Chronique des activités archéologiques de
l’École française de Rome
Italie du Sud | 2013
Cumes
Campagne de fouilles 2012
Jean-Pierre Brun, Priscilla Munzi, Laetitia Cavassa, Guilhem Chapelin,
Anselme Cormier, Henri Duday, Sandy Gualandi, Stéphanie Le Berre,
Bastien Lemaire, Nicola Meluziis, Dorothée Neyme, John-Marc Piffeteau
et Arnaud Watel
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/cefr/989
DOI : 10.4000/cefr.989
ISSN : 2282-5703
Éditeur
École française de Rome
Référence électronique
Jean-Pierre Brun, Priscilla Munzi, Laetitia Cavassa, Guilhem Chapelin, Anselme Cormier, Henri Duday,
Sandy Gualandi, Stéphanie Le Berre, Bastien Lemaire, Nicola Meluziis, Dorothée Neyme, John-Marc
Piffeteau et Arnaud Watel, « Cumes », Chronique des activités archéologiques de l’École française de
Rome [En ligne], Italie du Sud, mis en ligne le 28 juin 2013, consulté le 19 avril 2019. URL : http://
journals.openedition.org/cefr/989 ; DOI : 10.4000/cefr.989
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© École française de Rome
Cumes
Cumes
Campagne de fouilles 2012
Jean-Pierre Brun, Priscilla Munzi, Laëtitia Cavassa, Guilhem Chapelin,
Anselme Cormier, Henri Duday, Sandy Gualandi, Stéphanie Le Berre,
Bastien Lemaire, Nicola Meluziis, Dorothée Neyme, John-Marc Piffeteau
et Arnaud Watel
NOTE DE L’ÉDITEUR
La campagne de fouilles 2012 a été réalisée avec la collaboration de Benjamin Bauvit,
Ophélie Candelier, Carine Deal, Barbara Del Mastro, Gianluca D’Avino, Florian Jedrusiak,
Stéphanie Max-Dubos. Anthropologie funéraire : Sélim Djouad (Hadès - Archéologie),
Justine Petit. Topographie et DAO : Guilhem Chapelin, Jacques-Adrien Delorme. Relevés au
laser scanner 3D : Luciano Fattore, Luca Pelella (ARCA sas).
Les recherches à l'extérieur de la Porte Médiane de Cumes ont été poursuivies, grâce aux
crédits du Ministère des Affaires Etrangères et en collaboration avec la Soprintendenza
Speciale per i Beni archeologici di Napoli e Pompei e l’Ufficio per i beni archeologici di Cuma.
1
À Cumes, les fouilles en cours depuis 2001 portent sur la zone située à l’extérieur de la
porte centrale (dite Porte Médiane) des remparts nord de la ville. Sous l’Empire romain,
cette dernière ouvrait sur un carrefour distribuant trois voies, chacune bordée de
monuments funéraires : l’une s’échappait vers l’ouest en longeant les fortifications, une
autre se dirigeait vers le nord en direction de Capoue, tandis que la troisième filait vers
l’est et les collines du Monte Grillo. De nombreux monuments funéraires longeaient les
trois axes. La campagne de fouilles qui s’est déroulée entre le 4 juin et le 13 juillet 2012 a
porté sur les monuments bordant la place (fig. 1)1.
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Cumes
Fig. 1 - Cumes. Plan de la nécropole septentrionale de la Porte Médiane.
Réel. G. Chapelin, CJB CNRS-EFR.
2
Les recherches se sont concentrées sur deux secteurs névralgiques pour la
compréhension de l’évolution chronologique de la nécropole à proximité de la Porte
Médiane. Ces interventions ont, d’autre part, répondu aux demandes de la Surintendance
en prévision de l'ouverture de cette zone du parc archéologique au public.
3
La première opération a eu lieu dans le secteur situé le long des marges orientales de
l’espace dallé devant la porte, secteur qui avait été exploré de façon préliminaire en 2006
par l’Università degli Studi di Napoli « L’Orientale ». Les fouilles ont permis de dégager en
extension une partie de la nécropole monumentale de la ville en mettant au jour une série
d’édifices funéraires (D46A, D46B, D58, D59).
4
La deuxième opération a permis de compléter l’exploration du secteur situé au carrefour
entre l’axe nord-sud pour Capoue et la via Domitiana où les recherches récentes avaient
permis de dégager deux monuments funéraires – A41 en 2006 et A40 en 2010 – datés du II e
- IIIe siècle ap. J.-C. L’intervention sur le terrain s’est concentrée cette année sur
l’ensemble funéraire A56.
Le monument funéraire D46
5
Au cours de l’automne 2011, une petite opération s’est déroulée dans un secteur de la
nécropole situé à proximité immédiate de la Porte Médiane, qui avait été précédemment
en partie dégagé par l’Università degli Studi di Napoli « L’Orientale ». Les pluies avaient laissé
apparaître, immédiatement au nord-est de la Porte, trois stèles (cippi) en tuf portant des
inscriptions, deux en osque et une en latin. Ces stèles sont alignées, la face tournée vers la
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Cumes
voie qui se dirige vers le nord. La fouille avait révélé une situation stratigraphique plus
complexe que prévue. Il ne s’agissait pas de trois tombes à crémation, comme on le
présumait à la suite de la fouille d’une quarantaine de sépultures de ce type, mais d’un
ensemble jusqu’alors inconnu : les trois cippi inscrits, avec des traces de revêtement
d’enduit blanc, reposaient sur le bloc de sommet de la façade d’un mausolée à chambre
hypogée D46 (fig. 2).
Fig. 2 - Cumes. Mausolée D46, vue des trois cippi inscrits.
Cliché CJB CNRS-EFR.
6
Faute de temps, l’intervention avait due être interrompue ; elle a repris lors de la
campagne de fouille de l’été 2012.
7
Situé à une trentaine de mètres de la porte de la cité, le mausolée D46, précisé comme
MSL46070, est en partie ceinturé par des monuments en élévation d’époques postérieures
et se situe à proximité des monuments funéraires D58 et D59, également fouillés cette
année. Sans doute était-il établi à proximité immédiate du départ de la voie qui filait vers
le nord.
8
Le monument (fig. 3) est de plan rectangulaire de 3,55 m sur 2,75 m2, constitué de blocs de
tuf équarris assemblés sans liant et dont les dimensions varient entre 0,55 et 1,20 m de
longueur, pour une largeur à peu près constante, entre 0,35 m et 0,40 m, et une épaisseur
de 0,40 m en moyenne. L’orientation générale indique l’entrée vers l’ouest, légèrement
sud-ouest, en direction du carrefour des trois voies.
