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PALÉOLITHiQUE MOYEN ET NÉOLITHIQUE DE L'ORIENTAL MAROCAIN LA GROTTE DU RHAFAS Luc WENGLER, Brigitte WENGLER, Abdeljalil BOUZOUGGAR, Mohamed EL AZZOUZI, Rochdi BERNOUSSI, Jacques E. BROCHIER, Georgette DEL/BRIAS, Wahid KRARSSI". Norbert MERCIER, Ahmed MARGAA, Latifa MOFTAQIR, Abderrahim mohibLZセ[ゥ@ '('1 Mustapha NAMI, Jean-Louis REYSS, Hélène VALLADAS & Jean-Louis verntョセ@ ()i Résumé: Située au Nord-Est du Maroc à proximité de la frontière algérienne, la grotte du Rhafas contient des informations sur le Néolithique et sur le Paléolithique moyen grâce à sa longue série stratigraphique. L'ensemble, attribué au Pléistocène supérieur, comporte une importante succession de couches moustériennes avec des sols d'habitat où l'on peut suivre sur un plan paléoéconomique et techno-typologique l'évolution de cette culture durant le stade 5. Les études de matières premières ont par ailleurs permis de retracer la mobilité des groupes humains qui ont périodiquement occupé la cavité. Au-dessus, d'autres niveaux ont permis d'étudier le passage progressif du Moustérien à l'Atérien à la fois sur le plan culturel et paléoenvironnemental. Cette transition a pu être datée par thermoluminescence entre 60-80 kans. La séquence se termine par une couche anthropique qui est profondément marquée par plusieurs occupations successives. Elle contenait des artefacts lithiques, osseux et de la céramique qui caractérisent le Néolithique moyen tellien. Le matériel archéologique, les restes de faune et de flore permettent de retracer l'environnement d'une population de pasteurs dont on connaît une sépulture d'un enfant nouveau-né et quelques restes d'un adulte malheureusement remaniés postérieurement. Abstract: In the North-East of Morocco the Rhafas cave is situated near the Algerian border. Its long stratigraphic sequence contains information about the Neolithic and the Middle Palaeolithic. Dated from the Upper Pleistocene, it comprises a long succession of Mousterian layers with living floors where the evolution of this culture during stage 5 can be followed. By the study of raw materials, we could also reconstruct the travels of the human groups who settled periodically in the cave. Above, other levels allowed study of the graduai transition, both cultural and palaeoenvironmental, from Mousterian to Aterian. This transition could be dated by thermoluminescence between 60 and 80 kyr. The sequence ends with an anthropic layer which was deeply marked by several successive human settlements. It contained lithic and osseous artefacts and sorne pieces of pottery characteristic of the middle Neolithic of the Tellian Atlas. The environment of these shepherds could be reconstructed from archaeological material and remains of fauna and flora. The burial of a new-born baby and a few remains of an adult, the latter unfortunately reworked later, were found in this layer. LA GROTTE DU RHAFAS Jusque dans les années 70, la rareté des gisements moustériens en Afrique du Nord, malgré de nombreuses recherches, posait de réels problèmes d'interprétation (G. Camps, 1974). Une origine intrusive en provenance de la Méditerranée orientale fut envisagée (L. Balout, 1967) sans toutefois que les arguments avancés soient déterminants. La découverte de nouveaux sites dans différents pays du Maghreb, dont la grotte du Rhafas, laissent penser qu'il s'agit seulement d'un état de la recherche. En effet, une recherche raisonnée des sites moustériens et atériens, qui constituent le Paléolithique moyen du Maghreb, à partir de l'étude des formations géologiques susceptibles d'en contenir s'avère généralement fertile en découvertes, car la majorité des gisements sont des sites de plein air. Cependant, la connaissance de ces cultures est encore embryonnaire, tant dans le domaine palethnologique que de celui de leur origine, de leur diversité et de leur évolution. C'est dans ce cadre que s'inscrivent les recherches sur le Paléolithique moyen conduites au Maroc oriental à partir de la fin des années 70 (L. Wengler, 1993a). Cette cavité, située au Nord-Est du Maroc (fig. 1), à proximité de la frontière marocco-algérienne, est un reste de cavité karstique recoupée par le versant, qui a ensuite évolué comme un abri sous roche. Elle occupe une position privilégiée à 900 m d'altitude dans la partie orientale des Monts d'Oujda sur un des axes nord-sud qui traverse ces montagnes pour relier la zone des Hauts Plateaux steppiques aux plaines septentrionales de la région d'Oujda. Exposée au Sud-Est, elle s'ouvre sur le flanc nord d'une petite reculée dominant la vallée de l'oued Taïret dont le cours nord-sud sépare en partie les Monts d'Oujda des Monts de Tlemcen. La grotte du Rhafas, repérée lors de prospections dans la zone de l'oued Taïret en 1978, a fait l'objet d'un sondage très limité au printemps 1979. Celui-ci montra la superposition d'une couche néolithique sur un niveau atérien reposant sur une croûte riche en matériel du Paléolithique moyen. Des travaux plus importants furent entrepris de 1982 à 1986, afm de connaître les occupations préhistoriques et de collecter des informations chronologyques, géologiques et paléoenvironnementales. Les résultats obtenus firent l'objet de plusieurs articles sur les niveaux contenant des industries du Paléolithique moyen (L. Wengler, 1990) car ce gisement s'est révélé intéressant pour la connaissance du Moustérien. Cependant, la nécessité d'étendre la surface de fouilles pour traiter Pour le Néolithique, du fait de la diversification des faciès, les problèmes sont différents et doivent plutôt être considérés à une échelle régionale. Malgré les travaux effectués, la connaissance de nombreuses cultures est encore imparfaite, certaines zones ne sont connues que par des fouilles anciennes difficilement interprétables, tandis que pour d'autres tout reste à faire. C'est notamment le cas pour le Maroc oriental en dehors de la zone rifaine. 