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Idéologies, représentations et différenciations sociolinguistiques : quelques notions en question James Costa* ICAR (UMR 5191, Université de Lyon, CNRS, ENS de Lyon) ** Université Grenoble III, Lidilem Patricia Lambert* Cyril Trimaille** Résumé Cet article s’intéresse à la question des idéologies langagières/linguistiques, aujourd’hui très présente dans des travaux anglophones. Il s’agit plus précisément de tester la dimension heuristique du modèle d’analyse de la construction idéologique de la différence développé par des auteures associées au champ de l’anthropologie linguistique (Gal & Irvine, 1995 ; Irvine & Gal, 2000). Dans ce but, le modèle est ici mis à l’épreuve à partir d’un contexte scolaire français dans lequel la construction de la différence sur des critères linguistiques et langagiers apparaît de manière particulièrement significative. Cette tentative nous conduit à nous interroger sur les articulations possibles entre la notion d’idéologie de la langue/du langage et le concept connexe de représentations sociales, plus répandu dans le domaine sociolinguistique francophone. 0. Introduction L’argumentaire de l’atelier invitait à clarifier conceptuellement la notion d’« idéologies linguistiques » et à examiner les conséquences de ces idéologies « dans les situations sociolinguistiques ordinaires ». C’est ce double objectif, à la fois théorique et empirique, que nous essaierons de viser dans cet article, en nous intéressant aux processus de discrimination et de construction de différences au sein d’espaces socio-scolaires ethnicisés (Franchi, 2002). Rappelons d’emblée la définition désormais classique des idéologies de la langue énoncée par l’anthropologue nord-américain Michael Silverstein : […] les idéologies de la langue [ou du langage], ou idéologies linguistiques / langagières, sont tout ensemble de croyances à propos de la langue et du langage telles que formulées par les utilisateurs comme une rationalisation ou une justification de la manière dont ils perçoivent la structure d’une langue/du langage et son usage (notre traduction) (Silverstein, 1979 : 193) « […] ideologies about language or linguistic ideologies, are any sets of beliefs about language articulated by the users as rationalization or justification of perceived language structure and use ». Les traductions sont le fait des auteurs du présent article. . La traduction de cette définition pose d’emblée une question d’interprétation sur le sens à donner au terme language qui peut référer en anglais à la fois au langage et à une langue en particulier. Pour cette raison, nous proposons de traduire language ideologies par « idéologies de la langue et du langage » (désormais ILL), l’expression englobant les deux termes de l’alternative ; nous reviendrons en conclusion sur cette question. Une des raisons pour lesquelles il semble pertinent de tenter de comprendre comment agissent les ILL dans les processus d’intégration, de discriminations et de clivages, réside dans le fait qu’elles représentent une interface entre le langage, les langues (et leurs conceptions) et la société dans ses multiples dimensions, interpersonnelles, groupales, nationales, etc. : […] les idéologies de la langue/du langage ne concernent pas seulement la langue/le langage. Elles considèrent et mettent en œuvre des liens entre la langue et l’identité, l’esthétique, la moralité et l’épistémologie. A travers de tels liens, elles sous-tendent non seulement les formes et les usages linguistiques mais également la notion même de personne et de groupe social, en même temps que des institutions sociales fondamentales telles que les rituels religieux, la socialisation des enfants, les relations de genre, l’État-nation, l’École, et la Loi (Woolard, 1998 : 3) « […] ideologies of language are not about language alone. Rather, they envision and enact ties of language to identity, to aesthetics, to morality, and to epistemology. Through such linkages, they underpin not only linguistic form and use but also the very notion of the person and the social group, as well as such fundamental social institutions as religious ritual, child socialization, gender relations, the nation-state, schooling, and law ».. Mais si les réalités langagières, objets d’idéologies, constituent fréquemment des supports d’identification groupale, et si le fait, pour des sujets, de partager une ILL joue un rôle dans leur appartenance à un/des groupes, l’existence de groupes humains ne se réalise pleinement que dans leur relation à d’autres