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LE SENS DE LA RELATION Mémoire de synthèse présenté en vue de l’Habilitation à Diriger des Recherches Vol. 1/3 Isabelle Rivoal Membres du jury : Michel Boivin, directeur de recherche au CNRS (CEIAS, EHESS) Dominique Casajus, directeur de recherche au CNRS (CHISM, EHESS) Frédéric Hurlet, professeur d’histoire (Université Paris Ouest Nanterre la Défense) Laurence Kaufmann, professeur ordinaire de sociologie (Université de Lausanne) Gérard Lenclud, directeur de recherche honoraire au CNRS (LAS) Franck Mermier, directeur de recherche au CNRS (LAU-IIAC) Anne de Sales, directrice de recherche au CNRS (LESC) [1] Sommaire Introduction…….……………………………...………………………………………… ………4 Chap.1. Entrer en relation. Druzes d’Israël en marge de la Palestine……………. …..…10 De la Palestine aux Druzes : premiers cheminements de recherche………. Sur les hauteurs du Mont Carmel…………………………………………….. Ordre mondain et ordre religieux…………………………………………….. Les Druzes comme « unitaires » : histoire de la prédication et principes au fondement de la religion…………………………………………………... La religion « rabattue » sur la communauté…………………………………. ……..11 ……..15 ……..18 Chap. 2. Défaire les relations : Anthropologie de l’ascétisme…………………….. ……..29 Une mystique communautaire……………………..…………………………. L’ascétisme comme perfection et sa représentation communautaire à al-Bayyâda……………………………………………………………………... Premiers bilans………………………………………………………………….. ……..32 Chap. 3. Tisser des relations comme l’artisan sur son métier……….……………. ……..38 ……..20 ……..24 ……..34 ……..36 Huis-clos dans la Montagne libanaise…………………………….………….. De la relation ethnographique… …………….…………………..…………… … à l’ethnographie des relations………………………………….…………… ……..39 ……..41 ……..46 Chap. 4. Penser la relation dans son intensité et sa clôture...……………………… ……..52 Shu al-akhbâr ? Le tourbillon permanent de l’actualité politique………..….. Techniques d’intensification…………………………………………………… Tension vers l’avenir, registres de l’incertitude et (ir)réalité de la guerre civile…………...………………………………………………………………… « L’esprit des choses ». Quel projet de totalisation ?........................................ ……..53 ……..55 [2] ……..61 ……..64 Chap. 4. Mettre en relation……………………………………………………………. ….…..71 Curriculum vitae : activités et administration de la recherche, enseignement, valorisation……………………….………………………………………………......... ……...74 Publications……………………………………...…………………………………….. ……...94 [3] « Ah ! Mais vous savez, Isabelle, le Liban ce n’est pas une société facile à appréhender. Gilsenan a mis plus de 25 ans pour sortir son bouquin, ce n’est pas rien ! C’est que les Libanais ne sont pas faciles à comprendre… Ils sont tordus ». Ces propos qu’accompagnaient toujours un sourire entendu et des yeux pétillants, Raymond Jamous les a prononcés plus d’une fois au cours des longues après-midi de discussion, qu’en compagnie de Marie-Jo, il m’a toujours fait l’amitié de m’offrir à la tour Sapporo. L’un et l’autre n’ont jamais cessé d’accompagner ma recherche, avant même que je mette les pieds pour la première fois à Beyrouth en 1999. Le Liban, Raymond en parlait d’aussi loin qu’il m’en souvienne. Nous nous étions rencontrés alors que je commençais à suivre le cours d’anthropologie du monde arabe qu’il dispensait à l’EHESS en 1989-1990. Je cherchais alors à définir plus précisément mon sujet de recherche et je lui avais donné à lire quelques pages bien maladroites sur les Druzes que je me proposais d’aller ethnographier en Israël. Et très vite, Raymond m’avait parlé de ces Druzes de ‘Aley qu’il avait croisés lorsque que sa famille, comme la plupart des Beyrouthins qui en avaient les moyens, montait estiver dans la montagne. Sa fascination d’enfant pour les Druzes « qui étaient là, sans pour autant que nous n’ayons de relation avec eux » avait alors pleinement rencontré ma curiosité, tout juste naissante, pour ces Musulmans professant la croyance en la réincarnation et protégeant, par l’initiation, une religion réputée ésotérique. Guidée par ces échanges tout autant que par mes lectures avides sur les minorités musulmanes hétérodoxes du ProcheOrient et l’incontournable questionnement du problème israélo-palestinien, j’avais [4] posé l’intrigue de ma thèse à venir. Cela fait maintenant vingt-cinq années, et l’intérêt partagé pour ces « Druzes de la Montagne libanaise » ne s’est jamais démenti. Mais Raymond Jamous avait sûrement raison lorsqu’il m’avait mise en garde devant la complexité du Liban… Il m’a en effet fallu plus de dix ans pour réaliser l’ouvrage provisoire que je propose dans le cadre de cette Habilitation. Article après article, c’est un parcours de recherche déployé plus qu’une monographie construite autour d’une perspective unifiée qui ressort de ces pages. J’en considère encore la facture provisoire dans le sens où le travail de totalisation – et le travail de réécriture nécessaire au lissage de l’argument d’introduction en conclusion de chapitre – n’a pas encore été finalisé. À dessein. C’est qu’il est en effet impensable d’appréhender le Liban d’un point de vue unique sans sentir que la texture de l’ensemble échappe. Toute la difficulté avec cette société consiste à en « prendre une visée » 1 kaléidoscopique, mais à ne pas s’y arrêter non plus. Encore que cette métaphore serait fautive si elle devait évoquer chez le lecteur la logique de bricolage propre la pensée sauvage que Claude Levi-Strauss compare précisément à une structure kaléidoscopique 2. Je cherche simplement ici à rendre l’idée d’un ensemble de fragments qui renvoient différemment la lumière selon l’endroit d’où elle pénètre et dont le dessin appréhendé dans sa totalité varie en conséquence. « Parler du Liban, d’accord », écrivait Nadine Picaudou en introduction à son ouvrage sur l’histoire de la guerre civile « mais de quel Liban parle-t-on » ? Et si l’on accepte d’en considérer chaque singularité de la manière dont elle se donne, celle des Druzes plutôt que celle des Chiites, celle de la Montagne plutôt que celle d’un quartier de Beyrouth, celle de la faction joumblatti plutôt que celle des Arslan, celle du Chouf plutôt que celle du caza de ‘Aley, et ainsi de suite, comment rendre compte de ce qui transparaît de l’indéniable caractère libanais des hommes et des femmes qui habitent ce morceau de terre procheoriental ? Le Liban a ainsi constitué un formidable test à ma formation socioanthropologique. J’ai remis cent fois l’analyse de mes données sur le métier et à mesure que je tentais d’élucider l’ensemble, ces données me paraissaient avoir perdu de leur pertinence en même temps que de leur actualité. L’effet de 1 2 Selon l’expression chère à Louis Dumont La pensée sauvage, Paris, Plon, 1962, p. 51-52. [5] reconstruction d’un parcours ne laissera probablement pas transparaître suffisamment les doutes et les découragements qui m’ont parfois paralysée, le sentiment de travailler avec des modèles qui réduisaient plus qu’ils n’éclairaient. Existe-t-il, finalement, des sociétés plus « tordues » que d’autres ou avais-je fini par me convaincre de cette difficulté ? Ce qu’il est difficile de rendre du point de vue de l’écriture académique, l’écrivain sait souvent l’exprimer avec une justesse et une grâce qui laisse admirative. Ainsi Dominique Eddé, dans ses Lettres posthumes rapportant les méditations d’un homme mûr sur le Liban entre guerre et avant-guerre, écrit-elle : « À vrai dire, le Liban n’a jamais existé, à mes yeux, qu’à l’état d’obsédante ambition. Il est en quelque sorte la formidable évocation de ce qu’il aurait pu être et c’est en cela qu’il est indestructible. Un pays en puissance, acculé à provoquer le sort pour survivre à ses leurres, mais aussi le symptôme de quelque chose qui nous dépasse et de très loin… Plus comparable à un individu qu’à un État, il incarne, en vérité, la subjectivité absolue d’un côté et la faillite universelle de l’autre. Mobile à l’excès, doué d’une étonnante capacité d’absorption et d’adaptation, flexible jusque dans ses frontières, il est en un sens le plus ‘influençable’ et donc le plus ‘humain’ des pays qui me viennent à l’esprit. L’expression de ses névroses l’emporte si manifestement sur son identité qu’on pourrait ‘presque’ le concevoir étendu sur le divan d’un psychanalyste » 3. Une belle manière de rendre, de l’intérieur, cette impression tenace pour l’observateur ethnographe que le Liban échappe toujours. « Mobile », « flexible », « influençable », il est tension vers l’à-venir autant qu’écho d’un passé ottoman révolu, selon la manière dont on entend le considérer. Toute écriture sur le Liban me semble donc devoir tenir tout à la fois la description objective du réel et cette tension plus impalpable qui le traverse. Le titre de cette HDR aurait logiquement dû mettre en avant le thème des minorités religieuses comme perspective à partir de laquelle je n’ai jamais cessé de considérer les sociétés du Proche-Orient aux prises, depuis un siècle, avec ce formidable défi de reconfigurer une structure impériale en une juxtaposition arbitraire d’États qui ne sont ni Nations, ni modernes. Sans abandonner cette perspective dont la pertinence et le caractère incontournable sont loin d’avoir été démentis par la litanie des événements 3 Dominique Eddé, Lettres posthumes, Paris, p. 115-116. [6] tragiques qui ne cessent de marquer l’histoire contemporaine de la région, je ne la considère plus comme un objet de recherche en soi. J’entends par là que mon projet anthropologique est désormais beaucoup moins centré sur l’étude comparée des morphologies sociales et des configurations minoritaires. L’ethnographie a la vertu de rapprocher des hommes et le partage avec les mêmes personnes, au fil des années, du quotidien, des espoirs, des inquiétudes, finit par imposer une courbure dans la hiérarchie des observations : du morphologique, du normatif, des grammaires vers l’incertitude des formes, les émotions, le quotidien qui va sans dire. Voilà ce qui constitue désormais mon objet d’étude si je devais le désigner. Mais si je revendique une inflexion – de plus en plus marquée avec les années – des faits que je choisis de considérer et d’agencer dans une perspective narrative, faisant la part belle à la description de moments de vie quotidienne, de petites choses mises bout à bout, je n’entends pas pour autant renoncer à un horizon d’intelligibilité plus général qui suppose d’inscrire l’ethnographie dans un cadre morphologique. L’anthropologie ne doit pas se contenter de donner à voir par touches impressionnistes. Il lui faut garder, malgré tout, son ambition interprétative. La question de la totalisation ou, selon le terme emprunté à la sociologie pragmatique dans l’air du temps, de la « montée en généralité », a souvent animé les discussions dans lesquelles j’ai toujours le plaisir de me lancer avec mes collègues et amies du Laboratoire d’ethnologie, notamment Christine Jungen, Sophie Houdart, Anne de Sales, Monica Heintz ou encore Anne-Marie Peatrik. Faut-il ne voir dans la montée en généralité qu’une forme de théorisation qui permet d’inscrire un travail d’enquête dans un champ de recherche problématisé de ce point de vue théorique ? Sophie s’en explique d’emblée dans les premières pages de son HDR, L’ordre des choses : elle n’a ni le goût des états de l’art, ni d’intérêt pour les montées en généralité ou les synthèses. L’enquête et le croisement des fils de la recherche et des rencontres doivent seuls tisser l’écrit. De même, Christine est également réticente à l’explication théorique en surplomb, privilégiant l’élucidation implicite par juxtaposition des scènes ethnographiques. Elle excelle d’ailleurs dans cette forme d’écriture qu’elle qualifie de « scénographique » et dont j’ai essayé de considérer la force et, tout de même, les faiblesses, dans mon compte-rendu de son ouvrage sur les Politiques de l’hospitalité en Jordanie (voir HDR, vol.3 : 150). J’avoue être, de ce point de vue, au milieu du gué. J’hésite depuis longtemps à « totaliser » par peur de la violence inhérente à [7] toutes les systématisations, mais je ne puis me résoudre à renoncer à la recherche des cohérences qui procède des opérations de « mise en rapport » et de « mise en relation ». Avec un horizon qui demeure celui de la culture ou de l’identité que je traduirais à l’aune de questions telles que « qu’est-ce qu’être Druze ? » ou d’ailleurs plutôt « comment est-on quand on est Druze ? Quelles situations manifestent un être-druze-dans-le-monde » ? « Comment est-on Druze ici ou ailleurs ? », « quelle est la spécificité du Liban et des Libanais ? », « qu’est-ce qu’une vie accomplie, quels destins s’offrent pour les proche-orientaux aujourd’hui ? », je continue de faire le choix d’une compréhension historique et du parti-pris narratif qui l’accompagne plutôt que celui d’une compréhension ontologique ou naturaliste. Celle-ci me paraît trop affranchir d’une certaine dimension du politique, celle qui rend compte de l’altérité, au profit d’une critique globale de l’humain et des expressions historiques de la globalisation. Ce sont les raisons qui m’ont amenée à mettre la notion de relation au centre de mon travail, comme un fil rouge autour duquel je n’ai cessé de redéfinir mes objets et les dynamiques d’analyse visant à les construire. Des oppositions de valeurs structurant la compréhension d’une société particulière à l’étude des configurations différenciées de relations entre minorités et États, de l’étude des relations entre communautés à l’enquête sur les relations de patronage, de la comparaison comme heuristique essentielle à l’intérêt pour la relation ethnographique comme méthodologie, et enfin, à l’entreprise plus récente de réaliser une véritable ethnographie des relations, j’y reviens sans cesse pour trouver une clôture, certes toujours partielle, mais sans laquelle je peine à trouver un sens à l’écriture et, partant, une forme d’écriture. Ajoutons que ce parti-pris s’est également affirmé au cours des échanges féconds et souvent animés que j’ai eu avec Albert Piette ces dernières années au sujet de mon projet d’ethnographie des relations et qui informent peut-être en partie son Contre le relationnisme. Lettre aux anthropologues 4. Du moins, la sortie de ce petit essai m’a-t-il convaincue, par réaction, que je n’entendais pas m’affranchir du « relationnisme », tout comme il m’a convaincue de la nécessité de ne plus concevoir les relations comme simple « mise en rapport » de termes dans l’analyse, mais comme une véritable institution sociale qui doit être ethnographiée, avec précision, avant de pouvoir être, éventuellement, analysée. Le débat reste ouvert sur l’horizon du projet qui doit être celui de l’anthropologie, mais je sais gré à Albert de son insistance sur 4 Lormont, Le Bord de l'eau, coll. « Perspectives anthropologiques », 2014. [8] l’observation empirique des formes relationnelles en tant qu’elles sont produites par les acteurs / individu singuliers en situation. Je me propose donc, dans les lignes qui suivent, de suivre ce fil rouge du sens de la relation pour retracer à la fois mon parcours de recherche, l’objet à partir duquel j’ai déplié mon ethnographie sur le Liban (la relation patron-client) et comme métaphore de mon engagement dans ces autres dimensions, administration de recherche, animations de projet, encadrement, qui sont tout aussi centrales selon moi, au moment où je m’apprête à produire une synthèse de mon activité pour être habilité à transmettre et à former des jeunes chercheurs. [9] Chapitre premier Entrer en relation. Druzes d’Israël en marge de la Palestine Je suis presque devenue anthropologue par hasard. Ou plutôt, je dois à la sagacité de ma directrice de recherche, Lucette Valensi, de l’être officiellement devenue lorsqu’à l’issue de la soutenance d’une thèse inscrite sous la mention « histoire anthropologique », elle me proposa de renverser les termes sur le rapport de soutenance pour faire de moi « une anthropologue ». Et en effet, je n’avais pour tout bagage d’historienne qu’une culture théorique acquise lors de mes années de doctorat passées au Centre de Recherches Historiques de l’EHESS, que Lucette dirigeait alors, où j’avais assidument fréquenté les séminaires de J. Revel, R. Chartier A. Bourreau et J.-C. Schmitt. Avant cela, mon parcours universitaire ne m’avait pas plus disposée à devenir anthropologue de profession puisqu’en ayant choisi de passer les concours d’entrée aux Instituts d’Études Politiques de Bordeaux et de Lyon, c’est plutôt à l’administration que je m’étais d’abord destinée lorsqu’il m’avait fallu faire des premiers choix. Seul le hasard du calendrier de diffusion des résultats a voulu que je m’installe entre les rives du Rhône et de la Saône plutôt que sur l’estuaire de la Garonne et que je me spécialise sur le monde arabe plutôt que sur l’Afrique noire. Je dois à ma formation première en « sciences po » une ouverture large sur les sciences humaines et sociales qui m’a gardée, tout au long de ma carrière, de me sentir appartenir à une seule discipline et de lui vouer une loyauté académique indéfectible. Ma curiosité [10] universitaire est née dans la multidisciplinarité bien avant que j’entreprenne de lui donner un tour interdisciplinaire. De la fréquentation du droit constitutionnel et administratif, j’ai gardé le goût du raisonnement empirique sous forme « d’attendu que… », de l’analyse des documents historiques, celui des heuristiques ou « allongement du questionnaire » à la Paul Veyne, des enseignements de philosophie, un goût certain pour ces esthétiques élaborées par le déploiement systématique d’une idée ou d’un principe. C’est dans le cadre de l’Institut d’Études Politiques de Lyon que j’ai reçu mes premiers enseignements d’initiation au monde arabe. La Maison de l’Orient et sa riche bibliothèque partageaient la même cour de la rue Raulin et j’y passais déjà avec plaisir de longues journées pour assouvir ma curiosité sur l’histoire de l’Islam et du Proche-Orient, parfois au détriment d’un cours d’amphi sur les finances publiques ou l’économie politique… J’étais alors guidée par des enseignants qui deviendraient plus tard de proches collègues, Daniel Rivet, Élisabeth Picard, Jean Métral entre autres. Ils ont su développer cette curiosité et l’envie « d’aller y voir », de passer de l’autre côté du miroir des livres comme seul viatique possible à qui veut véritablement comprendre. Il me fallait faire germer cette graine. Au terme d’un été à hésiter tout de même entre préparation du concours pour entrer à l’Institut régional d’administration et rédaction d’un projet de recherche pour une inscription à l’EHESS, le choix (plus) risqué de la thèse s’est imposé. J’aurais le temps de revenir à l’administration plus tard… De la Palestine aux Druzes : premiers cheminements de recherche Septembre 1989. Lorsque je rencontre Lucette Valensi qui accepte de m’inscrire en DEA sous sa direction, l’actualité était centrée sur la possibilité de pourparlers de paix après la déclaration faite par Yasser Arafat quelques semaines auparavant que la charte de l’OLP assignant la destruction d’Israël comme finalité de son action était désormais « caduque » 5. On pouvait avoir le sentiment mesuré que « l’histoire était en train de se faire » entre Israéliens et Palestiniens. La tentation était trop forte pour ne pas envisager de participer à l’observation du changement annoncé. Je voulais donc m’attacher à définir le cadre d’une enquête à partir du Déclaration faite à Paris, à l’issue de la rencontre entre Arafat et le président F. Mitterrand le 2 mai 1989. 5 [11] conflit israélo-palestinien pour mettre en perspective un hypothétique « tournant » dans les relations entre ces deux nationalismes sourcilleux. Et d’abord, il me fallait me plonger dans l’histoire du conflit israélo-palestinien. Une dizaine de livres d’histoire politique plus tard, j’ai découvert l’existence d’une communauté d’Arabes palestiniens qui s’étaient « payé le luxe », pour le dire trivialement, de ne pas se reconnaître dans le nationalisme palestinien et de faire le choix d’une loyauté engagée envers l’État l’Israël en étant les seuls citoyens arabes soumis à la conscription obligatoire. Il me semblait que j’avais trouvé là une porte dérobée en quelque sorte pour considérer de côté le conflit israélopalestinien et ses rhétoriques imposantes. Je me sentais d’emblée plus à mon aise avec un tel objet. J’aime les marges, et celle-ci m’offrait encore la possibilité de ne pas entrer dans le déterminisme des loyautés politiques entre Palestiniens et Israéliens. J’allais donc poser les bases d’une recherche sur l’identité des Druzes en Israël dans mon mémoire de DEA soutenu en 1991 sous le titre La Construction de l’identité chez les minorités en Israël : le cas des Druzes. Le début de la décennie 1990 a incontestablement été marqué par l’intérêt croissant des sciences sociales pour la question des identités et des construits identitaires. Résurgences régionalistes en Europe, guerre dans l’ex-Yougoslavie, effets de la chute du bloc communiste : on s’attelait à documenter de toutes parts ces résistances visibles à la mondialisation et cette remise en cause de « la fin de l’histoire ». Mon sujet s’inscrivait bien dans l’air du temps et c’est avec un bel entrain que j’entreprenais d’assimiler et de décanter la littérature sociologique et politologique américaine des années 1980 sur les notions d’ethnicity, d’ethnic and racial conflicts et de social and ethnic minority : Nadel, Banton, Glazer, Horowitz, Moynihan pour citer quelques-uns des auteurs qui me sont restés en mémoire. Je m’imprégnais aussi, à travers la lecture de ces textes, de ce que pouvaient produire les efforts de théorisation sociologique. Autant dire que je n’étais pas convaincue par ces typologies diverses et autres modélisations constituées à partir d’analyses causales. Tout cela me paraissait trop souvent « tenir dans le vide ». Une lecture a cependant marqué mon cheminement intellectuel à cette période, celle de Fredrik Barth, Ethnic Groups and Boundaries qui m’avait été recommandée par Lucette Valensi. En 1990, cet ouvrage collectif dirigé par Barth était loin d’avoir la renommée qu’il a eue dans les années 2000 avec la consécration d’une traduction de l’introduction théorique dans l’ouvrage sur les Théories de l’ethnicité par Ph. Poutignat et J. Streiff-Fenard (2006). J’en avais retenu l’idée que l’identité ne se [12] considère pas de l’intérieur, par le relevé d’une série de traits ascriptifs, mais dans une tension avec l’extérieur – les frontières ethniques – qui fait ressortir telle dimension plutôt que telle autre et dans une interaction dynamique qui ne fige jamais l’identité. Aujourd’hui, un tel point de départ ressemble à une évidence… Cette lecture s’est avérée être l’une des premières ressources de ma boîte à outils, offrant comme finalité à l’analyse d’autres produits que la modélisation et les typologies. Il y avait là une ressource pour décrire le changement et la manière dont les choses changent. La question d’un certain changement social était bien au cœur des analyses de science politique qui offraient le plus grand nombre d’articles et d’ouvrages disponibles sur la communauté druze en Israël. Les termes en étaient des plus classiques : voici donc une communauté arabe traditionnelle, vivant essentiellement jusqu’il y a peu des ressources de l’agriculture, dirigée selon des hiérarchies patriarcales qui cherchent à protéger leur mode de vie, mais qui doit cependant s’adapter à la modernité israélienne. Une antithèse. Tiraillés entre une culture traditionnelle arabe et une citoyenneté israélienne, les Druzes que décrivait cette littérature étaient campés comme une société « en crise », ayant des difficultés à s’adapter à la structure étatique et aux exigences de la démocratie israélienne 6. Mes lectures révélaient une conception de l’identité univoque et politiquement restrictive. Univoque parce que les observateurs y considéraient exclusivement les relations entre l’État (israélien) et les groupes (les différentes minorités religieuses), relations mises en scène sur le mode du rapport de force (les « pressions » de la modernité politique et économique, les « résistances » de ces communautés locales). Ainsi de manière plus générale, la modernité politique, sous la forme des États nationaux, était introduite dans le tableau comme élément De manière plus critique il me semblait que trois types d’analyses du rapport entre la minorité druze et l’autorité politique étaient proposés : (1) une analyse en termes de changement social. On concevait l’identité druze comme l’ensemble des traits traditionnels dans les comportements et les institutions. Opposés à la pression de la modernité occidentale ils empêchaient une intégration réussie à l’État d’Israël ; (2) une analyse qui s’attachait à l’étude des relations de pouvoir et du « jeu politique druze ». L’identité était appréhendée dans le cadre d’allégeances multiples, comprises comme la manifestation d’un opportunisme politique fondé sur la taqiyya (principe de dissimulation qui permet aux minorités persécutées d’affirmer leur appartenance à la majorité tout en préservant secrètement leur identité religieuse véritable) ; et (3) une analyse du niveau politique local – celui de la communauté – dans ses réactions au niveau politique global – celui de l’État israélien – qui entendait montrer que l’identité ethnique s’était constituée en réaction aux pressions extérieures au détriment des modes de groupement politiques traditionnels : la filiation (patrilignage) et l’alliance (faction politique). 6 [13] déstabilisateur parce que développant, au sein des minorités, des niveaux d’appartenance différents. Ce conflit entre loyautés contradictoires ne trouverait sa résolution que dans la construction de projets séparatistes. Mais en posant que l’existence d’une minorité dans un État exige la constitution, comme dans un miroir, d’une structure politique qui ressemble peu ou prou à un État en miniature (le groupe ethnique), ces analyses d’inspiration juridico-politiques s’enferment dans une vision réductrice du tout ou rien, de l’édification nationale ou de la crise et du conflit. Un premier séjour en Israël de trois semaines entre décembre 1990 et janvier 1991 au cours duquel j’ai eu l’opportunité de séjourner trop rapidement dans deux villages druzes m’avait laissé une impression bien différente. Les Druzes qui m’avaient accueillie semblaient savoir très bien où ils en étaient. Je doutais que cette communauté fut « en crise d’identité ». Ceci était très superficiel et cette première visite a été davantage marquée, dans ma mémoire, par les heures passées avec des étudiants de l’université hébraïque (des amis d’amis parisiens) à discuter des SCUD irakiens qui menaçaient de s’abattre dans la banlieue de Tel Aviv en apprenant à enfiler correctement les masques à gaz largement distribués dans la population. La région était à l’aube de la première guerre du Golfe. Il n’empêche, ce bref séjour fut suffisant pour me convaincre de l’intérêt d’étudier les Druzes d’Israël en changeant d’approche. L’essentiel de ce premier mémoire a constitué en un exposé critique de la perspective implicite conduisant à ces lectures en termes de « crise d’identité » : la nécessité d’adapter les structures sociales et le leadership d’un ensemble humain considéré – en l’occurrence une minorité communautaire – à l’État moderne ou à une forme de nationalisme moderne. Ces gens avaient la caractéristique de ne revendiquer ni l’un, ni l’autre. En réponse à mes premières questions naïves sur ce qui faisait d’eux des Druzes, mes interlocuteurs avaient répondu avec la force de l’évidence : « parce que nous sommes de religion druze ». La religion n’avait pas encore la force politique qu’elle allait prendre dans les études de sciences sociales sur la région par la suite. Le fait religieux était encore perçu comme attachement à la tradition, ce qui justifiait que les Druzes soient campés comme une communauté traditionnelle. Mais puisque c’était ce vers quoi ils pointaient comme caractéristique première de leur identité, il me faudrait en tenir compte. [14] L’enquête sur l’identité religieuse druze que j’envisageais ainsi de conduire dans le cadre de la thèse à venir se heurtait cependant d’emblée à une difficulté logique majeure. La caractéristique principale de la religion druze est d’être une religion secrète, dont la pratique est soumise à une initiation qui différencie une minorité de « sages », désignés comme les ‘uqqâl (sg. ‘âqil) quand la majorité des Druzes non-initiés demeurent « ignorants » (juhhâl, sg. jâhil). Cette particularité m’amenait à problématiser plus spécifiquement l’étude à venir autour d’une question fondamentale : comment une communauté peut-elle définir son identité fondamentale autour de la religion quand la plupart de ses membres sont exclus de la connaissance et de la pratique de cette religion ? Seules les ressources méthodologiques de l’anthropologie fondées sur une ethnographie de long terme et le partage de la vie quotidienne des Druzes me semblaient à même de me permettre de répondre à cette question. Sans autre préparation que l’enseignement dispensé par Raymond Jamous à l’EHESS, les lectures qu’il m’avait conseillées alors 7 et la lecture assidue du Manuel d’Ethnographie de Mauss, je décidais de me faire ethnographe. Sur les hauteurs du Mont Carmel Au cœur de l’été 1992, je m’installais chez Fayîz ‘Azzâm, dans le village de ‘Isfiyâ sur les hauteurs du Mont Carmel. J’avais la chance de bénéficier d’une allocation de recherche et d’un rattachement institutionnel au Truman Institute for Peace Studies de l’université hébraïque de Jérusalem et je pouvais envisager sereinement ce terrain. Fayîz ‘Azzâm occupait alors des fonctions d’inspecteur de l’éducation pour les matières relevant des « coutumes et traditions druzes » 8 dont il rédigeait en collaboration les programmes. C’est à ce titre que l’on m’avait adressée à lui pour les besoins de mon enquête. Je me souviens très clairement de cette première rencontre alors qu’il m’avait invitée à déjeuner chez lui afin que je lui expose ce que je cherchais. Je réalise que En matière d’introduction à la discipline, j’avais lu Louis Dumont, Charles Malamoud, Erwin Goffman, Clifford Geertz, Malinovski, Edmund Leach, Ernest Gellner, Evans-Pritchard, Michael Gilsenan, Abner Cohen, le Barth des Swan Pathan, Jacques Berque, Abdallah Hammoudi, Hassan Rachik, Jocelyne Dakhlia pour citer celles de ces lectures qui ont eu une influence durable sur mon travail. 