Conference Presentations by Héloïse Van Appelghem

« Le film rape and revenge par les réalisatrices contemporaines : réappropriation politique d’un ... more « Le film rape and revenge par les réalisatrices contemporaines : réappropriation politique d’un genre à l’ère #MeToo ? », dans le cadre du Colloque international « Le cinéma de genre, un cinéma très politique ? », organisé par Damien Darcis, Stéphane François et Amélie Honorez, Université de Mons (UMONS), Belgique, les 20, 21 et 22 février 2025.
Dans les années 1970-80, plusieurs films d’exploitation du sous-genre « rape and revenge » ont établi ce que Pam Cook appelle « le stéréotype de l’héroïne agressive et positive obsédée par la vengeance ». La colère devient un ressort narratif servant à expliquer la violence féminine et son agressivité, rappelant le trope de la « angry woman ». Dans les années 70, ces récits de vengeance, souvent critiqués pour leur profusion de violence et leur voyeurisme, seraient d’abord l’apanage de réalisateurs masculins, occultant une perspective féminine sur la réalité des violences sexuelles, et préférant la mise en spectacle de celles-ci. Mais depuis les années 2000, le « rape and revenge » fait l’objet d’une réappropriation féministe par plusieurs réalisatrices contemporaines avec Revenge (Coralie Fargeat, 2018), The Nightingale (Jennifer Kent, 2018), parfois en subvertissant le schéma narratif-type (Promising Young Woman, Emerald Fennell, 2020). D’autres films, sans être des « rape and revenge movies », en empruntent les codes génériques, tels que Jennifer’s Body (Karyn Kusama, 2009), Monster (Patty Jenkins, 2003) qui réhabilite la figure d’Aileen Wuornos ou Les Femmes au balcon (Noémie Merlant, 2024), Blink Twice (Zoë Kravitz, 2024), Animale (Emma Benestan, 2024). Pour Coralie Fargeat, la scène de viol dans Revenge est « symbolique de toutes les violences – qu’elles soient verbales, psychologiques, physiques, sexuelles, auxquelles les femmes sont confrontées, et avec lesquelles elles ont dû s’habituer à vivre. » L’héroïne, au départ hypersexualisée et réifiée par le regard masculin, retrouve la possibilité d’être sujet du regard après sa mort et sa renaissance dans le désert, prenant en chasse ses agresseurs en renversant le rapport de domination. Le film de Coralie Fargeat propose une revanche de la figure de la Lolita par une inversion des rapports de force. Une mise en scène qui permettra de réfléchir aux possibilités de renouvellement du rape and revenge, à travers d'autres exemples (Promising Young Woman, Blink Twice, Animale).

« L’esthétique du “trip” psychédélique à travers le voyage chamanique dans Blueberry l’expérience... more « L’esthétique du “trip” psychédélique à travers le voyage chamanique dans Blueberry l’expérience secrète (Jan Kounen, 2004), Enter the Void (Gaspar Noé, 2009) et L’Etreinte du Serpent (Ciro Guerra, 2015) », Colloque international « La renaissance psychédélique : pratiques culturelles et esthétiques », organisé par Lambert Barthélémy et Jean-Christophe Valtat, laboratoire RIRRA 21, Université Paul-Valéry-Montpellier III, les 2 et 3 mai 2024.
Dans les années 1960, Henri Michaux autocritiquait son film Images du monde visionnaire (1964), regrettant l’incapacité du cinéma à reproduire visuelle les expérimentations psychédéliques. Pourtant, il semble que les formes filmiques peuvent retranscrire les visions mentales issues de la prise de drogue et des états modifiés de conscience permis par la pratique du chamanisme. Justement, Enter the Void (Gaspar Noé, 2009), L’Etreinte du Serpent (Ciro Guerra, 2015) et Blueberry (Jan Kounen, 2004) ont en commun le thème du voyage, du « trip », aussi bien voyage sous drogue, voyage de l’esprit et de la conscience qu’un voyage physique, et pourraient très bien illustrer l’idée du voyage chamanique incarnée par la figure du chamane, qui « parvient à accéder à un univers entièrement nouveau, pourtant familier et ancien, qui lui fournit des informations profondes à propos du sens de sa propre vie et de sa propre mort, ainsi que sur sa place dans la totalité de toute existence », selon l’anthropologue Michael Harner (La voie du chamane, Mama Editions, Péronnas, 2016, p.57). Comment ces trois films choisissent de représenter à l’écran des visions intérieures liées à la prise de psychédéliques ? Et par quelles images et narrations ces trois films peuvent s’illustrer comme un voyage chamanique, illustration du Livre des Morts Tibétain ? Il s’agira d’étudier comment le voyage, le trip physique est traité sous ses différentes formes, selon les stylèmes psychédéliques et la tradition chamanique, avant d’analyser la représentation de l’invisible à travers la prise de drogues et de plante hallucinogène. Enfin, par l’analyse de l’esthétique de ces visions, nous traiterons de la question de l’animisme et de l’Homme Unidimensionnel.

