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DOI : 10.3917/med.184.0045 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services1 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD2 Nous analysons le lien entre exportations de services et immigration. Notre échantillon observe la migration de 191 pays vers 20 membres de l’OCDE en 2000, 2005 et 2010. Nous montrons qu’une part plus élevée de migrants dans une population accroît les exportations de services. Cet effet ressort particulièrement lorsque les immigrés proviennent de pays avec une faible qualité de régulation et de règles de droit. Leur connaissance profonde des usages locaux de leurs pays d’origine leur donne des compétences complémentaires à celles des natifs. On peut dire que le canal du coût à l’échange est pertinent. Mots-clés : lien commerce-migration, commerce de services, équations de gravité, migrations OCDE Classification JEL : F14, F22, F63, J61, L80 Migration and OECD service exports: An institutional perspective We analyze the links between the exporting of services and immigration. Our sample concerns immigration from 191 countries towards 20 OECD countries in 2000, 2005, and 2010. We show that a higher share of immigrants in the population increases the exporting of services. This complement effect shows up in particular for immigrants originating from countries with a low quality of regulations and respect for the rule of law. Thanks to their deep knowledge of the local habits of their countries of origin, immigrants’ skills are complementary to those of natives. A trade cost channel seems to be at stake. Keywords: Trade migration nexus, trade in services, gravity equations, OECD immigrations 1 2 Nous remercions pour leurs commentaires les participants à la 19e Conférence INFER à Bordeaux, en juin 2017, et à une présentation à un séminaire de DIAL à Paris, en novembre 2017. Nous assumons la pleine responsabilité des erreurs pouvant subsister dans ce travail. Université d’Orléans, Laboratoire d’économie d’Orléans (LEO-CNRS). thierry.baudasse@univ-orleans.fr, thierry.montalieu@univ-orleans.fr, isabelle. rabaud@ univ-orleans.fr Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 45 46 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD L es controverses concernant l’impact de l’immigration sur les économies développées sont aujourd’hui d’une grande acuité. L’arrivée des immigrés est accusée d’accroître le chômage des non-qualifiés nationaux et d’abaisser leurs salaires. Ces craintes ont suscité une montée du populisme et des mouvements altermondialistes. Comme Rodrik (2018, 12) le souligne : « A number of empirical papers have linked the rise of populist movements to forces associated with globalization, such as the China trade shock, rising import penetration levels, de-industrialization, and immigration. » Cependant, l’automatisation et les nouvelles technologies digitales jouent un rôle quantitativement plus important dans la désindustrialisation et les inégalités de revenus que la mondialisation. Mais la mondialisation a revêtu le stigmate de l’injustice auquel la technologie a échappé. Alors que de nombreux articles analysent l’impact de l’immigration sur les marchés du travail, ses effets sur le commerce sont moins traités. Sur un plan théorique, la migration peut affecter le commerce par trois canaux. - L’immigration permet des réallocations de tâches vers la production domestique de biens au préalable importés ; il s’agit du canal de la « substitution à l’importation » de Mundell (1957) ou de changement de spécialisation induit par l’accroissement de l’offre du facteur rare, mis en lumière par Rybczynski dans le cadre de la théorie Heckscher-Ohlin. - Dans le contexte de la nouvelle nouvelle théorie du commerce international, relâchant l’hypothèse d’homogénéité du travail, le niveau plus élevé d’éducation et de qualification des immigrés vivant dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) permet une réduction des coûts de production ; on parle alors d’ « effet de productivité ». - À travers leur connaissance des institutions et des usages de leur pays d’origine, les immigrés vont favoriser les exportations (du pays d’accueil) en réduisant les coûts d’information et de commerce bilatéraux, ce qui peut être qualifié d’« effet spécifique de promotion des exportations » (effet de complémentarité)3. Dans la mesure où nous nous intéressons uniquement aux exportations, notre analyse restera centrée sur les deux derniers canaux : l’effet de productivité et l’effet de réduction des coûts à l’échange. À notre connaissance, la majeure partie de la littérature s’est focalisée sur la relation entre immigration et commerce de biens, omettant le commerce des services. Ottaviano et al. (2018), ainsi que Dastidar et Balasubramanyam (2015) sont les seules exceptions notables. Pourtant, exporter des services peut s’avérer tout aussi complexe que d’exporter des biens. Une bonne information sur la culture des affaires et les traditions du pays de destination est un prérequis à l’exploitation de tout service aux entreprises sur un marché étranger. Les comptables doivent connaître les règles et les procédures du pays-cible pour offrir de manière pertinente leurs services. Vendre des services juridiques à l’extérieur réclame une solide connaissance des subtilités du système juridique d’un pays. Les divergences entre un système de « common law » ou de « civil law » 3 En reprenant les termes et la classification de Ottaviano et al., 2018. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 47 peuvent donc introduire une différence significative dans la capacité d’un avocat ou d’un notaire à accomplir de manière appropriée une prestation de services. La qualité et la similarité des institutions comptent pour permettre à des fournisseurs de services de vendre à l’étranger. Des régulations transparentes et de bonnes institutions sont alors plus faciles à comprendre et à gérer pour des fournisseurs étrangers, surtout quand elles correspondent à des normes reconnues au niveau international. Les différences d’usage sont aussi à l’origine de freins au commerce. Par exemple, la perception différente de la façon de se conformer à la loi dans les pays d’Europe du Nord et du Sud peut conduire à des malentendus sur les conditions dans lesquelles des services juridiques ou aux entreprises sont délivrés. De plus, ces divergences coutumières et institutionnelles sont fréquemment perçues comme des obstacles au commerce de services, alors même qu’il n’y a pas de droit de douane. Par exemple, dans les professions réglementées (médecine, droit ou expertise comptable, un test d’aptitude est parfois requis pour s’installer. Les services sont des « biens d’expérience », leur qualité ne peut être évaluée qu’après leur utilisation par le client. Dans ces conditions, la réputation et la connaissance sont des préalables à toute exportation. Par conséquent, l’échange international est souvent accompagné d’une présence commerciale et d’un mouvement de personnes physiques. Les voyages d’affaires ou l’installation temporaire à l’étranger peuvent être considérés comme une migration. Ici, nous nous concentrerons sur le commerce transfrontière à partir des données de balance des paiements4. Dans le dernier quart de siècle, nous observons à la fois une hausse de la migration vers les pays de l’OCDE et une augmentation du commerce de services. Dans le même temps, ces deux phénomènes ont soulevé d’importantes préoccupations sur la dégradation du bien-être et des revenus des résidents des pays d’accueil. Les graphiques 1a à 1d illustrent, pour chaque pays de l’OCDE, la relation entre commerce de biens et de services et la part des immigrés établis dans chacun des pays. La relation est croissante entre cette part (mesurée comme le ratio des immigrés installés dans le pays et la population de ce pays d’accueil) et les exportations de services des pays de l’OCDE. Cette corrélation persiste malgré le ralentissement du commerce mondial après la crise financière et celle de l’Euro (voir les graphiques 1b pour 2015 et 1d pour 1995). À l’opposé, nous remarquons une plus faible relation croissante entre commerce de biens et immigration en 1995 et une corrélation devenant négative en 2015 (voir les graphiques 1a pour 2015 et 1c pour 1995). 