
cette base, Stiglitz et Weiss établissent la proposition suivante : pour un taux d'intérêt (r) donné,
il existe un seuil de risque ô tel que seules les firmes présentant un risque plus élevé (o > ô)
solliciteront un emprunt.
Il est évident qu'une entreprise ne souhaitera emprunter que si son profit est supérieur à 0.
Sachant que le seuil de risque critique ô est défini par 𝝅𝑬 (𝒓,
̂ 𝜽∗ ) = 𝟎 et que l'espérance de profit
de l'emprunteur est une fonction croissante de son risque, seuls les emprunteurs présentant un
risque (o > ô) seront incités à solliciter un crédit.
Les conséquences de cette proposition sont importantes. Premièrement, on peut considérer
l'incitation de la banque à augmenter le taux d'intérêt (r), car une augmentation des taux d'intérêt
pratiqués entraîne une modification du profil des candidats à l'emprunt, la banque étant alors
confrontée à des emprunteurs en moyenne plus risqués.
L'impact d'une hausse des taux sur le profit bancaire et le rationnement est notable. En réaction
à l'aversion au risque, l'augmentation du taux d'intérêt débiteur fera fuir les bons emprunteurs
pour laisser place à des emprunteurs plus risqués. Ainsi, une hausse du taux génère deux effets
opposés sur le profit espéré de la banque :
- Un effet positif où la marge bancaire augmente et la qualité des candidats
emprunteurs reste inchangée
- Un effet négatif où la banque enregistre une dégradation de la qualité moyenne de
ses clients.
Ceci dit, selon Joseph Stiglitz (1981), le rationnement du crédit peut résulter de deux actions :
soit dû au fait qu'une partie détient plus d'information que l'autre, soit en raison des coûts jugés
trop élevés pour obtenir et traiter l'information, ce qui peut probablement conduire au
phénomène de rationnement du crédit.
Stiglitz (1981), suggère également qu'il y a deux conséquences directes de l'asymétrie
d'information : l'anti-sélection et le risque moral. En effet, le prêteur ne possède pas toutes les
informations sur l'objet du financement, tandis que l'emprunteur détient toutes les informations
sur l'objet du financement et la probabilité de réussite de son projet. Cette situation rappelle
l'exemple du marché des "lemons". Dans de telles circonstances, la sélection adverse devient
prédominante.
Afin de se protéger contre la probabilité de défaut des emprunteurs malhonnêtes considérés
comme de mauvais emprunteurs, les institutions bancaires proposent des taux d'intérêt élevés.
Cependant, ces conditions risquent de dissuader les bons emprunteurs et de les discriminer.

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L'augmentation du taux d'intérêt peut constituer une technique de protection contre les
emprunteurs risqués. Cependant, il existe un seuil au-delà duquel l'augmentation du risque est
plus importante que l'augmentation du taux d'intérêt, ce qui conduit les banques à renoncer à
augmenter davantage le taux d'intérêt. Cela entraîne alors le rationnement du crédit (Stiglitz et
Weiss, 1981).

3. Facteur risque de défaut et rationnement du crédit


Une autre problématique qui a reçu beaucoup plus d'intérêt dans les littératures économiques et
financières est de trouver une explication théorique au phénomène du rationnement du crédit.
Dans ce sens, nous distinguons les travaux de Hodgman (1960), qui explique que le
rationnement du crédit est la conséquence de la présence d'un risque de défaut.
En effet, le rationnement du crédit est une conséquence de l'augmentation du risque de non-
remboursement calculé sur la base du montant de prêt sollicité. Autrement dit, selon Hodgman
(1960), il existe un montant déterminé que le prêteur estime, et toute demande ou promesse de
remboursement supérieure à ce seuil ne sera pas honorée par l'emprunteur.
Hodgman distingue le rationnement traditionnel qui est la conséquence d'une réaction négative
de la part des emprunteurs au taux d'intérêt, qui devient une fonction croissante du risque de
défaut. Les conclusions que Hodgman tirées de son analyse sont les suivantes :
- Le rationnement du crédit est une conséquence des caractéristiques de risque de
l'emprunteur. De plus, le rationnement du crédit devient effectif dès que la courbe de
demande coupe la courbe d'offre dans sa partie verticale. L'emprunteur se trouve
alors dans l'incapacité d'obtenir un supplément de crédit en proposant un taux
d'intérêt plus élevé.
- Le rationnement du crédit s'effectue, à un moment donné, de manière discriminatoire,
dans le sens où il peut exister simultanément des emprunteurs rationnés et des
emprunteurs non rationnés. Tout dépend de leurs caractéristiques respectives en
matière de risque ou de défaut.
- Lorsque la politique monétaire devient restrictive, les courbes d'offre de crédit se
déplacent vers la gauche, entraînant une augmentation générale des taux d'intérêt.
Cela a des conséquences à la fois en termes de taux et en termes d'offre de crédit :
o Plus la population des emprunteurs rationnés est élevée, moins les restrictions
de crédit seront importantes.
o Plus la population des emprunteurs non rationnés est importante, plus il
faudra s'orienter vers des restrictions de crédit par un rationnement basé sur
les taux.
De leur côté, Jaffe et Modigliani (1969), ne partagent pas la même logique que celle adoptée
par Hodgman (1960), pour expliquer le rationnement du crédit. Hodgman ne procède qu'à une
réflexion du côté de l'offre, en négligeant complètement la demande. Or, une hausse du taux
débiteur induit une augmentation de la probabilité de défaillance de l'emprunteur, ce qui, en
présence de coûts de faillite, peut finalement se traduire par une baisse de la profitabilité de la
banque. Dans ce cas, les conditions sont réunies pour faire naître des situations de rationnement
de crédit.
La contribution de Baltensperger (1978), permet de distinguer le rationnement de crédit à
l'équilibre. Selon lui, deux conditions doivent être réunies :
- Le taux d'intérêt demeure de manière persistante à un niveau stable.
- L'emprunteur est rationné alors même qu'il est prêt à payer tous les éléments
monétaires et non monétaires (garanties) demandés par le prêteur.