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Fig. 3 - Cumes. Plan du mausolée D46.
G. Chapelin et J.-A. Delorme, CJB CNRS-EFR.
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La construction, que des pilleurs avaient malheureusement déjà visité probablement au
cours du XIXe siècle, abrite une chambre funéraire (fig. 4-5) de 2,71 m par 1,85 m, voûtée
en plein cintre (VT46091), dans laquelle on accédait par une entrée à sommet semicirculaire (US 46085).
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Fig. 4 - Cumes. Mausolée D46, vue intérieure ouest.
Cliché CJB CNRS-EFR.
Fig. 5 - Cumes. Mausolée D46, vue intérieure est.
Cliché CJB CNRS-EFR.
10
Cette entrée présente un seuil légèrement plus bas que le sol dallé (SL46092) du mausolée.
Sur le sol extérieur repose un lourd bloc monolithe de tuf équarri obstruant l’entrée
(US 46086), appuyé contre la paroi externe. L’emplacement de la porte, dans le mur ouest
(MR46087), est décalé franchement sur la gauche. La première conséquence visible est
l’empiétement du lit sud (SP46084) sur le passage, ce qui indique clairement la mise en
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place postérieure de cette sépulture, par rapport à l’édification du monument et sa
première utilisation.
11
Les parois verticales, d’une hauteur de 1,10 m à partir du sol, sont délimitées en leur faîte
par une corniche sobrement moulurée. À partir des parois nord et sud, cette corniche
marque le début de la voûte, qui culmine à 2,35 m de hauteur à partir du sol.
12
L’ensemble est revêtu d’un enduit blanc (US 46258), très détérioré par le temps et
l’humidité. La partie basse du mur ouest (MR46087), contre lequel est appuyé le lit nord
(SP46082), est quant à elle peinte de rouge, sur une hauteur dépassant de peu celle du lit.
La plinthe rouge se prolonge sur le mur nord (MR46088), à même hauteur. Cet enduit
rouge est manifestement présent sur les parties des deux parois cachées par la
maçonnerie du lit. Il s’agit bel et bien d’un indice sur les différentes phases du mausolée,
nous indiquant que la sépulture nord serait postérieure à la phase d’origine, mais sans
doute antérieure à la sépulture sud.
13
Quant à la corniche, elle était recouverte au moment de la fouille par une fine épaisseur
de terre compacte, laissant à certains endroits apparaître en négatif les emplacements de
mobilier, sans doute de petits vases, qui furent subtilisés au moment du pillage. La fouille
a également livré en huit endroits des éléments et fragments d’os travaillé en nombre
conséquent, accompagnés de clous à large tête et de restes altérés par la décomposition
de ce qui semble être du bois, probablement des restes de coffrets.
14
L’édifice renfermait trois sépultures : un caisson recouvert de dalles rectangulaires et
carrées (SP46083) le long de la paroi est, ainsi que deux lits funéraires maçonnés, l’un
contre la paroi nord (SP46082) et l’autre contre la paroi sud (SP46084). Chacune de ces
sépultures avait accueilli un corps inhumé, dont la disposition des ossements avait été
fortement perturbée par les pillages : ceux des lits nord et sud ont été retrouvés en partie
repoussés et concentrés en un seul endroit de la sépulture, le reste éparpillé, tandis que
l’intérieur du caisson est avait été fortement remanié.
15
La présence de la nappe phréatique assez haute n’a pas permis de fouiller
minutieusement le couloir entre les sépultures ainsi que le fond de l’entrée (US 46072).
16
L’observation des données nous permet d’appréhender la chronologie du monument D46
en trois états : utilisation, abandon et pillage. Le premier état comporte trois phases : son
édification (MSL46070) et une première déposition (SQ46256) en relation avec le caisson
est (SP46083) ; une deuxième avec la construction du lit nord (SP46082) et la déposition
qui l’accompagne (US 46096) ; enfin une troisième phase, qui voit la construction, peutêtre en urgence, du lit sud (SP46084) pour la dernière inhumation (US 46097). Les trois
cippes ornant le monument à l’extérieur correspondent de toute évidence aux trois
sépultures de l’intérieur.
17
Un point reste cependant obscur en l’état actuel des recherches : il n’a pas encore été
possible de déterminer le mode d’accès à la chambre à cause de la présence, à l’ouest du
mausolée et donc devant l’entrée, d’une énorme fosse de pillage perturbant toute la
stratigraphie jusqu’à trois mètres de profondeur3.
18
Quant à la datation, les indices sont pour le moment peu nombreux. L’édifice est implanté
dans un espace funéraire utilisé comme tel au moins depuis le IVe siècle av. J.-C., comme
l’ont prouvé des sondages effectués en 2009 en zone 664, mais sur la base de la typologie
du monument et des comparaisons effectuées, un rapprochement s’opère de lui-même
avec le monument D29 fouillé en 2010, qui s’est révélé être celui ouvert par le chanoine
Andrea de Jorio en mai 1819 et qualifié par lui de « sepolcro misto »5. Cette comparaison
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ferait ainsi remonter le mausolée D46 au IIe siècle av. J.-C., au plus bas aux premières
décennies du Ier, selon la proposition de datation des inscriptions sur les cippes émise par
Giuseppe Camodeca. L’étude du mobilier et en particulier de la pièce de monnaie mise au
jour dans le lit nord permettra peut-être de confirmer cette hypothèse.
Le secteur 46B
19
En 2006, l’Università degli studi di Napoli « L’Orientale » avait dégagé partiellement les murs
de l’ensemble funéraire EFN46104 et du mausolée D58, en s’arrêtant sur des niveaux de
sol correspondants aux derniers états de la zone (fig. 1).
20
La campagne de l’été 2012 avait pour but de reprendre la suite des travaux de l’Université
« L’Orientale », afin de comprendre l’articulation de l’espace central du secteur 46B et de
pouvoir en observer les états antérieurs.
21
Au sein du secteur D46B, les recherches de cette année ont révélé quatre grandes phases
d’occupation funéraire, allant du Ier siècle av. J.-C. au Haut Moyen Âge, ainsi qu’une phase
d’occupation moderne, ceci sur un horizon stratigraphique de 1,27 m à 5,7 m s.l.m.
d’altitude (fig. 6).
Fig. 6 - Cumes. Secteur 46B, plan de détail.