8 La spécificité de la religion druze était à l’origine de cette formulation de l’intitulé qui équivaut, pour les autres religions, à des cours d’éducation religieuse. 7 [15] je devais être bien trop jeune à l’époque pour mériter une réception formelle au salon et c’est sur la terrasse de la maison que je me vis servir le café et les fruits alors qu’il me questionnait dans un anglais rudimentaire sur mon parcours et ce en quoi les Druzes m’intéressaient. Il avait déjà entendu parler de la première visite que j’avais faite dans le village voisin. Hochant la tête avec bienveillance, il m’écoutait expliquer que je cherchais à trouver un lieu où résider à ‘Isfiyâ, pendant un an ou deux, que je souhaitais étudier ce village plutôt que Daliyat alCarmel parce que ‘Isfiyâ abritait aussi une population chrétienne. Puis nous passâmes à table en compagnie de ses filles de mon âge, les plus jeunes mangeaient à part. Restée silencieuse tout au long de la visite, son épouse m’observait avec un intense regard bleu. Comme convenu, le lendemain, je rappelais Fayîz. Il m’annonça que deux de ses filles entraient à l’université cette année, qu’avec sa femme, ils avaient envisagé d’héberger deux autres jeunes filles originaires d’un village druze de Galilée qui venaient également suivre des études à l’université de Haifa et, si j’acceptais de m’installer avec ces quatre compagnes dans le sous-sol aménagé en deux grandes pièces de la maison contre un loyer modique, j’étais la bienvenue. « Imm Shu’ayb think you are a good person » a-t-il conclu. J’avais ainsi passé le premier test auprès de la maîtresse de maison à qui, je l’avais compris, revenait la décision de mon installation dans la famille. Fayiz et Kamle ‘Azzâm avaient huit filles, entre 28 et 8 ans, et un garçon jeune adolescent à l’époque. Je ne manquais pas de compagnonnage durant les premières semaines de mon séjour, emmenée en visite chez les trois ainées mariées, installant bureaux et commodités avec les deux suivantes à l’étage inférieur, risée des plus jeunes que mes rudiments d’arabe littéraire amusaient beaucoup. Je cessais vite d’ailleurs de m’essayer à mobiliser ce que j’en avais appris les deux années précédentes pour m’absorber pendant des heures dans le manuel d’arabe parler syro-libanais que j’avais emporté dans mes bagages. La famille m’emmenait presque tous les jours en visite dans le village, chez les membres de la famille, les voisins, les connaissances : on me présentait et il fallait que je sois identifiée par tous. J’appris avant toute chose les rituels de la visite orientale et les règles de l’hospitalité. Cantonnée aux observations visuelles alors que je ne maitrisais pas encore le fil des conversations, je notais scrupuleusement de quoi étaient faits les intérieurs, les différents agencements, la décoration ; je faisais des hypothèses sur les variations dans le statut social. On m’emmenait encore assister à quelques mariages et les jeunes filles s’amusaient follement à [16] m’enseigner les rudiments de la dabke afin que j’y fisse bonne figure. Après quelques semaines, je maitrisais une première cartographie pratique de ce village druzo-chrétien, les quartiers où la famille se rendait fréquemment, ceux où l’on ne se rendait pas. Je reportais tout ceci soigneusement sur le grand décalque de la carte topographique que je m’étais procurée au conseil municipal. Et puis, Fayiz qui travaillait à un nouveau manuel scolaire pour les petites classes de primaire et ayant observé mon goût pour l’aquarelle m’avait demandé de réaliser les illustrations de l’ouvrage. Nous y discutions des mises en scène de l’image. Je tentais de cerner des attentes et j’y répondais comme je le pouvais. Bref, j’avais le sentiment de commencer mon enquête… Tout a cependant débuté véritablement en septembre lorsque l’été finissant, chacun a retrouvé le chemin de la classe. Après huit heure tous les matins, et alors que tout le monde était parti, Kamlé me sonnait par l’interphone interne afin que nous prenions ensemble un petit déjeuner et la première tasse de café de la journée. Et puis commençait la préparation du repas – une dizaine de personnes à nourrir chaque jour, ce n’est pas une mince affaire – et une fois par semaine, la grande entreprise de la confection du pain. D’autres tasses de ce café à la cardamone dont le parfum me manque souvent. Je voulais comprendre les traditions druzes ? Voilà où il fallait que je sois, dans la cuisine, à observer et participer. Mes compétences dialectales progressant avec le temps, ces matinées ont été l’occasion de discussions de plus en plus fréquentes avec Kamle. Elle avait entrepris de faire mon éducation de jeune fille respectable dans la société druze. Le sharaf, voilà ce qui était important entre tous et je devais savoir bien me comporter pour que sa maison ne souffre pas d’héberger une étrangère, une occidentale. Kamle m’apprit ainsi les façons de tenir son corps, de s’asseoir, de se mouvoir. L’enjeu était de faire de moi une jeune femme modeste, c’est-à-dire, de confirmer que j’étais en effet « une bonne personne ». Elle commentait chacune des visites que nous continuions à rendre régulièrement dans le village. Elle pointait ce qui était « bien » (mnîh) et ce qui « n’était pas bien » (mesh mnîh). « Notre religion est comme ça » disait-elle régulièrement, « c’est le comportement ». Et à l’appui de chaque démonstration venait un récit ou une légende sur les saints, les shaykhs, l’exposé d’une règle, la force de la morale. Tout ce qui avait trait à la préparation des repas était également commenté et imprégné de commentaires. [17] « Les Druzes ne doivent manger que ce qui vient de leur travail, il faut faire les choses de ses mains », cela aussi c’est la religion. Ainsi, alors que je m’étais préparée à la difficulté inhérente de conduire une enquête dans une société réputée secrète, on me parlait avant tout de religion. Il me fallait reconfigurer ce que je pensais relever du domaine de « la religion » en fonction de ce contexte. Il ne s’agissait pas d’un corpus textuel, de rituels conduits par une classe de religieux, de catéchisme, ni même de foi ici. Ces éléments qui définissaient jusque-là la conception que je m’étais faite de la sphère du religieux n’étaient certes pas absents, mais ils n’étaient pas l’essentiel. L’essentiel, c’était cette morale religieuse du quotidien que chaque Druze, dans son comportement, se doit de vivre pour maintenir la distance et perpétuer l’entre-soi. À la différence d’Eléanore Armanet qui a également longtemps vécu dans un village druze de Galilée quelques années après, je n’ai pas choisi de construire exclusivement mon analyse sur cette dimension féminine de la religion, en acte, dans les foyers, autour des pratiques féminines. En se concentrant sur la description minutieuse de la confection du pain, de l’emmaillotage des nouveaunés, des manières de plier les voiles féminins et d’y emmailloter également le livre religieux, E. Armanet a défendu l’idée que l’identité druze doit être saisie comme expression d’une religion matricentrée. Cette thèse que j’ai discutée lors de sa publication (HDR, vol.3 : 321) traite effectivement d’une configuration centrale dans l’expression religieuse de la communauté druze d’Israël. Je crois qu’elle complète d’une manière extrêmement sensible le travail que j’ai réalisé de mon côté en partant des mêmes prémisses et des mêmes intuitions. Mais mon projet d’élucidation de cette communauté n’entendait pas rejeter tous les extérieurs comme ce qu’il convient de garder à distance d’un point de vue druze et donc, hors du champ de l’intérêt ethnographique. Je voulais également considérer ces relations et en donner une analyse, considérer la trajectoire historique particulière de cette communauté, les choix politiques de son leadership, son positionnement lors du processus d’Oslo. Mon horizon anthropologique demeurait politique. Ordre mondain et ordre religieux Au fil de nos conversations, Kamle m’avait donné la clé de sa conception du monde. Il y avait d’un côté ce qui relevait de la politique de village, des disputes [18] entre lignages, du prestige que chacun cherche à gagner pour lui-même, de l’activité des hommes qui se mettent en avant, la danse, la musique. Cela, c’est la dunya, tout ce qui fait que l’homme pense d’abord à lui. Cela comprend donc aussi le blâmable, tout ce qui était mesh mnîh, des comportements non honorables, à l’adultère, la vie de compromission hors du village et le mariage hors de la communauté qui excluait définitivement. De l’autre était la religion, le respect pour les shaykhs, le fait de ne pas manger de l’extérieur de la maison, de ne pas être attiré par l’extérieur du village et aussi le renoncement et l’ascèse. Cette dichotomie semblait exprimer parfaitement l’opposition entre ignorants et religieux et rendre compte des conditions dans lesquelles on accède à la religion et à ses secrets. Je disposais désormais d’une boussole pour poursuivre mes investigations en dehors du patronage de mes hôtes. Et j’ai consacré la seconde partie de mon séjour à recueillir nombre de récits d’origine de lignages, d’histoires sur le village et les événements de la révolte arabe de 1936, de controverses sur l’opposition factionnelle et les relations avec les partis politiques israéliens. Les interlocuteurs moins réservés m’ont également révélé des conflits touchant à l’honneur et à l’adultère dans le village. Ces révélations ont d’ailleurs été mal accueillies par Kamlé auprès de qui je cherchais confirmation et qui jugeait alors que mes interlocuteurs violaient le secret de la religion. Et voilà que je comprenais alors que le « secret de la religion » relève avant tout de la frontière « morale », celle qui dissimule à l’étranger les mauvaises choses de soi. Une affaire d’interprétation selon les uns ou les autres, donc. Je pouvais en revanche questionner sans limites sur tout ce qui doit caractériser les hommes de religion, des « débutants » aux plus grands shaykhs et ce qu’il convient de faire pour accéder à l’initiation. Les juhhal savent tout cela puisqu’il savent qu’ils devront en passer par l’initiation avant leur mort pour être assurés que leur âme se réincarnera bien dans la communauté. La dichotomie qui paraissait traverser toute l’organisation sociale des Druzes en Israël a naturellement été l’axe autour duquel j’ai choisi d’organiser la thèse qu’il me restait à écrire après mon retour du terrain en décembre 1993. Cette analyse de l’organisation sociale m’a conduite à étudier des institutions (lignages, factions politiques), des croyances et des pratiques religieuses (référence à un monothéisme exclusif, formes d’ascétisme, rapport à un texte sacré), des valeurs (honneur), des rituels, etc. que toutes les populations du monde arabe ont en partage. Toute ma démonstration a consisté à montrer que ce qui fait la spécificité [19] des Druzes ne réside pas dans un certain nombre de traits particuliers, mais dans une manière d’agencer des éléments communs autour d’une religion communautaire exclusive. Paradoxalement, j’en ai entrepris la rédaction par la fin… ou pour être plus précise, le premier chapitre que j’ai rédigé quelques semaines après mon retour à la demande de Lucette Valensi afin d’être présenté dans le séminaire des doctorants qu’elle venait de mettre en place pour cette année universitaire est finalement celui que j’ai placé à la fin du volume. Il s’intitule « Des femmes en pleurs » et porte sur l’analyse du rituel funéraire dont j’avais eu le privilège de suivre toutes les étapes, Kamle ayant un jour pris le risque de la désapprobation sociale en m’autorisant à l’accompagner à la khalwe pour assister à des funérailles. « C’est important, ce sont nos coutumes, il faut que tu puisses voir cela après tout » avait-elle dit ; et elle avait tenu tête devant l’assemblée des femmes. C’est en m’attaquant d’emblée à cette ethnographie des funérailles et du passage de l’âme d’un corps vers un autre corps qui assure, selon la croyance druzes, la permanence de la communauté, c’est en développant cette analyse du deuil qui vide la maison de son « pilier », de sa capacité à assurer l’hospitalité et donc à jouer le jeu lignager, et cette analyse de la mort de l’enveloppe charnelle qui prive théoriquement chaque Druze de son individualité dans cette vie au profit de la permanence de son âme dans la communauté que j’ai déployé pour la première fois la dichotomie de Kamle sur une variété de niveaux. Je n’avais plus seulement deux termes (dîn wa dunya), j’avais désormais un ensemble d’implications qu’il me fallait organiser à partir des matériaux consignés dans mes carnets d’enquête et dans toutes les cassettes d’entretiens que seul un long, très long travail de retranscription allait mettre à plat. Al-dîn wa al-dunya pouvait être transformé en « ordre religieux » et en « ordre mondain ». Les Druzes comme « unitaires » : histoire de la prédication et principes au fondement de la religion Parallèlement à ce travail de retranscription de la cinquantaine d’entretiens que j’avais réalisés au cours de mes seize mois d’enquête, j’entreprenais de me documenter aussi précisément que possible sur l’ensemble des traditions religieuses orientales, ismaélisme et soufisme en tête, afin d’être en mesure de situer ce que je savais de l’éthique religieuse druze et de ses caractéristiques [20] fondamentales (secret, croyance en la réincarnation selon la religion, endogamie communautaire stricte, conception cyclique de l’histoire de l’humanité et parousie) afin de la resituer dans ces traditions. À ce titre, le chapitre qui ouvre Les Maîtres du secret est un travail qui repose sur des sources de seconde main, essentiellement occidentales. On a pu me le reprocher à juste titre 9. Mon ambition n’était certainement pas de m’aventurer sur le terrain de l’islamologie pour lequel je n’ai que peu de compétences. Il s’agissait seulement, selon moi, de reconfigurer le patient enseignement de la religion en cuisine dispensé par Kamlé dans les termes d’une sociologie religieuse inspirée de très loin par Jean-Paul Charnay 10. Mon ambition était de retracer la genèse, dans la culture sociale et religieuse d’une période donnée de l’histoire des sociétés proche-orientales, des traits caractéristiques qui avait permis à ce schisme religieux-là de se constituer en communauté distincte 11 et surtout de perdurer en tant que telle quand tant d’autres tentatives schismatiques ont fait long feu. Cette culture sociale et religieuse était celle du XIe-XIIe siècles, celle de sociétés prises dans les rivalités politiques et idéologiques entre le califat abbasside à Bagdad et le califat fatimide au Caire et qui connaissaient un formidable bouillonnement intellectuel sous l’influence entre autres de mouvements religieux venus d’Iran et de la redécouverte de l’héritage philosophique grec. Aussi, c’est ainsi que j’ouvrais mon entreprise de compréhension des conceptions religieuses druzes : L’histoire de la religion druze est avant tout l’histoire d’une rupture avec cet ensemble religieux et social qu’est la communauté islamique (al-‘umma al-’islamiyya). La doctrine, que les Druzes désignent sous le nom de « religion unitaire » (al-dîn altawhîd) a été formulée au début du XIe siècle à la cour du calife fâtimide al-Hâkim bi-‘Amr Allâh (qui a régné de 996/387 à 1021/411). Elle est largement inspirée de la synthèse entre la théologie islamique shîcite et la philosophie néoplatonicienne réalisée dans la pensée ismâcîlienne, dont les cercles animaient alors la vie religieuse au Caire. Principal architecte du dogme druze, le persan Hamza ibn cAlî a développé les aspects les plus extrêmes de cette pensée au point que soit proclamée la divinité du calife al-Hâkim en 1017/408. Cette révélation (fath) marque le début de Voir notamment le compte-rendu de Mohamed Hocine Benkheira publié dans Studia Islamica, 94/2002 : 210-211. 10 Jean-Paul Charnay, Sociologie religieuse de l’Islam, 2e éd., Paris, Hachette, 1994. 11 Sous la désinence autorisée d’école juridique, madhhab 9 [21] l’ère druze. Le nouveau dogme a été immédiatement condamné comme hérésie polythéiste (shirk) par les musulmans, et ses sectateurs poursuivis et exterminés. Devant cette répression, Bahâ’ al-Dîn, quatrième ministre de la hiérarchie druze qui avait poursuivi la dacwa après la disparition de Hamza, décida de mettre fin à toute activité prosélyte en 1043/434 et « ferma les portes de la religion ». Mais les partisans de Hamza ont réussi à s’implanter définitivement au sein des populations montagnardes syro-libanaises où ils ont posé les cadres de la communauté druze. D’un point de vue anthropologique, il s’agit de comprendre comment une divergence doctrinale s’est incarnée dans le corps social en délimitant et en définissant, de manière exclusive, une communauté particulière. Pour ce faire, j’ai analysé l’une après l’autre les notions qui n’avaient cessé d’émailler les conversations que j’avais eues sur le terrain, en établissant une relation entre ce « savoir local » et une « culture globale » largement imprégnée dans ce cas des notions essentielles du soufisme, la mystique musulmane. L’enquête commence naturellement par la notion de tawhîd, d’unicité, tellement centrale que les Druzes se désignent comme les muwahiddîn, les « unitaires ». Il fallait d’autant plus creuser cette notion qu’elle est également la notion cardinale au fondement de l’Islam, exprimée dans la profession de foi « il n’y a de Dieu que Dieu » (la Ilâh illa Allâh). En quoi les Druzes étaient-ils donc les plus Unitaires des Musulmans ? La réponse que j’en ai proposée est largement adossée à l’éthique soufie qui imprègne les conceptions exprimées de la religion druze : l’idée que la religion est cheminement et travail sur soi pour se préparer à recevoir le divin. Mon entreprise d’élucidation s’est largement appuyée ici sur les travaux de Reynold Nicholson dans son The Idea of Personality in Sufism 12 dans lequel il montre que le tawhîd dans le soufisme est le moyen doctrinal de préserver la transcendance absolue de Dieu au fondement de l’Islam tout en recherchant la relation personnelle avec Lui. En somme, la résolution d’une contradiction possible entre la nécessité de transcendance absolue et le besoin de relation personnelle. Dès lors le tawhîd n’est plus quelque chose qui doit être appréhendé par l’intellect, mais devient un mystère révélé par Dieu à ceux qu’Il guide dans leurs expériences religieuses. Voilà l’idée qu’exprimaient les Druzes quand ils me disaient que l’initiation est une recherche qui permet de faire l’expérience d’un savoir acquis de manière 12 Lahore, 1964. [22] individuelle et qui est incommunicable – c’est là le secret, celui de la relation entre les plus accomplis des religieux et le Dieu ineffable. Il me semblait alors que d’un point de vue philosophique, l’originalité de ce monothéisme résidait dans la conception « monadologique » qui l’exprimait. À la base du tawhîd, il y a l’idée que Dieu n’est pas « être », mais « faire-être » et que de ce « faire-être » a émané un « être » initial, premier terme de la hiérarchie cosmique des manifestations de Dieu. Dans cette hiérarchie, chaque degré (hadd pl. hudûd) – qui est une entité dans l’Unité de Dieu – est défini dans son être par le degré qui le précède tandis que lui délimite le degré suivant : c’est ce processus, le tawahhud qui est constitutif de l’Unité. J’empruntais ensuite à Henri Corbin, Histoire de la philosophie islamique en 4 tomes 13, les ressources pour asseoir ma compréhension du système religieux druze et relire à cette aune le travail magistral de ce grand ancêtre de l’orientalisme français qu’est le baron Antoine Sylvestre de Sacy dans son Exposé de la religion druze 14 qui n’a curieusement jamais été traduit. Cette démonstration me permettait de comprendre que les Druzes se figurent l’origine historique de leur religion comme une fin, la fin des cycles de la propagation des diverses religions monothéistes, durant lesquels le choix d’une religion était ouvert à tous les hommes. Après le calife al-Hâkim, ultime manifestation de Dieu sur Terre, une séparation définitive est établie entre les hommes et les Druzes sont désormais le peuple élu, ou plus exactement le peuple de ceux qui se sont engagés dans la voie de la Vérité. Cette Vérité est figurée comme un noyau qu’entourent les vérités partielles contenues dans les autres religions. À l’extérieur, il y a les religions de l’Apparence (zâhir) : les hommes n’y connaissent Dieu que par l’accomplissement de rituels et le respect de la Loi (le judaïsme, la doctrine chrétienne et l’Islam). Plus proches de la vérité se trouvent les religions du sens caché (bâtin) qui prétendent trouver Dieu dans l’exégèse de Sa Parole (le shîcisme, l’ismâcîlisme et la mystique soufie). La religion unitaire est la Vérité 15, car elle est confession de l’Unité de Dieu par le cœur, qui est la seule Paris, 1964. Paris, Bibliothèque royale, 1838. 15 Je ne résiste pas au plaisir d’ajouter cette précision sémantique sur la notion de vérité et ses différents champs lexicaux en arabe. Deux termes permettent en effet en arabe d’exprimer la notion de vérité : haqîqa et sadâqa. La haqîqa, c’est la vérité dans son sens d’authenticité. Les mystiques opposent la haqîqa comme Loi intérieure s’exprimant dans une manière de vivre et de se comporter à la sharîca, la Loi extérieure fondée sur l’obéissance et l’encadrement par la vie rituelle. Sadâqa et 13 14 [23] expérience possible du tawhîd. Le zâhir et le bâtin ne sont pas rejetés, ils sont seulement dévalorisés par rapport à la révélation parfaite contenue dans le tawhîd. Voilà en quoi les Druzes se considèrent comme les vrais muwahhidîn. Jusque-là, rien d’extraordinaire, dira-t-on. Rien d’autre qu’une doctrine religieuse qui se pense dans la continuité d’une tradition tout en s’érigeant comme son perfectionnement ultime, indépassable. Je retenais tout de même que la conception de ce perfectionnement n’était pas imputée à un agent détenteur d’une humanité extra-ordinaire, un Prophète, un envoyé 16, mais reposait sur un cheminement de chaque individualité de l’apparent vers l’intime, du zâhir vers le bâtin, deux notions que j’avais entendu évoquer de manière récurrente sur le terrain. Et puis, encore faut-il trouver les moyens d’en assurer la clôture sociale et c’est bien à l’exposé de ces mécanismes que visait le travail de compréhension auquel je m’étais alors assignée. La religion « rabattue » sur la communauté C’est autour de la croyance en la réincarnation, forme d’étirement conceptuel des conceptions cycliques de l’ismâcîlisme où le perfectionnement peut s’étendre audelà de l’apparence d’une incarnation terrestre que ces mécanismes de clôture trouvent leur ancrage logique. La croyance en la réincarnation démultiplie sur une succession de vies l’effort du mystique qui, de station (maqâm) en station, par sa discipline ascétique garante d’une plus grande pureté, parvient à l’anéantissement en Dieu (fanâ’). Après quoi les âmes des Parfaits, devenues « les Lumières son corollaire sadîq, construits sur une racine qui est à l’origine un emprunt sémantique au judaïsme, réfèrent plutôt à la notion de véridique, c’est-à-dire à la relation développée à un même point fixe conçu comme vérité. Sadîq est un terme récurrent dans les écrits religieux druzes, qui en donnent plusieurs explications sous forme cabalistique en l’opposant au kidhb, le mensonge. Enfin, l’extension lexicale de la racine sdq porte aussi le sens de l’intégration, de l’appartenance à un groupe – la communauté musulmane dans l’Islam, mais partant, tout groupe qui se réaliserait autour du partage de la véridicité. (Sur cette notion de Sadâqa, j’ai largement utilisé les très belles analyses de C. Decobert dans Le Mendiant et le combattant. L’institution de l’Islam, Paris, 1991, p. 202 sq.). 16 En effet, le calife Al-Hâkim n’est pas envoyé de Dieu, il en est la « manifestation », ce qui n’est pas une incarnation non plus. Il n’a produit aucun écrit, aucune parole. Il est juste le garant des contrats passés par ceux qui ont choisi de le reconnaître avant que cette possibilité ne se referme à jamais. [24] saintes », sont réunies à l’imâm Hamza dans son séjour en Chine. Il a là bien sûr une expression des influences indiennes. La réincarnation (taqammus) est un processus instantané expliquent les Druzes: l’expiation du mourant s’achève dans le cri du nouveau-né, les âmes ne connaissent pas l’errance. Les âmes humaines sont dotées de l’éternité (khulûd) et leur nombre a par ailleurs été fixé par Dieu à l’origine. Si tous les hommes se réincarnent et sont susceptibles de s’améliorer, seuls les muwahhidîn peuvent prétendre à la perfection, car ils sont les seuls à avoir accepté le contrat de Dieu (mîthâq) à l’époque d’al-Hâkim. La conception druze de la métempsycose reste marquée par les frontières sociales et naturelles. Non seulement les Druzes ne reconnaissent que le passage des âmes dans des formes humaines, mais la réincarnation respecte aussi l’appartenance religieuse et le sexe. La fermeture des portes de la religion (‘iqfâl al-dacwa) par Bahâ’ al-Dîn en 1043 réalise la « rupture », si l’on peut dire. Les Druzes, condamnés par les Musulmans comme des incroyants (kâfir pl. kuffâr) et réprimés de ce fait, ont redéfini ensuite la frontière les séparant définitivement de l’Islam : les cinq obligations de l’Islam ont été remplacées par cinq obligations tournées vers la préservation de la communauté (voir sur ce point HDR vol. 3 : 283). L’importance accordée à la réalisation individuelle rapproche la religion druze du soufisme musulman. Mais, en fait d’une apparente promotion de l’individu, c’est sur lui-même que le mouvement druze devait se recentrer par son refus de s’ouvrir à la conversion de nouveaux adeptes. L’ensemble normatif qui allait être développé sur les fondements posés par les prédicateurs tendait principalement vers la préservation d’une communauté qui venait de se définir par l’exclusion de toute conversion et le secret de sa doctrine. La pérennité de ce choix étant assurée par le mécanisme de la réincarnation : aucune unité druze ne peut se perdre, aucun non-Druze ne peut tromper durablement sur la sincérité de son adhésion. Cette construction doit se comprendre comme une réorganisation, au profit de la communauté, des valeurs qui fondaient la pérennité des groupements de parenté. En effet, la prédication druze, lorsqu’elle s’est développée dans les contrées levantines, n’a pas converti des individus, mais des clans et des familles. Chacune de ces familles constituait socialement une unité indépendante basée sur des solidarités traditionnelles, c’est-à-dire sur une parenté réelle et des réseaux de patronage créateurs de parenté fictive. Une telle forme de solidarité est toujours [25] une solidarité particulière : les mécanismes institutionnels et structurels mis en œuvre pour l’assurer et la perpétuer ne peuvent s’exercer au-delà du cadre limité des relations de parenté. Une communauté ne pouvait pas s’édifier par l’extension pure et simple de ces mécanismes, au point de former une sorte de « super-tribu ». Ou alors, il aurait fallu que la communauté druze se forge une sorte d’unité mythologique, se réfère à un ancêtre mythique eut pu venir d’Égypte et dont seraient descendu l’ensemble des clans composant la communauté. Et ce n’est pas la solution qu’ont adoptée les Druzes. Au contraire, dans un tel modèle d’organisation sociale composé de groupes sans relations de parenté immédiates, chaque unité familiale se trouve en situation d’opposition, de conflit ou d’alliance avec les autres unités du même type et c’est dans ce jeu qu’elle affirme les liens de solidarité qui la constituent. L’affirmation trop forte d’un mode de solidarité fondé sur la parenté créait nécessairement une tension avec les besoins de la communauté prise dans son ensemble. Par ailleurs, la religion druze, dont le dogme refuse catégoriquement toutes les formes de rituel, ne mettait pas à la disposition de ses membres une structure au travers de laquelle ils auraient pu s’identifier comme appartenant à une même communauté religieuse. De plus, la pratique et l’accès au savoir religieux devenant l’apanage d’une minorité, l’impact de la religion sur la société druze aurait pu, à terme, s’estomper au point de n’être plus pertinent pour définir son identité. Il m’a semblé que là était la clef qui permettait de comprendre le développement particulier que les Druzes ont donné à la notion de parenté artificielle : non pas une parenté mythique renvoyant à un ancêtre commun sur le modèle des récits d’origine tribaux, mais une parenté dans la religion. La croyance en la réincarnation, qui a connu un formidable essor dans les décennies qui ont suivi l’arrêt de la prédication, a largement contribué à l’enracinement de la conscience que les Druzes avaient de partager un même sang. Le corollaire de cette affirmation, pour une communauté qui venait de se fermer à la conversion de nouveaux adeptes, ce fut l’exigence de l’endogamie pour tous ses membres, hommes et femmes. L’authenticité du passage dans le corps d’un membre de la communauté de l’une des âmes ne pouvait être garantie que s’il était le fruit de l’union d’un homme et d’une femme druzes. Au-delà de la solidarité familiale effective, tous les Druzes deviennent potentiellement des parents : ils l’ont été dans une existence antérieure ou le seront dans une prochaine. À un niveau idéal, la communauté druze se projette comme une unité [26] de parenté réelle : « kul al-durûz qarâ’ib ». La préservation de la pureté du sang par l’endogamie et la préservation du secret de la religion ont quasiment fusionné pour constituer le cœur des qiyam al-dîn al-durzî, cet ensemble de normes nonécrites, à caractère religieux, que les Druzes considèrent comme le fond de leurs coutumes et traditions (câdât wa taqâlîd). En « traduisant » la religion dans l’idiome de la parenté, ou en « englobant » la parenté dans une référence religieuse ultime, les prédicateurs à l’origine du mouvement ont favorisé l’expression d’une sensibilité druze par tous les membres de la communauté, tout en conservant à quelques initiés le contrôle sur l’aspect scripturaire et le dogme secret de leur religion afin d’éviter tout conflit d’interprétation, voire même, la possibilité de l’interprétation. De cette manière, une partie des valeurs sociales qui régissent les relations sociales entre les groupes de parenté se sont trouvées projetées sur la communauté. Et en premier lieu l’honneur, véritable ethos culturel, qui sanctionne la solidarité des hommes au sein du groupe de parenté et marque sa frontière avec les groupes extérieurs. La religion druze a, d’une certaine manière, pris une tournure de religion « civique » : l’importance du salut individuel est finalement secondaire à côté de la défense de la communauté et de ses valeurs. Après le premier cadrage par l’analyse des rituels funéraires, ce second cadre, « en surplomb », que m’a fourni l’analyse des grands principes mis en avant par la doctrine religieuse druze – sa morale devrais-je plutôt écrire – achevait de borner le déroulement de mon récit. J’avais un début et une fin, un fil d’Ariane à tisser autour de la réincarnation des âmes qui travaille la parenté lignagère en parenté communautaire. Il ne restait plus qu’à mettre de la chair ethnographique sur le passage de la mondanité à la religion que mes hôtes n’avaient cessé de me faire apparaitre comme la tension orientée de toute bonne vie druze. Je n’entrerai pas ici dans le détail de cet exposé qui a constitué le corps de ma thèse. J’en ai repris l’argument de manière synthétique dans la première partie d’un article rédigé plus tard pour les Annales ESC, paru en 2001, « Le poids de l’histoire. Druze d’Israël et Druzes du Liban face à l’État » (HDR, vol.3 : 155-179). J’ai soutenu ce travail en novembre 1997, pour lequel j’ai eu l’honneur de recevoir le prix de thèse l’année suivante avec, à la clé, une publication aux Éditions de l’EHESS. J’ai l’immense chance d’avoir eu récemment l’opportunité de le voir traduit en arabe. Sami Amer, le traducteur est un Druze de ‘Aley et nous avons eu l’occasion d’échanger longuement sur la manière de rendre ce texte qui aborde l’univers [27] religieux. C’est une question sensible. Le livre publié à Beyrouth est sorti en mars 2016 avec une nouvelle préface (HDR vol.3 : 327). Je suis impatiente de voir la réception qui lui sera faite. [28] Chapitre 2 Défaire la relation : Anthropologie de l’ascétisme Il y a quelques mois, j’étais invitée à participer à un colloque 17 sur Les Versets de l’invincibilité de Fanny Colonna, ouvrage sur le réformisme musulman en Algérie auquel les organisateurs de la manifestation entendaient donner l’écho qu’il n’avait pas reçu lors de sa parution 18. L’ethnographie druze m’offrant peu de moyens de travailler la question du réformisme musulman proprement dite, je choisissais de tisser mon argument sur la mise en exergue d’une formulation concluant l’introduction de l’ouvrage, qui pose avec force le thème central des Versets de l’invincibilité, à savoir que les lettrés hafiz et la culture savante construite sur le cilm étaient en train de disparaitre sous l’effet de la réforme. Fanny Colonna écrit en effet que la force des réformateurs du XXe siècle n’est pas tant de revenir à un savoir épuré ou fondamental, mais de proposer de nouvelles modalités de la présence du Coran dans la communauté. Elle nous dit qu’il sera nécessaire de revenir sur ces propos obscurs. Or, depuis la parution du livre, l’observation et l’étude des modalités de « présence » des phénomènes dans la vie quotidienne, et notamment des phénomènes religieux ou des entités religieuses telles que des Dieux, des saints, des esprits, est devenue l’approche dominante en anthropologie du « Lectures et pratiques des Versets de l’invincibilité. Journées d’étude en hommage à Fanny Colonna », organisées par Emmanuel Blanchard et Augustin Jommier, Paris, 19-20 novembre 2015. 