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4. Facteurs microéconomiques du rationnement du crédit


Nous avons exposé précédemment que l'asymétrie de l'information, l'aléa moral, la sélection
adverse et les coûts d'agence sont des éléments qui impactent la décision bancaire en matière
d'octroi de crédit aux PME. Sur le plan empirique, de nombreuses études scientifiques ont tenté
de trouver une corrélation entre le rationnement du crédit et les caractéristiques de l'entreprise,
du dirigeant, du crédit sollicité et de la relation banque-entreprise.
Dans ce sens, une étude réalisée par Gregoryet al. (2000), il a été démontré que des informations
telles que la taille de la société, l'âge du dirigeant et le domaine d'activité sont des éléments
importants dans la décision de financement.
Levenson et Willard (2000), à la fin des années 1980 aux États-Unis, ont conclu qu'en ce qui
concerne l'accès des petites entreprises au financement externe, la taille de la société en termes
d'effectif a un impact sur la décision de financement. Dans la même perspective, une étude
réalisée sur les PME vietnamiennes par Thuan (2010), a démontré que la décision de
rationnement repose souvent sur des caractéristiques du dirigeant telles que l'âge, l'expérience
et les qualifications.
Udell et al. (1991), McKillop et Hutchinson (1994), affirment quant à eux que la présence de
garanties est un élément qui influence la décision d'octroi de crédit. Les entreprises qui offrent
des biens en garantie ont plus de chances de voir leurs demandes de financement satisfaites.
Cela permet à la banque de réduire l'opacité de l'information et incite l'entreprise à être plus
coopérative.
De plus, la présence de collatéraux est un facteur important pour l'accès des PME au crédit
bancaire. Ces garanties physiques contribuent à la réduction des asymétries d'information entre
l'entreprise et ses créanciers Steijvers et Voordeckers (2009); Hall et Lerner (2010). Dans le
même ordre d'idées, afin de pousser les PME à être plus coopératives et de réduire les coûts liés
à la recherche d'information, les créanciers exigent des garanties sous forme de nantissements
sur les actifs corporels de l'entreprise Myers, (1977). De plus, les banques s'intéressent
davantage aux garanties en nature Phung (2010).
Berger et Udell (1995), dans une étude portant sur un échantillon de 3000 PME, ont conclu que
plus la relation entre la PME et la banque est de longue durée, plus elle bénéficie de privilèges
en termes de taux d'intérêt et d'exigences en matière de garantie.
D'autre part, Chevallier et Anthony (2014), dans une étude portant sur les PME opérant dans le
domaine de haute technologie, ont montré que le potentiel de croissance de la PME encourage
la banque à offrir un financement à long terme. La probabilité de refus de financement est plus
élevée pour les projets non innovants Freel, (2000); Piga et Atzeni (2007).
De plus, le rationnement peut être lié au montant du prêt demandé lorsque la banque estime que
le montant dépasse un seuil critique Phung (2010).
La multi-bancarité de l'entreprise peut également influencer la décision de financement. Une
PME ayant plusieurs relations bancaires peut faire jouer la concurrence si sa demande de crédit
est rejetée Bris et Welch, (2005). Par conséquent, la multi-bancarité peut réduire le pouvoir de
négociation de la banque lorsqu'elle est sollicitée pour un financement.
En conclusion d'une enquête menée auprès de 106 chargés d'affaires bancaires, Buttner et Rosen
(1988), ont montré que ces derniers étaient plus enclins à financer des entreprises dirigées par
des hommes que par des femmes. Carrington (2006), a conclu que les femmes dirigeantes sont
beaucoup plus susceptibles de faire face à des discriminations bancaires en matière d'accès au
financement. A contrario, Naranchimeg Mijid (2015), a constaté que les entreprises dirigées
par des femmes sont plus susceptibles de se voir refuser leur demande de crédit.
Selon Berger et Udell (1992), les crédits à court terme sont moins rationnés que les crédits à
long terme, car s'engager dans un crédit de courte durée incite le dirigeant à adopter un meilleur
comportement et à être plus coopératif pendant la durée du crédit, et cela encourage également
la banque à renouveler le contrat de crédit.
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Evans et Jonanovic (1989), ont conclu que plus le montant du crédit est important, plus la
probabilité de rationnement est élevée. Berger et Udell (1992), ont également indiqué que la
taille du crédit demandé est un facteur pouvant favoriser le rationnement.