49 ! Préhistoire en Figure 1. Localisation de la grotte du Rhafas. certains problèmes restés en suspens conduisit à reprendre des fouilles dans cette cavité à partir de 1995. distincts (fig. 2), séparés par des phases d'érosion entamant les dépôts sous-jacents. Les trois plus profonds comprennent dans leur partie inférieure des couches meubles dont certaines peuvent être légèrement consolidées par des carbonates. Leur partie supérieure comprend toujours un horizon carbonaté de sol correspondant à une croûte carbonatée plus ou moins compacte et souvent en position terminale à cause de l'érosion des dépôts sus-jacents. Cette croûte est de plus en plus développée et indurée dans la zone du porche en allant vers l'extérieur. L'ensemble supérieur (1), de couleur grisâtre, se démarque totalement des précédents dont la teinte dominante est beige plus ou moins foncé ou brun. Sa consistance pulvérulente est due aux sables et limons argileux qui le constituent et sont très riches en particules charbonneuses, en cendres et en phytolitaires qui proviennent de la décomposition de fumier. Fortement bioturbé par des petits rongeurs et des grosses larves d'insectes, il résulte en grande partie d'une intense activité humaine et contient également une proportion notable de cailloux souvent corrodés et des plaquettes de gélifraction. LES DONNEES GEOLOGIQUES La grotte du Rhafas s'est développée. dans la dolomie cristallisée du Jurassique (Aaléno-Bajocien) qui forme des bancs horizontaux d'épaisseur pluridécimétrique à métrique. Sa forme actuelle est celle d'une nef d'une quinzaine de mètres de profondeur que le recul du porche et plus généralement de la falaise a largement ouvert vers l'extérieur. La dolomie encaissante, compacte et très peu fissurée, donne cependant, sous l'action des alternances gel-dégel, des plaquettes de desquamation de la paroi et des gélifracts. Son altération est à l'origine d'un sable grossier dolomitique. Ces différents éléments se retrouvent avec des proportions variables dans les couches qui constituent le remplissage de la grotte, témoignant entre autres de l'influence du climat sur sa genèse. Lors des travaux des années 80, le remplissage de la cavité a été reconnu sur 4,5 m d'épaisseur. Il est constitué par 71 couches parfois subdivisées, qui forment 101 niveaux d'inégale puissance répartis en 4 ensembles sédimentaires L'histoire de ce remplissage est complexe. Sa base nous est encore inconnue et de l'ensemble inférieur (IV) seule a pu être étudiée la partie terminale marquée par une croûte très 50 C10 Cg T ca T C7 T C6 C5 o Il III a セlGN[@ '0 aMャhエKイョセ@ .... セ[ZM .•".'. ; .... t .... , .. ,' .. [\oセMZNL@ .';: ....;:..\: :.;.:. ::.:.::,.:).•_[GZセ@ .. , : ··:···;:'·····::·:.·...:\·':··1'·: .:,.•'... , ..... CD .. ' '.' ',' nIb J 1''>·11 _4 0 2 l!Em3 .', '., ,".0: Nセ@ l':ds セV@ Figure 2. Stratigraphie de la grotte du Rhafas. 1 : sable limoneux cendreux. 2 : limon sableux beige. 3 : croûte tuffeuse. 4 : croûte calcaire. 5 : niveau carbonaté plus ou moins induré. 6 : foyer et zone rubéfiée. compacte et polyphasée sus-jacente à des limons indurés. Après une phase d'érosion affectant sa partie supérieure, l'ensemble IlIa s'est peu à peu mis en place de façon rythmique sur près de deux mètres d'épaisseur. Il est constitué par une série de cyclothèmes limono-sableux formés au maximum de 4 termes. Chacun se termine par une phase carbonatée tuffeuse, souvent lenticulaire, liée à l'activité biologique de cyanobactéries dans un sédiment résultant de l'altération de la paroi et d'apports exogènes constitués par le ruissellement et le vent qui transportent notamment des poussières issues du démantellement de sols rouges méditerranéens. Les 28 séquences observées sont souvent réduites à 2 ou trois termes et se succèdent selon un rythme irrégulier. Seule la couche 55 présente une différence notable du fait de la présence d'environ 40 % de cailloux émoussés et de quelques plaquettes de gélifraction. Le léger pendage des différents niveaux vers le fond de la cavité indique que les eaux météoriques pénétraient à l'intérieur de la cavité. Cette sédimentation traduit des alternances de phases plus ou moins humides dans un contexte de climat méditerranéen semi-aride à subhumide. La modification du climat provoque l'interruption de cette rythmicité et un ravinement des couches précédentes dans la partie gauche de la cavité. Après cet épisode, la sédimentation limono-sableuse se poursuit, formant l'ensemble IIIb. Peu à peu des cailloux et des plaquettes de gélifraction issus de la désagrégation de la voûte sont incorporés au sédiment fin. La partie supérieure de cet ensemble évolue en sol carbonaté sous l'action d'un climat plus contrasté et plus aride. Un horizon carbonaté (6bc) lié à l'activité racinaire se met peu à peu en place dans la zone du porche où il constitue une véritable croûte plus ou moins indurée. Un nouvel épisode