18 Fanny Colonna, Les Versets de l’invincibilité. Permanence et changements religieux dans l’Algérie contemporaine, Éd. Sciences-Po, Paris, 1996. 17 [29] religieux. On le doit notamment aux travaux d’Albert Piette 19, inspiré de ce point de vue par son compagnonnage d’un temps avec Bruno Latour construisant ses « ontologies » comme modalités d’existence ou d’être-au-monde de toute chose et de toute notion ; ou encore aux travaux d’Elisabeth Claverie sur les apparitions de la Vierge à Medjugordje 20. Je m’emparais ainsi de l’idée de « nouvelle présence du Coran dans la société » pour considérer une manière de rendre « la présence du secret » dans la société druze, exposant en partie des matériaux traités autrement dans le chapitre 7 de la monographie sur le « Quant-à-soi druze » (HDR vol.2). À la fin de cet exposé, Mohamed Benkheich me faisait toutefois remarquer que tout ce que je venais de raconter n’avait rien de particulier et que l’on trouve cela partout en Islam. Les chevauchements d’activité m’ayant interdit alors de poursuivre longuement la discussion avec lui – nous étions alors en pleine rentrée littéraire à la MAE – je voudrais profiter de l’exposition rétrospective de mes travaux sur l’anthropologie de l’ascétisme pour discuter ce point qui est capital. Car, je n’ai jamais cherché dans mon travail sur les Druzes, ceux d’Israël en tout cas que j’ai effectivement considérés en tant qu’ils sont une communauté religieuse, à les ériger comme particularisme irréductible. Il me semble d’autant plus important de le dire avec force que l’accusation de « fabriquer » une communauté druze distincte de l’ensemble national palestinien a depuis longtemps été reprochée à l’État d’Israël, en partie à juste titre. D’ailleurs, la monographie sur le Liban à laquelle j’ai travaillé après ce premier opus montre, j’espère, que je n’ai pas cherché à me faire « druzologue », mais bien anthropologue du Proche-Orient ! Dès la publication des Maîtres du secret, je me suis employée à poursuivre la réflexion autour de cette question de la spécificité qui en est une sans en être une. J’y ai notamment consacré un article qui sous le titre de « Penser l’identité et les frontières sociales » s’attachait à développer le point de vue qui me paraissait y répondre le plus précisément possible : montrer comment les Druzes « font du différent avec du même » (HDR, vol.3 : 26 ; voir également l’introduction à ce volume). Chaque trait, chaque aspect pris séparément n’est en rien particulier. Ce n’est qu’à partir du moment où l’on entreprend de considérer les inflexions de ces traits pris ensemble qui, en l’occurrence, pointent toujours vers la réalisation de la Albert Piette, La religion de près. L’activité religieuse en train de se faire, Paris, Metaillé, 1999 et Le fait religieux, une théorie de la religion ordinaire, Paris, Economica, 2003. 20 Elisabeth Claverie, Les guerres de la vierge. Une anthropologie des apparitions, Paris, Gallimard, 2003. 19 [30] communauté comme tâ’ifa et non comme ‘umma, c’est-à-dire comme ensemble borné par la parenté par la naissance et non comme ensemble déterminé par la profession de foi, que le singulier se laisse appréhender. La thèse que je défends n’est rien d’autre que celle d’un religieux « rabattu » sur la communauté comme implication de cette seule différence essentielle que professent les Druzes : la croyance en la réincarnation qui transforme chaque destin individuel en destin pour et par la communauté. C’est la raison pour laquelle j’ai tenté d’en livrer une synthèse dans le premier chapitre de ce texte. En dehors de cela, les Druzes sont bien des musulmans comme les autres… (ou presque), qui mettent l’accent sur la modestie des femmes, sur la maîtrise des désirs terrestres par le tarwîd et le jeûne, sur le dépouillement, sur la solidarité par l’entraide, sur la soumission à Dieu, sur l’évaluation de la vie entre bienfaits et actions répréhensibles, sur la prière par le recueillement, etc. Dans « Penser l’identité », je n’ai pas développé mon argument à partir de la considération d’un aspect de la pratique religieuse, mais à partir de cette valeur partagée entre toutes par les populations de la région : l’honneur. À partir de l’exploration sémantique de l’honneur qui a trois expressions en arabe, je me suis attachée à montrer comment les Druzes infléchissaient une valeur mondaine dans un sens religieux, et donc communautaire. Si l’honneur se décline comme karam, générosité et capacité à prodiguer l’hospitalité, cird, l’honneur du lignage, des femmes et de ce qui ressorti de la vengeance, et sharaf, honorabilité, modestie des femmes et que les Druzes sont pleinement attachés à chacune des expressions de l’honneur, ils subordonnent largement les deux premières à la dernière. Le sharaf al-dîn, la défense de « l’honneur de la communauté » dans les frontières de son domaine du sacré que représentent les femmes et le Livre, sont érigés comme le premier des cinq commandements qui remplacent les cinq piliers de l’Islam. Il en va en effet de la possibilité de réincarner des âmes pures et de protéger le secret de la religion. Si le premier terme (réincarner des âmes pures) est maintenant familier au lecteur, il me faut néanmoins développer plus avant l’exploration de ce sharaf qui commande de « protéger le secret de la religion » en exposant cette partie de mes travaux dans laquelle je me suis attachée à tirer les implications de cette inflexion vers la communauté que je tiens pour la véritable spécificité druze – ce qui permet de constituer une identité particulière. Et ceci, précisément en étudiant l’une des dimensions qui, a priori, semble le moins s’y prêter : l’ascétisme. [31] Mystique communautaire Que l’on me permette, pour introduire ce développement, de recourir de nouveau à l’artifice d’exposition qui consiste à restituer l’exacte formulation de la problématique sur cette question tirée de l’article que j’ai consacré à la « mystique communautaire druze » sous le titre « Una mistica comunautaria. Ascetismo, secret y transmision del saber en la religion drusa » (HDR, vol.3 : 242). L’ascétisme est une dimension essentielle de l’expérience religieuse dans la plupart des grandes religions révélées. Mystiques, yogis, anachorètes, sûfis, renonçants, qu’ils vivent seuls et isolés ou qu’ils s’organisent en confréries ou monastères, posent la question de la quête du divin autrement, à côté ou en dehors des voies et des règles établies par le système religieux. On sait depuis les travaux menés par Max Weber sur les voies du salut-délivrance (Weber, 1996 : 175 sq), ceux de Louis Dumont sur le renoncement en Inde (Dumont, 1979 : app. b) et ceux de Peter Brown sur la chrétienté dans l’antiquité tardive (Brown, 1988) qu’être ascète implique une rupture, exige de se faire étranger à la société à laquelle on appartient pour changer radicalement de statut social, voire ontologique. L’ascétisme peut ouvrir sur la marginalité ou la sainteté, il recèle toujours une dimension subversive parce qu’il questionne les catégories de l’ordre social. Mais qu’en est-il lorsque l’ascétisme est l’ordre religieux, lorsqu’il n’existe d’autres voies que celles de la rupture avec la société pour vivre dans la dimension religieuse ? C’est durant la période de mes recherches consacrées à l’ascétisme que j’ai sérieusement lu Max Weber… et comment en aurait-il autrement sur un tel sujet. J’avais déjà utilisé dans la construction de la thèse la distinction bien connue entre prêtrise et ascétisme telle qu’utilisée dans les travaux de Louis Dumont. Je n’avais pas tiré toutes les implications possibles de la compréhension d’un ordre religion en tant qu’ascétisme dans mon travail et j’ai donc entrepris de le faire sous le patronage de Max Weber, ou plus précisément, par la mise en pratique de la comparaison heuristique si bien enseignée par Raymond Jamous. Dans son Éthique du protestantisme, Weber analyse que logiquement conduits par le dogme de la prédestination à se détourner des problèmes de la théodicée, les doctrinaires des sectes protestantes se sont tournés vers le monde d’ici-bas comme seule dimension dans laquelle servir Dieu. Ce changement radical dans l’orientation cosmogonique de l’action religieuse a surtout eu pour corollaire le [32] développement d’une attitude nouvelle devant la discipline ascétique, analyse Weber. L’ascèse monastique tournée vers l’expérience mystique du catholicisme est en effet rejeté par Luther qui valorise l’ascèse dans le quotidien, faisant ainsi de la vie dans la société tout entière un cheminement ascétique. Ce faisant, les sectes issues du protestantisme ont développé un rapport très critique à l’autorité en place. En effet, la plupart des communautés calvinistes voulaient redessiner la hiérarchie sociale en distinguant les élus, touchés par la grâce divine, des chrétiens passifs et des réprouvés. À partir de ce schéma logique, j’entreprenais de considérer mes matériaux ethnographiques. La communauté druze offre aussi un exemple d’ascétisme dans et pour la société. Mais il se pose en des termes radicalement différents de la configuration puritaniste étudiée par Weber. L’ascétisme n’est pas la preuve d’une quelconque « élection », celle-ci est donnée par la naissance au sein de la communauté et il est seulement nécessaire de la confirmer dans le choix du conjoint. En revanche, elle est la voix impérative pour réaliser un destin d’Unitaire druze. Par ailleurs, alors que la relation à l’ascétisme permet de distinguer chez les puritains entre la secte des élus, menant une ascèse dans le monde comme signe de leur élection et le reste de l’humanité des réprouvés, elle distingue deux manières d’être à l’intérieur de la communauté des vrais unitaires : les ignorants et les religieux-ascètes. Ces derniers réalisent l’expérience d’une vérité, le tawhîd, dont sa communauté se réclame le dépositaire exclusif. Loin de sortir de leur société, les religieux druzes font un parcours qui doit les ériger en référence, une référence active puisqu’ils agissent à travers l’organisation religieuse en tant que guides et juges. Le religieux druze n’est pas ascète à des fins individuelles, pour dépasser un ancrage particularisé et nouer une relation individuelle à Dieu, mais pour sa communauté, parce qu’elle ne peut exister et se perpétuer qu’à travers ces parcours religieux sans cesse recommencés. Et c’est la société tout entière qui doit s’organiser en fonction de leur présence et leur permettre de respecter les règles de conduite dictées par leur engagement. La religiosité des ignorants s’exprime par le respect dû à ceux qui incarnent la religion druze: vivre au contact quotidien avec les religieux et agir avec eux en fonction des valeurs religieuses d’ascétisme et non des valeurs mondaines de rivalité et de prestige inscrit les ignorants dans un universel druze. Ainsi, la rupture avec l'ordre mondain ne coupe pas les religieux de la société. Par la réalisation de cet idéal ascétique, ils vont au-delà des divisions internes à la communauté, des luttes d’intérêt et de pouvoir qui la structurent. [33] Ayant dépassé le domaine mondain et renoncé à leur engagement dans les rivalités de prestige pour atteindre le monde de la connaissance intérieure (bâtin), seule vérité, ils transcendent les oppositions et affirment l’unité idéale de la communauté druze dans la sphère qui leur est propre. Cette distinction m’avait amenée à concevoir le déploiement de la religion druze comme un ascétisme avec des « gradations ». Il est en effet possible de distinguer deux formes de hiérarchie religieuse à l’œuvre dans la communauté : une hiérarchie qui demeure malgré tout indexée sur le prestige familial et qui conduit les religieux issus des lignages ayant une certaine notabilité à occuper des positions dans les khalwa-s des villages, en qualité de juges des affaires familiales ou de performer les rituels de mariage notamment ; une hiérarchie qui tient principalement compte du prestige conféré par le « parcours » ascétique du religieux, qui doit le mener à un renoncement du monde tel qu’il se défait de son ancrage familial, s’éloigne de son conjoint et de ses enfants voire, refuse le commerce charnel et la procréation selon une conception qui n’est pas sans évoquer le cénobitisme chrétien. L’ascétisme comme perfection et sa représentation communautaire à al-Bayyâda J’avais ainsi identifié deux oppositions pertinentes dans Les Maîtres du secret : (1) une opposition ignorants / religieux et, à l’intérieur de cet ensemble, (2) une opposition religieux-dans-le-monde / ascètes. L’ascète, selon cette logique, représente le religieux parfait, la référence idéale sans laquelle les religieux ne pourraient se situer dans le monde. Ces ascètes véritables sont désignés comme des farîd-s, un terme construit sur la racine qui signifie être seul, s’isoler et qui donne fard, l’individu en arabe. J’en ai développé une compréhension comparative avec, cette fois, les analyses développées par Louis Dumont autour de la figure du renonçant en Inde. Selon Dumont, la différence entre le prêtre – comme figure du religieux agissant au sein de l’institution, équivalent sociologique du religieux-actif-dans-lemonde dans la configuration druze – et le renonçant est radicale : on naît brâhmane, mais on devient renonçant en rompant définitivement avec la société, c’est-à-dire en renversant les feux sacrificiels qui sont la marque de l’inscription individuelle dans un lignage. Le renonçant ne retourne jamais dans le monde – [34] comment pourrait-il renouer avec la dette envers les ancêtres dont il s’est affranchi en renonçant à faire des sacrifices ? – et c’est en cela qu’il développe une figure de l’individualisme, sujette à une société holiste par ailleurs. L’opposition entre religieux et ascète dans la société druze est d’une autre nature. En refusant de revenir dans le monde par l’action dans une congrégation religieuse villageoise particularisée en tant que membre d’un lignage, l’ascète demeure en dehors de la structure religieuse hiérarchisée, mais pas en dehors de la communauté druze. Il représente au contraire le religieux parfait, la référence idéale sans laquelle les religieux et l’ensemble de la communauté ne pourraient se situer. C’est une figure parfaite du point de vue des valeurs religieuses, mais elle n’est pas en opposition avec le religieux à la manière de l’opposition entre brâhmane et renonçant en Inde. Il n’y a pas de différence, on l’a vu, entre prêtrise et ascétisme, tous les religieux sont ascètes et c’est l’inscription sociale qui permet seule de marquer une différence de degré entre les deux. En rompant avec une définition familiale, l’ascète parfait représente néanmoins la communauté à un niveau plus global que ne le peut le religieux, mais en contrepartie, il perd les moyens d’agir dans sa société. Les plus prestigieux d’entre eux sont distingués par le port d’un couvre-chef particulier, un laffe rond quand le laffe des religieux réguliers est cylindrique. Cette distinction se confère de deux manières : soit d’un shaykh parfaits à un autre qu’il distingue ainsi, soit par la congrégation des religieux ascètes du « centre érémitique » de la khalwa al-Bayyâda près de Hasbaya au Sud-Liban. Il est extrêmement difficile d’espérer conduire une ethnographie de première main dans ce lieu que les religieux Druzes considèrent comme « espace du retrait du monde » absolu, que même les ignorants d’entre les Druzes ne peuvent visiter qu’exceptionnellement. Un lieu qui ressemble, en ceci, à une quasi-clôture monastique. Il n’est donc pas étonnant que, sollicitée pour discuter des relations entre monachisme et parenté en 2004 par Adeline Herrou, collègue spécialiste du monachisme taoïste, j’aie immédiatement pensé à cette khalwa al-Bayyâda qui suppose justement, pour les shaykhs qui choisissent de la rejoindre, de faire leur testament et quitter définitivement leur famille. Cette invitation m’a donné l’occasion de présenter dans un colloque tenu en 2005 au LESC, puis dans la publication des Actes, de rassembler un matériel ethnographique à partir de [35] discussions avec des religieux druzes libanais ayant eu l’occasion de visiter le lieu pour en proposer un portrait et une analyse (HDR, vol.3 : 259). J’y montre à quel point cette khalwa (en réalité, un ensemble de khalwat rassemblées autour d’un édifice commun) est une institution atypique à l’échelle de l’ensemble culturel proche-oriental. Dans ce lieu, tout se passe comme si l’on avait cherché à empêcher toute possibilité de distinction sociale, possibilité qui est à la base de l’acquisition du prestige et qui est la condition du jeu politique. C’est bien le caractère collectif des shaykhs d’al-Bayyâda qui permet à l’ensemble conventuel de se poser en référence idéale et transcendante pour tous les Druzes : une forme de centralité ascétique unique différente de l’organisation hiérarchisée des religieux dirigée par un chef spirituel (le shaykh al-caql) représentant la communauté devant l’État. De ce point de vue, elle se manifeste dans une relation similaire à celle qui oppose le religieux druze ordinaire au virtuose de l’ascèse. Premiers bilans Puisque, selon le fil métaphorique que j’ai choisi de suivre dans l’organisation de cette synthèse, il s’agit dans ce chapitre de « défaire », je crois important de livrer dès à présent un premier bilan de mon parcours de recherche marqué, dans cette période, par le souci de comprendre le fait communautaire. À l’instar de Dominique Casajus, le « parrain » de cette HDR avec qui j’en ai parfois discuté, j’ai pris beaucoup de recul sur la manière de travailler et d’analyser les données telles que j’en ai rappelé les grands agencements dans les deux chapitres qu’on vient de lire. Mon ethnographie, ce corpus de données consignées produit à la fois par des relevés d’observation et des questionnements ouverts, était alors guidée par le souci de repérer des éléments de structuration d’un ordre social et la recherche des valeurs permettant d’en rendre compte. La lecture de Dumont et celle de Geertz m’avait fortement façonnée lorsque je suis arrivée sur ce premier terrain. Je ne présageai certes de rien et j’attendais de l’imprégnation dans et par la société que cette structure et ces valeurs émergent. A posteriori, il s’agit toujours du récit que je puis en donner tellement Kamle et les siens ont été parfaits comme passeurs de ce point de vue. Je ne désavoue pas ce travail d’explicitation et la façon dont je l’ai conduit alors. J’ai le sentiment qu’il dit quelque chose de la société que j’ai étudiée, qu’il permet effectivement d’en comprendre certains ressorts profonds. Il y a une [36] esthétique et une force de démonstration dans le déploiement logique d’un principe de cohérence qui ne laisse pas de me séduire. Je ne me suis pas encore résolue à renoncer à ces efforts visant à produire de belles architectures fondées sur une problématisation convaincante. Mais alors que je continuais de « faire tourner » ces oppositions structurantes dans l’analyse de l’ascétisme et de les polir par l’exercice de la comparaison, je commençais à m’interroger sur le caractère sinon factice – je ne suis jamais allée jusqu’à le penser sérieusement – du moins surplombant et pour le coup résolument normatif de cette manière de faire. Car dans les Maîtres du secret, il s’agit bien d’un discours de la société sur elle-même, sur la manière dont elle se voit et dont elle veut être vue. Je pense que ceci n’en invalide en rien la pertinence. Après tout, mon projet initial était bien d’étudier les manifestations de l’identité religieuse druze à partir d’un point de vue interne et non à partir d’une perspective « extérieure », celle qui postule la nécessaire domination de l’Etat sur ses minorités. Je pense au moins avoir rempli ce programme de recherche… Le normatif est élégant, mais il manque du foisonnement de la vie ; c’est là son moindre défaut dirait le fabuliste. Je crois que la lecture du livre de Patrick Williams, Nous on n’en parle pas 21 a constitué un déclic en révélant qu’une autre « mise-en-scène » du récit ethnographique était possible. Un récit fait de petites observations et notations mises bout à bout pour dévoiler progressivement le sens des agencements collectifs et individuels, et le faire avec sensibilité. C’est cela que je voulais rendre et comme cela que je voulais le rendre désormais. Et être cigale à mes heures. Je voulais donner à voir des gens plutôt que des valeurs, des situations concrètes du quotidien, plutôt que des modes de structuration. En lieu et place de la cohérence, je chercherais désormais à produire de l’intelligibilité. Nous on n’en parle pas. Les vivants et les morts chez les Manouches, Paris, Maison des Sciences de l’Homme, 1993. Le contraste est d’autant plus saisissant que j’ai lu ensuite le livre issu de son travail de thèse sur le mariage chez les Roms de Paris d’un structuralisme un peu ennuyeux. 21 [37] Chapitre 3 Tisser des relations comme l’artisan sur son métier Tout ce que je viens de dire a bien évidemment été le résultat d’une maturation progressive ou d’un inconfort grandissant comme on voudra. Et comme tous ces fameux turn des derviches de toutes obédiences, celui-ci s’est fait par degrés. Il y eut d’abord l’effet paralysant de mon premier séjour de six mois au Liban en 1999. Six mois au cours desquels j’ai perdu tous mes repères d’ethnographe, été dans l’impossibilité de conduire une enquête et durant lesquels je n’ai rien compris aux relations humaines dans lesquelles j’étais prise. Il m’a fallu près de sept ans pour mettre ce « terrain » à distance, trouver une clé pour l’interroger et être enfin en mesure d’écrire sur le Liban. Il y eu ensuite l’année 2008 durant laquelle j’ai eu la chance d’être accueillie en qualité de Visiting researcher au département d’anthropologie de l’Université de Sydney. J’y ai fait l’expérience extrêmement déstabilisante de discuter mes travaux avec des collègues qui ne parlaient absolument pas la même langue théorique. Je me suis posé beaucoup de questions de « traduction » durant cette année et pas seulement pour préparer les enseignements. Il y eut bien sûr de nombreux apports théoriques tout au long d’une décennie d’échange, de séminaires et de programmes de recherche montés et animés avec de nombreux collègues. J’ai tissé beaucoup de relations stimulantes. Et j’ai beaucoup réfléchi sur « le sens de la relation » ; la relation de patronage bien sûr – dont on dit qu’elle est à double sens, mais dont le sens est [38] orienté par les rapports de pouvoir – ; sur les sens implicites de l’analyse structurelle et post-structurelle également qui postulent la relation sans l’ethnographier ; sur le sens du « métier » d’anthropologue enfin. Huis-clos dans la montagne libanaise Nous y voilà… Ainsi, je voulais étudier des gens et des situations concrètes plutôt que des valeurs et des modes de structuration ? Le Liban est un pays qui comble tous désirs disent les brochures touristiques. J’allais être servie… Je ne vais pas retracer ici le récit de mon arrivée sur ce premier terrain libanais, de ma naïveté dans le décodage de ce qui était en train de se jouer autour de moi et des événements qui ont émaillé ce séjour. Je les ai rapportés dans ce qui est désormais le chapitre 5 de ma monographie (HDR, vol.2 : 129) à la lecture duquel je renvoie. Son écriture a fonctionné comme une catharsis. À la suite de ces six premiers mois, seul l’engagement moral vis-à-vis de la Fondation Fyssen qui avait financé la bourse m’ayant permis de le réaliser et l’engagement scientifique à l’égard du groupe de recherche sur les Municipalités au Liban piloté par Agnès Favier et Élisabeth Picard au Cermoc (devenu ensuite IFPO-Beyrouth) m’ont convaincue de retourner au Liban. J’y passais encore une bonne part de l’année 2000, installée cette fois-ci à Baaqline et partageant le quotidien d’une famille à la dynamique très différente. Il n’empêche. Six mois de terrain et des carnets restés désespérément blancs avaient ouvert un doute profond sur ce que l’on fait véritablement lorsque l’on prétend « faire de l’ethnographie ». Forte de ma première enquête à ‘Isfiyâ, je m’attendais en arrivant au Liban à ce que « la » société « se donne » et me livre ses clés de lecture. Et puis, j’avais choisi de poursuivre en terrain druze, je supposais même une grande familiarité. Las ! Je n’ai pas vu de « société », mais des individus, opaques qui plus est, dont je ne comprenais rien des attitudes à mon égard. La relation était vrillée d’emblée. Je subissais, sidérée, incapable de m’extraire de ce huis clos. J’ai donc produit non sans difficulté l’article sur le pouvoir municipal à Baaqline paru en 2001 et puis, en dépit d’un nouveau terrain en 2002 puis de séjours plus courts en 2003 et en 2005, plus rien. J’accumulais certes des données, mais je n’y « croyais plus ». Ou plutôt, je ne croyais plus à la possibilité d’en donner une cohérence en occultant les premiers six mois comme simplement « non pertinents » (irrelevant). Je ne pouvais considérer que ces [39] individus-là, Druzes de la Montagne libanaise tout aussi bien, puissent être simplement écartés en tant qu’individus quand j’en considérerais d’autres avec lesquels la relation humaine avait fonctionné différemment et qu’elle rendait de ce point de vue, eux, pertinents pour l’analyse. Il y a finalement aussi de l’honnêteté intellectuelle dans le souci de cohérence. On reproche souvent aux entreprises de totalisation de tailler dans le réel pour accommoder l’analyse. En l’occurrence, mon propre récit sur la Montagne libanaise devait aussi faire sens de ce huis clos. Il devait trouver sa place dans un ensemble et ne pas « tomber hors des marges de mon texte », pour reprendre cette belle formule que Michael Gilsenan emprunte à Italo Calvino. On ne cache pas les miettes sous le tapis… En attendant, je remettais donc sur le métier mes analyses sur la religion druze, sur l’ascétisme. Avec Nadine Picaudou, que j’avais toujours considérée comme une