entités humaines (Tajfel, 1972). L’identification passe donc aussi par la séparation et la discrimination, par la construction de frontières symboliques. Postulant pour notre part, à la suite du sociologue Ben Halpern (1961 : 36), la fonction fondamentalement « séparatrice » des idéologies, nous avons choisi de retravailler un extrait de discours produit au cours d’une recherche ethnographique dans un lycée professionnel (Lambert, 2005), en interrogeant la place qu’y tiennent les ILL. L’extrait de discours sélectionné, porteur de catégorisations sociolinguistiques, sociales et ethniques, est à notre sens révélateur et peut-être même emblématique de ces processus de discrimination, résultant de l’essentialisation et de la radicalisation de différences entre des locuteurs, des pratiques langagières et des « groupes » supposés homogènes (section 1). Pour tenter d’identifier Comme propose de le faire notamment Wortham (2001). des liens entre des aspects sociolinguistiques de l’insertion/intégration scolaire et des idéologies de la langue et du langage, nous nous appuierons (section 2) sur le modèle développé par S. Gal et J. Irvine (Gal & Irvine, 1995 ; Irvine, 2001 ; Irvine & Gal, 2000). La mise à l’épreuve de ce modèle heuristique nous conduira enfin à nous interroger sur la pertinence de l’« importation » de la notion d’ILL depuis le champ de l’anthropologie linguistique de langue anglaise (dans lequel il s’est développé depuis une trentaine d’années), notion potentiellement concurrente, pour ce qui concerne la sociolinguistique contemporaine de langue française, du concept de représentation sociale (section 3). 1. Différenciations scolaires, socio-ethniques et langagières en discours dans un lycée professionnel Notre démarche de mise à l’épreuve du modèle proposé par Gal et Irvine s’est donc d’abord développée à partir d’un travail ethnographique mené dans une classe de lycée professionnel classé en Zone d’Education Prioritaire (Lambert, 2005). Dans cet établissement, les élèves des classes de seconde secrétariat-comptabilité sont recruté(e)s localement Le recrutement s’opère dans des collèges ZEP-REP de la périphérie de l’agglomération grenobloise. et souvent suite à des orientations par défaut. Ces élèves sont en moyenne plus âgés que dans les filières valorisées, et en très large majorité des jeunes filles issues de milieux populaires et descendantes de migrants de diverses provenances. La classe observée partage l’ensemble de ces caractéristiques. Tout au long de l’année scolaire, cette classe se caractérise en outre par la construction de deux groupes de pairs féminins, entendus comme deux mini-réseaux affinitaires que nous avons appelés le « groupe des 6 » et le « groupe des 13 » sur la base du nombre de leurs membres respectifs. Leurs relations sont tendanciellement conflictuelles, comme elles le sont aussi entre le « groupe des 13 » et des enseignants. Sur le plan langagier, les différenciations entre ces deux réseaux se manifestent dans la manière dont les sujets se représentent les langues, les normes et leur apprentissage, ainsi que dans des styles sociaux communicatifs (Kallmeyer, 2004) qui leur sont respectivement attribués. En effet, parmi les faisceaux de traits présentés tour à tour par les différents sujets comme caractéristiques des comportements, des normes et des attitudes des membres de chacun des groupes, la référence à des « façons de parler » Locution spontanément actualisée dans de nombreux discours d’enquêté(e)s. distinctes leur permet d’associer des ensembles de pratiques langagières et interactionnelles à leur groupe, et au groupe par rapport auquel ils/elles se positionnent. Les membres du groupe des 13 font l’objet de représentations et d’attitudes assez négatives, à la fois de la part d’enseignants et des élèves du groupe des 6, qui décrivent leurs pratiques communicatives de manière stable comme déviantes par rapport à ce qui est attendu et jugé acceptable dans l’espace scolaire. C’est ce qu’Ambre – membre et leader du groupe des 6 – thématise, avec son amie Lilia, dans l’extrait d’entretien suivant. Dans cet échange, l’adolescente précise, à la demande de l’enquêtrice (Enq dans la transcription), ce qu’elle entend par « Françaises », ethnonyme national qu’elle utilise pour désigner son propre groupe – celui des 6. Ce travail d’explicitation va la conduire à énoncer des éléments qui fondent, à ses yeux, l’altérité radicale du groupe des 13. Ambre ben en fait on est blanche de peau / on crie pas quand on parle / on insulte pas les profs on s(e) rebelle pas