de ravinement entame la partie supérieure de ce dernier ensemble avant que la sédimentation ne reprenne et forme l'ensemble II épais de 50 à 80 cm. Le sédiment comportera désormais une proportion importante de cailloux avec de nombreuses plaquettes de gélifraction notamment dans la couche 4. Le refroidissement du climat s'accompagne d'une humidité relative suffisamment importante en période hivernale pour provoquer la cryoclastie de la dolomie. Ce n'est qu'après un ravinement de ces niveaux bien marqué dans la zone du porche que se développe le dernier sol encroûté (3 ab) présent dans cette cavité, surmonté des sédiments caillouteux de la couche 2. La sédimentation paraît ensuite s'arrêter pour ne reprendre qu'après une longue interruption à la suite de la fréquentation intense du lieu par l'homme (ensemble 1). C'est durant cette dernière phase que les eaux des précipitations, en pénétrant dans la cavité, s'infiltrent et entraînent localement une partie des sédiments vers des zones plus profondes du karst, provoquant un soutirage karstique. Le dernier épisode de cette histoire, raconté par un berger avant les travaux archéologiques, est l'intervention de chercheurs de trésor venus du Souss qui ont creusé un 51 Mセ@ Préhistoire en trou entamant les ensembles 1 et II. Ils se sont arrêtés dans leur entreprise après la découverte de restes humains néolithiques et ont remanié une partie des dépôts dans la zone centrale de la grotte. L'organisation et la composition des différentes couches, ainsi que la présence d'ossements fossiles, dont il sera question ultérieurement, et d'artefacts appartenant au Moustérien dans de nombreuses couches réparties entre la base de la coupe et la couche 3b comprise, puis d'une industrie de transition en 3a et d'Atérien en 2 font attribuer les ensembles IV à II au Pléistocène supérieur. L'ensemble l, ne comportant qu'un niveau complexe contenant du Néolithique, se rattache à un épisode de l'Holocène. Les données anthracologiques (L. Wengler et lL. Vernet, 1992 ; L. Wengler et al., 1992) et les rares analyses palynologiques qui ont révélé la présence de pollens montrent que cette partie des Monts d'Oujda est restée dans le domaine de la forêt méditerranéenne oscillant à l'intérieur des limites de la niche écologique du thuya (Tetraclinis articulata) avec entre autres la cohabitation avec l'oléastre (Olea europaea), le genévrier (Juniperus sp.) et le chêne vert (Quercus ilex) en fonction des variations climatiques. STRUCTURE ET EVOLUTION DU MOUSTERIEN La séquence de la grotte du Rhafas a permis d'identifier une trentaine de niveaux archéologiques dont certains, reconnus sur une petite surface, sont relativement pauvres en matériel dans la zone fouillée, alors que d'autres, au contraire, ont fourni un matériel abondant et très bien conservé soit dans des couches qui sont le reflet d'occupations multiples, soit dans des sols d'habitat. Les ensembles lithiques recueillis sont formés à plus de 97 % par des éclats de débitage, le reste étant des nucléus et des outils. couches 6ab et 3a et vont s'accentuer à partir de cette dernière. Par contre, durant la phase froide de la couche 4, ce sont principalement les roches à grain grossier qui sont recherchées (L. Wengler, 1993b). Les fluctuations des taux de matières premières dans la séquence de la grotte du Rhafas ne sont pas aléatoires. Elles sont une des réponses de l'homme à l'impact des modifications du climat sur son environnement immédiat et traduisent leur capacité d'adaptation. Celle-ci se manifeste dans ce cas par le besoin d'avoir à leur disposition un outillage lithique efficace, réalisé à partir de produits débités ayant certaines caractéristiques (forme, dimensions). Or pour obtenir ces caractéristiques, il est nécessaire de débiter un bloc de roche qui permettra de les obtenir et donc de choisir la roche en conséquence. Dans la couche 4, où le milieu forestier s'ouvre, une étude morphométrique des artefacts montre que ce sont les modules de grande taille et de faible épaisseur qui étaient recherchés, ce que l'on ne peut obtenir dans la région qu'à partir des quartzites et des tuffites qui affleurent en larges bancs dans les zones de horst où les couches du socle affleurent. Cependant, dans ce site, on observe peu à peu une orientation du choix vers les roches à grain fin qui semble être le résultat de l'accumulation progressive d'expériences se transmettant de générations en générations. Elle permet une évolution culturelle orientée vers le désir d'obtenir une certaine qualité d'objets utilitaires (finesse des tranchants). Les autres roches ne représentent souvent que quelques pour cent du total des matières premières lithiques. Elles ont été transportées dans la cavité et débitées, mais il s'agit souvent d'essais qui visiblement n'ont pas été suffisamment concluants pour que l'on souhaite les renouveler. Ils montrent que les hommes préhistoriques étaient curieux et toujours en quête de nouvelles matières premières. D'un niveau à un autre, il faut remarquer que souvent ces essais sont répétés sur des roches identiques (phtanite, dacite ... ). Ils mettent en évidence la constance de ces comportements de recherche et d'essai à travers le temps (L. Wengler, 1991). Les matières premières lithiques Les hommes qui ont vécu au Rhafas ont débité et façonné en outils une vingtaine de variétés de roches faciles à identifier à partir des artefacts et parfaitement