Utilité Des Manœuvres de Contractions Musculaires Volontaires Dans La Prévention Des Syncopes Vagales
Utilité Des Manœuvres de Contractions Musculaires Volontaires Dans La Prévention Des Syncopes Vagales
Utilité Des Manœuvres de Contractions Musculaires Volontaires Dans La Prévention Des Syncopes Vagales
Rythmologie
ans une période où tout ce qui date de plus de 10 ans est considéré
D
Il est connu de longue date que la contraction
musculaire, surtout isométrique, provoque une comme périmé et où tout semble avoir été inventé la veille, il est
augmentation significative de la pression
réconfortant d’observer avec humilité que les progrès actuels ne sont
artérielle. Il est tout aussi connu et depuis
presque aussi longtemps que la syncope
souvent que le fruit d’études anciennes injustement oubliées. L’histoire que je
vasovagale est en partie au moins vais vous conter en est l’illustration.
la conséquence d’une chute de la pression
artérielle. Vouloir prévenir la seconde par la Combien d’étudiants après deux ou trois années de médecine ignorent que
première paraissait donc une option logique. toute contraction musculaire, surtout isométrique, s’accompagne d’une
augmentation significative de la pression artérielle ? Ayant fait l’expérience
Les premiers essais réalisés sur quelques cas
ont confirmé la validité de la méthode de poser cette question à ceux qui m’entourent, la réponse est : très peu ! Il
et ont permis la conception d’un essai s’agit donc d’un concept physiologique de base. Comme mes Maîtres me
multicentrique randomisé comparant l’ont enseigné il y a déjà bien des années, il s’agit donc d’un concept phy-
chez des patients ayant des syncopes siologique de base ancien.
vasovagales récidivantes avec symptômes
prémonitoires les mesures de prévention
classique dans un groupe à ces mêmes mesures
Craignant probablement une déception, je n’ai pas posé aux étudiants la ques-
associées à des manœuvres de contractions tion suivante mais la soumets aux lecteurs qui ont eu la patience de m’accom-
musculaires volontaires dans l’autre. pagner jusqu’à cette ligne : comment évolue la pression artérielle durant les
minutes ou secondes qui précèdent une syncope vasovagale ? J’espère ne sur-
La récidive des syncopes a été très prendre personne en écrivant qu’il s’agit d’une baisse significative s’accompa-
significativement diminuée dans ce dernier
gnant presque toujours d’une bradycardie, voire d’une véritable pause respon-
groupe par rapport au premier,
faisant de ces manœuvres le premier traitement sable de la syncope.
préventif ayant démontré son efficacité
dans la syncope vasovagale. Qu’il ait fallu plus de 15 ans à la communauté médicale pour relier deux
concepts aussi simples et anciens n’est pas en faveur d’une hyperactivité neu-
ronale de ses membres. Il appartenait à un physiologiste de franchir le pas… ce
fut W. Weeling et son équipe à Amsterdam, qui en 2002, publièrent l’étude
princeps [1]. Ils montrèrent que, chez des patients soumis à un test d’inclinai-
son pour syncopes d’origine possiblement vasovagale, une contraction muscu-
laire isométrique effectuée dès les prémices cliniques annonciateurs de l’im-
minence de la syncope et dès que la chute tensionnelle s’amorçait, provoquait
une hausse tensionnelle de 30 à 40 mmHg et évitait la perte de connaissance.
Une deuxième étude quelques mois plus tard, issue d’une équipe italienne, ne
fit que confirmer la précédente [2]. Le traitement préventif de la syncope vaso-
vagale par contractions musculaires volontaires (CMV) était lancé.
Rythmologie
POINTS FORTS
La contraction musculaire isométrique s’accompagne d’une
augmentation de la pression artérielle.
mais recevait en plus une information sur les CMV. Les réci-
dives de syncopes ont été très significativement réduites
Fig. 4 : Effet sur la pression artérielle mesurée par voie externe de la contrac- (p < 0,004) pendant un suivi moyen de 14 mois dans le groupe
tion musculaire par écartement contrarié des bras (la pression systolique CMV par rapport au groupe témoin [3].
augmente de 32 mm).
Ce traitement devient donc le premier traitement préventif
la manœuvre dès qu’il ne “se sent pas bien”. Elle doit être ayant résisté à l’épreuve d’une étude correctement menée
poursuivie environ une minute, ce qui laisse le temps soit (même si elle n’est pas méthodologiquement parfaite). Une
d’éviter la syncope, soit de se mettre “en position de sécurité”. étude du même type effectuée par un groupe différent serait
certainement souhaitable pour confirmer ces premiers résul-
L’apprentissage et l’entraînement sont indispensables. Il faut tats, mais sa réalisation paraît difficile : il faut beaucoup
faire exécuter les manœuvres plusieurs fois devant soi, don- d’opiniâtreté pour entreprendre, sans aide financière quel-
ner une feuille les expliquant et demander au sujet de les répé- conque, une étude dont les résultats sont connus et publiés.
ter régulièrement en l’absence de symptômes pour qu’elles
deviennent “automatiques” lorsqu’il devra les appliquer dans
un contexte plus stressant. ❚❚ CONCLUSION