figure tutélaire depuis que ses ouvrages avaient fourni la trame de mon tout premier projet de thèse sur la Palestine, je renouais le fil de ces premières amours en organisant un colloque, puis en publiant mon premier ouvrage dirigé sur la question des returnees après Oslo. Parallèlement, j’organisais un séminaire sur la question palestinienne à l’IISMM. Et le grand projet d’enquête sur les « Mémoires palestiniennes » coordonné ensuite par Nadine m’offrait l’occasion de revenir sur l’historiographie d’une « communauté en marge de la Palestine » (HDR, vol.3 : 193). La porte de sortie s’est dessinée en 2006, à la faveur du projet de colloque que j’ai voulu organiser en l’honneur de Raymond Jamous qui prenait sa retraite après huit ans de direction du LESC. J’y avais logiquement associé Frédérique Fogel et alors que nous réfléchissions sur la thématique possible de ce colloque, l’idée de réunir un vaste panel d’étudiants et de collègues autour de « la relation ethnographique du terrain au texte » nous a été suggérée par Simonne Pauwels. La feuille de route invitait à revisiter les dynamiques relationnelles qui se mettent en place lorsque l’ethnographe arrive sur son terrain, de le contextualiser, d’analyser les enjeux des assignations et la manière dont ceci informe l’écriture ethnographique. Je devais saisir l’opportunité que j’avais en partie contribué à créer pour parler de l’impossible relation et de l’échec d’un terrain. « Séquelles de guerre ou l’impossible enquête chez un ancien milicien libanais » était dans les tuyaux. La seconde partie de ce texte sur l’écho de la relation violente avec Nadim au sein de son gynécée est venue ensuite, comme la mise en cohérence, la totalisation de l’ensemble relationnel qui m’avait si profondément affectée et si [40] longtemps paralysée. Cette totalisation-là était nécessaire pour que je puisse reprendre les fils de la quête du sens, pour que je croie à nouveau dans la possibilité de faire émerger de l’intelligibilité des relations humaines… De la relation ethnographique… On n’a pas manqué de me faire remarquer que l’écriture de ce texte avait fonctionné comme une cure analytique après un traumatisme conduisant sa résolution par la nécessité de revenir à la relation et « de faire sens de » – comprendre « mettre en récit » – cet épisode de ma vie d’ethnologue. Soit. Et n’y serait-il donc question que de moi ? Le long travail de lecture d’une partie de la littérature anthropologique labellisée « postmoderne » et sa critique du « paradigme ethnographique » dans le dessein de rédiger l’introduction au volume en préparation sur La relation ethnographique (HDR, vol. 3 : 290) m’a donné l’opportunité de réfléchir à ces implications. Quels sont les déterminants de l’enquête ? Que produit la notion d’assignation ? Et surtout, l’enquête ethnographique découle-t-elle entièrement de la relation ethnographique, des modalités de l’intégration de l’ethnologue par un petit groupe ? Certes, on avait déjà largement remis en cause le terrain « malinovskien » pour développer une ethnographie de processus, de chaînes de relations pointant vers les réseaux sous l’influence de Marcus et ses ethnographies multisites. Mais aucun des terrains présentés dans le colloque ne sortait vraiment de l’idéal-type malinovskien de ce point de vue et la plupart des communications rendaient intelligibles les modalités concrètes de la relation établie entre l’ethnologue et ses informateurs par leur « mise en relation » avec les aspects essentiels de leur « ethnographie » comme projet intellectuel d’élucidation de la société. Tout ce que je m’apprête à écrire à présent n’enlève rien à l’intérêt intrinsèque de chacun des 24 articles qui constituent le volume de La Relation ethnographique. Terrains et textes. Ils représentent toujours à mon sens une belle introduction à la diversité du travail ethnographique, que l’on peut donner à lire à tous les étudiants qui s’apprêtent à partir sur le terrain et se demandent « comment cela va se passer ». Poursuivons. La comparaison implicite entre mon premier terrain et le second me faisait tout de même douter que l’assignation à des rôles, l’intégration progressive à une « place » dans la société, la dynamique dialogique productrice de co-savoirs, soient effectivement tout ce qui détermine et produit un terrain. J’ai [41] cependant très longtemps compris mon séjour chez Coco et Nadim comme un « échec » ethnographique précisément, quelque chose qui avait raté dans la relation et raté, par conséquent, dans la production d’une ethnographie. Un échec comparé au déroulement du premier terrain à ‘Isfiyâ qui, si je l’avais pris comme cadre à la production de l’article pour ce volume, aurait donné un texte absolument différent ! Une totale réussite pour le coup du point de vue de la relation ethnographique... En effet, ce premier terrain en Israël répondait aux attentes du terrain idéal-typique de l’ethnologie. J’y ai expérimenté le temps-long de l’intégration à une famille dont la mère a pleinement joué le rôle d’éducatrice en m’enseignant l’ensemble des règles de ce qui se fait et ne se fait pas. Je me suis imprégnée socialement de manière progressive par la construction de relations concentriques autour du noyau de cette famille nucléaire qui en constituait ma « centralité ethnographique ». Cette manière d’acquérir un point de vue sociologique sur la société environnante était similaire à celle d’un individu né dans la société. De même, les relations que je tissais au fil du temps étaient de la même nature, faites de dettes, de comptes à rendre, d’intimité. J’observais à partir de cette matrice et de l’engagement dans les affects qu’elle suppose et non seulement « dans la latéralité » selon la formule d’Albert Piette. Cette posture ethnographique se traduisait dans le fait d’accepter de me faire tancer lorsque je « faisais une bêtise » et que mon attitude ou mes postures étaient inappropriées ; dans le fait en retour de me sentir responsable de l’honorabilité de la famille, d’être prise à partie, par des interlocuteurs extérieurs, sur l’honorabilité de cette famille-là que je « défendais » de ce point de vue comme la mienne. Je sentais les enjeux, ces enjeux. Je rêvais en arabe après trois ou quatre mois et ne quittais plus mon terrain durant ma « vie nocturne ». Je m’appropriais ‘Isfiyâ à force de l’arpenter après l’avoir cartographiée. J’y construisais une histoire par le processus dialogique. Bref, ce premier terrain ne m’a pas posé de gros problèmes quant aux cohérences enchâssées qui répondent à la requête académique implicite d’explicitation / mise en cohérence d’un « objet ». Le mien, celui des identités communautaires, était en l’occurrence des plus classiques et il s’est quasiment « dissous » dans le temps même du terrain puisque j’y ai fait l’expérience d’une mise à distance de l’extérieur par les hôtes qui est d’ailleurs devenue le socle de ma démonstration théorique. L’enquête avait finalement moins mobilisé les ressources de « l’observation ethnographique » qu’elle n’avait mobilisé l’ensemble [42] des conséquences implicites de ma position d’hôte qui en a été l’assignation initiale. Je n’ai fait l’expérience d’aucune dissonance cognitive sur ce terrain entre mon expérience sur le terrain et ma formation académique. En me présentant comme désireuse d’étudier « les coutumes et traditions » (cadât wa taqâlid), je pointais vers un lieu commun pré-négocié et assez naturellement les narrations de mes informateurs se sont donc enchaînées sur le passé, les coutumes, les cadres de la morale, la présentation d’eux-mêmes. Il y avait logiquement une grande cohérence dans ce qui se donnait et c’est pour cela aussi que je n’avais jamais eu l’impression de forcer le trait. Cette première analyse n’avait pas eu à « faire émerger » un objet, une perspective, qu’à mettre en forme un don déjà articulé, déjà cohérent, autour de al-dîn wal-dunyâ. C’est ce que nous avions invité à exposer dans La Relation ethnographique, mais j’avais déjà mesuré la force de construction d’une ethnographie construite à partir d’une relation et d’une assignation. Précisément parce que le terrain libanais n’a rien mis en œuvre de cette structure. Néanmoins, il était indispensable que j’adopte une posture réflexive pour me départir de la dissonance cognitive dont j’ai fait l’expérience pendant mes premiers terrains au Liban (et jusqu’en 2007 précisément). La critique postmoderne a eu pour effet de développer une hyper-réflexivité dans la discipline anthropologique en général et sur la question de l’ethnographie en particulier. C’est certainement l’une des forces de cette discipline que de se remettre sans cesse en question et en perspective. L’enquête ethnographique, celle qui va au-delà de l’injonction à considérer les données « par le-bas », tient de l’exercice funambuliste et il faut peut-être qu’il en soit ainsi. Dès que l’on tient quelque chose pour acquis, l’on cesse de questionner et cela cesse de questionner en retour. Il faut trouver constamment les moyens de maintenir la tension heuristique. Je trouvais ainsi aussi stimulantes qu’agaçantes ces lectures sur toutes les facettes de la relation entre l’ethnographe et « son » terrain, « ses » informateurs, explorées d’un point de vue réflexif. J’ai gardé assez de stimulant pour avoir du plaisir à écrire l’introduction et conservé les agacements pour après. La pratique systématique de la réflexivité qui a produit nombre d’ouvrages et d’articles pendant une période et qui est aujourd’hui passée de mode livre finalement une certaine conception de la relation. Il y a d’un côté l’ethnographe et les déterminations dont il est porteur, de l’autre des membres d’une société (communauté, culture, lieu comme on voudra les considérer) avec lesquels s’établissent un rapport et une mise en relation. L’établissement du rapport découle [43] en partie de l’ensemble des déterminations culturelles et sociales, et une bonne part de cette littérature de veine postmoderne a essentiellement considéré les biais de la domination implicite des uns sur les autres dans la production des discours à la suite d’Edward Said et Arjun Appadurai notamment. La mise en relation pouvait également être éclairée par l’élucidation des rôles et assignations données explicitement et implicitement à l’ethnographe par ses hôtes. Et alors, « tout se passait un peu comme si » l’ethnographe était happé par une structure relationnelle déterminant le destin de l’enquête à venir. Je force le trait – à dessein pour souligner l’argument –, mais j’avais à fréquenter cette littérature l’impression persistante d’une structure d’intelligibilité trop balisée par l’implicite des généalogies relationnelles de type psychanalytique à partir desquelles tout découlerait ensuite. Or, je travaillais à ce texte alors que j’étais chercheur invité au département d’anthropologie de l’université de Sydney dans lequel une bonne part de mes collègues, Jadran Mimica en tête, enseignaient que la perspective psychanalytique devait être au cœur de toute connaissance anthropologique critique et je ne me sentais pas à l’aise avec cela. Pour être plus spécifique, l’enseignement donné par certains collègues de Sydney (ceux qui n’était pas restés de plain-pied dans les traditions marxistes et le compagnonnage avec Maurice Godelier) partait de l’idée que le savoir anthropologique est déterminé dialogiquement par des savoirs constitués (une tradition épistémologique) et un nombre plus important encore de non-savoirs corrélatifs, parmi lesquels les structures de personnalité et le narcissisme de l’ethnographe – soit un horizon d’ignorance inextinguible. En somme, la tradition académique ne serait alors qu’un prétexte pour porter un projet personnel comme projet de savoir. Grand admirateur de Georges Devereux, Jadran Mimica défendait l’idée que le seul projet valide d’ethnographie devait être une véritable psychanalyse ethnographique prenant en compte les transferts et les contretransferts entre l’ethnographe et les informateurs. Selon cette logique, le dévoilement par la pratique empirique des « structures de personnalité réciproques » est la condition du projet ethnographique, sans quoi, la démarche de l’anthropologue reste ancrée dans une position « archaïco-narcissique » où il parle de lui et sa tradition culturelle en parlant des autres. Cette critique armait dans le même temps un ensemble d’étudiants contre la tentation même de la réflexivité : qu’elle dévoile les ressorts de la domination (critique de Foucault, Derrida, Deleuze, Bourdieu en tête) ou qu’elle s’attache à production des ontologies non- [44] occidentales (l’on critiquait alors Descola, Taylor, Serre, Latour, Habermas). Et ceci, au nom du fait que la réflexivité n’est autre qu’une représentation-projection idéalisée de son propre objet narcissique tant que l’on n’a pas procédé à la psychanalyse ethnographique… Je nourrissais certes une défiance de plus en plus persistante pour les mécaniques bien huilées, mais les longues heures passées à animer en tandem avec Erin Taylor le post-graduate seminar hebdomadaire et à discuter les travaux en cours des étudiants formés dans des traditions épistémologiques si différentes de celle dans laquelle je me reconnaissais ont été une expérience déstabilisante qui m’a fait regretter une part du confort cognitif que ces mécaniques procurent ! … Mais comme l’enseigne Jack Katz à ses étudiants : « Je recommande à mes étudiants américains – je ne sais pas comment cela se passe [en France] – d’aller dans un autre environnement de recherche universitaire avant de commencer leur thèse et d’enseigner, afin de prendre conscience de l’aveuglement que suscitent les dieux locaux. Tout à coup, on en découvre d’autres très différents ailleurs. Vos dieux paraissent alors bien plus petits » 22. Une maxime utile… À côté du radicalisme de l’ethnopsychanalyse dont je découvrais l’existence à Sydney, un autre versant de l’enseignement dispensé au département allait faire son chemin dans mon travail. Il s’agit de la phénoménologie traduite dans l’idée de ne pas supposer que la manière d’être au monde et la constitution même du monde sont articulées de la même manière partout et que l’une des tâches principales de l’anthropologie est précisément de déterminer de quoi est faite la « mondanité » (wordhood) selon l’époque ou la société. Autrement dit, l’on y invitait encore les étudiants à prendre en compte les différentes formes de perception et les modalités de l’expérience – autour de questionnements sur les états conscients, le rêve, les visions, la communication avec les esprits, etc. – et à observer comment les individus expérimentaient et évaluaient ces modalités de l’expérience selon différents contextes – comme savoir, comme vérité, etc. Michael Jackson avait laissé une empreinte forte sur l’anthropologie australienne de ce point de vue. Cette approche donnait notamment lieu à des thèses en cours sur la consommation de psychotropes dans les cultures junkies… Plus généralement, je m’imprégnais à Sydney d’une heuristique nouvelle invitant à produire un savoir sur ces matrices existentielles / expérimentales comme alternative aux discours et 22 http://www.laviedesidees.fr/L-ethnographie-en-trois-dimensions.html [45] épistémologies institutionnelles. Une inflexion qui allait entrer en résonnance avec les travaux d’Albert Piette à mon retour à Nanterre. J’y reviendrai. …à l’ethnographie des relations Parallèlement à la petite « révolution épistémologique » que je vivais dans les murs de l’université, je profitais également de mon séjour à Sydney pour fréquenter régulièrement les Druzes qui s’y étaient installés. En 2004, à l’occasion d’un premier séjour de quelques semaines, j’avais eu l’opportunité d’entrer en contact avec l’association druze locale et je voulais élargir mon enquête des réunions de commensalité aux réunions politiques. J’ai ainsi fait la connaissance du responsable de la branche du PSP à Sydney et ai été invité à participer plusieurs de leurs réunions. Cette enquête s’inscrivait dans un prolongement, à titre comparatif, de l’enquête intensive menée entre mars et avril 2007 au sein de l’Association des Jeunesses Progressistes du Parti Socialiste Progressiste à Beyrouth. C’est également à partir de là que j’ai « suivi » les événements violents de mai 2008 au Liban. Depuis mon étude liminaire sur la municipalité de Baaqline et le pouvoir local dans le Chouf, j’avais profondément réorienté mon enquête ethnographique par rapport au projet initial qui m’avait conduit au Liban. Présenté dans le cadre de mon dossier de candidature pour le CNRS en 2001, ce projet proposait en effet de développer une anthropologie comparée des relations entre minorités et États au Proche-Orient, sur la base d’une ethnographie comparée de la communauté druze en Israël et au Liban. L’hypothèse centrale envisageait de montrer qu'à partir d'une même manière d'appréhender une identité religieuse, un groupe minoritaire se définit différemment en relation au contexte social, politique et historique extérieur. En somme, il s’agissait d’en revenir à l’histoire et au « poids de l’histoire » pour ne pas figer l’approche anthropologique dans la permanence de l’identité religieuse. Formulé après une première année – chaotique, on l’a vu – de terrain au Liban, je précisais les lignes de la comparaison en soulignant que la différence majeure entre les deux communautés druzes résidait dans le retrait par rapport à la politique israélienne d’un côté, quand les Druzes libanais qui se pensaient à l’origine historique de l’Etat au Liban participaient activement au système politique. La comparaison devrait donc s’appuyer d’abord sur l’étude de l’autorité politique avant d’envisager ses relations avec la dimension religieuse. [46] Cette « condition préalable » a vite fait de devenir l’essentiel de mon enquête, mon anthropologie, une anthropologie politique et mon objet, la relation de patronage au Liban. Pendant trois mois durant l’été 2002, je montais tous les samedis matin à Moukhtara et fréquentais le diwân de Walid bek qui avait autorisé ma présence. Je nouais des relations en dehors de ces sessions avec son entourage, une véritable administration dans laquelle chacun était comme un « ministre » responsable d’un portefeuille particulier plus qu’homme de main. Il s’agissait visiblement d’un autre héritage de la période de l’Administration Civile de la Montagne. Je sympathisais avec des partisans réguliers, jeunes et moins jeunes. Je circulais entre les différents salons observant attitudes et postures. Je regardais et j’écoutais semaine après semaine et redescendait passer le reste du temps, auréolée du prestige de cette proximité avec le bek, dans « ma » famille à Baaqline. Mais que faire de ces observations ? Je n’avais pas véritablement de fil discursif à tirer, d’histoire à raconter, de tableau à camper. Les matinées à Moukhtara passaient dans un bruissement de conversations, d’allées et venues, chacun poursuivant des objectifs précis, des problèmes à exposer dont j’ignorais les tenants et les aboutissants, ne saisissant par bribes que les sentences que Walid Joumblatt exprimait à voix suffisamment haute pour être entendues de tous. La plupart du temps, quand la situation exposée l’exigeait, il prenait tel ou tel de ses ministres en entretien à part sur son balcon et le petit groupe des requérants passait ensuite dans l’un des salons pour continuer avec lui le traitement de l’affaire, en fonction de ce que le bek avait indiqué à son « ministre ». Les entretiens quelque peu suivis que l’on m’accordait « là-haut » étaient tous plus ou moins des panégyriques à la gloire des Joumblatt. Rien que de très conventionnel et attendu en matière de relation patron-client… Fallait-il que je m’obstine dans cette voie qui ne semblait livrer que des évidences ? À nouveau, les doutes sur la pertinence même de ce que je faisais dans la Montagne libanaise…Puis Walid Joumblatt m’a fait signifier que « la situation politique rendait ma présence problématique au palais ». Et j’étais congédiée. S’il est certainement nécessaire de disposer d’un bon fond de ténacité pour faire ce métier et d’une foi certaine dans la finalité poursuivie, je crois que l’on ne peut souvent avancer qu’à l’aide des heuristiques. La première de celles que j’ai fini par mettre en place pour considérer ces matériaux est venue d’un programme de recherche sur la catégorie jeune dans le monde méditerranée que j’ai coordonné [47] entre 2004 et 2007 dans le cadre d’une ACI jeune chercheur. L’idée de travailler sur les jeunes m’a été donnée par Raymond Jamous et avec Christine Jungen, nous avons donc coordonné pendant deux ans un séminaire de recherche au LESC dans lequel l’équipe rassemblée autour du projet exposait et discutait des ethnographies mettant en scène des jeunes aux prises avec la nécessité de « s’accomplir » socialement. L’hypothèse centrale de ce programme de recherche était formulée ainsi : Plutôt que de questionner la jeunesse en tant que groupe sociologique éventuellement appréhendé dans ses dynamiques historiques, nous entreprendrons d’interroger la catégorie des « jeunes » dans la perspective anthropologique (1) des règles et codifications ou de leur absence qui permet la succession des générations et (2) de son rapport à la structuration des relations d’autorité dans le monde méditerranéen. Au-delà, c’est la compréhension même de la constitution du leadership politique, de valeurs comme l’honneur ou de relation comme le patronage, appréhendés jusqu’à présent par l’anthropologie du point de vue de « l’homme socialement accompli » qu’il nous intéresse de retravailler à partir de la catégorie des jeunes. (…) La question centrale de notre projet est de comprendre les mécanismes de passage vers l’âge adulte, ou la prise de responsabilité. Quels sont les mécanismes sociaux déployés par les jeunes pour sortir de l’ambiguïté ou au contraire, à quel point les jeunes sont-ils en position d’électron libre par rapport à l’ordre social et doivent gérer entre eux leur position. À l’opposé, on se demandera quels sont les mécanismes sociaux déployés par les figures d’autorité pour maîtriser cette ambiguïté des jeunes dans l’ordre social. Il est probable que les deux mécanismes existent dans les sociétés méditerranéennes, mais ne concernent pas les mêmes populations de jeunes. La question de l’autorité politique, des rhétoriques de l’honneur, de la relation entre hommes accomplis et jeunes inaccomplis était au cœur de ce projet (voir l’introduction à la publication dans HDR, vol. 3 : 127). Il s’agissait encore de travailler à partir d’une opposition à deux termes pour considérer une ethnographie, mais cette opposition m’a permis de faire une avancée considérable. En reconsidérant mes premières enquêtes à l’aide de cette « clé de questionnement », je remarquais qu’au Liban, très peu de situations signalent un affrontement de valeurs entre les jeunes et les chefs de famille. Je n’avais pas documenté de conflit d’autorité direct au sein des familles que je fréquentais et il n’y avait pas vraiment de problème d’héritage les justifiant. Au contraire, on [48] encourageait de manière incessante les jeunes à devenir à leur tour des « chefs de famille » par le mariage et la fondation d’un foyer. J’avais noté que certains cherchaient d’autres voies et que la plupart mettaient en œuvre des espaces de sociabilité propre. La grande différence entre les chefs de famille et les jeunes tenait à leur manière de parler de, de nommer et d’agir avec Walid Joumblatt. À partir du moment où ceci est devenu clair pour moi, j’ai commencé à envisager la relation de patronage comme une relation différenciée. Mais pas uniquement selon la mise en œuvre d’un ordre social hiérarchisé comme l’avait analysé Michael Gilsenan à partir de son ethnographie du nord-Liban : le bey tout en haut, les agha-s régisseurs de son domaine et hommes de main en-dessous et les fallahin, les paysans partisans sur lesquels s’exerce la domination tout en bas. La « relation » était infiniment plus riche que l’effet de différenciation sociale et les logiques de domination par laquelle on la considère. Je reformulais sur cette base une question théorique sur le patronage : les leaders politiques au Liban, définis comme zacîm-s, sont généralement dépeints comme des personnages exerçant d’abord une violence contre les leurs (c’est-à-dire, leur communauté, leur localité, leurs dépendants), souvent de manière arbitraire, à travers leurs hommes de main, des qabadaye-s aux miliciens (Chevallier, Picard, Johnson, Gubster, Gilsenan). Mais comment comprendre qu’une société se donne des leaders dont la fonction première serait de retourner leur violence contre leurs partisans ? N’y aurait-il ici qu’une logique de violence et de domination dictée par la nécessité de l’affrontement entre communautés ? Ou autre chose à élucider… Tout ce que j’avais observé dans les foyers dans le quotidien de mes hôtes au long des mois passés dans la Montagne prenait désormais un relief différent. Et ceci justifiait que je retourne sur le terrain, à Beyrouth cette fois-ci pour ajouter à mes observations sur les jeunes scouts, les jeunes en famille, les jeunes discutant de politique, agitant des drapeaux et paradant dans la montagne lors des périodes électorales, une ethnographie de l’organe des jeunesses partisanes et ses antennes dans les universités et à la Montagne. Cette enquête a donc été réalisée durant une période d’extrême tension politique entre mars et avril 2007 dans le cadre du programme de recherche ANR coordonné par Sabrina Mervin et Franck Mermier sur les sociétés partisanes au Liban. Dès lors, je reconsidérais l’ensemble de mes matériaux à l’aune de cette ethnographie de la relation dans ses dimensions les plus concrètes. Mon projet d’enquête consistait à documenter la manière dont les partisans, comme les non- [49] partisans qui vivent dans le Chouf d’ailleurs, inscrivent Joumblatt dans leur vie. Comment ils en font l’expérience et comment ils le constituent comme un leader de la Montagne. J’avais le cadre de mon métier, il me restait à tisser les relations, à repérer les nœuds, les figures dans la trame pour en rendre les motifs, à déplacer Joumblatt – les Joumblatt – d’une stricte position de domination vers l’existence de ses partisans qui définissent la sienne en retour. C’est ainsi que tout à la volonté de « tester » jusqu’au bout l’hypothèse de la domination, j’ai entrepris d’observer mes interlocuteurs à Sydney. Selon la logique unique de ce rapport, étant affranchis des contraintes de l’échange patron-client dans leur quotidien, ils seraient probablement affranchis de Joumblatt. Bien au contraire, j’ai retrouvé le bek au cœur de leur intimité et au centre de leurs discussions, comme une référence essentielle dans la constitution de leur appartenance à cette société de la Montagne qu’il fallait emporter en migration. Une multitude de détails prenait sens rétrospectivement. Je retournais à nouveau dans la Montagne en 2009 pour les confirmer. À la suite de quoi, j’écrivais enfin la pièce centrale de mon manuscrit demeurée si longtemps en gestation : « Intimité, mise en scène et distance dans la relation politique au Liban » qui en constitue le chapitre 3 et qui a d’abord été publié dans l’ouvrage collectif issu de l’ANR sur les sociétés partisanes évoquées précédemment. Ce chapitre annonce les deux suivants avec lesquels il « fonctionne » comme une unité. Celui sur les jeunes d’abord et le huis clos ethnographique ensuite en tant qu’il offrait une facette singulière, mais capitale dans l’ethnographie de toutes les modalités de relation au leader, celle du refus de la relation, de la mise-à-distance maximale précisément de celui qui veut / voulait jouer au leader pour lui-même : le chef de milice. Selon cette lecture, Nadim avait finalement continué à jouer le jeu des jeunes, l’armée de Joumblatt, en se posant comme un shaykh ash-shabâb qui rend des comptes au secrétaire du parti, mais qui n’a pas pris la mesure des implications de son changement de statut par le mariage et la paternité, pas plus que du changement d’époque, qui supposait d’entrer dans le subtil jeu de préséance entre lignages dans et par la relation avec le bek. Il s’était mis en dehors et m’avait happée dans sa clôture. Deux ans après ce premier séjour, j’avais recroisé le frère de Nadim. Ce dernier avait émigré dans le Golfe et transformait depuis sa maison en château. Dans les années 2000, l’actualité évoquait de temps à autre ces anciens miliciens devenus fous, n’ayant pas su s’adapter, occasionnant des carnages ; a [50] contrario, il suffisait qu’une manifestation de violence soit gênante pour qu’on l’évacue en pointant le fait « d’anciens miliciens » pour clore l’affaire, quitte à ce qu’elle se reconfigure comme affaire politique nationale sur la coexistence entre communautés et conduise à la fermeture d’une chaîne de télévision nationale, mais c’est un autre sujet. Il n’empêche, une anthropologie politique du Liban sans cette dimension aurait bien été incomplète… J’avais finalement trouvé à ce texte une place indispensable dans la cohérence finale. [51] Chapitre 4 Penser la relation dans son intensité et sa clôture J’ai fait référence à plusieurs reprises dans Druzes de la Montagne libanaise à la formule de Raymond Jamous sur le « théâtre des passions politiques libanaises ». C’est qu’elle sonne juste. Dans l’article éponyme, Raymond s’est attaché au « théâtre » dans sa dimension d’exagération, de jeu, mais aussi dans sa dimension tragique. L’argument qu’il a développé dans plusieurs de ses papiers sur le Liban articule une lecture entre la force de la parole et la violence. Cette parole qui est au Liban performance devant un public, commentaire de l’action et sur l’action politique, et qui peut par sa seule force contraindre au changement de registre politique et basculer dans la violence… Il existe une ambiguïté permanente sur l’interprétation à donner à une performance qui peut être un jeu d’exagération (c’était pour rire…) ou devenir sérieuse. Mais même la violence a des accents baroques. Vivre au Liban, c’est apprendre à ne plus considérer