choisies. Elles proviennent des formations géologiques primaires (tuffite, quartzites, schiste vert silicifié, phtanite, dacites, quartz), secondaires (silex, calcédoine) et quaternaires (calcédoine de l'oued el Hay, basanite). La majorité d'entre elles sont présentes dans l'environnement immédiat de la grotte à moins d'une dizaine de kilomètres, d'autres nécessitent un trajet d'une trentaine de kilomètres et n'ont été amenées sur le site que de manière sporadique. Une autre roche présente dans tous les niveaux archéologiques paraît remarquable dans ce site. Il s'agit d'une calcédoine blanchâtre, translucide, dont les gîtes sédimentaires sont situés dans la partie sud-ouest du bassin de l'oued el Hay, dans la zone des steppes à alfa, à environ quatre-vingts kilomètres de la grotte du Rhafas en empruntant les voies de pénétration naturelles. La relative rareté de cette calcédoine dans les différents niveaux archéologiques de la grotte et l'état sous lequel on la trouve (nucléus préparé, éclat Levallois ou outil), indique qu'elle a été transportée sous une forme déjà élaborée. Il s'agit apparemment d'un petit stock de matière première lithique apporté par les moustériens lors d'une migration probablement saisonnière (L. Wengler, 1990 b et cl, comme on en connaît dans les populations de chasseurs-cueilleurs actuelles. Cette roche nous renseigne donc sur le lieu de provenance du groupe avant son installation dans la cavité et sur son caractère nomade, parcourant aussi bien les vastes étendues steppiques que les zones boisées des Monts d'Oujda. Elle témoigne également de la permanence de ce comportement au cours des millénaires que représentent les dépôts de la grotte du Rhafas. Le cortège de roches les plus abondantes dans les différents niveaux archéologiques est constitué par le quartzite vert, la tuffite, le schiste vert silicifié et la calcédoine du Trias. Elles proviennent de gîtes primaires ou secondaires (nappe alluviale, dépôt de pente) nécessitant parfois des trajets de plusieurs kilomètres à partir de la grotte du Rhafas (Fig. 3). Leurs proportions relatives varient selon les niveaux. Le quartzite, la tuffite et la basanite sont plus abondants dans les couches inférieures que le schiste vert silicifié, le silex et la calcédoine, qui sont des roches à grain fin. Ces proportions s'inversent à la fin des phases plus humides et chaudes des 52 L. Wengle et al.: Paléolith},<:jU8 moyen et NéoJ_ithique de ャGoイゥセAエ。@ marocain: La grotte du Rhafas . Fe. • セエ^M@ --. -, . ..... .,, ......... セ@ 0V M... o'"Ch セ@ '. ,, ZセGN@ . ' \\ " ;. r- 1.<.:::, セ@ Figure 3. Gîtes de matières premières lithiques exploitées par les hommes du Paléolithique moyen à partir de la grotte du Rhafas (les traits sont proportionnels à la quantité de roche retrouvée). L'ensemble des matières premières utilisées par les moustériens, puis par les atériens permet de préciser le territoire parcouru par les hommes ayant séjourné dans la grotte du Rhafas. Il s'étend sur une centaine de kilomètres du nord au sud et ne paraît pas atteindre la chaîne de montagne des Béni Snassen au Nord, qui sépare les plaines d'Oujda de la zone littorale méditerranéenne. Il semble que dans cette région, on soit en présence de populations tournées vers l'intérieur du continent plutôt que vers la zone côtière. Le débitage La production d'éclats dont la longueur varie entre quelques millimètres et douze centimètres est une constante de ces industries et apparaît dès le premier 53 セイ←ィゥウエZN・@ en Afrique / African Prehistory - - - - ---------------- comportements très variés lors du débitage des roches et de l'emploi des produits qui en résultent. examen, de même que la présence d'éclats Levallois. La présence de nucléus, même s'ils sont relativement peu nombreux, et pour la plus grande majorité des roches débitées, des artefacts représentatifs des différentes phases du débitage montre que cêlui-ci a -été pratiqué sur le site et que mise à part le cas de la calcédoine de l'oued el Hay uniquement dans certains niveaux, la matière première était apportée dans la grotte sous forme de blocs peu ou pas préparés. Variations typologiques Les niveaux inférieurs ne sont que partiellement connus et contiennent une industrie sur éclat qui s'intègre parfaitement dans le Moustérien. La couche 69 est la plus ancienne à avoir livré du matériel archéologique. Parmi celui-ci se trouvait un petit biface subtriangulaire associé à des éclats Levallois ou non et à des outils comprenant divers types de racloirs, quelques rares grattoirs, coches et denticulés. Ces derniers donnent à cette série un cachet typiquement moustérien que la présence d'un biface ne contredit pas. Il témoigne seulement de la survivance d'une tradition acheuléenne et ne paraît pas suffisant en l'état actuel des connaissances pour attribuer ce niveau à l'Acheuléen. Il montre, cependant, qu'une filiation est très probable entre l'Acheuléen régional connu dans le bassin de l'oued el Hay (L. Wengler, 1993) et les Béni Snassen (J. Collina-Girard, 1992). Si on considère à part les quelques tests de roche et les blocs de matières premières difficilement utilisables qui ont donné des éclats et des nucléus aux formes mal définies, on constate que le débitage se faisait suivant le mode Levallois récurrent. Toutefois, dans les niveaux moustériens les plus récents, d'autres schémas opératoires étaient connus, mais moins utilisés. Ils permettaient la