5. Modération du rationnement du crédit entre financement relationnel


et contraintes concurrentielles
Bien que les grandes entreprises aient la capacité d'accéder directement au marché financier,
les petites et moyennes entreprises (PME) sont largement tributaires des banques. Néanmoins,
il est important de noter que la relation entre les banques et les PME n'est pas homogène. Des
disparités émergent en termes de proximité relationnelle, de nature des informations échangées
et de durée de la relation, ce qui peut favoriser un risque de rationnement du crédit entre autres.
Par ailleurs, plusieurs recherches empiriques corroborent l'existence de deux catégories
d'entreprises dans le domaine du financement bancaire. Certains acteurs privilégient
l'établissement de relations à long terme, cherchant ainsi à instaurer un climat de confiance avec
leur banque et espérant bénéficier d'un soutien en période de difficultés financières et d’être
pallier à un risque du rationnement du crédit. En revanche, d'autres entreprises privilégient une
approche plus concurrentielle visant à optimiser les conditions de financement à un instant
précis. À cet égard, Diamond (1991), soutient que des relations étroites et durables avec une
banque devraient permettre aux PME de bénéficier de contrats plus avantageux.
Dans le cadre d'un financement relationnel, il est courant que le client et la banque consentent
à des sacrifices temporaires en vue d'obtenir des avantages futurs. Deux approches peuvent être
envisagées selon Ongena et Smith (2001) :
- Du point de vue de la banque, celle-ci peut attirer les emprunteurs en proposant des
taux d'intérêt initiaux inférieurs à leurs coûts, avec l'espoir de compenser ces pertes
initiales en facturant ultérieurement des frais plus élevés aux mêmes clients.
- Du point de vue de l'emprunteur, celui-ci peut être disposé à accepter initialement
des prêts à des taux d'intérêt supérieurs à leurs coûts, si une relation à long terme
promet des taux permanents inférieurs à l'avenir.
Selon Allen N. Berger et Gregory F. Udell (2002), trois niveaux d’information généralement
observées dans le cadre d'une relation bancaire. Au début la banque collecte des informations
allant au-delà des informations publiques facilement disponibles ensuite vient la collecte
d'informations qui se constitue au fil du temps grâce à de multiples interactions avec
l'emprunteur, souvent par la fourniture de multiples services financiers et au final collecte des
informations à caractères confidentielles :
Les caractéristiques du financement relationnel ne sont pas toujours clairement circonscrites.
Dans sa quête d'une définition exhaustive du financement relationnel Boot (2000), avance l'idée
que ce mode de financement n'existe que lorsque la banque s'engage dans l'acquisition
d'informations spécifiques sur ses clients, souvent d'une nature exclusive. Parallèlement, la
rentabilité de ces investissements est évaluée à travers de multiples interactions avec le client.
Dans le cadre du financement relationnel Boot (2000), souligne que l'emprunteur peut se
montrer plus enclin à divulguer des informations que dans un contexte de financement
transactionnel, du fait que le prêteur est davantage incité à investir dans la production
d'informations. Ainsi, le financement relationnel permet à la banque d'accumuler des
informations sur la qualité de l'entreprise et de résoudre ainsi le problème du rationnement du
crédit, inhérent à la relation de crédit.
En contraste, le financement transactionnel repose sur une relation plus distanciée et un échange
d'informations moins intense entre les parties. Ces distinctions constituent des éléments
discriminants pour différencier la dette bancaire de la dette obligataire.

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Adil BOUTFSSI. Asymétrie d’information et Rationnement du crédit des PME : Une exploration de la théorie à
la pratique