Communication intitulée « L’arrêt sur image dans les road movies : effet de “stase”, iconisation ... more Communication intitulée « L’arrêt sur image dans les road movies : effet de “stase”, iconisation et esthétique de la disparition », proposée dans le cadre de la Journée d’étude « Images fixes : du support à l’émotion. Photographie, cinéma, vidéo » organisée par le Cerlis, l’Ircav, le LabEx Icca, à la Maison de la Recherche de la Sorbonne Nouvelle, Paris, le 1er juin 2023.
L’arrêt sur image, comme procédé cinématographique figeant l’espace et le temps, est particulièrement utilisé dans différents road movies, genre qui, à l’opposé, met au premier plan le mouvement en avant. L’arrêt sur image appliqué au road movie permettrait de suspendre la mobilité, dans un effet de « stase », puisque l’iconographie du genre participe à la mise en place d’une « pause », d’un arrêt dans le récit, où l’image de la route peut tendre à l’abstraction en étant réduite à ses lignes de fuite. Avec ces lignes infinies convergeant vers un horizon inatteignable, le paysage du désert, dépouillé à l’extrême, « suspend » le moment et l’arrêt sur image vient appuyer cette interruption du mouvement. Ainsi, ma communication propose d’étudier ce mouvement figé dans le road movie, allant de la « stase » et de l’iconisation (Thelma et Louise) à la disparition (Point Limite Zéro), jusqu’à la destruction radicale (Macadam à deux voies) ; l’arrêt sur image fixant l’héroïsation des personnages comme pour conjurer leur mort annoncée, l’issue fatale étant constitutive du genre filmique.
Lors du Colloque AVISA - "Écrire l’histoire du harcèlement sexuel sur la longue durée : Nommer, d... more Lors du Colloque AVISA - "Écrire l’histoire du harcèlement sexuel sur la longue durée : Nommer, dénoncer, représenter, mettre en image ou en musique", les 9 et 10 décembre 2021 à l'Université d'Evry Val d'Essonne, et organisé par Armel Dubois-Nayt, Louise Piguet, Chloé Tardivel, et Réjane Vallée, j'ai présenté ma communication intitulée "Héroïnes contre harceleurs : représentations du pouvoir patriarcal et stratégies de résistance au cinéma. Étude de cas de Promising Young Woman (Emerald Fennell, 2020)", pour le panel "Dénoncer : voix de femmes".
Présentation de ma communication : "Sur la route des road movies américains : tourisme, cinéphili... more Présentation de ma communication : "Sur la route des road movies américains : tourisme, cinéphilie et réception performative", lors du colloque international "Tourisme, Arts et Territoires" organisé par l'Université du Littoral Côte d'Opal (ULCO) à Boulogne-sur-Mer les 7 et 8 octobre 2021.
Cette journée d'étude tenue le 3 octobre 2020 se propose d’examiner comment les arts et les média... more Cette journée d'étude tenue le 3 octobre 2020 se propose d’examiner comment les arts et les médias participent au renouvellement des normes émotionnelles de la honte, à des fins éthiques et politiques de
lutte contre les discriminations.
Comité d'organisation et de rédaction de Traits d'Union :
Marija Apostolovic, Eve Benhamou, Myriam Boulin, Priscilla Coutinho, Marie Grenon, Justine Le Floc'h, Claire Salles, Guglielmo Scafirimuto, Héloïse Van Appelghem, Aliette Ventéjoux.
Cette journée d’étude organisée par Sabrina Bouarour et Héloïse Van Appelghem avec le Centre de l... more Cette journée d’étude organisée par Sabrina Bouarour et Héloïse Van Appelghem avec le Centre de l'Université de Chicago à Paris s’inscrit dans la publication du numéro 16 de la revue Mise au point consacrée à l’intersectionnalité au cinéma. Les intervenant.e.s ont présenté les articles qui y seront publiés en interrogeant la circulation du concept d’intersectionnalité, sa pertinence et ses limites, dans le champ des études filmiques et médiatiques.