Lilia et puis on a des bonnes notes / on suit en cours Ambre (…) Compte tenu des objectifs poursuivis dans cet article, l’utilisation d’au moins un extrait de discours situé nous semble incontournable. Soulignons toutefois que, pour des raisons de lisibilité et de respect des contraintes éditoriales, une coupure a été opérée dans la transcription de celui-ci. Nous sommes bien entendu conscients 1) du caractère nécessairement sélectif et simplificateur de ce type d’opération (comme il en va de toute opération de transcription, d’analyse et de mises en textes d’extraits transcrits) ; 2) des effets spécifiques possiblement induits par ce choix du côté de la réception. et puis elles parlent en arabe aussi j(e) trouve / ça part en discussions+ j(e) suis désolée on est en France et nous on comprend pas leur langue / donc si elles ont que(l)que chose à nous dire i(l) vaudrait mieux qu’elles nous l(e) disent en face Enq vous les entendez souvent parler en arabe’ Ambre ben heu moi j’en entends quelques-unes qui s(e) parlent en arabe / quand elles s(e) disent des choses elles se parlent en arabe Enq mais des mots ou ::: des phrases complètes ou des<+ Ambre c’est mélangé / c’est français-arabe / mais on peut pas comprendre Enq suffisamment pour que tu comprennes pas Ambre voilà c’est dosé Enq et dans quel but à votre avis Ambre (de plus en plus tendue) ah mais elles sont chez elles+ / elles parlent arabe chez elles quoi Enq comment ça « elles sont chez elles » Ambre non mais elles ont qu’à parler arabe chez elles / elles ont pas b(e)soin d(e) parler arabe devant nous soi-disant parce que :::+ / c’est qu’elles ont que(l)que chose à cacher si elles veulent pas l(e) dire Enq oui donc c’est vécu comme une exclusion / comme un rejet Ambre (ton d’évidence) ben oui plutôt / voilà / pa(r)ce qu’y a pas d(e) communication ent(r)e les deux groupes Dans le discours d’Ambre, la différenciation entre les deux groupes repose sur la convocation de traits diacritiques de différentes natures : le phénotype (« on est blanche de peau »), l’attitude et les résultats scolaires (« on insulte pas les profs on s(e) rebelle pas »), catégorie qui fait l’objet d’une co-énonciation de la part de Lilia : « on a de bonnes notes/on suit en cours ») ; et des comportements langagiers rattachés à la tonalité des interactions (dysphorique vs. policée : « on insulte pas les profs », « on crie pas quand on parle »), ou à l’utilisation de l’arabe à laquelle Ambre associe de façon assez insistante une fonction cryptique (« elles parlent en arabe aussi j(e) trouve » ; « j’en entends quelques-unes qui s(e) parlent en arabe » ; « c’est qu’elles ont que(l)que chose à cacher si elles veulent pas l(e) dire »). Autant la tonalité interactionnelle que les intentions de cryptage qu’Ambre attribue aux filles du groupe des 13 dans leurs échanges révèlent les frontières et les rapports de force qui caractérisent les relations entre les deux groupes, et qui traversent plus largement des réseaux de lycéens. Alors que le groupe des 6 est également composé de migrantes et descendantes de migrantes d’origines diverses (Lilia qui participe avec Ambre à l’entretien est elle-même descendante de parents migrants – originaires du Maroc et d’Italie), la différence linguistique soulignée dans l’extrait (français vs. arabe), et de manière récurrente dans des discours d’élèves et d’enseignants, indexe des contrastes sociaux ethnicisés. En effet, les rapports d’inclusion/exclusion aux groupes reposent fréquemment sur l’actualisation des catégories ethniques « arabes » et « françaises ». Mais la mention de différences ethniques sert également, et peut-être le plus souvent, à manifester des différences sociales et des postures divergentes vis-à-vis de l’institution et du travail scolaires. Un ensemble de déterminants externes, de logiques affinitaires ou électives et d’assignations identitaires fondent la formation et la cohésion des groupes, ainsi que les relations entre leurs membres. L’analyse croisée des discours et des comportements des sujets montre également que leur insertion dans différents réseaux extra-scolaires, les modes de socialisation qui y prédominent, les lieux de vie ainsi que les attitudes développées à leur égard, et enfin les perspectives développées vis-à-vis du langage et des langues constituent de puissants supports d’identification. 