Il arrive parfois que les relations entre banques et entreprises soient davantage centrées sur la
transaction. L'utilisation systématique de garanties suggère que les banques sont davantage
préoccupées par la rentabilité à court terme de leurs prêts que par l'établissement d'une relation
à long terme avec leurs clients.
Il est manifeste que le financement relationnel s'ancre dans les relations personnelles entre un
agent bancaire et un potentiel emprunteur. À cet égard, Berger et Udell (2002), font remarquer
que les banques de petite taille, dotées d'une structure organisationnelle simple, optent souvent
pour le financement relationnel. Ces banques accumulent des informations qualitatives "soft"
sur la personnalité et les compétences du dirigeant de PME grâce à une relation étroite et à des
échanges réguliers entre l'agent bancaire et le gestionnaire de l’entreprise. À l'inverse, les
banques privilégiant le financement transactionnel évaluent les demandes de crédit à partir de
données quantitatives "hard", telles que les états financiers, l'historique des défauts de paiement
ou la capacité à fournir des garanties.
Par ailleurs, une étude empirique menée par Berger et al. (2005), met en évidence l'importance
accrue accordée par les grandes banques aux états financiers dans leur décision d'accorder un
crédit, ainsi qu'une communication plus impersonnelle avec leurs clients. Par conséquent, les
PME empruntant auprès de grandes banques sont davantage exposées au risque de rationnement
du crédit.
De plus, selon Stiglitz et Weiss (1981), l'incapacité des banques à évaluer rigoureusement les
taux d'intérêt en fonction de la véritable qualité des emprunteurs potentiels fait du financement
relationnel l'option privilégiée pour évaluer la solvabilité du client. De surcroît, le financement
relationnel permet de pallier le rationnement du crédit et la demande excessive de garanties.
Dans cette même veine, Udell (1989), soutient que l'agent bancaire, agissant au nom de la
banque, ne partage pas toujours les mêmes intérêts que cette dernière. En raison de
considérations de performance favorisant les résultats à court terme, l'agent bancaire peut être
incité à privilégier le volume d'affaires au détriment d'une évaluation approfondie des clients.
De plus, sa proximité relationnelle avec le dirigeant peut l'amener à dissimuler la détérioration
de la situation d'un client ou d'une entreprise non viable.
Cependant, la détention d'informations "soft" par le chargé de clientèle, inhérente au
financement relationnel, génère des problèmes d'agence au sein de l'organisation bancaire elle-
même, et non pas en raison d'une asymétrie d'information, comme le soulignent Berger et Udell
(2002).
D’un autre point de vue, le modèle élémentaire qui met en exergue la distinction entre les
marchés concurrentiels et monopolistiques du crédit a été formulé par Petersen et Rajan (1995),
qui se penchent sur l'impact de la concurrence bancaire sur les termes des contrats de crédit
ainsi que sur les banques elles-mêmes. Dans cette optique, une banque peut décider de financer
une entreprise émergente ou en difficulté si elle anticipe que la relation sera profitable à l'avenir.
Cependant, la capacité à générer des bénéfices futurs est tributaire du pouvoir de marché de la
banque. Plus la banque accumule un pouvoir de marché significatif au fil du temps, plus elle
sera encline à financer des entreprises présentant une qualité de crédit plus faible. En revanche,
une intensification de la concurrence sur le marché du crédit bancaire, en réduisant les rentes
futures perçues par les banques, peut entraîner un rationnement du crédit Petersen et Rajan,
(1994).
L'affinement de l'information détenue par la banque prêteuse au fil du temps est également à
souligner. Ainsi, à l'instant t=1, la banque acquiert une connaissance parfaite du type
d'emprunteur, résolvant ainsi pleinement le problème de sélection adverse.
En effet, avant l'octroi du crédit, il est impossible de distinguer les bons entrepreneurs des
mauvais. Par conséquent, les bons entrepreneurs ne peuvent emprunter qu'à des taux
compensant les pertes potentielles encourues par la banque en cas de défaillance. L'application
de taux d'intérêt élevés « type 3 du rationnement du crédit selon Ang (2000) » peut biaiser les

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incitations du dirigeant de l'entreprise et l'encourager à choisir des projets risqués, introduisant


ainsi un problème d'aléa moral.
Il est évident que ce n'est pas tant la nature ou la durée de la relation avec la PME qui fournit le
plus d'informations sur celle-ci, mais plutôt le comportement de la PME après l'approbation de
l'acte de financement. En effet, les informations cruciales ne se révèlent qu'après que
l'emprunteur a reçu le crédit. C'est pourquoi la banque doit inciter le dirigeant à investir dans
des projets prometteurs et rentables.
Il est clair que l'emprunteur est libre d'investir dans un projet qui correspond à ses perspectives.
Le problème survient uniquement lorsque le rendement du projet devient négatif. Selon
Petersen et Rajan (1994), cette situation peut être évitée si la banque exerce son autorité ou son
pouvoir sur le marché, par exemple en appliquant des taux d'intérêt élevés, cette pratique est
une autre figure du rationnement du crédit entre autres. Dans cette optique, la banque aura plus
intérêt a encouragé la firme à investir dans des projets rentables afin d'éviter l'application de
taux d'intérêt élevés.
Ainsi, l'évolution des taux d'intérêt appliqués au fil du temps dépend également du pouvoir de
marché de la banque : plus le pouvoir de marché de la banque est élevé, moins la baisse des
taux d'intérêt est prononcée.
En effet, dans un marché monopolistique, les entreprises bénéficient initialement de taux plus
favorables que dans un marché concurrentiel, mais elles sont ensuite confrontées à des taux
d'intérêt plus élevés.
Cependant, ce pouvoir de marché (baisse des taux débiteurs) peut également être considéré
comme préjudiciable au financement relationnel (une relation de longue durée entre la banque
et l'emprunteur). En effet, une demande de financement suscite un partage important
d'informations entre l'emprunteur et la banque.
Les banques dites "guetteuses" (externes) attendront la publication des résultats réalisés par les
entreprises pour évaluer la qualité des emprunteurs et l'importance de leurs investissements,
puis leur proposeront une offre de financement conséquente avec des conditions moins strictes.
-Model de Sharpe (1990) simplifié par Frédéric Lobez et Laurent Villanova (2006):
En t=0, un entrepreneur aspire à obtenir un financement bancaire pour son projet
d'investissement s'étalant sur deux périodes. Après avoir sollicité plusieurs établissements
bancaires, il opte pour celui qui propose le taux d'intérêt le plus compétitif.
À cet instant, ni l'emprunteur ni la banque ne possèdent une connaissance précise du rendement
futur de l'investissement.
À ce stade, l'emprunteur et la banque reçoivent un signal parfait (Y) concernant les revenus
engendrés par le projet en t=2, tandis que les autres banques reçoivent un signal faible (Ỹ).
Après avoir analysé les signaux, chaque banque formule une offre de prêt avec une échéance
fixée en t=2. Une fois de plus, l'emprunteur choisit la banque proposant le taux d'intérêt le plus
bas.
Selon Sharpe, la banque "interne", qui est informée des informations détenues par les banques
"externes", peut prévenir le départ de ses clients les plus précieux, ceux pour lesquels le signal
Y est favorable, tout en les exploitant.
Cette perspective, soutenue par Sharpe (1990) et Petersen et Rajan (1995), met en évidence les
avantages d'une relation bancaire étroite pour les entreprises de moindre qualité, mais souligne
les inconvénients potentiels pour les entreprises de qualité supérieure.
Hodgman (1963), quant à lui, se concentre sur les relations bancaires basées sur la qualité des
dépôts et admet l'hypothèse selon laquelle la valeur d'un dépôt peut favoriser un client déposant
par rapport à un client non déposant.
En effet, les dépôts des clients constituent la base des crédits. Afin de motiver les déposants et
de les inciter à ne pas retirer leurs fonds de la banque, cette dernière propose initialement de