B. Lemaire, St. Le Berre, CJB CNRS-EFR.
22
À la phase la plus ancienne (état 1), probablement liée au réaménagement du mausolée
D46 est associée la sépulture à inhumation à fosse et sous tuiles en bâtière (SP46188).
23
Dans le courant du Ier s. av. J.-C., lui succède un programme de construction funéraire
plus monumental (état 2) (fig. 7).
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Fig. 7 - Cumes. Secteur 46, vue générale de l’est.
Cliché CJB CNRS-EFR.
24
Sont érigés le mausolée MSL46175 en opus vittatum dans la partie nord de la zone
(partiellement dégagé cette année) puis un second mausolée avec chambre hypogée
(MSL46144) de plan rectangulaire en opus quasi-reticulatum au centre du secteur.
25
Le mausolée MSL46175 en opus vittatum n’a été que partiellement observé dans sa partie
sud. Il est réalisé en petits blocs rectangulaires de tuf jaune taillés et liés par un mortier
gris. Seulement trois assises du mur sud ont pu être identifiées et une corniche a été mise
en évidence sur son parement nord. Les parements nord et sud de ce mur sont recouverts
d’un enduit blanc. Sur cette façade, le mausolée n'était donc pas hypogée.
26
Le mausolée MSL46144 est directement installé contre le parement sud du mausolée
MSL46175. Il s’agit d’un monument hypogée dont les murs semblent construits contre
terre, à l'exception du mur nord qui s'appuie sur le mausolée antérieur MSL46175. En
effet, les murs sont construits en opus quasi-reticulatum, mais ne sont pas enduits sur leurs
faces externes6. On remarque notamment que les murs du monument ne sont pas chaînés
et se sont fissurés suite à des mouvements de terrain.
27
Le plan de ce monument est légèrement trapézoïdal. Les murs nord et sud, mesurent 3 m
de longueur. Le mur est mesure 2,75 m de long et la paroi ouest du mausolée mesure
2,96 m de long. La superficie interne du monument est de 3,9 m² (2 x 2 x 2,06 x 1,92 m). Le
mur nord est moins large que les autres.
28
Lors de la fouille de ce monument, bien que très remanié lors d’états postérieurs, deux
phases d’utilisation du mausolée ont pu être distinguées.
29
Dans un premier temps, le mausolée MSL46144, connaît un aménagement de la chambre
funéraire dont il ne nous reste que peu de traces. Cet aménagement comporte une
structure bâtie semi-circulaire SB46184, située au centre de la paroi sud. Cette structure
est réalisée en opus incertum de moellons de tuf jaune liés par du mortier gris. Au centre
de sa partie supérieure, se trouve le négatif d’un élément de forme arrondie. Quelques
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traces laissent envisager des structures identiques au centre des murs nord et est. Ce
premier état de la chambre funéraire pourrait donc présenter un (avéré) ou plusieurs
aménagements semi-circulaires, dont la fonction est incertaine (support d’urne
funéraire ?).
30
Dans un second temps, la chambre est réaménagée et deux lits funéraires sont installés.
Ce changement est principalement visible dans la partie sud du monument, dans laquelle
le lit (SP46150) était encore conservé. L’observation des arrachements dans le mortier
permet de restituer un second lit funéraire, dans la partie nord du mausolée, en face du
premier, entièrement détruit par la suite lors des réaménagements de la zone7.
Correspondant à cette phase, un sol en béton de tuileau partiellement conservé (SL46177)
a pu être observé le long du lit funéraire et essentiellement dans l’angle sud-est.
31
La zone est restructurée au début du IIe s. av. J.-C. après la construction de la via Domitiana
et l’aménagement de l’espace dallé devant la Porte : de nouveaux ensembles funéraires
sont construits sur le côté est de la place.
32
Lors de l’état 3 (fig. 8), l’espace change de fonction : après l’arasement des monuments
MSL46175 et MSL46144, le niveau de circulation est rehaussé et la zone est clôturée à
l’ouest, à l’est et au nord par un ensemble de murs (EFN46104), le côté sud étant occupé
par l’escalier du second état du mausolée D58 (Cfr. infra).
Fig. 8 - Cumes. Secteur 46B, vue générale du nord.
Cliché CJB CNRS-EFR.
33
Les murs sont en opus reticulatum, chaînés aux angles en opus vittatum et construits sur des
fondations débordantes. Ils sont enduits d’un épais mortier (0,03 m) de chaux blanche,
contenant de grosses inclusions de tuileau et lissé en surface. Leurs orientations
divergent d’environ 5 degrés vers l’ouest par rapport au mausolée précédent. Trois accès
sont également aménagés desservant les espaces donnant sur l'espace dallé devant la
Porte Médiane, et un bassin est construit dans le quart nord-ouest de la zone. La
stratigraphie de l’espace central montre différents niveaux de sol ou d’occupation.
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Dans une phase ultérieure, le mur nord de l’ensemble funéraire EFN46104 est réaménagé
pour la mise en place d’un massif de maçonnerie parallélépipédique en opus reticulatum
(SB46101), partiellement dégagé et pouvant correspondre à un aménagement funéraire.
35
Dans un quatrième temps, l’enclos EFN46104 est remblayé. La zone garde son caractère
funéraire puisque qu’une sépulture à inhumation à tuiles en bâtière (SP46100), datée
entre l’antiquité tardive et le Haut Moyen Âge, a été mise au jour dans la berme nord du
secteur.
36
Enfin, à l’époque moderne, de grands travaux de pillage ou de terrassement sont
entrepris : une vaste et profonde fosse vient recouper et perturber une grande partie des
niveaux de la moitié orientale du secteur (FS46140).
Le Mausolée D58
37
Le monument funéraire D58 fait partie des nouveaux ensembles funéraires qui sont
édifiés, entre la fin du Ier s. et le début du IIe s. av. J.-C., après la construction de la via
Domitiana et l’aménagement de l’espace dallé devant la Porte. Le monument est de forme
rectangulaire (L. : 7,10 m ; l. : 5,75 m). De la chambre funéraire semi-hypogée, n’émerge
au-dessus du niveau de la place, qu’une partie constituant probablement le podium
entrant dans la composition extérieure. Bien que nous n’ayons que peu de données
concernant la forme réelle de l’élévation du monument, nous pouvons émettre des
hypothèses en nous basant sur des comparaisons typologiques avec d’autres monuments.
