De Tertullien à Augustin, vers une définition de l’irrémissible Tertullien, s’appuie sur l’impossibilité de l’intercession fraternelle quand il y a « péché qui conduit à la mort » (1 Jn 5, 16) pour définir les péchés « irrémissibles »,...
moreDe Tertullien à Augustin, vers une définition de l’irrémissible
Tertullien, s’appuie sur l’impossibilité de l’intercession fraternelle quand il y a « péché qui conduit à la mort » (1 Jn 5, 16) pour définir les péchés « irrémissibles », que la grande Eglise ne peut remettre. Laissant ouverte la question de leur pardon ultime par Dieu, il n’évoque qu’à la marge l’irrémissibilité absolue présentée dans le logion du blasphème contre l’Esprit (Mt 12, 31-32). Il faut attendre Augustin pour retrouver l’adjectif forgé par Tertullien au cœur d’une réflexion – qui culminera dans le Sermon 71, mais dont on peut suivre l’évolution dès 394 –, associant les deux passages scripturaires déjà convoqués par le Carthaginois : posant quant à lui, dans le souci de préserver l’unité de l’Eglise animée par l’Esprit, l’équivalence totale entre le pardon qu’elle accorde par l’intermédiaire de ses ministres et le pardon de Dieu, Augustin renonce à toute définition de l’irrémissible selon des critères externes : ce n’est plus l’Église qui refuse son pardon, mais le pécheur qui se met volontairement dans l’incapacité de le recevoir, par sa persévérance intérieure dans l’endurcissement de l’impénitence. On notera entre les exégèses des deux auteurs de nettes similitudes méthodologiques, et, chez l’un comme chez l’autre, la prégnance des enjeux ecclésiologiques, qui conditionnent la sotériologie.
From Tertullian to Augustine, towards a definition of unforgiveness
Tertullian’s definition of the unforgivable sins, – which cannot be forgiven by the Great Church –, is based on the impossibility of fraternal intercession in case a "sin leading to death" has been committed (1 Jn 5, 16): the question whether God ultimately forgives has been left open, Tertullian recalls just by the by the unforgivable sin mentioned in the logion of the blasphemy against the Spirit (Mt 12: 31-32). It is not until Augustine that the adjective created by Tertullian appears again, at the very heart of a reflection combining both scriptural passages already quoted by the Carthaginian, which culminates in the Sermon 71 but finds its origin in 394. In order to preserve the unity of the Church animated by the Spirit, Augustin makes a total equivalence between forgiveness the Church grants through its ministers and God’s forgiveness. He gives up by the way the external definition criteria: not the Church denies forgiveness, but the sinner makes himself deliberately unable to receive it because of his hardness and impenitent heart. Methodological similarities between our two authors’ exegesis should be noted, as well as the significant influence of the ecclesiological issues on their soteriology.