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Adil BOUTFSSI. Asymétrie d’information et Rationnement du crédit des PME : Une exploration de la théorie à
la pratique

verser des intérêts directement calculés sur les dépôts (par exemple, les dépôts à vue) qui sont
plafonnés par la réglementation. Ainsi, la banque doit offrir une compensation supplémentaire
en proposant des prêts à des taux moins élevés, mais pour des montants inférieurs aux coûts
associés.
D'un point de vue empirique, il semble que les relations entre les banques et les entreprises
soient bénéfiques pour ces dernières. Cela est notamment démontré par des études d'événements
qui, dans la lignée de James (1987), ont mis en évidence l'augmentation de la valeur des actions
de l'emprunteur à l'annonce de l'obtention d'un crédit bancaire.
D'un point de vue théorique, deux thèses s'opposent. D'une part, la thèse classique, suivant
Diamond (1991), prédit une baisse des taux d'intérêt en fonction de la durée des relations, car
les banques accumulent de l'information grâce à la répétition des interactions avec l'emprunteur.
En revanche, l'étude de Petersen et Rajan (1994), révèle notamment l'absence de relation
significative entre le taux d'intérêt appliqué et la durée des relations bancaires. Plusieurs
explications peuvent être avancées :
- L'insuffisance de concurrence dans ce segment de clientèle ne contraint pas la
banque à transférer les bénéfices de la relation par une baisse des taux. Ainsi,
l'emprunteur serait captif de sa banque traditionnelle.
- Les chargés de clientèle sont contraints de se conformer aux grilles tarifaires en
vigueur au sein de leur institution. Or, ces grilles reposent principalement sur des
critères de taille, bien que Petersen et Rajan soulignent que lorsque l'on considère
non pas la durée, mais la profondeur de la relation, cela réduit de manière
significative le taux d'intérêt appliqué.

6. Études empiriques antérieures sur le rationnement du crédit des


entreprises
Dans les titres précédents, nous avons développé l’idée selon laquelle la régulation du crédit
bancaire destiné aux PME est le résultat de divers facteurs micro et macroéconomiques. En
effet, nous avons montré que ce phénomène dépend de plusieurs variables étroitement liées aux
caractéristiques externes et internes des PME, des banques, des conditions et de
l'environnement macroéconomique.
Au niveau des titres qui suivront, nous présenterons une revue de littérature de certains travaux
empiriques éminents qui ont mis en lumière la problématique du rationnement du crédit des
PME d’un point de vue microéconomique.
6.1.Déterminants empiriques du rationnement du crédit dans le contexte international
Notre revue de littérature nous a permis d’identifier plusieurs facteurs microéconomiques
susceptibles d'influencer la décision de financement bancaire, notamment les facteurs en
relation avec les caractéristiques de la PME du dirigeant et de la nature de relation banque-
PME.
6.1.1. Déterminants empiriques du rationnement du crédit relatives aux
caractéristiques de la PME
Un certain nombre d'études ont cherché à trouver une justification logique à la relation entre la
taille de l’entreprise et leur niveau de risque qui peut être un facteur favorisant ou limitant
l'accès au financement. Par exemple les études menées par Carroll (1983), Hall (1992), Mitchell
(1994), Baldwin et Johnson (1997), Sorensen et Stuart (2000), Glennon et Nigro (2005), ont
corroboré l'idée selon laquelle les petites entreprises sont plus susceptibles de faire face à des
difficultés et à un risque de défaillance plus élevé. En revanche, les grandes entreprises