2. Iconisation, gommage et récursivité : mise à l’épreuve d’un modèle heuristique L’extrait de discours d’Ambre met en lumière la diversité des représentations sur lesquelles repose une différenciation idéologiquement construite et reproduite au sein de l’espace scolaire, ainsi que la centralité, dans ce contexte, de l’élément langagier/linguistique. Afin de l’utiliser dans l’analyse de données empiriques, nous avons combiné la notion d’ILL à l’approche et au modèle heuristiques développés par Susan Gal et Judith Irvine dans plusieurs articles depuis 1995 (Gal & Irvine, 1995 ; Irvine, 2001 ; Irvine & Gal, 2000) Pour un exemple d’application en français, voir Gadet (2007).. Ce modèle permet d’appréhender comment : a) au niveau micro-sociolinguistique des pratiques langagières et de leur catégorisation dans les discours, des différences entre des locuteurs et entre des groupes sont perçues, identifiées, construites ou « inventées » (ou au contraire ignorées) ; b) ces différences, plus ou moins fondées empiriquement, se voient investies localement de significations sociales et / ou ethniques, et deviennent déterminantes dans les assignations/endossements de rôles, de positionnements et d’identités ; c) ces significations locales s’inscrivent dans un réseau de significations plus globales. Il s’agit en définitive d’une approche visant à rendre compte du rôle des idéologies, et des processus sémiotiques qui les constituent, dans la différenciation (linguistique / sociale / identitaire…) et donc dans les processus d’intégration / discrimination – en précisant qu’on entend ici par « discrimination » la création, la maximisation ou l’essentialisation de différences potentiellement contextuelles. Pour Gal et Irvine, les idéologies langagières différenciatrices « opèrent par 3 processus sémiotiques, fondamentaux pour la création de frontières sociales et linguistiques » (1995) : l’iconisation, le gommage et la récursivité. L’iconisation réfère au fait que « les différences linguistiques fonctionnent comme des représentations iconiques de contrastes sociaux qu’elles indexent – comme si, d’une certaine manière, un trait linguistique décrivait ou exhibait l’essence d’un groupe social » (Irvine, 2001: 33). Le gommage est un deuxième processus par lequel l’idéologie, en simplifiant le champ sociolinguistique, rend des personnes (et certaines de leurs caractéristiques), des activités ou des phénomènes sociolinguistiques invisibles. Les faits qui ne rentrent pas dans le schème idéologique sont ignorés ou écartés (ibid.). La récursivité fractale implique quant à elle la projection d’une opposition saillante à un certain niveau de la relation, sur un autre niveau et contribue ainsi à renforcer les oppositions (Gadet, 2007 : 207). Par exemple, des oppositions intragroupes peuvent être projetées vers des relations intergroupes, ou vice-versa (Irvine, 2001: 33). L’extrait que nous avons présenté plus haut nous semble prototypique d’un discours iconisant : les différences physiques, linguistiques et comportementales y fonctionnent comme des emblèmes hétéro-attribués de contrastes sociaux qui sont utilisées, de façon argumentative, comme des « révélateurs » de l’essence d’un groupe social. Ce processus d’iconisation est donc une naturalisation ou une essentialisation d’un lien entre des pratiques langagières et sociales (telles qu’elles sont perçues ou représentées) et des positionnements qui sont plus ou moins fantasmés et réifiés en « identités ». Car en effet, contrairement à ce qu’Ambre suggère avec insistance dans son discours, ces deux groupes ne clivent pas exactement des origines socio-ethniques différentes et homogènes, et chacun d’eux se compose de descendantes de migrants d’origines diverses. Si la proportion des descendantes de migrants maghrébins est objectivement plus importante dans le groupe des 13 que dans celui des 6, il n’y a pas d’un côté des Françaises dites « de souche » et de l’autre uniquement des jeunes filles issues de l’immigration maghrébine : les deux groupes sont de ce point de vue beaucoup plus hétérogènes qu’il n’y parait, ce qui n’empêche pas les discours à tendance ethnicisante. Les élèves entre elles s’attribuent en effet réciproquement ces identités socio-ethniques, les intériorisent à divers degrés, et les endossent de manière variable selon les situations. De ce point de vue, le « durcissement » identitaire auquel conduit le discours discriminant d’Ambre correspond assez bien à ce que la psychologie sociale considère comme une « erreur fondamentale d’attribution » (Ross, 1977), par laquelle un sujet privilégie des causes dispositionnelles / internes par rapport à des causes situationnelles / externes pour expliquer le comportement d’autrui (ou, dans l’expérience princeps de Ross, la