la réalité en plan, mais en origami. Je renvoie d’ailleurs aux belles formulations de Dominique Eddé dans le paragraphe cité en introduction de la synthèse sur l’alternance entre réalité et théâtre et la confusion permanente entre les deux. Plutôt qu’à la dimension de théâtre, bien explorée par Raymond Jamous, mais aussi Michael Gilsenan sur l’ethnographie duquel Raymond construit ses analyses, je me suis attachée à la notion de « passion politique » en tant qu’elle est une expression inhérente au maintien des tensions entre patrons, constitutives du jeu politique libanais. Que veulent les gens qui « veulent de la politique » sinon de [52] l’intensité dans l’engagement du « nous » dans ces espaces où « nous » se rend visible pour les « non-nous » alliés ou adversaires politiques du moment. Quels sont les ressorts de l’intensité, les modalités et les pratiques d’intensification et que produit en retour l’alternance de montée et de décroissance de l’intensité ? En suivant la voie ouverte par ces questionnements, il s’agit de poursuivre la description d’une dimension essentielle des relations entre les humains, mais aussi des relations entre eux et les objets, eux et les entités non présentes en situation, eux et les présences invisibles. Shû al akhbâr ? Le tourbillon permanent de l’actualité politique Au chapitre des dimensions déstabilisantes lorsque l’on s’engage dans une ethnographie de longue durée au Liban, il faut apprendre à composer avec la noncumulativité des séjours successifs. J’ai dit dans le chapitre précédent la difficulté devant le fait de ne pas parvenir à rassembler ce qui aurait ressemblé à un corpus de données. Voilà une société qui ne « se donne » pas. Pas de discours d’ordre mémoriel, pas de narrations constituantes de prime abord – on verra tout de même l’importance des récits politiques sur l’histoire de l’émirat libanais – , pas de discours sur les valeurs, sur la morale, sur l’ordre du monde. Elle se donne à voir et elle se regarde elle-même. Shû al-akhbâr ? Quelles sont les nouvelles, quelle est l’actualité ? Il ne s’agit pas de formules purement phatiques, mais d’une véritable nécessité de l’échange. Chaque « nouvelle » se donne comme un commentaire, une interprétation sur la nouvelle, le contexte, la situation, et ce, quel que soit le registre dans lequel s’inscrit la nouvelle en question. La grande affaire, c’est bien évidemment la situation politique nationale et internationale. Je n’ai pas rencontré de Libanais qui ne soit en mesure – résiste au plaisir – de dresser de vastes tableaux géopolitiques expliquant les raisons derrière l’action de celui-ci ou de cette nation-ci, les intentions cachées à ne pas confondre avec l’action visible de celui-là ou de ce parti-là. Le tout émaillé de « tu verras bien ce que je te dis, tu te souviendras de moi plus tard, car le futur me donnera raison ». J’ai enregistré des heures de ces soirées où je rendais visite à tel ou tel membre de la famille parce que j’étais de retour au village ou pour dire au revoir avant un départ. Inévitablement, la discussion finissait par se cristalliser sur l’analyse de la situation politique (al-wadec siyâsiyy). Et inlassablement les mêmes rhétoriques tournaient, même si les coordonnées en étaient modifiées d’un séjour à l’autre. J’ai d’abord [53] pris très au sérieux le contenu de ces entretiens dont je relançais fébrilement la dynamique dans l’espoir de « glaner des matériaux », surtout quand il y était question de commenter les dernières positions politiques du bek. Et puis j’ai abandonné, car j’ai compris que le contenu était secondaire par rapport à la mise en scène des oppositions factionnelles et au jeu de la démonstration de compétence politique. Je n’étais qu’un public, extrêmement captif qui plus est. Et puis lorsque vient le moment de donner son congé, toujours ces mêmes formules échangées : beddik shi ? Salamtak, que l’on peut rendre comme : tu veux quelque chose, tu as besoin de quelque chose de moi ? Ta santé, ta paix. Une manière de refermer l’échange, de rendre à l’autre sa tranquillité après tant d’intensité. Nous avions passé un bon moment ensemble, c’était une belle sahra. Il ne m’a pas moins fallu de trois séjours au Liban pour accepter la dimension non cumulative de tous ces commentaires sur le contexte et sur le fait que ce contexte n’éclaire rien d’autre que la situation présente et permet de postuler des « stratégies » qui ne valent qu’à un moment donné, dans un contexte donné. Bref, d’un séjour à l’autre, le contenu des commentaires changeait ; ce qui demeurait était le fait de commenter l’actualité au quotidien ainsi que les grandes thématiques sur lesquelles ces commentaires étaient indexés : sur la place de la Syrie au Liban, le jeu de Joumblatt avec les Syriens, les Américains, les Russes, les Saoudiens, Hariri, Lahoud, le 14 mars et le 8 mars, le Hezbollah, la frustration à l’égard des maronites qui disposent de la présidence, le mépris et la crainte à l’égard des chiites qui grignotent les terres dans la Montagne, les injustices, le manque d’État, le manque d’avenir, etc. Je n’envisageais pas, cependant, de retracer une biographie politique de Walid Joumblatt commentant ses positionnements changeants et ses retournements d’alliance, entrant finalement dans le jeu de ces contempteurs qui le dépeignent comme « la girouette de Moukhtara » et qui tiennent les Druzes pour une composante insignifiante dans les équilibres confessionnels libanais. Dans un sens, c’est vrai…mais alors j’étais à côté de la plaque en compagnie d’un clown et de quelques agités nostalgiques ? Je n’avais pas plus le projet de me faire l’écho des thuriféraires du bek. Descendre à Beyrouth et passer du temps au Cermoc et des soirées avec mes collègues et amis n’était pas plus reposant de ce point de vue. Tous me semblaient pris, à un titre ou un autre, dans le tourbillon de l’actualité, un œil sur les dépêches AFP, une oreille sur la radio en bruit de fond. C’est qu’il se passe toujours quelque chose, lâcher le fil, c’est perdre la maîtrise sur l’événement et ne [54] plus suivre le jeu des commentaires dans la vie sociale. Je me souviens ainsi de ce petit déjeuner avec Élisabeth Picard qui avait souvent la gentillesse de m’héberger lorsque je descendais de la Montagne. La radio annonce soudain un rassemblement et une manifestation en cours près du rond-point de l’Unesco. « Et voilà, me dit alors Élisabeth, 30 ans que je suis ce pays et il y a toujours quelque chose qui se passe et dont je n’étais pas au courant »… L’on attendait parfois de moi, surtout en 2002 que j’étais toutes les semaines à Moukhtara, des scoops sur les dernières positions de Joumblatt. Je n’en avais jamais, bien évidemment, ne m’entretenant pas en tête-à-tête avec le bek comme pour un entretien journalistique. La troisième fois que j’assistais à son diwân, il m’invita à le suivre dans une pièce attenante où il se reposait un moment de la foule en buvant un café. À ce moment, je m’attendais à un entretien. Cependant, comme je l’ai raconté par ailleurs, Joumblatt m’a posé une question sur l’attitude politique de la France et sans écouter ma réponse avait pris le téléphone pour appeler Nora, son épouse, la prévenant qu’il avait bientôt terminé et qu’il irait bien faire un tour sur le bateau dans l’après-midi… J’ai craint de passer pour une oie blanche devant mes collègues si je racontais effectivement de quoi étaient faites mes entrevues avec Joumblatt… Ou je ne savais pas m’y prendre. Je n’ai d’ailleurs jamais sollicité d’interview. Techniques d’intensification En 2004, j’ai fait la connaissance de Ghassan Hage à l’université de Sydney, alors qu’il travaillait à une ethnographie phénoménologique de la migration à partir de l’observation de Libanais en Australie, au Vénézuéla, au Canada, à Paris et au Liban. La lecture des différents articles qu’il avait alors écrits sur la base de ces enquêtes a laissé une empreinte significative sur mon travail. Je me souviens notamment de ce papier dans lequel il observait les manières de rendre présent le Liban dans le quotidien d’une existence menée ailleurs. Il avait passé des journées à observer un émigré qui tenait une laverie à Sydney et auquel son frère venait rendre visite de temps à autre. Le second avait réussi, tandis que le premier ne s’était jamais enrichi avec son commerce. Quand les frères se retrouvaient, l’un avait tendance à parler de ses affaires présentes quand l’autre ramenait régulièrement la discussion sur la situation politique au Liban. Tous les matins, il lisait la presse derrière son comptoir et commentait les nouvelles à l’intention de [55] Ghassan. Il s’emportait parfois et alors, il frappait de manière répétitive les pages du journal tandis que sa voix montait. Il intensifiait ainsi son propos et ce, d’autant plus fort que l’édition qu’il parcourait était un journal libanais, avec ses publicités sur Beyrouth qui le déplaçait mentalement loin de sa laverie, plutôt que la presse arabe distribuée à Sydney et diffusant des réclames australiennes que lisait plutôt son frère. La lecture des travaux de Ghassan Hage sur les émotions attachées au foyer et le sens du home en migration, sur les circulations monétaires entre différentes branches d’une même famille installée dans différents lieux du monde, sur la manière dont on touche tous les jours un passeport dans le fond d’un tiroir pour se conforter dans l’idée qu’un ailleurs est possible « au cas où », sur les manières de négocier l’avenir, sur les conversations téléphoniques qui, d’un village au Liban où une mère ou une tante est offusquée de l’attitude d’une voisine, « tournent » de Caracas à Toronto en passant par Sydney pour revenir au Liban, en somme, sur ce qui fait la famille transnationale entre le Liban et ailleurs, a constitué un tournant dans ma manière de questionner mon ethnographie 23. J’ai appris à véritablement passer d’une analyse ethnographique de données qui émergent du terrain lui-même à la production de ces données par un travail pur d’observation « dans la latéralité », dont il faut ensuite faire émerger du sens. C’est sous le rapport des « mécanismes d’intensification de la réalité » que j’ai alors entrepris de reconsidérer toutes mes données ethnographiques sur le diwân de Walid bek. À cette aune, les affaires dont il avait été question durant ces entrevues et qui étaient trop parcellaires pour que j’en fasse un usage narratif cohérent n’avaient plus d’importance. Je m’affranchissais enfin du tourbillon des événements politiques et de la ritournelle incessante des commentaires. Je me suis attachée à décrire le rythme des samedis à Moukhtara dans le salon principal, la manière dont Joumblatt accueillait, recevait, s’asseyait, se levait, montait ou baissait la voix, les ruptures et les continuités dans l’échange avec ses visiteurs. Je considérais aussi les visiteurs, les postures, les circulations entre les différents espaces du palais. À partir de ce travail, j’ai été en mesure de faire émerger des clés d’analyse sur « l’humeur du bek », sur ce que les gens viennent faire, au fait, quand ils montent à Moukhtara sans avoir de problème à régler, sur la circulation des nouvelles, sur les différents positionnements des uns et des autres face au pouvoir qu’incarne Walid Joumblatt. Ni trop près, ni trop loin… savoir trouver la Pour tous les articles que j’ai utilisés et qui n’ont jamais été publiés en un recueil, voir la bibliographie dans Druzes de la Montagne libanaise. 23 [56] bonne distance est avec la capacité de commenter la politique de manière informée, deux compétences essentielles du « théâtre politique libanais ». La passion politique, elle, est un jeu sur les intensités : faire monter le défi, affirmer ensuite que les journalistes n’ont rien compris, dire devant un public de jeunes partisans qu’ils ne doivent pas croire ce qui a été dit à la télévision deux jours plus tôt, mais que la vision véritable du leader est celle-ci, etc. La tension tient sur l’incertitude des basculements. J’ai essayé de le montrer dans le chapitre « Vouloir de la politique ». La proximité politique avec le leader ne s’établit donc pas uniquement dans les termes d’une relation de clientélisme, qu’on y voie un effet de la tradition ou l’inscription dans un type d’échange. Être en mesure de parler de l’humeur du bek, c’est montrer qu’on fait partie du cercle de proximité. Il s’agit d’une compétence qui organise une certaine forme de compétition entre partisans. La proximité avec le leader politique n’est pas ici l’apanage d’un groupement identifié d’hommes de main dont le statut social serait directement fondé sur cette relation privilégiée (selon les analyses classiques de M. Johnson et M. Gilsenan). Le leader définit un espace de pertinence politique qui peut se lire en termes de distance constamment négociée avec la référence qu’il représente. Une référence qui est double, car Walid Joumblatt ne saurait être sans la référence à Kamal bek, son père martyr, et avant lui, tous les martyrs de la maison Joumblatt 24. C’est aussi de cette manière qu’il faut comprendre la centralité du « mensonge » dans cette société telle qu’a tenté de la saisir Raymond Jamous. Le mensonge (kidhb) dont il est question au Liban, et au Proche-Orient de manière plus générale, a moins à voir avec la question de la vérité et de sa dissimulation qu’avec la question de la réalité et de son interprétation. L’enjeu est le donner à voir. J’ai esquissé cette relation, centrale dans l’analyse, dans sa dimension historique avec le chapitre consacré à la construction du récit historique de légitimation des Joumblatt dans la Montagne libanaise et en épilogue de l’ouvrage provisoire soumis pour l’HDR. Il faudra encore consacrer un développement plus circonstancié sur la « relation » nécessaire entre Walid Joumblatt et son père martyr, ainsi qu’à la nécessaire refondation des lignages politiques par le martyr au Liban (à titre de comparaison, il faudrait faire l’ethnographie de la trajectoire de la maison Hariri depuis l’assassinat de son fondateur Rafic, ou encore de la famille Gemayel après l’assassinat de Pierre répétant celui de Bashir en 1982). Je profiterai de l’organisation du prochain colloque de la MAE en juin 2016 sur le thème « (Re)Fonder. Les modalités du (re)commencement dans le temps et dans l’espace » avec Frédéric Hurlet et Philippe Gervais-Lambony pour travailler plus systématiquement cette dimension, indispensable dans l’économie de mon anthropologie politique du Liban. 24 [57] À ce jeu-là, les Libanais sont sans arrêt dans la surenchère. La réalité est une matrice qui se peut transformer, se peut transfigurer parfois ; seule l’intensification incessante fait tenir l’illusio, selon des « stratégies » différentes du fétichisme pointé par Bourdieu. Il en va plutôt des ressorts du « prestige », dont on ne peut oublier que l’étymologie renvoie à cette capacité de manipulation puisque praestigio a également donné la prestidigitation (HDR, vol. 3 : 92). Le kidhb est de cette nature, il est « ce qui est trop beau pour être vrai ». Il est cette ressource qui permet de tenir l’absurde, et le cynisme qui en découle parfois, à distance 25. Aussi, il n’y a pas que de la politique lorsque l’on considère le Liban sous le rapport des intensités. Bien différentes des différentiels d’intensité et des techniques d’intensification mises en œuvre par Joumblatt, les techniques d’intensification des religieux et la manière dont l’entourage ou les dévôts « construisent » ces religieux sont tout aussi efficaces. Tandis que le premier doit faire en sorte de répondre aux attentes tout en n’étant jamais tout à fait là où on l’attend… pour entretenir l’attente précisément 26, les religieux sont fixes et toujours là où on les attend, comme on les attend. Ils évacuent radicalement l’incertitude et là est leur force. Alors que Joumblatt est assis sur une chaise mobile, le dos à son balcon, le shaykh est allongé dans un lit, dos au mur. On vient chercher la parole du premier, son froncement de sourcil (Walid bek la tacbus dit la chanson), on vient quérir le silence du second et son sourire ineffable. J’ai joué sur l’opposition entre leader politique et shaykh religieux dans mon premier travail, je n’ai pas voulu systématiser à nouveau cette opposition. Il n’en était pas moins nécessaire de faire « apparaitre » les shaykhs dans le récit, car ils sont des figures Je pense par contraste au très beau film d’Elia Suleiman, Intervention divine (2002) qui s’ouvre sur cette scène mémorable où le personnage principal traverse son village en Cisjordanie au volant de sa voiture. On le voit de l’extérieur, tout sourire, saluant de la tête chacun de ses voisins, et de l’intérieur, on l’entend dire à voix haute « salut bite chauve… et toi, le collabo…mais oui, bonjour, pauvre imbécile, etc ». Cette scène souligne toute la distance entre les apparences et les intentions, pour mieux ancrer le ton du film dans l’alternance entre le cynisme implacable que produit la violence de la réalité (celle de l’occupation et des humiliations quotidiennes au check-points) et la folie comme ressource pour échapper à cette réalité. 26 En écrivant ces lignes, je ne peux m’empêcher d’évoquer une histoire que racontait parfois Raymond Jamous sur son enfance et qui s’apparente à ces manières de jouer avec les attentes des autres. Raymond raconte ainsi comment sa mère demandait tous les matins à chacun de ses enfants ce qu’ils voulaient manger à déjeuner. Et jamais pourtant elle ne préparait un plat qui avait été désiré par l’un d’eux. À sa manière, n’intensifiait-elle pas en créant l’attente de la découverte du plat amené sur la table… tout en gardant le contrôle absolu sur la politique de la cuisine ? 25 [58] de la permanence et à leur manière, ils constituent aussi les Joumblatt dans ce qu’ils sont. Considérons ce portrait de Walid Joumblatt avec le shaykh Abu Muhammad Jawwad Wali al-Dîn (décédé en mai 2012) qui a circulé récemment sur la page facebook communautaire ‫ﺍﻟﻤﺨﺘﺎﺭﺓ ﻣﻦ ﷲ ﻭﺑﻨﻲ ﻣﻌﺮﻭﻑ‬ La mise en scène révèle bien un Walid Joumblatt qui parle quand le shaykh Jawwad lui sourit. L’un et l’autre, main dans la main, derrière la formule qui annonce : « Al-Moukhtara, de Dieu et des Bani Maarouf (l’un des noms par lesquels les Druzes se désignent) » 27, sont une représentation de la Montagne et 26F des relations essentielles qui font cette entité. Je me suis attachée à en rendre compte dans deux articles, placés à la fin de la monographie, qui contribuent ainsi à souligner, par contraste, la manière d’être des Joumblatt. Cette image, reconstruite avec la paraphernalia habituelle – étoile druze, cinq couleurs et compositions florales – que je retrouverai prochainement sans doute accrochée ou stickée dans divers endroits à l’intérieur des foyers, est ainsi moins un portrait de deux personnages qu’elle n’est une image de Moukhtara. Moukhtara Cette formule est aussi le nom d’utilisateur Facebook de la page qui diffuse beaucoup de ces photomontages de Walid Joumblatt et de ses députés. On y voit aussi énormément de post sur Wael Bou Fa’our, ce qui laisse supposer que des jeunes de la Munazzame sont derrière cette page communautaire. 27 [59] en tant que centralité politique qui ne tient pas simplement en elle-même ni même sur la maison politique des Joumblatt, mais en tant qu’elle est une réalisation « de Dieu et de la communauté druze ». Ainsi, l’une des hypothèses principales à partir de laquelle j’ai entrepris d’organiser ma recherche propose que le Liban doit en réalité être au moins autant être compris en tant que communautés en opposition pour le contrôle de l’espace étatique qu’en terme d’espace politique polarisé. Joumblatt n’est pas seulement un leader politique, il n’est pas seulement le représentant d’une communauté agissant au nom de ses partisans et grâce à leur soutien sur la scène politique nationale : il représente une centralité politique (centralité rendant un peu de l’arabe mawqac par lequel on désigne le palais de Moukhtara) polarisant un ensemble de relations sociales à l’échelle d’une région. Voilà ce qui est perpétuellement institué et réinstitué. Du point de vue d’une anthropologie politique plus générale, j’ai tenté de montrer que la légitimité des leaders régionaux au Liban fonctionne comme autant de polarités, comme espace d’influence, de négociation, d’attentes et non comme une autorité instituée par l’extérieur 28. C’est bien ce qu’il faut comprendre pour saisir la particularité des enjeux politiques et sociaux au Liban : rien ne se donne en dehors de la relation au leader (constitution de la famille, construction de l’espace, situations quotidiennes saturées de références, même dans un contexte de migration), mais cette relation n’est jamais fixe, c’est pourquoi l’instabilité semble dominer ce jeu. Cette dynamique se développe sur la base d’une profondeur historique qu’il est indispensable d’élucider. Ainsi, l’hypothèse d’un leadership comme « centralité active » oblige à reconsidérer l’espace dans lequel la souveraineté politique qui l’occupe se déploie et donc, la manière dont l’espace régional est construit comme « fief politique » et espace patrimonialisé. J’y ai consacré l’article intitulé « Les ombres de Beiteddin » qui explore la relation entre Joumblatt (et les Druzes de la Montagne) et l’État (vu à la fois comme État-pour-soi et Etat-de-l’autre) à partir du récit du retour du président de la République en estivage dans le palais de Beiteddin. Sur ce point, je cherche à rompre en partie avec le constat désabusé des Georges Corm ou Ahmad Beydoun qui ne croient pas que l’idée libanaise puisse exister tant que l’organisation du patronage à la libanaise fait constamment intervenir l’extérieur dans le jeu politique intérieur et le paralyse. 28 [60] Tension vers l’avenir, registres de l’incertitude et (ir)réalité de la guerre civile Dès lors que j’avais mobilisé la notion d’intensité pour observer et qualifier les relations dont j’avais entrepris l’ethnographie, il me fallait logiquement envisager leur « envers », la non intensité ou ce qu’Albert Piette qualifie encore de reposité. Les gens ne sont pas toujours tendus vers l’action, le vouloir de la politique, la création de mises-en-scène pour commenter la réalité et faire leur cinéma. Autant les rythmes beyrouthins peuvent sembler frénétiques, autant la vie dans la Montagne est faite de rythmes lents, de mi-journées passées sur les balcons et terrasses à siroter le maté en attendant de déjeuner. Il me faudra ainsi encore réaliser, dans un projet à venir, une analyse sur ces longues périodes passées dans le village et le quotidien des maisons qui laissent entrevoir d’autres temporalités que celle de l’intensité politique. On pourra les qualifier de « temporalités de retrait ». Une scène est à l’origine de mon intérêt pour les sociabilités féminines considérées sous ce regard. J’arrive sur le terrain en 2005. La scène a lieu au début du mois de juillet, alors que mon hôtesse et sa voisine attendent anxieusement les résultats d’examen de leurs enfants. Les deux femmes n’ont plus de mari à domicile. L’époux de mon hôtesse, Bassima, très fortement endetté a émigré au Nigéria deux ans auparavant et n’a depuis jamais envoyé de subsides, cessant même progressivement de donner des nouvelles. Quant à la voisine, elle est veuve avec quatre adolescents à charge. Les deux vieilles femmes qui viennent rendre visite cette après-midi-là sont également deux veuves dans une situation visible de précarité. Les femmes échangent peu et décident rapidement de combler le vide de la conversation par le partage du visionnage d’un film video : les funérailles du plus respecté des religieux druze, mort quelques mois auparavant. J’ai proposé de comprendre cette scène du visionnage des funérailles comme une manière pour ces femmes de s’inscrire dans un futur propitiatoire. J’ai ainsi entrepris d’inscrire mon analyse dans une réflexion plus globale sur les formes de temporalité dans les sociétés du Proche-Orient, en essayant notamment de saisir la spécificité d’un futur pour les femmes, quand la norme veut que le futur de la femme soit celui de son époux et de son fils. J’ai développé l’hypothèse que la figure du shaykh, au moment où il est transformé en saint (les funérailles) constitue une figure masculine idéale susceptible de donner un cadre au futur immédiat de ces femmes. Cette réflexion a énormément profité de mes discussions [61] avec Ghassan Hage qui travaille depuis plusieurs années sur l’espoir comme catégorie pertinente dans une analyse anthropologique des phénomènes migratoires. Ce texte placé à la fin du volume provisoire de la monographie sur le Liban ainsi qu’une partie des recherches collectives que j’ai développées ces dernières années sont des déclinaisons autour d’un même thème, qui se donne comme l’envers de l’intensité et de l’adéquation (recherchée ou au contraire cachée) aux attentes des autres 29. Comment s’organise la vie dans les villages de montagne libanais pour ces femmes abandonnées par leur mari émigré par nécessité, et qui ne donnent plus jamais de nouvelles, ces femmes veuves, ces femmes restées célibataires que l’on qualifie de vieilles filles, et plus généralement, d’une société locale profondément marquée par l’émigration de ses jeunes (qui trouvent massivement des emplois dans les pays du Golfe) qui reviennent en masse l’été pour redonner de la vie à la montagne ? Plus spécifiquement, j’ai proposé dans ce chapitre une réflexion sur la résistance au changement telle qu’elle se manifeste dans une frange majoritaire de la population druze du Chouf ; résistance qui va au-delà du positionnement politique conjoncturel de Walid Joumblatt. Les discours des acteurs dans ce contexte traduisent une réticence marquée face à la dynamique de ce qui a été désigné comme la « modernité islamique » et que des anthropologues comme Sabah Mahmud pour l’Égypte ou Lara Deeb pour le Liban avec son étude du Hezbollah ont déjà bien documenté. Il y a là plus qu’une opposition motivée par la compétition politique entre communautés, mais bien une attitude de défiance informée par la situation de communauté religieuse minoritaire. Mais c’est à travers la réflexion sur « l’écriture suspendue » des ethnographes de l’avant-guerre civile au Liban que j’ai entrepris de développer une réflexion plus approfondie sur le travail du temps dans le déploiement de l’enquête de terrain, selon une perspective très différente des propositions de J. Fabian qui restent finalement centrées sur la dimension d’altérité et de distance (effacées en partie sur le terrain, reconstruites dans l’écriture). Je suis depuis longtemps Cette idée est d’ailleurs à l’origine d’une « tentation » de recherche sur les losers et la lose, comme catégorie de non adéquation et de non réponse aux attentes implicites. Avec Anne de Sales, nous avons organisé une journée d’étude au Lesc sur ce thème. J’ai remis jusqu’à aujourd’hui la proposition d’écrire un essai sur ce thème plus littéraire qu’ethnographique il est vrai. Je n’y ai pas encore complètement renoncé… 29 [62] intéressée par le rapport à l’histoire dans le travail ethnographique (voir HDR, vol. 3 : 3e partie, 151). La dimension historique rendue manifeste dans les événements politiques violents se retrouve presque nécessairement au cœur de tout projet d’étude anthropologique dans le Proche-Orient. La réflexion sur la spécificité du terrain libanais que j’élabore dans ce travail fait sienne le constat d’A. Beydoun, historien libanais quand il écrit « La guerre libanaise n’est rien d’autre qu’une maladie du temps ». Si j’ai entrepris de spécifier la notion de synchronisation / désynchronisation comme point de vue spécifique pour une ethnographique des dynamiques temporelles, il me semblait néanmoins important de rester attentive à la configuration d’enquête produite dans ces contextes de rupture d’intelligibilité. L’ouvrage s’ouvre donc par une réflexion sur la difficulté à aborder le terrain libanais après la guerre civile : difficile de « renouer simplement le fil » avec les thématiques traditionnelles de l’analyse anthropologique du Liban – la question du patronage en tête – sans faire la part du déferlement de violence de la guerre civile ; impossible de focaliser l’analyse pour autant sur le postulat du Liban comme un système politique organisant l’équilibre de la violence. J’ai beaucoup fréquenté durant mes premières années au Liban le livre collectif dirigé par Jean Hannoyer et publié au CERMOC-Karthala, Guerres civiles. Économies de la violence, dimensions de la civilité. Sur mon terrain, j’ai longtemps été mal à l’aise entre un point de vue absolument présentiste évacuant la guerre au motif que mes interlocuteurs n’en faisaient pas un objet de discours et un point de vue qui aurait consisté à enquêter délibérément sur « la mémoire refoulée » de la guerre qui a par ailleurs fait l’objet de travaux ethnographiques remarquables (mais quasiexclusivement centrés sur Beyrouth). J’ai donc entrepris dans ce texte placé en ouverture de l’ouvrage de poser la question des temporalités asymétriques comme difficulté dans le travail d’enquête et l’analyse des données ethnographiques sur le terrain libanais. En effet, les matériaux échappent constamment quand on tente de les saisir par les structures, voire même, par les grammaires. Toute analyse du Liban contemporain doit prendre en considération la question de cette « réconciliation » imposée de l’après-guerre civile qui repose sur le déni et les silences. L’écriture de ce texte était devenue une nécessité dans le cheminement de mon analyse, et c’est notamment pour penser ce problème qu’avec Monica Heintz nous avions pris l’initiative d’organiser, dans le cadre de la conférence de l’American Anthropological Association de 2011, un atelier sur les temporalités en [63] contexte de rupture politique majeure et les « ethnographies à contre-temps » qui a servi de base au volume d’Ethnologie française paru en 2014 (HDR, vol. 3 : 180). « L’esprit des choses ». Quel projet de totalisation ? Chacun des chapitres qui constituent aujourd’hui le manuscrit original que je soumets dans le cadre de cette Habilitation a d’abord été conçu comme