4 Les négociations à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont défini quatre modes de commerce de services : (1) le commerce transfrontière (Mode 1), lorsque l’offreur et l’usager demeurent dans leur pays respectif ; (2) la consommation à l’étranger (Mode 2), quand le consommateur acquiert le service en dehors de son pays d’origine ; (3) la présence commerciale (Mode 3), lorsque l’offreur établit une filiale ou une branche dans un autre pays pour fournir le service ; (4) la présence de personnes physiques (Mode 4), lorsqu’un individu est présent à l’étranger pour offrir le service (Commission européenne et al., 2015). Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 48 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD Graphique 1a : Part de l’immigration et exportations de biens en 2015 Part des immigrants 50 40 30 20 y = -1,162x + 46,24 R² = 0,021 10 0 22 23 24 25 26 27 28 29 Log des exportations de biens Graphique 1b : Part de l’immigration et exportations de services en 2015 Part des immigrants 50 40 30 y = 1,531x - 22,17 R² = 0,028 20 10 0 22 23 24 25 26 27 28 Log des exportations de services Graphique 1c : Part de l’immigration et exportations de biens en 1995 Part des immigrants 25 20 15 y = 1,053x - 18,23 R² = 0,041 10 5 0 20 21 22 23 24 25 26 27 28 Log des exportations de biens Graphique 1d : Part de l’immigration et exportations de services en 1995 Part des immigrants 25 20 15 y = 1,229x - 21,11 R² = 0,045 10 5 0 20 21 22 23 24 25 26 27 Log des exportations de services Source : Calculs des auteurs, d’après la base World Development Indicators (WDI) de la Banque mondiale (2018). Nous appliquons le cadre des modèles de gravité, la pierre angulaire de l’économie internationale, à la relation entre stock d’immigrés installés dans les pays de l’OCDE et commerce de services. Nous étendons les travaux existants centrés sur l’OCDE pour inclure la migration en provenance des pays en développement, en étudiant 191 pays d’origine et 20 pays d’accueil, membres de Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 49 l’OCDE. Les exportations sont observées pour les années 2000, 2005 et 2010. Les particularités du commerce des services sont prises en compte à travers l’introduction de variables dyadiques spécifiques qui sont particulièrement pertinentes pour les transactions dans ces activités : - Système juridique commun, soit « common law » ou « civil law » avec un impact particulier sur les régulations domestiques, considérées comme des obstacles au commerce de services. - Qualité des institutions : des restrictions au commerce de services prennent la forme de régulations internes (barrières « behind the borders ») qui entravent le commerce dans la mesure où elles diffèrent d’un pays à l’autre. Nous mettons l’accent sur les institutions les plus pertinentes quand il s’agit de développer une activité à l’étranger, c’est-à-dire la qualité de la régulation, la mise en œuvre des règles de droit et le contrôle de la corruption. Des écarts dans ces institutions auront un impact sur le commerce bilatéral de services. Dans notre spécification principale, nous nous concentrons sur l’interprétation des variables suivantes : • variables usuelles aux équations de gravité (distance, frontière, langues, histoire coloniale communes), • spécifiques aux services décrivant la similarité du régime juridique (« common law » ou « civil law ») qui facilite particulièrement l’échange dans les services. Nous introduisons des effets fixes pays-temps. Enfin, nous séparons notre échantillon en quatre, en fonction de la qualité institutionnelle des pays d’origine des migrants : très mauvaise (inférieur au premier quartile), mauvaise (entre le premier et le deuxième quartiles), bonne (entre le deuxième et le troisième quartiles) et très bonne (supérieure au quatrième quartile), pour voir si l’effet de complémentarité de la migration sur le commerce est plus élevé pour les pays d’origine dotés d’institutions de faible qualité. Cet article apporte une triple contribution : i) appliquer le cadre de l’équation de gravité à la relation entre exportations de services et immigration ; ii) étendre l’analyse de la migration depuis 191 économies, incluant des pays en développement vers 20 pays de l’OCDE ; iii) établir si l’effet de complémentarité entre immigration et commerce est plus fort pour la migration originaire de pays à faible qualité institutionnelle. Sur ce dernier point, nous nous fondons sur l’intuition qu’une bonne connaissance des usages et des coutumes d’un pays est d’autant plus utile que la qualité de la régulation et des règles de droit est faible et que le degré de corruption est élevé. Ainsi, lorsqu’il s’agit d’entamer une relation d’affaires avec des entreprises ou des individus dans de tels pays, le besoin de gérer des règles informelles, que seuls les natifs connaissent car ils les ont expérimentées eux-mêmes, est d’autant plus fort. Nous trouvons que les exportations de services des pays de l’OCDE sont complémentaires de la part des immigrés dans la population du pays d’accueil. Cet effet est particulièrement important lorsque les migrants viennent de pays à faible qualité de régulation et de règles de droit, alors qu’il n’est pas significatif dans le cas de la migration en provenance de pays à forte corruption. Dans ce cas, on peut imaginer que la migration est un substitut à la corruption dans le Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 50 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD sens où les firmes exportatrices réalisent un arbitrage entre le recrutement d’un personnel qualifié les aidant à commercer ou à verser un « dessous-de-table » au partenaire étranger. Nos résultats sont robustes aux nombreuses spécifications testées, en particulier différentes modalités d’effets fixes ; ils peuvent être étendus aux importations ; ils restent également valides dans les estimations en PPML (Poisson Pseudo Maximum Likelihood), contrôlant les valeurs manquantes. Dans la première partie, nous rappelons les principaux travaux de la littérature sur le lien migration-commerce. Dans la deuxième, nous présentons les données et la méthodologie. Nous appliquons la spécification standard des modèles de gravité à la relation entre immigration et exportations de services et proposons les résultats dans la troisième partie. 