différence de performance). La forte focalisation sur la langue arabe, observable dans cet extrait comme dans bien d’autres discours, notamment en milieu scolaire, est en partie liée à la réalité objective d’une forte proportion, dans le lycée, d’adolescents au contact avec cette langue dans leur vie quotidienne. Mais elle tend à masquer certains pans de la réalité sociolinguistique tant objective que telle qu’elle est vécue par bon nombre d’élèves plurilingues, qu’ils soient arabophones ou non. Ce masquage correspond tout à fait à la définition du gommage de Gal et Irvine, qui participe ici à la maximisation des différences et à l’essentialisation d’une catégorie d’élèves. Ce deuxième processus du modèle, le gommage, est le corollaire de l’iconisation qu’il tend à renforcer, puisqu’en masquant des traits qui ne correspondent pas à l’association stéréotypique, il contribue à rendre le lien sémiotique (iconique) plus saillant encore. Dans ce contexte scolaire, l’action conjuguée de ces deux processus aboutit, comme on l’a vu, à une différenciation ou altération (fait de rendre « autre ») radicale qui se cristallise le plus souvent dans une catégorisation en « nous » et « elles ». Cette opposition se décline aussi, dans les discours des unes et des autres, sous des couples de désignations tels que « sages » /« sauvages », « sérieuses »/ « perturbatrices », « Françaises » / « Arabes ». Le recours, fréquent, à ce réseau d’oppositions significatives à l’échelle de cette classe nous semble relever du troisième processus du modèle de Gal et Irvine, à savoir la récursivité fractale (qui consiste, rappelons-le, à projeter une opposition saillante et significative à un niveau de relation sur un autre niveau). On peut en effet considérer ces catégorisations dichotomiques comme des actualisations micro-sociales d’idéologies qui génèrent des oppositions, qui structurent et clivent des groupes humains à d’autres échelles et à d’autres époques, notamment sur la base de critères linguistiques, nationaux, socio-économiques, etc. On pense, en particulier, aux oppositions du type « intellos » vs « racailles » à l’école, « bourgeois » vs « classes populaires », et, de façon beaucoup plus large « Français » vs « étranger » ou « civilisé » vs. « sauvage », etc. Les ILL ne seraient-elles pas alors des ensembles cohérents et articulés de connaissances, s’élaborant dans et sous-tendant les discours qui prennent le langage ou les langues comme objet, même lorsque ces objets linguistiques/langagiers ne sont que des points de focalisation cognitive et discursive pour désigner (et prendre position sur) des questions plus vastes, comme la place de tel ou tel groupe dans une société par exemple ? 3. Idéologies de la langue et du langage et représentations sociales Si l’on considère la sociolinguistique contemporaine à l’échelle de son inscription internationale, force est de constater que le concept d’idéologie langagière / linguistique tient une place non négligeable dans l’appareil théorique de la discipline (voir, pour ne citer que quelques exemples, Heller, 2002 ; Jaffe, 1999, ainsi que le thème de l’atelier qui a donné lieu à la publication de ce volume). L’analyse présentée ci-dessus s’appuie ainsi sur la notion d’idéologies de la langue et du langage (ILL) en tentant de l’opérationnaliser. Or, dans le même temps, cette analyse entre en forte résonance avec des travaux sociolinguistiques francophones faisant usage de la notion de représentations sociales (désormais RS). Depuis au moins une vingtaine d’années, des études sociolinguistiques francophones appréhendent en effet les discours qui thématisent les langues ou les pratiques langagières en produisant de la catégorisation/discrimination sociale grâce au concept de représentations sociales Concept forgé en psychologie sociale (Jodelet, 1989 ; Moscovici, 1961), défini par Jodelet comme « une forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » (1989 : 36). et à ses déclinaisons (socio)linguistiques (cf. Boyer & Peytard, 1990 ; Billiez, 1997 ; Matthey & Moore, 1997 ; Py, 2004). Si l’on accorde quelque crédit aux nombreux appels de ces linguistes francophones pour la prise en compte des représentations (sociales, épilinguistiques) dans l’étude des faits linguistiques et langagiers (par exemple Billiez, 2004 ; Boyer, 1990 ; Calvet, 1999 ; Py, 2004), il nous semble impossible de faire l’économie d’une réflexion sur l’articulation entre ILL et RS des langues et des pratiques langagières. En quoi les catégories conceptuelles de RS et d’ILL, que l’on convoque pour