QUI gaulois_interieur_ok.indd 1 ÉTAIENT LES GAULOIS ? 11/07/11 12:46 © 2011, EPPDCSI/ÉDITIONS DE LA MARTINIÈRE, UNE MARQUE DE LA MARTINIÈRE GROUPE, PARIS (FRANCE). CONNECTEZ-VOUS SUR WWW.EDITIONSDELAMARTINIERE.FR gaulois_interieur_ok.indd 2 11/07/11 12:46 QUI ÉTAIENT LES GAULOIS SOUS LA DIRECTION DE FRANÇOIS MALRAINET MATTHIEU POUX gaulois_interieur_ok.indd 3 ? 11/07/11 12:46 4 gaulois_interieur_ok.indd 4 11/07/11 12:46 PRÉFACE FRÉDÉRIC MITTERRAND Ministre de la Culture et de la Communication La « fabrique de l’histoire » se nourrit des questionnements et des préoccupations du présent. C’est pour cette raison qu’il y autant de visions particulières des Gaulois que d’historiographies, depuis le portrait qu’en a brossé Jules César dans La Guerre des Gaules jusqu’aux travaux les plus récents sur l’industrie du sel. L’histoire de la période gauloise à la manière d’un Michelet ou d’un Lavisse a construit une image d’Épinal, traduction d’une authentique « mythologie politique », qui a nourri un vif intérêt pour le sujet et une passion des origines jamais démentis au fil du temps. Chaque époque a ainsi mobilisé ses méthodes de recherche pour améliorer nos connaissances notamment sur la période gauloise. Depuis trente ou quarante ans, l’archéologie a été un acteur de premier plan dans le changement radical opéré dans la compréhension des sociétés gauloises. À ceux qui s’interrogent parfois sur l’intérêt ou l’utilité de la recherche archéologique, cette exposition et ce catalogue apportent de manière éclatante la démonstration de l’apport considérable de cette discipline à l’approfondissement de nos connaissances historiques. Des découvertes exceptionnelles, parmi lesquelles le dépôt de Tintignac (Naves, Corrèze), le site d’Acy-Romance (Ardennes) ou encore les nombreux sites de la vallée de l’Aisne, ont apporté une documentation inédite, parfois surprenante. En même temps, la multiplication des fouilles – notamment celles pratiquées dans le cadre de l’archéologie préventive – et l’ensemble des recherches, patientes et minutieuses, conduites par des spécialistes provenant de tous horizons – ministère de la Culture et de la Communication, Inrap, universités, CNRS, collectivités territoriales — ont restitué une image bien différente et sans doute plus conforme à la réalité de ces Gaulois qui occupèrent la plus grande partie de la France et de la Belgique entre les IIIe et Ier siècles avant notre ère. Ces études ont révélé la complexité des sociétés et de leur organisation, tant du point de vue technique et économique que du point de vue politique et religieux. Elles ont également apporté de précieux témoignages sur les modes de vie et le rapport que l’homme entretenait alors avec son environnement. L’exposition et le catalogue présentent ainsi un état de la recherche intégrant les avancées les plus récentes. Ils témoignent du rôle de premier plan que l’archéologie joue aujourd’hui dans la construction d’une connaissance scientifique du passé. Il est à cet égard particulièrement signifiant que la Cité des sciences et de l’industrie accueille aujourd’hui l’archéologie au même titre que les autres disciplines scientifiques. Le lieu de l’exposition et son contenu soulignent combien ces travaux de recherche de très haute tenue sont destinés à chacun d’entre nous et combien ils permettent aux visiteurs de se réapproprier un patrimoine reçu en héritage. 5 gaulois_interieur_ok.indd 5 11/07/11 12:46 6 gaulois_interieur_ok.indd 6 11/07/11 12:46 DROIT DE CITÉ POUR LES GAULOIS CLAUDIE HAIGNERÉ Présidente d’Universcience JEAN-PAUL JACOB Président de l’Institut national de recherches archéologiques préventives « Les Gaulois » ! Venant après les expositions « Science (et) fiction, aventures croisées » ou « Océan, climat et nous », ce thème pouvait surprendre à la Cité des sciences et de l’industrie. Rarement pourtant, au cours de la période récente, le concert de sciences humaines et des sciences dites « dures » aura suscité de telles avancées du savoir. De fait, la Gaule avant la romanisation ne nous a légué que de rares archives textuelles, laissant souvent les stéréotypes prendre le pas