production d'éclats de taille modeste et ont abouti à l'abandon de rares nucléus prismatiques, globuleux ou à débitage croisé. L'exploitation des nucléus Levallois se faisait selon plusieurs méthodes. Dans la majorité des cas, le nucléus était exploité sur l'ensemble de son pourtour avec des axes de percussion dirigés vers le centre de la surface de débitage. Selon cette méthode, il était possible à un moment soit d'obtenir un éclat Levallois préférentiel, puis de réaménager la convexité de la surface de débitage pour continuer dans cette voie, soit de continuer l'exploitation du nucléus à partir de la périphérie par une succession d'enlèvements où chacun prépare les suivants tout en conservant la convexité de la surface de débitage. Ces deux schémas d'exploitation ont très probablement été employés successivement selon les désirs du tailleur et les contraintes propres au bloc de matière première. Les nucléus retrouvés ont des dimensions qui varient entre 9 et 2,6 cm et correspondent assez souvent à l'exploitation d'un gros éclat épais. On rencontre également sur des éclats Levallois des traces de préparation bipolaire ; cependant, celle-ci semble peu employée, de même que le débitage nubien. Le Moustérien de la grotte du Rhafas (fig. 4) contient une très forte proportion de racloirs extrêmement diversifiés (47 à 80 %). Les pointes Levallois et moustériennes ne sont jamais très nombreuses, ainsi que les autres outils, y compris les denticulés, sauf dans le niveau 4ab ; seules les coches sont un peu plus abondantes (3 à 13 %). La structure de ce Moustérien est tout à fait comparable à celle d'un Moustérien de type Ferrassie (A. Tuffreau, 1984) pour tous les niveaux archéologiques de l'ensemble III. Dans l'ensemble II, dès la couche 5, les proportions de coches et de denticulés augmentent légèrement tandis que celle des racloirs convergents diminue, ce qui contribue à modifier l'équilibre de l'outillage vers un Moustérien typique riche en racloirs. Vers la fin de cette période, à la base de la couche 3, une nouvelle modification touche le groupe des racloirs où les racloirs convergents et en particulier des racloirs déjetés augmentent. Cette modification annonce le passage à l'Atérien. Dans l'ensemble les variations des proportions des types d'outils sont minimes et calquées sur l'évolution du milieu. Elles semblent traduire les besoins d'un groupe qui s'adapte aux modifications peu importantes qui touchent l'environnement, puisque l'on reste dans le domaine des forêts thermoméditerranéennes. Ces ensembles lithiques soulignent la continuité des traditions techno-typologiques et la perennité de l'occupation de la région durant la fin du Tensiftien et la première partie du Soltanien. Les types d'outils sont identiques à ceux connus dims d'autres régions et réalisés préférentiellement sur des supports Levallois, seules quelques particularités soulignent l'originalité de cette industrie. Dans presque tous les niveaux, on remarque la présence de petits racloirs triples à retouche écailleuse semi-abrupte passant à la retouche scalariforme. Dès le sommet de la couche 6, apparaissent quelques pièces esquillées typiques. Parmi les pièces exceptionnelles, signalons un hachereau dans le niveau 6d, une pièce foliacée bifaciale en 3b et surtout la présence de deux pièces pédonculées (couche 55 et 6d) qui permettent de faire un parallèle avec celles trouvées dans le gisement d'El Guettar en Tunisie (M. Gruet, 1952, 1954, 1955), également Les éclats obtenus sont rarement laminaires (entre 3 et 6 %), mais les moustériens savaient obtenir des lames notamment dans les derniers stades du Rhafas. Suivant les niveaux, on observe que le module des produits débités change. Les plus grands sont obtenus durant la phase froide et humide de la couche 4, tandis que les tailles les plus modestes sont mieux représentées dans les niveaux encroûtés de fin de période humide, comme d'ailleurs les produits Levallois dont les indices oscillent entre 20 et 38. L'étude des produits débités et notamment des éclats Levallois en fonction des types de roche montre que le taux moyen de productivité de ces éclats varie autour de 30 %. L'augmentation de ce taux pour des roches comme la tuffite ou le quartzite vert dans certains niveaux indique des importations de produits Levallois dans la zone fouillée. A l'inverse, la baisse très nette de ce taux pour des roches de bonne qualité, laisse présager des exportations, c'est-à-dire une utilisation de ces produits hors de la zone fouillée. On assiste donc dans la grotte du Rhafas à des 54 L Wengle et al..' ---------------_.- Paléolithique moyen ・エn←ッャゥィアセQX@ de 1'Ç>rientalmarocain : La grotte du Rhafas Figure 4. Outillage du niveau 3b moustérien final de la grotte du Rhafas. 1 : racloir simple convexe sur éclat cortical; 2 : racloir convergent concave; 3 : racloir double biconvexe sur éclat Levallois; 4, 5 : racloirs simples convexes sur éclat Levallois; 6 : racloir simple convexe sur éclat de préparation; 7 : raclette sur éclat cortical; 8 : fragment proximal de racloir double convexe-concave sur éclat Levallois à retouches scalariformes sur le bord droit; 9 : couteau à dos naturel; 10 : burin; 11 : coche clactonienne sur éclat cortical; 12 : pièce esquillée ; 13 : fragment de pièce foliacée bifaciale ; 14 : rabot. Les n 0 3 et 14 sont en quartzite vert, les n 0 10 et 11 en calcédoine de l'Oued El Hay, le n 0 13 en silex beige et les autres en schiste vert silicifié. 