une étude en soi et a fait l’objet d’une publication comme article séparé ou chapitre d’un volume collectif. Ce projet de publication sous forme de monographie à part entière doit être lu comme un essai provisoire d’intégration d’une recherche dont les différentes facettes ont été exposées comme autant de volets successifs dans des textes qui dialoguent entre eux. Au moment de soumettre ce travail pour l’HDR, j’ai beaucoup réfléchi sur la facture d’ensemble qu’il sera souhaitable de donner à cet ensemble. L’écriture de l’introduction à pareille entreprise est souvent le moment de décider de la perspective dans laquelle on souhaite livrer un texte à ses lecteurs. Il ne s’agit pas simplement de l’objet du livre, encore que celui-ci soit essentiel, mais de sa clôture, de l’horizon implicite ou explicite en fonction duquel le texte a été écrit et construit. À la différence de mon premier manuscrit, l’écriture et la construction du texte n’ont pas été concomitantes. Et en l’état actuel, l’organisation même du manuscrit est susceptible d’être repensée en fonction de cet horizon. Chaque plan est un parti-pris qui organise une narration. Il en va de même du choix du titre. Je pense pour l’instant que le livre pourrait finalement s’intituler : Fils de la Montagne. Une anthropologie du patronage des Joumblatt au Liban… Mais Raymond dirait que ces questions-là se décident lors d’une soirée animée autour d’une bonne bouteille. Nous en reparlerons certainement après la soutenance ! Il ne s’agit bien évidemment pas seulement de cet ouvrage en cours de finalisation. La question de la clôture ou de la totalisation est une manière de discuter le projet anthropologique de manière plus générale. Enquêter : comment et pour quel type de données ethnographiques ; écrire : selon quelle forme et pour quelle démonstration ? Il me semble important d’aborder ces questions et de les discuter à ce moment de ma carrière au CNRS où je m’apprête à accepter la responsabilité d’encadrer une nouvelle génération d’anthropologues. [64] Ces questions à la fois théoriques et méthodologiques, je les ai rencontrées avec une véritable acuité lorsque je préparais l’introduction au volume de la Relation ethnographique comme je m’en suis d’ores et déjà expliquée. Dans un parcours de recherche, les périodes de lecture intensives sont souvent l’occasion de « rencontres » capitales. Pour ma part, je rencontrais véritablement la sociologie pragmatique, les travaux de Luc Boltanski et Laurent Thévénot et de toute leur « galaxie » alors que je cherchais à « réindexer » la pratique de l’ethnographie sur la (les) sociologie(s). J’avais sûrement « raté » la première rencontre alors qu’entre 2001 et 2003 j’animais avec Cyril Lemieux et Jean-Pierre Cavaillé un séminaire de recherche à l’EHESS sur « Illégitimité et légitimation du secret » ; un séminaire auquel Luc Boltanski nous faisait la gentillesse d’assister régulièrement. Nous y discutions de « cas » et « d’affaires », suivant en cela les thématiques au travail au Groupe de Sociologie Politique et Morale (GSPM) à l’époque. Cyril commentait beaucoup en essayant de dégager des « grammaires ». Il tissait déjà les relations à sa façon. Je m’imprégnais alors de cet « entre-soi » pragmatiste, qui commentait et questionnait les intervenants en s’appuyant sur des notions et une terminologie qui ne m’était pas familière à l’époque. Quelques années après, je reprenais tout ceci à bras le corps, alors que la propre maturation de mon travail sur le terrain libanais m’éloignait de la cohérence donnée par les discours sur les valeurs et me rapprochait des partis-pris pragmatistes. Par ailleurs, l’ethnologie traversait de son côté une « crise de la totalisation » qui se traduisait de manière retentissante dans les instances même de la discipline au comité national, une crise qui allait mettre aux prises constructivistes favorables aux rapprochements avec les historiens et naturalistes farouchement opposés à ces rapprochements. Et même en faisant le choix du constructivisme, devait-on continuer à interpréter à partir de contextualisations larges pour identifier des totalités culturelles selon une tradition portée pour moi par les figures tutélaires de Mauss, Dumont et Geertz, ou fallait-il opérer un tournant pragmatique et viser, comme ces collègues s’y employaient depuis des années, à mettre en évidence des dynamiques d’action hétérogènes dans le but de reconstruire des modalités de justifications, ellesmêmes productrices d’ordres de grandeur et de mondes avec leurs jurisprudences et leurs grammaires propres ? [65] Dans un très bel article écrit en 1997, Nicolas Dodier et Isabelle Baszanger posent avec acuité et pertinence les termes de ce débat 30. Ils y distinguent trois modalités de totalisation de l’ethnographie : la première, l’ethnographie intégrative de la tradition anthropologique qui se donne la forme de monographies, s’attache à construire des collectifs d’appartenance ; la seconde, l’ethnographie narrative de la tradition postmoderne qui met en évidence le caractère très personnel de l’intégration sur le terrain produit des récits de l’enquête et place le travail d’écriture au cœur de l’entreprise de totalisation ; la troisième, l’ethnographie combinatoire de la sociologie pragmatique vise à réunir une jurisprudence de cas pour identifier différentes formes d’action. Dans ces trois postures, la totalisation se fait par rapport à une « altérité » implicite : celle de la culture et de l’interaction sur la base d’une négociation culturelle dans les deux premiers ; celle des « positions actantielles » dans le troisième qui postule un fond commun de compétences dans toutes les situations. C’est cette altérité qui nourrit le projet universel des grammaires proposé par Cyril Lemieux. Le vaste projet d’enquête sur les grandeurs produit par L. Boltanski et L. Thévenot dans De la justification se déployait cependant selon des coordonnées qui m’étaient familières. Les grandeurs, à leur manière, fonctionnent comme les hiérarchies de valeur de Dumont et la généalogie des mondes dépeinte par les deux sociologues s’apparentait finalement à une relecture ambitieuse de l’histoire de l’Occident. L’intérêt de ce travail résidait plus spécifiquement, selon moi, dans les efforts pour penser le passage d’un monde à un autre, pour penser le glissement progressif d’un ordre de grandeur à un autre et leur coexistence dans des mondes enchâssés, là où Dumont n’avait su penser que leur opposition radicale. Je retenais donc plutôt l’enquête que Boltanski avait menée avec Ève Chiapello sur Le nouvel esprit du capitalisme comme ressource théorique majeure pour saisir des réalités en mouvement et la manifestation de ces changements et de ces dissonances parfois violentes dans un contexte donné. Le monde arabe contemporain ne peut en effet être appréhendé comme une totalité culturelle stable. Reste à déterminer quels objets, quelles situations considérer pour en saisir « l’esprit ». « Totalisation et altérité dans l’enquête ethnographique », Revue Française de Sociologie, 38(1), 1997 : 37-66. 30 [66] Ce bref panorama ne saurait être complet sans ajouter à la discussion une autre modalité de totalisation qui évacue, quant à elle, tout à la fois l’histoire et la culture. Il s’agit du « radicalisme anthropologique » défendu par Albert Piette avec lequel j’ai beaucoup discuté depuis son arrivée au LESC en 2010. J’avais été séduite par le projet qu’il défendait alors dans L’Acte d’exister. Une phénoménographie de la présence qui esquissait un programme d’enquête convaincant sur la présence des êtres humains en situation à partir de la tradition phénoménologique. À la suite de Tarde, il proposait alors de suivre la sociologie de Simmel que j’avais déjà largement intégrée dans mon travail et de s’attacher à une étude précise des conditions de la socialisation, par le questionnement préalable sur les principes de « généralisation sociale » et sur l’a priori de la vie sociale. Dans le sillage de ces propositions, je commençais à lire les travaux de Laurence Kaufmann et de Fabrice Clément sur la cognition des enfants et le postulat d’une sociologie « naïve » mettant au jour les règles élémentaires de la socialisation humaine ou ceux de François Cooren sur l’art de « faire parler ». Albert Piette « touchait juste » quand il invitait à saisir également dans l’analyse ce qui peut relever de l’humain et pas seulement de toutes les logiques socioculturelles dans l’action. Ces propositions me paraissaient offrir une heuristique nouvelle susceptible d’enrichir notablement les ressources de l’enquête et les modalités de sa restitution. J’avais d’ailleurs sollicité Albert pour qu’il m’accompagne dans les derniers kilomètres de cet ultra-trail qu’était devenue mon HDR. Cependant, là où j’avais perçu une heuristique complémentaire, Albert avançait quant à lui un projet radical d’anti-sociologisme, qu’il a labellisé ensuite anti-relationnisme, au profit d’une refondation de l’anthropologie sur l’étude de la singularité de l’homme considéré comme individu biologique total et considéré sous ce rapport. La totalisation changeait radicalement d’horizon. Dès lors qu’il n’y avait plus que l’individu dans la singularité de son existence, le projet de totalisation devenait, selon la lecture que j’en fais aujourd’hui, un projet naturaliste qui s’attache à mettre à jour les catégories cognitives de l’humanité, sur le modèle de la « découverte » qu’Albert a documentée d’une capacité spécifiquement humaine d’inattention maîtrisée et de focalisation diffuse en situation. La capacité de jouer sur l’engagement / le désengagement dans toute situation sociale et qui permet d’être-là a minima. Ce programme théorique est intéressant en soi. Il suppose de mettre en œuvre des méthodologies qui n’ont en effet que peu à voir avec celles de la sociologie et de l’anthropologie telles qu’elles [67] se sont constituées. Mais il s’agit bien d’un projet hors de la sociologie et non pas dans la sociologie ; une totalisation alternative qui n’en est pas moins une totalisation radicale. De ce point de vue, je resterai sociologue. Nos échanges souvent passionnés, mais toujours amicaux ont cependant eu la vertu de m’amener à véritablement « objectiver » - pour reprendre une notion centrale de la sociologie du dévoilement – la relation en tant qu’implicite de et dans la pratique ethnologique. Le sens de la relation porte la trace de ce compagnonnage et j’en sais gré à Albert, comme à tous les collègues qui ont participé à ces débats. Au moment de prendre position quant au travail concret d’enquête et d’analyse sur les Druzes du Chouf, le leadership de Joumblatt et l’anthropologie politique du Liban que j’ai réalisé pendant toutes ces années, je n’ai pas l’ambition de produire une théorie ou de livrer un modèle. Simplement de donner à voir et à comprendre un ensemble humain dans quelques-unes de ses spécificités et dans ce qui le relie à d’autres ensemble. Mon horizon demeure en effet de produire une parcelle d’intelligibilité sur le Proche-Orient contemporain et je crois ce projet utile. À ma façon, j’ai donc bien mené le projet de comparaison entre deux composantes d’une minorité religieuse au Proche-Orient comme je l’avais développé lorsque j’ai candidaté au CNRS en 2001. La question de « l’identité ethnique » qui avait été au cœur de mon travail pendant des années a trouvé une nouvelle expression dans l’ouvrage que je livre aujourd’hui. Elle est reprise dans le chapitre sur le « quant-à-soi » qui a été rédigé en réponse à une commande sur « la minorité druze» à paraître dans un ouvrage des plus classiques sur les communautés religieuses au Proche-Orient. Cependant, le déplacement que j’avais fait dans la formulation même des objets sociologiques induits par la sociologie pragmatique m’invitait à reconsidérer profondément cette question : je ne pouvais me résoudre à la reprendre d’une manière classique articulant trajectoire histoire de la communauté druze et l'exposé des principaux traits ascriptifs caractérisant (et distinguant) cette communauté parmi les autres. La posture analytique que j’ai tenté de développer dans l’article est de nature différente. Poser la question de l’élucidation de la question des minorités religieuses au Proche-Orient appelle en effet une réflexion sur la notion de communauté et sur ce qui la spécifie en tant que groupement humain distinct : trajectoire historique, éthos religieux, ensemble normatif, dispositif relationnel. Du point de vue de la sociologique pragmatique, on peut donc considérer que ce type d’approche s’attache à discerner l’ensemble [68] des appuis pertinents sur lesquels les individus, se reconnaissant et étant reconnus comme membres d’une communauté, se reposent dans l’ensemble des situations dans lesquelles cette dimension de leur identité est pertinente. Autrement dit, qu’est-il possible de décrire si l’on pose la question de la « manière d’être » minoritaire, saisie comme je l’entends à partir de l’ethnographie particulière d’une communauté et non en tant « qu’éthos minoritaire » idéal-typique ? Qu’est-ce qui fait qu’un Druze est druze, dans son attitude quotidienne, dans sa relation aux autres, druzes ou non druzes, dans sa manière d’habiter son existence ? Ce texte trouve sa place dans l’économie de l’ouvrage en position de produire une forme de synthèse après les différents volets « décomposant » la relation de patronage. Il met en perspective cette relation de patronage en la resituant dans une dynamique plus globale qui est une « manière d’être » druze au Liban, une manière d’être en relation entre soi et avec les autres communautés : dans une relation à un leader qui définit par les relations qu’il construit à l’intérieur de l’ensemble régional, mais aussi entre cet ensemble et l’espace politique libanais, être dans un territoire – le Chouf – qui n’est pas seulement historique, mais espace produit par les référents religieux druzes. Être un Druze libanais, c’est faire tenir cette double référence dans l’ensemble de ces interactions au quotidien. « L’esprit des choses » quand on se place au cœur du Chouf libanais, c’est la continuité par le territoire, celle qui fait les « Fils de la Montagne », les ‘ibna al-Jabal, quand le monde des relations politiques et la spirale des événements et des changements d’alliance reste marqué par l’instabilité permanente. Il s’agit certes d’une clôture partielle, mais d’une clôture néanmoins. En toute honnêteté cependant, je me dois de dire en conclusion de cette synthèse que le livre n’est pas encore aussi complet qu’il pourrait l’être. D’autres chapitres sont en gestation, d’autres points de vue méritent encore d’être tissés. J’ai déjà mentionné l’importance de consacrer un développement plus circonstancié sur la construction de Kamal Joumblatt comme martyr symbolique et la constitution du « couple » Walid / Kamal comme élément essentiel dans la légitimité du leadership Joumblatt dans la Montagne. Il me faudrait certainement mieux considérer ce qui caractérise les familles dans ce contexte, notamment le fonctionnement des associations familiales (rabta câ’iliya), car les familles ne sont pas seulement présentes dans leur relation à Joumblatt. [69] Il me faudrait encore consacrer un chapitre à la manifestation des oppositions internes dans la communauté druze et des défis qui sont lancés au leadership de Walid Joumblatt. Ainsi des conflits entre Walid Joumblatt et Talal Arslan sur la nomination du chef spirituel de la communauté ou du conflit sur les bienfonds religieux de la communauté (waqfs). Je dispose également d’un dossier partiellement documenté sur la famille Abou Ayach dont deux frères, originaires de Baaqline, ont fait fortune dans le Golfe avant la guerre et ont fondé la banque Al-Madina. L’un des deux, Ibrahim, a été enlevé pendant la guerre par les miliciens de Joumblatt et le frère Adnan sommé de verser une rançon pour financer l’effort de guerre. Cet épisode a été à l’origine d’un antagoniste très fort et les deux frères ont tenté de faire un peu de politique locale après la guerre, finançant notamment un splendide bâtiment ayant vocation à servir de Maison de village (bayt al-balad) à Baaqline. Ce coup d’éclat a fait long-feu et toutes les activités municipales se déroulent, on l’a vu, dans les locaux de la Bibliothèque nationale. Malik Abou Ayach, le mari de Bassima, est le cousin de ces deux frères et il a été employé par Adnan durant la guerre, amassant un pécule qu’il n’a pas réussi à faire fructifier avant de fuir en 2003, harcelé par la banque familiale et menacé par l’hypothèque sur sa maison. Il avait cru un temps s’en sortir par le haut quand le père des deux frères (son oncle donc) est décédé et qu’il a pris en charge l’organisation des funérailles. Il pensait obtenir l’épuration de ses crédits et des bourses d’étude pour ses enfants à l’Université Américaine de Beyrouth. Et puis, en 2005 la banque Al-Madina était accusée d’avoir financé l’attentat contre Hariri et Adnan était inculpé. En l’état, mon projet d’élucidation autour de la relation de patronage tient en partie. Mais que faire de ces « restes » de l’ethnographie ? Et quand faut-il refermer une totalité ? Autant de questions qui demeurent ouvertes pour moi au moment de soumettre malgré tout un texte imparfait et que je sais incomplet. Mais il faut aussi savoir finir, m’a souvent répété Lucette Valensi… Je ne fais donc que refermer provisoirement une parenthèse en attendant d’en discuter avec vous, à l’occasion de la soutenance et après. [70] Chapitre 5 Mettre en relation Le travail de recherche individuel est central dans la carrière d’un chargé de recherche au CNRS. Mais cette dimension de l’activité est loin d’être tout ce qui fait le quotidien et l’intérêt de notre métier. Je crois que j’ai choisi d’être ethnologue parce que j’aime les gens. Il est assez difficile de rendre tout ce que l’on peut mettre derrière ce terme. Il peut prendre des connotations très positives liées à l’humanité et l’attachement (les vrais gens, les gens du coin) ou assez négatives lorsqu’on l’associe aux ragots. En tout cas, les gens ne se donnent pas comme des individus, mais comme une pâte humaine et voilà aussi pourquoi je resterai ethnosociologue et non pas ontographe et ontologue. Dès lors, la recherche n’est jamais aussi stimulante que lorsqu’elle s’exerce dans l’échange. C’est évident sur le terrain et ça l’est tout autant dans le travail de « labo », d’équipe, de séminaire. Mettre des gens – souvent des étudiants – en relation autour d’un projet, d’un thème de recherche, mettre les données de terrain des uns et des autres en relation par la comparaison, mettre en relation des courants et des traditions académiques par la lecture collective de textes est ce dans quoi j’ai le plus souvent retrouvé l’énergie et l’enthousiasme de revenir à ma table de travail ou en bibliothèque. Je puise toujours une très grande satisfaction professionnelle dans ces entreprises collectives que l’on parvient à mener d’une idée, d’un échange, à une publication de qualité et dont le caractère collectif ne signifie pas manque de [71] cohérence, au contraire. Ma production scientifique reflète ce goût pour le travail collectif. Du projet ACI sur la catégorie jeune avec Raymond Jamous et Christine Jungen, puis Anne-Marie Peatrik au programme de recherche sur le changement social animé au LESC par Anne de Sales, de l’aventure interdisciplinaire sur le Prestige avec Frédéric Hurlet (un historien) et Isabelle Sidéra (une préhistorienne) aux échanges autour de la Morale et de la cognition initiés et piloté par Monica Heintz qui me laisse le souvenir d’une belle semaine à Cerisy ; des séminaires de l’Institut d’Études de l’Islam et des Sociétés du Monde Musulman aux séminaires doctoraux avec l’université de Chicago, de ceux de l’université de Sydney, du Centre Marc Bloch à Berlin ou à l’IFPO, et encore des écoles doctorales à Fès, Rabat ou Beyrouth : j’ai trouvé dans ces espaces d’échange et de travail collectif les heuristiques les plus fécondes. J’y ai aussi construit de belles amitiés et partagé d’inoubliables discussions autour d’un verre ou d’un bon repas. Le « sens de la relation » dans une carrière de recherche est aussi fait de cela… Et puis il y a aussi ces liens durables qui s’établissent dans et par la formation. Chacun des masters que j’ai accepté d’encadrer – au début de ma carrière, c’était encore des maîtrises et des DEA – fut l’occasion d’une remise en question, à un moment ou à un autre. Sans cette tension, il serait plus difficile d’avancer souvent. Je me réjouis d’avoir bientôt la responsabilité d’encadrer des travaux sur le long terme, comme j’ai déjà pu le faire en partie avec Anna Poujeau dont l’ethnographie riche et sensible sur les monastères chrétiens de Syrie m’a tant appris. Mettre en relation suppose d’avoir un goût pour la coordination, qui se concrétise dans l’activité quotidienne par des logistiques plus ou moins prenantes. Loin de le vivre comme une dimension chronophage du métier, j’avoue trouver beaucoup de plaisir dans l’organisation d’événements scientifiques. Il y a dans ces périodes qui précèdent chaque colloque, journée d’étude, congrès, des phases d’intense activité que je vis paradoxalement comme une détente nécessaire dans le travail de recherche. À ce titre, le plus grand défi que j’ai été amenée à relever fut sans conteste le pilotage du congrès biannuel de l’European Association of Social Anthropologists (EASA) sur le campus de Nanterre en 2012. Scientifiquement, cette aventure a été l’occasion d’échanges nombreux avec Anne de Sales et Monica Heintz au moment où il a fallu définir le thème du colloque. « Incertitude et inquiétude » porte la marque de nos réflexions sur le changement social, l’ethnographie du doute, l’anthropologie des institutions quand elles vacillent. [72] Logistiquement, j’ai véritablement « découvert » à cette occasion la très grande qualité de l’ingénierie de recherche au CNRS. Cette entreprise n’aurait pas été le succès qu’elle a été sans l’aide et les ressources du service de valorisation et communication de la MAE. Pendant plus d’un an, j’ai travaillé presque quotidiennement avec Myriam Danon et Carine Constans en lien avec les services de la MAE, de l’INSHS et de l’Université Paris-Ouest pour accueillir 1800 conférenciers dans les meilleures conditions. J’ai pris la mesure de ce que le travail en équipe, mené en bonne intelligence et avec plaisir, peut produire en termes de visibilité et de valorisation de nos activités. J’ai énormément appris et ces compétences, je souhaite les mettre à présent au service de l’encadrement des étudiants. Forte de cette belle expérience, c’est assez logiquement que j’ai accepté d’assurer un mandat à la direction adjointe de la MAE à partir de 2012, découvrant d’abord ce nouveau rôle administratif aux côtés de Pierre Rouillard et Isabelle Déan et très rapidement en faisant équipe avec Frédéric Hurlet comme directeur et Myriam Danon comme directrice administrative. J’avais déjà participé dans mes premières années au CNRS au conseil scientifique de l’IISMM et à la commission « mission » du LESC ; j’avais bénéficié pendant des années de l’expertise gestionnaire de Monique Descieux, véritable « pilier du labo » sur laquelle je savais pouvoir compter. Dire que la tâche a été facile pour notre nouveau trio à la tête de la plus importante MSH du réseau en termes de moyens quand nous avons été plongés dans le « grand bain » avec la rédaction du projet quinquennal 2013-2018 serait mentir. Mais quel défi ! Il est difficile de rendre par écrit le quotidien du pilotage d’une telle structure et plus encore d’exprimer la profonde satisfaction que cette action procure et qui doit beaucoup à la complicité que nous avons réussi à tisser durant ces années. Cela n’efface rien de toutes les difficultés et des petits combats pour faire tenir « la Maison », la développer si possible par une politique scientifique aussi ambitieuse que possible, l’animer et la valoriser. J’en profite pour remercier mes acolytes du 4e étage, mes collègues du LESC et tout le personnel de la Maison de la générosité qu’ils m’ont accordée en me permettant de pouvoir achever cette HDR aussi sereinement que possible. [73] Curriculum Vitae Activités de recherche Administration de la recherche Enseignement Valorisation [74] Isabelle Rivoal 25 juin 1968 CR1 section 38 n° d’agent : 14268 entrée en fonction : 1er octobre 2001 Laboratoire d’ethnologie comparative (UMR 7186) 12 rue Waldeck Rochet 92000 Nanterre 06 46 77 72 46 Université de Paris Ouest Nanterre la défense Maison de l’Archéologie et de l’Ethnologie 21, allée de l’université 92023 Nanterre cedex 01 46 69 26 14 01 46 69 24 75 isabelle.rivoal@mae.u-paris10.fr Isabelle.rivoal@cnrs.fr et de sociologie Titres et diplômes 1986-1989 : Diplôme de Sciences Politiques, mention spécialisation monde arabe à l’Institut d’études politiques (Lyon) 1989-1991 : Master d’histoire anthropologique à l’EHESS sous la direction de Lucette Valensi (La Construction de l’identité chez les minorités en Israël : le cas des Druzes) 1990 : Certificat d’arabe littéral à l’université de Paris-III 1991-1997 : Thèse d’anthropologie sociale et historique à l’EHESS sous la direction de Lucette Valensi (Les Maîtres du secret. L’identité communautaire et ses manifestations au Proche-Orient : le cas des Druzes en Israël) 1998 : Prix de thèse de l’EHESS 1998 : Qualification en ethnologie par le CNU 2001 : Recrutement CR1 au CNRS Postes et missions 1992-1995 : allocataire de recherche du Rectorat de Paris 1992-1993: doctoral student associate at the Harry S. Truman research Institute for the advancement of peace, Hebrew University of Jerusalem. [75] 1995: boursière Aire culturelles de la mission de la recherche 1998 : Secrétaire associée de l’association Barbaresques dans le cadre d’un contrat de vacation à l’EHESS 1998-1999: Post-doctorat (visiting fellow researcher) à l’American University of Beyrouth (department of social and behavioral research, dir. Samir Khalaf). Financement bourse de la fondation FYSSEN 2000 : Post-doctorat à l’Institut Français du Proche-Orient (Beyrouth). Financement bourse Lavoisier 2000-2006 : Membre du Centre d’Histoire Sociale de l’Islam Méditerranéen – EHESS (F. Pouillon dir.). 2001–2007 : Membre du conseil scientifique et du comité de pilotage de l’Institut d’études de l’Islam et des Sociétés du Monde Musulman (IISMM-EHESS, 96 bd Raspail, 75006 Paris) 2004 : Séjour de recherche au Centre Marc Bloch, Berlin (mars-juin). Coordination de l’axe « Islam en Europe ». 2007-2008: Honorary research associate au Department of Anthropology, Faculty of arts, University of Sydney. 2010-2012: Membre de l’executive committee de l’European Association for Social Anthropologists (EASA) et coordinatrice du comité local d’organisation de la conférence biennale 2012-2018 : Directrice scientifique adjointe de la Maison de l’Archéologie et de l’Ethnologie Administration de recherche : conseils et instances Depuis janvier 2012 : Directrice scientifique adjointe de la Maison Archéologie & Ethnologie – René Ginouvès et direction adjointe de l’USR 3225 de la MAE (45 ITA). • • Membre du Conseil scientifique de la MAE • Comité éditorial des Éditions de la MAE • • Membre du Comité de pilotage de la MAE Conseil de l’USR Conseil des utilisateurs de la MAE [76] • • • Conseil de Directeurs d’unité de la MAE Réunions des chefs de service de l’USR Membre du Conseil de Laboratoire du Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie Comparative (LESC) Participation à la commission interrégionale de classement de la BAP F – DR5 (sept. 2014) Participation en tant que représentants du CNRS à la Commission électorale consultative pour l’organisation des élections de la Comue Paris-Lumières Élue en avril 2015 au Conseil Académique de la Comue Paris-Lumières (collège B) Dans le cadre de mes fonctions à la direction scientifique de la MAE et à la direction de l’USR pour lesquelles je travaille très étroitement avec Frédéric Hurlet, directeur de la MAE, professeur d’histoire romaine à l’UPO et membre d’Arscan et de Myriam Danon, ingénieur de recherche et directrice administrative de l’USR, j’ai participé à la mise en place de la politique scientifique de la MAE et au pilotage de plusieurs opérations : Direction scientifique • • Rédaction du projet quinquennal de la MAE (2013) Mise en place d’une politique éditoriale de la MAE avec création du comité éditorial, création en 2013 avec Frédéric Hurlet d’une nouvelle collection en collaboration avec les Presses Universitaires de Paris-Ouest : « Sociétés humaines • dans l’histoire » : 3 ouvrages publiés • Mise en place d’axes scientifiques de la MAE • Sorbonne (dotation 18000 E) depuis 2013 • Création d’un appel à projet interdisciplinaire annuel avec soutien UPO et UP1 Création d’un Prix de thèse de la MAE biannuel depuis 2013 Organisation de la « rentrée littéraire de la MAE » : une semaine dédiée aux publications scientifiques de la MAE, recensement de toutes les publications, mise en valeur du pôle éditorial de la MAE (qui héberge 11 revues), organisation de 4 soirées de discussion autour d’ouvrages. Voir : http://www.mae.u- paris10.fr/qd_gallery/rentree-litteraire-de-la-mae-octobre-2014/ et http://www.mae.u-paris10.fr/qd_gallery/rentree-litteraire-de-la-mae-novembre• 2015/ Pilotage du Partenariat avec l’université de Chicago dans le cadre du programme PUF (Partner University Fund) 2011-2014 : organisation des séjours des étudiants américains à Paris, des séjours des étudiants français à Chicago, séminaire de recherche hebdomadaire en visio-conférence avec Chicago, organisation de [77] conférences invitées, colloque en mai 2012 à la MAE, colloque en mai 2013 à • Chicago. Organisation logistique avec la direction et les services de l’USR du colloque annuel de la MAE (les colloques sont sous la direction scientifique de chercheurs • de la MAE) • Prestige. Autour des formes de la distinction sociale Organisation scientifique (avec F. Hurlet et I. Sidéra) du colloque de 2013 sur « Le Réflexion sur la mise en place d’un projet transversal autour d’un axe numérique entre MAE et MSH Paris-nord dans le cadre du projet Projet Investissement • Avenir 2 de la COMUE Paris-Lumières (PLUM). Dans le cadre du projet de PIA2 de la COMUE PL j’ai accepté de produire un document de réflexion sur la situation des post-docs en sciences humaines afin de participer à la définition d’une politique dans la future COMUE. Organisation de deux journées prospective les 4-5 juin 2015, avec le soutien de l’Université ParisLumières et du conseil général d’Ile-de-France. Direction administrative • Implication dans le projet d’extension de la MAE dans le bâtiment SHS de l’UPO : réunion avec le service du patrimoine de l’UPO, réunion avec les UMR du futur bâtiment, pilotage de l’opération de restructuration interne de la MAE avec le • • service logistique de l’USR. Réalisation d’entretiens annuels des personnels ITA de l’USR Organisation des instances Afin d’acquérir les outils de management nécessaires à ces nouvelles fonctions, j’ai suivi le cycle « formation au management », 2 modules, organisés par la DR5 du CNRS en 2013. Responsabilités éditoriales Mise en place avec Frédéric Hurlet du comité éditorial de la MAE Création d’une troisième collection en partenariat avec les Presses Universitaires de Paris Ouest « Sociétés humaines dans l’histoire » que Frédéric Hurlet et moi-même dirigeons. Depuis janvier 2013, 7 ouvrages reçus, 3 publiés [78] Opération scientifique d’envergure : organisation de la conférence EASA (European Asdsociation of Social Anthropologists) à l’Université Paris Ouest Nanterre la Défense (2012) Audience internationale, accueil de 1800 personnes. 