sur la réalité. C’est pourquoi l’archéologie joue un rôle prépondérant dans la connaissance de cette civilisation. Si l’intérêt pour le monde gaulois remonte au XIXe siècle avec les fouilles d’Alésia, de Gergovie et de Bibracte entreprises par Napoléon III, les études ont pris un essor décisif dans la seconde moitié du XXe siècle avec le développement de l’archéologie préventive et la conduite de nouvelles fouilles programmées. Science « totale » des sociétés du passé, l’archéologie s’est approprié les méthodes des sciences de la vie et de la terre pour interpréter les « archives du sol ». Ainsi la géomorphologie et l’étude de la stratigraphie retracent-elles l’évolution des sites dans des paysages en mutation, sous l’effet d’une présence humaine importante à la période gauloise. La physique des isotopes fournit des datations. L’archéozoologie caractérise le gibier, le bétail, le régime alimentaire et certaines pratiques rituelles : belle occasion d’en finir avec les Gaulois mangeurs de sanglier ! La palynologie et la carpologie renseignent sur les pratiques culturales, mais aussi sur les paysages du passé, à travers l’étude des pollens et des graines : elles témoignent d’une civilisation agricole sophistiquée. La xylologie et la dendrochronologie permettent la caractérisation des essences et la datation des éléments organiques conservés en milieu humide, qui sont des données essentielles pour révéler un monde de bâtisseurs en bois et torchis. L’anthropologie physique caractérise les restes humains, détermine le sexe et l’âge des individus, mais aussi leur état sanitaire. La chimie concourt aux recherches des céramologues pour identifier les argiles entrant dans la composition des pâtes et comprendre la circulation des amphores romaines en Gaule avant la conquête. L’analyse des alliages intervient dans les recherches sur la métallurgie, domaine d’excellence des forgerons gaulois. La géomatique restitue la structure des agglomérations et le tracé des voies pour rendre compte de l’occupation du territoire par l’homme dans des cartographies nouvelles. Enfin, les traitements statistiques permettent l’interprétation de nombreux indices collectés au cours des trente dernières années. « Il est plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé », déclarait Einstein. Gageons néanmoins que cette exposition contribuera à balayer les stéréotypes et à faire connaître au plus grand nombre, et notamment aux jeunes, les avancées récentes de la recherche et la richesse du monde gaulois. Y avait-il un lieu plus approprié qu’Universcience pour rendre compte au public de cette magnifique synthèse pluridisciplinaire entre sciences et société ? 7 gaulois_interieur_ok.indd 7 11/07/11 12:46 SOMMAIRE 10 14 OÙ VIVAIENT LES GAULOIS ? CARTE ET REPÈRES CHRONOLOGIQUES 20 POUR EN FINIR AVEC LE « MYSTÈRE » GAULOIS 32 ARRÊT SUR IMAGES : SCÈNES DE LA VIE QUOTIDIENNE EN GAULE 34 UN PEUPLE DES BOIS ? UN MONDE INVISIBLE ? YVES MENEZ FRANÇOIS MALRAIN ET MATTHIEU POUX FRANÇOIS MALRAIN 46 DE PIÈTRES ARCHITECTES ? MATTHIEU POUX 60 MANGEURS DE SANGLIERS ? VÉRONIQUE ZECH-MATTERNE QUE FAISAIENT LES GAULOIS ? 76 DES ARTISANS CHEVRONNÉS ? STÉPHANE GAUDEFROY 88 TRAFIQUANTS OU COMMERÇANTS ? FABIENNE OLMER 100 DES GUERRIERS SANGUINAIRES ? LIONEL PERNET 112 ARRÊT SUR IMAGES : LE TRÉSOR DE TINTIGNAC 8 gaulois_interieur_ok.indd 8 11/07/11 12:46 QUE PENSAIENT LES GAULOIS ? 116 128 ANNEXES LES GAULOIS ENTERRAIENT-ILS LEURS MORTS ? 194 GLOSSAIRE VALÉRIE DELATTRE XXX ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE LES GAULOIS AVAIENT-ILS DES TEMPLES ? XXX À PROPOS DES AUTEURS XXX « GAULOIS : UNE EXPO RENVERSANTE » À LA CITÉ DES SCIENCES XXX REMERCIEMENTS XXX CRÉDITS ICONOGRAPHIQUES PHILIPPE BARRAL 142 UN PEUPLE SANS ÉCRITURE ? JACQUES LACROIX 156 UNE SOCIÉTÉ COMPLEXE ? STÉPHANE VERGER QU’AVONS-NOUS FAIT DES GAULOIS ? 