Il convient pour cela de tenir compte du fait que la grande base rectangulaire dans
laquelle est construite la chambre funéraire hypogée, fonctionne comme substruction et
devait recevoir une élévation de type « à édicule » en opus quadratum de calcaire dont les
blocs ont été récupérés lors de l’Antiquité tardive. Le nettoyage du mausolée a mis en
évidence plusieurs phases d’utilisations de la structure, dont certaines ont entraîné
d’importantes modifications structurelles.
38
La première phase (état 1) concerne la construction du monument (MSL5857) et la
première utilisation de la chambre funéraire. Les murs sont composés d’un blocage
interne en béton dépourvu de parement sur les parties des faces extérieures destinées à
être enterrées et ont un parement en opus reticulatum sur les parties émergentes. Les
parois internes sont en opus vittatum disposé en assises de 0,08 m de hauteur en moyenne.
La chambre hypogée de forme rectangulaire mesure dans un premier temps 5,81 m de
longueur pour 4,45 m de largeur avec une hauteur maximale de 4,34 m (fig. 9).
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Fig. 9 - Cumes. Mausolée D58, plan de l’intérieur et coupe ouest-est.
Relevé et DAO : J.-A. Delorme, G. Chapelin, N. Meluziis (CJB CNRS-EFR).
39
Dans les quatre angles de la pièce des piédroits également en opus vittatum (MR58024 au
nord-est, MR58025 au sud-est, MR58026 au sud-ouest, MR58027 au nord-ouest) portent
des arcs (MR58028, MR58029, MR58030, MR58031) qui, à leur tour, soutiennent une voûte
d’arête en béton (VT58021) (fig. 10-11).
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Fig. 10 - Cumes. Mausolée D58, vue de l’intérieur de la chambre funéraire de l’ouest.
Cliché CJB CNRS-EFR.
Fig. 11 - Cumes, Mausolée D58, vue de l’intérieur de la chambre funéraire, nuage de points.
Relevé au Laser scann 3D : L. Fattore, L. Pelella, ARCA sas.
40
Naturellement, la chambre étant partiellement enterrée, ces arcs sont aveugles, bouchés
par des murs (MR58011, MR58012, MR58013, MR58014) légèrement en retrait. Pendant
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cette première phase, l’entrée de la chambre se fait au sud par une porte (PR58019) située
dans la partie est du mur MR58013 (fig. 12).
Fig. 12 - Cumes. Mausolée D58, vue orthogonale de la face interne sud, nuage de points et image
en niveau de gris.
Relevé au Laser scann 3D : L. Fattore, L. Pelella, ARCA sas.
41
Cette porte est bouchée dans une phase ultérieure. Sous les arcs les dimensions des parois
en retrait sont de 3,69 m au nord (MR58011) et 3,70 m au sud (MR58013). Les parois est
(MR58012) et ouest (MR58014), de même hauteur, ont des longueurs inférieures (3,07 m et
2,98 m). Les murs nord, est et sud portent des trous réservés lors de la pose des moellons
(le mur ouest de la même phase n’est pas observable). Il est probable compte tenu de leur
disposition qu’il s’agisse de logements destinés à caler les cintres ayant servi à construire
les arcs et peut-être aussi celui de la voûte. La voûte présente en sous face le moulage des
planches sur lesquelles elle a été coulée ainsi qu’en partie centrale le négatif d’un élément
parallélépipédique (L. : 1,15 m ; l. : 1,15 m ; h. : 0,10 m environ) malheureusement
endommagé par un percement moderne.
42
Les arcs ont des portées égales à la longueur des murs qui les ferment et ont des flèches
de 1,30 m. À l’est et à l’ouest, ils sont chacun constitués de 44 claveaux trapézoïdaux de
tuf volcanique jaune dont les mesures moyennes sont 0,08 m à l’intrados et 0,11 m à
l’extrados. Au nord et au sud, les arcs ont un nombre de claveaux qui s’élève à 50 à quoi il
faut ajouter de chaque côté un sommier constitué de 3 moellons équarris ajustés. Dans les
quatre cas les parements clavés des arcs sont surmontés d'assises horizontales. Au niveau
de la clé, le dernier claveau placé est beaucoup plus fin que les autres.
43
Le sol de la chambre (SL58006) est réalisé en béton gris grossièrement lissé sur lequel, des
traces d’un mortier blanc (US 58058) laissent supposer la présence de sarcophages ( ?)
posés à même le sol. Ces traces sont notamment visibles sur le côté est de la chambre sur
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une longueur d’environ 1,60 m. Enfin, il semblerait qu’aucun revêtement n’ait été
appliqué sur les parois dans cette phase.
44
Au cours du IIe s. ap. J.-C., ce secteur situé à l’est de la place connaît une série de
transformations. Au sud-ouest du mausolée D58 (état 2 : MSL58010) est accolé un nouveau
columbarium (D59) qui interdit probablement l’utilisation de l’accès original à la porte
PR58019. Ceci a pour conséquence la construction au nord d’un nouveau dromos (ES58010)
accessible depuis l’enclos funéraire EFN46104 et le percement d’une nouvelle porte
d’accès (PR58017) (fig. 13).
Fig. 13 - Cumes. Mausolée D58, vue de l’intérieur de la chambre funéraire de l’angle sud-ouest.
Cliché CJB CNRS-EFR.
45
La paroi externe du dromos, observable sur le côté nord jusqu’à 1,40 m de hauteur, est
revêtue d’un parement en opus reticulatum de moellons de tuf volcanique jaune. Par la
suite, sont effectués des travaux importants le long de la façade ouest du mausolée D58
dont le mur est profondément démaigri sur toute sa hauteur émergeant du sol (secteur
D58B). Entre le monument et la place une importante coulée de béton est effectuée sur
30 m2 environ afin de servir de base une construction en grand appareil dont la
restitution est rendue impossible par la totale spoliation des blocs de l’élévation. Ces
interventions affectent alors légèrement le columbarium D59 dont le mur nord est retaillé.
46
Dans le dromos ES58010, le nouvel escalier d’accès (fig. 14) à la chambre funéraire,
parallèle au mur MR58011, est large de 0,90 m et est composé d’une volée de 15 marches
monolithiques en bas desquelles se rencontre un palier de même largeur et long de
1,43 m.
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Fig. 14 - Cumes. Mausolée D58, vue du dromos ES58010 depuis le haut de l’escalier.
Cliché CJB CNRS-EFR.