144 panels. Participation entre 2010 et 2012 au conseil exécutif de l’EASA dont j’ai été membre en tant que coordinatrice du comité local d’organisation. Activité scientifique de la manifestation : • • Détermination du thème et argumentaire scientifique de la conférence. Montage des dossiers de subventions et partenariat (Wenner-Gren Foundation, Mairie de Paris, CNRS, MQB) Organisation logistique et communication (avec l’aide du service communication de l’USR, Myriam Danon et Carine Constans) • Coordination avec services logistiques UPO pour salles. Appel à société pour • équipements visio. Gestion du prestataire. • Organisation Banquet à la Mairie de Paris. • • Organisation de l'Animation (troupe théâtre, manifestation quai Branly). Organisation des présentations l'espace éditeur Création des supports de communication (affiche, programmes, supports conférence) Valorisation • • • Mise en place de la politique de communication avec conférence de presse au siège du CNRS Interviews dans la presse écrite Émissions radiophoniques Activités collectives de recherche Programmes et opérations de recherche : organisation et participation 1999-2000 : Participation au programme de recherche « Municipalités et pouvoirs locaux au Liban » (CERMOC-Beyrouth, sous la direction d’A. Favier & E. Picard) 2002-2005 : Responsable de l’axe « La interdisciplinaires » à l’IISMM. [79] question palestinienne. Approches 2002-2005 : Participation au Programme « Les frontières intérieures : factions et identités politiques », (Ph. Ramirez dir. financement ACI terrain). 2003-2007 : Responsable avec D. Dehouve de l’axe « Anthropologie politique et organisations sociales » au Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (LESC). 2003-2005 : Participation au programme CORUS « Identités et territorialités palestiniennes », axe 2 « De l’histoire sociale de la mémoire aux usages politiques du passé : le cas de la Palestine », (IFPO-Beyrouth, INALCO, IISMM, sous la direction de N. Picaudou et H. Laurens). 2004-2007 : Coordinatrice d’une ACI jeunes chercheurs (JC 6460) intitulée « La catégorie des jeunes dans le monde méditerranéen » (LESC). 2007-2010 : Participation au programme ANR « Construire le politique au MoyenOrient Figures du leadership et sociétés partisanes », (IFPO-Beyrouth, sous la direction de S. Mervin & F. Mermier). 2008-2012 : Responsable de l’Axe 1 du LESC (avec Isabelle Daillant et Éric Garine) « Formes et dynamiques comparées de la parenté et du politique » 2010-2011 : Participation à l’axe de recherche « Le Changement social : observer, décrire, comprendre » coordonné par Anne de Sales au LESC. Séminaire doctoral. 2011 : Organisatrice avec Monica Heintz d’une table-ronde sur la dimension biographique dans les contextes de changement radical. Tenue d’un panel au congrès annuel de l’AAA (Montréal 2011) sur ce thème. [Encadrement de 5 doctorants > Publication dans un numéro spécial d’Ethnologie Française]. 2011-2013- Coordinatrice avec Monica Heintz d’un programme de recherche sur « Morale et cognition » : Deux workshops au LESC (2011 et 2012) et colloque à Cerisy la salle : (Label : École thématique du CNRS) [encadrement de 7 doctorants > Publication en cours aux Éditions du CNRS]. 2012 : Organisatrice avec Noel Salazar du Young Scholars Forum, Plénière de la Biennale EASA. Conférence introductive. [Encadrement de 3 doctorants > Publication du dossier dans Social Anthropology] 2012-2014 Coordinatrice du programme Partner University Fund (Université de Chicago/MAE) « Migration, Material Culture and Memory: Constructing Community in Mobile Worlds » (avec Michèle Baussant et Michael Dietler) (gestion USR 3225). [Encadrement de 30 doctorants > Publication d’un volume aux Presses Universitaires [80] Paris-Ouest (en français) + Publication en cours d’un volume en anglais aux Presses Universitaires de Chicago]. 2013- : Participation au programme de recherche Université Paris Lumières coordonné par Albert Piette et Jean-Michel Salanskis « L’Humain dans les sciences sociales, les humanités et la philosophie». Coordinatrice avec A. Piette de l’axe « Présence et activité ». Organisation de colloques, séminaires et journées d’étude Colloque IISMM Les returnees palestiniens après les accords d’Oslo. Catégorie sociale ou dynamique historique ? Paris, 4 mars 2004 : « Conclusions » Colloque Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative, Université Paris XNanterre, La Relation ethnographique du terrain au texte. Parcours ethnologiques. Colloque en l’honneur de Raymond Jamous, Nanterre 1er, 2 et 3 février 2007 : « Séquelles de guerre. L’impossible enquête chez un ancien milicien libanais ». Colloque La catégorie des ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen, LESC-Nanterre, 11-12 octobre 2007 : « Introduction : La catégorie des jeunes : un point de vue heuristique sur l’anthropologie méditerranéenne ? » & « Dans l’intimité du leader. Les Jeunes du Parti ». Conférence de l’American Association of Anthropologists, Panel Biographical time in contexts of radical social changes: methodological questions (organization avec Monica Heintz), Montreal, 16-20 novembre 2011 : « Suspended writings, engaged lives: An appraisal of post-war Lebanon” Journée d’étude “Morale & cognition I: les émotions”, coord. Monica Heintz & Isabelle Rivoal, Nanterre, LESC, 25 novembre 2011 : « Introduction de la journée d’étude ». Journée d’étude « Morale et cognition II: Les origines de la morale, coord. Monica Heintz & Isabelle Rivoal, Nanterre, LESC, 13 avril 2012 : « Faire le pari d'une histoire globale de la vie sur terre: David Christian et la big history ». Colloque international programme PUF University of Chicago – MAE « Logiques mémorielles et temporalités migratoires », coord. Michèle Baussant, Isabelle Rivoal, Evelyne Ribert, Irène Dos Santos, MAE - Nanterre, 21-23 mai 2012 : « Introduction ». Séminaire général du LESC, « Cryptographie. Journées d’étude dédicacées à Laurence Caillet », coordination Sophie Houdart, Sylvaine Camelin, Adeline Herrou, Isabelle Rivoal, Nanterre, 31 mai-1er juin : « Le texte comme matrice, l’écriture pour mystique : usages et transmission des livres religieux druzes ». [81] Conférence biennale de l’EASA, « Uncertainty and Disquiet / Incertitude et inquiétude », Coordinatrice du comité local d’organisation et responsable scientifique, Nanterre, 10-13 juillet 2012. Conférence biennale EASA, panel “What happens when we stop believing in / believing that?”, coord. Isabelle Rivoal & Anne de Sales: “When the ethnographer starts experiencing inadequacy of/on fieldwork” + discutante du panel, Nanterre, 10 juillet 2012. Journée d’étude “Anthropologie de la lose”, coord. Isabelle Rivoal & Anne de Sales : « Introduction : penser la lose comme loose ». Nanterre, LESC, 13 décembre 2012. Colloque international final du programme PUF MAE-Université de Chicago « Mobility, memory, material worlds: crossroads and convergences ». (Coord. Michael Dietler, Isabelle Rivoal, Fristin Hickman, Remi Hadad), Chicago 30 mai-1er juin 2013: Introduction du colloque avec Michael Dietler + « Remembering Kamal Jumblat Here and There: Embodiment, Ritualization, Circulation of Images Between Lebanon and Australia ». Colloque interdisciplinaire de la MAE : « Le Prestige. Autour des formes de la différenciation sociale », coord. Frédéric Hurlet, Isabelle Rivoal, Isabelle Sidera, Nanterre, MAE, 12-14 juin 2013: « Conclusions du colloque ». École thématique CNRS & colloque de Cerisy-la-salle : « Morale & cognition », Coord. Monica Heintz, Nicolas Baumard, Olivier Morin, Isabelle Rivoal. Cerisy-la-salle, 4-11 septembre 2013 : « La religion comme morale du comportement ». Atelier « Expérience & expérience : approches anthropologiques » (avec Albert Piette et Anne de Sales), séminaire 2h mensuel, de novembre à juin 2013-2014 : « En quoi consisterait une anthropologie existentiale ? Enseignement Cours 1990-1991 : Maître auxiliaire en sciences économiques et sociales au Lycée de la Providence à Dieppe (76). 1991 : Maître auxiliaire en histoire-géographie et français au Collège Notre-Dame à Honfleur (14). 1998-2002 : Cours en maîtrise (département d’ethnologie, Paris X - Nanterre, certificat Monde arabo-musulman) : « Islam et sociétés au Maghreb et au Mashreq ». [82] 2002-2006 : Cours master « Islam et société » avec Sylvaine Camelin (département d’ethnologie, Paris X – Nanterre, 20h annuelles). 2009-2011: Cours master « Islam et société » (département d’ethnologie, Paris Ouest – Nanterre La Défense, 48h annuelles). Séminaires 2000-2001 : responsable du séminaire mensuel de l’équipe 10 « Communauté, minorités et idéologie religieuse dans le monde arabe et musulman », Université de Paris XNanterre. 2001-2003 : responsable du séminaire « Illégitimité et légitimation du secret », EHESS (avec C. Lemieux & et J.P. Cavaillé). 2001-2003 : responsable des « ateliers d’anthropologie politique : factionnalisme et configurations sociales », CHSIM-EHESS (avec G. Albergonni & J. Schmitz). 2002-2004 : responsable du séminaire mensuel LESC « anthropologie de l’expérience conflictuelle » (avec O. Kyburz). 2002-2004 : responsable du séminaire mensuel « La question palestinienne. Approches pluridisciplinaires », IISMM-EHESS. 2003-2005 : responsable séminaire mensuel LESC / CREA « Ateliers de lectures commentées » (avec D. Dehouve & L. Scubla). 2004-2006 : responsable séminaire mensuel LESC dans le cadre de l’ACI « La catégorie des jeunes dans le monde méditerranéen ». 2006-2007 : responsable séminaire mensuel à l’IISMM-EHESS « Des frontières, des limites et des marges dans les sociétés du monde musulman » (avec R. Jamous). Séminaire mensuel, de novembre à juin. 2008 : Post graduate seminar, 2e semestre (coordonné avec Erin Taylor), Department of Anthropology, University of Sydney, Australie, séminaire hebdomadaire d’encadrement des doctorants, août-novembre. 2008 : Research seminar, 2e semester, Department of Anthropology, University of Sydney, Autralie, seminaire bi-hebdomadaire, août-novembre. [83] 2010-2012 : Séminaire « Anthropologie du changement social : observer, décrire, comprendre », LESC, 2h mensuel, octobre à juin, (avec Monica Heintz et Anne de Sales) 2012-2013 : séminaire doctoral dans le cadre du programme PUF Chicago sur Objets et culture matérielle (2h hebdo) d’octobre à février. 2013-2014 : atelier « Expérience & expérience : approches anthropologiques » (avec Albert Piette et Anne de Sales), séminaire 2h mensuel, de novembre à juin. Écoles doctorales 2003 : École doctorale, IISMM et l’Université St Joseph, Beyrouth en octobre 2003 : conférence & encadrement ateliers. 2005 : Université de Paris X-Nanterre, l’université de Mohammedia et centre Jacques Berque, Rabat en avril 2005 : encadrement ateliers. Encadrement travaux étudiants • • La zakât, une aumône islamique, par Glenn Levesque, Maîtrise, 2004 Les Palestiniens de Chatila dans la construction des identités à Bagnolet. Militantisme, négociation et mises en scène entre jeunes et municipalité, par Alexandrine Jan, Maîtrise • 2006. • dans le colloque terminal. • ONG palestinienne au Liban, par A. Gharbi, Maîtrise 2006. • dans le colloque terminal. • la paroisse Notre-Dame du Liban (Paris), par Laure Assaf, Maîtrise, 2007 • modèle audiovisuel, par Romain Bonvoisin, Maîtrise 2007. Ce travail a bénéficié de l’encadrement de l’ACI Catégorie jeune et il a été présenté Enjeux statutaires et mise en scène du pouvoir. Étude ethnographique des jeunes dans une Ce travail a bénéficié de l’encadrement de l’ACI Catégorie jeune et il a été présenté Construction d’une communauté libanaise maronite. Étude ethnographique des scouts de « Faire parler » du cinéma en Jordanie : la Royal Film Commission et la mise en place d’un • Les nouveaux résidents européens en Cappadoce, par Margaux Dassieu, M1 2011. • Bouhassoun, Tutorat d’un M2 d’ethnomusicologie dirigé par Jean Lambert, 2013. Chants et rituels du cycle de la vie chez les Druzes du sud de la Syrie, par Waed Etudes des loisirs des jeunes aisés d'Agadir (Maroc), Jessica Dubarry, Master 2 en cours [84] Expertises et jurys divers Expertises scientifiques de projets et candidatures 2006 Expertise ACI JC – Mobilités, frontières et mécanismes de pouvoir dans l’espace israélo-palestinien (C. Parizot) 2006 Expertise Musée du Quai Branly – L. Tahan 2008 Expertise ANR – projet BALKABAS (G. de Rapper) 2009 Expertise ANR – projet MIGRORIENT (M.K. Dorai) 2009 Expertise Musée du quai Branly – E. Saleh 2010 Expertise ANR – projet GenrEnGuerre (J. Freedman) 2013 Expertise Labex CAP – Projet Usages et statuts de l’image documentaire au Liban : les archives photographiques de la reconstruction de Beyrouth (S. Brones) 2015 Expertise Austrian Science Fund (FWF) - Death & Life. Local Conceptions of Reincarnation among the Druzes in the Middle East (G. Fartacek) Expertises éditoriales 2003 Expertise d’un ouvrage pour les éditions du CNRS (G.Châtelard – Briser la mosaïque) 2005 Expertise d’un ouvrage pour les éditions du CNRS (K. Doraï – Les réfugiés palestiniens du Liban) 2006 Expertise d’un article pour la REMMM (C. Roussel) 2007 Expertise d’un article pour la REMMM (F. Naili) 2008 Expertise d’un article pour la revue Civilisation (aveugle – Tourisme et mobilité Palestine) 2008 Expertise d’un article pour le Journal of religion review (aveugle – Druzes Israel) 2010 Expertise de deux articles pour les Archives de Sciences Sociales des Religions (aveugle – monachisme & Pèlerinage Liban) 2012 Expertise d’un ouvrage pour la Société d’Ethnologie (A. Poujeau – Des monastères en partage) 2013 Expertise d’un article pour les Annales HSS (aveugle – Domination Liban) 2013 Expertise d’un article pour la REMMM (Halabi-Halawi – réforme druze XVIe) 2014 Expertise d’un article pour le Journal of the Royal Anthropological Society (S. Hermez – Cynism and Political mobilisation Liban) 2014 Expertise d’un ouvrage pour les Presses Universitaires de Paris-Ouest (I. Sidéra - Le site néolithique de Cuiry-lès-Chaudardes-II) 2014 Expertise d’un ouvrage pour les Presse Universitaires de Paris-Ouest (C. Vassas – Esther, le nom voilé) [85] Jurys de concours et prix 2006 membre du jury du Prix de thèse de l’IISMM-EHESS 2014 membre du jury du Prix de thèse de la MAE 2014 membre du jury de la Bourse Michel Seurat 2015 membre du jury de la Bourse Michel Seurat Jurys thèse 2008 : Anna Poujeau Eglise, monachisme et sainteté. Construction de la communauté chrétienne en Syrie (dir. R. Jamous), Thèse d’ethnologie, Université Paris-X Nanterre, 18 décembre 2008. (Membre jury) 2009 : Barbara Karatsiolis Quand les ennemis habitent ensemble. Dynamiques du conflit et de la paix dans les cohabitations entre Chypriotes grecs et turcs. Ethnographie comparative de la cohabitation (dir. J. Friedman), Thèse d’anthropologie sociale, EHESS, 15 décembre 2009. (Membre jury) Communications dans des colloques nationaux et internationaux Xe Congrès de l’AFEMAM, Perpignan, 7-8 juillet 1995 : « Affirmation d’une identité religieuse et absence de revendication politique dans la communauté druze israélienne ». Colloque international Lucette Valensi : histoire sociale et anthropologie au Maghreb et au Mashreq, Oxford, 1-2 avril 2000 : « Pour en finir avec l’identité communautaire ». [article publié] Colloque international CERMOC Pouvoirs locaux et municipalités au Liban, Beyrouth, 6-9 novembre 2000 : « Pouvoirs locaux, illusions communautaires. Baaqline, de l’Adminisitration Civile de la Montagne à la renaissance municipale ». [article publié] Colloque international de l’IISMM L’exercice de la comparaison : comparer au plus proche, comparer au pluriel, Paris 7-8 décembre 2000 : « Le poids de l’histoire. Druzes du Liban, Druzes d’Israël face à l’État ». [article publié] Colloque CIESAS-Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie Comparative Formes de vote et pratiques d’assemblée, Colima (Mexique) 10-12 octobre 2001 : « L’invention des primaires. La désignation conflictuelle d’un candidat dans un village druze en Israël ». [article publié] [86] Colloque international de l’IISMM Minorités en miroir. Musulmans en contexte non musulman, non-musulmans en contexte musulman. Normes et pratiques, Paris 5-6 décembre 2001 : « Le système confessionnel libanais de la constitution de 1926 aux accords de Ta’if ». Colloque CIESAS-Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie Comparative Les dialectiques du conflit et du pouvoir, Nanterre 4-5 février 2002 : « Factions, confessions et partis politiques. Un point de vue à partir du Liban ». [article publié] Colloque IRMC Le religieux en Méditerranée: terrains et théories, Tunis, 1-2 novembre 2002 : « Le rôle de la hiérarchie religieuse dans l’inscription de la communauté druze en Israël » Colloque CIESAS Lo secreto publico. Categorias de lo politico, Mexico 6-8 mai 2003 : « Mensonge et secret. Les formes de la dissimulation entre ordre politique et ordre religieux au Proche-Orient ». Journée d’étude LESC-CIESAS Nation et pensée sacrificielle (org. D. Dehouve), Nanterre 4 novembre 2003 : « Commentaires de conclusion ». Colloque IISMM Les returnees palestiniens après les accords d’Oslo. Catégorie sociale ou dynamique historique ? Paris, 4 mars 2004 : « Conclusions » [article publié] Journée d’étude CIESAS-Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative La Figure du prêtre, Nanterre 9 mars 2004 : « ‘Maître de la religion et du monde’. Le chef spirituel de la communauté religieuse druze en Israël ». Journée d’étude ‘ACI Les frontières intérieures’, La relation frère-frère, Villejuif 10 décembre 2004 : « La rivalité fraternelle et la division factionnelle : données proche-orientales ». Colloque Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative La vie monastique dans le miroir de la parenté. Vers une comparaison de différentes formes de monachisme, Nanterre 1er-2 février 2005 : « Ascétisme et communauté. Le centre érémitique d’al-Bayyâda dans l’organisation religieuse druze » [article publié] Colloque IFPO Beyrouth, IISMM, INALCO, Pour une histoire sociale de la mémoire palestinienne, Paris 10-11 mars 2005 : « En marge de la Palestine : question d’historiographie druze » [article publié] Colloque Université Hassan II, Centre Jacques Berque, Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative L’altérité et la reconstruction de la société locale, Mohammedia (Maroc) 14-18 avril 2005 : « Du socialisme d’un seigneur de la montagne : paradoxe du système politique libanais » Colloque CERES, Terrains et savoirs actuels de l’anthropologie, Tunis 8-10 décembre 2005 : « Les minorités religieuses au Proche-Orient : sortir du politique » [87] Colloque international, Figures d’Ibn Khaldûn. Réception, appropriation, usages, Alger 17, 18 et 19 juin 2006 : « Les usages du ‘concept’ de ‘asabiyya sur le terrain proche-oriental » Colloque Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (UMR 7535) & Centre d’anthropologie de Toulouse (UMR 8555), Figures et substituts des saints. Manipulation d’objets et pratiques rituelles, Nanterre 19, 20 et 21 octobre 2006 : « Revivre la mort du saint. Quand les femmes druzes visionnent les vidéos des funérailles des shaykhs ». [article publié] Workshop Université Paris 10 Centre Jacques Berque, La Fabrication sociale des frontières, Rabat, 7-9 novembre 2006 : « La construction sociale de « seuils » politiques et régionaux au Liban : le Chouf comme fief des Joumblatt ». Colloque Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative, Université Paris XNanterre, La Relation ethnographique du terrain au texte. Parcours ethnologiques. Colloque en l’honneur de Raymond Jamous, Nanterre 1er, 2 et 3 février 2007 : « Séquelles de guerre. L’impossible enquête chez un ancien milicien libanais ». [article publié] 8th international conference on the social context of death, dying, and disposal, Bath, UK, 12-15 septembre 2007: “Women are weeping while men are kept outside the house. Gender, honour and reincarnation in Druze funerals”. Colloque La catégorie des ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen, LESC-Nanterre, 11-12 octobre 2007 : « Introduction : La catégorie des jeunes : un point de vue heuristique sur l’anthropologie méditerranéenne ? » & « Dans l’intimité du leader. Les Jeunes du Parti Socialiste Progressiste (Liban) » [article publié] Joint International conference of the ASA, the ASAANZ and AAS on Ownership and appropriation, University of Auckland, New Zealand, 8-12 décembre 2008: “The Shuf mountains as 'Junblat's place'. Hospitality and the political construction of regional estates in Lebanon”. Conference Friends, Patrons, Followers. Practices, discourses and semantics of friendship and patronage in historical, anthropological and cross-cultural perspectives, Albert-Ludwigs University of Freiburg, Allemagne, 23-25 juillet 2009: “Formation of masculinities and political identities in Lebanon”. Journée d’étude La compétition dans les sociétés du haut moyen âge, Universités Paris 1 Panthéon-Sorbonne/LAMOP, Paris Ouest Nanterre La Défense/ArScAn, Roma Tre, Nanterre, 19-20 novembre 2010 : « Compétition et solidarité, opposition ou complémentarité ? Un point de vue anthropologique » [article en ligne sur le site de travail du groupe] [88] Conférence AFEA, « Connaissances, no(s) limite(s) », Paris, EHESS, 21-24 septembre 2011 : « "Nous voulons nous enthousiasmer!" Manipulations numériques des discours politiques par les jeunes Libanais ». Conférence de L’American Association of Anthropologists, Panel Biographical time in contexts of radical social changes: methodological questions (coordination avec Monica Heintz), Montreal, 16-20 novembre 2011 : « Suspended writings, engaged lives: An appraisal of post-war Lebanon”. [article publié ] Journée d’étude “Morale & cognition I: les émotions”, coord. Monica Heintz & Isabelle Rivoal, Nanterre, LESC, 25 novembre 2011 : « Introduction de la journée d’étude ». Journée d’étude « Morale et cognition II: Les origines de la morale, coord. Monica Heintz & Isabelle Rivoal, Nanterre, LESC, 13 avril 2012 : « Faire le pari d'une histoire globale de la vie sur terre: David Christian et la big history ». Colloque international programme PUF University of Chicago – MAE « Logiques mémorielles et temporalités migratoires », coord. Michèle Baussant, Isabelle Rivoal, Evelyne Ribert, Irène Dos Santos, MAE - Nanterre, 21-23 mai 2012 : « Introduction ». [article publié] Séminaire général du LESC, « Cryptographie. Journées d’études dédicacées à Laurence Caillet », Nanterre, 31 mai-1er juin : « Le texte comme matrice, l’écriture pour mystique : usages et transmission des livres religieux druzes [article en cours de publication] Conférence biennale EASA, Young Scholar Plenary, coord. Isabelle Rivoal & Noel Salazar, « Contemporary ethnographic practice and the value of serendipity”, Nanterre, 13 juillet 2012: “Introduction”. [article publié] Conférence biennale EASA, panel “What happens when we stop believing in / believing that?”, coord. Isabelle Rivoal & Anne de Sales: “When the ethnographer starts experiencing inadequacy of/on fieldwork” + discutante du panel, Nanterre, 10 juillet 2012. Journée d’étude « Anthropologie de la lose », coord. Isabelle Rivoal & Anne de Sales : « Introduction : penser la lose comme loose ». Nanterre, LESC, 13 décembre 2012. Colloque international final du programme PUF MAE-Université de Chicago « Mobility, memory, material worlds: crossroads and convergences ». Chicago, 30 mai-1er juin 2013: Introduction du colloque avec Michael Dietler + « Remembering Kamal Jumblat Here and There: Embodiment, Ritualization, Circulation of Images Between Lebanon and Australia ». [89] Colloque interdisciplinaire de la MAE : « Le Prestige. Autour des formes de la différenciation sociale », coord. Frédéric Hurlet, Isabelle Rivoal, Isabelle Sidera, Nanterre, MAE, 12-14 juin 2013: « Conclusions du colloque ». [article publié] École thématique CNRS & colloque de Cerisy-la-salle : « Morale & cognition », Coord. Monica Heintz, Nicolas Baumard, Olivier Morin, Isabelle Rivoal. Cerisy-la-salle, 4-11 septembre 2013 : « La religion comme morale du comportement ». [article en cours de publication] Conférences & communications dans des séminaires de recherche et d’enseignement 2000 Conférence à l’Université américaine de Beyrouth, 7 janvier 2000 : « The Spiritual Leadership in the Lebanese Druze Community ». 2003 Conférence prononcée dans le cadre de l’École doctorale IISMM-Université SaintJoseph, Beyrouth 3 octobre 2003 : « Ascétisme et communauté. Réflexions à partir du centre érémitique d’al-Bayyâda au sud-Liban ». 2003 Journée d’étude « ACI Les frontières intérieures (Ph. Ramirez) », Lille Institut d’études politiques, 17 octobre 2003 : « L’anthropologie du monde arabe et la question des factions » 2004 Séminaire « Atelier de lectures commentées » (D. Dehouve, I. Rivoal, L. Scubla), Nanterre 27 janvier 2004 : « Les dimensions du fait religieux dans la pensée de Tocqueville ». 2004 Conférence prononcée au Consejo Superior de Investigationes Cientificas, Madrid 25 juin 2004 : « Communal mysticism. Ascetism, secrecy and transmission of knowledge in druze religion ». 2005 Séminaire général du LESC, Nanterre 12 avril 2005 : « La catégorie des jeunes dans les sociétés du monde méditerranéen ». 2006 Séminaire du CEIFR-EHESS, Paris 5 mai 2006 : « Les minorités religieuses ». 2006 Séminaire de l’IISMM-EHESS « Études Palestiniennes (E. Aubin-Boltanski) », Paris 4 mai 2006 : « Les returnees dans la Palestine d’Oslo ». 2007 Séminaire du CREA-Ecole polytechnique (L. Scubla), Paris 16 janvier 2007 : « Factions, confessions et partis politiques. L’exemple du Liban ». [90] 2007 Séminaire du CERLIS-Faculté des sciences humaines et sociales de la Sorbonne « Les Frontières culturelles entre fluidité et durcissements identitaires. Europe, Chine, Méditerranée » (D. Desjeux, V. Cicchelli) , Paris, 5 février : « Des frontières de Fredrik Barth aux frontières de Georg Simmel. Sur un parcours ethnographique proche-oriental ». 2007 Séminaire de l’Institut Français du Proche-Orient, Beyrouth 12 avril 2007 : « Le Chouf, patrimoine et histoire. Walid Joumblatt et la construction d’une za’ama de la Montagne » 2007 Séminaire ACI sur « La catégorie des ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen », Nanterre 4 mai 2007 : « Le président et les jeunes. Ethnographie de l’Oraganisation des Jeunes Progressistes (Liban) ». 2007 Séminaire IISMM-EHESS « Minorités en miroir » (E. Alès), Paris 7 mai 2007 : « L’importance du jeu politique dans la définition des communautés au Liban ». 2008 Postgraduate seminar, Department of anthropology, Sydney (Australie) 18 septembre 2008: “Viewing the funeral of a blessed Shaykh. On analyzing ethnographic data”. 2008 Research seminar, Department of anthropology, Sydney (Australie), 16 octobre 2008: “Drama, plays and violence. Anthropology of political passion in Lebanon”. 2010 Séminaire général du LESC ‘(Maison de l’Archéologie et de l’ethnologie René Ginouvès - Université Paris Ouest Nanterre La Défense) « Essai de prospective. L’environnement institutionnel de l’anthropologie et ses évolutions », 25 mars 2010 : « Présentation du projet d’accueil à Nanterre de la conférence de l’European Association of Social Anthropologists en 2012 » 2011 Séminaire Anthropologie du changement social : observer, décrire, expliquer (LESC – Université Paris Ouest, 8 & 22 février 2011 ;) : « Les ruses du changement social. Lire Le nouvel esprit du capitalisme de Boltanski et Chiapello (Gallimard 1999) à partir d'une ethnographie libanaise. » 2011 Séminaire du CREA, « Frontières » coordonné par Lucien Scubla, 16 mars 2011, « Le Liban, un État frontière ? ». 2012 Séminaire EHESS « Dynamiques de patrimonialisation des sites et des rituels religieux au Moyen-Orient » dirigé par Sossie Andézian, le 6 avril 2012 : « Logiques de patrimonialisation dans les communautés druzes (Liban, Israël) ». [91] 2012 Séminaire de Licence Animé par Albert Piette, Université Paris-Ouest Nanterre la Défense, 2 mai 2012 : « Retours sur un parcours ethnographique au Proche-Orient. Proposition pour une anthropologie existentiale ». 2013 Séminaire du IIAC, Incertitude, dirigé par Alfredo Pena-Vega, EHESS, 20 février 2013 : « Au-delà de l’inquiétude : vers une société de la peur ? ». 2013 Séminaire Master Ethnologie animé par Emmanuel de Vienne, UPOND, 3 avril 2013 : « Anthropologie de la lose : un programme de recherche sur les temporalités désynchronisées ». 2013 Séminaire d’archéologie funéraire, dirigé par Frédérique Valentin, MAE 8 avril 2013 : « Variété des pratiques et monuments funéraires au Proche-Orient. Exemples druzes et chiites (Israël, Liban). 