Programme sur : https://centerinparis.uchicago.edu/events/20210402intersectionnalitecinema
Les 6 et 7 mai 2019, à la Maison de la Recherche de Paris 3 - Sorbonne Nouvelle, l'Ecole Doctoral... more Les 6 et 7 mai 2019, à la Maison de la Recherche de Paris 3 - Sorbonne Nouvelle, l'Ecole Doctorale Arts et Médias (ED 267) a organisé deux journées de présentation de thèse pour les doctorants de 2e, 3e ou 4e année.

Le festival "Le documentaire engagé dans les Amériques" constitue une première collaboration entr... more Le festival "Le documentaire engagé dans les Amériques" constitue une première collaboration entre l’Institut des Amériques (IdA) et le cinéma Le Studio à Aubervilliers. Un groupe de doctorant.e.s, appartenant aux universités affiliées à l’IdA, ont contribué à la sélection des films, à l’organisation du festival et compose, avec des enseignantes chercheuses et des professionnels, un jury qui remettra un prix au documentaire élu. Notre choix, en effet, pour cette première édition, a été de nous intéresser à un cinéma du réel engagé, mais non univoque, qui met en lumière les dysfonctionnements de nos sociétés, mais évoque, montre ou propose également des chemins de résilience dans un monde contemporain aux prises avec l’imminence de la catastrophe.
Parmi les longs métrages sélectionnés : Le grain et l’ivraie de Fernando Solanas, In Jackson Heights de Frederick Wiseman, La cordillère des songes de Patricio Guzmán, Batallas íntimas de Lucía Gajá, La fin des terres de Loïc Darses, et O processo de Maria Ramos.
Le mercredi 9 octobre marquait la troisième soirée du festival Le documentaire engagé dans les Am... more Le mercredi 9 octobre marquait la troisième soirée du festival Le documentaire engagé dans les Amériques, au cinéma Le Studio à Aubervilliers, avec la projection de Batallas íntimas de Lucía Gajá pour la première fois en France. La réalisatrice est l’invitée d’honneur du festival, venue spécialement du Mexique pour présenter son film porteur d’un discours puissant, et pour débattre avec le public après la séance.
Intervention au sein de l'atelier "Genre et intersectionnalité", pour la Journée doctorale de l'A... more Intervention au sein de l'atelier "Genre et intersectionnalité", pour la Journée doctorale de l'AFECCAV, organisée avec le soutien de l’Ecole doctorale Arts & Médias et des unités de recherche CIM, IRCAV, IRMECCEN et LIRA, le 06/09/2019.
Journée d'étude organisée par Traits d'Union, revue des jeunes chercheurs de Paris 3, le 25/05/20... more Journée d'étude organisée par Traits d'Union, revue des jeunes chercheurs de Paris 3, le 25/05/2019 à la Maison de la Recherche, Paris.
Ma communication s'intitulait "Féminisme et antispécisme : relier condition animale et figure de la « femme sauvage » dans les road movies" et montrait comment, dans les road movies, le lien entre femmes et animaux oscille entre harmonie au sein de la « wilderness », dans une dimension écoféministe, et dénonciation d’un système capitaliste reliant patriarcat et spécisme.
"Le road movie féminin : entre émancipation et aliénation du genre". Intervention lors du séminai... more "Le road movie féminin : entre émancipation et aliénation du genre". Intervention lors du séminaire "Cinémas de genre : formes, usages, étiquetages" organisé par Mélanie Boissonneau, Quentin Mazel et Thomas Pillard (IRCAV), à la Maison de la Recherche, Université Sorbonne Nouvelle (Paris3), le 08/12/2017.
" 'Time's up!' 2018, le 'temps révolu' des représentations sexistes à l'écran ?". Intervention lo... more " 'Time's up!' 2018, le 'temps révolu' des représentations sexistes à l'écran ?". Intervention lors de la journée d'étude "Le(s) Présent(s)" organisée par la revue Traits d'Union à la Maison de la Recherche (Paris), le 10/04/2018.
"Le corps des héroïnes de road movies, de l’épreuve physique à la réappropriation corporelle et i... more "Le corps des héroïnes de road movies, de l’épreuve physique à la réappropriation corporelle et identitaire." Communication pour le colloque "Corps et Pouvoir" organisé par l'Université de Lorraine (Nancy), les 11 et 12 octobre 2018.
