À l’heure actuelle, la culture est devenue un des principaux enjeux de circulation économique, le... more À l’heure actuelle, la culture est devenue un des principaux enjeux de circulation économique, les sphères culturelles sont le lieu de concurrence et de concentration transnationales inédites, les processus de mondialisation touchent désormais tous les continents : il paraît donc nécessaire d’interroger l’histoire des relations culturelles internationales au long du XXe siècle. Il semble qu’après la Première guerre mondiale, l’Occident ait inventé un nouvel instrument politique extérieur, une diplomatie d’un nouveau type où s’articulent autrement la volonté de puissance des États-nations et les champs de production symbolique. À côté d’initiatives privées, l’appareil d’État a ainsi tenu une place décisive dans l’exportation des cultures nationales, la mise en place de réseaux et d’institutions visant à internationaliser les sciences, la culture et la formation des élites culturelles. L’ouvrage s’intéresse à la montée en puissance de cette diplomatie culturelle occidentale jusqu’à la fin des années 1970 lorsqu’elle est contrainte de redéfinir ses tâches devant d’autres processus, plus massifs, d’internationalisation. En de brefs essais qui touchent aussi bien la politique culturelle française au Proche-Orient et aux États-Unis, que la présence britannique en France via les « British Council » ou la comparaison des politiques culturelles française et américaine au Vietnam, l’ouvrage rappelle qu’il y eut deux pôles majeurs, peut-être successifs, de la diplomatie culturelle au XXe siècle : des politiques du rayonnement et des politiques de la réciprocité entre lesquelles on n’a cessé d’osciller. Il permet aussi d’insister sur la multiplicité des outils institutionnels de l’action culturelle extérieure. A travers l’objet « diplomatie culturelle », il propose de s’interroger en retour sur les identités nationales, en particulier sur leurs crises. Une attention particulière est accordée à deux chantiers historiographiques brûlants dont l’écho est persistant dans l’actualité de ce début de XXIe siècle : la politique française pendant la Seconde guerre mondiale et l’attitude de la diplomatie française dans la Palestine mandataire. Entre rayonnement et réciprocité se présente comme une étape d’une généalogie de la mondialisation culturelle, qui est un des aspects les plus méconnus des politiques étrangères des États-nations au XXe siècle. L’ouvrage offre donc un aperçu de ce que pourrait être, à la jonction de l’histoire culturelle et de l’histoire des relations internationales, une histoire de la diplomatie culturelle, qui reste encore à élaborer
Comme d’autres mini-publics, la Convention citoyenne pour le climat (CCC), qui s’est tenue en Fra... more Comme d’autres mini-publics, la Convention citoyenne pour le climat (CCC), qui s’est tenue en France en 2019 et 2020, a dû répondre à une double contrainte : pour que ses conclusions soient jugées valables du point de vue de la délibération, elle devait apparaître comme imperméable aux influences extérieures, mais pour que ses conclusions aient du poids, les membres de l’assemblée étaient incité·es à développer des alliances avec d’autres acteurs et actrices, et à porter ainsi le débat au-delà des murs de l’assemblée. Cette tension entre ouverture et fermeture, délibération et participation, mini-public et grand public, de plus en plus problématisée au sein des théories de la démocratie délibérative, a été résolue à travers certaines des caractéristiques organisationnelles et logistiques du dispositif, comme dans ces longues intersessions au cours desquelles les citoyen·nes ont été convié·es à investir leur rôle, ce qui a constitué un élément décisif dans la publicité des débats. L’...
Launched in 2019, the French Citizens’ Convention for Climate (CCC) tasked 150 randomly chosen ci... more Launched in 2019, the French Citizens’ Convention for Climate (CCC) tasked 150 randomly chosen citizens with proposing fair and effective measures to fight climate change. This was to be fulfilled through an “innovative co-construction procedure”, involving some unspecified external input alongside that from the citizens. Did inputs from the steering bodies undermine the citizens’ accountability for the output? Did co-construction help the output resonate with the general public, as is expected from a citizens’ assembly? To answer these questions, we build on our unique experience in observing the CCC proceedings and documenting them with qualitative and quantitative data. We find that the steering bodies’ input, albeit significant, did not impair the citizens’ agency, creativity, and freedom of choice. While succeeding in creating consensus among the citizens who were involved, this co-constructive approach, however, failed to generate significant support among the broader public. ...