2013 Conférence à l’AEEAN, UPO 13 mai 2013 : « L’impossible enquête chez un ancien milicien libanais » 2013 Séminaire « Existence et expérience », dirigé par Albert Piette, Isabelle Rivoal et Anne de Sales, MAE, 5 novembre 2013 : « « En quoi consisterait une anthropologie existentiale ? » (avec A. Piette) 2013 Séminaire de Master 2 dirigé par Émilie Guitard, UPO 7 novembre 2013 : « Du nationalisme palestinien à la question minoritaire au Proche-Orient: manières d'interroger la conflictualité ». 2013 Séminaire de Master 2 dirigé par Albert Piette, UPO 5 décembre 2013 : « La notion d’existence dans les débats anthropologiques récents ». 2014 Séminaire « Existence et expérience », dirigé par Albert Piette, Isabelle Rivoal et Anne de Sales, MAE, 3 mars 2014 : « L’existence comme horizon sans fin : réflexions sur la narration ethnographique ». 2014 « Les Druzes entre Liban, Syrie et Israël. Une communauté hétérodoxe sous tension », Conférence grand public pour l’association d’Ethno-linguistique, Conservatoire des arts, Montigny le Bretonneux, 25 septembre. 2015 Séminaire de Master 2 dirigé par Albert Piette, UPO 26 mars 2015 : « Un projet d’étude des singularités ». 2015 « Les Jeunes dans le monde arabe. Avenir, religion, révolte. Comment l’anthropologie peut-elle aider à comprendre ? », Conférence grand public pour l’association d’Ethno-linguistique, Conservatoire des arts, Montigny le Bretonneux, 3 avril. [92] Valorisation et interventions grand public 2012 Intervention dans une classe de CM2 (École Pasteur A – Clichy la Garenne) : « Présenter l’ethnologie aux enfants » (une journée) 2013 Intervention dans une classe de CM2 (École Pasteur A – Clichy la Garenne) : « Apprendre à observer des clichés ethnographiques » (une journée) 2014 L’ethnologie : culture et sociétés », Portes ouvertes à la MAE. Journées nationales du patrimoine, septembre. 2014 « Les Druzes entre Liban, Syrie et Israël. Une communauté hétérodoxe sous tension », Conférence grand public pour l’association d’Ethno-linguistique, Conservatoire des arts, Montigny le Bretonneux, 25 septembre. 2015 « Les Jeunes dans le monde arabe. Avenir, religion, révolte. Comment l’anthropologie peut-elle aider à comprendre ? », Conférence grand public pour l’association d’Ethno-linguistique, Conservatoire des arts, Montigny le Bretonneux, 3 avril. [93] Publications [94] Ouvrages et ouvrages dirigés : tables des matières Isabelle Rivoal, Les Maîtres du secret. Ordre mondain et ordre religieux dans la communauté druze en Israël, Paris, Éditions de l’EHESS, 2000, 432 p. ISBN : 27132-1338-X Isabelle Rivoal, Sadat al-asrar. Nizâm al-dunyâ wa al-nizâm al-dîniyy lil-tâ’ifa al-durziyya fî Isra’îl, Beyrouth, Dar Alrabbeh, 2016 (atelier osez dire). ISBN 978614-432-507-X [95] Introduction Chap. 1 Naissance d’une communauté religieuse 1. Le système religieux druze 2. D’un mouvement religieux extrémiste à une communauté fermée Chap. 2 Sur les hauteurs du mont Carmel 1. L’histoire d’un village à la périphérie 2. Etre cAsfanî: appartenance à la localité, appartenance à la communauté Chap. 3 Figures de leaders 1. La confrontation électorale de novembre 1993: analyse d’un échec familial 2. Les figures du passé 3. Le zacîm et la mise en œuvre des valeurs de la dunyâ Chap. 4 Transformation sociale et quête de Vérité 1. Conditions et modalités de l’accès à l’initiation religieuse 2. S’éloigner du monde. La transformation sociale du religieux druze 3. La recherche de la connaissance religieuse: entre les Ecritures et le vide Chap. 5 L’organisation religieuse de la communauté druze en Israël 1. Les congrégations religieuses locales 2. Au-delà de la congrégation locale: les tombeaux des saints 3. Une conception culturelle et idéale de l’unité druze Chap. 6 Les religieux aux limites de la communauté 1. L’Autorité spirituelle (al-ri’âsa al-rûhâniyya) 2. La constitution de communautés druzes autonomes 3. La construction d’une identité religieuse communautaire Chap. 7 La vie du shaykh Amîn Tarîf entre dîn et dunyâ 1. Dâr Tarîf: une famille prédestinée à engendrer des walî-s 2. Un parcours à l’envers 3. La guidance du shaykh Amîn à la tête de la communauté druze 4. La mort et l’accession à la sainteté: analyse d’une stratégie politique Chap. 8 Les femmes en pleurs 1. Quand la mort survient 2. La présence du mort 3. Les funérailles: une tension entre l’individu et la communauté Conclusions Index [96] Nadine Picaudou et Isabelle Rivoal (dir.), Retours en Palestine. Trajectoires, rôle et expériences des returnees dans la société palestinienne après Oslo, Paris, IISMM-Karthala, 2006, 289 p. (Collection Terres et gens d’islam). ISBN : 2-84586760-3 Chapitre 1- Introdution Nadine Picaudou Chapitre 2- Revenir dans les Territoires : Returnees, zones de souveraineté et crise de l’État-nation Sari Hanafi Chapitre 3- L’exécutif palestinien de l’autonomie (1994-2004). Les dispositifs juridiques et l’historique des cabinets Jean-François Legrain Chapitre 4- L’exécutif palestinien de l’autonomie (1994-2004). La sociologie des cabinets Jean-François Legrain Chapitre 5- Le pouvoir local, une affaire de familles Aude Signoles Chapitre 6- Des returnees permanents ? Le cas des universitaires palestiniens dans les Territoires Vincent Romani Chapitre 7- Le retour de l’ancêtre et des martyrs Emma Aubin Chapitre 8- Returnees du Golfe et processus de construction nationale en Jordanie (19901994) Françoise de Bel-Air Chapitre 9 - Conclusions Isabelle Rivoal [97] Frédérique Fogel et Isabelle Rivoal (dir.), La Relation ethnographique, terrains et textes. Mélanges offerts à Raymond Jamous, (Ateliers du LESC, n°33, mars 2009) http://ateliers.revues.org/sommaire8162.html Frédérique FOGEL & Isabelle RIVOAL Introduction Anne-Christine TAYLOR Métagermanité et affinité potentielle : la relation de mariage en Inde et en Amazonie Nicolas JOURNET Quand le terrain s’impose, le récit aussi Christine JUNGEN De source sûre. Expérimentations croisées sur l’archive Anna POUJEAU Des monastères aux funérailles. La construction d’une relation ethnographique avec des chrétiennes de Damas (Syrie) Miguel Ángel RODRIGUEZ LIZANA Revenir sur ses pas. Le pèlerinage à Chalma (Mexique) et l’intégration d’un ethnologue « porteur » Charles MALAMOUD Joutes dharmiques. Note sur la volonté de donner, le refus de recevoir et la force contraignante de la vérité Lucien SCUBLA À propos du regard éloigné de l’ethnographe ou les rapports entre la théorie et l’observation Dominique CASAJUS L’ethnologue, l’historien et le deuil de la voix Gérard LENCLUD Mensonge et vérité. À propos d’un article de Raymond Jamous Laurence CAILLET Mes chers collègues, les moines, ou le partage de l’ignorance Anne-Marie PEATRIK Du texte au terrain : temps, durée assignation dans la relation d’enquête [98] Katia BOISSEVAIN Décalages et rôles mal ajustés dans le travail ethnographique Michèle BAUSSANT Entre quête et enquête : la distance dans le terrain ethnographique Baptiste BUOB Filmer, montrer, entendre des savoir-faire. Regards et écoutes croisés dans la médina (Fès) Claire Cécile MITATRE Par-delà l’interdit (haram). Une ethnographie du mariage et de la sexualité chez les Sahraouis du Sud marocain Olivier HERRENSCHMIDT Trop-plein de parents ou aucun parent. L’« intégration » de l’ethnologue au gré des systèmes de parenté de l’Inde du Nord et de l’Inde du Sud Emmanuelle NOVELLO L’amitié dans la relation ethnographique. Traitement de l’individu et rapport à l’autre dans les groupes locaux de Hijra (Delhi, Inde) Michael HOUSEMAN Les épouses de mon père. À propos de la polygamie en pays beti Simonne PAUWELS Un trophée fait fille ou lorsque l’étranger n’existe pas Frédérique FOGEL L’ethnologue et l’assignation, sur le terrain de la parenté Élise PREBIN Trouver la bonne distance : étrangère, marginale, ethnologue et parente en Corée du Sud Antoinette MOLINIE Anthropologue prend garde ! Trois assignations périlleuses sur trois terrains andins Romain SIMENEL Défaire et refaire les origines de l’étranger : quand l’ethnographe est pris pour un banni Isabelle RIVOAL Un huis clos ethnographique ou l’impossible enquête chez un ancien milicien libanais [99] Isabelle Rivoal & Noel Salazar (guest Editors), “Young Scholar ethnographic Forum: practice and Contemporary the value of serendipity”, Social Anthropology / Anthropologie sociale, vol. 21, n°2, Mai 2013. YOUNG SCHOLAR FORUM - Contents • Contemporary ethnographic practice and the value of serendipity, Isabelle Rivoal and Noel Salazar • What can we learn from a “liar” and a “madman”? Serendipity and double commitment during fieldwork, Stefan Le Courant • Serendipity…mon amour? On discomfort as a prerequisite for anthropological knowledge Julie Giacobini • The field as a temporal entity and the challenges of the contemporary Steffen Dalsgaard • Commentary: opportunism, perspective and insight Daniel Miller Frédérique Valentin, Isabelle Rivoal, Corinne Thévenet et Pascal Sellier (éds), La Chaîne opératoire funéraire. Ethnologie et archéologie de la mort, Paris, De Boccard. 2014. ISBN : 978-2-7018-0352-4 [100] Frédéric Hurlet, Isabelle Rivoal et Isabelle Sidéra (dir.), Le Prestige. Autour des formes de la différenciation sociale, Paris, De Boccard (Coll. « Colloque de la MAE », vol. 10). ISBN : 978-2-7018-0360-3. Frédéric Hurlet, Isabelle Rivoal & Isabelle Sidéra Entre affirmation de statut et désir de reconnaissance. Introduction au prestige 1ère PARTIE – SAVOIR-FAIRE DE PRESTIGE ET CONDUITES DE DISTINCTION Jean-Jacques Glassner L’invention de l’écriture en Mésopotamie et le renforcement du prestige des élites Jean-Michel David Formes du prestige oratoire, à Rome, sous la République et le Haut-Empire Jean-François Thomas Le prestige politique à Rome : de l’auctoritas patricienne au prince augustus Magda Helena Dziubinska « Pas tout le monde sait faire une belle fête ». Le prestige incertain du chef kakataibo (Amazonie péruvienne). Alain Duplouy Le prestige des citoyens. Agôn et citoyenneté en Grèce archaïque [101] Christophe Badel La dignitas à Rome : entre prestige et honneur (fin de la république) Francesco Mari Le prestige est-il affaire d’héritage ? Le cas d’Apollodore et de Pasion Emma Gobin La fabrique rituelle du prestige. Le secret initiatique comme opérateur de la différenciation socio-religieuse (Ifa, Cuba) 2e PARTIE – OBJETS ET CONSOMMATIONS DE PRESTIGE Élise Luneau Identifier le prestige : éléments de controverse à propos de quelques objets singuliers de la civilisation de l'Oxus (Asie centrale, âge du bronze) Laetitia Phialon De la tombe au palais : la vaisselle en métal comme forme de prestige dans le monde mycénien Amandine Cristina Le cheval des élites. Le prestige des propriétaires-éleveurs de chevaux dans l’antiquité tardive Christelle Mazé Entre luxe et prestige : les vases en pierre en Égypte ancienne au IIIe millénaire avant notre ère. Construction, transmission et réadaptation des signes de pouvoir dans la société égyptienne. Danièle Dehouve Des fleurs et du tabac. Métaphores et vecteurs du prestige chez les guerriers aztèques Boris Deschanel Prestige et accumulation capitaliste. L’exemple de la bourgeoisie commerciale dauphinoise (1780-1830) 3e PARTIE – AFFICHAGE PUBLIC ET CONTRÔLE DE L’ESPACE POLITIQUE Egon Flaig Prestige et capital symbolique. Réflexions sur les funérailles aristocratiques dans la Rome républicaine Rémi Hadad L'architecture d'un pouvoir sans prestige : Regards croisés à partir du néolithique précéramique A et des pueblos du southwest [102] Raphaël Angevin Trajectoires sociales et valeurs d’affirmation des mobiliers de prestige : L’exemple du viatique funéraire lithique des élites de Nagada (Égypte, IVe millénaire) Bernard Formoso Le prestige des renonçants en Thaïlande Juliane Israel Individual prestige in a democratic society – The case of the metic nikeratos and his tombmonument in ancient Athens Camille Thiel Cuius nomen deus scit : anonymat et prestige dans les inscriptions de l’antiquité tardive Alexandre Niess Prestige personnel et capital social familial au service du contrôle de l’espace politique local (1871-1940) Carine Constans et Isabelle Rivoal Le prestige des revues scientifiques et les logiques de classement [103] Monica Heintz et Isabelle Rivoal (éditeurs invités), ‘Temps biographique et discontinuités politiques’, Ethnologie Française, t. XLIV, 201, 4/3, avril 2014. [104] Michèle Baussant, Irène Dos Santos, Evelyne Ribert et Isabelle Rivoal (dir.), Migrations humaines et mises en récit mémorielles. Approches croisées en anthropologie et en préhistoire, Nanterre, Presses Universitaires de ParisOuest, Éditions de la MAE. 2015 ISBN : 978-2-84016-210-0 Introduction, Michèle Baussant, Irène Dos Santos, Evelyne Ribert et Isabelle Rivoal 1ère partie : Récits institutionnels Chapitre 1: Memory Studies and Migration Studies at the Crossroads: an Anglo-Saxon Perspective, Irial Glynn et J. Olaf Kleist Chapitre 2 : Retracer des migrations préhistoriques : un cas d’étude sur la néolithisation de l’Europe, Catherine Perlès Chapitre 3 : L’Expansion Bantu : Dynamiques des populations et dynamiques environnementales, Augustin F.C. Holl [105] Chapitre 4 : Du pot au mythe : la production d'une « épopée » préhistorique ou « Nos Ancêtres les Lapita... », Rémi Hadad 2ème partie : Entre mémoires vives et mises en récit publiques Chapitre 5 : Interprétations plurielles d’une migration planifiée. Des usages de l’histoire et des légendes en amont du barrage des Trois Gorges (Chine), Katiana Le Mentec Chapitre 6 : Temporalités et appartenances dans les récits de « retours » des anciens réfugiés Laotiens et de leurs descendants, Brett Le Saint Chapitre 7: «We didn’t drop from the sky ». Récits du passé et enjeux du présent pour les organisations portoricaines de New York, Audrey Célestine Chapitre 8 : Entre crise politique et phénomène migratoire à Madagascar, le cas du doany, demeure royale devenue esprit, Élisabeth Rossé Chapitre 9 : Mémoire diasporique, mémoire exilique: réflexions à partir des exemples marocains et polonais, Thomas Lacroix 3ème partie : La migration comme séquence biographique Chapitre 10 : Des plantations ivoiriennes à la rue ouagalaise. Chronique familiale de ces hommes qui partent « se chercher en brousse », Muriel Champy Chapitre 11 : Prendre la route à bord du microbus. Mobilités, ancrages et territorialité chez des Roms roumains entre Arad et Montreuil, Norah Benarrosh-Orsoni Chapitre 12 : Allers-retours. Le genre dans les récits migratoires des Afghans en Iran, Bathaïe Azita Chapitre 13 : Rhythm and blues de sans-papiers parisiens, Frédérique Fogel Chapitre 14 : Un étudiant sahélien en URSS. Temporalités fragmentées et récits d’expérience, Michèle Leclerc-Olive [106] Isabelle Rivoal (dir.), Les ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen. Ethnologie d’une catégorie singulière, Ateliers du LESC, n°42, 2015. Isabelle Rivoal et Anne-Marie Peatrik Les « jeunes » dans le sud de la Méditerranée. Cadres conceptuels pour l’étude de sociétés sous tension Raymond Jamous Être « jeune » dans le Rif oriental Irène Dos Santos Quand les « Diables » deviennent de bien jeunes maires Rite et politique dans le nord-est du Portugal Anna Poujeau Le corps des shabâb. Jeunesse et ritualité dans une communauté chrétienne de Syrie Romain Simenel Les Dépravés de Dieu. Une jeunesse marocaine sous l’influence du cheytan Christine Jungen Devenir un « maître de maison » dans le Sud jordanien [107] Muriel Champy Ni enfants, ni adultes. Une lecture comparative de la « jeunesse » (Burkina Faso) Marko Juntunen Jeunes hommes des classes populaires à Larache. Affirmer sa virilité et se construire un avenir dans une communauté frontalière marocaine Agnès Gharbi Mesmar Mises en scène du pouvoir et enjeux statutaires chez les jeunes Palestiniens réfugiés (Liban) Isabelle Rivoal « Vouloir de la politique ». Exaltation et proximité dans l’engagement partisan des jeunes au Liban Anne-Marie Peatrik Un âge au prisme des stratégies intellectuelles. À propos de trois ouvrages sur la jeunesse dans le monde méditerranéen [108] Ouvrages 2000 Les Maîtres du secret. Ordre mondain et ordre religieux dans la communauté druze israélienne, Paris, Éditions de l’EHESS, 432p. ISBN : 2-7132-1338-X 2016 Sadat al-asrar. Nizâm al-dunyâ wa al-nizâm al-dîniyy lil-tâ’ifa al-durziyya fî Isra’îl, Beyrouth, Dar Alrabbeh, (atelier osez dire). ISBN 978-614-432-507-X Direction d’ouvrages et de numéros de revues 2006 (avec Nadine Picaudou), Retours en Palestine. Trajectoires, rôle et expériences des returnees dans la société palestinienne après Oslo, Paris, IISMM-Karthala, 289 p. Collection Terres et gens d’islam. ISBN : 2-84586-760-3 2009 (avec Frédérique Fogel), La Relation ethnographique, terrains et textes. Mélanges offerts à Raymond Jamous, (Ateliers du LESC, n°33, mars 2009) http://ateliers.revues.org/sommaire8162.html 2013 (avec Noel Salazar), “Young Scholar Forum: Contemporary ethnographic practice and the value of serendipity”, Social Anthropology / Anthropologie sociale, vol. 21, n°2, Mai 2013. http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/1469-8676.12026/abstract 2014 (avec Frédérique Valentin, Corinne Thévenet et Pascal Sellier), La Chaîne opératoire funéraire. Ethnologie et archéologie de la mort, Paris, De Boccard. ISBN : 978-2-70180352-4 2014 (avec Frédéric Hurlet et Isabelle Sidéra), Le Prestige. Autour des formes de la différenciation sociale, Paris, De Boccard (Coll. « Colloque de la MAE », vol. 10). ISBN : 978-2-7018-0360-3. 2014 (avec Monica Heintz), ‘Temps biographique et discontinuités politiques’, Ethnologie Française, t. XLIV, 201, 4/3, avril 2014. 2015 (avec Michèle Baussant, Irène Dos Santos, Evelyne Ribert), Migrations humaines et mises en récit mémorielles. Approches croisées en anthropologie et en préhistoire, Nanterre, Presses Universitaires de Paris-Ouest, Éditions de la MAE. ISBN : 978-2-84016-210-0 2015 Les ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen. Ethnologie d’une catégorie singulière, Ateliers du LESC, n°42. 2016 (avec Monica Heintz), Morale et cognition, Éditions du CNRS (en préparation). [109] 2017 (avec Sophie Houdart, Sylvaine Camelin, Adeline Herrou), Cryptographie(s), Nanterre, Société d’ethnologie française, coll. « Écritures » (en préparation) Articles et chapitres d’ouvrages 2001 « Les Voies religieuses de l’identité communautaire. La minorité druze en Israël », Les Cahiers de l’Orient, n° 61, p. 99-108. ISSN : 0767-6468 2001 « Baaqline, de l’Administration Civile de la Montagne à la renaissance municipale. Réflexion sur le pouvoir local au Liban », dans : Agnès Favier (dir.), Pouvoirs locaux et municipalités au Liban, Les Cahiers du CERMOC, n°24, Beyrouth. p. 319-338 [ISBN : 2-905465-20-4] 2002 « Le poids de l’histoire. Druzes du Liban, Druzes d’Israël face à l’État », Annales HSS, n°1, janvier-février 2002, p. 49-70 2002 « Penser l’identité communautaire et les frontières sociales », dans : Lucette Valensi à l’œuvre. Une histoire anthropologique de l’Islam méditerranéen, Paris, Éditions Bouchène, p. 115-132. 2004 « Secret, dissimulation et organisation sociale. Une comparaison entre la Sierra Leone et le Liban » [Autour d’un livre. Mariane C. Ferme, The Underneath of things. Violence, history and the everyday in Sierra Leone, Berkeley, Los Angeles, 2001], Politique Africaine, n°93, p. 157-160. 2004 « Division, équilibre, médiation. Une lecture de l’opposition factionnelle dans le monde arabe », Ateliers, n° 27 « Logiques de l’extériorité. Textes rassemblés par Danièle Dehouve », 2004, p. 147-185. 2005 « Dire ce qui est derrière » Secret et rapport de pouvoir chez les Mende (Afrique de l’Ouest) d’après une étude récente de Mariane Ferme », [Secret / Public], n°0, 2005, p. 27-31 http://gaelleju.free.fr/secret-public/IMG/pdf/TEXTE_3_Rivoal.pdf 2006 « Conclusions », dans : Nadine Picaudou et Isabelle Rivoal, Retours en Palestine. Trajectoires, rôle et expériences des returnees dans la société palestinienne après Oslo, Paris, IISMM-Karthala, p. 219-229. 2006 « En marge de la Palestine. Comment lire l’historiographie druze ? », dans : Nadine. Picaudou (dir.), Territoires palestiniens de mémoire, Paris, IFPO-Karthala, p. 235-267. 2007 « Una Mística comunitaria. Ascetismo, secreto y transmisión del saber en la religión drusa » dans : Cristina de la Puente & Delfina Serrano (eds.), Activismo político y [110] religioso en el mundo islámico contemporáneo, Madrid, Siglo XXI editores, p. 301-318. [ISBN: 978-84-323-1291-5]. 2008 Notice « Michel Seurat », Dictionnaire des Orientalistes de langue française, sous la direction de François Pouillon, Paris, IISMM-Karthala, p. 891-892. 2009 « Introduction », dans : Frédérique Fogel & Isabelle Rivoal (dir.), La Relation ethnographique, terrains et textes. Mélanges offerts à Raymond Jamous, Ateliers d’Anthropologie. Revue du LESC, n°33, mars 2009). 2009 « Un Huis-clos ethnographique ou l’impossible enquête chez un ancien milicien libanais », dans : Frédérique Fogel & Isabelle Rivoal (dir.), La Relation ethnographique, terrains et textes. Mélanges offerts à Raymond Jamous, Ateliers d’Anthropologie. Revue du LESC, n°33, mars 2009. 2009 « Ascétisme et communauté. L’ermitage d’al-Bayyâda dans l’organisation religieuse druze », dans : Adeline Herrou & Gisèle Krauskopff (dir.), Des Moines et des moniales de par le monde. La vie monastique dans le miroir de la parenté, Paris, Karthala, p. 51-66. 2010 « Minorité religieuse » dans : Régine Azria & Danièle Hervieu-Léger (dir.), Dictionnaire des faits religieux, Paris, PUF- Quadrige, p. 718-725. 2011 « Las Invención de las primarias. Conflictos en tourno a la designación de un candidato en una aldea árabe de Israel », dans : Víctor M. Franco Pellotier, Danièle Dehouve et Aline Hémond (eds.), Formas de voto, prácticas de las asambleas y toma de decisiones. Un acercamiento comparativo, Mexico, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, p. 469-483. [ISBN : 978-607-486-155-6]. 2012 « Intimité, mise en scène et distance dans la relation politique au Liban », dans Franck Mermier & Sabrina Mervin, Leaders et partisans au Liban, Paris-Beyrouth, Karthala-IFPO-IISMM, p. 139-165. [ISBN : 978-2-8111-0595-2] 2012 « Les Fêtes religieuses druzes : cheminement spirituel et solidarité communautaire », dans : T-M Courau et H. de La Hougue (dir), Rites, fêtes et célébrations de l’humanité Paris, Bayard, p. 415-426. [ISBN-13: 978-2227483323] 2013 « Contemporary ethnographic practice and the value of serendipity » dans Isabelle Rivoal & Noel B. Salazar (éds.), ‘Young Scholar’s Forum: Contemporary ethnographic practice and the value of serendipity’, Social Anthropology / Anthropologie Sociale, vol. 21, n°2, Mai 2013, p. 178-195. 2014 « Introduction » (avec Corinne Thévenet, Pascal Sellier et Frédérique Valentin), dans Valentin Frédérique, Rivoal Isabelle, Thévenet Corinne et Sellier Pascal (dir.), La [111] Chaîne opératoire funéraire. Ethnologie et archéologie de la mort, Paris, De Boccard, 2014, p. 7-9. 2014 « Réincarnation, perfection religieuse et tombes des saints : les usages funéraires dans la communauté druze (Proche-Orient) » dans : Valentin Frédérique, Rivoal Isabelle, Thévenet Corinne et Sellier Pascal (dir.), La Chaîne opératoire funéraire. Ethnologie et archéologie de la mort, Paris, De Boccard, p. 42-43. 2014 « Entre affirmation de statut et désir de reconnaissance. Introduction au prestige » (avec Frédéric Hurlet et Isabelle Sidéra), dans : Frédéric Hurlet, Isabelle Rivoal, Isabelle Sidéra (dir.), Le Prestige. Autour des formes de la différenciation sociale, Paris, De Boccard, p. 9-21. 2014 « Le Prestige des revues scientifiques et les logiques de classement » (avec Carine Constant), dans : Frédéric Hurlet, Isabelle Rivoal, Isabelle Sidéra (dir.), Le Prestige. Autour des formes de la différenciation sociale, Paris, De Boccard, p. 283-298. 2014 « Introduction : Ethnographies à contretemps » (avec Monica Heintz), Ethnologie Française, vol. XLIV, n°3, juillet 2014, p. 389-397. 2014 « Écritures suspendues, vies engagées. Traverser la guerre civile libanaise », Ethnologie Française, vol. XLIV, n°3, juillet 2014, p. 503-512. 2014 « Intimate Politics. The art of the political relationship in Lebanon », Anthropology of the Middle East, vol.9, n°1, spring 2014, p.1-17. 2015 « Visionner les funérailles du saint. Réflexion sur la temporalité féminine dans la société libanaise », dans : Philippe Petriat (dir.), Une histoire du Proche-Orient au temps présent : Études en l'honneur de Nadine Picaudou, Paris, Publications de la Sorbonne, p. 125-141. 2015 « ‘Vouloir de la politique’. Exaltation et proximité dans l’engagement partisan des jeunes au Liban » dans : Isabelle Rivoal (dir.), Les ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen. Ethnologie d’une catégorie singulière, Ateliers d’Anthropologie. Revue du LESC, n°42. 2015 « Les Jeunes dans le sud de la Méditerranée : Cadres conceptuels pour l’étude de sociétés sous tension(s) » (avec Anne-Marie Peatrik) dans : Isabelle Rivoal (dir.), Les ‘jeunes’ dans le monde méditerranéen. Ethnologie d’une catégorie singulière, Ateliers d’Anthropologie. Revue du LESC, n°42. 2015 « Logiques mémorielles et temporalités migratoires. Une introduction » (avec Michèle Baussant, Irène Dos Santos, Evelyne Ribert) dans : Michèle Baussant, Irène Dos Santos, Evelyne Ribert, Isabelle Rivoal (dir.), Migrations humaines et mises en récit [112] mémorielle. Approches croisées en anthropologie et en préhistoire, Nanterre, Presses Universitaires de Paris-Ouest / Éditions de la MAE (sous presse), p. 11-33. 2016 « Le ‘quant-à-soi’ comme manière d’être au monde. Taqiyya, politesse et distance druzes » dans : Françoise Saquer (dir.), Groupes ethniques et marginalités au ProcheOrient contemporain, Presses universitaires de Lille. 2016 « The Shadows of the Palace of Beiteddin. The Capital of the Lebanese Emirs at stake between presidential power and regional power », in Sami Hermez & Michelle Obeid (eds), Beyond State Failure: New Anthropological Perspectives on the Everyday State in Lebanon American University of Beirut and the Centre for Lebanese Studies, Oxford University (en préparation). 2017 “Remaining aloof” as a way of living in the world. Taqiyya, Druze courtesy and detachment, Ethnicity (article soumis). Compte-rendus 2001 [Susan SLYOMOVICS, The Object of Memory. Arabs and Jews Narrate the Palestinian Village, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 1998, 294p.] L’Homme, n°158159, 2001, p. 478-479. http://lhomme.revues.org/index6701.html 2003 [David PARKIN & Stephen HEADLEY (ed.), Islamic Prayer Across the Indian Ocean. 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Une ethnographie du sacré chez les Druzes d’Israël, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2011, 363 p. (coll. Les Anthropologiques)], 134 | décembre Revue 2013, mis des en mondes ligne musulmans le 19 et de décembre la Méditerranée, 2013. URL : http://remmm.revues.org/7933 2014 [Véronique CNOCKAERT, Bertrand GERVAIS, Marie SCAPA (éds.), Idiots. Figures et personnages liminaires dans la littérature et les arts, PUN/ Éditions Universitaires de Lorraine, Nancy, 2012, 259 p. (collections « EthnocritiqueS ») / hors-collection « Figura » (Université du Québec)], L’Homme, n°209, janv-mars 2014. [114] 2014 [Cyril ROUSSEL, Les Druzes de Syrie. Territoire et mobilité, Beyrouth, Presses de l’Ifpo (avec le concours du Ministère des Affaires étrangères et du Cnrs et soutien de l’université F. Rabelais de Tours), 2011, 261 p., 50 fig.], Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, [En ligne], Lectures inédites, mis en ligne le 13 juin 2014. URL : http://remmm.revues.org/8601 Publications grand public 2010 « Pourquoi le monachisme ne s’est-il pas développé en islam ? », Religions et histoire, hors-série, mars 2010, p. 10. 2012 « Entretien autour de la Biennale EASA ‘Incertitude et inquiétude’ » (avec Sandrine Clerisse), La Lettre de l’INSHS, n°17, mai 2012, p. 14-16. 2012 « Une société de plus en plus incertaine » (entretien avec Charlène Zeitoun), Le Journal du CNRS, n°267, juillet-août 2012, p. 20-26. 2012 « Résister aux nouvelles peurs » (entretien avec Pascale Schenk), Le Figaro madame, 4 août 2012. Émissions radiophoniques et télévisuelles 2011 Émission Lahaye l’amour et vous animée par Brigitte Lahaye, RMC, 23 août 2011, 14h : « Lahaye World tour au Liban ». http://www.rmc.fr/blogs/brigittelahaie.php?post/2011/08/23/Le-Lahaie-World-Tourau-Liban-avec-Isabelle-Rivoal 2012 Émission Autour de la question animée par Dominique Desaunay, RFI, 4 juillet 2012, 11h : « Comment faire face à l’incertitude ». http://www.rfi.fr/emission/20120704-1comment-faire-face-incertitude 2012 Émissions On verra ça demain animée par Daniel Fiévet, France Inter, 18 juillet 2012, 15h : « Incertitudes et inquiétudes ». http://www.franceinter.fr/emission-on-verraca-demain-incertitudes-et-inquietudes 2012 Émissions Le débat de midi animée par Thomas Chauvineau, France Inter, 13 août 2012, 12h : « Avons-nous besoin d’avoir peur ? ». http://www.franceinter.fr/emission-le-debat-de-midi-avons-nous-besoin-d-avoirpeur [115] 2013 Interview pour l’émission ARTE Personne ne bouge sur « C’était mieux avant - Les losers », diffusion 26 mai 2013. 2014 Émissions Tea Time club animée par Caroline Gillet, France Inter, 8 août 2014, 16h : « Avoir peur / se sentir en sécurité ». http://www.franceinter.fr/reecouter- diffusions/913624 2016 Programme Parlons passion, proposé par la CASDEN, Tip Top production, France 3. Diffusion en mai. Expositions et posters 2012 « La “chaîne opératoire” funéraire : exemples de gestes et de séquences décrits par les ethnologues et reconstruits par les archéologues », exposition poster coordonnée par Frédérique Valentin et Isabelle Rivoal, réalisée par Martine Esline, MAE, Nanterre, mai 2012. 2012 Poster « Réincarnation, perfection religieuse et tombes des saints : les usages funéraires dans la communauté druze (Proche-Orient) », Exposition « La “chaîne opératoire” funéraire : exemples de gestes et de séquences décrits par les ethnologues et reconstruits par les archéologues », exposition poster coordonnée par Frédérique Valentin et Isabelle Rivoal, réalisée par Martine Esline, MAE, Nanterre, mai 2012. [116]