172 QUE RESTE-T-IL DU MYTHE GAULOIS ? MARC-ANTOINE KAESER ET LAURENT OLIVIER, PROPOS RECUEILLIS PAR PIERRE BARTHÉLÉMY 9 gaulois_interieur_ok.indd 9 11/07/11 12:46 CARTE DES PEUPLES GAULOIS gaulois_interieur_ok.indd 10 11/07/11 12:46 gaulois_interieur_ok.indd 11 11/07/11 12:46 -10 000 > DOMESTICATION -3700 > TECHNIQUE Le chien, ami de l’homme Natoufiens du Mont Carmel Israël La roue Mésopotamie -3500 > ÉCRITURE Hiéroglyphes Égypte -9000 > AGRICULTURE SOCIÉTÉ -3400 À -3200 > ÉCRITURE Orge, blé, seigle Croissant fertile Cunéiforme Mésopotamie -2300 > TECHNIQUE Métier à tisser Égypte -1300 > ÉCRITURE Alphabet par les Phéniciens -2650 > LITTÉRATURE Épopée de Gilgamesh 1re oeuvre littéraire Mésopotamie ART -900 > LITTÉRATURE Bible Début de rédaction par les juifs Palestine -1352 > HOMME Toutânkhamon, pharaon d’Égypte REPÈRES CHRONOLOGIQUES -1270 > BATAILLE Guerre de Troie -1252 > HOMME Moïse vers la terre promise Fuite des Hébreux Égypte ÉVÉNEMENTS ÂGE DE PIERRE ÂGE DU BRONZE Fin entre - 4 000 et - 2 500 - 10 000 gaulois_interieur_ok.indd 12 - 5 000 - 1 800 - 800 - 1 000 11/07/11 12:46 -287 > MATHÉMATIQUES/GÉOMÉTRIE Archimède Calcul de l’air et du volume Grèce -276 > MATHÉMATIQUES/GÉOMÉTRIE Ératosthène Circonférence de la terre Grèce 1ER SIÈCLE > ARCHITECTURE Pont du Gard Pont-aqueduc romain France DE -447 À -432 > ARCHITECTURE E Parthénon Acropole d’Athènes Grèce -800 > LITTÉRATURE 70 > ARCHITECTURE Colisée Forum romain France L’Iliade et l’Odyssée Poème homérique -400 > BATAILLE Invasion des Celtes Gaule -390 > BATAILLE Attila Mise à sac de Rome par les Celtes Rome pillée -753 > POLITIQUE Fondation de Rome -100 > HOMME Naissance de Jules César et de Vercingétorix Rome -43 > BATAILLE Fondation de Lugdunum (Lyon), capitale des trois Gaules VERS -600 > POLITIQUE VERS -30 > HOMME Massalla (Marseille) fondée par les Phocéens Mort de Cléopâtre, dernière reine d’Égypte VERS -190 > BATAILLE Gaule cisalpine sous dépendance de la République romaine -461 > HOMME Périclès, chef du parti démocratique Grèce VERS -125 À -121 > BATAILLE 4 SEPTEMBRE 476 > BATAILLE Déclin de l’Empire romain Les Romains conquièrent la Provence VERS -428 À -347 > HOMME Platon, philosophe grec -58 À -51 > BATAILLE Conquête de la Gaule par Jules César DE 481 À 511 > HOMME Clovis 1er roi des Francs -52 > BATAILLE Vercingétorix capitule à Alésia -49 > BATAILLE Prise de Marseille par les Romains HALLSTATT 1 ÂGE DU FER ER LA TÈNE 2ND ÂGE DU FER - 800 - 700 - 480 - 500 gaulois_interieur_ok.indd 13 - 250 - 50 0 500 11/07/11 12:46 Ta qui core voluptatem. Edi nos molut erferfe ruptatu ribus, que volum am experum hit. gaulois_interieur_ok.indd 14 11/07/11 12:46 POUR EN FINIR AVEC LE « MYSTÈRE » GAULOIS FRANÇOIS MALRAIN MATTHIEU POUX Commissaires scientifiques de l’exposition Le « village gaulois » a établi ses quartiers à l’ombre de la peau-miroir de la Géode de La Villette. La Cité des sciences et de l’industrie n’en est certes pas à son premier coup. Après avoir rendu hommage à l’univers de la bande dessinée et de Star Wars, elle s’attaque à un nouveau mythe qui n’est pas moins solide et n’a que peu à voir, à première vue, avec le monde de la science. Pour une majorité de nos contemporains, le monde gaulois renvoie en effet à un passé ancestral, antérieur à l’invention des sciences, des villes, des techniques et des arts. Il appartiendra évidemment à l’exposition « Les Gaulois » et à son catalogue de démontrer le contraire, pour au moins deux bonnes raisons. La première est que les Gaulois constituent, depuis plus d’un siècle, un objet d’étude scientifique au même titre que les grands primates, les végétaux ou les hommes de la Préhistoire. La seconde prend acte d’une révolution récente liée à l’aménagement du territoire : le développement de l’archéologie préventive et l’émergence, au fil des fouilles, d’un passé protohistorique dont nul n’aurait osé, il y a quelques décennies, soupçonner la richesse et la complexité. L’exposition explore le vaste territoire, entre Rhin et Rhône, que César a assigné à la Gaule, sur une plage chronologique qui couvre principalement les deux siècles précédant la guerre des Gaules. L’époque gauloise compte aujourd’hui parmi les principaux sujets d’étude d’un « jeune » institut de recherche spécialisé dans l’exploration du passé, l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap, créé en 2002), dont les équipes ont retourné, en l’espace d’un peu plus de trente