"Représentations de la wilderness dans les road movies féminins de l’Ouest américain : de la figu... more "Représentations de la wilderness dans les road movies féminins de l’Ouest américain : de la figure de la femme sauvage à la quête de la Terre Promise." Intervention pour la journée d'étude "Images et usages de la wilderness au Canada et aux États-Unis", organisée par l'Université Paul-Valéry-Montpellier III, le 12/10/2018.
"Prendre la route quand on est une femme : la représentation des femmes dans les road movies, de ... more "Prendre la route quand on est une femme : la représentation des femmes dans les road movies, de Thelma et Louise (Ridley Scott, 1991) à Mad Max : Fury Road (Georges Miller, 2015)". Communication lors de la journée d'étude des Masters sur le Genre, organisée par l'Université Paris-Sorbonne, le 14/03/2016.
Papers by Héloïse Van Appelghem

Revue Traits-d'Union #10 - La condition animale : stratégies discursives et représentations, 2021
Dans les road movies, la nature sauvage permet aux protagonistes de quitter un ordre social oppre... more Dans les road movies, la nature sauvage permet aux protagonistes de quitter un ordre social oppressif : l’évolution spirituelle et identitaire entre en écho avec l’harmonie de la nature et le règne animal. Lorsque ce sont des femmes qui prennent la route, la critique socio-politique est redoublée d’une dimension symbolique, réactualisant la figure de la « femme sauvage », libre et indomptée, traduisant l’émancipation féminine. L’usage de la métaphore animale permet de relier le sexisme et le spécisme. L’interconnexion de ces deux formes de domination révèle également des points de tension, en faisant émerger le concept de « référent absent ». Nécessaire à première vue, l’usage de la métaphore animale pourrait a contrario contribuer à la réification des femmes et des animaux, et mérite d’être questionnée. Le recours à la métaphore, par l’animalisation des femmes et la féminisation de la nature constitue-t-elle la clé d’une critique féministe et antispéciste ?

Mise au Point, 2022
En étudiant trois exemples du cinéma contemporain anglophone sortis à la fin des années 2010, cet... more En étudiant trois exemples du cinéma contemporain anglophone sortis à la fin des années 2010, cet article vise à montrer différentes lectures politiques et problématiques posées par la complexité du concept d’intersectionnalité au cinéma. L’article part du phénomène de "feminism-washing" dans l’industrie hollywoodienne, où la récupération d’enjeux féministes va parfois jusqu’à l’édulcoration. Dans un premier temps, le concept d’intersectionnalité servirait ainsi à dépasser la question du genre pour décrypter de façon plus complète les représentations cinématographiques, par l’analyse de l’imbrication triptyque genre-classe-race dans la fiction. Dans un deuxième temps, au-delà de l’intersectionnalité comme outil d’analyse, le concept peut être sollicité du côté de la production ou du côté de la réception, opérant différents discours sur un film : Antebellum appuie son scénario et sa promotion sur un discours intersectionnel, s’efforçant d’étudier l’intersection de différentes discriminations sous le prisme de la Black Horror, là où Suffragettes fait le choix d’invisibiliser le paramètre d’oppression de race au profit de la classe. Dans le cas de Joker, l’ambivalence du discours du film entraîne un « double speak » (pour la presse et le public), où le héros est interprété comme un représentant de la lutte des classes partageant l’oppression des femmes noires, tout en étant aussi lu comme un "incel", figure symbolique de la misogynie et de l’extrême droite blanche américaine. Entre récupération, revendication, invisibilisation et discours contradictoires, les trois films étudiés exemplifient ainsi différents discours portés sur l’intersectionnalité (ou qu’on leur a attribué), jusqu’à comporter certaines limites.
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By studying three examples of contemporary Anglo-Saxon cinema aimed at the “general public” and released at the end of the 2010s, this article aims to show different political readings and problems posed by the complexity of the concept of intersectionality in cinema. The article starts from the phenomenon of feminism-washing, which is recurrent in the Hollywood industry and waters down feminist issues. First, the concept of intersectionality would thus serve to go beyond the question of gender to decrypt cinematographic representations in a more complete way, by analyzing the gender-class-race triptych in fiction. In a second step, beyond intersectionality as an analytical tool, the concept can be solicited on the side of the production or on the side of the audience in the reception, operating different discourses on a film: Antebellum bases its script and promotion on an intersectional discourse, striving to examine the intersection of different discriminations through the lens of the Black Horror genre, while Suffragettes makes the choice to invisibilize the parameter of race oppression in favor of class. In the case of Joker, the ambivalence of the film's discourse leads to a “double speak” (for the press and the public), where the hero is interpreted as a representative of class struggle sharing the oppression of black women, while also being read as an incel, a symbolic figure of misogyny and the white American far right. Between recuperation, vindication, invisibilization and contradictory discourses, the three films studied exemplify different discourses on intersectionality (or that have been attributed to them), to the point of including certain limits.