Il peut paraître paradoxal à l’historien qui s’intéresse à l’histoire de la diplomatie culturelle... more Il peut paraître paradoxal à l’historien qui s’intéresse à l’histoire de la diplomatie culturelle de se pencher sur une période marquée par un conflit militaire mondial. La place de la culture en politique étrangère ne risque-telle pas d’être secondaire lorsque les armes prédominent dans les relations internationales ? Ce constat paraît d’autant plus vrai en France que les moyens budgétaires dont dispose l’Etat diminuent considérablement pendant la guerre. Vichy est dans une situation financi..
Quelle fut la place de la reference a la Commune de Paris dans la mobilisation atypique des Gilet... more Quelle fut la place de la reference a la Commune de Paris dans la mobilisation atypique des Gilets jaunes, en France, a partir de novembre 2018 ? Si l’on s’en tient a ses occurrences, elle resta restreinte par rapport a celle de la Revolution francaise. Si l’on se tourne vers les historiens, la comparaison ne tiendrait pas. Le spectre de 1871 est pourtant revenu dans le discours d’une partie marginale des Gilets jaunes autour de l’« assemblee des assemblees » initiee a Commercy, dans la Meuse. La Commune de Paris, en particulier son projet federatif, est alors la metonymie d’un projet communaliste de reorganisation anticapitaliste et anti-etatique de la societe, inspire notamment de l’anarchiste nord-americain Murray Bookchin. Et le mouvement des Gilets jaunes gagne a etre regarde comme une « Commune des ronds-points ». Pour saisir cette presence a la fois evanescente, insistante et partielle de la Commune de Paris parmi les Gilets jaunes, il serait utile de penser en termes de « survivance », comme nous y a invites Aby Warburg en matiere artistique.
Reitman, Ben. — Boxcar Bertha : une autobiographie recueillie par / Ben Reitman ; trad. de l'... more Reitman, Ben. — Boxcar Bertha : une autobiographie recueillie par / Ben Reitman ; trad. de l'americain Doc Van Daal ; couv. ill. d'apres Joe Coleman. — Paris : L'Insomniaque [Les Archives de l'avenir], 1994. — 284 p. : ill. ; 21 cm.
À l’heure actuelle, la culture est devenue un des principaux enjeux de circulation économique, le... more À l’heure actuelle, la culture est devenue un des principaux enjeux de circulation économique, les sphères culturelles sont le lieu de concurrence et de concentration transnationales inédites, les processus de mondialisation touchent désormais tous les continents : il paraît donc nécessaire d’interroger l’histoire des relations culturelles internationales au long du XXe siècle. Il semble qu’après la Première guerre mondiale, l’Occident ait inventé un nouvel instrument politique extérieur, une diplomatie d’un nouveau type où s’articulent autrement la volonté de puissance des États-nations et les champs de production symbolique. À côté d’initiatives privées, l’appareil d’État a ainsi tenu une place décisive dans l’exportation des cultures nationales, la mise en place de réseaux et d’institutions visant à internationaliser les sciences, la culture et la formation des élites culturelles. L’ouvrage s’intéresse à la montée en puissance de cette diplomatie culturelle occidentale jusqu’à la fin des années 1970 lorsqu’elle est contrainte de redéfinir ses tâches devant d’autres processus, plus massifs, d’internationalisation. En de brefs essais qui touchent aussi bien la politique culturelle française au Proche-Orient et aux États-Unis, que la présence britannique en France via les « British Council » ou la comparaison des politiques culturelles française et américaine au Vietnam, l’ouvrage rappelle qu’il y eut deux pôles majeurs, peut-être successifs, de la diplomatie culturelle au XXe siècle : des politiques du rayonnement et des politiques de la réciprocité entre lesquelles on n’a cessé d’osciller. Il permet aussi d’insister sur la multiplicité des outils institutionnels de l’action culturelle extérieure. A travers l’objet « diplomatie culturelle », il propose de s’interroger en retour sur les identités nationales, en particulier sur leurs crises. Une attention particulière est accordée à deux chantiers historiographiques brûlants dont l’écho est persistant dans l’actualité de ce début de XXIe siècle : la politique française pendant la Seconde guerre mondiale et l’attitude de la diplomatie française dans la Palestine mandataire. Entre rayonnement et réciprocité se présente comme une étape d’une généalogie de la mondialisation culturelle, qui est un des aspects les plus méconnus des politiques étrangères des États-nations au XXe siècle. L’ouvrage offre donc un aperçu de ce que pourrait être, à la jonction de l’histoire culturelle et de l’histoire des relations internationales, une histoire de la diplomatie culturelle, qui reste encore à élaborer