1. REVUE DE LA LITTÉRATURE Le lien entre commerce et migration a été abondamment analysé pour le commerce des biens. Une des premières contributions montrant l’influence des immigrants sur les flux de marchandises est celle de Gould (1994). L’article de cet auteur établit que cet effet peut être attribué à deux mécanismes, un mécanisme basé sur les préférences (les immigrés ont des préférences pour les produits en provenance de leur pays d’origine) et un mécanisme lié aux coûts de transactions (les immigrés ont des connaissances à propos des marchés de leur pays natal, qui rendent plus facile l’établissement de relations commerciales et réduisent les coûts liés au manque de confiance). Gould étudie seulement le commerce bilatéral des États-Unis en utilisant des données de panel concernant 47 partenaires commerciaux de ce pays. Il montre que les immigrants ont un impact positif fort, à la fois sur les importations et sur les exportations. L’effet des migrants a tendance à s’accroître à un taux décroissant lorsque la taille de la population immigrée augmente. L’effet le plus fort concerne le secteur exportateur, tandis que le secteur importateur est moins influencé. Dans le cas du secteur exportateur un nombre relativement faible d’immigrants semble épuiser la plus grosse part de l’effet. En revanche, dans le cas des importations, une communauté relativement large de migrants est requise avant que l’effet marginal d’un migrant additionnel devienne négligeable. Il semble donc que l’effet sur les importations est obtenu principalement au travers du mécanisme des préférences, qui est davantage proportionnel à la taille de la communauté de migrants, tandis que l’effet sur les exportations passe plutôt par le mécanisme des coûts de transaction, qui est moins dépendant de la taille de la communauté. Finalement l’auteur montre que l’effet de la communauté de migrants est plus important sur les exportations et les importations de produits de consommation que de biens intermédiaires, ce qui est également cohérent avec les deux mécanismes décrits ci-dessus. Rauch (2001) met en évidence trois canaux de la relation entre commerce et migration. Premièrement, les réseaux facilitent le commerce en créant de la Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 51 confiance dans un contexte où l’exécution des contrats est plus difficile à réaliser. Deuxièmement, outre le fait qu’ils peuvent transmettre l’information passée (mécanisme de réputation), les réseaux peuvent transmettre de l’information au sujet des opportunités d’affaires présentes, ce qui inclut l’information sur les distributeurs, les fournisseurs ou les co-investisseurs. Enfin, troisièmement, les réseaux modifient la structure du marché. Tandis que les réseaux transnationaux peuvent aider à dépasser les barrières informelles à l’échange, les réseaux nationaux peuvent, au contraire, créer de telles barrières en rendant possible une collusion visant à restreindre l’accès du marché domestique aux firmes étrangères. Bowen et Pédussel Wu (2013) développent un modèle dans lequel une fraction des migrants est spécifiquement employée par le secteur des biens non échangés internationalement (le secteur des services dans ce modèle), tandis que la fraction restante acquiert le même statut que les travailleurs nationaux, et peut donc être employée dans tous les secteurs. La fraction « sectoriellement spécifique » est supposée être composée de travailleurs faiblement qualifiés, tandis que les migrants les plus qualifiés obtiennent le même statut que les travailleurs domestiques (et sont donc mobiles entre les secteurs). L’article de Bowen et Pédussel Wu traite de l’influence du paramètre que constitue la fraction de migrants sectoriellement spécifiques sur la complémentarité ou la substituabilité du commerce et de la migration. Si tous les migrants sont sectoriellement spécifiques, alors l’échange et la migration sont complémentaires. L’échange international et la migration deviennent substituables quand la proportion courante de migrants sectoriellement spécifiques excède la part des nouveaux immigrants spécifiques au secteur. Pour 14 pays de l’OCDE sur la période 19802001, le test empirique montre que la production de services augmente avec le niveau d’immigration et que l’échange international et l’immigration sont complémentaires et non substituables, ce qui est cohérent avec l’idée intuitive d’une proportion importante de migrants employés dans le secteur des services non échangeables internationalement. Felbermayr et Toubal (2012) reprennent les deux canaux de transmission présentés par Gould et utilisent un modèle de gravité sur des données transversales pour l’année 2000. Ils testent d’abord l’impact sur le commerce bilatéral des pays de la part des émigrants et des immigrants, définie comme le ratio du stock d’immigrants né dans un pays j et vivant dans une nation i dans la population du pays hôte. Ils montrent un impact positif de la migration au sein de l’OCDE, signe d’un effet de complémentarité. L’équivalent tarifaire de l’immigration des personnes très qualifiées est nettement plus élevé ; elles réduisent sensiblement les coûts d’information. Ils montrent, ensuite, que le rapport de la part émigrants sur la part des immigrants n’a aucun effet significatif sur le ratio importations sur exportations. Les auteurs attribuent le lien commerce-migration exclusivement au canal coût/information. Peri et Requena-Silvente (2010) utilisent des données sur les exportations espagnoles, en décomposant les exportations de l’Espagne en transactions commerciales provenant de 50 provinces espagnoles vers 77 pays étrangers sur 14 années (1995-2008). Ils utilisent une équation de gravité basique au niveau Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 52 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD provincial, en expliquant les exportations agrégées d’une certaine province i vers un pays j pour la période t par le produit des outputs bruts de la province i et du pays j, et par le stock total des immigrants provenant du pays j dans la province i, avec une forme log-linéaire. Le travail confirme l’impact positif du stock de migrants sur les exportations : un accroissement de 10% de la communauté d’immigrés provenant d’un pays donné dans une province donnée accroît les exportations vers ce pays entre 0,5% et 1%. Dans la plupart des cas la création de commerce est due à un accroissement du nombre de transactions et pas à un accroissement du volume de la transaction moyenne. Peri et Requena-Silvente montrent également que la création d’exportation est plus importante pour les biens hautement différenciés. Par ailleurs, les exportations vers des régions pour lesquelles les coûts de transaction sont vraisemblablement élevés (par exemple, l’Afrique, qui a de plus grosses différences culturelles avec l’Espagne que, par exemple, l’Amérique latine) sont plus influencées par l’état des stocks de migrants que les exportations vers les régions culturellement proches de l’Espagne. Les résultats empiriques de Peri et Requena-Silvente montrent que l’impact des stocks de migrants