décrire, analyser et interpréter des discours à teneur épilinguistique et à portée différenciatrice/discriminatrice, sont-elles différentes ? Et dans quelle mesure sont-elles compatibles ? Ces relations sont, à notre connaissance, peu thématisées en sociolinguistique. On en trouve une articulation dans deux articles de Boyer (1990, 2004), pour qui, dans le cas de l’idéologie diglossique, la relation entre idéologie et représentations est d’engendrement-reproduction : On considère donc qu´une idéologie diglossique repose sur la production de deux représentations des langues en présence : une représentation de la langue dominante (A) et une représentation de la langue dominée (B), parfaitement antagonistes. La fonction de l'idéologie diglossique est d´orienter cet antagonisme au profit de la langue A, car l'issue doit être une substitution en sa faveur, de sorte que la violence de cette logique de substitution est sinon totalement occultée du moins atténuée afin d´être acceptable (Boyer, 2004) Cf. Boyer (2004, 2011, à paraitre).. Si les relations entre ILL et RS d’objets langagiers La notion d’ILL étant surtout mobilisée dans les travaux sociolinguistiques anglophones, il est logique que ses relations avec le concept de RS soient peu développées, dans la mesure où ces travaux utilisent systématiquement la notion d’attitude (elle aussi empruntée à la psychologie sociale) mais jamais, à notre connaissance, celle de RS. ont assez peu été interrogées, il n’en va pas de même pour les liens entre la notion plus générale d’idéologie et celle de RS. En effet, la psychologie sociale, où le concept de RS a été élaboré, s’est intéressée à l’articulation entre ce concept et la notion d’idéologies (voir en particulier Aebischer, Deconchy, Lipiansky, 1991 ; Rouquette, 1996). Pour Lipiansky (1991 : 58) RS et idéologies « réfèrent à des phénomènes proches », elles « constituent des formes discursives structurées ayant par là même une fonction cognitive structurante dans la construction et la reproduction de la réalité sociale » (1991 : 60). De plus, RS et idéologies assument des fonctions « cognitive (de construction de la réalité sociale), axiologique (d’orientation dans cette réalité à partir des valeurs qu’elles impliquent) et conative (d’influence qu’elles exercent sur les conduites) » (Lipiansky, 1991 : 58). Mais au-delà de ces formes et fonctions communes, les deux types de cognitions sont de portées différentes : les RS sont une « forme définie de cognition, tendant à constituer un objet précis ainsi que les mécanismes qui président à sa genèse et à sa structuration » (ibid.). L’idéologie, quant à elle, serait un « système de représentations » […] « [l]a notion de système implique l’idée d’un lien structurel entre représentations mises en relation dans l’idéologie, d’une tendance à la clôture, à l’unité et à la cohérence interne » (Lipiansky 1991 : 56).. Toujours selon Lipiansky (1991 : 60), « les idéologies instituent des liens et des rapports logiques entre un ensemble épars de représentations sociales » et participent ainsi à organiser et structurer le champ social. Au plan cognitif, si RS et idéologies ont une « fonction d’organisation et de maîtrise de l’environnement en tant qu’univers de connaissance », les idéologies ont, en plus des RS, une « visée tendanciellement globalisante, fondée sur la croyance et combine[nt] étroitement informations et valeurs » (Lipiansky, 1991 : 60). Au niveau social, l’idéologie « cherche à faire reconnaître l’ordre social qu’elle conforte, comme légitime et ‘naturel’ et par là même elle favorise la méconnaissance de son caractère ‘intéressé’ et arbitraire » (p. 61) Lipiansky a recours à la terminologie d’Althusser pour distinguer RS et idéologie sur deux points : d’une part la fonction pratico-sociale de l’idéologie l’emporte sur sa fonction théorique ; d’autre part son usage psycho-social « peut s’éclairer par deux fonctions étroitement liées : une fonction de reconnaissance ayant comme envers une fonction de méconnaissance ».. Elle tend « à instaurer une identité […] et une intégration groupale ». Il nous semble enfin particulièrement pertinent de noter, dans une perspective de compréhension des articulations des comportements et discours individuels avec les cognitions sociales, que l’idéologie joue un rôle d’interface entre identité sociale (fondée sur de la discrimination intergroupe et des biais pro-endogroupes) et identité personnelle. En effet, elle offre aux pulsions des objets d’investissement socialement légitimés (Dieu, la Nation, le Parti, l’Ennemi, le