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présentent une probabilité de défaillance moins élevée en raison de leur plus grande flexibilité
financière, Duffie et al. (2007).
De plus, les entreprises de petite taille sont confrontées aux conséquences des asymétries
d'informations, ce qui affecte leur capacité d'endettement Pettit & Singer (1985).
La littérature empirique a identifié plusieurs facteurs, directs ou indirects, expliquant les
difficultés d'accès au financement des PME. Parmi ces facteurs, le secteur d'activité de
l'entreprise joue un rôle important. Lennox (1999), a soutenu l'idée que le secteur d'activité peut
être un déterminant de la défaillance des entreprises.
Une étude menée par Bellone et al. (2010), a observé que les entreprises françaises qui se
lancent pour la première fois sur les marchés d'exportation présentent une meilleure santé
financière que leurs concurrents non exportateurs. Cependant, une étude réalisée par Benkraim
et Miloudi (2014), sur un échantillon de 1895 PME françaises a constaté une relation négative
entre l'activité d'exportation et le crédit bancaire.
L'âge de l'entreprise, mesuré par le nombre d'années d'exercice, est une variable qui peut refléter
le degré de maturité et d'expérience acquise par celle-ci. Ainsi, plus une entreprise est jeune,
plus elle peut rencontrer des difficultés pour obtenir des financements externes. Binks et Ennew
(1996), ont constaté que les jeunes entreprises à forte croissance rencontrent plus de difficultés
pour obtenir des capitaux que les grandes entreprises. Une étude menée par Wynant et al.
(1991), au Canada conclut également que l'âge de l'entreprise est l'un des déterminants
importants de l'accès au crédit bancaire.
Phung (2010), a trouvé une corrélation positive entre l'âge des PME vietnamiennes et le refus
catégorique de leur demande de crédit. De plus, dans une recherche récente portant sur les
difficultés d'accès au financement bancaire des entreprises de la région de Souss-Massa, Aicha
Amrhar (2019), souligne que l'âge de l'entreprise est l'un des déterminants du rationnement
partiel du crédit. Cependant, Rutherford et al. (1999), ont montré que l'âge de l'entreprise ne
constitue pas un obstacle au financement des PME.
6.1.2. Expériences et niveau intellectuel du dirigeant
On ne peut pas accorder une attention particulière aux PME sans s'intéresser à leur dirigeant.
En effet, plusieurs études mettent en évidence le rôle crucial du dirigeant dans la pérennité de
son entreprise. Altman (1983), constate que l'incompétence des dirigeants est la principale
cause des défaillances d'entreprises. Les résultats de son étude montrent que 50 % des faillites
d'entreprises résultent d'une expérience insuffisante ou d'une spécialisation excessive, et 44 %
sont attribuables à l'incompétence du dirigeant. Ces résultats sont en accord avec ceux d'Amit
(2003), qui considère que le niveau de rationalité du dirigeant est un élément crucial dans la
survie ou l'échec de la société.
De leur côté, Ooghe et Waeyaert (2004), soulignent que les difficultés managériales d'une
entreprise sont principalement liées au manque de compétences, de qualités personnelles et de
motivations de la direction. Dans la littérature sur le management, le niveau intellectuel du
dirigeant est souvent associé à l'incapacité de l'entreprise à se développer, voire à sa défaillance.
Perry et Pendleton (1983), notent, par exemple, qu'environ 90 % des faillites des PME
enregistrées sont dues à un manque de connaissances générales ou de compétences de la part
du propriétaire-dirigeant ou de l'équipe dirigeante. Les défaillances sont généralement causées
par l'incapacité du dirigeant à adapter l'entreprise aux bouleversements externes, ainsi que par
le manque d'expérience et de formation Baldwin et al. (1997); Argenti (1976); Hall (1994).
6.1.3. Nature de la relation de financement
Dans une relation de financement entre une banque et une PME, plusieurs éléments contribuent
à atténuer l'asymétrie d'information et le risque moral, en plus de la disponibilité d'une garantie
réelle. L'un de ces éléments est l'établissement d'une relation de financement à long terme. En

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Adil BOUTFSSI. Asymétrie d’information et Rationnement du crédit des PME : Une exploration de la théorie à
la pratique