Comme d’autres mini-publics, la Convention citoyenne pour le climat (CCC), qui s’est tenue en Fra... more Comme d’autres mini-publics, la Convention citoyenne pour le climat (CCC), qui s’est tenue en France en 2019 et 2020, a dû répondre à une double contrainte : pour que ses conclusions soient jugées valables du point de vue de la délibération, elle devait apparaître comme imperméable aux influences extérieures, mais pour que ses conclusions aient du poids, les membres de l’assemblée étaient incité·es à développer des alliances avec d’autres acteurs et actrices, et à porter ainsi le débat au-delà des murs de l’assemblée. Cette tension entre ouverture et fermeture, délibération et participation, mini-public et grand public, de plus en plus problématisée au sein des théories de la démocratie délibérative, a été résolue à travers certaines des caractéristiques organisationnelles et logistiques du dispositif, comme dans ces longues intersessions au cours desquelles les citoyen·nes ont été convié·es à investir leur rôle, ce qui a constitué un élément décisif dans la publicité des débats. L’...
Launched in 2019, the French Citizens’ Convention for Climate (CCC) tasked 150 randomly chosen ci... more Launched in 2019, the French Citizens’ Convention for Climate (CCC) tasked 150 randomly chosen citizens with proposing fair and effective measures to fight climate change. This was to be fulfilled through an “innovative co-construction procedure”, involving some unspecified external input alongside that from the citizens. Did inputs from the steering bodies undermine the citizens’ accountability for the output? Did co-construction help the output resonate with the general public, as is expected from a citizens’ assembly? To answer these questions, we build on our unique experience in observing the CCC proceedings and documenting them with qualitative and quantitative data. We find that the steering bodies’ input, albeit significant, did not impair the citizens’ agency, creativity, and freedom of choice. While succeeding in creating consensus among the citizens who were involved, this co-constructive approach, however, failed to generate significant support among the broader public. ...
Il peut paraître paradoxal à l’historien qui s’intéresse à l’histoire de la diplomatie culturelle... more Il peut paraître paradoxal à l’historien qui s’intéresse à l’histoire de la diplomatie culturelle de se pencher sur une période marquée par un conflit militaire mondial. La place de la culture en politique étrangère ne risque-telle pas d’être secondaire lorsque les armes prédominent dans les relations internationales ? Ce constat paraît d’autant plus vrai en France que les moyens budgétaires dont dispose l’Etat diminuent considérablement pendant la guerre. Vichy est dans une situation financi..
Quelle fut la place de la reference a la Commune de Paris dans la mobilisation atypique des Gilet... more Quelle fut la place de la reference a la Commune de Paris dans la mobilisation atypique des Gilets jaunes, en France, a partir de novembre 2018 ? Si l’on s’en tient a ses occurrences, elle resta restreinte par rapport a celle de la Revolution francaise. Si l’on se tourne vers les historiens, la comparaison ne tiendrait pas. Le spectre de 1871 est pourtant revenu dans le discours d’une partie marginale des Gilets jaunes autour de l’« assemblee des assemblees » initiee a Commercy, dans la Meuse. La Commune de Paris, en particulier son projet federatif, est alors la metonymie d’un projet communaliste de reorganisation anticapitaliste et anti-etatique de la societe, inspire notamment de l’anarchiste nord-americain Murray Bookchin. Et le mouvement des Gilets jaunes gagne a etre regarde comme une « Commune des ronds-points ». Pour saisir cette presence a la fois evanescente, insistante et partielle de la Commune de Paris parmi les Gilets jaunes, il serait utile de penser en termes de « survivance », comme nous y a invites Aby Warburg en matiere artistique.