Progrès…) ; ces objets sont d’autant plus fortement investis qu’ils sont des substituts symboliques des objets originaires de désir et de haine (comme la notion de ‘mère-patrie’ le suggère par exemple) et qu’ils sont collectivement partagés et approuvés (Lipiansky, 1991 : 62). A ce rôle de « socialisation des pulsions », qui permet aux objets idéologiquement investis d’échapper à la répression des pulsions, s’ajoute une fonction de « renfort de l’identité », « […] en assignant au sujet une place, en offrant des images et des modèles d’identification […] en favorisant l’étayage de l’identité personnelle sur l’identité sociale » et, enfin, en fonctionnant comme mécanismes de défense (ibid.). Autant de caractéristiques qui, bien qu’elles ne s’y limitent nullement, trouvent un écho avec les questions langagières et sociales qui nous préoccupent. Ainsi, dans le court extrait de discours d’Ambre présenté plus haut, certains énoncés pourraient être réduits à des propositions du type : « les X sont différentes de nous, les Françaises, car elles sont x [elles ne sont pas blanches de peau], x’ [elles sont en échec scolaire] x’’ [elles parlent arabe, fort, et insultent les profs] et x’’’ [elles s’approprient notre espace] », propositions que l’on peut considérer comme une actualisation d’éléments constitutifs de représentations sociales partagées non seulement au sein du groupe des 6, mais aussi par un certain nombres de membres de la communauté scolaire, et, plus largement, dans des discours autorisés relayés par les médias. Toutes ces représentations socialement élaborées et partagées qui concernent des aspects physiques, psychologiques (tendance à l’agressivité et à la dissimulation), comportementaux (indiscipline et usages langagiers emblématiques de l’altérité) nous semblent pouvoir être articulées, au niveau de la France, dans un ensemble idéologique national-républicain-jacobin dont les tenants contemporains ont fait de la lutte contre le « communautarisme musulman » leur cheval de bataille le plus récent Bataille dont le niveau le plus global serait la guerre déclarée à « l’axe du mal », par « l’axe du bien » - cf. Appadurai (2006). et dont les dérives s’apparentent à ce que S. Bouamama et P. Tévanian (2008) nomment le « racisme postcolonial » Cf. sur le site Les mots sont importants http://lmsi.net/Un-racisme-post-colonial (consulté le 20/10/10). « […] on peut difficilement nier que dans la société française contemporaine continuent de circuler - et d’agir - de manière massive des représentations du « Noir », de « l’immigré », du « musulman », du « beur » ou de la « beurette » survalorisant une différence « culturelle » (« ils » sont différents de « nous ») en même temps que sont niées les autres différences, notamment de classe ou de « personnalité » (« ils » sont tous les mêmes, et « nous » partageons tous une même « identité nationale ») ».. Force est en outre de constater que la dimension langagière et linguistique de cette idéologie peut éventuellement fournir un habillage politiquement correct et socialement recevable au discours de l’invasion et de la dépossession territoriale, et de l’inversion de la domination symbolique (cf. l’énoncé d’Ambre, « elles sont chez elles » qu’il est difficile de ne pas entendre dialogiquement comme « on n’est plus chez nous »). La mise en relation des notions d’idéologie et de RS nous semble fournir une grille d’interprétation théorique des processus (sociaux, sémiotiques et donc sociolinguistiques) qui relient des phénomènes locaux, et potentiellement très micro, à d’autres éléments qui opèrent à un niveau plus macro, dépassant à l’évidence les seules questions linguistiques/langagières. Tout en étant conscients des limites de cet essai d’intégration de plusieurs concepts qui se développent indépendamment les uns des autres, en même temps qu’ils se recouvrent partiellement, il nous parait justifié de conserver la distinction entre idéologie et RS pour rendre compte de différents niveaux d’organisation en discours et en interaction. 