effet, plus la relation entre la banque et la PME est de longue date, plus la banque aura le temps
de collecter un maximum d'informations sur l'entreprise. Diamond (1991), considère que des
relations étroites et de long terme avec une banque devraient permettre aux PME de bénéficier
de contrats plus favorables, voire de substituer la force de la relation à la garantie pour
l'obtention de crédits Steijvers et Voordeckers (2009). Hoshi et al. (1991), évoquent également
la force du lien entre la banque et la firme pour la disponibilité des crédits.
De nombreuses études empiriques mettent en évidence l'impact positif des relations à long
terme sur la disponibilité du crédit Petersen et Rajan, (1994) ; Harhoff et Körting (1998).
Lorsque l'historique du comportement de l'emprunteur est inconnu, la relation bancaire devient
un déterminant crucial de la décision de crédit Holmes et al. (2005), cité par Rim Boussaada,
(2012).
6.1.4. Nombre de banques partenaires
Une première idée stipule que la multi-bancarisation réduit la probabilité de rationnement du
crédit Detragiache et al (2000). La diversification des sources de financement par les entreprises
permet la dilution de l'information et l'assouplissement de la surveillance des banques Refait,
(2003). Selon Steijvers et Voordeckers (2009), l'idée la plus répandue est que les entreprises
qui demandent un crédit à une seule banque ont plus de chances de l'obtenir avec de meilleures
conditions. Cependant, une entreprise de mauvaise qualité ou anticipant une détérioration de sa
performance a tendance à s'adresser à plusieurs banques pour diluer l'information et échapper
au contrôle strict d'une banque principale Refait, (2003), cité par Rim Boussaada (2012).
D'un point de vue post-décisionnel, la multi-bancarité peut rendre la renégociation des termes
du crédit plus difficile Bolton et Scharfstein (1996), car l'emprunteur se sent financièrement
sécurisé en bénéficiant d'autres sources de financement qui peuvent compenser le manque de
financement causé par la décision de la banque en question.
L'intérêt de la multi-bancarisation réside essentiellement dans le maintien d'une concurrence
entre les banques, ce qui permet aux PME de bénéficier de conditions plus avantageuses et
d'éviter le risque de capture Detragiache et al (2000) ; Rajan, (1992). Elle évite ainsi aux
entreprises les plus opaques d'être rationnées en crédit. Des études plus récentes Aya et Mouldi
(2012), ont établi une relation positive significative entre le nombre de relations bancaires et
les fonds disponibles.
6.2.Études antérieures sur le rationnement du crédit au Maroc
Bien que l'accès au financement bancaire constitue la principale difficulté des PME, cette
problématique demeure modestement examinée dans le contexte marocain. Parmi les études
pertinentes dans la littérature financière marocaine, nous pouvons citer les travaux de Mourji
(1998), Joumady (1999), Bellemare (2000), Quamar (2008), Hadj Khalifa (2016) et Amrhar
(2019).
Une étude basée sur une enquête auprès de 647 microentreprises réalisée par Mourji (1998),
économètre, a démontré que 82,5 % des microentreprises se voient refuser leur demande de
crédit en raison d'un manque de garantie. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle 33,46 % de ces
microentreprises n'entament pas de démarches pour obtenir un crédit. L'étude révèle également
que la plupart des microentreprises (91 %) se financent par des fonds propres, car les offres de
crédit informel, comme les prêteurs sur gages, sont trop coûteuses.
En revanche, l'approche macroéconomique de Joumady (1999), a montré que l'engagement du
Maroc dans la voie de la libéralisation a entraîné une diminution des contraintes de crédit sur
les entreprises et a réduit l'impact des asymétries d'information.
En effet, l'application des principes du libéralisme à l'économie nationale a éliminé les
contraintes exogènes liées à l'offre de financement, telles que le plafonnement des taux
débiteurs. De plus, la libéralisation de l'économie marocaine a contribué à réduire l'asymétrie
d'information sur le marché des capitaux. L'étude empirique de Joumady (1999), a porté sur les
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entreprises manufacturières marocaines, et les résultats obtenus indiquent que les banques
adoptent un comportement plus accommodant suite au désencadrement du crédit en 1991.
Dans le même domaine, à travers une perspective plus microéconomique, l'article de Bellemare
(2000), soutient que le rationnement du crédit ne peut être considéré comme un phénomène
permanent. Selon lui, une microentreprise qui ne recourt pas au financement bancaire préfère
se financer par ses propres fonds, car les coûts engendrés sont moins importants que ceux du
crédit bancaire. Ainsi, le fait qu'une entreprise ne soit pas financée par un crédit bancaire ne
signifie pas qu'elle fait face à un rationnement de crédit. L'étude de Marc Bellemare (2000),
portant sur les contraintes de crédit dans le Maroc urbain, conclut que les microentreprises
casablancaises font effectivement face à un rationnement du crédit. Les variables telles que la
taille de l'entreprise en termes de nombre d'employés et d'apprentis, ainsi que le fait d'avoir un
compte bancaire, ont un impact significatif sur ce phénomène. En revanche, l'âge de l'entreprise
(dans le cas des microentreprises) et sa taille (dans le cas des entreprises formelles) ne sont pas
révélateurs pour faire face aux asymétries d'information.
Sous la réglementation bancaire Bâle II Quamar (2008), démontre, du point de vue de l'offre, à
travers une analyse effectuée au prêt des banques marocaines que le facteur susceptible
d'influencer la relation entre les banques et les PME au Maroc est la nouvelle méthode
d'évaluation du risque de crédit, qui prend des formes qualitatives en raison de la non-
transparence des états financiers des PME. Les variables sur lesquelles la banque se base pour
attribuer une notation à une PME sont toutes qualitatives. Quamar (2008), distingue deux
formes de variables qualitatives. La première concerne le degré d'engagement de l'équipe
dirigeante et de l'actionnariat, mesuré par l'implication du dirigeant dans le projet, la
transparence de l'entreprise et la qualité du support. La deuxième forme concerne le niveau de
risque industriel de l'activité de l'entreprise, mesuré par la durée d'activité de l'entreprise, la
position du secteur dans le cycle économique et la position de l'entreprise dans son secteur.
Dans le même contexte, Hadj Khalifa (2016), montre que l'application de la réglementation
bancaire Bâle II a affaibli la position des PME et des grandes entreprises marocaines situées
dans des zones de forte consommation de fonds propres bancaires. Ce constat s'explique par la
nature de la méthode d'évaluation du risque de crédit. En effet, le passage des approches
standard à l'approche de notation interne (IRB) a entraîné une amélioration de l'offre de crédit
pour les segments qui permettent une économie pour les banques, tandis que les zones de
consommation excessive de fonds propres (la majorité des PME) devraient rencontrer des
difficultés d'accès au crédit, avec des coûts de crédit élevés ou un rationnement du crédit.
Plus récemment, Aicha Amrhar (2019), a réalisé une importante contribution scientifique en
examinant la problématique du rationnement du crédit des entreprises opérant dans la région de
Souss Massa. Les principaux résultats de cette étude sont les suivants :
-L'âge de l'entreprise, le niveau d'endettement, le niveau d'instruction du dirigeant et son
expérience ont un impact significatif sur l'auto-rationnement du crédit des entreprises.
-Le taux d'endettement, le type d'activité, le type d'entreprise, le chiffre d'affaires, l'âge de
l'entreprise et du gestionnaire, ainsi que le lieu d'implantation, expliquent totalement le
rationnement du crédit des entreprises de type partiel.
-Les aspects juridiques, le niveau d'endettement, le lieu d'implantation, l'expérience, l'âge et le
niveau d'instruction du gestionnaire expliquent le rationnement du crédit des entreprises de type
total.