47
Il est couvert par une voûte en béton (VT58080) sur l’extrados de laquelle est aménagée
une rampe (US 58082) qui sert probablement d’accès au niveau supérieur du mausolée. La
porte PR58017 a une largeur de 0,81 m et une hauteur de 1,29 m. Situés dans le plan du
parement extérieur du mur MR58011, le seuil, les piédroits et le linteau sont réalisés en
blocs de basalte et présentent une feuillure de 4 à 4,5 cm de profondeur. On note la
présence d'une crapaudine située sur le seuil du côté est et un arrachement lui faisant
face sur le linteau qui permettent la restitution d’une porte s’ouvrant vers l’intérieur.
Dans cette phase, l’intérieur de la chambre aussi subit d’importantes modifications. Il
semblerait que les pratiques funéraires en relation avec ce mausolée aient changé,
passant de l’inhumation à la crémation. En effet, si dans un premier temps des
sarcophages ont pris place dans la chambre comme le laissent supposer les traces de
mortier au sol, des niches sont ensuite creusées dans l’épaisseur des quatre murs et des
piédroits d’angle. Celles-ci accueillent des urnes cinéraires de type « Vecchio 22.28 »
scellées dans la maçonnerie, qui s’ouvrent au niveau de leur sol. La paroi septentrionale
(MR58011), outre la porte d’accès, comporte quatre niches s’ouvrant à 1,12 m de hauteur
au-dessus du sol. Dans la paroi orientale (MR58012), cinq niches sont aménagées, toutes à
une hauteur de 1,10 m. Des restes d’enduit blanc semblent mettre en valeur la niche
centrale. Six niches sont creusées dans la paroi méridionale dont les deux plus orientales
se situent dans le bouchage en opus vittatum de la porte PR58019 (MR58020). Il est possible
que dans cette phase la paroi occidentale ait accueilli cinq niches comme celle lui faisant
face. L’observation en est rendue impossible à cause du doublage du mur MR58014 par un
autre mur (MR58015), peut-être destiné à aménager d’autres niches ou à renforcer
l’extrémité supérieure de cette paroi amincie par les creusements pratiqués à l’extérieur.
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
15
Cumes
La construction de ce mur réduit la longueur de la pièce la faisant passer de 5,81 m à
5,22 m. Le premier mur ne se voit que dans son épaisseur dans un grand creusement
effectué à l’époque moderne où l’on distingue seulement, du côté nord, le négatif d’une
urne et le fond d’une niche vu en coupe. Le mur de doublage (MR58015) réalisé sous l’arc
(MR58031) est la dernière phase constructive identifiable et présente deux niches
complètes sur les cinq restituables. Contrairement à toutes les autres niches simplement
creusées dans les murs suivant un tracé incisé à la pointe, celles du mur de doublage sont
prévues dès sa conception. Leurs parements intérieurs et l’arc réalisé dans le parement en
moellons clavés en témoignent. Les urnes, contrairement à celles des autres niches ne
semblent pas prises dans la maçonnerie sous le niveau de sol de la niche mais posées dans
la niche scellées par un mortier. Dans les angles, les piédroits des arcs sont chacun
creusés d’une niche à l’exception de celui du sud-ouest qui, si une urne supplémentaire
avait dû être placée dans ce mausolée, en aurait été l’emplacement logique. Au total 23
sépultures sont attestées et six autres, hypothétiques mais probables, porteraient ce
nombre à 28. Après la fin de son utilisation en tant qu’espace funéraire, le monument a
sans doute fait l’objet de multiples spoliations notamment en ce qui concerne ses
élévations. C’est probablement au cours du XIXe s. ap. J.-C. que des fouilleurs clandestins
réalisent un trou au sommet de la voûte pour accéder à la chambre ainsi que ce grand
creusement dans la double paroi ouest. Ce dernier semble être une tentative infructueuse
de pillage qui, après avoir traversé les deux murs, a atteint le colossal volume de béton
coulé à l’extérieur. Il est à noter la présence d’un creusement dans le sol au centre de la
pièce, qui a peut-être été fait dans le but de capter l’eau de la nappe phréatique qui
aujourd’hui, selon les saisons, remonte de quelques dizaines de centimètres dans la
chambre. Cette hypothèse permettrait d’interpréter le trou dans la voûte comme une
ouverture destinée au puisage.
Le monument funéraire D59
48
Le mausolée D59, précisé comme MSL59001, est le monument funéraire le plus méridional
de la nécropole romaine de la Porte Médiane. Il est entouré du mausolée D58 au nord-est,
d’une structure à vocation vraisemblablement funéraire au nord (secteur D58B) et des
bâtiments de la Porta Mediana au sud. Sa surface interne est d’environ 25 m2.
49
Le mausolée D59 a déjà fait l’objet d’une première fouille menée par l’Università degli Studi
di Napoli « L’Orientale » en 20068. Ces recherches ont été arrêtées sur plusieurs niveaux
dont le plus reconnaissable lors de la reprise en 2012 était l’US 59007. Cette couche a
initialement été identifiée comme un niveau de sol fonctionnant avec le four FR59006
dont seule la surface avait été mise au jour, ce qui a contribué à l’interpréter comme un
foyer d’époque tardive. Une inhumation avait également été prélevée contre le mur sud
(MR59002). Implantée selon un axe est-ouest, elle daterait du VIIe siècle de notre ère 9.
D’autres niveaux indéterminés étaient enfin visibles, dont l’US 59015, niveau d’argile
s’étendant sur la quasi-totalité de la moitié ouest de l’édifice (fig. 15).
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
16
Cumes
Fig. 15 - Cumes. Mausolée A59, vue de l’intérieur de la chambre funéraire lors de la reprise des
fouilles en 2012.
Cliché CJB CNRS-EFR.
50
En l’état actuel des recherches, le phasage du mausolée D59 repose essentiellement sur
des éléments de chronologie relative, l’étude du mobilier n’étant pas achevée. Précisons
également que la fouille de 2012 n’a pas dégagé le sol originel du monument dans sa
totalité (les fours ont été laissés en place). De plus, plusieurs structures en creux gênent la
compréhension des relations stratigraphiques. C’est notamment le cas d’une fosse
(FS59022) qui a fortement perturbé le secteur nord-ouest du mausolée, empêchant de
relier avec certitude l’un des seuils du mur ouest (MR59003) à des niveaux de sol.
51
On peut distinguer deux grands états du monument, l’un correspondant à la fonction
funéraire et l’autre se rapportant à l’utilisation du mausolée à des fins artisanales.
