Manuscrit disponible sur HAL :
https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-03221006
Les lampes minoennes sont les seules sources de lumière artificielle à ne pas avoir été étudiées comme telles mais plutôt comme marqueurs chronologiques et régionaux. Ce travail de recherche propose une analyse fonctionnelle de ces objets, depuis la mèche jusqu’à la lumière produite et enquête, par ce prisme, sur le rythme des activités et l’espace vécu des Minoens.
À cet effet, une approche interdisciplinaire a été mise en œuvre. Une analyse morpho-techno-fonctionnelle a été appliquée à 567 lampes et objets ayant pu avoir un lien avec l’éclairage. Ce corpus est issu de sept sites dont la séquence chronologique couvre l’ensemble de l’âge du Bronze ; il autorise une analyse diachronique des techniques d’éclairage dans l’habitat.
Le fonctionnement des lampes a été étudié dans le cadre d’un programme expérimental. Fondé sur la reconstitution du répertoire des formes, des combustibles et des mèches disponibles dans l’environnement des Minoens, il a jeté un éclairage nouveau sur les aspects techniques de leur utilisation (transport, durée de combustion, fumées, odeurs, lumière).
Dans ce cadre, un référentiel de dépôts de suie a été élaboré. La forme et la texture de ces dépôts varient selon la nature des combustibles utilisés. Des enregistrements photométriques expérimentaux ont, par ailleurs, montré que les ambiances lumineuses diffèrent en fonction des combustibles utilisés. Le référentiel a donc non seulement permis d’identifier les combustibles des lampes minoennes (huiles végétales, graisses animales, cire d’abeille) mais aussi la couleur et l’intensité de leurs flammes, à partir desquels de premiers modèles en trois dimensions ont été réalisés.
Une analyse spatiale des lampes dans leur contexte archéologique a, enfin, contribué à préciser le rôle de la lumière dans le rythme et la localisation des activités quotidiennes en s’appuyant, par moments, sur des analogies ethnographiques. C’est l’image d’une société préindustrielle qu’il faut avoir en tête : la journée de travail commence à l’aube et se termine au crépuscule. Son rythme et son intensité varient en fonction des saisons, de la météo et de l’altitude. Les lampes éclairaient, le soir venu, et parfois en journée, des activités collectives et individuelles, à l’extérieur ou à l’intérieur. Mais leurs flammes ne permettaient pas de voir à plus d’un mètre, ce qui suggère que l’on se déplaçait régulièrement dans le noir.