Mise au Point, 2022
Introduction à « Analyser l’intersectionnalité au cinéma. Circulation d’un concept en France et a... more Introduction à « Analyser l’intersectionnalité au cinéma. Circulation d’un concept en France et aux États-Unis », n°16 de Mise au Point, co-dirigé par Sabrina Bouarour et Héloïse Van Appelghem, 2022.
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Conference Presentations by Héloïse Van Appelghem
Dans les années 1970-80, plusieurs films d’exploitation du sous-genre « rape and revenge » ont établi ce que Pam Cook appelle « le stéréotype de l’héroïne agressive et positive obsédée par la vengeance ». La colère devient un ressort narratif servant à expliquer la violence féminine et son agressivité, rappelant le trope de la « angry woman ». Dans les années 70, ces récits de vengeance, souvent critiqués pour leur profusion de violence et leur voyeurisme, seraient d’abord l’apanage de réalisateurs masculins, occultant une perspective féminine sur la réalité des violences sexuelles, et préférant la mise en spectacle de celles-ci. Mais depuis les années 2000, le « rape and revenge » fait l’objet d’une réappropriation féministe par plusieurs réalisatrices contemporaines avec Revenge (Coralie Fargeat, 2018), The Nightingale (Jennifer Kent, 2018), parfois en subvertissant le schéma narratif-type (Promising Young Woman, Emerald Fennell, 2020). D’autres films, sans être des « rape and revenge movies », en empruntent les codes génériques, tels que Jennifer’s Body (Karyn Kusama, 2009), Monster (Patty Jenkins, 2003) qui réhabilite la figure d’Aileen Wuornos ou Les Femmes au balcon (Noémie Merlant, 2024), Blink Twice (Zoë Kravitz, 2024), Animale (Emma Benestan, 2024). Pour Coralie Fargeat, la scène de viol dans Revenge est « symbolique de toutes les violences – qu’elles soient verbales, psychologiques, physiques, sexuelles, auxquelles les femmes sont confrontées, et avec lesquelles elles ont dû s’habituer à vivre. » L’héroïne, au départ hypersexualisée et réifiée par le regard masculin, retrouve la possibilité d’être sujet du regard après sa mort et sa renaissance dans le désert, prenant en chasse ses agresseurs en renversant le rapport de domination. Le film de Coralie Fargeat propose une revanche de la figure de la Lolita par une inversion des rapports de force. Une mise en scène qui permettra de réfléchir aux possibilités de renouvellement du rape and revenge, à travers d'autres exemples (Promising Young Woman, Blink Twice, Animale).
Dans les années 1960, Henri Michaux autocritiquait son film Images du monde visionnaire (1964), regrettant l’incapacité du cinéma à reproduire visuelle les expérimentations psychédéliques. Pourtant, il semble que les formes filmiques peuvent retranscrire les visions mentales issues de la prise de drogue et des états modifiés de conscience permis par la pratique du chamanisme. Justement, Enter the Void (Gaspar Noé, 2009), L’Etreinte du Serpent (Ciro Guerra, 2015) et Blueberry (Jan Kounen, 2004) ont en commun le thème du voyage, du « trip », aussi bien voyage sous drogue, voyage de l’esprit et de la conscience qu’un voyage physique, et pourraient très bien illustrer l’idée du voyage chamanique incarnée par la figure du chamane, qui « parvient à accéder à un univers entièrement nouveau, pourtant familier et ancien, qui lui fournit des informations profondes à propos du sens de sa propre vie et de sa propre mort, ainsi que sur sa place dans la totalité de toute existence », selon l’anthropologue Michael Harner (La voie du chamane, Mama Editions, Péronnas, 2016, p.57). Comment ces trois films choisissent de représenter à l’écran des visions intérieures liées à la prise de psychédéliques ? Et par quelles images et narrations ces trois films peuvent s’illustrer comme un voyage chamanique, illustration du Livre des Morts Tibétain ? Il s’agira d’étudier comment le voyage, le trip physique est traité sous ses différentes formes, selon les stylèmes psychédéliques et la tradition chamanique, avant d’analyser la représentation de l’invisible à travers la prise de drogues et de plante hallucinogène. Enfin, par l’analyse de l’esthétique de ces visions, nous traiterons de la question de l’animisme et de l’Homme Unidimensionnel.