7. Cadre conceptuel et hypothèses de recherche


En se basant sur notre revue de la littérature, nous avons pu identifier plusieurs facteurs
microéconomiques susceptibles d'influencer la décision d’octroi de crédit à une PME
notamment les facteurs liés à l’environnement interne de ces entités.

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la pratique

Dans ce sens, nous avons mis en œuvre un modèle conceptuel mettant en évidence le rapport
existant entre le rationnement du crédit et les caractéristiques de la PME, du dirigeant et de la
nature de la relation de financement Banque-PME.
Le modèle conceptuel que nous proposons résume et illustre l'idée générale de notre réflexion
théorique sur le phénomène du rationnement du crédit des PME dans un contexte d’asymétrie
d’information. Il s'agit d'un schéma récapitulatif qui peut être opérationnaliser dans le cadre de
recherches scientifiques postérieures.
Nous avons également estimé qu'en introduisant le concept d’asymétries d’information comme
variable modératrice dans le modèle conceptuel que nous proposons, permettra une évaluation
plus précise de la force de la relation entre nos variables et ainsi une explication plus rigoureuse
du phénomène du rationnement du crédit.
Figure 1 : Modèle conceptuel de la recherche proposé

Asymétries d’information

Caractéristiques de la
PME

Caractéristiques du Rationnement du crédit de


dirigeant la PME

Caractéristiques de la
relation Banque-PME

Source : Auteur
À la lumière des éléments développés ci -dessus, nous pouvons émettre l'hypothèse générale
selon laquelle en présence d’une asymétrie d’information dans le marché de crédit il existe une
forte corrélation entre les caractéristiques de la PME, les propriétés du dirigeant et de la nature
de la relation banque-PME et le rationnement du crédit.
Ainsi, en fonction des axes retenus pour illustrer les déterminants du rationnement du crédit,
les hypothèses suivantes peuvent être formulées
H1 : Il existe une relation causale entre le rationnement du crédit et les caractéristiques de
la PME.
H2 : Les caractéristiques du dirigeant sont des déterminants du rationnement du crédit.
H3 : La nature de la relation banque PME est un déterminant rationnement du crédit.

5. Conclusion
Le marché du crédit caractérisé par une forte disparité entre l’information dont disposent les
personnes physiques ou morales à la recherche de financement et celle que détiens les bailleurs
de fonds, ce qui peut donner naissance au phénomène de rationnement du crédit.
D’un premier lieu, les demandeurs de crédit à savoir les PME, communiquent une information
qui est généralement rudimentaire, ce qui provoque chez les banquiers une difficulté à évaluer

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le risque économique et financier de cette catégorie d’entreprises opaques, menant ainsi à un


rationnement du crédit.
Ces emprunteurs souvent classés dans la catégorie des emprunteurs a risque élevé, font face
aux clauses restrictives bancaires tel que l’augmentation du taux d’intérêt qui constitue pour la
banque un moyen d’immunisation contre le risque couru. Toutefois, cette technique peut être
abandonnée dans le cas où le taux d’intérêt dépasse un certain seuil critique au-delà duquel
l’augmentation du risque est plus importante que l’augmentation du taux d’intérêt, dans ce cas
de figure la banque rationne le crédit (Stiglitz et Weiss, 1981).
D’un autre côté, Hodgman (1960), souligne qu’il existe un montant déterminé que le prêteur
estime, et toute demande ou promesse de remboursement supérieure à ce seuil ne sera pas
honorée par l'emprunteur, ainsi le rationnement du crédit devient une assurance indirecte contre
le risque de défaut.
Sur le plan empirique, de nombreuses études scientifiques ont trouvé une relation marquante
entre le rationnement du crédit et les caractéristiques de l'entreprise, du dirigeant, du crédit
sollicité, de la relation banque-PME et de la disponibilité de garanties.
Dans ce sens, il a été démontré que des informations telles que la taille de la PME, l'âge et le
sexe du dirigeant, le domaine d'activité, l’étendue de la relation banque PME, les avoirs en
garantie et le montant du crédit sollicité sont des éléments importants qui impactent la décision
de financement.
Certes, les banques mettent en œuvre une procédure d'évaluation, qualitative et/ou quantitative,
visant à réduire les imperfections informationnelles. Toutefois, malgré ces efforts, les banques
ne peuvent disposer en fin de compte d’autant d’informations que le dirigeant sur la véritable
qualité de la PME qu’il dirige, en particulier son niveau du risque. Cette situation est susceptible
de rendre inévitable la génération du phénomène de rationnement du crédit.

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