4. Conclusion Dans le cas du contexte scolaire que nous avons choisi comme terrain de mise à l’épreuve, l’assemblage conceptuel exploré (iconisation / gommage / récursivité fractale et ILL) constitue un mode de mise en relation de productions langagières / discursives locales avec des processus globaux de reproduction du système de valeurs dominant au sein de l’institution scolaire française Qui continue de favoriser la conception d’un public idéal homogène et monolingue, ou en voie manifeste d’assimilation linguistique et culturelle. Ainsi, plusieurs membres du groupe des 6 ayant intériorisé ce fonctionnement dominant dévoilent rarement en classe les pratiques plurilingues souvent effectives dans la sphère de leurs échanges familiaux.. La notion d’ILL, telle que définie et opérationnalisée par Gal et Irvine, nous semble ainsi indéniablement heuristique, et notamment, comme nous avons tenté de le montrer, de nature à nous aider à mieux articuler perspectives macro et micro dans nos interprétations des processus de différenciations sociolinguistiques et dans leur mise en texte. Au niveau de la pratique de la recherche, on peut affirmer que s’il existe différentes définitions et donc diverses manières de concevoir les ILL et d’utiliser ce concept, un consensus existe sur le fait que celles-ci représentent une interface – discursive et praxique – entre le langage, les langues (et leurs conceptions) et la société dans ses multiples dimensions, interpersonnelles, groupales, institutionnelles. On peut esquisser deux types de conclusions théoriques à partir de notre propos : la première sur l’utilisation même du terme d’idéologie pour se référer aux questions de langue / langage, et la seconde concernant l’articulation entre ILL et RS. En premier lieu, il nous semblerait important, en français tout au moins, de distinguer entre idéologies linguistiques et idéologies langagières. Dans la première catégorie seraient classées les langues et toute variété linguistique dans l’articulation des discours et des pratiques (la thématisation de l’« arabe » dans le cas d’Ambre) ; la seconde catégorie regrouperait les discours et les pratiques plus spécifiquement liés aux pratiques langagières, communicatives et interactionnelles, ainsi qu’à l’évaluation et la sélection de traits langagiers particuliers (comme le fait d’utiliser telle ou telle variante ou de « parler fort »). Ces deux catégories renvoient plus généralement à des idéologies englobantes permettant la formation de groupes particuliers et la construction de distinctions entre groupes. En second lieu, la réflexion ici amorcée sur l’utilisation conjointe des notions d’ILL et de RS nous invite à réaffirmer le potentiel interprétatif des méthodologies de terrain qui combinent différents niveaux de recueil, de production et d’analyse d’observables (interactions, discours locaux/supra-locaux, documents de diverse nature, recherches inter-sites, analyses multi-niveaux etc.) Cf. la discussion dans Woolard et Schieffelin (1994 : 57-58) : où se situent, et donc où trouver et étudier, les idéologies ? Dans les discours épilinguistiques / métalinguistiques ou dans les pratiques langagières ; explicites (discursives) ou implicites (« comportementales, pré-réflexives ou structurelles, c’est-à-dire non pas dans la conscience mais dans les relations vécues ») ?. Si le débat reste très largement ouvert, il nous semble, à ce stade de notre réflexion, que le recours à la notion d’ILL n’implique pas l’abandon du concept de RS. Le défi demeure néanmoins d’appréhender la complexité des rapports entre pratiques, représentations sociales et idéologies en articulant ces formes de cognition en tant que principes à la base de (et orientant des) phénomènes de catégorisations et des actions. Dans ce sens, bien que nous n’ayons pu l’aborder dans cet article, la question des rapports entre ILL, RS et attitudes Notion que l’on définira ici comme orientation générale et évaluative, positive ou négative, par rapport à un objet de représentation sociale. apparait incontournable. Pour peu qu’un travail interdisciplinaire soit impulsé, cette ambition intégrative Qui n’est pas sans rappeler la proposition faite par Lesley Milroy (2004 : 161-162) d’inclure, dans la sociolinguistique variationniste, les liens entre attitudes, idéologies et pratiques langagières. pourrait d’ailleurs ne pas se limiter au champ disciplinaire de la sociolinguistique. En effet, d’autres disciplines des sciences humaines et sociales approchant le sociolinguistique et des problématiques liées aux processus d’inclusion/inclusion auraient sans doute des contributions décisives à apporter à ce projet. Références citées Aebischer, V., Deconchy, J.-P., Lipiansky, E.-M., Delval, C. (éds.), 1991, Idéologies et représentations sociales, Cousset Delval. Appadurai, A., 2006, Fear of Small Numbers: An Essay on the Geography of Anger, Durham and London, Duke University Press. Billiez, J., 2004, « Et il fallut apprendre aà eÏtudier les repreÏsentations », in L. Gajo, M. Matthey, D. Moore & C. 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