sur les exportations est principalement dû à la réduction des coûts de transaction des exportateurs, ce qui confirme les résultats de Gould (1994). Parsons et Winters (2014) considèrent les deux premiers canaux, concernant la confiance et l’information, cités par Rauch (2001). Des résultats provenant d’études empiriques robustes suggèrent que la migration et le commerce sont positivement liés. De plus, il semble que les immigrants ont un effet procommerce plus fort quand les autres facteurs favorables au commerce (institutions, État de droit, langage commun, culture commune) sont faibles. Hatzigeorgiou et Lodefalk (2015), en utilisant des données de panel et une méthodologie de variable instrumentale, exploitent une nouvelle base de données pour la Suède et 184 de ses partenaires commerciaux sur la période 2000-2010. En se basant sur une équation de gravité, leurs estimations confirment l’hypothèse que l’immigration encourage les exportations suédoises mais aucun effet n’est trouvé en ce qui concerne les importations. L’impact sur les exportations est plus grand pour les immigrants qui sont les plus intégrés (c’està-dire moins souvent sans emploi). Donc le bénéfice à encourager une meilleure intégration des immigrants sur le marché de l’emploi semble particulièrement pertinent du point de vue économique. Ainsi, la littérature met en évidence une relation généralement positive entre stock d’immigrants et commerce qui apparaît plus prononcée pour les exportations que pour les importations. Nous avons pour objectif d’étendre ces études aux échanges de services, en contrôlant l’intensité de cet effet en fonction de la qualité des institutions dans le pays d’origine des immigrants. D’après nos connaissances, Ottaviano et al. (2018) sont les seuls actuellement à étudier l’impact de l’immigration sur les échanges de services. Ils analysent cette relation pour les entreprises britanniques produisant des services pour 24 activités et les échanges bilatéraux avec 142 pays partenaires sur la période 2001 à 2007. Ils trouvent des résultats correspondant aux trois canaux de transmissions Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 53 qu’ils ont pris en considération : (a) un « effet de substitution aux importations » provenant de la réaffectation des tâches productives, préalablement externalisées à l’étranger, aux travailleurs immigrés ; (b) un effet général de productivité lié aux qualifications élevées et complémentaires des immigrés ; (c) un effet spécifique de productivité relatif aux exportations qui provient de la baisse des coûts des exportations bilatérales. L’objectif de notre article est de poursuivre ce travail et de l’étendre à l’immigration vers l’ensemble des pays de l’OCDE. Nous regardons également si la qualité des institutions du pays d’origine des immigrés a un effet positif sur les exportations de services de leur pays hôte vers leur pays d’origine. Pour analyser cette relation nous étudions le stock d’immigrés provenant des pays en développement et pas seulement de l’OCDE. Nous trouvons un effet de complémentarité entre la part des immigrés dans la population des membres de l’OCDE et les exportations de services lié à la faible qualité des réglementations et au manque de respect de la règle de droit dans les pays d’origine des migrants. 2. LES DONNÉES ET LA MÉTHODOLOGIE 2.1 Les données Nous utilisons la base de données d’échanges de services développée par Francois et Pindyuk (2013) qui constitue une consolidation à partir des données miroirs des flux commerciaux reportés par Eurostat, le FMI, l’OCDE et les Nations Unies. Cette base présente le meilleur recensement des données relatives aux échanges transfrontières (Mode 1). Les statistiques sont disponibles pour la période 1985 à 2011. Dans la mesure où la base de données comprend de nombreuses valeurs manquantes les premières années, nous commençons l’étude uniquement en 2000. Cependant, de nombreuses observations manquent pour 2010 ; pour cette année-là nous utilisons la base de données COMTRADE des Nations Unies. Les données d’exportation pour les 20 pays de l’OCDE retenus, en logarithmes, vont de 7,20 à 24,78 (voir tableau 1 pour les statistiques descriptives). Nous contrôlons pour la résistance multilatérale mise en évidence par Anderson et Van Wincoop (2003), qui montrent que l’éloignement compte : deux nations très éloignées du reste du monde tendent à commercer plus intensément entre elles que deux économies semblables séparées par la même distance, mais disposant de nombreux pays voisins. Lorsque cet effet est négligé cela conduit à une surestimation des flux d’échange bilatéraux. Nous incluons des effets fixes exportateur x temps et importateur x temps pour contrôler cette résistance multilatérale spécifique aux pays. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 54 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD Tableau 1 : Résumé des statistiques descriptives, exportations de services et variables économiques Moyenne Écart-type Minimum Maximum Ln(Exportations) 18,4431 2,4892 10,8396 24,6822 0,1137 0,3988 0 7,2283 0,0438 0,2178 0 6,8972 0,0318 0,1151 0 2,0670 0,0381 0,1381 0 2,7154 Ln(PIBit) 26,9427 1,2868 23,8981 30,3367 Ln(CPIBjt) 21,5232 1,7549 9,9800 33,7110 Ln(Dij) 8,3236 0,9985 5,0810 9,8802 ADJ, Contiguïté, variable indicatrice 0,0379 0,1909 0 1 Part des immigrants provenant d’un pays donné (%) Part des immigrants hautement qualifiés provenant d’un pays donné (%) Part des immigrants moyennement qualifiés provenant d’un pays donné (%) Part des immigrants peu qualifiés provenant d’un pays donné (%) LANG, Langage commun, variable 0,1144 0,3183 0 1 indicatrice Colony, colonie commune, variable 0,0628 0,2426 0 1 indicatrice Comleg, système légal commun, variable 0,4158 0 1 0,2222 indicatrice Différence de qualité de la régulation, 0,8805 0,002 3,8914 1,0777 difregulijt Source : Calculs des auteurs à partir de la base de Francois et Pindyuk (2013) et de la base de données de la Banque mondiale. La base de données sur le stock de migrants comprend 20 pays de l’OCDE dont 15 pays européens5 et 195 pays d’origine et elle est disponible tous les cinq ans. Elle est établie par l’Institut pour la recherche sur l’emploi (Institut für Arbeitsmarkt und Berufsforshung, IAB) de Nüremberg. Une distinction est effectuée entre les migrants selon leur pays d’origine, le niveau d’éducation faible (primaire), moyen (secondaire) et élevé (université) pour les hommes et pour les femmes. Nous nous concentrons sur les années 2000, 2005 et 2010 pour assurer la conformité avec les données d’échanges de services. 5 Parmi les 15 pays européens, 13 sont membres de l’Union européenne : Allemagne, Autriche, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni et Suède. Belgique et Italie sont exclues de la base sur les migrations, Norvège et Suisse sont ajoutées. En plus, nous avons cinq pays de l’OCDE non européens : Australie, Canada, Chili, États-Unis et Nouvelle Zélande. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 55 La base de données ne comprend que des valeurs positives. En test de robustesse pour éviter le biais de sélection, nous ajoutons des valeurs zéros, non pas pour l’ensemble des relations commerciales possibles entre les pays déclarants, mais uniquement pour les économies exportatrices et importatrices, qui ont déjà commercées ensemble une année donnée. En ce qui concerne les institutions, nous nous appuyons sur les Worldwide Governance Indicators (WGI) établis par Kaufman et al. (2010), qui prennent en compte les six dimensions de la gouvernance pour 214 pays entre 1996 et 2013. Au début, outre les enquêtes auprès des entreprises et des ménages, les données étaient collectées tous les deux ans auprès d’experts d’organisations non gouvernementales (ONG), d’agences du secteur public et de producteurs d’informations commerciales et liées aux affaires. Depuis 2002, les informations sont rassemblées sur une base annuelle et désormais fondées sur 35 sources de données provenant de 33 organisations dans le monde. Au sein de la base WGI, la gouvernance est définie comme les traditions et institutions par lesquelles est exercée l’autorité dans un pays. Elle comprend six éléments. Cependant, nous nous concentrons sur les trois qui sont liés au climat des affaires et qui influencent l’offre de services : (a) “Regulatory Quality” : la capacité d’un gouvernement à offrir des réglementations et des politiques saines qui rendent possible et promeuvent le développement du secteur public (regul), (b) “Rule of Law” (règle de droit) : le degré de confiance et d’obéissance des agents aux règles de la société, y compris la qualité du respect des contrats et des droits de la propriété, de la police, de la justice, comme de la probabilité de délits et de violence (rulelaw), (c) “Control of Corruption” : le degré d’exercice de la puissance publique pour un gain privé, comprenant les formes de petite et de grande corruption, comme la « captation » de l’État par les élites et les intérêts privés (corruption). Nous construisons un indicateur de divergence de qualité des institutions entre pays partenaires. Il mesure simplement la différence entre l’indicateur pour le pays d’origine et le pays de destination, comme suit : DifInstitution = Institutioni - Institutionj avec Institutioni (Institutionj), l’indicateur WGI pour une institution donnée du pays hôte i (j) où les immigrants habitent (proviennent), alors qu’ils viennent d’un pays d’origine j. Grâce à leur connaissance des traditions et des habitudes de leurs pays d’origine, les immigrants tendent à atténuer l’effet des dysfonctionnements des institutions de ces pays. C’est pourquoi, les écarts institutionnels ne jouent que lorsque la qualité est plus faible dans les pays d’origine i que dans les pays de destination j. Ainsi, nous utilisons la variable différence de qualité des institutions, lorsqu’elle prend une valeur positive et la mettons à zéro autrement6. 6 Pour la divergence entre les institutions des pays partenaires, nous notons, respectivement, difregul pour les différences de qualité de la régulation, difrulelaw pour les divergences de respect de la règle de droit et difcorrupt pour les écarts dans le contrôle de la corruption. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 56 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD En raison de la corrélation élevée entre les indicateurs WGI, nous ajoutons cet indicateur séparément dans l’équation pour chaque type d’institution, pour éviter la multicolinéarité. Les données sur les liens géographiques et institutionnels proviennent de la base GEODIST développée par le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) et Head et al. (2010). Nous ajoutons une variable indicatrice pour un même régime légal (« common law » ou « civil law »). Les lois jouent un rôle plus important pour les services que pour les biens, dans la mesure où nombre d’entre eux sont des activités réglementées ou des professions assujetties à l’obtention d’un diplôme, d’une certification, de sorte qu’elles sont régies par des réglementations « derrière la frontière », domestiques. Cette variable indicatrice est une approximation des mesures réglementaires, dans la mesure où il n’existe pas de droit de douane pour l’échange de services. Comme l’appartenance commune à un accord de libreéchange (ALE) favorise à la fois le commerce et la migration, nous n’incluons aucune variable indicatrice pour une participation commune à un ALE avec des clauses sur les services7. Notre base de données comprend 191 pays d’origine des immigrants vivant actuellement dans un de nos 20 pays de l’OCDE, alors qu’ils sont nés dans un pays étranger. 2.2 La méthodologie La littérature se réfère aux mêmes variables explicatives pour les échanges de services et pour le commerce de biens lorsqu’il s’agit des équations de gravité : les flux bilatéraux d’échanges sont proportionnels au produit du PIB des partenaires et inversement proportionnels à la distance. Notre équation est fondée sur l’équation générale de gravité proposée par Head et al. (2010) et Head et Mayer (2014). Nous estimons la spécification suivante pour les exportations de services : (2) EXijt= MimjtMexitTijRijt avec, EXijt, les exportations de services du pays domestique i vers le pays étranger j l’année t, en millions de dollars courants, pour chaque type de services, Mimjt, l’ensemble des caractéristiques du marché du pays importateur j, qui promeuvent les importations en provenance de toutes les sources j l’année t ; nous introduisons des effets fixes importateur x temps, mesurant la richesse et la taille du pays, son marché intérieur ; Mexit, le potentiel du pays exportateur i, comme fournisseur d’importations vers toutes les directions l’année t ; nous employons des effets fixes exportateur x temps, qui prennent en compte l’ensemble des spécificités des pays exportateurs et leur variabilité temporelle ; Tij, une fonction de coût d’échange que nous allons spécifier ci-dessous, 7 Voir Orifice (2015) pour l’étude de la relation entre ALE et migration. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 57 Rijt = exp {6 mijt +7 difInstitutionsijt}, avec  mijt = Mijt/POPijt, la part du stock d’immigrants provenant d’un pays donné l’année t, soit le nombre de personnes nées dans un pays j et vivant dans un pays de l’OCDE i dans la population totale du pays i l’année t ; et  difInstitutionsijt, la différence de qualité des institutions entre le pays hôte et le pays d’origine des immigrants, lorsque le pays d’accueil possède de meilleures institutions ; ainsi, nous conservons uniquement les valeurs positives et mettons à zéro les autres observations. À la suite de Felbermayr et Toubal (2012), nous spécifions la fonction de coût d’échange comme suit : Tij =Dij1exp{2 colonyij+ 3 ADJij + 4 LANGij+ 5 comlegij} où les facteurs liés au coût de l’échange sont :  Dij, la distance bilatérale,  colonyij, ADJij, LANGij, l’appartenance commune à un même empire colonial, la contiguïté ou une langue partagée, respectivement, variables habituelles dans les équations de gravité,  comlegij, pour tenir compte de l’importance des réglementations domestiques dans les services, nous introduisons une variable indicatrice pour le partage d’un même régime légal (“common law” ou “civil law”). Nous prenons alors le logarithme de l’équation (2) pour déduire notre équation d’exportation de services : ln (EXijt) = 1 ln(Dij) + 2 colonyij + 3 ADJij + 4 LANGij + 5 comlegij + 6mijt + 7 difInstitutionsijt+ jt + it + ijt (3) avec, it et jt, des effets fixes exportateur x temps et importateur x temps, respectivement, ijt, le terme d’erreur. La résistance multilatérale, le fait que deux pays très éloignés du reste du monde vont beaucoup plus commercer entre eux que deux pays disposant d’un grand nombre de voisins, a été mise en évidence par Anderson et Van Wincoop (2003). Nous la contrôlons par des effets fixes exportateur x temps et importateur x temps. Ainsi, les caractéristiques inobservables des 191 pays importateurs et leurs variations temporelles peuvent être prises en compte tout comme celles des 20 pays exportateurs de l’OCDE et leurs spécificités temporelles. Outre les résultats habituels de plus forte intensité des échanges lors du partage d’une frontière, d’une langue ou d’une histoire coloniale commune, nous estimons l’effet d’un régime légal commun (« common law » ou « civil law »). Nous nous attendons à une augmentation des exportations d’un pays i vers un pays j avec la part du stock d’immigrants vivant dans le pays i et nés dans le pays j. Nous supposons également que cet impact devrait être plus élevé pour le commerce avec des partenaires dont les institutions sont de plus faible qualité, dans la mesure où la connaissance des règles et des habitudes de leurs pays d’origine joue un rôle plus important pour faire des affaires. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 58 3. Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD LES RÉSULTATS Nous commençons par estimer une équation de gravité pour l’ensemble des données pour connaître le rôle joué par le stock d’immigrants d’un pays donné dans la population totale du pays hôte sur les exportations à destination du pays d’origine des immigrants. Pour mesurer les barrières aux échanges, nous introduisons les différences de qualité de nos trois types d’institutions (régulation, règle de droit ou corruption) entre les partenaires. Dans le tableau 2, pour les variables dyadiques de gravité, nous obtenons un effet négatif de la distance et positif de la langue, de l’héritage colonial et du système légal communs. La frontière partagée n’a aucun impact. La part des immigrants provenant d’un pays donné dans la population des pays hôtes de l’OCDE favorise toujours le commerce, quel que soit la nature des institutions considérées. Pour finir, nous observons une augmentation des exportations bilatérales des pays de l’OCDE, lorsque la qualité des régulations, le respect de la règle de droit ou le contrôle de la corruption sont mieux assurés dans le pays hôte que dans le pays d’origine des migrants. Nous retrouvons ces résultats pour les immigrants hommes ou femmes. Pour mieux comprendre la raison pour laquelle l’immigration favorise les exportations de services, nous scindons nos observations en quatre groupes selon la qualité des institutions du pays d’origine des immigrants. Nous nous attendons à ce que les immigrants jouent un rôle d’autant plus important que les traditions et les habitudes liées aux affaires diffèrent entre les partenaires. Dans la mesure où la « régulation » apparaît comme l’institution la plus importante pour les échanges de services, nous avons construit nos quatre groupes dans les intervalles entre les quartiles pour le score reflétant la qualité de la « régulation » dans le pays d’origine des immigrants. Dans le tableau 3, nous montrons les résultats, respectivement, pour les pays d’origine où la qualité est inférieure au premier quartile (très mauvaise qualité), entre le premier et le deuxième quartile (mauvaise qualité), entre le deuxième et le troisième quartile (bonne qualité) et au-dessus du troisième quartile (très bonne qualité). Dans les quatre bases, le commerce décroît avec la distance et augmente avec un passé colonial ou une langue partagés. La frontière commune ne favorise les échanges que lorsque les régulations sont de mauvaise et très mauvaise qualité dans le pays importateur ; alors la connaissance des voisins compense l’absence de bon signal des institutions. Les effets du régime légal sur les exportations des pays de l’OCDE sont mitigés : - négatif si les partenaires possèdent des régulations de très mauvaise qualité, - positif lorsque les régulations des importateurs présentent une très bonne qualité, - non significatif, lorsque la qualité des régulations se situe dans l’intervalle interquartile (bonne et mauvaise). Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 59 Tableau 2 : L’effet de la part du stock d’immigrants d’un pays donné sur les exportations de services, le rôle des différences de qualité des institutions (1) (2) (3) Ln(Dij) -0,9510a -0,9555a -0,9542 a (0,0427) (0,0429) (0,0430) colonyij 0,8318a 0,8420a 0,8372a (0,1019) (0,1004) (0,1012) ADJij -0,1658 -0,1375 -0,1373 (0,1399) (0,1398) (0,1412) LANGij 0,3953a 0,3908a 0,3731a (0,0817) (0,0816) (0,0814) comlegij 0,1942a 0,1949a 0,1941a (0,0560) (0,0565) (0,0564) difregulij 1,0339a (0,1987) difrulelawij 0,9401a (0,1806) difcorruptij 0,5027a (0,1183) mijt 0,1651a 0,1587a 0,1621a (0,0614) (0,0616) (0,0634) Exportateur x temps EF OUI OUI OUI Importateur x temps EF OUI OUI OUI Clustering des erreurs Exportateur x Exportateur x Exportateur x Importateur Importateur Importateur R-carré 0,8825 0,8823 0,8820 R-carré ajusté 0,8694 0,8691 0,8688 Observations 3 736 3 740 3 736 Note : a p < 0,01, b p < 0,05, c p < 0,1. Source : Base de données de Francois et Pindyuk (2013) et de la Banque mondiale sur les échanges de services, WDI et CEPII pour les autres variables. Ainsi, lorsque les régulations ne sont pas fiables, le manque de confiance dans les institutions est plus important lorsque le système légal est semblable. Finalement, la part des immigrants d’un pays donné accroît les exportations bilatérales pour les pays dont les régulations sont de très mauvaise ou très bonne qualité. Dans le premier cas, l’immigration permet de surmonter les barrières à l’échange liées à des coutumes, règles et traditions différentes entre partenaires. Dans le dernier cas, les immigrants renforcent les similarités entre les partenaires. Nous avons reproduit cet exercice en scindant les observations en quatre selon le degré de respect de la règle de droit ou de contrôle de la corruption. Les résultats sont présentés dans le tableau 4. Lorsqu’ils proviennent de pays avec des régulations et un respect de la règle de droit de très mauvaise qualité, les immigrants ont un effet positif important sur les exportations bilatérales, autant pour les hommes que pour les femmes et pour presque toutes les qualifications. Les exportations de l’OCDE sont également favorisées par les immigrants provenant de pays avec de bonnes et très bonnes régulations ou, à un degré Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 60 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD moindre, respect de la règle de droit. En revanche, le commerce avec des pays accueillant des institutions de mauvaise qualité n’est pas affecté par la présence d’immigrants. Le contrôle de la corruption a moins d’impact sur les exportations bilatérales de l’OCDE. Tableau 3 : L’impact de la part du stock d’immigrants provenant d’un pays donné sur les exportations de services, pour les immigrants provenant de nations avec des régulations de différentes qualités