L’arrêt sur image, comme procédé cinématographique figeant l’espace et le temps, est particulièrement utilisé dans différents road movies, genre qui, à l’opposé, met au premier plan le mouvement en avant. L’arrêt sur image appliqué au road movie permettrait de suspendre la mobilité, dans un effet de « stase », puisque l’iconographie du genre participe à la mise en place d’une « pause », d’un arrêt dans le récit, où l’image de la route peut tendre à l’abstraction en étant réduite à ses lignes de fuite. Avec ces lignes infinies convergeant vers un horizon inatteignable, le paysage du désert, dépouillé à l’extrême, « suspend » le moment et l’arrêt sur image vient appuyer cette interruption du mouvement. Ainsi, ma communication propose d’étudier ce mouvement figé dans le road movie, allant de la « stase » et de l’iconisation (Thelma et Louise) à la disparition (Point Limite Zéro), jusqu’à la destruction radicale (Macadam à deux voies) ; l’arrêt sur image fixant l’héroïsation des personnages comme pour conjurer leur mort annoncée, l’issue fatale étant constitutive du genre filmique.
lutte contre les discriminations.
Comité d'organisation et de rédaction de Traits d'Union :
Marija Apostolovic, Eve Benhamou, Myriam Boulin, Priscilla Coutinho, Marie Grenon, Justine Le Floc'h, Claire Salles, Guglielmo Scafirimuto, Héloïse Van Appelghem, Aliette Ventéjoux.
Programme sur : https://centerinparis.uchicago.edu/events/20210402intersectionnalitecinema
Parmi les longs métrages sélectionnés : Le grain et l’ivraie de Fernando Solanas, In Jackson Heights de Frederick Wiseman, La cordillère des songes de Patricio Guzmán, Batallas íntimas de Lucía Gajá, La fin des terres de Loïc Darses, et O processo de Maria Ramos.
Ma communication s'intitulait "Féminisme et antispécisme : relier condition animale et figure de la « femme sauvage » dans les road movies" et montrait comment, dans les road movies, le lien entre femmes et animaux oscille entre harmonie au sein de la « wilderness », dans une dimension écoféministe, et dénonciation d’un système capitaliste reliant patriarcat et spécisme.
Papers by Héloïse Van Appelghem
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By studying three examples of contemporary Anglo-Saxon cinema aimed at the “general public” and released at the end of the 2010s, this article aims to show different political readings and problems posed by the complexity of the concept of intersectionality in cinema. The article starts from the phenomenon of feminism-washing, which is recurrent in the Hollywood industry and waters down feminist issues. First, the concept of intersectionality would thus serve to go beyond the question of gender to decrypt cinematographic representations in a more complete way, by analyzing the gender-class-race triptych in fiction. In a second step, beyond intersectionality as an analytical tool, the concept can be solicited on the side of the production or on the side of the audience in the reception, operating different discourses on a film: Antebellum bases its script and promotion on an intersectional discourse, striving to examine the intersection of different discriminations through the lens of the Black Horror genre, while Suffragettes makes the choice to invisibilize the parameter of race oppression in favor of class. In the case of Joker, the ambivalence of the film's discourse leads to a “double speak” (for the press and the public), where the hero is interpreted as a representative of class struggle sharing the oppression of black women, while also being read as an incel, a symbolic figure of misogyny and the white American far right. Between recuperation, vindication, invisibilization and contradictory discourses, the three films studied exemplify different discourses on intersectionality (or that have been attributed to them), to the point of including certain limits.