Reitman, Ben. — Boxcar Bertha : une autobiographie recueillie par / Ben Reitman ; trad. de l'... more Reitman, Ben. — Boxcar Bertha : une autobiographie recueillie par / Ben Reitman ; trad. de l'americain Doc Van Daal ; couv. ill. d'apres Joe Coleman. — Paris : L'Insomniaque [Les Archives de l'avenir], 1994. — 284 p. : ill. ; 21 cm.
Depuis la fin de l’année 2010, les bouleversements politiques et sociaux dans le monde arabe sont... more Depuis la fin de l’année 2010, les bouleversements politiques et sociaux dans le monde arabe sont – une fois encore – au centre de toutes les attentions et notamment de l’attention académique. Les chercheurs en sciences sociales d’aujourd’hui n’entendent pas se laisser dicter leurs objets par l’actualité et les problématisations non-savantes qu’elle charrie mais refusent dans le même temps de démissionner devant les faits ou de s’emmurer dans leur tour d’ivoire, feignant d’ignorer la gravité du monde qui les entoure et l’urgence d’une pensée construite et contrôlée. C’est à cet exercice délicat que se sont livrés les auteurs réunis dans ce dossier, sans cesse pris dans une forme d’injonction paradoxale : prendre de la distance avec l’événement historique – les « révolutions arabes », le « printemps arabe » – et saisir son épaisseur sociale dans toute sa matérialité, réfuter les explications causales macrosociologiques et prendre au sérieux les revendications et les répertoires d’action des protestataires, résister au diktat de l’instant et de l’accélération de l’histoire et réinscrire les pratiques et les discours dans leur terreau sociologique et historique. L’objectif du numéro n’est pas de proposer, cinq ans plus tard, une nouvelle interprétation des événements qui ont bouleversé la région mais bien plutôt de comprendre, au moyen d’enquêtes de terrain de longue haleine, comment ces événements ont bousculé les structures sociales et politiques des pays concernés et de quelles façons cette histoire courte est à réintégrer au sein des mutations sociales plus larges qu’ont connu ces sociétés. Fondés sur un travail empirique inédit, les six articles composant le dossier étudient ainsi les conséquences du déclassement des chômeurs diplômés tunisiens sur leurs dispositions à se mobiliser (Pierre Blavier), la recomposition du capital social des insurgés dans le cas syrien (Gilles Dorronsoro et al.), l’impossibilité du soulèvement dans le cas algérien (Layla Baamara), le rôle de groupes professionnels comme les avocats dans la révolution tunisienne (Eric Gobe), les voies de la reconversion politique des Frères musulmans égyptiens entre 2005 et 2012 (Marie Vannetzel) et les modalités du passage d’une situation révolutionnaire à un résultat révolutionnaire dans le contexte tunisien (Choukri Hmed).
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Fondés sur un travail empirique inédit, les six articles composant le dossier étudient ainsi les conséquences du déclassement des chômeurs diplômés tunisiens sur leurs dispositions à se mobiliser (Pierre Blavier), la recomposition du capital social des insurgés dans le cas syrien (Gilles Dorronsoro et al.), l’impossibilité du soulèvement dans le cas algérien (Layla Baamara), le rôle de groupes professionnels comme les avocats dans la révolution tunisienne (Eric Gobe), les voies de la reconversion politique des Frères musulmans égyptiens entre 2005 et 2012 (Marie Vannetzel) et les modalités du passage d’une situation révolutionnaire à un résultat révolutionnaire dans le contexte tunisien (Choukri Hmed).