Qualité de la Très mauvaise Mauvaise Bonne Très bonne régulation (1) (2) (3) (4) Ln(Dij) -1,0415a -0,9443a -1,0973 a -0,9214a (0,3076) (0,2033) (0,0993) (0,0599) colonyij 1,2159a 1,0966a 0,9871a 0,4710a (0,2824) (0,2062) (0,1996) (0,1468) ADJij 1,5273b 1,0361c 0,3702 -0,0320 (0,6440) (0,5584) (0,4329) (0,1420) LANGij 0,4992b 0,6120a 0,4797b 0,1900c (0,2452) (0,1935) (0,2088) (0,1036) comlegij -0,4046b 0,1129 0,1797 0,3201a (0,2077) (0,1484) (0,1237) (0,0701) mijt 1,4516a 0,2054 0,2082a 0,0922 (0,5654) (0,3089) (0,0852) (0,0773) Exportateur x temps EF OUI OUI OUI OUI Importateur x temps EF OUI OUI OUI OUI Clustering des erreurs Exportateur x Exportateur x Exportateur x Exportateur x Importateur Importateur Importateur Importateur R-carré 0,7783 0,8557 0,8326 0,9038 R-carré asjusté 0,7019 0,8222 0,8007 0,8936 Observations 368 676 844 1 835 Note : a p < 0,01, b p < 0,05, c p < 0,1. Source: Base de données de Francois et Pindyuk (2013) et de la Banque mondiale sur les échanges de services, WDI et CEPII pour les autres variables. Il existe un lien ente migration et échanges de services, au moins pour les immigrants originaires de pays avec un très faible respect des régulations ou de la règle de droit. Les immigrants apportent leur connaissance des règles, habitudes, traditions et pratiques informelles de leur pays d’origine, ce qui favorise l’augmentation de la confiance nécessaire aux affaires internationales et facilite le commerce, en particulier les exportations. En test de robustesse, nous avons estimé différentes spécifications concernant les effets fixes. En annexe, dans les tableaux A et B, respectivement pour les exportations et les importations, dans les colonnes 1 à 3, avec le PIB par tête et la population, le PIB par tête et le PIB et le PIB seul, respectivement, nous introduisons des effets fixes exportateur, importateur et temps. Puis, dans la colonne 4, nous conservons le PIB et le PIB par tête du pays de l’OCDE (exportateur dans le tableau A et importateur dans le tableau B) en utilisant des effets fixes pays exportateur, temps et importateur x temps pour le tableau A, Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 61 puis importateur, temps, exportateur x temps pour le tableau B. L’estimation symétrique est réalisée dans la colonne 5. Enfin, nous reportons l’estimation avec les effets fixes exportateur x temps et importateur x temps. Pour les six spécifications, la part des immigrants d’un pays donné dans la population du pays hôte de l’OCDE favorise les exportations (tableau A) et les importations (tableau B). Ces résultats tiennent quel que soit le genre des immigrants. Tous immigrés Hautement qualifiés Moyennement qualifiés Peu qualifiés Immigrés hommes Hautement qualifiés Moyennement qualifiés Peu qualifiés Immigrés femmes Hautement qualifiés Moyennement qualifiés Peu qualifiés Très mauvaise (1) Mauvaise (2) Bonne (3) Très bonne (4) Très mauvaise (5) Mauvaise (6) Bonne (7) Très bonne (8) Très mauvaise (9) Mauvaise (10) Bonne (11) Très bonne (12) Tableau 4 : Comparaison de l’impact des stocks d’immigrants d’un pays donné sur les exportations de services selon la qualité de la régulation, le respect de la règle de droit ou le degré de contrôle de la corruption Qualifications/ Qualité de la Respect de la règle Degré de contrôle Genre régulation de droit de la corruption (+) (+) (+) ns ns (+) (+) (+) (+) ns ns (+) (+) (+) (+) ns ns ns (+) ns (+) (+) ns (+) ns ns ns (+) ns (+) (+) ns (+) ns ns (+) (+) (+) ns ns (+) (+) ns (+) (+) (+) ns ns (+) (+) ns (+) ns ns (+) (+) (+) (+) ns ns (+) (+) ns (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) ns ns ns (+) ns (+) ns ns ns (+) ns (+) ns (+) (+) (+) (+) (+) ns ns ns ns (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) (+) ns ns ns ns (+) (+) ns (+) ns ns ns (+) ns ns ns ns (+) (+) ns (+) (+) (+) ns (+) ns ns ns (+) (+) ns (+) (+) (+) (+) (+) ns ns (+) (+) ns Note : ns : non significatif ; (+) positif et statistiquement significatif ; (-) négatif et statistiquement significatif ; estimations MCO avec des effets fixes exportations x temps et importations x temps ; cluster des erreurs par exportateurs x importateurs. Finalement, pour contrôler les valeurs manquantes, nous effectuons une estimation PPML (Poisson Pseudo Maximum Likelihood), dans le tableau C de l’annexe. Nous obtenons une confirmation de nos résultats d’effet de complémentarité de la part des immigrants d’un pays donné à la fois sur les importations (quelle que soit la qualification des immigrants) et sur les exportations (sauf pour les immigrants hautement qualifiés). Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 62 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD CONCLUSION La relation entre commerce et migration est un sujet très controversé parmi les économistes internationalistes. Les importations et les exportations sont-elles des substituts ou des compléments aux flux migratoires ? Cette question a été souvent traitée pour le commerce des biens (voir Rauch, 2001 ; Gould, 1994). Cet article cherche à étendre l’analyse de la relation entre commerce de services et immigration. Nous fondons notre démarche économétrique sur le cadre théorique des modèles de gravité et proposons une évaluation de l’impact de l’immigration sur les exportations de services de 20 pays de l’OCDE vers 191 économies. Les bases de données de Francois et Pindyuk (2013) pour le commerce bilatéral de services et de l’Institute for Employment Research pour les statistiques concernant les stocks de migrants sont utilisées pour les années 2000, 2005 et 2010. À notre connaissance, c’est la première contribution au sujet du lien migrationcommerce de services étendant l’analyse à l’immigration provenant d’économies en développement et pas uniquement des membres de l’OCDE. Dans la mesure où il s’agit de l’un des principaux obstacles au commerce, nous nous focalisons sur le rôle des écarts de qualité des institutions. Il est montré que, comme pour le commerce des biens, les complémentarités entre immigration et commerce de services proviennent de la capacité des migrants à améliorer l’information sur les marchés étrangers et donc de réduire les coûts à l’exportation (trade-cost channel). Grâce à leur connaissance fine des marchés locaux et des usages de leurs pays d’origine, les immigrés présentent des qualifications complémentaires à celles des natifs. Les résultats sont robustes pour les différentes spécifications d’effets fixes testées. Ils sont également significatifs pour les importations et demeurent stables lors des estimations en PPML permettant de contrôler pour les valeurs manquantes. Nous avons ainsi mis en lumière une extension vers le commerce des services du canal du coût à l’échange dans la liaison migration-commerce, effet d’autant plus fort que les migrants sont originaires de pays à faible qualité institutionnelle (régulations et règle de droit). Une application de ce travail en matière de politique économique est que les pays exportateurs de services ont intérêt à détenir un stock significatif et diversifié de migrants en provenance de pays dont les institutions sont de mauvaise qualité. En effet, grâce à leur connaissance des règles tacites qui régissent les relations économiques dans leurs pays d'origine, ceux-ci sont à même de réduire les obstacles informels au commerce et de produire de la confiance dans les relations d'affaires internationales. BIBLIOGRAPHIE Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 63 ANDERSON J. E., VAN WINCOOP E. (2003) Gravity with Gravitas: A solution to the Border Puzzle, American Economic Review, 93(1), 170-192. BANQUE MONDIALE (2018), World Development indicators, 21 septembre, https://datacatalog.worldbank.org/dataset/world-development-indicators. BOWEN H. P., PÉDUSSEL WU J. 