55 Préhistoire en Rhafas niveau 3b Rhafas niveau 3a Out'I, 1ur ,.lets et btfachu.. ーセッBオャ@ •• (b) et Rhafas couche 2 P01 "tes LN・エッオ」セGs@ R.c1otrs. "lIple'S .t doubles coセL@ Outth Pal. '\III. tr"ns..-erU!ux Figure 5. Diagramme circulaire comparatif des niveaux 3b (Moustérien), 3a (Proto-Atérien) et 2 (Atérien) de la grotte du Rhafas. pédonculées augmentent (4,5 %). Leur taux atteindra 12,2 % dans la couche 2 qui, compte tenu de cette fréquence, est attribuée à l'Atérien, tandis que le niveau 3a est qualifié de Proto-Atérien (L. Wengler, 1997). Dans la couche 2 (fig. 6), si l'on ne tient pas compte de la présence d'un pédoncule sur certains outils, on constate que la structure de l'industrie est quasiment identique à celle des niveaux 3b et 3a. On assiste dans cette petite séquence au succès et à la diffusion d'une technique de façonnage destinée à faciliter l'emmanchement des pièces, mais on ne constate pas de changement marquant sur le plan typologique ni technologique. Ces critères ne marquent donc pas un véritable changement culturel, mais seulement les prémices de celui-ci qui se fera un peu plus tardivement avec une modification du débitage, de l'équilibre de l'outillage, l'apparition d'une industrie sur os et des premiers objets d'art. Néanmoins, l'apparition et la diffusion des pièces pédonculées sont de bons indicateurs pour marquer l'amorce de ce changement qui se fait de façon très progressive à partir d'un substrat moustérien. en plein contexte moustérien. Le façonnage d'un pédoncule sur certaines pièces n'est donc pas une invention atérienne, et la présence d'une pièce pédonculée n'est pas suffisante pour qualifier un ensemble lithique d'Atérien. LA TRANSITION MOUSTERIEN-ATERIEN Dans la partie supérieure de la séquence sédimentaire, au niveau de la couche 2-3, s'opère un changement perceptible lors de la fouille qui se traduit par la présence de pièces pédonculées parmi les artefacts. Ces pièces ont tellement frappé les premiers préhistoriens d'Afrique du Nord qu'ils en ont fait les outils caractéristiques d'une culture, l'Atérien, du nom du site aujourd'hui disparu de Bir el Ater en Algérie. Sur le plan géo-pédologique, la couche 3 est complexe et présente plusieurs faciès liés à une pédogénèse qui est sensiblement contemporaine de la mise en place du sédiment. Elle correspond à un calcarisol développé un limon moyen caillouteux. Ce sol est absent vers le fond de la grotte, où le sédiment originel constituant la partie inférieure de la couche est visible (couche 3). Le sol calcaire est de plus en plus différencié vers l'extérieur dans la zone du porche, où la sédimentation s'est poursuivie, permettant de distinguer un niveau inférieur encroûté et très carbonaté (faciès 3b et 3') d'un niveau supérieur moins carbonaté (3a) dans lequel se sont développées des croûtes zonaires. L'ensemble se termine par la couche 2, carbonatée, mais non indurée. Depuis 1996, une quarantaine de fragments d'artefacts provenant des niveaux moustériens et proto-atérien de la grotte de Rhafas ont été sélectionnés lors des fouilles en vue de leur datation par la thermoluminescence. Bien que tous aient présenté des altérations de surface (craquelures, noircissement ou rubéfaction) pouvant être attribuées à une chauffe à haute température, une étude préliminaire a montré que pour un certain nombre sur d'entre eux la température atteinte a été insuffisante pour remettre à zéro leur signal de thermoluminescence géologique. Parallèlement, une étude dosimétrique de la radioactivité naturelle du gisement a été réalisée et a conduit à éliminer une douzaine d'artefacts se trouvant dans des zones de la fouille qui semblaient peu favorables. Parmi les 8 pièces Lors de la fouille du niveau 3b, un moustérien très riche en racloirs, de type Ferrassie, a été recueilli. Il contenait un fragment d'éclat cortical pédonculé (0,3 %). Dans le niveau 3a, l'industrie ne change pas réellement (fig. 5), mais proportionnellement au niveau précédent les pièces 56 L. Wengle et al..' Paléolithique moyen et Néolithique de l'Oriental marocain : La grotte du Rhafas -----------_ .._ - - - - - _ _----_.. _-_. _.. .......•• 1 o セU[。⦅、@ 2 3 4cm 9 c-=i 13 Fig. 6. Outillage de la couche 2 atérienne de la grotte du Rhafas. 1 : racloir simple convexe sur éclat Levallois; 2 : racloir simple convexe sur éclat d'entame; 3, 9 : racloirs doubles biconvexes sur éclat Levallois, le n03 porte une cupule thermique; 4 : grattoir sur éclat cortical; 5 : pointe moustérienne sur éclat Levallois; 6 : grattoir sur éclat retouché; 7 : pointe Levallois retouchée, pédonculée; 8 : racloir convergent biconvexe pédonculé; 10 : racloir convergent biconvexe sur éclat Levallois à retouche partiellement biface; 11 : racloir convexe sur face plane d'un éclat Levallois pédonculé; 12 : pointe ogivale courte pédonculée; 13 : racloir simple convexe sur éclat Levallois pédonculé. Le n01 est en tuffite, le n02 en silex, le n03 en calcédoine du Trias, le n012 en quartzite vert et les autres en schiste vert silicifié. 