52
Le mausolée D59 est un édifice rectangulaire appartenant à la série des monuments
funéraires de type columbarium. Ses murs sont bâtis en appareil mixte d’opus vittatum et d’
opus reticulatum. L’intérieur du monument constitue la chambre funéraire, semi-enterrée,
qui est conçue pour recevoir des crémations. Au-dessus d’une fine corniche horizontale
composée de plusieurs moellons taillés viennent se greffer des séries de niches semicirculaires dont le nombre de voussoirs varie entre sept et huit. À l’exception des niches
disposées aux extrémités des murs, toutes possèdent des piédroits géminés sur lesquels
reposent les voûtes composées de blocs plus ou moins bien taillés. Sur ce niveau, deux
assises d’opus vittatum grossièrement maçonnées assurent la jonction avec l’appareil
réticulé qui se développe au-dessus. Le mur ouest (MR59003), dont la maçonnerie interne
est identique aux autres, au moins dans le traitement de l’appareillage, présente des loculi
ajourés. Ils sont clos par un mur parallèle et mitoyen. Manifestement antérieur, il
explique la solution architecturale adoptée.
53
En l’état actuel de conservation, il est impossible de savoir si un autre étage de niches a
existé. Le sol de la chambre (SL59041) est réalisé en béton gris grossièrement lissé.
54
Au moins deux phases correspondent à cette occupation. Dans la première (état 1A), le
seuil est aménagé au nord-est de l’édifice dans le mur MR59004 (PR59061).
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
17
Cumes
55
Par la suite, entre la fin du Ier et le II e siècle, le secteur à proximité de la Porte est
restructuré. Des grands travaux intéressent l’intérieur de la chambre funéraire et la
façade ouest du monument funéraire D58. De ce fait, l’entrée originelle menant à la
chambre funéraire du mausolée D59, est abandonnée et un nouvel accès est créé. Dans le
troisième tiers est du mur nord (MR59004) on repère un changement net de maçonnerie
(saignée verticale) avec la présence d’un opus vittatum venu combler un espace
initialement ouvert. Le mur MR59001 est en partie détruit sur sa moitié sud sur près de
deux mètres. Un seuil monolithique (SE59005) et un escalier (ES59014) sont alors mis en
place en substitution de cette première ouverture (état 1B).
56
En raison des nombreuses perturbations postérieures, le premier état du monument n’a
révélé aucun mobilier précisant sa datation. Néanmoins, l’analyse de l’architecture du
bâtiment permet de proposer quelques éléments de chronologie.
57
Le mausolée D59 s’appuie contre le mur sud du monument D58 dans sa première phase
d’utilisation et la monumentalisation que connaît ce dernier successivement entraîne des
modifications dans l’organisation de D59 qui se voit doter d’une nouvelle entrée.
58
Le mausolée perd sa fonction funéraire vraisemblablement au cours de l’Antiquité tardive
(état 2A : UNA59006). Deux fours à tuiles (FR59006 et FR59018) sont alors implantés sur le
sol d’origine (fig. 16)10.
Fig. 16 - Cumes. Mausolée A59, vue des deux fours FR59006 et FR59022 de l’ouest.
Cliché CJB CNRS-EFR.
59
Disposés contre la paroi est (MR59001), ils occupent environ les deux tiers de l’espace.
Une nouvelle entrée (PR59044) est aménagée dans le mur ouest (MR59003), près de l’angle
nord-ouest de l’édifice.
60
Le four FR59006, situé dans l’angle nord-est de l’espace, est de forme rectangulaire,
orienté est-ouest et bâti sur le niveau de sol antique du mausolée. Les parois nord et est
du monument constituent les cloisons externes du four, quant à la paroi sud elle est
réalisée au moyen de gros blocs de basalte et de tuf liés entre eux par du mortier. La
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
18
Cumes
chambre de chauffe est constituée de quatre rangées de murets transversaux alternés
d’espace latéraux qui permettent de faciliter la distribution de la chaleur. On distingue
sur deux des murets le départ d’arcs de voûtes, plus une voûte entièrement conservée.
Cet espace délimite un couloir central de chauffe. Les murets sont constitués de lits de
tegulae posées à plat. Elles supportent des tegulae positionnées de biais et qui forment le
départ des arcs. Il ne reste qu’un reliquat de la sole, visible (US59074) contre la paroi du
mur MR59001. Il est composé d’un lit de tegulae qui forme une surface de soutènement
pour le chargement. Sur cette surface sont aménagés deux canaux orientés nord-sud
(US59080 et US59081) qui permettent la circulation de l’air chaud vers le laboratoire.
61
De plus petite dimension, la deuxième structure (FR59018) s’appuie contre le four
FR59006, ce qui implique une date de construction postérieure. Orientée est-ouest, elle ne
s’appuie pas contre le mur MR59001 mais a été construite sur l’escalier 59014 qui a fait
office partiellement de mur externe est. Le mur sud du four FR59006 constitue la paroi
nord. Une ordonnance de blocs de basaltes et de tuf ainsi que quelques tegulae liées au
mortier constituent la paroi sud du four. De cet aménagement est conservé un reliquat de
la gueule située à l’extrémité ouest de l’alandier. Des traces de rubéfaction sont visibles
sur les blocs de tuf formant un espace semi-circulaire. On distingue clairement en coupe
(nord-sud) la naissance du couloir de chauffe surmonté d’une voûte en tegulae (US 59075).
La sole, composée de tegulae posées à plat (US 59076), est constituée de deux canaux
orientés nord-sud (US 59077 et US 59078) qui permettent la répartition de la chaleur dans
le laboratoire aujourd’hui disparu.
62
Après l’arrêt de cette activité (état 2B), l’espace est remblayé par divers niveaux et une
sépulture (SP59066) y est implantée à une date inconnue mais antérieure au VIIe siècle
(fig. 17).
Fig. 17 - Cumes. Mausolée A59, sépulture SP59066 d’un nouveau-né installée dans l’angle sudouest de la chambre.
Cliché CJB CNRS-EFR.
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Cumes
63
Cette tombe est recouverte par plusieurs couches de remblai. Un nouveau seuil est
aménagé dans le mur ouest (MR59003). Cette nouvelle entrée est directement liée avec
l’US 59007. La fonction du monument à cette époque reste indéterminée, mais il est
possible d’envisager une occupation à caractère également artisanal si l’on considère la
nature cendreuse de l’US 59007 et l’état du four FR59006 dont le sommet est encore
visible, ce qui laisse à penser qu’il était utilisé comme base de foyer.
64
La prochaine campagne de fouilles devra répondre à plusieurs objectifs : déterminer la
genèse du mausolée et les relations qu’il entretient avec les monuments environnants,
notamment ceux situés au nord et au sud, étudier ses différentes périodes de
fonctionnement et enfin préciser la datation et les phases de comblement des fours 11.