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ANNEXES Tableau A : Impact de la part du stock d’immigrants d’un pays donné sur les exportations de services, estimations avec divers effets fixes lPIBit (1) lPIBjt lCPIBit lCPIBjt lPOPit lPOPjt Ln(Dij) colonyij ADJij LANGij comlegij difregulij mijt 0,0114 (0,0381) -0,0215 (0,0157) 3,3846a (0,8849) -0,9703 (0,6043) -0,9658a (0,0421) 0,8100a (0,1027) -0,1682 (0,1410) 0,4209a (0,0825) 0,1684a (0,0565) 0,0840a (0,1006) 0,1580a (0,0639) OUI OUI OUI NON (2) 2,3481a (0,4792) 2,2152a (0,1879) -0,0081 (0,0356) -0,0152 (0,0149) (3) 2,3410a (0,4752) 2,2245a (0,1872) -0,9671a (0,0419) 0,8103a (0,1028) -0,1892 (0,1407) 0,4050a (0,0822) 0,1767b (0,0943) 0,1755a (0,0563) 0,1655a (0,0619) OUI OUI OUI NON -0,9676a (0,0418) 0,8105a (0,1029) -0,1898 (0,1406) 0,4057a (0,0822) 0,1751a (0,0563) 0,1806b (0,0939) 0,1654a (0,0618) OUI OUI OUI NON (4) 2,3582a (0,4558) -0,0217 (0,0350) -0,9320a (0,0438) 0,8186a (0,1037) -0,1667 (0,1421) 0,3751a (0,0826) 0,2062a (0,0565) 0,6302a (0,1427) 0,1761a (0,0639) OUI NON OUI NON (5) (6) 2,1799a (0,1790) -0,0161 (0,0140) -0,9835a (0,0412) 0,8181a (0,1013) -0,1847 (0,1394) 0,4203a (0,0815) 0,1583a (0,0559) 0,2486b (0,1065) 0,1542a (0,0604) NON OUI OUI OUI -0,9510 a (0,0427) 0,8318a (0,1019) -0,1658 (0,1399) 0,3953a (0,0817) 0,1942a (0,0560) 1,0339a (0,1987) 0,1651a (0,0613) NON NON NON OUI Exportateur EF Importateur EF Temps FE Exportateur x temps EF Importateur x NON NON NON OUI NON OUI temps EF Clustering Exportateur Exportateur Exportateur Exportateur Exportateur Exportateur des x x x x x x erreurs Importateur Importateur Importateur Importateur Importateur Importateur R-carré 0,8597 0,8637 0,8637 0,8757 0,8698 0,8825 R²ajusté 0,8515 0,8558 0,8559 0,8633 0,8698 0,8694 Observations 3,754 3,754 3,754 3,736 3,754 3,736 Note : avec le pays de l’OCDE i qui exporte des services vers une économie j ; lPIB, le logarithme du PIB ; lCPIB, le logarithme du PIB par tête ; lPOP, le logarithme de la population ; a p < 0,01, b p < 0,05, c p < 0,1. Source : Base de données de Francois et Pindyuk (2013) et de la Banque mondiale sur les échanges de services, WDI et CEPII pour les autres variables. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 Une approche institutionnelle du lien migration et commerce de services 65 Tableau B : Impact de la part du stock d’immigrants d’un pays donné sur les importations de services, estimations avec divers effets fixes lPIBit (1) lPIBjt lCPIBit lCPIBjt lPOPit lPOPjt Ln(Dij) colonyij ADJij LANGij comlegij difregulij mijt 0,0812b (0,0383) 0,0255c (0,0136) 3,7199a (0,7098) -1,4607a (0,4395) -0,8605a (0,0394) 0,5000a (0,0960) 0,0799 (0,1050) 0,3206a (0,0844) 0,1432a (0,0555) 0,0589c (0,0323) 0,1319a (0,0532) OUI OUI OUI NON (2) 2,7218a (0,3974) 0,8234a (0,1881) 0,0734b (0,0354) 0,0258b (0,0134) (3) 2,7506a (0,3950) 0,7994a (0,1902) -0,8607a (0,0394) 0,4970a (0,0960) 0,0702 (0,1053) 0,3120a (0,0845) 0,1463a (0,0556) 0,0063 (0,0353) 0,1356a (0,0518) OUI OUI OUI NON -0,8602a (0,0394) 0,4948a (0,0957) 0,0704 (0,1055) 0,3102a (0,0845) 0,1481a (0,0556) 0,0133 (0,0357) 0,1354a (0,0520) OUI OUI OUI NON (4) 2,5834a (0,4017) 0,0532 (0,0358) -0,8645a (0,0405) 0,4935a (0,0976) 0,0727 (0,1049) 0,3007a (0,0852) 0,1470a (0,0558) 0,1164 (0,1085) 0,1363a (0,0502) OUI NON OUI NON (5) (6) 0,8245a (0,1781) 0,0243b (0,0124) -0,8509a (0,0392) 0,4960a (0,0961) 0,0586 (0,1056) 0,2976a (0,0845) 0,1438a (0,0558) 0,00004 (0,0340) 0,1442a (0,0518) NON OUI OUI OUI -0,8509 a (0,0402) 0,4888a (0,0981) 0,0670 (0,1048) 0,2857a (0,0851) 0,1455a (0,0561) 0,1674 (0,1070) 0,1441a (0,0500) NON NON NON OUI Exportateur EF Importateur EF Temps FE Exportateur x temps EF Importateur x NON NON NON YES NON OUI temps EF Clustering Exportateur Exportateur Exportateur Exportateur Exportateur Exportateur des x x x x x x erreurs Importateur Importateur Importateur Importateur Importateur Importateur R-carré 0,4702 0,4710 0,4708 0,4777 0,4779 0,4848 R²ajusté 0,4612 0,4620 0,4619 0,4614 0,4674 0,4672 Observations 12,238 12,238 12,238 12,253 12,253 12,253 Note : avec le pays de l’OCDE i qui importe des services provenant d’une économie j ; lPIB, le logarithme du PIB ; lCPIB, le logarithme du PIB par tête ; lPOP, le logarithme de la population ; a p < 0,01, b p < 0,05, c p < 0,1. Source : Base de données de Francois et Pindyuk (2013) et de la Banque mondiale sur les échanges de services, WDI et CEPII pour les autres variables. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184 66 Thierry BAUDASSÉ, Thierry MONTALIEU et Isabelle RABAUD Tableau C : PPML, estimation de l’impact de la part du stock d’immigrants d’un pays donné sur les exportations et les importations de services, effet des différences dans la qualité des institutions Ln(Dij) colonyij ADJij LANGij comlegij difregulij mijt mhijt (1) -0,1640a (0,0164) 0,0541b (0,0272) -0,1787a (0,0321) 0,0635b (0,0290) -0,0046 (0,0201) 0,1019 (0,0697) 0,0408b (0,0174) mmijt Exportations (2) (3) -0,1647a -0,1643a (0,0165) (0,0164) 0,0607b 0,0488c (0,0270) (0,0275) -0,1662a -0,1904a (0,0314) (0,0324) 0,0687b 0,0592b (0,0288) (0,0291) -0,0029 -0,0059 (0,0201) (0,0201) 0,1014 0,1034 (0,0698) (0,0697) 0,0321 (0,0269) mlijt Exportateur x temps EF Importateur x temps EF Clustering des erreurs R-carré Nb d’obs exclues Nombre d’ observations 0,2134a (0,0607) (4) -0,1646a (0,0164) 0,0550b (0,0272) -0,1734a (0,0318) 0,0619b (0,0292) -0,0045 (0,0201) 0,1039 (0,0697) OUI OUI OUI 0,1111b (0,0509) OUI OUI OUI OUI OUI (5) -0,1113a (0,0083) 0,0388a (0,0147) -0,0929a (0,0154) 0,0355b (0,0157) 0,0067 (0,0105) 0,0375 (0,0307) 0,0197a (0,0075) Importations (6) (7) -0,1113a -0,1117a (0,0084) (0,0084) 0,0427a 0,0362a (0,0146) (0,0149) -0,0885a -0,0968a (0,0153) (0,0160) 0,0387a 0,0335b (0,0156) (0,0158) 0,0077 0,0061 (0,0105) (0,0105) 0,0374 0,0381 (0,0307) (0,0307) 0,0218c (0,0128) 0,0903a (0,0275) (8) -0,1116a (0,0084) 0,0405a (0,0147) -0,0886a (0,153) 0,0361b (0,0158) 0,0070 (0,0105) 0,0389 (0,0306) OUI OUI OUI 0,0395c (0,0240) OUI OUI OUI OUI OUI Exports Exports Exports Exports Exports Exports Exports Exports x x x x x x x x Imports Imports Imports Imports Imports Imports Imports Imports 0,6097 0,6094 0,6100 0,6096 0,4934 0,4931 0,4936 0,4932 1 201 1 201 1 201 1 201 1 178 1 178 1 178 1 178 4 814 4 814 4 814 4 814 13 268 13 268 13 268 13 268 Note : avec le pays de l’OCDE i qui exporte (importe) des services provenant (vers) d’une économie j ; lPIB, le logarithme du PIB ; lCPIB, le logarithme du PIB par tête ; lPOP, le logarithme de la population ; a p < 0,01, b p < 0,05, c p < 0,1. Source : Base de données de Francois et Pindyuk (2013) et de la Banque mondiale sur les échanges de services, WDI et CEPII pour les autres variables. Mondes en Développement Vol.46-2018/4-n°184