Dans les années 1970-80, plusieurs films d’exploitation du sous-genre « rape and revenge » ont établi ce que Pam Cook appelle « le stéréotype de l’héroïne agressive et positive obsédée par la vengeance ». La colère devient un ressort narratif servant à expliquer la violence féminine et son agressivité, rappelant le trope de la « angry woman ». Dans les années 70, ces récits de vengeance, souvent critiqués pour leur profusion de violence et leur voyeurisme, seraient d’abord l’apanage de réalisateurs masculins, occultant une perspective féminine sur la réalité des violences sexuelles, et préférant la mise en spectacle de celles-ci. Mais depuis les années 2000, le « rape and revenge » fait l’objet d’une réappropriation féministe par plusieurs réalisatrices contemporaines avec Revenge (Coralie Fargeat, 2018), The Nightingale (Jennifer Kent, 2018), parfois en subvertissant le schéma narratif-type (Promising Young Woman, Emerald Fennell, 2020). D’autres films, sans être des « rape and revenge movies », en empruntent les codes génériques, tels que Jennifer’s Body (Karyn Kusama, 2009), Monster (Patty Jenkins, 2003) qui réhabilite la figure d’Aileen Wuornos ou Les Femmes au balcon (Noémie Merlant, 2024), Blink Twice (Zoë Kravitz, 2024), Animale (Emma Benestan, 2024). Pour Coralie Fargeat, la scène de viol dans Revenge est « symbolique de toutes les violences – qu’elles soient verbales, psychologiques, physiques, sexuelles, auxquelles les femmes sont confrontées, et avec lesquelles elles ont dû s’habituer à vivre. » L’héroïne, au départ hypersexualisée et réifiée par le regard masculin, retrouve la possibilité d’être sujet du regard après sa mort et sa renaissance dans le désert, prenant en chasse ses agresseurs en renversant le rapport de domination. Le film de Coralie Fargeat propose une revanche de la figure de la Lolita par une inversion des rapports de force. Une mise en scène qui permettra de réfléchir aux possibilités de renouvellement du rape and revenge, à travers d'autres exemples (Promising Young Woman, Blink Twice, Animale).
Dans les années 1960, Henri Michaux autocritiquait son film Images du monde visionnaire (1964), regrettant l’incapacité du cinéma à reproduire visuelle les expérimentations psychédéliques. Pourtant, il semble que les formes filmiques peuvent retranscrire les visions mentales issues de la prise de drogue et des états modifiés de conscience permis par la pratique du chamanisme. Justement, Enter the Void (Gaspar Noé, 2009), L’Etreinte du Serpent (Ciro Guerra, 2015) et Blueberry (Jan Kounen, 2004) ont en commun le thème du voyage, du « trip », aussi bien voyage sous drogue, voyage de l’esprit et de la conscience qu’un voyage physique, et pourraient très bien illustrer l’idée du voyage chamanique incarnée par la figure du chamane, qui « parvient à accéder à un univers entièrement nouveau, pourtant familier et ancien, qui lui fournit des informations profondes à propos du sens de sa propre vie et de sa propre mort, ainsi que sur sa place dans la totalité de toute existence », selon l’anthropologue Michael Harner (La voie du chamane, Mama Editions, Péronnas, 2016, p.57). Comment ces trois films choisissent de représenter à l’écran des visions intérieures liées à la prise de psychédéliques ? Et par quelles images et narrations ces trois films peuvent s’illustrer comme un voyage chamanique, illustration du Livre des Morts Tibétain ? Il s’agira d’étudier comment le voyage, le trip physique est traité sous ses différentes formes, selon les stylèmes psychédéliques et la tradition chamanique, avant d’analyser la représentation de l’invisible à travers la prise de drogues et de plante hallucinogène. Enfin, par l’analyse de l’esthétique de ces visions, nous traiterons de la question de l’animisme et de l’Homme Unidimensionnel.
L’arrêt sur image, comme procédé cinématographique figeant l’espace et le temps, est particulièrement utilisé dans différents road movies, genre qui, à l’opposé, met au premier plan le mouvement en avant. L’arrêt sur image appliqué au road movie permettrait de suspendre la mobilité, dans un effet de « stase », puisque l’iconographie du genre participe à la mise en place d’une « pause », d’un arrêt dans le récit, où l’image de la route peut tendre à l’abstraction en étant réduite à ses lignes de fuite. Avec ces lignes infinies convergeant vers un horizon inatteignable, le paysage du désert, dépouillé à l’extrême, « suspend » le moment et l’arrêt sur image vient appuyer cette interruption du mouvement. Ainsi, ma communication propose d’étudier ce mouvement figé dans le road movie, allant de la « stase » et de l’iconisation (Thelma et Louise) à la disparition (Point Limite Zéro), jusqu’à la destruction radicale (Macadam à deux voies) ; l’arrêt sur image fixant l’héroïsation des personnages comme pour conjurer leur mort annoncée, l’issue fatale étant constitutive du genre filmique.
lutte contre les discriminations.
Comité d'organisation et de rédaction de Traits d'Union :
Marija Apostolovic, Eve Benhamou, Myriam Boulin, Priscilla Coutinho, Marie Grenon, Justine Le Floc'h, Claire Salles, Guglielmo Scafirimuto, Héloïse Van Appelghem, Aliette Ventéjoux.
