F 12, Voltaire, Candide À La Guerre
F 12, Voltaire, Candide À La Guerre
F 12, Voltaire, Candide À La Guerre
Texte 4
Extrait du troisième chapitre de Candide, Voltaire, 1759
INTRODUCTION :
François-Marie Arouet, né en 1864 à Paris, est un écrivain et philosophe français qui a marqué le
ème
XVIII siècle et la littérature françaises.
Il diffuse ses idées philosophiques à travers divers écrits, comme des contes philosophiques tels
que Zadig ou Candide des essais ou encore des pièces de théâtre, son genre favoris, avec des œuvres
comme Œdipe ou Brutus.
Ce texte est un extrait du troisième chapitre de Candide, conte philosophique dans lequel le
personnage principal va remettre en question, au cours de nombreux voyages et péripéties, la vision du
monde optimiste que lui a transmise le maître de philosophie Pangloss (reflet de la philosophie de
Leibnitz). Dès le chapitre 3, Candide est confronté à la guerre pour la première fois.
Lecture du texte
Problématique + Annonce :
Ainsi, nous nous demanderons comment à travers le regard naïf de Candide, Voltaire dénonce les
atrocités de la guerre ?
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2. Le récit prend de la distance avec la mort
-> Distanciation dans le compte des morts : on oublie que ce sont des êtres humains tués -> on se
concentre seulement sur le nombre.
Cette idée est renforcée avec l’imprécision du nombre (« l.3 ») qu’il faut multiplier puisqu’on
ne discerne pas les deux camps -> vision neutre, aucun parti.
L’expression adverbiale « à peu près », l’adverbe « environ » ou bien le déterminant
indéfini (« quelques ») amplifient l’approximation du nombre de tués, peu important.
Voltaire a recours à la synecdoque (figure de rhétorique qui permet de prendre une partie
pour le tout) : les soldats ne sont plus que des « canons », de la « mousqueterie » ou des «
baïonnettes » : rend la mort uniquement technique.
Les euphémismes pour désigner la mort : « les canons renversèrent » avec un verbe
d’atténuation ou la périphrase empruntée à la philosophie « ôta du meilleur des mondes »
cèdent une forme impersonnelle : les armes deviennent les sujets.
La mort est justifiée ironiquement : les soldats sont assimilés à des parasites dont il est
préférable de se débarrasser.
Candide prend aussi ses distances avec les morts (l.7). Ses remarques le présentent comme
un anti-héros : il ne combat pas, il « tremble » et « se cache ».
La comparaison avec les "philosophes" ridiculise ceux qui se contentent de belles paroles
sans actions concrètes.
L'oxymore "boucherie héroïque" associe un terme négatif à un autre positif, mais dans ce
contexte, la violence inhérente à la "boucherie" rend toute idée d'héroïsme absurde.
Décalage dans l’ensemble du premier paragraphe
Partie II : La fuite de Candide et description des atrocités commises dans l’arrière-pays. (l.11 à 20)
1. La fuite de Candide
Longue périphrase qui décrit la désertion de Candide qui se réfèrent à la philosophie de Leibnitz comme
on peut le comprendre à travers les termes utilisés « raisonner ailleurs des effets et des
causes »
Ensuite, récit des déplacements : d’un village abare à un village bulgare, auquel s’ajoute les
descriptions de ce qu’il voit.
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Il ne se s’attarde pas sur les dégâts et les dommages causés et compte seulement s’enfuir, pour
revenir à ses préoccupations antérieures, montrant qu’il n’est pas affecté par la scène :
Seuls comptent ses provisions de bouche « portant quelques petites provisions dans son
bissac » et l’amour qui occupe son esprit : « n'oubliant jamais Mlle Cunégonde ».
2. Les dégâts dans les deux camps (presque miroir)
La similitude des sonorités entre les deux peuples, les "Abare" et les "Bulgares", renforce le
constat que la barbarie affecte les deux factions.
Une symétrie se manifeste lorsque Candide visite un village bulgare qui a été traité de la même
manière par les Abares, montrant les mêmes dommages des deux côtés. L'ironie réside dans
l'expression "selon les lois du code civil" -> sous-entend que la barbarie est justifiée
La guerre fait des dégâts aussi bien au front qu’à l’arrière.
3. Les divers types de morts et de blessures
Les détails de la description sont affreux, s’opposant au premier paragraphe
La vision d'une véritable "boucherie" envahit chaque coin que Candide observe, incitant le
lecteur à visualiser la scène. Alors que les soldats viennent de s'en aller, la description est
marquée par un envahissement de l'espace, articulé par l'utilisation répétée d'adverbes de lieu
tels que "ici" (l.12) et "là" (l.14), le recours à des pronoms indéfinis comme "d'autres" (l.15),
ainsi que par des groupes verbaux comme "toujours marchant sur" (l.18).
Le champ lexical de la famille : « vieillards » (l.12), « femmes » (l.13) ou « enfants » (l.13) 3
générations qui ne sont pas au front et qu’on doit protéger sont reliés par un jeu de regards.
Ils sont marqués par une diversité de blessures : « criblés de coups » (l.12), « égorgées » (l.13)
etc.
Voltaire fait allusion au viol des filles en utilisant une périphrase : il décrit le crime de guerre
comme "avoir assouvi les besoins naturels de quelques héros"+ euphémisme ironique qui
désigne les viols, justifiés par ceux que le narrateur sarcastiquement nomme "héros".
Dans ce village, un autre sens est sollicité : l'ouïe, où les survivants "criaient qu'on achevât de
leur donner la mort" (l.15), soulignant le supplice des victimes encore en vie.
La description de l'agonie, le moment le plus horrifiant, demeure constante.
Résumé : Dans cette seconde partie, le lecteur est confronté de manière réaliste et
brutale à l'horreur de la guerre, à travers le regard de Candide.
CONCLUSION :
Dans ce chapitre, Candide est confronté pour la première fois à la guerre.
Le texte expose deux perspectives contrastées : l'une dépeint la guerre comme un spectacle presque festif,
avec une pointe d'ironie, tandis que l'autre la représente de manière réaliste et brutale.
Voltaire adopte un point de vue neutre pour dénoncer l'horreur de la guerre, persuadant ainsi le lecteur
de son absurdité : les pertes sont massives des deux côtés, tant sur le front qu'à l'arrière. Il critique
également la justification de la guerre par la politique et la religion.
Ce passage s'inscrit dans le mouvement des Lumières. On peut établir un parallèle entre cet extrait
et la guerre picrocholine décrite par Rabelais dans Gargantua, où la guerre est présentée comme une
farce grotesque pour mieux la condamner (utilisation du burlesque). Bien que les procédés utilisés
diffèrent, ils partagent tous deux la volonté de combiner « rire et savoir ».
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