57 Préhistoire en restantes, 3 provenant de la base de la couche 3 moustérienne, vers le fond de la cavité, ont donné les âges suivants: 61700 ± 5100 ans; 78800 ± 7000 ans; 60300 ± 7500 ans Les autres pièces prélevées dans la zone du porche concernent le niveau 3b moustérien: 126900 ± 9300 ans; 63200 ± 7000 ans; 68100 ± 7900 ans et le niveau 3a proto-atérien : 80300 ± 6600 ans; 78200 ± 6300 ans Mis à part l'âge de 126, 9 kans qui s'écarte significativement de l'ensemble des résultats et qui reste inexpliqué, les âges se répartissent entre 80,3 ± 6,6 et 60,3 ± 7,5 kans avec une distribution qui ne permet pas séparer chronologiquement les niveaux 3a et 3b. Ces résultats suggèrent que la couche 3 correspondant à la fin du Moustérien et au passage Moustérien-Atérien s'est mise en place pendant les stades isotopiques 5a et 4 durant une période où le climat, plus contrasté qu'actuellement, a favorisé la formation d'un sol encroûté. portent parfois une cupule centrale, et des fragments de meule mobilière. Les haches sont en quartzite vert, leur corps est bouchardé et seul le tranchant est poli. Une, de grande taille, est à l'état d'ébauche dans un bloc de quartzite en cours de façonnement. L'essentiel du matériel est taillé, il s'agit principalement d'éclats, de lamelles et de quelques lames. Les outils sont principalement des lamelles à bord abattu, des pièces à coches et des denticulés. La panoplie est complétée par quelques grattoirs, racloirs, perçoirs, pièces esquillées ou à retouche continue. La technique du micro burin était employée, mais les microlithes géométriques, qui sont surtout des segments, sont peu représentés. Aucune armature de pointe de flèche n'a été trouvée. Quelques outils en os ont été recueillis, il s'agit de poinçons et de lissoirs. L'approvisionnement en matière première est très proche de celui connu à l'Atérien avec une dominance des roches à grain fin et la présence d'un petit stock de calcédoine de l'oued el Hay. La céramique rencontrée dans cette couche est toujours réalisée à partir d'une terre franche enrichie en sable grossier quartzeux. Le montage des vases est réalisé au colombin, les surfaces sont plus ou moins bien lissées et parfois recouverte d'un engobe, elles ne portent jamais de trace de peinture (L. Wengler et al., 1989). Les vases sont assez mal cuits en cuisson réductrice avec des coups de flamme. Les formes sont globulaires ou étirées avec des fonds ronds ou coniques. Les bords parfois décorés sont dans certains cas renforcés, les éléments de préhension sont rares et limités à des boutons hémisphériques, des mamelons et des oreilles. La décoration est réalisée par impression au peigne cranté ou à l'aide de poinçons ; les cordons avec des impressions paraissent rares. Le registre des motifs est varié. Il comporte comme élément de base des faisceaux de cannelures, des chevrons, des croisillons, des lignes brisées, des lignes de poinçonnage... qui peuvent être assemblés sur la partie supérieure de la panse des vases pour former des motifs composés. LE NÉOLITHIQUE Les dépôts cendreux holocènes qui constituent la couche 1 sont des limons moyens sableux contenant en moyenne 30 % de cailloux parfois émoussés et corrodés. Cette couche, dont l'épaisseur varie de 20 à 50 cm, a livré deux foyers en cuvette à fond non empierré bien conservés ainsi que la sépulture d'un enfant nouveau-né ou âgé de moins de 6 mois. Il a été placé dans une petite fosse dont les bordures et le fond ont pu être mis en évidence grâce à un tassement différentiel des sédiments. La fosse, profonde d'une vingtaine de centimètres, a été creusée dans la partie inférieure de la couche néolithique et dans la partie terminale de la couche 2 ; elle était remplie de terre grisâtre provenant du niveau néolithique. L'enfant y reposait en décubitus dorsal. Le crâne a basculé sur le sternum et une partie des os de sa base n'ont pas été retrouvés. La calotte crânienne, qui semble avoir été déplacée, reposait probablement en position secondaire par rapport au reste du squelette lors de sa découverte. Cette couche contient des structures parfaitement conservées, mais il n'est pas possible d'y suivre des niveaux d'occupation. La fréquentation de la cavité, notamment par des grands animaux, durant cette période a entraîné des remaniements superficiels et périodiques des dépôts. Ces remaniements ont été accentués par les larves fouisseuses de certains insectes, ainsi que par les petits rongeurs, dont des souris, qui ont élu domicile dans les sédiments et dont on trouve la trace des terriers. Les éléments de parure sont également très rares, seules quelques rondelles d'enfilage en œuf d'autruche ont été trouvées ainsi que 3 pendeloques réalisées à partir de coquillages marins qui indiquent, soit des échanges, soit la fréquentation de la côte méditerranéenne distante d'une quarantaine de kilomètres, mais qui nécessite la traversée des plaines d'Oujda et la barrière des Béni Snassen. Ces pendeloques sont 2 lamelles allongées et perforées, découpés dans des coquilles de Glycimeris nummaria, et une coquille perforée et remplie d'ocre de Semicassis saburnum. L'ocre était par contre fréquemment employée. On le trouve à l'état de trace sur de nombreux outils et éclats, sur l'ébauche de hache polie et également sous forme de fragments de goethite et d'un gros sphéroïde d'hématite, matières qui par broyage fournissent des ocres. L'ensemble de ce matériel s'apparente à celui connu dans d'autres régions du Maghreb (c. Goetz, 1942 ; G. Aumassip, 1971 ; G. Camps, 1974). Il caractérise un Néolithique moyen tellien. Une datation par le radiocarbone sur charbon de bois a d'ailleurs donné un âge de 5190 ± 100 ans B.P. Le fait que la poterie ne soit pas très abondante, de même que le matériel de broyage et que l'on Le matériel archéologique est relativement disséminé et comporte principalement des artefacts lithiques. Les objets en pierre polie sont des haches en boudin dont les dimensions varient entre 9 et 19 cm, des molettes, qui 58 ----_._--_ - .._. L .. Wengle et-- al..' Paléolithique ._moyen et Néolithique de l'Oriental ._._._--_ marocain: La grotte du ..