Programme sur : https://centerinparis.uchicago.edu/events/20210402intersectionnalitecinema
Parmi les longs métrages sélectionnés : Le grain et l’ivraie de Fernando Solanas, In Jackson Heights de Frederick Wiseman, La cordillère des songes de Patricio Guzmán, Batallas íntimas de Lucía Gajá, La fin des terres de Loïc Darses, et O processo de Maria Ramos.
Ma communication s'intitulait "Féminisme et antispécisme : relier condition animale et figure de la « femme sauvage » dans les road movies" et montrait comment, dans les road movies, le lien entre femmes et animaux oscille entre harmonie au sein de la « wilderness », dans une dimension écoféministe, et dénonciation d’un système capitaliste reliant patriarcat et spécisme.
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By studying three examples of contemporary Anglo-Saxon cinema aimed at the “general public” and released at the end of the 2010s, this article aims to show different political readings and problems posed by the complexity of the concept of intersectionality in cinema. The article starts from the phenomenon of feminism-washing, which is recurrent in the Hollywood industry and waters down feminist issues. First, the concept of intersectionality would thus serve to go beyond the question of gender to decrypt cinematographic representations in a more complete way, by analyzing the gender-class-race triptych in fiction. In a second step, beyond intersectionality as an analytical tool, the concept can be solicited on the side of the production or on the side of the audience in the reception, operating different discourses on a film: Antebellum bases its script and promotion on an intersectional discourse, striving to examine the intersection of different discriminations through the lens of the Black Horror genre, while Suffragettes makes the choice to invisibilize the parameter of race oppression in favor of class. In the case of Joker, the ambivalence of the film's discourse leads to a “double speak” (for the press and the public), where the hero is interpreted as a representative of class struggle sharing the oppression of black women, while also being read as an incel, a symbolic figure of misogyny and the white American far right. Between recuperation, vindication, invisibilization and contradictory discourses, the three films studied exemplify different discourses on intersectionality (or that have been attributed to them), to the point of including certain limits.
Disponible en ligne : https://cinema.institutdesameriques.fr/2019/09/18/batallas-intimas-de-lucia-gaja-mexique-2016/
Est-ce le sujet choisi d'un documentaire qui permet de le rendre « engagé » ? Ou bien peut-on envisager que les formes filmiques, par le montage, la mise en scène, construisent l'engagement d'un documentaire ? Ces questions sont légitimes, dans le contexte de la tenue du Festival documentaire de l'Institut des Amériques, qui pousse à nous interroger, chercheur.e.s, comme grand public, sur l'étiquette apposée au genre du documentaire, à sa possible puissance militante, et son degré de subjectivité. Proposer une réflexion sur le droit des femmes et leur émancipation, et dénoncer les violences sexistes qu'elles rencontrent dans le monde constitue déjà une forme d'engagement, et donc un premier niveau de discours. Ce discours social peut être appuyé par l'esthétisme de l'oeuvre : le choix du cadrage, des angles de caméra, de la mise en scène (lumière, colorimétrie, sons…) et du montage va faire émerger des problématiques sociologiques et anthropologiques propres au sujet du film. L'approche gender studies induite par le thème de Batallas Intímas fonctionne de pair avec une lecture esthétique par l'analyse filmique des paramètres audiovisuels, comme je tâcherai de le montrer dans cet article.
Le scandale Weinstein a entraîné une remise en question de l’industrie cinématographique hollywoodienne, tout comme la lecture de certaines œuvres. Le médium filmique nous permet d’évaluer notre propre rapport au monde, en étudiant par exemple la représentation des femmes, leur place aussi bien dans la société qu’au cinéma. Porter un nouveau regard sur notre capacité à considérer les femmes comme des personnages à part entière dans la fiction permet aux chercheurs et chercheuses comme au grand public de mettre au jour les inégalités économiques et la sous-représentation féminine au cinéma. Au prisme des cultural and gender studies, la réception et l’interprétation des films permettent de lier représentations sexistes passées et questionnements du présent, et donc de présentifier autrement les inégalités de genre.
Dans quelle mesure les représentations cinématographiques peuvent-elles révéler des inégalités de sexe et de genre de notre société contemporaine ? Comment penser l’actualité des droits des femmes au regard des représentations visuelles ?
perspective différente. S’inscrivant dans le champ disciplinaire des cultural studies, elle développe l’hypothèse selon laquelle la pin-up peut être vue comme un personnage féministe. Cette idée est confrontée à une analyse esthétique approfondie à partir d’un riche corpus de films (des archétypes de pin-up regroupant des personnages de fiction, des actrices, et un genre filmique : le fantastique) et de leurs paratextes (affiches, images publicitaires, critiques, photographies…).