Le monument funéraire A56
65
En 2004, l’équipe du Centre Jean Bérard avait effectué un décapage au nord du monument
funéraire A41 (fig. 1 et 18) qui avait mis au jour l’ensemble funéraire EFN56002 (A56).
Fig. 18 - Cumes. Mausolée A56, plan de détail avec indication des principales phases.
G. Chapelin et J.-A. Delorme, CJB CNRS-EFR.
66
À cette occasion, une inscription sur marbre provenant d’une tombe à coffre (« bauletto
»), située dans l’angle formé par les murs MR56005 et MR56002, avait été dégagée. Placé
entre deux monuments d’époque sévérienne, fouillés ces dernières années, il apparaissait
important d’étudier l’ensemble funéraire A56 pour comprendre l’organisation des abords
immédiats de la Porte Médiane.
67
Le monument funéraire A56 se situe dans la partie centrale de la nécropole, sur le côté
occidental d’une voie importante, orientée nord-sud, reliant la ville de Cumes à Capoue.
L’ensemble A56 est édifié entre les monuments funéraires A4112 au sud et A40 13 au nord.
Ces deux derniers tombeaux sont datés entre les dernières décennies du IIe et le début du
IIIe siècle et ont été installés sur des monuments plus anciens, construits en opus
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
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Cumes
reticulatum. Un mur en opus reticulatum (MR56092) a également été retrouvé dans les
niveaux plus anciens de l’ensemble A56. Son orientation correspond à celle du mur
MR40181 qui fait partie d’un ensemble funéraire plus ancien que le mausolée A40.
68
La présence de la tombe à coffre visible dans l’ensemble funéraire A56 lors du sondage de
2004 suggérait que la structure n’était pas un monument funéraire fermé de type tombe à
chambre (comme les monuments A40 ou A41) mais plutôt un enclos, donc un espace
ouvert. Mais l’étude des enduits peints en place et fragmentaires de l’ensemble A56
semble indiquer un espace fermé.
69
L’inscription en marbre provenant de la tombe à coffre SP56001 située dans l’ensemble
funéraire A56 mentionne une jeune femme du nom de Luccia, morte à 35 ans, 10 mois et
19 jours14 (fig. 19).
Fig. 19 - Cumes. Mausolée A56, vue de l’intérieur de l’espace funéraire du nord.
Cliché CJB CNRS-EFR.
70
La dédicace faite par C. Iulius Flavianus, le mari, est dédiée aux Dieux Mânes. La tombe à
coffre associée à la dédicace avait été initialement daté du IIe siècle mais les nouveaux
éléments apportés par une étude épigraphique plus approfondie et par les fouilles de 2012
pourraient repousser la datation jusqu’au début du IIIe siècle ce qui rendrait les trois
monuments – A40, A41 et A56 – contemporains15.
71
Les nombreux pillages, les réutilisations continues de l’espace funéraire pendant
plusieurs siècles ainsi que l’arasement du monument rendent difficile la compréhension
de l’organisation spatiale et de la chronologie. Ainsi une fosse (FS56143) a détruit une
grande partie de l’espace du secteur 1 et des tombes environnantes. Les vastes
dimensions de cette fosse suggèrent une destruction moderne par un engin mécanique.
72
Un phasage et des datations ont été établis à partir de la stratigraphie relative, de l’étude
du mobilier et des éléments architecturaux et décoratifs.
73
Trois états (du Ier au IV e s. ap. J.-C.) ont été identifiés sur un horizon stratigraphique de
2,4 m à 4,6 m d’altitude au dessus du niveau de la mer (fig. 20).
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Cumes
Fig. 20 - Cumes. Mausolée A56, Secteur 1, vue de détail de la succession stratigraphique à partir du
creusement de la fosse FS56143.
Cliché CJB CNRS-EFR.
74
Dans un premier temps (état 1A), la zone est occupée par un monument plus ancien
EFN56092 dont il ne reste qu’un mur (MR56092) en opus reticulatum orienté nord-sud. Ce
dernier se trouve dans le même axe que le mur MR40181 appartenant à l’ensemble
funéraire EFN40181, localisé sous le monument A40 en 2011 et daté du I er siècle ap. J.-C.
75
À une sous-phase (état 1B), correspondent des niveaux de fréquentation (sol SL56109 ; sol
SL56115 ; sol SL56125 ; sol SL56139) et la tombe à inhumation SP56138.
76
Dans un second état (état 2A), une nouvelle construction funéraire est édifiée : l’ensemble
EFN56002. Elle se compose des murs MR56002, MR56005 à l’est, MR56008 au nord et
MR56046, MR56004 à l’ouest et de différents sols (sol SL56104 ; sol SL56105). La limite sud
a été oblitérée par l’installation postérieure du monument funéraire A41. On suppose que
l’entrée de l’ensemble A56 se trouvait à l’ouest, même si aucun seuil n’a été retrouvé. Une
tombe à coffre (SP56001) et une banquette (US 56022) appartiennent à l’aménagement de
cet état.
77
Quelque temps plus tard (état 2B), l’ensemble funéraire A56 est réduit au sud, par la
construction du monument funéraire A41, mais continue à être utilisé comme le
montrent les installations aménagées le long du mur nord du tombeau A41 (les structures
maçonnées non-identifiées SB56015 et SB56032 ; les tombes à coffre SP56038, SP56123 et
SP56136).
78
Peu après (état 2B), les derniers espaces libres sont utilisés pour implanter des tombes
modestes (SP56124, SP56138, SP56119, 56025, SP56070). Certaines de ces sépultures n’ont
pu être fouillées par manque de temps.
79
On note que deux autres sépultures sont disposées le long du mur MR56046 à l’extérieur
de du tombeau A56 dans la zone appelée A54. Ces deux tombes SP56036 et le bauletto
SP56012 se trouvent dans une zone qui n’a pas été fouillée, et il est donc impossible à
l’état actuel de les replacer dans un contexte chronologique.
80
Après le VIe siècle (état 3), l’espace funéraire A56 ne semble plus fréquenté.
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
22
Cumes
81
Dès la fin de l’Antiquité, l’ensemble a dû être spolié de ses éléments en marbre. Puis plus
tard, au cours des siècles, la réutilisation du terrain à des fins agricoles, ainsi que des
pillages successifs détruiront une grande partie du monument.