セ。ヲウ@r _..- - .. ..._.. ⦅Mセ@ Remerciements n'ait aucune trace de céréales, laisse penser que cette cavité, en grande partie remplie de sédiments et donc de taille modeste, a surtout servi de bergerie, d'autant que l'étude des poussières anthropiques permet de reconnaître un faciès de combustion dé végétaùx ligneux et un faciès lié à la pratique de l'élevage avec probablement un cheptel ou une technique d'élevage qui évolue durant le laps de temps enregistré par les sédiments. Les pasteurs vivant dans cet abri pratiquaient également la chasse aux petits mammifères (lapin [Oryetolagus eunieulus], lièvre [Lepus eapensis], porc-épie [Hystrix eristata]), ainsi qu'au sanglier (Sus serofa) et peut-être au cheval. Ils mangeaient aussi des ovicaprinés constituant leur cheptel. Nous tenons à remercier l'Institut des Sciences de l'Archéologie et du Patrimoine, la Direction du Patrimoine à Rabat et le Ministère de la Culture marocain, ainsi que le Ministère des Affaires étrangères français, Division des Sciences Sociales et de l'Archéologie pour les autorisations accordées et leur soutien financier. Adresses des auteurs Luc WENGLER, Brigitte WENGLER Université de Perpignan 52, avenue de Villeneuve 66860 Perpignan cedex, FRANCE et Laboratoire de Préhistoire UMR 5590 CNRS *** La grotte du Rhafas s'avère intéressante, car on peut y suivre l'évolution du Moustérien sur une période de temps relativement longue, ce que l'on n'avait pu faire jusqu'à présent faute de site adéquat. Elle se fait dans un contexte culturel qui paraît stable et permet des adaptations en fonction des variations du milieu. La conséquence est une évolution continue avec des fluctuations minimes de la culture matérielle. Au travers des ensembles de pièces étudiés, on a mis en évidence certains comportements des moustériens face aux ressources offertes par l'environnement immédiat de la cavité. A cet égard, leur gestion des matières premières lithiques est riche en enseignements sur le mode de vie et sur le territoire que parcouraient ces populations de chasseurs-cueilleurs qui utilisaient la grotte du Rhafas comme lieu de séjour occasionnel, probablement d'assez courte durée. Mohamed EL AZZOUZI, Wahid KRARSSI, Ahmed MERGAA, Latifa MOFTAQIR, Abderrahim MOHIB, Mustapha NAMI Ministère des Affaires culturelles Délégations régionales d'Oujda, Rabat et Marrakech, MAROC Abdeljalil BOUZOUGGAR, Rochdi BERNOUSSI INSAP Avenue John Kennedy Casier Postal Rabat Souissi Rabat, MAROC Jacques E. BROCHIER LPHP Université de Provence centre St Charles 13331 Marseille cedex 3 FRANCE Le sommet des couches pléistocènes de la cavité présente un autre intérêt. Il montre la parfaite continuité temporelle et culturelle entre le Moustérien et l'Atérien dans un contexte paléoenvironnemental particulier qui est celui du début d'une phase climatique plus sèche et contrastée. Cette évolution de la culture matérielle commence seulement par une invention technologique, le façonnage d'un pédoncule à la base d'artefacts, qui, en apportant une solution à un besoin du moment, va être diffusée et s'intègrera dans les modifications progressives qui conduiront ultérieurement à un véritable changement culturel. Georgette DELIBRIAS, Norbert MERCIER, Jean-Louis REYSS, Hélène V ALLADAS LSCE Unité mixte de recherche CEA-CNRS 91198 Gif-sur-Yvette cedex FRANCE Jean-Louis VERNET UPRESA 5059 CNRS Institut de Botanique 34000 Montpellier cedex 5 FRANCE Le matériel beaucoup plus récent de la couche 1 permet d'aborder un autre domaine de l'archéologie préhistorique du Maroc oriental que l'on ne connaissait pas : celui d'un monde pastoral qui vivait durant le 4 e millénaire. Les vestiges laissés dans la cavité par les hommes de cette période montrent qu'ils appartiennent à un vaste ensemble culturel qui occupe la zone tellienne et dont les limites géographiques sont encore difficiles à préciser avec certitude. Les renseignements obtenus sur le mode de vie sont encore très fragmentaires. A cette période, la grotte était occupée par un petit nombre de personnes qui possédaient un troupeau d'ovicaprinés. On ne sait pas s'ils y séjournaient de manière continue, mais ils taillaient des roches, en polissaient certaines, utilisaient de la poterie et pratiquaient la chasse dans un paysage sensiblement identique à l'actuel, au milieu d'une forêt de thuyas et d'oliviers sauvages mêlés de lentisques. Bibliographie AUMASSIP, G., 1971, La poterie préhistorique d'Oranie d'après les documents déposés au Musée Demaeght à Oran. Lybica, 19, p. 137-162. BALOUT, L., 1967, l'Homme préhistorique et la Méditerranée occidentale. Revue de l'Occident musulman et de la Méditerranée, 3, p. 9-29. CAMPS, G., 1974, Les civilisations préhistoriques de l'Afrique du Nord et du Sahara. Edit. Doin, Paris. COLLINA-GIRARD, l, 1992, Le Paléolithique de surface de la plaine des Triffas (Berkane, Maroc nord-oriental). L'Anthropologie, 96, p. 657-688. GRUET, M., 1952, AmonceIIement pyramidal de sphères calcaires dans une source fossile moustérienne à El-Guettar 59 Préhistoire en (Sud Tunisien). 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