ans, des millions de mètres cubes de terre pour en faire resurgir des fermes, des agglomérations, des paysages, bouleversant notre connaissance des modes de vie, des techniques et des mentalités de nos ancêtres. D’autres acteurs de terrain, parmi lesquels l’université, le CNRS et le ministère de la Culture ont mené des recherches parallèles, ciblées sur des domaines particuliers : on leur doit, en particulier l’invention de véritables « villes » gauloises et des lieux de culte qui les précédaient. Quelle que soit leur appartenance institutionnelle (État, collectivités territoriales, archéologues privés), tous font appel à des méthodes scientifiques pointues, éprouvées au fil des chantiers et des études spécialisées. La plupart d’entre eux ont recours aux sciences du vivant pour la datation des matériaux, l’étude des restes osseux ou végétaux ou encore la restitution des environnements passés… La combinaison de ces différentes approches a transformé le chantier archéologique et ses annexes en véritable « laboratoire ». LES GAULOIS DE LÉGENDE Parmi les thèmes historiques revisités par ces chercheurs en sciences humaines, peu ont bénéficié d’autant d’avancées que le monde gaulois. Il suffit, pour mesurer le chemin parcouru, de prendre n’importe quel manuel scolaire du début du siècle dernier et d’en consulter les images. Qu’y trouvet-on ? Un monde peuplé de primitifs hirsutes vêtus de peaux de bête, exerçant au 15 gaulois_interieur_ok.indd 15 11/07/11 12:46 Ta qui core voluptatem. Edi nos molut erferfe ruptatu ribus, que volum am experum hit. fond d’obscures forêts leurs activités quotidiennes de chasse et de cueillette, abreuvant de sacrifices des divinités sanguinaires… Comment ces populations auraient-elles pu rivaliser avec une civilisation gréco-romaine incarnée, depuis le XVe siècle, par les découvertes de Pompéi et les temples de marbre blanc célébrés par les romantiques ? Cantonnés dans leur rôle de faire-valoir les Gaulois ont été enrobés d’une aura mythique, pour ne pas dire mystérieuse, qui revêt différentes formes selon les époques. La IIIe République a usé jusqu’à la corde le mythe national du guerrier protecteur aux bras noueux, honoré sur nos monuments aux morts, avec ses relents de bonapartisme qui plus tard ont servi à élaborer la propagande du régime de Vichy. Un autre archétype, celui du Celte romantique empreint de spiritualité, en symbiose avec la nature, a été récemment remis au goût du jour par le new age, l’heroic fantasy et d’inquiétants « néo-druides » dont la religion vient d’être officiellement reconnue outre-Manche. La figure du bon vivant ancré dans le terroir et rétif à toute discipline en constitue le dernier avatar, popularisé par un célèbre couple de Gaulois résistant, encore et toujours, à un envahisseur qui a changé de camp au fil des siècles : les légions romaines, l’ennemi héréditaire d’outre-Rhin, le cosmopolitisme d’avant-guerre, l’atlantisme d’après-guerre… Symbole de résistance à la mondialisation, incarné par un José Bové qui arbore fièrement ses moustaches gauloises, le couple Astérix et Obélix vient d’être récupéré par la publicité d’une célèbre chaîne de restauration rapide ! La part de mystère qui entoure « nos ancêtres les Gaulois » a autorisé toutes les dérives. Les plus récentes se confondent avec un concept d’identité nationale qui n’a aucune réalité, dans une Gaule fractionnée en une soixantaine de peuplades alliées ou ennemies. Il est temps de la dissiper, en faisant partager les découvertes des archéologues au plus grand nombre. La science ne reconnaît pas de « mystère » ou d’« énigme », mais seulement des problèmes qu’elle doit s’attacher à résoudre de la manière la plus objective et la plus rigoureuse possible. C’est à ces questions au sens propre, c’est-à-dire posées sur un mode interrogatif, que les auteurs du catalogue tenteront de répondre en s’appuyant sur un état des connaissances qui est loin d’être définitif, mais permet au moins de les formuler sur de nouvelles bases. Ta qui core voluptatem. Edi nos molut erferfe ruptatu ribus, que volum am experum hit. 16 gaulois_interieur_ok.indd 16 11/07/11 12:46