La synthèse, intitulée "Décrire les langues pour comprendre le Langage", que je présente dans le cadre du diplôme national d'habilitation à diriger des recherches, vise à faire le point sur ma production scientifique actuelle et sur mes...
moreLa synthèse, intitulée "Décrire les langues pour comprendre le Langage", que je présente dans le cadre du diplôme national d'habilitation à diriger des recherches, vise à faire le point sur ma production scientifique actuelle et sur mes projets futurs.
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Dans une première partie introductive, j'évoque brièvement mon parcours de linguiste, qui compte pour le moment trois étapes fondamentales :
- 1. l'étude de l'occitan (commencée à partir du dialecte que l'on parlait dans ma propre famille) puis d'autres langues romanes ;
- 2. la description d'une langue créole, le capverdien (avec laquelle je suis entré en contact dans le cadre de mon Service National) ;
- 3. l'ouverture, lors de mon entrée au C.N.R.S. en 1999, d'un nouveau champ de recherche sur les langues kordofaniennes (parlées au centre de la République du Soudan), dont fait partie le koalib, idiome auquel j'ai consacré environ 12 mois de terrain depuis l'an 2.000.
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Dans une deuxième partie, intitulée la description ou le défi de rendre compte de l'altérité, je passe en revue les principales caractéristiques de mon approche (essentiellement descriptive) du Langage, en commençant par évoquer dans un premier chapitre la façon dont je recueille des données sur le terrain auprès de mes informateurs. J'analyse ensuite (second chapitre) les descriptions que j'ai publiées des idiomes que j'ai étudiés : ces travaux témoignent dans leur ensemble d'une recherche de l'exhaustivité dans le traitement de l'objet considéré et d'un intérêt marqué pour la lexicographie, illustré en particulier par mes deux dictionnaires les plus récents, le Dicionário Prático Português-Caboverdiano, "Dictionnaire pratique portugais-capverdien" (Mendes & al. 2002) et mon Dictionnaire koalib-français (en cours de préparation). Je consacre ensuite un chapitre à la prise en compte de la diachronie, un autre thème récurrent dans mon approche, puis, dans un dernier chapitre, je m'attache à montrer, à l'aide d'exemples tirés de mes divers champs d'étude, l'importance du travail de terrain pour arriver à prendre conscience de certains phénomènes linguistiques.
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La troisième partie, intitulée la relativisation de l'approche, traite des évolutions méthodologiques qui ont accompagné mon cheminement scientifique. Parmi ces évolutions, je mentionne tout d'abord la prise en compte des textes, qui m'a ouvert à la syntaxe. Je mets ensuite l'accent sur la remise en cause de plusieurs concepts de base (langue, dialecte, catégories grammaticales), au fur et à mesure de mes enquêtes de terrain ou de mes études (découverte de la tradition grammaticale arabe). Puis je m'intéresse à la façon dont ont évolué les interférences entre visées descriptives et prescriptives dans mes productions, avant de conclure sur la question du difficile équilibre entre le travail de terrain et un nécessaire entretien des connaissances théoriques du linguiste descripteur.
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La partie suivante, intitulée la diffusion du savoir, traite de l'ensemble de mes activités visant à la transmission des connaissances. Dans un premier chapitre, j'évoque mes expériences d'enseignement (cursus réguliers, cours facultatifs et conférences ponctuelles). Puis, après avoir souligné de façon générale l'intérêt et la valeur scientifiques des ouvrages de vulgarisation, je passe en revue mes principales publications dans ce domaine : articles et synthèses présentant mes recherches à un public de chercheurs, méthodes de langue, traductions et ouvrages lexicaux bilingues. Dans le dernier chapitre de cette partie, j'ai inclus une réflexion sur les relations du linguiste avec les médias, relations qui me semblent cruciales pour l'avenir de la discipline dans les sociétés occidentales contemporaines.
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Dans une cinquième partie, intitulée perspectives, je parle de mes principaux projets de publications et de recherches, en particulier dans le domaine kordofanien (poursuite de la description du koalib, étude d'autres langues heibaniennes) et dans celui des créoles afro-portugais (divers projets pour le capverdien, description de l'annobonais et du saint-antonien). Je mentionne également la vision que j'ai du futur en ce qui concerne mes activités d'encadrement de la recherche (direction de thèses, retour des connaissances acquises vers les communautés linguistiques concernées) et les projets collectifs (opération de recherche, colloques) que j'aimerais voir aboutir.
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En conclusion, je mets l'accent sur l'importance donnée au travail de terrain dans mon approche des langues et du Langage ainsi que sur la nécessité de prendre son temps pour produire des descriptions valables. Je rappelle en dernier lieu que l'étude rigoureuse des langue de communautés minorisées (et souvent brimées) peut aussi être une façon de souligner l'égale dignité des divers groupes humains (grands ou petits) en ce qui concerne le génie du Langage.