BIBLIOGRAPHIE
Basile 2008 = L. Basile, dans F. Zevi, F. Demma, E. Nuzzo, C. Rescigno, C. Valeri, Museo archeologico
dei Campi Flegrei. Catalogo generale. Cuma, Naples, 2008, p. 418.
Brun - Munzi 2010 = J.-P. Brun, P. Munzi [avec la collaboration de S. Girardot], La decorazione
pittorica di un mausoleo di età severiana nella necropoli settentrionale di Cuma, dans X Colloque
international de l’Association internationale pour la peinture murale antique, Naples 17-21 septembre 2007,
Naples, 2010, p. 499-510.
Brun - Munzi 2011 = J.-P. Brun, P. Munzi, Cumes (Italie). Les fouilles du Centre Jean Bérard 2000-2010,
dans Bulletin de la Société française d'archéologie classique, XLI, 2009-2010, dans Revue archéologique,
2011-1, 51, p. 155.
Jorio 1824 = A. de Jorio, Metodo per rinvenire e frugare i sepolcri degli antichi, Naples, 1824, p. 179-180.
Malpede 2008 = V. Malpede, dans F. Zevi, F. Demma, E. Nuzzo, C. Rescigno, C. Valeri, Museo
archeologico dei Campi Flegrei. Catalogo generale. Cuma, Naples, 2008, p. 431.
NOTES
1. Un compte-rendu des recherches faites dans cette zone en 2011 est paru dans la Chronique des
activités archéologiques de l’École française de Rome [en ligne], Italie du Sud. URL : http://
cefr.revues.org/633.
2. Le monument n’ayant pas été dégagé à l’extérieur, hormis la voûte, le calcul résulte de
l’addition de l’épaisseur des blocs des parois et des dimensions internes.
3. Cette fosse de pillage semble correspondre chronologiquement avec le pillage du mausolée, au
XIXe siècle, qui a laissé des traces : fragment de vaisselle de l’époque dans l’US 46073, couche de
sédimentation dans le caisson est (US 46254), enduit recouvrant le matériel sur la corniche, à la
verticale du passage pratiqué par les pilleurs.
4. Voir à ce sujet Brun - Munzi 2011, p. 155.
5. Voir MEFRA, 123-1, 2011, p. 292-295; Jorio 1824, p. 179-180.
6. Le niveau de circulation du secteur a pu être rehaussé, car le mausolée MSL46175 présente un
enduit extérieur laissant penser que le monument pouvait être à l’air libre, alors que le mausolée
MSL46144 n’a pas d’enduit extérieur et semble donc être hypogée. Cette hypothèse est renforcée
par l'observation rapide, en fin de campagne de fouille, de niveaux d'occupation (US 46201 46202 - 46203) de part et d'autre de la porte qui, en stratigraphie, semblent antérieurs à
l'arasement du mausolée.
7. La zone d'arrachement de l'enduit très régulière indique une destruction nette et méthodique,
par conséquent plutôt liée à un réaménagement antique qu'à un pillage moderne.
8. Fouille inédite de l’Università degli studi di Napoli « L’Orientale ».
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
23
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9. Malpede 2008, p. 431.
10. C’est l’importante quantité de tuiles surcuites découvertes dans le comblement qui a conduit
à cette identification.
11. Une étude archéomagnétique des fours a été réalisée par Ph. Lanos et G. Hervé, Institut de
recherche sur les archéomatériaux (IRAMAT) - CNRS UMR 5060, Centre de recherche en physique
appliquée à l'archéologie (CRPAA), Université Bordeaux 3
12. Fouillé en 2006. Voir Brun - Munzi 2010, p. 499-510.
13. Fouillé en 2011. Voir Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome [en ligne],
Italie du Sud. URL : http://cefr.revues.org/633.
14. D(is) M(anibus) / Lucciae Disciane q(uae) / vixit annis XXXV m(ensibus) X / dieb(us) XVIIII C. Iulius /
Flavianus emeritus / coniugi incomparabil(is) / bene merenti fecit.
15. Basile, 2008, p. 418. L’ensemble du dossier épigraphique de la nécropole de la Porte Médiane
de Cumes est en cours d’étude par G. Camodeca (Università degli studi di Napoli « L’Orientale »)
et M. Cébeillac-Gervasoni (CNRS, ANHIMA UMR 8210).
INDEX
Mots-clés : nécropole, sépulture, Cumes, mobilier funéraire, hypogée
institutions Centre Jean Bérard (USR 3133 CNRS-EFR), Soprintendenza speciale per i Beni
Archeologici di Napoli e Pompei, Ministère des affaires étrangères et européennes (Paris)
AUTEURS
JEAN-PIERRE BRUN
Collège de France - jean-pierre.brun[at]college-de-france.fr
PRISCILLA MUNZI
CNRS, Centre Jean Bérard (USR 3133 CNRS-EFR) - priscilla.munzi[at]ivry.cnrs.fr
LAËTITIA CAVASSA
CNRS, Centre Jean Bérard (USR 3133 CNRS-EFR) - laetitia.cavassa[at]ivry.cnrs.fr
GUILHEM CHAPELIN
CNRS, Centre Jean Bérard (USR 3133 CNRS-EFR) - berard[at]unina.it
ANSELME CORMIER
Université Paris Ouest Nanterre La Défense - anselme.cormier[at]orange.fr
HENRI DUDAY
Université Bordeaux 1, PACEA (UMR 5199) - henri.duday[at]u-bordeaux1.fr
SANDY GUALANDI
Université Paris Sorbonne-Paris IV - sandy.gualandi[at]gmail.com
Chronique des activités archéologiques de l’École française de Rome , Italie du Sud | 2013
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Cumes
STÉPHANIE LE BERRE
INRAP, Grand Ouest / Bretagne - stephanie.le-berre[at]inrap.fr
BASTIEN LEMAIRE
Université Paul-Valéry Montpellier III, UMR 5140 Archéologie des Sociétés Méditerranéennes
(CNRS-UPV) – bastien_lemaire[at]hotmail.fr
NICOLA MELUZIIS
Archéologue - nmeluziis[at]yahoo.it
DOROTHÉE NEYME
Université Aix-Marseille, Università degli studi di Napoli « L'Orientale » - dorothee_neyme
[at]yahoo.fr
JOHN-MARC PIFFETEAU
EPHE, UMR 8210 ANHIMA – johnmarcpiffeteau[at]yahoo.fr
ARNAUD WATEL
Université Paris Ouest Nanterre La Défense - watel.arnaud[at]gmail.com
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