César Mawanzi

Décoloniser les savoirs constitue l'un des enjeux majeurs d'une sociologie de l'éducation en Afrique postcoloniale. Réinventer la science paraît l'objectif au coeur des sociétés où s'affirme l'humanité de l'homme. Au regard de la crise de la rationalité qui caractérise le système mondial, Jean-Marc Ela préconise une autre manière de faire la science en examinant les enjeux auxquels l'Afrique est confrontée. S'attachant à explorer le fondement de la science, Ela reprend les interrogations des sciences humaines sur les questions du temps présent, à l'ère du savoir et du nouvel ordre mondial, afin d'établir la place des cultures africaines dans le champ de la rationalité scientifique. Dans un effort considérable d'élucidation, J.-M. Ela tente de décrypter les enjeux du savoir et revendique sans détour l'universalité de la connaissance. De cette manière, il s'attèle à mettre en oeuvre une « science sans fétiche ». La tâche du chercheur africain, soutient-il, s'inscrit dans l'appropriation du monde par la transgression et l'invention.

The issue of Negro-African life and culture is hereby captured in the perspective of a radical phenomenology. By subscribing his radical philosophy of the pathos of life to a tradition rupture between Husserl and Heidegger, the French philosopher Michel Henry intended to lead a breakthrough. Rooted in the experience of the "pathos of life" that borders on reason sapiential in the Negro-African symbolic universe, the cosmos-vital existence of each individual, as Kahang apprehends, finds the base, "the matrix common to all cultures of Black Africa ". Our contribution proposes to highlight the link between classical phenomenology (transcendental) and radical (material) phenomenology. Considering the work of Mr. Henry, we would like to argue that sapiential phenomenology draws the task of reconstruction of African identity in its cultural manifestations, in this case in the world of Negro-African life. Seized in its aim of maturity, our reflection places the truth of the man at the heart of the experience of life, where the relation to others makes one discover the other, as well as one’s self, a "pathos-with". Moreover, it claims precisely the place of emergence and of accomplishment of an experiment of self-affection, where the symbolic animal (animal symbolicum) is confronted with the existential questions of finitude and death, banality of evil and guilt, justice and law, domination and violence, power and struggle for recognition.

Keywords: radical phenomenology, pathos of life, aim of maturity, symbolic reason, pathos of the sapiential life, Dominique Kahang'a Rukonkish, Michel Henry, Ernst Cassirer, philosophy of symbolic forms, Negro-African identity.

A plusieurs égards, il ne fait pas de doute que la question de Dieu dans le christianisme africain postcolonial fait toujours couler de l'encre. Ce questionnement veut revendiquer une parfaite autonomie d'exercice philosophique d'une pensée symbolique, et rationnelle, ainsi qu'un effort herméneutique du penser théologique. Car son incarnation dans la culture constitue sa source de renouvellement, un repère essentiel, qui demeure en dialogue avec d'autres horizons. Notre problématique est articulée autour de quatre volets. Le premier point porte sur la légitimité du discours théologique en Afrique postcoloniale. Le second entreprend la déconstruction de l'énigme de la religion chrétienne en post-modernité. Alors que le troisième moment de notre questionnement cherche à élucider la responsabilité du sens de l'humanité comme herméneutique intégrative, le dernier volet se penche sur certaines métaphores qui donnent à penser. En effet, il cherche à comprendre la dimension universelle de la foi incarnée dans une culture. Une relecture approfondie de l'héritage culturel, théologique du Négro-Africain montre l'importance combien grandissante d'une interprétation du discours théologique négro-africain dans la postmodernité. Oscar Bimwenyi en est le pionnier qui, après une réflexion théologique brillante, a inauguré une rupture avec une certaine pensée directrice. Son oeuvre apparaît comme une véritable étoile de « rédemption de la mémoire africaine » (1). En dépit de la déstructuration du mode de vie de l'Africain, il convient de réaffirmer la force de créativité culturelle de l'imaginaire africain, tout en relevant son intuition fondamentale inaliénable. On lira: Kä Mana, Problème de la Culture dans le Discours théologique Négro-Africain. Lames de fond et modèles théoriques, in: Kalamba Nsapo/Bilolo Mubabinge (dir.), Renaissance de la théologie négro-africaine. Mélanges en l'honneur du Prof. Bimwenyi-Kweshi, Publications Universitaires Africaines, Munich/ Kinshasa 2009, p. 24.

César Mawanzi « Relire Hannah Arendt : Entre banalité, violence et responsabilité ou l'ontologie du vivre-ensemble en Afrique postcoloniale » Mots-clés : Hannah Arendt – Banalité (phénoménologie) du mal – Génocide rwandais-Responsabilité-culpabilité Résumé (French) En Afrique postcoloniale, les affres des guerres ont, durant des années, consacré l'impunité des crimes contre l'humanité. L'effondrement de l'ordre régalien, l'absence parfois d'un Etat de droit et de démocratie dans certains régimes, à l'exemple du Rwanda, ont conduit au génocide ; ce qui indique une crise de principes de normativité régissant le vivre-ensemble dans une communauté, ayant provoqué des pertes en vies humaines. Le génocide rwandais paraît, à nos yeux, le cas typique de la phénoménologie de la violence criminelle (mal) à laquelle se consacre notre investigation. Réfléchir sur l'incapacité de penser qui caractériserait le génocidaire, révèle la force d'une analyse que Hannah Arendt soumet au débat philosophique de notre temps. Un crime signe la culpabilité (personnelle) de son auteur. Aussi la question de la banalité du mal que pose Hannah Arendt se heurte-t-il, en effet, à la nécessité impérieuse de décliner la justice et les droits humains ? Il nous semble toutefois que le respect des droits de l'homme est parfois mis en mal, sur le plan international, par des contraintes politiques, des intérêts économiques et des velléités hégémoniques. Convoquant le génie de l'idée des Lumières de la paix universelle qui consacre l'imaginaire de l'humanisme planétaire, l'émergence d'une culture humaine en Afrique moderne, respectueuse des droits et de la démocratie, responsable de son action, nous paraît inéluctable. Summary (English) « Hannah Arendt understand: the relationship between " Banality of Evil " , violence and responsibility or the ontology of coexistence in post-colonial Africa » In post-colonial Africa, there exist crimes against humanity as a result of deterioration of normative principles, breakdown of rule of law and lack of democracy. Consequently, issues such as justice and respect for human rights have rather diverted the interests of African foreign development partners who are pursuing the political and economic stability of the continent. On the basis of Hannah Arendt's thesis (" Banality of Evil "), attempt was made in Africa to develop a philosophical approach to understanding and contextualizing the Rwandan genocide. To what extent is a criminal incapable of distinguishing between the good and the evil? Is the reason for the innocence of the crime, which Arendt proposed, to be inconspicuous? "

Face à la mondialisation et à l’idéologie de la société dominante, un nouvel ordre mondial politique s’impose. Le tournant du pragmatisme qu’emprunte la littérature de nos jours, stimule à la réflexion éthique au regard des vicissitudes et des injustices que présente la mondialisation en Afrique et au monde. Il scande l’engagement politique des citoyens du monde de tous bords. Dans le débat que nous menons avec Kimoni Iyay, nous interrogeons en effet sa pensée pour nous rendre compte de la place que peut encore occuper la littérature négro-africaine et quel destin lui assigner dans la vie pratique concrète des citoyens aujourd’hui.